LA BANQUE MONDIALE République Démocra�que du Congo Mémorandum Économique Pays Voies d’accès à la diversifica�on économique et l’intégra�on commerciale régionale Favoriser la diversification économique et l'intégration régionale pour accélérer la croissance, la création d'emplois et la réduction de la pauvreté République Démocratique du Congo Mémorandum Économique Pays Voies d’accès à la diversification économique et l’intégration commerciale régionale Favoriser la diversification économique et l'intégration régionale pour accélérer la croissance, la création d'emplois et la réduction de la pauvreté Septembre 2023 © 2023 Banque mondiale 1818 H Street NW, Washington, DC 20433 Téléphone : 202-473-1000 ; Internet : www. worldbank.org Certains droits réservés 1 2 3 4 23 22 21 20 Ce travail est un produit du personnel de la Banque mondiale avec des contributions externes. Les résultats, interprétations et conclusions exprimés dans ce document ne reflètent pas nécessairement les opinions de la Banque mondiale, de son Conseil d'administration ou des gouvernements qu'ils représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l'exactitude des données incluses dans ce travail. Les frontières, les couleurs, les dénominations et les autres Les frontières, couleurs, dénominations et autres informations figurant sur les cartes de cet ouvrage n'impliquent aucun jugement de la part de la Banque mondiale quant au statut juridique d'un territoire, ni l'approbation ou l'acceptation de ces frontières. Rien dans le présent document ne constitue ou ne peut être considéré comme une limitation ou une renonciation aux privilèges et immunités de la Banque mondiale, privilèges et immunités de la Banque mondiale, qui sont tous spécifiquement réservés. Droits et autorisations Attribution - Banque mondiale. 2023. Mémorandum économique-pays pour la République Démocratique du Congo. Voies d’accès à la diversification économique et l’intégration commerciale régionale. Washington, DC : Banque mondiale. Traductions - Cette traduction n'a pas été créée par la Banque mondiale et ne doit pas être considérée comme une traduction officielle de la Banque mondiale. La Banque mondiale n'est pas responsable du contenu ou des erreurs de cette traduction. Adaptations - Il s'agit d'une adaptation d'une œuvre originale de la Banque mondiale. Les points de vue et opinions exprimés dans l'adaptation relèvent de la seule responsabilité de l'auteur ou des auteurs de l'adaptation et ne sont pas approuvés par la Banque mondiale. Contenu de tiers - La Banque mondiale n'est pas nécessairement propriétaire de chaque élément du contenu de l'ouvrage. Elle ne garantit donc pas que l'utilisation d'un élément ou d'une partie de l'œuvre appartenant à un tiers n'enfreindra pas les droits de ce tiers. Le risque de réclamations résultant d'une telle violation vous incombe exclusivement. Si vous souhaitez réutiliser un élément de l'œuvre, il vous incombe de déterminer si une autorisation est nécessaire pour cette réutilisation et d'obtenir l'autorisation du détenteur des droits d'auteur. Les exemples de composants peuvent inclure, sans s'y limiter, des tableaux, des figures ou des images. Toutes les questions relatives aux droits et aux licences doivent être adressées aux Publications de la Banque mondiale, The World Bank Group, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA; e-mail : pubrights@worldbank.org. Couverture : Banque mondiale/Creative Commons License ii Table des matières Acronymes et abréviations ................................................................................................................... vii Remerciements ....................................................................................................................................... x Résumé analytique ................................................................................................................................. 1 Chapitre 1 - Diversification économique : l’historique macroéconomique des moteurs de croissance actuels et futurs .............................................................................................................. 19 1.1. Contexte du pays ................................................................................................................................. 19 1.2. Tendances et moteurs de la croissance actuelle en RDC ........................................................................ 20 1.3. Pourquoi la diversification économique est-elle importante pour la RDC ? ............................................. 25 1.4. Contraintes à la croissance et à la diversification et défis en matière de productivité du travail ............. 28 1.4.1. Contraintes à la diversification économique ................................................................................. 28 1.4.2. Emplois et faible dynamique de la productivité du travail ............................................................. 31 1.4.3. Évaluation/cartographie et défis de la pauvreté ........................................................................... 33 1.5. Les futurs moteurs de croissance de la RDC .......................................................................................... 35 1.5.1. La vision de la RDC à l’horizon 2050 ............................................................................................. 35 1.5.2. Moteurs potentiels de croissance ................................................................................................ 35 1.5.3. Perspectives de croissance à long terme de la RDC ...................................................................... 37 1.6. Recommandations clés......................................................................................................................... 49 Références........................................................................................................................................................ 50 Chapitre 2 : Environnement des affaires : S’attaquer aux principaux défis et contraintes réglementaires ................................................................................................................ 52 Politiques visant les principaux goulets d’étranglement pour une croissance durable et inclusive ....... 52 2.1. Améliorer la réglementation des entreprises .............................................................................................. 52 2.1.1. Perspective internationale ........................................................................................................... 53 2.1.2. Entrée sur le marché................................................................................................................... 54 2.1.3. Opérations .................................................................................................................................. 56 2.2. Promouvoir l’accès au numérique, à l’électricité et au financement ...................................................... 59 2.2.1. Accès au numérique : faciliter le développement du secteur numérique ..................................... 59 2.2.2. Accès à l’électricité : améliorer l’approvisionnement énergétique ................................................. 61 2.2.3. Accès au financement : promouvoir l’inclusion financière ........................................................... 62 2.3. Remédier à l’inefficacité de la fiscalité et de la politique fiscale : contraintes et défis ............................ 64 2.3.1 Un système de recettes publiques peu performant........................................................................... 65 2.3.2 Les défis du système de recettes fiscales .......................................................................................... 67 2.3.3 Les défis du système des recettes non fiscales .................................................................................. 76 2.3.4. Les défis liés à l’administration des recettes ................................................................................. 78 2.3.5. Recommandations pour les politiques ......................................................................................... 80 2.4 Encourager la décentralisation fiscale .................................................................................................. 81 2.4.1 Un processus de décentralisation fiscale inachevé en RDC ................................................................ 81 2.4.2. Contexte actuel et défis rencontrés dans les efforts de décentralisation fiscale en RDC................. 83 2.4.3. Recommandations pour l’avenir................................................................................................... 86 iii 2.5 Attirer le développement de chaînes de valeur : études de cas illustratives ............................................ 88 2.5.1. Développement de la chaîne de valeur de l’exploitation minière pour les batteries de véhicules électriques ................................................................................................................................................... 88 2.5.2. Développement de la chaîne de valeur agro-industrielle du manioc ............................................. 94 Références...................................................................................................................................................... 100 Chapitre 3 : Intégration et diversification des échanges au niveau régional : L'intégration de la RDC dans les marchés régionaux, les perspectives de l'adhésion à la CAE et la Zone de libre- échange continentale africaine ..................................................................................... 102 3.1. Les perspectives d'intégration régionale ouvriront-elles la porte à la diversification ? .......................... 102 3.1.1 Une géographie difficile pour le commerce .................................................................................... 102 3.1.2 Le commerce de la RDC est très concentré ..................................................................................... 102 3.2 Politiques du commerce : première évaluation de la CAE et de la ZLECAF............................................ 107 3.2.1. Politiques de stimulation du commerce : une première évaluation de la manière dont l'adhésion à la CAE et à la ZLECAF pourrait favoriser une réforme du commerce............................................................. 107 3.2.2. Questions commerciales et chaîne de valeur minière ................................................................. 115 3.3. Estimation des gains d'une intégration régionale plus poussée avec la CAE et la ZLECAF ..................... 117 3.3.1. Scénarios de modélisation ......................................................................................................... 118 3.3.2. L'impact de l'adhésion de la RDC à la CAE .................................................................................. 119 3.3.3. Scénarios de participation à la ZLECAF ....................................................................................... 122 3.4. Conclusions et recommandations ....................................................................................................... 123 Références...................................................................................................................................................... 125 ANNEXES ...................................................................................................................................... 126 Annexe 1.A. - Modèle de croissance à long terme de la Banque mondiale (LTGM) utilisant l'extension des ressources naturelles (NR) ............................................................................................. 126 Annexe 1.B. - Résumé des tableaux et figures des différents scénarios de réforme pour l'exercice de modélisation de la RDC .................................................................................................. 128 Annexe 3.A. Méthodologie de modélisation EGC ................................................................................. 131 Annexe 3.B. Description du modèle ENVISAGE..................................................................................... 133 Figures Figure 1.1. Croissance du PIB réel et contributions à la croissance du PIB réel (%) .................................. 21 Figure 1.2. Croissance du PIB réel et décomposition .............................................................................. 22 Figure 1.3. RDC : Principales tendances de croissance et chiffres de la pauvreté .................................... 23 Figure 1.4. PIB réel, PIB réel par habitant et tendances de la croissance ................................................. 24 Figure 1.5. RDC vs pairs : PIB par habitant en USD (2002 vs 2021) .......................................................... 25 Figure 1.6 : (a) Zones minières et nombre d’entreprises (formelles et informelles), (b) nombre de sites miniers ............................................................................................................................... 26 Figure 1.7. RDC : Dynamique de croissance dans le contexte des chocs .................................................. 27 Figure 1.8 : (a)Indice d’accès aux marchés et (b) Indice d’accès rural ...................................................... 29 Figure 1.9 : Indice du capital humain en RDC ......................................................................................... 30 Figure 1.10. RDC : Productivité, emploi et marché du travail .................................................................. 32 iv Figure 1.11. Conflits, zones de restauration prioritaires et nombre de pauvres ....................................... 34 Figure 1.12. Croissance du PIB, % ........................................................................................................... 40 Figure 1.13. Croissance du PIB, % ........................................................................................................... 40 Figure 1.14. Croissance sectorielle du PIB, % .......................................................................................... 40 Figure 1.15. Production de cuivre, Milliers de tonnes ............................................................................. 41 Figure 1.16. Production de cobalt, Tonnes métriques ............................................................................. 41 Figure 1.17. Contribution de chaque moteur à la croissance du PIB par habitant, ................................... 42 Figure 1.18. Paquets de réformes .......................................................................................................... 44 Figure 1.19. Contribution de chaque réforme à la croissance incrémentale du PIB par habitant ............. 45 Figure 1.20. Croissance du PIB par habitant, % ....................................................................................... 46 Figure 1.21. Revenu intérieur brut par habitant, USD réels de 2020 ....................................................... 46 Figure 1.22. Croissance économique et diversification en RDC : scénarios de référence et scénarios de réformes ............................................................................................................................. 47 Figure 2.1. Qualité de la réglementation ................................................................................................ 53 Figure 2.2. Évolution du crédit privé....................................................................................................... 62 Figure 2.3 : Recettes totales et dons (en % du PIB) ................................................................................. 65 Figure 2.4 : Recettes fiscales totales, Pourcentage du PIB ....................................................................... 66 Figure 2.5 : Total des recettes non fiscales, subventions comprises Pourcentage du PIB ......................... 66 Figure 2.6 : Revenus et bénéfices totaux, 2015-2020, Pourcentage des recettes fiscales ......................... 69 Figure 2.7 : Revenus et bénéfices totaux, 2015-2020, Pourcentage du PIB ............................................. 69 Figure 2.8 : Total des impôts sur le revenu et les bénéfices des personnes physiques, 2015-2020 Pourcentage du PIB............................................................................................................. 70 Figure 2.9 : Recettes de l’IRS, 2015-2020, Pourcentage des recettes fiscales ........................................... 72 Figure 2.10 : Recettes de l’IRS, 2015-2020, Pourcentage du PIB .............................................................. 72 Figure 2.11 : Recettes de la TVA dans quelques pays, 2012-2020, Pourcentage du PIB............................ 73 Figure 2.12 : Recettes des droits d’accises dans quelques pays, 2012-2020, Pourcentage du PIB ............ 75 Figure 2.13 : Recettes tirées de l’extraction des ressources, 2015-2020, Pourcentage du PIB .................. 77 Figure 2.14. Carte fiscale de la RDC ........................................................................................................ 82 Figure 2.15. Répartition des paiements de transfert aux entités décentralisées par catégorie en 2022 ... 84 Figure 2.16. Transferts aux provinces et aux ETD par habitant au titre de la masse salariale, du fonctionnement et des dépenses d’investissement de 2016 à 2022 .................................... 84 Figure 2.18. Taux d’exécution du budget dans les provinces en 2022 ...................................................... 85 Figure 2.17. Équilibre entre les financements conditionnels et inconditionnels destinés aux collectivités locales dans différents pays................................................................................................. 86 Figure 2.19. Croissance de la demande de minéraux entre 2020 et 2040 selon le scénario de développement durable (en multiple de la demande de 2020) ........................................... 89 Figure 3.1. Composition des exportations de la RDC ............................................................................ 103 Figure 3.2. Exportations de minerais de cuivre et de cobalt et de produits raffinés, 2009-2021 ............ 103 Figure 3.3. Origine des importations de la RDC et destination des exportations de la RDC (part du total) ......................................................................................................................................... 105 Figure 3.4. Exportations de biens et services de la RDC (balance des paiements) en $US...................... 107 Figure 3.5 Couverture politique des accords du COMESA, de la SADC et de la CAE ............................... 111 Figure 3.6 Restrictions au commerce des services en RDC par rapport aux pays de la CAE .................... 112 Figure 3.7. Barrières non tarifaires pondérées en fonction des échanges et imposées aux importations de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), par pays, 2020 et 2035 ............. 113 Figure 3.8. 6Indice de performance logistique 2023, performance de la RDC par rapport à ses pairs et dans le temps ................................................................................................................... 115 v Tableaux Tableau 1.1. Aperçu des scénarios de réformes modérées et ambitieuses.............................................. 43 Tableau 2.1. Rapport à la compétitivité mondiale : RDC ......................................................................... 54 Tableau 2.2 : Processus de paiement des impôts et charge globale ........................................................ 56 Tableau 2.3 : Structure des recettes non fiscales en RDC (2020) ............................................................. 66 Tableau 2.4 : Structure des impôts (en % du total et du PIB) – 2020 ....................................................... 68 Tableau 2.5 : Taux d’IRS dans quelques pays .......................................................................................... 71 Tableau 2.6. Taux et seuil de TVA dans quelques pays ............................................................................ 74 Tableau 2.7. Dépenses fiscales en RDC (2019-2021) ............................................................................... 76 Tableau 2.8 : Recommandations prioritaires pour les politiques ............................................................. 99 Tableau 3.1. Exportations totales et 5 premières catégories de produits exportés par la RDC vers les voisins régionaux ........................................................................................................... 105 Tableau 3.2. Petit commerce frontalier au sein de la CAE (en millions USD, 2018, 2019 ou 2021) ......... 106 Tableau 3.3. Répartition des taux tarifaires dans le tarif extérieur de la RDC en 2020 (pourcentage du total) ............................................................................................................................. 108 Tableau 3.4. Répartition des taux tarifaires dans le tarif extérieur commun de la CAE en 2022 (pourcentage du total) ................................................................................................... 108 Tableau 3.5. Comparaison du TEC CAE révisé avec le TEC 2017 ............................................................ 109 Tableau 3.6. Feuille de route pour la mise en œuvre de l'adhésion de la RDC à la CAE.......................... 110 Tableau 3.7. Impact en 2035 sur la CAE et la RDC du nouveau TEC 2022 par rapport à la situation de référence ....................................................................................................................... 117 Tableau 3.8. Impact de l'adhésion de la RDC au TEC de la CAE — Variation du revenu réel en 2035 en pourcentage par rapport au scénario de base ................................................................ 120 Tableau 3.9. Gains de l'adhésion profonde de la RDC à la CAE (scénario 2) ........................................... 120 Tableau 3.10. Impact sur les exportations sectorielles de la RDC en volume ......................................... 121 Tableau 3.11. Gains de bien-être grâce à la ZLECAF . Pourcentage de changement par rapport à la base 2035 ...................................................................................................................... 122 Encadrés Encadré 1.1 LTGM-NR : Résumé des hypothèses clés pour la RDC .......................................................... 38 Encadré 2.5. Principales taxes, redevances et droits du secteur forestier au Ghana ................................ 78 vi Acronymes et abréviations AEZO Organisation africaine des zones économiques (African Economic Zones Organization) AFD Agence française de développement AFE Accord de facilitation des échanges ALE Accord de libre-échange ASS Afrique subsaharienne BACI Base pour l’analyse du commerce international BASL Bureau de l’administrateur des stool lands BIVAC Bureau d’inspection, évaluation, estimation et contrôle BM Banque mondiale BNT Barrières non tarifaires CAE Communauté d’Afrique de l’Est CAFI Initiative pour la forêt de l’Afrique centrale (Central African Forest Initiative) CAMI Cadastre minier CDN Contribution déterminée au niveau national CEM Mémorandum économique d’un pays (Country Economic Memorandum) CEPII Centre d’études prospectives et d’informations internationales CIA Cadre intégré amélioré CNSS Caisse nationale de sécurité sociale CNUCED Conférence des Nations Unies sur le commerce et le développement CO2 Dioxyde de carbone COMESA Marché commun de l’Afrique orientale et australe (Common Market for Eastern and Southern Africa) COREF Comité de pilotage et d’orientation de la réforme des finances publiques DDIB Division du développement de l’industrie du bois DGDA Direction générale des douanes et accises DGI Direction générale des impôts DGRAD Direction générale des recettes administratives, judiciaires, domaniales et de participations DSP Diagnostic systématique pays DSPP Diagnostic secteur privé pays EDIC Étude diagnostique d’intégration commerciale EGC Équilibre général calculable EMAPE Exploitation minière artisanale et à petite échelle ENCORE Amélioration de la collecte des recettes et de la gestion des dépenses (Enhancement of Revenue Collection and Expenditure Management) ETD Entité territoriale décentralisée FAB Franco à bord FCP Fonds de contrepartie FFN Fonds forestier national FMI Fonds monétaire international FNSCC Fonds national de solidarité contre la COVID-19 FOMIN Fonds minier pour les générations futures FONER Fonds d’entretien routier vii FPC Fonds de promotion culturelle FPEF Fonds de promotion de l’éducation et de la formation FPT Fonds de promotion touristique GUCE Guichet unique de création d’entreprises GUICE Guichet unique intégral pour le commerce extérieur GWh Gigawattheure ICH Indice de capital humain IDE Investissement direct étranger IFM Indice de la faim dans le monde IPL Indice de performance logistique IRP Impôt sur le revenu des particuliers IRS Impôt sur le revenu des sociétés ISYS-Régies Système d’information de gestion pour la numérisation des paiements des recettes LFP Participation de la population active (Labor force participation rate) LOGIRAD Logiciel de gestion intégrée des recettes administratives et domaniales MCLT Modèle de croissance à long terme MCLT-RN Extension aux ressources naturelles du modèle de croissance à long terme MCO Moindres carrés ordinaires MNT Mesure non tarifaire MoU Protocole d’accord (Memorandum of Understanding) MPME Micros, petites et moyennes entreprises NPF Nation la plus favorisée NQMT Normes, qualité, métrologie et tests OCC Office congolais de contrôle OEC Observatoire de la complexité économique (Observatory of Economic Complexity) OMC Organisation mondiale du commerce OPEC Office des petites et moyennes entreprises OTC Obstacles techniques au commerce PEM Perspectives de l’économie mondiale PIB Produit intérieur brut PMC Protocole du marché commun PME Petites et moyennes entreprises PMMP Perspectives des marchés des matières premières PMP Perspectives macroéconomiques de la pauvreté PNSD Plan national stratégique de développement PRIS Pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure PTF Productivité totale des facteurs PWT Penn World Table RCCM Registre du commerce et du crédit mobilier RDC République démocratique du Congo RDP Revue des dépenses publiques REDD+ Réduction des émissions dues à la déforestation et à la dégradation des forêts, et gestion durable des forêts RNB Revenu national brut RNEC Rapport national sur l’évolution du climat RVA/Go-Pass Régie des voies aériennes/Go-Pass SADC Communauté de développement de l’Afrique australe (Southern African Development Community) viii SARA Autorité fiscale semi-autonome (Semiautonomous revenue authority) SFI Société financière internationale SPS Sanitaires et phytosanitaires SYDONIA Système douanier automatisé TADAT Outil d’évaluation diagnostique de l’administration fiscale (Tax Administration Diagnostic Assessment Tool) TCAC Taux de croissance annuel composé TEC Tarif extérieur commun TIC Technologies de l’information et de la communication TRIMS Mesures relatives aux investissements liés au commerce (Trade-Related Investment Measures) TRIPS Droits de propriété intellectuelle liés au commerce (Trade-Related Intellectual Property Rights) TVA Taxe sur la valeur ajoutée UE Union européenne USD Dollars US (dollars des États-Unis) USGS Institut de surveillance géologique des États-Unis (United States Geological Survey) VAB Valeur ajoutée brute VE Véhicule électrique WDI Indicateurs du développement dans le monde (World Development Indicators) WGI Indicateurs mondiaux de gouvernance (mesurés par la Banque mondiale) WITS Solution mondiale intégrée pour le commerce (World Integrated Trade Solution) ZES Zone économique spéciale ZLECAf Zone de libre-échange continentale africaine ix Remerciements Le présent Mémorandum économique-pays a été produit par une équipe multidisciplinaire composée de membres du personnel de la Banque mondiale et d’experts externes, dirigée par Sandra El Saghir (Economiste Principale, cheffe d’équipe de projet et auteure principale) et Jean-Christophe Maur (Economiste Principal, co-chef d’équipe de projet), sous la supervision d’Abha Prasad (Directrice Sectorielle) et d’Albert Zeufack (Directeur-Pays). L’édition de ce rapport a été assurée par Sandra El Saghir avec la collaboration de Moise Tshimenga Tshibangu (Economiste), sur la base des contributions des membres de l’équipe suivants : ● Chapitre 1 : Sandra El Saghir, Moise Tshimenga Tshibangu, Steven Michael Pennings (Economiste Principal), Arthur Galego Mendes (Consultant), Alexandra Jarotschkin (Economiste), Aly Sanoh (Economiste Principal) ● Chapitre 2 : Sandra El Saghir, Moise Tshimenga Tshibangu, Magueye Dia (Spécialiste Principal du Secteur Privé), Alphonsus Achomuma (Spécialiste Principal du Secteur Financier), Ruxandra Burdescu (Spécialiste en chef de la gouvernance), Isabella Hayward (Spécialiste Principale du Développement Numérique), Clement Gevaudan (Consultant), Thomas Dubut (Consultant) ● Chapitre 3 : Jean-Christophe Maur, Maryla Maliszewska (Economiste Principale), Carmen Estrades Pineyrua (Consultante). Pour les deux études de cas complémentaires sur les chaînes de valeur régionales : ● Etude de cas 1 (chaîne de valeur de l’exploitation minière (batteries de véhicules électriques) : Martin Lokanc (Spécialiste Principal de l'Exploitation Minière), Lois Hooge (Consultant), Nils Handler (Consultant), Kimberly Ann Berman (Consultante). L’équipe témoigne sa reconnaissance à Cina Vazir et Abdurrehman Naveed de la Harvard Kennedy School, qui ont fourni une grande partie des informations sur les chaînes de valeur du cuivre. ● Etude de cas 2 (chaîne de valeur agroalimentaire-manioc) : Sandra El Saghir, Ilias Hamdouch (Consultant), Lisa Michelle Choux (Chargée de Stratégie), Fanja Ravoavy (Responsable Principale des Opérations), Natalia Agapitova (Economiste Principale), Cheikh Amadou Tidiane Dia (Spécialiste Principal en Agriculture), Patience Balomba Mpanzu (Economiste en agriculture) et Ando Irina Rabarijohn (Consultante). Nos remerciements les plus chaleureux vont également à Chadi Bou Habib (Economiste en chef), Richard Record (Economiste-Pays en Chef) et Cesar Calderon (Economiste en Chef) pour leurs commentaires et suggestions. L’équipe remercie Hassan Zaman (Directeur Régional), Asad Alam (Directeur Régional), Vivek Suri (ancien Directeur Sectoriel), Sébastien Dessus (Directeur Sectoriel), Malick Fall (Responsable-Pays), Douglas Pearce (Directeur Sectoriel), Guillemette Jaffrin (Cheffe de Programme), Philip Schuler (Economiste en Chef) et Frederico Gil Sander (Directeur Sectoriel) pour leurs conseils et leur soutien. Lydie Ahodehou (Assistante de Programme Principale), Karima Laouali Ladjo (Assistante de Programme) et Jeannine Nkakala (Assistante de Programme) ont apporté un excellent soutien opérationnel et administratif. x L’équipe tient également à remercier de nombreux experts du gouvernement congolais pour leur collaboration et leurs précieux commentaires et suggestions, principalement au sein des ministères des Finances, du Budget, du Plan, des Mines, de l’Industrie et du Commerce extérieur. Des remerciements particuliers sont également adressés au COPEMECO, à la FEC et aux membres des institutions académiques et universitaires pour leurs précieux commentaires et contributions tout au long de la préparation du présent Mémorandum économique-pays. Cet ouvrage a été partiellement financée par les fonds fiduciaires du Mécanisme de coordination pour le commerce et du Mécanisme de soutien au climat. La révision éditoriale, la composition et la traduction ont été assurées par JPD Systems. xi Résumé analytique Favoriser la diversification économique et l’intégration régionale pour accélérer la croissance, la création d’emplois et la réduction de la pauvreté Malgré des efforts notables, le cadre macroéconomique actuel ne permet pas de créer les conditions pour que la croissance en RDC se traduise par une amélioration des conditions de vie. Afin d’accéder au statut de pays à revenu intermédiaire, il va falloir adopter des réformes économiques ambitieuses pour favoriser une croissance diversifiée. Bien que richement dotée en ressources naturelles et humaines, la République démocratique du Congo (RDC) a eu des difficultés à atteindre son plein potentiel économique, notamment en raison des niveaux élevés et persistants de vulnérabilité et de fragilité. Des décennies de mauvaise gouvernance, de faiblesse des institutions budgétaires, de mauvaise gestion des ressources naturelles, de conflit et de violence prolongés ont freiné les progrès dans le développement du capital humain et physique, entraînant une sous-performance économique et des niveaux élevés de pauvreté. Au cours des deux dernières décennies, l’économie de la RDC a connu une croissance remarquable, associée à un retour significatif à la stabilité macroéconomique. Avec une croissance moyenne de 5,7 % sur la période 2011- 2021, l’économie de la RDC se classe parmi les économies d’Afrique subsaharienne (ASS) à la croissance la plus rapide. Malgré cette reprise, la RDC affiche un rythme de rattrapage plus lent et n’a guère progressé pour ramener son PIB par habitant à son niveau de 1960. Les niveaux de croissance de la RDC sont loin d’être à la hauteur du potentiel des ressources dont dispose le pays, un potentiel qui permettrait d’améliorer les conditions de vie de sa population . Au cours des deux dernières décennies, les performances économiques ne se sont pas traduites par des améliorations dans la vie de la plupart des gens, et la pauvreté reste répandue pour plus de 61,9 % de la population en 2022. Malgré le potentiel économique considérable de la RDC, notamment sa richesse en ressources naturelles et humaines, l’économie du pays reste concentrée dans quelques secteurs, notamment l’exploitation minière et l’exportation de minéraux bruts. Une plus grande diversification des partenaires commerciaux et des produits, y compris le long de la chaîne de valeur du secteur minier, est nécessaire pour renforcer la résilience et maintenir des taux de croissance élevés, créer des emplois et accélérer la réduction de la pauvreté. Sur la base des tendances actuelles, les perspectives sont favorables à moyen et long terme grâce au renforcement du secteur non minier ; toutefois, en l’absence de réformes économiques, elles ne se traduiront pas par une amélioration du PIB par habitant . La croissance en RDC devrait avoisiner les 6 % dans la seconde moitié des années 2020 avant de ralentir à son niveau potentiel de 4 % à l’horizon 2035 et de se stabiliser autour de 4,4 % jusqu’en 2050. Cependant, en raison de la croissance rapide de la population, le PIB réel par habitant devrait augmenter en moyenne de 3 % dans la seconde moitié des années 2020, mais diminuer à 1-2 % à long terme. À court terme, la croissance est principalement tirée par le secteur minier. À moyen et long terme, le secteur non minier présente de meilleurs fondamentaux (croissance de la PTF, du capital humain et de la population en âge de travailler), tandis que le secteur minier souffre de l’épuisement des réserves et de l’absence de gains de productivité. D’ici 2050, la part de l’exploitation minière dans le PIB devrait être d’environ 13 % (contre 32 % en 2020). Les principaux 1 vents contraires à la croissance par habitant sont la croissance démographique et l’épuisement des réserves de cuivre. En l’absence de réformes économiques, le revenu par habitant en RDC devrait croître lentement, de moins de 2 % en moyenne, avec un RNB inférieur à 1 000 USD d’ici 2050. Les investissements publics et privés et la productivité du secteur non minier sont les principaux moteurs de la croissance à moyen terme. Le secteur minier devrait connaître une croissance très rapide avant de décliner dans la seconde moitié des années 2020. La croissance du PIB non minier devrait maintenir une tendance à la hausse jusqu’à la fin des années 2020, car l’économie aura tendance à se diversifier par rapport au secteur minier, avant de se stabiliser autour de 5,5 % jusqu’en 2050. La contribution de l’accumulation de capital à la croissance potentielle devrait augmenter à court terme avant de se stabiliser. L’investissement nécessaire (par l’accumulation de capital privé et public) devrait passer de 11 % du PIB en 2020 à 16 % en 2025, avant de stagner à environ 17 % en 2050. La forte croissance du capital humain est due à l’augmentation des taux de scolarisation et des mesures de santé. Cependant, la qualité de l’éducation reste stagnante. La croissance du capital humain est forte, mais n’a qu’un faible effet sur la croissance, car le secteur minier est exigeant en investissements. Si la RDC veut atteindre son objectif de statut de pays à revenu intermédiaire inférieur/supérieur d’ici 2035-2050, il lui faudra adopter des réformes économiques plus ambitieuses. Les perspectives économiques de la RDC s’améliorent et le pays dispose d’une conjoncture favorable pour promulguer des réformes qui soutiendront des niveaux de croissance accrus et permettront l’émergence de nouveaux moteurs de croissance. Les simulations de modélisation montrent que, grâce à un ensemble de réformes ambitieuses, la RDC pourrait atteindre une tendance de croissance potentielle à la hausse d’ici 2050. La combinaison de différents facteurs de croissance et la mise en place de, réformes économiques offrent au pays un potentiel de croissance important. Des réformes modérées et ambitieuses peuvent stimuler la croissance du PIB par habitant de 2 à 4 % d’ici 2035 et de 3 à 6 % d’ici 2050. Cependant, tous les scénarios de réforme ne permettent pas d’atteindre l’objectif d’un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure d’ici à 2050. Néanmoins, des réformes ambitieuses peuvent presque doubler le revenu par habitant pour le porter à plus de 1 600 USD d’ici à 2050 par rapport au scénario de référence. Dans ce cas, l’objectif de devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure pourrait être atteint d’ici 2035 dans le cadre du scénario de réformes le plus ambitieux lorsqu’il est associé à une réponse fiscal e forte et à la bonne tenue des cours des produits miniers. La diversification économique en RDC est entravée par un environnement des affaires et des contraintes réglementaires et budgétaires clés qui ne sont pas propices à une croissance tirée par le secteur privé. Au nombre des politiques visant à résoudre les principaux goulets d’étranglement à une croissance durable et inclusive, on peut citer : i) l’amélioration de la réglementation des affaires ; ii) la promotion de l’accès au numérique, à l’électricité et au financement ; iii) la résolution des problèmes de fiscalité inefficace et de politique fiscale ; iv) l’encouragement de la décentralisation fiscale et v) l’attraction du développement de la chaîne de valeur (comme illustré dans les deux cas pratiques joints au rapport Mémorandum économique-pays et résumés ci-dessous). Faire du secteur privé le moteur déterminant de la croissance dépend de la capacité d’un pays à créer un environnement commercial prévisible et transparent susceptible d’attirer les investissements productifs. D’un point de vue opérationnel, un environnement commercial difficile, caractérisé par un régime fiscal inefficace, complexe et inadapté, et un approvisionnement insuffisant en électricité, favorise les inégalités tout en affaiblissant le secteur privé. 2 Le climat des affaires en RDC est confronté à des défis majeurs en raison de la lourdeur et de la complexité de son cadre réglementaire. Par conséquent, la conception, la mise en œuvre et le suivi efficaces et efficients des réglementations affectant les entreprises devraient constituer une priorité importante pour le Gouvernement de la RDC. L’environnement concurrentiel de la RDC se situe dans le 10e centile inférieur de 141 économies, selon le rapport sur la compétitivité mondiale. Les défis auxquels sont confrontées les entreprises en RDC sont enracinés dans le cadre réglementaire complexe et lourd du pays. Ce rapport analyse les principales charges réglementaires qui affectent les entreprises à différents stades du cycle de leur vie, de l’entrée sur le marché à l’exploitation. L’enregistrement des entreprises reste un défi en raison du manque d’application de la réforme établissant un guichet unique pour faciliter leur enregistrement. Le cadre réglementaire pour l’octroi de licences est fragmenté et trop normatif. Les entreprises n’ont pas facilement et rapidement accès à des conseils clairs et complets sur les licences dont elles ont besoin, les mesures qu’elles doivent prendre et le temps qu’il faudra aux régulateurs pour examiner leurs demandes de licence et y répondre. Il est absolument nécessaire de rationaliser et de limiter l’octroi de licences aux seuls secteurs qui répondent à des préoccupations économiques, sociales, environnementales et de sécurité, afin de promouvoir l’activité des entreprises et l’investissement privé. L’octroi de licences devrait être rationalisé et limité à un nombre réduit de secteurs et d’activités spécifiques pour lesquels un contrôle préalable des entreprises est nécessaire afin de préserver les intérêts économiques, sociaux, sécuritaires ou environnementaux. Ainsi, la conception, la mise en œuvre et le suivi efficaces des réglementations affectant les entreprises devraient être une priorité importante pour le Gouvernement de la RDC. Pour remédier à ces goulets d’étranglement, il devrait prendre toutes les dispositions utiles pour une intégration complète des composantes du guichet unique, en assurant des interconnexions avec la DGI et le ministère de l’Économie. Il existe également un besoin important de réforme des licences afin de réduire le fardeau administratif des acteurs du secteur privé qui mènent des activités en RDC, tant au niveau provincial que national. Cet environnement des affaires est entravé par la faible profondeur du secteur financier, avec pour caractéristique un accès très difficile au financement, en particulier pour les MPME, d’où la nécessité d’intensifier les réformes visant à promouvoir l’inclusion financière. Le ratio du crédit privé au PIB, estimé à 7,3 % en RDC en 2020, est l’un des plus faibles de l’Afrique subsaharienne (ASS). La part du financement des MPME dans les crédits du secteur privé n’est que de 15 % environ. En outre, le crédit est très cher en RDC. Les réformes devraient se concentrer sur les principaux facteurs d’amélioration de l’accès au financement pour les MPME congolaises, notamment la concurrence bancaire, l’infrastructure de crédit et les politiques publiques. Un cadre de coordination plus formalisé est nécessaire afin de : i) mieux contrôler les risques de chevauchement ; ii) mesurer la complémentarité de ces programmes et surtout iii) maximiser la mobilisation des fonds auprès des institutions financières privées. Deux autres politiques publiques pourraient avoir un impact sur l’accès au crédit des MPME ; d’une part, la simplification de la fiscalité et d’autre part la mise en place de Centres de gestion agréés. Les réformes du secteur de l’énergie devraient être mises en œuvre de toute urgence en vue de remédier à la qualité médiocre de l’approvisionnement en électricité et à son coût. Par rapport à ses pairs structurels, la RDC est longtemps restée en dessous de la moyenne dans le domaine de l’accès à l’électricité. Ce retard dans la fourniture d’électricité est encore renforcé par la lourdeur des procédures d’obtention de l’électricité. La libéralisation du secteur de l’énergie a commencé en 1994, et les réform es les plus récentes ont eu lieu en 2021. Les réformes depuis 2021 comprennent la numérisation du système de paiement des factures, l’établissement d’objectifs pour garantir la fiabilité de l’approvisionnement en 3 énergie et la création du Système national de distribution. À court terme, l’État devrait prendre toutes les dispositions nécessaires au bon fonctionnement des organes de régulation en les dotant de ressources suffisantes et en renforçant la mobilisation des investissements susceptibles de réaliser le potentiel de la production électrique congolaise. Le pays ne dispose pas d’un nombre suffisant de bases numériques et analogiques pour mener à bien une transformation numérique transversale. Les priorités pour le développement du secteur devraient dès lors prévoir des investissements importants dans l’infrastructure de réseau pour combler les lacunes existantes, parallèlement à des efforts visant à stimuler la demande de services numériques ainsi que la poursuite de la réforme de la réglementation. L’absence de nombreux fondements numériques et analogiques constitue un obstacle important à la création d’un secteur numérique robuste, piloté par le secteur privé, et à l’exploitation du potentiel de création d’emplois et de croissance économique lié à l’utilisation productive des technologies basées sur les données. Le gouvernement a adopté le Plan national du numérique (PNN) en 2019, qui doit faire l’objet d’une révision intermédiaire en 2025. Cependant, de nombreuses initiatives envisagées ne se sont pas concrétisées en raison du manque de financements publics. La RDC ne dispose donc pas de nombreux éléments de base pour faire avancer la transformation numérique, notamment l’accès universel au numérique, l’infrastructure publique numérique pour faciliter la prestation de services numériques, y compris l’identification numérique, et les compétences numériques. Des recommandations politiques devraient être envisagées dans trois grandes catégories : i) faciliter l’investissement dans le développement du secteur ; ii) développer l’infrastructure publique numérique pour catalyser l’expansion des services numériques et iii) poursuivre les réformes réglementaires et le dialogue. En ce qui concerne la fiscalité, le système des recettes publiques est clairement peu performant, avec un ratio global ressources publiques/PIB très faible. Cette faible performance est due non seulement aux déficiences d’un système fiscal très complexe, fragmenté et non adapté à l’environnement des entreprises, mais aussi aux faiblesses de l’administration fiscale. La fiscalité, tant directe qu’indirecte, reste largement inefficace en termes de mobilisation des recettes et comporte des exonérations fiscales très généreuses. Cependant, aucune réforme du système de recettes fiscales et non fiscales ne peut réussir à augmenter les recettes publiques sans s’attaquer aux faiblesses d’une administration dotée d’un personnel pléthorique, mais sous-productive. Dans ce contexte, le Gouvernement de la RDC devrait accélérer les réformes en cours afin de moderniser la fiscalité des particuliers et des entreprises et d’élargir et de mieux protéger l’assiette fiscale. Le gouvernement devrait accélérer la mise en œuvre de la loi révisée sur l’impôt sur le revenu des personnes physiques et l’impôt sur les sociétés, lutter contre l’informalité et revoir les exonérations fiscales existantes afin d’élargir l’assiette fiscale. Il est également urgent de renforcer la gestion de la TVA et d’accélérer les efforts pour rationaliser et mieux cibler les accises. Le gouvernement devrait surveiller et évaluer de près les dépenses fiscales et réduire radicalement les régimes fiscaux dérogatoires existants. Le système des recettes non fiscales doit également être rationalisé, car les opérateurs économiques sont soumis à une multitude de charges non fiscales et parafiscales qui pèsent sur l’économie congolaise tout en ne représentant qu’une part marginale des recettes totales, avec un potentiel sous-exploité du secteur extractif. Le gouvernement devrait numériser la déclaration et le paiement de toutes les taxes et viser une coordination et une consolidation accrues de toutes les administrations fiscales. Les efforts pour améliorer la numérisation, moderniser l’outil informatique de gestion intégrée de la DGI et de la D GRAD, améliorer la communication et l’échange d’informations entre la DGI, la DGRAD et la DGDA, rationaliser 4 et mettre en place une gestion de l’audit fiscal basée sur le risque sont essentiels. Enfin, la RDC devrait envisager la création d’une autorité fiscale unique semi-autonome et d’un organe administratif semi- indépendant en dehors de la hiérarchie traditionnelle des pouvoirs publics afin de consolider l’ensemble de l’administration fiscale au sein d’une seule entité administrative. Cela permettrait de résoudre les problèmes de coordination actuels, d’améliorer les performances des administrations fiscales ainsi que les services fournis aux citoyens et, en fin de compte, d’accroître la mobilisation des recettes publiques dans le pays. Les réformes de décentralisation fiscale ont un potentiel considérable pour aider à réduire la pauvreté et contribuer à une prospérité partagée en RDC. Les réformes en vue d’une décentralisation sont connues pour promouvoir des gains d’efficacité, l’inclusivité et la réacti vité, une restructuration des forces de l’économie politique dans un contexte de fragilité, de conflit et de violence, ainsi que le développement durable et l’amélioration de la prestation des services publics. Dans le contexte actuel de la RDC, le gouvernement au niveau central collecte toutes les recettes nationales et redistribue une partie de ces fonds aux provinces et aux ETD sous forme d’investissements opérationnels et de transferts de salaires. Le système actuel souffre d’un manque d’équité dans les transferts de ressources ainsi que de fortes disparités dans leur exécution. Il est urgent de procéder à des réformes au niveau local afin de mieux rendre compte des dépenses publiques et de mieux contrôler les provinces. Le gouvernement s’est engagé à poursuivre ses efforts de décentralisation fiscale en élaborant une stratégie de six ans pour le renforcement de la décentralisation financière. Pour que le processus de décentralisation soit favorable, il faudra établir un dialogue fréquent afin de dissiper les malentendus et de s’adapter aux circonstances en constante évolution d’un environnement de gouvernance fragile, faire des efforts supplémentaires pour renforcer la voix des bénéficiaires finaux des réformes, et demander des comptes aux gouvernements locaux et centraux tout en renforçant les capacités à tous les niveaux du gouvernement. L’intégration commerciale régionale et la diversification des échanges peuvent favoriser le développement de la chaîne de valeur et contribuer à la création d’emplois, libérant ainsi des possibilités de croissance plus forte et d’amélioration du bien-être. L’intégration commerciale régionale peut promouvoir le développement de la RDC et contribuer à la croissance et à la création d’emplois. Compte tenu de l’importance du commerce régional en RDC par rapport à d’autres pays d’Afrique, une intégration et une diversification plus poussées du commerce avec la région peuvent conduire à un développement plus fort. La RDC partageant des frontières avec 9 voisins, l’intégration régionale peut favoriser la facilitation du commerce et la modernisation des politiques commerciales et offrir des opportunités de diversification du commerce dans les provinces de la RDC. En outre, elle peut permettre le développement de chaînes de valeur complémentaires avec les voisins régionaux afin de garantir la rentabilité tout en assurant le transfert des connaissances et le partage des compétences. Le commerce régional est essentiel pour la RDC étant donné les barrières commerciales très élevées auxquelles le pays est confronté. Une orientation du commerce vers le marché local peut être la seule option économique lorsque l’accès aux marchés lointains est prohibitif. Les estimations des barrières non tarifaires placent la RDC parmi les pays ayant les niveaux les plus élevés du continent. En outre, le pays est confronté à une combinaison de conditions géographiques coûteuses et de performances généralement faibles en matière de facilitation du commerce et de logistique, ce qui se traduit par des coûts logistiques extrêmement élevés pour le pays. 5 En réponse, la RDC devrait poursuivre une stratégie avec deux objectifs complémentaires : i) améliorer le commerce régional pour offrir de nouvelles possibilités de diversification des exportations et de réduction des coûts d’importation, et ii) tirer parti du secteur minier pour créer des conditions permettant de capturer une plus grande part de la chaîne de valeur . Les recommandations concernant ce dernier point sont disponibles dans le cas pratique consacré au secteur minier. En ce qui concerne l’amélioration du commerce régional, la décision de la RDC d’adhérer à la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf) et à la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) est une évolution très positive qui devrait créer les conditions d’une intégration plus poussée dans les économies régionales tout en réduisant les coûts commerciaux dans leur ensemble. Les perspectives les plus immédiates de réforme et d’intégration commerciales sont susceptibles de se concrétiser dans le cadre de l’adhésion à la CAE. La CAE dispose déjà d’une base institutionnelle solide et a formulé un large éventail de politiques d’intégration qui ont été mises en œuvre par ses membres. La RDC devrait être en mesure de se mettre rapidement au niveau des normes de la CAE, avec des gains significatifs attendus de la facilitation des échanges avec les membres de la CAE et de l’accès à un marché élargi de la CAE. La facilitation des échanges devrait être une priorité pour la RDC, tant dans le contexte de la CAE que dans celui de la ZLECAf. Les simulations de modèles suggèrent que l’ampleur de ces gains pourrait être très importante pour la RDC si des politiques ambitieuses de libéralisation du commerce sont mises en œuvre. Les simulations de réforme de la politique commerciale suggèrent que l’ampleur des gains de l’adhésion à la CAE pourrait être très importante pour la RDC (8 % de richesse supplémentaire) si des politiques ambitieuses de libéralisation du commerce sont mises en œuvre . Ces gains proviennent en grande partie de la facilitation du commerce, car l’impact des changements tarifaires est comparativement beaucoup plus modeste. En pratique, la RDC a déjà commencé à adopter des mesures transfrontalières pour rationaliser les processus avec ses voisins de la CAE. Les gains de l’intégration dans la CAE se produiront malgré le fait que le tarif NPF moyen appliqué par la RDC (actuellement faible) augmentera en raison de la nécessité de mettre en œuvre le tarif extérieur commun de la CAE. Une fois que la ZLECAf sera effective, la RDC tirera d’importants avantages en plus de ceux déco ulant de son intégration dans l’espace de la CAE. Un modèle actualisé de simulation des bénéfices de la ZLECAf pour la RDC montre un gain potentiel de 13,7 % du bien-être. Les pays voisins de la CAE devraient également enregistrer des gains importants grâce à la ZLECAf. Cela signifie qu’en termes d’objectifs politiques, la poursuite de l’intégration de la CAE (et l’inclusion de la RDC) sera mieux réalisée en gardant à l’esprit les gains futurs conférés par la ZLECAf. Cas pratiques associés au Mémorandum économique-pays de la RDC : chaînes de valeur régionales Les deux cas pratiques examinés dans des rapports complémentaires visent à mieux illustrer les possibilités et les défis décrits dans le Mémorandum économique-pays et considérés comme importants pour la diversification économique et la création d’emplois grâce à la transformation structurelle et au renforcement du commerce et de l’intégration régionale. L’accent est mis sur deux secteurs clés, moteurs potentiels de la croissance (l’exploitation minière et l’agro-industrie), qui offrent d’importantes possibilités d’expansion dans le contexte de la transition énergétique mondiale, de l’insécurité alimentaire et de la poursuite de l’intégration régionale. Bien que les possibilités et les contraintes 6 spécifiques à la chaîne de valeur du manioc et de l’exploitation minière liée aux batteries de véhicules électriques soient présentées (et incluent une dimension climatique), la plupart des défis et des recommandations pourraient également s’appliquer à d’autres produits ou secteurs de l’économie (par exemple, le maïs ou tout autre produit manufacturé ou transformé). Ces cas pratiques soulignent le manque d’attrait de l’environnement commercial en général pour l’investissement privé, l’expansion des PME ou la compétitivité des produits. Cas pratique 1 : chaînes de valeur de l’industrie minière La RDC doit saisir l’occasion offerte par la transition énergétique mondiale pour tirer parti de ses richesses minérales et jeter les bases d’un développement rapide, résilient et propre des chaînes de valeur minières liées aux batteries de véhicules électriques. La transition énergétique mondiale transforme en profondeur l'industrie minière internationale. Cette transition présente des opportunités pour les entreprises et les États qui les accueillent. On assiste à un regain d’intérêt pour un développement des approvisionnements en minéraux de la transition énergétique. Cependant, cette transition pose également des défis sur les plans réglementaires et technologiques, car les pays et les entreprises cherchent également à décarboniser leurs chaînes de valeur conformément aux engagements de l'Accord de Paris. Dans un monde où les consommateurs finaux et les fabricants de technologies d'énergie renouvelable cherchent de plus en plus à produire des produits propres, où les références « vertes » sont mesurées tout au long des chaînes de valeur, la RDC est bien placée pour être un fournisseur de choix. En fait, la RDC et la Zambie possèdent certaines des ressources en cuivre et en cobalt les plus propres de la planète, tant par la grande quantité d'énergie renouvelable (hydroélectrique) utilisée dans leur production, que par la haute teneur de leurs gisements. La demande de « minéraux pour batteries » devrait être multipliée par dix au cours de la prochaine décennie, et la RDC est bien placée pour fournir un pourcentage important de ces minéraux, à condition que des conditions favorables soient réunies. L’analyse des données publiques et des projections publiées par les constructeurs automobiles mondiaux indique qu’ils produiront 5 819 GWh de capacité de batterie et 55 millions de voitures, avec un investissement total de 1 200 milliards USD à l’horizon 2030. Pour certains minéraux, cela représente une augmentation massive de la demande (et de l’offre correspondante) d’ici 2040 par rapport aux niveaux de 2020. Le lithium-graphite et le cobalt connaîtront les plus forts coefficients d'augmentation de la demande, bien que leur production en 2020 soit faible. Si le cuivre ne doit connaître qu'une faible augmentation de 2,6, sa base de départ est très large et représente un défi important pour l'industrie, car il ne peut pas être remplacé par d'autres minerais. 7 Croissance de la demande de minéraux de 2020 à 2040 selon le scénario de développement durable (en multiple de la demande de 2020) La contribution du secteur minier au PIB, aux exportations et aux recettes fiscales de la RDC a été substantielle et continue d’augmenter. Selon l’ITIE, les recettes collectées dans le secteur minier de la RDC ont dépassé celles du secteur pétrolier et gazier en 2010, année au cours de laquelle les entreprises minières ont contribué à hauteur de 63 % des 875 millions USD. En 2017, le secteur a généré 1,68 milliard USD, représentant 17,4 % du PIB, 55 % des recettes publiques totales, 99,3 % des exportations totales et un quart de l’emploi total. En 2019, la contribution fiscale du secteur minier est passée à 1,78 milliard USD et atteindra environ 4,0 milliards USD en 2021. Pourtant, la RDC reste pauvre et la gouvernance du secteur minier demeure un défi. Un nouveau code minier a été adopté en 2018 après de nombreux débats avec le secteur privé et la société civile. Si les dispositions fiscales ont été révisées pour assurer de meilleures retombées financières de l’exploitation minière, le code a également créé un certain nombre de problèmes à cet égard. Avant tout, comme dans de nombreux pays en développement, les capacités sont limitées pour mettre le nouveau Code en application. Le pays ne dispose que d’une capacité institutionnelle limitée pour mettre en œuvr e des politiques, contrôler ou faire respecter la loi. De plus, la capacité du gouvernement à tirer parti du secteur pour développer et diversifier l'économie reste faible. Tandis que le secteur minier de la RDC se prépare à une nouvelle vague d’investisse ments et à une transition vers des activités à plus forte intensité énergétique, le moment est venu de jeter les bases d’une chaîne d’approvisionnement résiliente, responsable et propre. Le pays ne dispose que d’une capacité institutionnelle limitée pour mettre en œuvre des politiques, contrôler ou faire respecter la loi. De plus, la capacité du gouvernement à tirer parti du secteur pour développer et diversifier l'économie reste faible. En outre, l’approfondissement des mines existantes entraînera de nouve lles richesses géologiques et déclenchera une vague de nouveaux investissements à plus forte intensité énergétique. Un environnement favorable doit être créé pour que le secteur : i) se décarbonise avant que l’industrie ne s’enferme dans des technologies à forte intensité de carbone ; ii) attire une nouvelle vague d’investissements pour soutenir les opérations existantes et iii) permette à la RDC de bénéficier du développement dans des parties de son territoire jusqu’ici inexplorées. Les améliorations de la gouvernance, de la stabilité, de la prévisibilité et des infrastructures énergétiques et de transport sont des éléments clés pour soutenir cette transition en diversifiant l’économie dans des grappes et le long des corridors économiques afin de promouvoir une croissance durable, inclusive et à long terme. L'attention portée aux problèmes socio-économiques et environnementaux causés par l'exploitation minière artisanale non réglementée devra être accrue. L’impact de l’exploitation minière artisanale et à petite échelle est lié à la pauvreté, au manque de développement rural et aux faibles niveaux de contrôle 8 et de gestion de l’État. La note de risque globale du pays est affectée par ces facteurs, et l’investissement dans le développement de minerais essentiels à travers un secteur minier à grande échelle pourrait être compromis si ces défis ne sont pas relevés. Dans l’ensemble, les changements climatiques et la transition énergétique offrent Perspectives diverses perspectives pour la RDC : ● Fournir une offre supplémentaire de minéraux pour la transition énergétique nécessaire pour atténuer le changement climatique ● Diversifier les chaînes d’approvisionnement mondiales grâce à la valeur ajoutée locale ● Contribuer à deux biens publics mondiaux et créer un bien public national ● Fournir des intrants à faible teneur en carbone aux chaînes d’approvisionnement mondiales en technologies d’énergie renouvelable ● Réaliser des investissements pour la transformation dans les infrastructures de transport ● Faire de l’infrastructure énergétique un catalyseur essentiel pour le secteur minier de la RDC et la valeur ajoutée au-delà de l’exploitation minière, car des investissements importants peuvent contribuer à réduire la pauvreté énergétique en RDC, s’ils sont réalisés correctement ● Tirer parti de la croissance du secteur et du soutien à la création de valeur ajoutée pour améliorer la formation du capital humain, en particulier les compétences. Défis Les principaux défis que la RDC doit relever en saisissant les perspectives offertes par la transition énergétique sont les suivants : ● Les opportunités identifiées ci-dessus concernent les infrastructures (transport et énergie) et les compétences, sont aussi porteuses de défis pour la RDC. ● Le cobalt, la matière première la plus à risque dans la chaîne d'approvisionnement des batteries, et la volatilité des prix et la concentration des ressources en RDC sont les seules raisons pour lesquelles les chercheurs s’efforcent de l'éliminer de la chaîne de valeur des batteries. ● L’accès à un financement compétitif, qui reste une contrainte non seulement pour le développement de la chaîne de valeur, mais aussi pour tous les investissements nationaux en RDC. Recommandations La RDC pourrait bénéficier grandement de la transition énergétique si on l’aide à saisir cette occasion. En réponse, un programme en six points pour l’exploitation minière et la création de valeur ajoutée en RDC est proposé pour aider le pays à saisir cette opportunité. Au-delà de la génération de devises, de recettes fiscales, d’achats locaux, de valeur ajoutée et d’emplois, l’augmentation de la demande en minerais essentiels accroît considérablement les bénéfices potentiels du secteur. En outre, investir dans la capacité de la RDC à saisir les possibilités offertes par la chaîne de valeur des minéraux s’aligne sur 9 l’Accord de Paris, en soutenant le programme mondial de décarbonisation tout en tirant parti d’une belle perspective de développement. Grâce à son échelle et à ses multiples agences de développement, le Groupe de la Banque mondiale est particulièrement bien placé pour soutenir le programme en six points suivant pour l’exploitation minière et la création de valeur en RDC : 1. Augmenter les capacités de réponse de la RDC en matière d’approvisionnement en soutenant les investissements miniers. 2. Débloquer des possibilités de développement transformationnel à long terme grâce à des investissements stratégiques dans des infrastructures de transport axées sur les ressources minérales. 3. Soutenir les investissements dans les énergies renouvelables pour décarboniser les chaînes de valeur minières, atteindre les contributions déterminées au niveau national de la RDC et réduire la pauvreté énergétique en milieu rural. 4. Soutenir la création de valeur ajoutée au-delà de l’exploitation minière afin de capturer plus de valeur pour la RDC (et l’Afrique) et de diversifier l’économie et les chaînes de valeur mondiales en faveur des minéraux de la transition énergétique. 5. Investir dans la formation du capital humain pour permettre à la population de la RDC de concrétiser les perspectives de revenus offertes par le secteur en plein essor, sa chaîne de valeur en aval et la diversification économique. 6. Renforcer la gouvernance, les communautés affectées par l’exploitation minière et la gestion de l’environnement pour s’assurer que le développement de l’exploitation minière et des métaux profite à la RDC et à ses citoyens dans un contexte de durabilité. On trouvera ci-dessous un tableau classant les six recommandations ci-dessus par ordre de priorité en fonction de la rapidité potentielle de leur mise en œuvre et de leur impact sur le développement : 10 L'adoption de cet agenda en six points peut apporter de multiples avantages à la RDC. Certains de ces avantages affecteront la RDC elle-même, tels que la mobilisation des recettes nationales et les avantages macroéconomiques, les possibilités d’emploi de qualité et la diversification économique, tandis que d’autres affecteront la communauté internationale, car ils génèrent des biens publics mondiaux tels qu e l’amélioration de la capacité mondiale à atténuer les changements climatiques, l’amélioration de la résilience des minéraux de la transition énergétique, la réduction de l’intensité des émissions dans les chaînes de valeur et l’amélioration de l’intégration dans l’économie mondiale. Recommandations spécifiques pour favoriser la création de valeur ajoutée dans les chaînes de valeur du cuivre et du cobalt Le cobalt et le cuivre sont des composants essentiels de la chaîne de valeur de la transition énergétique et ont établi la production minière en RDC. Tandis que l’expansion des chaînes de valeur de ces industries devrait être une priorité absolue pour la création d’emplois et les exportations, la valeur ajoutée ne contribuera que très peu en termes de recettes fiscales supplémentaires. Deux domaines d’intérêt particulier sont la fabrication de fils de cuivre et le traitement des minéraux précurseurs pour les batteries de véhicules électriques. La première option de valeur ajoutée pour la RDC consisterait à développer la fabrication de produits à base de cuivre dans la région de l’ex-Katanga, en mettant l’accent sur la transformation de la région en un pôle de fabrication avec une concentration locale d’industries similaires ou complémentaires. Par rapport à la fonte et au raffinage, la fabrication de produits à base de cuivre nécessite moins d’énergie. De plus, comme le démontrent les opérateurs existants, la fabrication est déjà économiquement et techniquement faisable en RDC. Les possibilités dans la chaîne de valeur du cuivre vont de la production de produits électriques, à partir de fils, de câbles et d’autres semi-conducteurs en cuivre, jusqu’à des produits tels que les moteurs électriques, les transformateurs, les énergies renouvelables et, potentiellement, les feuilles de cuivre utilisées dans les cellules des batteries des véhicules électriques. La production de 500 millions USD de produits à base de cuivre par an se traduirait par 112 millions USD d’exportations supplémentaires et 1 300 à 2 000 emplois supplémentaires, mais seulement 9 millions USD de recettes annuelles imposables, car les marges sont faibles. En revanche, la chaîne de valeur des batteries pour véhicules électriques est beaucoup plus complexe et difficile à pénétrer, car elle nécessite des compétences hautement techniques tout au long de la chaîne de valeur, bien qu’elle ait le potentiel de quadrupler la valeur finale des minerais de batteries extraits en Afrique. Le développement de l’ensemble de la chaîne de valeur nécessitera une approche régionale dans laquelle chaque pays d’Afrique australe apporte sa contribution en termes de métaux et de capacités spécifiques afin d’entreprendre une fabrication complexe et d’attirer les investissements nécessaires. Pour la RDC, la production de précurseurs d’hydroxyde de cobalt est une étape limitée, mais nécessaire dans un parcours beaucoup plus long et complexe. Passer du développement des capacités de production de précurseurs au développement des capacités nécessaires à la fabrication de batteries représente un saut considérable. Cependant, la production de précurseurs est un premier pas très important dans la matérialisation de cette ambition, et bien qu’elle puisse contribuer à procurer un léger avantage en matière de coûts à court terme, elle ouvrira la voie à une production à plus long terme pour d’autres produits de la chaîne de valeur. Pour y parvenir, la RDC doit relever des défis spécifiques en matière de déficit de compétences, d’accès au financement et d’infrastructures telles que l’énergie et les transports. Pour combler le déficit de 11 compétences, une stratégie à plusieurs volets est nécessaire, qui comprendra : i) la facilitation de l’accès aux travailleurs étrangers qualifiés avec des exigences proportionnelles pour les programmes de transfert de compétences et les obligations et ii) le renforcement de la propre filière de compétences de la RDC, en commençant par les compétences STEM, avec un accent inclusif sur les femmes, les filles et les personnes handicapées afin de renforcer les capacités de compétences professionnelles, et enfin améliorer le pipeline de diplômés de qualité. Si ces défis sont relevés, la construction d'une usine de précurseurs de batteries en RDC pourrait être rentable. Cependant, les principales préoccupations seront le taux de rendement minimum ajusté requis ainsi que les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance associés à l’approvisionnement en minerais de cobalt. Si les risques économiques et politiques peuvent être atténués par des opérations saines et une assurance contre les risques, les risques environnementaux, sociaux et de gouvernance sont quant à eux plus difficiles à atténuer et constituent actuellement un élément dissuasif majeur non seulement pour les investissements en RDC, mais aussi une menace pour l’utilisation à long terme de la chimie du cobalt dans les batteries des véhicules électriques. En examinant les diverses perspectives, contraintes et études de cas nationales, plusieurs recommandations clés spécifiques émergent qui pourraient aider la RDC à obtenir une plus grande valeur ajoutée dans les chaînes de valeur du cuivre et du cobalt. Ces recommandations sont énumérées ci-dessous et détaillées avec des exemples de pays dans la section sur les recommandations à la fin du chapitre sur les cas pratiques. 1. Améliorer les infrastructures et la logistique : investir dans le développement des infrastructures, y compris les réseaux de transport, l’approvisionnement en électricité (en expl oitant les ressources vertes) et la logistique pour faciliter la circulation des matières premières et des produits finis (exemples de pays : Chine et Viêt Nam). 2. Accélérer le développement de la zone économique spéciale de Kinsevere consacrée au traitement et à la fabrication du cuivre et du cobalt : les zones spéciales devraient offrir des incitations telles que des allègements fiscaux, des réglementations simplifiées et l’accès à des services publics fiables afin d’attirer les investisseurs nationaux et étrangers. Lorsqu’il existe des lacunes en matière d’infrastructures, les décideurs politiques devraient dialoguer avec la communauté internationale en vue d’aligner les projets conçus pour soutenir les objectifs du gouvernement (exemples de pays : Chine, Éthiopie, Singapour, Mexique). 3. Encourager le transfert de technologies et la recherche et forger des partenariats public-privé : promouvoir le transfert de technologies en établissant des partenariats avec des entreprises ou des institutions internationales pour faciliter les échanges de connaissances et renforcer les capacités locales de traitement du cuivre et du cobalt, et investir dans la recherche et développement pour améliorer les techniques d’extraction, les processus d’affinage des métaux et la mise au point de produits pour des applications à plus forte valeur ajoutée. Le principal fabricant européen de batteries, Northvolt, a fait part à la Banque mondiale de son intérêt pour nouer des liens avec le Gouvernement de la RDC, et cela pourrait constituer un domaine de coopération avec le programme de développement des compétences discuté dans le paragraphe suivant. Collaborer avec les associations industrielles, les institutions de recherche et les États étrangers pour tirer parti de leur expertise, de leurs réseaux et de leurs possibilités de financement (exemples de pays : Corée du Sud, Inde). 4. Améliorer les compétences et le développement de la main-d’œuvre : investir dans des programmes de formation technique et professionnelle afin de constituer une main-d’œuvre qualifiée capable de faire fonctionner des machines de pointe, de gérer des processus de production et de mener des 12 recherches. Un bon moyen d’y parvenir sera de collaborer avec les établissements d’enseignement et les experts de l’industrie pour concevoir des programmes de formation qui répondent aux besoins des chaînes de valeur du cuivre et du cobalt (exemples de pays : Allemagne, Malaisie). 5. Soutenir l’accès au financement : faciliter l’accès au financement pour les petites et moyennes entreprises impliquées dans des activités de valorisation en établissant des fonds spécialisés, des subventions ou des programmes de prêts pour soutenir les entrepreneurs et les entreprises intéressés par l’établissement d’installations de production de fils et de feuilles de cuivre ou la fabrication de composants à base de cobalt pour les industries de véhicules électriques (exemples de pays : Malaisie, Brésil). 6. Renforcer les normes environnementales et sociales : se conformer aux normes internationales de durabilité renforcera la réputation de la RDC et attirera des investisseurs éthiques. L’opérationnalisation des plans nationaux pour la formalisation de l’extraction du cobalt ainsi que les programmes de traçabilité pourraient figurer parmi les activités relevant de cette recommandation (exemples de pays : Norvège, Costa Rica). 7. Promouvoir la transformation et la fabrication locales : en dehors de la loi sur les zones économiques spéciales, le gouvernement devrait encourager la transformation et la fabrication locales en offrant des incitations aux entreprises pour qu’elles établissent des installations de production en RDC. Ceci pourrait être réalisé en mettant en œuvre des politiques qui donnent la priorité aux achats nationaux de fils de cuivre, de feuilles et de composants à base de cobalt afin de promouvoir la valeur ajoutée et de créer des opportunités d’emploi pour la population locale (exemples de pays : Brésil, Thaïlande). 8. Soutenir le développement du marché intérieur et travailler au niveau régional : faciliter le développement du marché en promouvant activement les produits de cuivre et de cobalt à valeur ajoutée de la RDC, d’abord au niveau régional en participant à des foires commerciales internationales, et travailler en collaboration dans la région de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC) pour soutenir les ambitions d’autres pays en matière de valeur ajoutée. Tirer parti de l’évolution prochaine du secteur de la construction automobile en Afrique du Sud pour garantir la demande continentale pour les futurs produits à valeur ajoutée de la RDC dans la chaîne de valeur des batteries de véhicules électriques. Explorer les possibilités de partenariats stratégiques avec les fabricants de véhicules électriques et les producteurs de batteries (exemples de pays : Allemagne, Kenya). 9. Établir des réglementations et des politiques claires : élaborer des réglementations et des politiques claires et cohérentes qui soutiennent la création de valeur dans les chaînes de valeur du cuivre et du cobalt en fournissant un cadre transparent, complet et facile d’accès pour l’investissement et la croissance de l’industrie (avec des lignes directrices sur les licences, la fiscalité et les procédures d’exportation) afin de créer un environnement favorable aux investisseurs et de favoriser la stabilité à long terme dans le secteur. Il faudrait veiller à ce que tous les contrats à négocier soient standardisés afin d’éviter toute incertitude inutile et de permettre les investissements en RDC (exemples de pays : Royaume-Uni, Afrique du Sud). 13 Cas pratique 2 : chaîne de valeur du manioc Pour répondre aux préoccupations en matière de sécurité alimentaire et renforcer la résilience face aux chocs extérieurs, la RDC devrait promouvoir la diversification économique par le développement du secteur agro-industriel en se concentrant sur la transformation des produits agricoles prioritaires tels que la chaîne de valeur du manioc. Le développement des principales chaînes de valeur agricoles est une étape essentielle vers la diversification économique et la sécurité alimentaire et contribue de manière essentielle à un cadre macroéconomique durable et crédible à long terme1.. Malgré son énorme potentiel agricole inexploité, la République démocratique du Congo (RDC) est un importateur net de denrées alimentaires, ce qui accroît sa vulnérabilité aux chocs externes et climatiques. La RDC importe 80 % de ses denrées alimentaires2, y compris des produits de base tels que l’huile de palme, qu’elle produisait de manière compétitive jusqu’aux années 20003. Avec un panier d’exportation étroit, le Gouvernement de la RDC devrait exploiter le fort potentiel de l’agro-industrie afin de contenir son déséquilibre commercial en devenant plus sûr sur le plan alimentaire et en jetant les bases pour s’attaquer aux exportations de cultures et d’horticulture, de bétail et de pêche vers les marchés de l’Afrique subsaharie nne et de l’Europe. Cet immense potentiel repose sur : i) une estimation de 51 millions d’hectares de terres cultivables inexploitées ; ii) une insécurité alimentaire accrue, qui touche environ un quart de la population au premier semestre 20234 ; iii) des conditions climatiques et écologiques favorables à divers aménagements agricoles et iv) un marché régional important et en plein essor de plus de 200 millions d’habitants, qui sont jeunes et s’urbanisent rapidement5.. Afin de réduire les importations de blé et de devenir plus autosuffisant, le gouvernement de la RDC cherche à produire des produits de substitution pour améliorer durablement sa sécurité alimentaire. Le renforcement de la balance commerciale est un mécanisme important pour stimuler la croissance et la diversification économiques et réduire la pauvreté, comme le souligne le rapport de la Banque mondiale sur le rôle du commerce dans l’éradication de la pauvreté6. Tandis que la RDC se concentre sur son programme de diversification, elle a le potentiel de jouer un rôle important dans la chaîne de valeur mondiale du manioc du point de vue de la production et de la transformation. Exploiter cette possibilité en améliorant l’environnement favorable au développement du secteur privé, en attirant plus rapidement les investissements étrangers, en réduisant les coûts administratifs et en améliorant la productivité peut se traduire par une augmentation des recettes fiscales pour l’État, une amélioration de la rentabilité des entreprises et une croissance plus durable pour le secteur, ainsi qu’une amélioration des opportunités 1 Marivoet, Wim, Ulimwengu, John M., et El Vilaly, Mohamed Abd Salam. 2018. « Comprendre le paradoxe agricole de la République démocratique du Congo sur la base de la plateforme de données eAtlas ». Addis-Abeba : Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI). http://ebrary.ifpri.org/cdm/singleitem/collection/p15738coll2/id/132259. 2 https://www.trade.gov/country-commercial-guides/republic-congo-agricultural-sector 3 https://globalpressjournal.com/africa/democratic-republic-of-congo/drc-palm-oil-prices-skyrocket-demand-outpaces- production 4 https://www.wfp.org/countries/democratic-republic-congo 5 Diagnostic du secteur privé du pays (CPSD) (2022) https://www.ifc.org/wps/wcm/connect/publications_ext_content/ifc_external_publication_site/publications_listing_page/cpsd- democratic-republic-of-congo 6 https://www.worldbank.org/en/topic/trade/publication/the-role-of-trade-in-ending-poverty 14 d’emploi pour les MPME et les travailleurs ruraux. Ceci est d’autant plus déterminant pour un pays dans lequel environ 62 % de la population continue à vivre dans la pauvreté et un Congolais sur six continue à vivre dans l’extrême pauvreté malgré le fait qu’il abrite l’une des populations les plus jeunes du monde 7. La chaîne de valeur du manioc offre des possibilités inexploitées pour que la RDC dépende moins des exportations de céréales et devienne une chaîne de valeur agricole prioritaire aux côtés du maïs et de la pêche. En 2021, le pays s’est classé au deuxième rang mondial des producteurs de manioc, après le Nigeria, avec 45,67 millions de tonnes de manioc frais et un taux de croissance annuel composé de 3,91 %8. Cette culture importante est de plus en plus indispensable pour assurer la sécurité alimentaire, réduire la pauvreté, créer des emplois, s’adapter au changement climatique et équilibrer les échanges commerciaux. Compte tenu de la volatilité de l’économie mondiale, l’État devrait prendre des mesures proactives pour développer la chaîne de valeur du manioc afin de faire face à la croissance rapide de la population et à la détérioration chronique des conditions de vie, qui ont abouti à une estimation de 26,4 millions de personnes confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, 5,7 millions de personnes déplacées à l’intérieur du pays et 2,8 millions d’enfants souffrant de malnutrition aiguë au cours du premier semestre de 20239. En fait, l’impact de la guerre en Ukraine a accéléré les efforts du pays visant à réduire les importations de blé, à devenir plus autosuffisant et, par conséquent, à promouvoir davantage le développement de l’agro-industrie telle que la chaîne de valeur du manioc. L’accélération du développement d’une industrie autour du manioc, une culture résistante au climat, soutiendra les efforts nationaux de la RDC pour améliorer à la fois l’adaptation aux changements climatiques et son atténuation. La RDC est classée 178e sur 182 pays dans l’indice mondial d’adaptation de Notre Dame pour 202010, ce qui souligne sa grande vulnérabilité au changement climatique. En outre, plusieurs études, telles que la publication de 2021 du Fonds international de développement agricole (FIDA) des Nations Unies (11), affirment que les changements climatiques devraient réduire les rendements céréaliers de 30 à 80 % dans la région subsaharienne au cours des prochaines décennies si les températures continuent d’augmenter. En développant cette valeur prioritaire et en i ncorporant des méthodes et des technologies agricoles intelligentes sur le plan climatique, selon la FAOSTAT, les rendements du manioc peuvent être améliorés de deux à quatre fois par rapport à un rendement de 8,15 t/ha en 2021. Malgré la résistance du manioc au climat, le manioc frais se gâte dans les 48 à 72 heures suivant la récolte, avec plus de 50 % de la récolte annuelle mondiale perdue en moyenne. Par conséquent, la plupart des agriculteurs, principalement des petites exploitations féminines, vivent avec moins d’un dollar par jour et par habitant. Une fois transformés, les produits dérivés tels que le foufou ont une durée de conservation de 18 mois. L’augmentation des rendements et la réduction des pertes post-récolte peuvent se traduire par des revenus 2 à 4 fois supérieurs pour ces petits exploitants. Si la sécurité alimentaire est assurée sur l’ensemble de son territoire, la RDC peut tirer parti de sa position stratégique au centre du continent africain et de ses frontières avec neuf pays pour commencer à orienter une plus grande partie de sa production agricole, y compris le manioc, vers une industrie orientée vers l’exportation. Avec l’augmentation de la demande dans les pays occidentaux, où le manioc est en train de 7 https://www.worldbank.org/en/country/drc/overview 8 FAO Stat. 2021. https://www.fao.org/faostat/en/#data/QCL 9 https://www.wfp.org/countries/democratic-republic-congo 10 L'indice pays ND-GAIN résume la vulnérabilité d'un pays au changement climatique et sa capacité à améliorer sa résilience. 11 https://www.ifad.org/en/web/latest/-/ifad-report-predicts-steep-drop-in-african-staple-crops-by-2050%C2%A0prompting- urgent-call-for-adaptation-funding-at-cop26 15 devenir un ingrédient alimentaire courant, il existe une possibilité croissante de cibler les ports stratégiques des Pays-Bas et de la Belgique qui servent de centres de distribution majeurs pour la plus grande partie du continent. À travers les chaînes de valeur agroalimentaires prioritaires et plus spécifiquement celle du manioc, une stratégie nationale de développement en partenariat avec le secteur privé doit être associée à une coordination et un engagement forts aux niveaux national, régional et local afin de relever efficacement les principaux défis et contraintes qui empêchent la RDC, deuxième producteur mondial de manioc, d’atteindre la sécurité alimentaire pour ses citoyens et éventuellement de s’attaquer aux marchés d’exportation. Les défis structurels, en particulier l’accès à des infrastructures fiables (électricité, transport routier et réseaux de télécommunications) et les contraintes liées à l’environnement commercial des micro, petites et moyennes entreprises (MPME) affectent négativement l’accélération de la croissance nécessaire pour atteindre la sécurité alimentaire nationale, améliorer les moyens de subsistance et l’inclusion sociale, construire une industrie orientée vers l’exportation et faire face aux effets du changement climatique. L’établissement de partenariats a vec le secteur privé est une étape cruciale étant donné que les MPME emploient 88,6 % de la population active12.. En outre, les plans d’action doivent être bien adaptés aux entreprises de différentes tailles, des petits exploitants aux entreprises commerciales, afin de créer une accélération durable de la croissance, avec un triple bénéfice pour le secteur public, le secteur privé et l’environnement. Les récents entretiens structurés sur les chaînes de valeur agricoles du Groupe de la Banque mondiale entrepris pour l’analyse du Mémorandum économique -pays13 ont confirmé certains des principaux défis discutés dans le rapport et associés au développement d’une culture stratégique telle que le manioc. Il s’agit notamment de la fiscalité (charges fiscales et par afiscales), des principaux coûts de gestion administrative, de l’accès à la terre, de l’infrastructure et de la logistique, de l’accès au financement, de l’entrepreneuriat féminin et des changements climatiques (entre autres contraintes) : ● En ce qui concerne la fiscalité, le fardeau pèse de manière disproportionnée sur le secteur privé, qui se plaint unanimement de la pression fiscale. Environ 52 paiements sont exigés des entreprises par an, contre une moyenne de 37,4 en Afrique subsaharienne, et le taux d’imposition total est de 54,6 % des bénéfices, contre 46,8 % dans le reste de l’Afrique et 39,8 % dans les pays de l’OCDE. Cette situation engendre des complexités de gestion administrative qui se traduisent par des coûts supplémentaires de 20 à 35 % pour la comptabilité et les frais juridiques afin de rester en phase avec les formulaires et les frais administratifs. ● En ce qui concerne l’accès à la terre, tous les participants interrogés ont convenu que les principaux obstacles à l’accès à la terre comprenaient : i) le coût élevé de l’achat de terres ; ii) la sécurité de la propriété foncière ; iii) la fréquence des conflits fonciers, qui peuvent affecter la sécurité de la propriété foncière et iv) les défis en matière d’infrastructure associée au développement des terres agricoles. ● En ce qui concerne les contraintes d’infrastructure, l’électrification, l’irrigation, les conditions de transport routier après la récolte et la logistique restent des obstacles majeurs pour dépasser l’agriculture de subsistance. 12 Groupe de la Banque mondiale. 2022. Cadre de partenariat pays pour la République démocratique du Congo pour la période 22-26. Washington, DC. 13 En collaboration avec la Société financière internationale (SFI). 16 ● En ce qui concerne l’accès au financement, seuls 30 % des agriculteurs commerciaux et des transformateurs avaient un prêt en cours. Trente autres pour cent ont déclaré qu’ils ne pouvaient pas contracter de prêt bancaire, que ce soit auprès d’une banque traditionnelle ou d’une institution de microfinance, ce qui représente un défi pour la majorité des MPME. ● En ce qui concerne les défis spécifiques au genre , les principales contraintes qui limitent la création d’entreprises par les femmes sont : i) l’accès limité aux ressources financières ; ii) le manque d’autonomie de décision par rapport aux hommes ; iii) le manque de formation à l’entrepreneuriat ; iv) la peur du harcèlement sexuel et v) l’accès difficile au financement. ● Enfin, pour atténuer les effets du changement climatique et ses répercussions sur la productivité et la rentabilité, les agriculteurs, en particulier les petits exploitants, ont tendance à s’adapter en privilégiant des solutions à court terme qui ne leur permettent pas toujours d’obtenir des résultats durables en matière de rotation des cultures, de lutte contre les épidémies, de fertilité des sols, de gestion de l’eau, de prévention des inondations et de prévisions météorologiques. Le tableau ci-dessous résume les recommandations de politiques au fil du temps. Recommandations de politiques prioritaires Résultats immédiats Définir un environnement favorable aux entreprises afin d’accélérer les investissements privés dans les chaînes de valeur prioritaires Réduire la charge fiscale et rationaliser les procédures administratives afin de promouvoir l’accès à la terre et le développement du marché privé et, partant, la croissance durable des MPME dans les chaînes de valeur prioritaires Améliorer l’accès à un financement adapté aux MPME, des petits exploitants aux agrégateurs en passant par les producteurs commerciaux Renforcer la capacité du soutien à l’entrepreneuriat existant et adapter les programmes d’entrepreneuriat aux groupes vulnérables, y compris les femmes et les jeunes Priorité élevée Accélérer la modernisation des infrastructures et la transformation numérique du pays, y compris celle des chaînes de valeur agricoles prioritaires Développer les zones économiques spécialisées et en faciliter l’accès afin d’attirer davantage d’investissements étrangers Catalyser les possibilités de développement du marché pour promouvoir l’intégration régionale à l’intérieur et à l’extérieur du pays Développer les programmes d’adaptation aux changements climatiques 17 CHAPITRE 1 DIVERSIFICATION ECONOMIQUE : L’HISTORIQUE MACROECONOMIQUE DES MOTEURS DE CROISSANCE ACTUELS ET FUTURS La ville minière de Kolwezi, capitale de la province du Lualaba au sud-est de la République démocratique du Congo (RDC). Octobre 2022. Par EdwinAlden. 1995. Sous une licence Creative Commons 18 Chapitre 1 - Diversification économique : l’historique macroéconomique des moteurs de croissance actuels et futurs 1.1. Contexte du pays 1. Bien que richement dotée en ressources naturelles et humaines, la République démocratique du Congo (RDC) a eu des difficultés à atteindre son plein potentiel économique, notamment en raison des niveaux élevés et persistants de vulnérabilité et de fragilité. Des décennies de conflit, de mauvaise gouvernance, de faiblesse des institutions budgétaires, de mauvaise gestion des ressources naturelles, de conflit et de violence prolongés ont freiné les progrès dans le développement du capital humain et physique, entraînant une sous-performance économique et des niveaux élevés de pauvreté. L’économie de la RDC reste très dépendante de l’extraction minière, et donc vulnérable aux fluctuations des prix des matières premières et aux performances de croissance de ses principaux partenaires commerciaux, qui pourraient être perturbés par des conflits géopolitiques et la résurgence de pandémies. En outre, malgré son énorme potentiel agricole inexploité, la RDC est un importateur net de denrées alimentaires, ce qui accroît encore sa vulnérabilité aux chocs externes et climatiques et exacerbe son insécurité alimentaire. Les contraintes structurelles ont favorisé une vaste économie informelle et entravé le développement du secteur privé et sa capacité de fournir les biens et services dont l’économie a besoin. 2. De récents efforts notables visant à stabiliser l’économie et à stimuler la croissance économique ont été entrepris avec une transformation structurelle limitée, n’entraînant que peu ou pas de réduction de la pauvreté au niveau national et dans les zones rurales, en particulier. Des années d’expansion de l’activité économique, avec un taux de croissance annuel moyen du PIB de 5,6 % au cours des deux dernières décennies, n’ont entraîné qu’une baisse modeste du taux de pauvreté, passant de 69,3 % en 2005 à 64 % en 2012. Malgré une nouvelle baisse (4,3 points de pourcentage) entre 2012 et 2018, la pauvreté est généralisée et les inégalités sont relativement élevées. Cette situation est en partie exacerbée par une forte croissance démographique – le nombre de personnes pauvres ayant augmenté de 6 millions, atteignant près de 60 millions en 2022, selon les estimations – et par d’importantes disparités régionales, qui placent la RDC au deuxième rang des pays d’Afrique subsaharienne comptant le plus grand nombre de personnes extrêmement pauvres. Les résultats de la lutte contre la faim et le retard de croissance sont très médiocres en RDC, surtout dans les zones rurales. Tous ces facteurs entravent l’accumulation de capital humain, pourtant nécessaire et hautement bénéfique pour la transformation structurelle. 3. À l’avenir, la voie vers la diversification économique par le biais d’une transformation structurelle ne pourra être tracée qu’en réduisant les contraintes, en promouvant des incitations, en permettant l’innovation du secteur privé et en mettant les ressources à la disposition de l’activité économique. D’importants obstacles à la croissance et à la compétitivité persistent, entravant la réalisation de cette transformation économique en RDC. Il est nécessaire d’améliorer l’environnement des affaires et de combler les lacunes en matière d’infrastructures (y compris de connectivité) et de capital humain pour parvenir à la diversification économique et réduire la dépendance à l’égard des produits de base. Le gouvernement de la RDC ne peut à lui seul relever les défis macro et microéconomiques. L’implication des partenaires extérieurs publics et privés est requise pour placer le pays sur la voie d’une 19 croissance forte et durable. L’environnement des affaires et la correction des défaillances du marché sont des défis de plus en plus importants pour le développement du secteur privé. Le diagnostic systématique pays (DSP, 2017) a énuméré des contraintes telles que la gouvernance et les institutions, l’accès au financement, la mauvaise qualité et le coût élevé des intrants, le manque d’infrastructures et la concurrence déloyale. 4. Les autorités de la RDC sont fortement engagées dans le renforcement de la résilience économique et révisent actuellement le Plan national stratégique de développement (PNSD) pour tenir compte de l’impact des chocs externes sur l’économie. Suite à l’impact ressenti de la pandémie de COVID-19 et de la guerre en Ukraine sur l’économie de la RDC, le gouvernement a lancé le processus de révision et d’extension du PNSD actuel (PNSD, 2019-2023) et d’initiation d’un nouveau cycle de planification stratégique et programmatique pour la période 2023-2027. L’objectif est de couvrir un large éventail de domaines de développement et de relever les défis spécifiques à la RDC. Le PNSD révisé cherchera également à s’appuyer sur les atouts et les ressources naturelles du pays, tels que ses ressources minérales, ses paysages, son écologie et ses espaces verts, tout en intégrant et en encourageant un mode de vie plus durable et plus respectueux de l’environnement. Les conclusions et les recommandations du présent Mémorandum économique-pays devraient contribuer à documenter le PNSD révisé. 5. L’objectif de ce chapitre est d’analyser les performances de croissance de la RDC et sa capacité à favoriser une croissance inclusive, et d’identifier les contraintes à la diversification économique et à la spécialisation dans les secteurs clés pour favoriser une croissance inclusive. L’analyse tiendra compte des enseignements tirés du développement économique de la RDC au cours des dernières décennies, ainsi que des enseignements tirés d’autres pays pairs structurels et ambitieux. Ce chapitre comprendra une analyse sur : (i) la croissance potentielle du PIB, les moteurs et les modèles de croissance, et (ii) les contraintes qui limitent la création et l’expansion des entreprises. 1.2. Tendances et moteurs de la croissance actuelle en RDC 6. Au cours des deux dernières décennies, l’économie de la RDC a connu une croissance remarquable, associée à un retour significatif à la stabilité macroéconomique. Depuis 2002, l’économie de la RDC a connu sa plus longue expansion continue, après que le pays ait souffert de l’impact de deux grandes guerres dans les années 1990 et au début des années 2000. Les politiques non durables de nationalisation (appelée zaïrianisation) et de radicalisation, adoptées dans les années 1990, ont eu des effets désastreux sur l’économie en raison de la faible production agricole, de l’hyperinflation, du chômage et des pénuries de produits de base, entraînant une contraction de 5,3 % du PIB entre 1990 et 2001 et la perte de millions de vies humaines. La fin de la guerre en 2002 a coïncidé avec le redressement des cours miniers sur les marchés internationaux, favorisant une augmentation de la croissance du PIB réel qui s’est accélérée à un taux annuel moyen de 5,6 % par an entre 2002 et 2021 (figure 1.1), offrant des opportunités pour l’augmentation des investissements publics et privés et la mise en œuvre de politiques macroéconomiques saines. L’économie de la RDC a maintenu cette forte dynamique de croissance et a fait preuve d’une plus grande résistance aux chocs extérieurs, principalement grâce aux performances du secteur minier. En fait, après un ralentissement à 1,7 % en 2020 en raison des effets néfastes de la COVID-19, la croissance s’est accélérée à 8,9 % en 2022 (après une reprise d’environ 6,2 % en 2021) grâce à la forte expansion de la production minière. 20 7. Au cours de la dernière décennie, la croissance a été principalement tirée par l’expansion de la production dans l’industrie extractive, mais elle s’est également étendue aux secteurs de la construction et des services. Au cours de la période 2012-2021, les activités extractives ont augmenté de 8,9 % par an grâce à l’augmentation du prix des principales matières premières exportées par la RDC. La production de cobalt est passée de 3 570 tonnes en 2001 à 93 011 tonnes en 2021, tandis que la production de cuivre a été multipliée par 50, passant de 30 821 tonnes en 2001 à environ 1 800 000 tonnes en 2021. Le cobalt et le cuivre représentant environ 80 % des exportations de la RDC sur la période 2012-2021, la contribution globale du secteur extractif à la croissance représente plus de 40 % du total (figure 1.1). En outre, la croissance du PIB dans le secteur non extractif s’est également accélérée de 4,5 % par an en moyenne entre 2012 et 2021, tirée en partie par les secteurs de la construction et des services. Le secteur de la construction a été stimulé par les efforts du gouvernement visant à relever les défis liés à l’insuffisance des infrastructures (routes, énergie et transports). Un examen plus approfondi des secteurs des services montre une expansion significative du secteur des télécommunications depuis sa libéralisation en 2002, tandis que le secteur du commerce a bénéficié de la stabilité macroéconomique et de l’amélioration de l’environnement commercial et réglementaire. Employant plus de 70 % de la population active totale, le secteur agricole a connu une croissance de 3 % par an depuis 2002, démontrant sa productivité limitée. Il s’agit essentiellement d’une agriculture de subsistance, qui approvisionne les marchés locaux et se heurte toujours à des problèmes de sécurité et de connectivité dans les zones rurales. Figure 1.1. Croissance du PIB réel et contributions à la croissance du PIB réel (%) 10 %, points de pourcentage 9.0 8.9 8.5 8 6.9 7.1 6.9 6.2 5.8 6 4.4 3.7 4 2.4 1.7 2 0 -2 -4 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022e Industrie extractive Industrie non extractive Agriculture Services Croissance ASS PIB Sources : Autorités statistiques de la RDC, Banque mondiale 8. En outre, des politiques macroéconomiques saines ont soutenu la stabilité macroéconomique et la demande globale. L’engagement du gouvernement à rétablir la stabilité macroéconomique et à 21 libéraliser l’économie au début des années 2000 a permis de briser le cercle vicieux de l’hyperinflation des années 1990 et de jeter les bases d’une reprise de la croissance économique. L’une des actions importantes entreprises en ce sens a consisté à mettre fin à la monétisation du déficit budgétaire, limitant ainsi la forte influence des finances publiques sur la politique monétaire. Grâce à la politique de gestion sur base-caisse, le taux d’inflation est passé de plus de 500 % en 2000 à 135 % en 2001, avant d’être contenu à environ 14,1 % au cours de la période 2002-2022. Récemment, l’inflation s’est accélérée, de 5,3 % en 2021 à 13,1 % à la fin de 2022 (avec une moyenne de 9,2 % en 2022), en raison de la hausse des prix des denrées alimentaires et du pétrole importés, due à la guerre en Ukraine. La Banque centrale a opté pour une politique monétaire rigoureuse pour ancrer les anticipations d’inflation et contenir le taux de change à un niveau relativement stable. 9. La consommation et l’investissement privés et publics ont soutenu la tendance positive de la croissance. Des investissements expansionnistes, publics et privés, principalement dans les infrastructures publiques et le secteur minier, ont soutenu l’augmentation de la production. La consommation privée a tiré la croissance, soutenue par le fort ralentissement de l’inflation dans le contexte de la reprise de l’activité économique après la période de guerre, ainsi que par une demande accrue résultant de l’augmentation des dépenses publiques. Les exportations nettes de biens et de services n’ont contribué que marginalement à la croissance, car l’expansion des exportations minières a été compensée par une augmentation des importations, principalement en raison de la forte demande intérieure de denrées alimentaires et de biens d’équipement (y compris les services) et la hausse des prix des denrées alimentaires et de l’énergie importés (figure 1.2). Figure 1.2. Croissance du PIB réel et décomposition Source : Estimations des services de la Banque mondiale sur base des Indicateurs du développement dans le monde (WDI) 22 10. L’économie de la RDC a même figuré parmi les économies d’Afrique subsaharienne (ASS) ayant enregistré la croissance la plus rapide au cours de la dernière décennie. Avec une accélération de la croissance du PIB réel à un taux annuel moyen de 5,8 % depuis 2002 contre une contraction de 4,9 % entre 1992 et 2001, l’économie de la RDC est l’une des économies d’ASS à la croissance la plus rapide, dépassant de 3,3 points de pourcentage la moyenne de l’ASS. La croissance de la RDC a été estimée à 6,2 % en 2021, dépassant la moyenne de 5,1 % des pays riches en ressources minérales et métalliques tels que le Botswana, la Zambie, l’Afrique du Sud, la Mauritanie, le Liberia, le Niger, etc. Seuls des pays comme l’Éthiopie, la Côte d’Ivoire, le Rwanda, la Guinée, le Ghana et la Tanzanie ont vu leur taux de croissance annuel moyen dépasser celui de la RDC au cours de la dernière décennie. Figure 1.3. RDC : Principales tendances de croissance et chiffres de la pauvreté a. Croissance du PIB par habitant (%) : RDC vs ASS b. Croissance du PIB réel à long terme (%) Croissance du PIB par habitant (% annuel) 10.0 Croissance du PIB (%) 6.0 5.0 8.0 4.0 3.0 6.0 2.0 1.0 4.0 0.0 -1.0 -2.0 2.0 -3.0 ASS RDC -4.0 0.0 -5.0 -6.0 2001 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021 -2.0 2001 2002 2003 2004 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 Source : Indicateurs du développement dans le monde Source : Indicateurs du développement dans le monde c. Croissance du PIB par habitant (%) : RDC vs ASS d. Croissance du PIB réel (%) : RDC vs ASS Source : Indicateurs du développement dans le monde Source : Perspectives macroéconomiques sur la pauvreté (MPO) de la Banque mondiale 11. Malgré cette reprise de la croissance, la RDC a affiché un rythme de rattrapage inférieur à celui des pays pairs (figures 1.3c – 1.3d). Bien que la RDC soit l’un des pays ASS à la croissance la plus rapide, son économie n’a pas encore récupéré les pertes profondes subies au cours des décennies précédentes. La figure 1.3d montre la forte augmentation du PIB par habitant depuis 2012, en la comparant à ses performances historiques et à celles de pays pairs. Bien que la croissance de la RDC soit plus élevée que la moyenne de ses pairs, son indice de PIB réel reste le plus bas, reflétant la nécessité pour la RDC de faire face à une phase de rattrapage plus rapide de sa croissance. Selon le Diagnostic systématique pays (DSP), 23 la forte croissance enregistrée ces dernières années en RDC a résulté d’une convergence vers les revenus moyens de l’économie mondiale (effet de rattrapage) plutôt que d’une trajectoire de croissance dynamique qui aurait pu conduire à une réduction substantielle de la pauvreté. L’effet de rattrapage résulte de la combinaison d’un super cycle des prix des matières premières, de la mise en œuvre de politiques économiques saines et de réformes structurelles, et d’une aide étrangère massive. Figure 1.4. PIB réel, PIB réel par habitant et tendances de la croissance a. RDC : Croissance du PIB (en % - droite) et PIB (gauche- USD b. RDC : Croissance du PIB par habitant (en % - droite) et PIB constants 2015, milliards) par habitant (gauche – USD constants 2015) Source : Indicateurs du développement dans le monde Source : Indicateurs du développement dans le monde c. Indice du PIB par pays (1990 = 100), RDC et pairs d. Indice du PIB par pays (1990 = 100), RDC et pairs structurels, 1990-2021 ambitieux, 1990-2021 Source : Indicateurs du développement dans le monde Source : Indicateurs du développement dans le monde 12. La RDC a réalisé peu de progrès pour ramener son PIB par habitant à son niveau de 1960, avec une performance moins impressionnante que celle de ses pairs . Les figures 1a et 1b montrent un retour à la croissance en RDC depuis 2002, conduisant à une croissance positive par habitant d’environ 2,4 % par an en moyenne sur la période 2002-2021 (contre -8,2 % en 1990-2001). Cependant, la forte croissance démographique a empêché la poursuite de cette dynamique de croissance, insuffisante pour relever les défis du développement. Après avoir diminué d’environ 3,1 % par an en moyenne en 41 ans, passant de 1 255 USD (en USD constants de 2015) en 1960 à 323 USD en 2001, le PIB par habitant a augmenté de manière significative pour atteindre 501 USD en 2021. Toutefois, cela ne représente encore que 40 % du niveau de 1960. Au rythme actuel de la croissance du PIB par habitant (environ 2,2 % en moyenne entre 2002 et 2021), il faudra 43 ans à la RDC pour atteindre son niveau de 1960. Cela contraste fortement avec la plupart des pairs structurels et ambitieux qui ont maintenu une tendance positive (à l’exception de 24 Madagascar). Plus précisément, sur la période 2011-2021, le PIB réel par habitant de la RDC était inférieur de 40 % à celui de ses pairs structurels (Madagascar, Mozambique, Ouganda et Zambie) et de 80 % à celui de ses pairs ambitieux (Bolivie, Cameroun, Kenya, Indonésie et Nigeria). Figure 1.5. RDC vs pairs : PIB par habitant en USD (2002 vs 2021) a. PIB par habitant (2002 vs 2021) : RDC vs pairs structurels b. PIB par habitant (2002 vs 2021) : RDC vs pairs ambitieux Source : Indicateurs du développement dans le monde Source : Indicateurs du développement dans le monde c. Indice du PIB par habitant par pays (1990 = 100), RDC et d. Indice du PIB par habitant par pays (1990 = 100), RDC et pairs pairs structurels, 1990-2021 ambitieux, 1990-2021 Source : Indicateurs du développement dans le monde Source : Indicateurs du développement dans le monde 13. L’économie de la RDC reste confrontée à des niveaux élevés d’informalité. On estime qu’environ 60 % des opérateurs sont informels. Selon le recensement des entreprises de 2019, 98 % d’entre elles sont informelles. Les niveaux élevés d’informalité affectent le recouvrement des impôts, la sécurité des travailleurs et le potentiel de l’économie à s’engager dans des investissements à long terme. Avec des possibilités limitées d’emploi salarié formel, des niveaux élevés d’insécurité et des investissements publics négligeables, les ménages de la RDC dépendent d’autres groupes sociaux pour assurer leurs revenus et leurs moyens de subsistance, notamment les familles et d’autres réseaux, y compris les envois de fonds de la diaspora. 1.3. Pourquoi la diversification économique est-elle importante pour la RDC ? 14. Les niveaux de croissance de la RDC n’ont pas permis d’exploiter le plein potentiel des ressources du pays pour améliorer les conditions de vie. Deux décennies de performances économiques ne se sont pas traduites par une amélioration des conditions de vie de la majorité de la population, environ 60 millions de personnes vivant toujours dans la pauvreté en 2022. Malgré le potentiel économique considérable de la RDC, dont ses richesses en ressources naturelles et humaines, l’économie reste 25 concentrée dans quelques secteurs, notamment l’exploitation minière et l’exportation de minéraux bruts. Selon plusieurs rapports analytiques de la Banque mondiale, cela est dû à la faiblesse du taux de croissance, qui aurait pu favoriser une réduction substantielle de la pauvreté, mais aussi aux sources de croissance et à la gestion des ressources naturelles ; à l’existence de plusieurs contraintes réelles à une croissance durable et inclusive, et à une insuffisante capacité des politiques publiques à promouvoir une croissance inclusive et à remédier à la faible élasticité de la croissance par rapport à la pauvreté 14. Dans ce contexte, la diversification économique, et en particulier celle des exportations, est plus cruciale que jamais pour favoriser la création d’emplois, renforcer la résilience et maintenir les taux de croissance élevés nécessaires pour réduire considérablement la pauvreté et les inégalités (DSP, 2018). Figure 1.6 : (a) Zones minières et nombre d’entreprises (formelles et informelles), (b) nombre de sites miniers Source : a) Indice de ciblage des projets de l’Observatoire de la pauvreté et de l’inégalité en RDC, et b) IPIS15 15. Une plus grande diversification des partenaires commerciaux et des produits, y compris le long de la chaîne de valeur du secteur minier, est nécessaire pour renforcer la résilience et maintenir des taux de croissance élevés. Le niveau élevé des exportations (35 %) et la concentration des exportations par marché (40 % vers la Chine) et par produit (90 % pour le pétrole et les mines) exposent l’économie à la volatilité des prix des matières premières et aux fluctuations du PIB des partenaires commerciaux 16. Cette sensibilité aux chocs a été illustrée par les chutes importantes des prix des matières premières en 2009, 2016 et 2019, et plus récemment par les conflits géopolitiques et la pandémie mondiale de COVID- 19, qui ont également conduit aux ralentissements observés au cours des deux dernières décennies (figure 1.7). La volatilité des prix des matières premières nuit à la croissance et compromet la poursuite de la réduction de la pauvreté. En termes de diversification au sein du secteur minier, des interventions robustes seront nécessaires pour que l’économie de la RDC puisse bénéficier de la demande mondiale 14 Aterido, Alvaro Gonzalez, Dino Merotto, Carly Petracco et Javier Sanchez-Reaza, « Democratic Republic of Congo: Jobs Diagnostic », 2017, Banque mondiale, Washington, DC. Licence Creative Commons Attribution CC BY 3.0 IGO; et DSP RDC (2018). 15 https://ipisresearch.be/fr/home/cartes-donnees/ 16 Bou-Habib, Chadi et Ephraim Kebede, « Democratic Republic of Congo: Product and Market Concentration and the Vulnerability to Exogenous Shocks », 2016, Document de travail de recherche sur les politiques, n° 7700, Washington, DC : Banque mondiale. 26 croissante de minéraux stratégiques du pays. Un boom minier pourrait avoir des répercussions importantes sur l’emploi dans tous les domaines, en particulier dans les services, et créer des emplois pour les femmes. Comme indiqué lors de l’enquête auprès des entreprises de 2019, environ 28 % de la totalité des entreprises en RDC se trouvent dans les mêmes zones où il existe au moins un site minier. Dans ces mêmes zones, 13 % des entreprises sont actives dans l’agriculture, 20 % dans l’industrie et 28 % dans les services, tandis que 26 % sont actives dans d’autres segments. Ces zones emploient en outre 25 % de l’ensemble de la main-d’œuvre féminine. Figure 1.7. RDC : Dynamique de croissance dans le contexte des chocs Source : Services de la Banque mondiale 16. Une croissance plus diversifiée et plus riche en emplois est nécessaire pour accélérer la réduction de la pauvreté. La diversification pourrait être réalisée le long de la chaîne de valeur de l’exploitation minière, de l’agriculture, de l’industrie manufacturière, des services et du commerce en général, à condition que le pays améliore son climat d’investissement. Selon le diagnostic de l’emploi entrepris pour la RDC, l’agriculture commerciale peut potentiellement créer davantage d’emplois rémunérés ; et être également un stimulant pour les emplois dans les services hors agriculture (dans le transport, le stockage, l’emballage et le commerce) et pour les emplois dans l’agro-transformation. Avec plus de 60 % des emplois concentrés dans l’agriculture, les gains potentiels d’une augmentation du niveau de productivité agricole et d’une meilleure circulation des travailleurs sont importants. En outre, le gouvernement pourrait également envisager de cartographier les chaînes de valeur dans l’industrie manufacturière et l’agro-industrie qui ont le plus grand potentiel de création d’emplois, grâce à leurs liens avec l’étranger. 17. La diversification économique est également une étape essentielle dans l’engagement à long terme en faveur d’un cadre macroéconomique durable et crédible. Selon le DSP, pour promouvoir les objectifs de développement à long terme et accroître sa résilience, la RDC doit adopter et appliquer des 27 cadres juridiques, administratifs et institutionnels crédibles afin d’améliorer la mobilisation des recettes intérieures provenant du secteur des ressources naturelles, en vue d’éliminer les goulets d’étranglement en matière d’infrastructures et de renforcer le capital humain nécessaire à la diversification de l’économie. Une croissance solide et plus diversifiée offrira non seulement la possibilité de transformer le sous- développement actuel du pays en une trajectoire de croissance durable, mais favorisera également la résilience et la crédibilité du cadre macroéconomique au cours de la prochaine décennie. 1.4. Contraintes à la croissance et à la diversification et défis en matière de productivité du travail 18. Les niveaux de croissance de la RDC n’ont pas permis d’exploiter le plein potentiel des ressources du pays en raison des multiples contraintes et sources de chocs auxquels le pays s’est heurté au cours des deux dernières décennies. La vulnérabilité de la RDC aux chocs souligne la nécessité de renforcer sa résilience économique et de se concentrer sur la diversification de l’économie. Pour parvenir à cette diversification, le pays aura besoin d’investissements à long terme dans les infrastructures et le capital humain et devra surmonter les faiblesses institutionnelles et structurelles, y compris le manque de ressources humaines et financières. 1.4.1. Contraintes à la diversification économique Cette sous-section résume brièvement les principaux obstacles à la diversification. Une analyse plus détaillée ainsi que des recommandations stratégiques sont présentées au Chapitre 2. 19. Pour renforcer la résilience et maintenir des taux de croissance élevés nécessaires pour réduire sensiblement la pauvreté et les inégalités, il faudra débloquer des investissements dans les infrastructures et le capital humain et surmonter les faiblesses institutionnelles et structurelles. Il s’agira notamment de pallier le manque de ressources humaines et financières. La faible part du capital produit reflète le déficit d’infrastructure du pays, qui limite la compétitivité du secteur privé et la diversification économique. Le DSP de la RDC (2018) a identifié trois grandes voies pour atteindre les deux objectifs : (1) renforcer la résilience des cadres macro-budgétaires et institutionnels ; (2) renforcer le capital humain ; et (3) construire des infrastructures et stimuler le développement du secteur privé. 20. La gouvernance et l’environnement des affaires sont entravés par des réglementations excessives, des impôts multiples, des taxes parafiscales et des obstacles au commerce, autant de facteurs qui limitent la création d’entreprises et la croissance. Au cours de la dernière décennie, la RDC a amélioré sa gouvernance. Malheureusement, beaucoup de ces améliorations de l’environnement des affaires ne se traduisent pas par des améliorations matérielles et les progrès sont encore considérés comme lents. Le DSP de la Banque mondiale suggère également que la RDC s’est améliorée en matière de participation et de redevabilité depuis la première décennie des années 2000. La RDC occupe la 169e place sur 189 pays dans l’Indice de perception de la corruption (IPC) de Transparency International, ce qui correspond à un score de 19/100. En outre, la RDC a obtenu un score d’environ 3,85 pour l’efficacité du gouvernement, 6,25 pour la qualité de la réglementation, 3,37 pour l’indice de l’État de droit et 3,81 pour la stabilité et l’absence de violence17. En ce qui concerne les impôts et la parafiscalité, le paiement des 17Ces chiffres datent de 2015, la plupart d'entre eux s’étant améliorés ou ayant diminué depuis, mais ils sont tous tirés du récent Diagnostic systémique pays (DSP) de la RDC de 2018, juste avant l’arrivée de l'administration actuelle de la RDC. 28 impôts est complexe et alambiqué, moins en raison des niveaux d’imposition que du nombre et de la complexité des impôts et des taxes parafiscales que les entreprises sont invitées à payer. Cette situation génère des revenus limités pour l’État tout en créant des obstacles importants à l’expansion du secteur privé. Outre le lourd fardeau du paiement des impôts, la lourdeur du processus d’octroi de licences aux entreprises et la multitude de réglementations découragent l’investissement privé et la formalisation des entreprises. 21. Le mauvais état des infrastructures représente un obstacle majeur à une croissance durable et inclusive ainsi qu’à la fourniture de services. Les lacunes sont particulièrement importantes dans le domaine du transport routier, entravant l’accès aux marchés, la connectivité Internet, l’approvisionnement en électricité et l’accès aux services d’approvisionnement en eau et d’assainissement. Ces lacunes sont particulièrement visibles dans les zones urbaines 18 et dans les zones rurales. Le réseau historique de transport multimodal (rail, route, eau) n’est plus opérationnel pour relier les entreprises aux marchés intérieurs et mondiaux (tant pour les importations que pour les exportations). Seules six des vingt-six capitales provinciales sont accessibles par la route depuis Kinshasa, et seuls 5 % du réseau routier sont asphaltés, dont environ 14 % en bon état19. L'infrastructure de fibre optique à large bande reste inégale et concentrée principalement le long du corridor Kinshasa-Lubumbashi, tandis que des connexions par satellite abordables qui pourraient aider à connecter les zones rurales isolées ne sont actuellement pas disponibles. Parallèlement, le secteur de l’énergie pose un problème d’envergure nationale malgré la capacité hydroélectrique colossale de la RDC. Le taux global d’accès à l’électricité en RDC n’est que de 19 %20. De grandes disparités géographiques dans l’accès à l’électricité sont également notables puisque seulement 1 % des populations rurales a accès à l’électricité, contre 45 % dans les zones urbaines telles que Kinshasa21. L’industrie, principalement extractive, représente la plus grande part de la consommation d’électricité, soit 55 % de la demande de la RDC, suivie par 35 % pour le secteur résidentiel et 10 % pour les autres usages et services commerciaux. Figure 1.8 : (a)Indice d’accès aux marchés et (b) Indice d’accès rural a - Indice d’accès aux marchés b - Indice d’accès rural 18Diagnostic systématique pays (RDC), Priorités de politiques pour réduire la pauvreté et promouvoir la prospérité partagée dans un pays fragile sortant d'un conflit, Banque mondiale, 2018. 19 Cadre de partenariat pays de la RDC pour la période 2022-2026, Banque mondiale, 2022. 20 Accroître l'accès à l'électricité en RDC : opportunités et défis, Banque mondiale, 2020. 21 Cadre de partenariat pays de la RDC pour la période 2022-2026, Banque mondiale, 2022. 29 Source : Indice de ciblage des projets de l’Observatoire de la pauvreté et de l’égalité en RDC 22. L’état actuel du capital humain et les disparités entre hommes et femmes sont également des obstacles majeurs à la diversification économique. Un faible capital humain se traduit par une faible qualité de la main-d’œuvre et une faible productivité. Par exemple, en 2020, l’indice du capital humain (ICH) de la RDC était de 0,37, inférieur à la moyenne de 0,40 pour l’ASS. Cela signifie qu’un enfant congolais né aujourd’hui ne peut espérer atteindre que 37 % de son potentiel productif à l’âge adulte. La mauvaise santé des travailleurs affecte leur productivité, tandis que la prévalence des pandémies, combinée à la médiocrité des services de santé, dissuade les investisseurs et les touristes. Les inégalités entre les sexes exacerbent la situation : en effet, bien que l’ICH des filles soit le même que celui des garçons, il existe des différences et de grandes disparités entre les sexes, en particulier pour certaines composantes du capital humain telles que l’éducation et la santé. La faible accumulation de capital humain en RDC est largement due à plusieurs facteurs : (i) un système éducatif peu performant, marqué par des environnements scolaires médiocres, un manque d’efficacité des enseignants, des infrastructures scolaires médiocres et de faibles résultats d’apprentissage ; (ii) un taux élevé de retard de croissance chez les enfants, d’environ 42 % au cours des deux dernières décennies. La pénurie de compétences et l’inadéquation entre les résultats du système éducatif et les besoins du marché du travail contribuent à un chômage important chez les jeunes. La pénétration du haut débit mobile n’est que de 15,4 % et la faiblesse des infrastructures des technologies de l’information et de la communication (TIC) constitue un obstacle à l’exploitation des services numériques et de l’innovation, à l’élargissement de l’accès à l’éducation et à l’amélioration de la qualité et de la pertinence de l’éducation et des compétences requises pour la création de biens et de services. Malgré quelques améliorations au cours des dernières années, la qualité de l’éducation doit être encore améliorée pour que la population congolaise soit compétitive par rapport aux normes internationales. Figure 1.9 : Indice du capital humain en RDC Source : Indice de ciblage des projets de l’Observatoire de la pauvreté et de l’égalité en RDC 30 1.4.2. Emplois et faible dynamique de la productivité du travail 23. La RDC connaît une augmentation de la population en âge de travailler alors que le taux de participation à la population active est faible. Selon les projections, la part de la population en âge de travailler représenterait 51 % de la population en 2022. Cela signifie que le pays comptera environ 50 millions d’habitants rejoignant le marché du travail en 2022 et près de 60 millions en 2030 (selon les projections des Nations Unies), soit environ 8 millions de plus, étant donné qu’environ 1 million de jeunes Congolais rejoignent le marché du travail chaque année. Cependant, la taille de la population active représente généralement les deux tiers de celle de la population en âge de travailler. Globalement, la population active de la RDC a été estimée à 33,4 millions de personnes, ce qui la place au-dessus de tous ses pairs, à l’exception de l’Indonésie qui compte plus de 138 millions de personnes actives. Seuls deux tiers de la population en âge de travailler sont employés, tandis que seulement 2,2 % sont au chômage. Cela signifie que près d’un tiers de la population en âge de travailler est sans emploi. Le pays doit donc créer des emplois productifs et en nombre suffisant pour cette population en âge de travailler afin de récolter le dividende démographique. 24. En outre, l’emploi en RDC reste concentré dans des secteurs où la productivité et la hausse des revenus sont faibles. Plus de 60 % des travailleurs restent bloqués dans le secteur agricole, qui ne contribue qu’à environ 15,5 % de la production totale, reflétant le faible niveau des gains potentiels de productivité du travail dans le secteur. Cela est d’autant plus vrai que le secteur est dominé par les petits exploitants et les agriculteurs de subsistance. Cependant, l’augmentation de la valeur ajoutée par travailleur nécessaire dans l’agriculture exige de réduire la main-d’œuvre et d’introduire du capital. Parallèlement, bien que l’emploi dans l’industrie ait augmenté, il reste faible, avec environ 3,3 millions d’emplois sur un total de 28 millions. Cela reflète en partie la prédominance de l’exploitation minière à forte intensité de capital dans le secteur industriel. En 2018, la valeur ajoutée par travailleur dans l’industrie était plusieurs fois supérieure à celle de l’agriculture, et l’écart par rapport aux services était encore plus important (figure 1.10). En outre, il est peu probable que la main-d’œuvre excédentaire du secteur agricole soit entièrement absorbée par l’industrie et les services, qui créent non seulement plus d’emplois, mais également des emplois de meilleure qualité. La nécessité d’accroître la productivité est donc fondamentale pour la création d’emplois et l’amélioration du bien-être du pays grâce à de meilleurs salaires et à la croissance économique. 25. Cependant, le faible niveau de productivité du travail en RDC dans les secteurs moteurs de la croissance a été un obstacle au développement de l’emploi (figure 1.10). Entre 2000 et 2021, l’emploi a augmenté dans tous les secteurs de l’économie de la RDC, mais la performance de la productivité du travail a varié entre les secteurs et a été presque entièrement responsable de la croissance. La productivité de l’industrie extractive, principal moteur de la croissance économique représentant environ 26,5 % du PIB, a augmenté avec la hausse des prix réels du cuivre et du cobalt, mais sa nature à forte intensité de capital a probablement limité la contribution à la création d’emplois. Bien que le secteur des services se développe rapidement et occupe la plus grande part du PIB avec 37,8 % (Diagnostic-pays du secteur privé, 2022), sa productivité du travail reste faible, essentiellement concentrée dans le secteur informel. La productivité a en fait compensé les lacunes du marché du travail et l’évolution démographique. Sa contribution à la croissance s’est considérablement améliorée, passant d’un effet négatif au début des années 2000 à un effet positif les années suivantes. Cependant, la productivité reste faible par rapport à d’autres pays de la région. 31 26. La nécessité d’accroître la productivité dans l’agriculture pourrait permettre de créer de meilleurs emplois agricoles et non agricoles. Les écarts de productivité du travail entre les secteurs sont importants. Avec plus de 60 % des emplois dans l’agriculture, les gains potentiels pouvant découler de l’augmentation du faible niveau de productivité agricole et de la facilitation du mouvement des travailleurs vers des emplois non agricoles sont importants. Ces emplois non agricoles pourraient se traduire soit par une urbanisation plus poussée avec son lot d’avantages, soit par des emplois non agricoles dans l’agriculture à plus forte valeur ajoutée. L’agriculture commerciale peut avoir le potentiel de créer des emplois salariés ; elle peut également stimuler les emplois de service en dehors des exploitations agricoles (dans le transport, le stockage, les entrepôts d’emballage et le commerce) et les emplois dans l’agro-transformation. Figure 1.10. RDC : Productivité, emploi et marché du travail a. RDC : Répartition de l’emploi par grand secteur (2000-2019) b. RDC : Parts de la valeur ajoutée par grand secteur (2002-2021) Source : Perspectives macroéconomiques sur la pauvreté (MPO) et WDI Source : Systèmes des comptes nationaux et WDI Note : L’emploi total est tiré de MPO, les parts d’emploi de WDI sur la base Note : Sur la base des données de Système des comptes nationaux, la des estimations de l’OIT. La population en âge de travailler est supposée valeur ajoutée est mesurée comme le produit intérieur brut (PIB) en CDF avoir entre 15 et 64 ans. constants de 2005. c. RDC: Emploi par secteur (en millions), 2010-2019 d. RDC : Valeur ajoutée par travailleur (indice, 2000=100), 2000-2019 Source : Perspectives macroéconomiques sur la pauvreté (MPO) et WDI Source : Perspectives macroéconomiques sur la pauvreté (MPO) et WDI Note : L’emploi total est tiré de MPO, les parts d’emploi de WDI sur la base Note : Sur la base des données MPO, la valeur ajoutée est mesurée des estimations de l’OIT. La population en âge de travailler est supposée avoir comme le produit intérieur brut (PIB) en USD constants de 2015. entre 15 et 64 ans. 32 e. RDC : Dynamique du marché de l’emploi (2017-2019) f. RDC : Pyramide des âges Source : Institut national de la statistique de la RDC Source : Institut national de la statistique de la RDC 1.4.3. Évaluation/cartographie et défis de la pauvreté 27. Malgré ces années de création de richesses, la pauvreté en RDC reste très répandue et les inégalités restent stables et élevées. La population vivant en dessous du seuil national de pauvreté a diminué de 69,3 % en 2005 à 64 % en 2012. Malgré une autre légère baisse (4,3 points de pourcentage) entre 2012 et 2018, le nombre de pauvres a augmenté de 6 millions, atteignant près de 55 millions en 2018, principalement en raison de la forte croissance démographique. La RDC est au troisième rang des pays comptant le plus grand nombre de pauvres dans le monde. De plus, la mauvaise gouvernance, la faiblesse des institutions budgétaires, la mauvaise gestion des ressources naturelles et les conflits et violences prolongés ont limité les progrès en matière de développement du capital humain et physique, ce qui a entraîné une sous-performance économique et des niveaux élevés de pauvreté. Le taux de pauvreté international est estimé à 77,2 % (estimation 2021 de la Banque mondiale), et 55 % des pauvres de la RDC résident dans les zones rurales 22, où le taux de pauvreté est de 80,2 %, contre 56,3 % dans les zones urbaines23. D’importantes disparités géographiques existent entre les provinces, l’extrême pauvreté étant concentrée dans les provinces du Centre et du Nord-Ouest, tandis que le plus grand nombre de pauvres se trouve dans l’est du pays. Une grande partie de la population de la RDC, et plus particulièrement le nombre de pauvres, vit dans des zones où il y a soit une prévalence des conflits, en 22 Banque mondiale, Rapport sur le développement territorial, phase 2, 2019. 23 Banque mondiale, Diagnostic systématique pays, 2018. Rapport n° 112733-ZR. 33 particulier les zones avec le plus grand nombre de sites miniers (artisanaux), soit des risques climatiques élevés (figure 1.11). Figure 1.11. Conflits, zones de restauration prioritaires et nombre de pauvres Conflits Nombre de pauvres Moyenne non pondérée des conflits, du nombre de pauvres, des risques climatiques Source : Indice de ciblage des projets de l’Observatoire de la pauvreté et de l’égalité en RDC 28. Dans l’ensemble, la pauvreté non monétaire ou multidimensionnelle a diminué de 2014 à 2018, mais s’est aggravée dans les zones rurales. Au niveau national, l’incidence de la pauvreté non monétaire ou multidimensionnelle, c’est-à-dire la privation simultanée dans plus d’un tiers des 10 dimensions liées à la santé, à l’éducation et au niveau de vie, a diminué de 72,3 % à 64,5 % entre 2014 et 2018. Cependant, dans les zones rurales, elle a augmenté de 85,6 à 87 % au cours de la même période. L’incidence de la pauvreté multidimensionnelle est presque deux fois plus élevée en milieu rural qu’en milieu urbain, en raison des taux de privation très élevés en matière d’électricité, d’eau potable et de logement, avec plus de 80 % dans ces zones rurales contre au plus 40 % pour les zones urbaines. Au niveau national, la fraction de la population pauvre en situation de grande pauvreté a diminué de 18,3 à 13,3 % grâce à une baisse de la pauvreté sévère dans les zones urbaines, tandis que la gravité de la pauvreté a légèrement augmenté dans les zones rurales, passant de 53,7 à 55 %. L’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM), qui tient compte à la fois de la proportion de personnes démunies et de leur degré de privation, montre également un léger recul de la pauvreté non monétaire. 29. Les résultats obtenus en matière de lutte contre la faim et le retard de croissance sont très médiocres en RDC, surtout dans les zones rurales. En 2021, la RDC a obtenu un score de 39 sur l’indice de la faim dans le monde (GIH) et s’est classée 112e sur 116 pays. En raison de cette faim sévère, trop d’enfants de moins de 5 ans souffrent de retards de croissance et d’une morbidité et une mortalité élevées. Les taux globaux de retard de croissance ont relativement peu évolué dans le pays, baissant seulement de 42,6 à 42 %, mais ils ont augmenté de 47,5 à 50,3 % dans les zones rurales, et de 14,7 à 15,7 % à Kinshasa. En termes de retard de croissance, la RDC enregistre le troisième plus mauvais taux de tous les pays, obtenant de meilleurs résultats que le Niger et le Burundi seulement. 34 1.5. Les futurs moteurs de croissance de la RDC 30. Cette section examine la trajectoire potentielle future de la croissance économique et la manière dont elle peut favoriser la croissance à long terme en RDC. Après une brève présentation de la vision du gouvernement à l’horizon 2050, elle analyse les moteurs potentiels de croissance en RDC et un ensemble de scénarios de la croissance économique en RDC au cours des trois prochaines décennies à l’aide du modèle de croissance à long terme (LTGM) de la Banque mondiale. 1.5.1. La vision de la RDC à l’horizon 2050 31. La vision du gouvernement à l’horizon 2050 prévoit d’atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire (PRI) de la tranche supérieure d’ici 2050. Le gouvernement de la RDC a exposé sa vision du développement jusqu’en 2050 et défini des étapes à court terme dans son Plan national stratégique de développement (PNSD) de la RDC 2019-2023. Les autorités gouvernementales ont décidé de poursuivre la mise en œuvre du PNSD au cours des cinq prochaines années, de 2023 à 2027, et présentent une vision révisée du développement du pays en deux étapes – en 2035 et 2050 – en vue de devenir un pays à revenu intermédiaire avec une économie diversifiée et inclusive. Dans le cadre des scénarios de croissance visés, l’économie de la RDC devra afficher une croissance annuelle d’environ 5 % du PIB réel par habitant (ou environ 8 % de la croissance annuelle du PIB réel) pour devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) d’ici 2035, ou de 7 % du PIB réel annuel par habitant (soit une croissance annuelle du PIB d’environ 10 %) pour devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (PRITS) d’ici 2050. Cette vision se concentre sur la valorisation des ressources naturelles, qui favorisera la création de l’espace budgétaire requis pour financer des investissements publics dans les infrastructures (transports, énergie, systèmes d’eau et technologies de l’information et de la communication) et le capital humain (santé et éducation). Les gains de productivité qui en résulteront auront des implications positives sur les secteurs de production (notamment l’agriculture et l’agroalimentaire) et la transformation structurelle. 32. Des simulations montrent que la réalisation de l’objectif ambitieux du gouvernement consistant à devenir un PRITS d’ici 2050 nécessitera une accélération significative de la croissance économique, et notamment de la croissance de la productivité. Sur la base de la vision à l’horizon 2050, deux scénarios de croissance sont envisagés pour la RDC : (i) devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) d’ici 2035, et (ii) un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (PRITS) d’ici 2050. 1.5.2. Moteurs potentiels de croissance 33. Les perspectives économiques de la RDC s’améliorent et le pays dispose d’une fenêtre d’opportunité pour mettre en place des réformes qui favoriseront des niveaux de croissance plus élevés et l’émergence de nouveaux moteurs de croissance. Compte tenu de ses ressources naturelles abondantes, de sa position stratégique à la frontière de neuf pays et de sa population jeune et croissante, la RDC dispose d’un potentiel économique considérable. Selon des estimations, le potentiel hydroélectrique de la RDC serait à lui seul suffisant pour fournir trois fois plus d’électricité que l’Afrique en consomme actuellement. La RDC possède également l’une des plus grandes concentrations de 35 richesses minérales au monde, avec plus de 1 000 substances, dont 20 minerais stratégiques. La flore et la faune y sont parmi les plus riches du continent. D’une superficie de 2,345 millions km2, la RDC est le plus grand pays d’Afrique subsaharienne (ASS), avec plus de 80 millions d’hectares de terres fertiles et arables et 52 % de toutes les ressources en eau douce de l’ASS. La RDC pourrait potentiellement nourrir l’ensemble du continent africain, même si elle est aujourd’hui incapable de nourrir adéquatement sa propre population. Si elles sont exploitées de manière durable, soutenues par des infrastructures appropriées, une gouvernance et des normes sectorielles appropriées, ces ressources naturelles pourraient créer d’importantes opportunités pour la croissance économique et le secteur privé de la RDC, permettant de mettre en œuvre des technologies vertes, de créer des emplois et soutenir la transition vers une économie à faible émission de carbone. La poursuite des réformes permettra d’étendre leurs effets et de créer de nouvelles opportunités dans d’autres secteurs de l’économie, à commencer par l’agroalimentaire, la construction et les services pour répondre aux besoins des marchés urbains en croissance rapide. 34. L’exploitation minière peut également constituer une opportunité importante, en attendant la mise en place de cadres appropriés. Considérant l’importante richesse minière du pays, l’exploitation minière peut être créatrice de nombreux emplois formels, notamment en amont de la chaîne de valeur pour des professionnels plus qualifiés, sans parler de l’augmentation des recettes publiques et de la demande accélérée d’emplois (de services) supplémentaires qu’elle pourrait favoriser. Tout cela pourrait se produire, en attendant la mise en place de cadres réglementaires adéquats qui garantiront des structures stables. Le gouvernement de la RDC a récemment pris des mesures importantes dans ce sens en concluant des accords avec les Émirats arabes unis, principale destination de l’or provenant de l’Afrique de l’Est. Des accords similaires sont en cours de finalisation pour les « 3T » (étain, tungstène et tantalite). En outre, les processus de certification dans le pays contribueront à s’assurer que la qualité des métaux est garantie par les producteurs. Par ailleurs, le gouvernement envisage de construire la plus grande fonderie d’Afrique à Bukavu afin qu’une partie du traitement des minerais à grande échelle soit effectuée dans le pays. Tout cela contribue à un cercle vertueux dans l’utilisation des ressources. Une étude de cas à l’appui (Cas pratique1) de la Banque mondiale, produite en parallèle pour ce Mémorandum économique-pays, examine en détail, le potentiel et les perspectives de développement des industries minières et de la chaîne de valeur de la RDC (les principaux résultats sont présentés au chapitre 2). 35. Le potentiel considérable de l’agro-industrie représente un marché important en RDC. L’immense potentiel repose sur (i) environ 51 millions d’hectares de terres cultivables inexploitées ; (ii) des conditions climatiques et écologiques favorables à diverses activités agricoles ; (iii) un potentiel de développement des cultures d’exportation, de l’horticulture, de l’élevage et de la pêche ; et (iv) un marché régional important et en croissance rapide de plus de 200 millions d’habitants, jeune et en rapide urbanisation24. La RDC importe une grande partie de la nourriture qu’elle consomme (1,1 milliard USD d’importations alimentaires en 2021) et exporte très peu. Kinshasa doit importer une grande partie de sa nourriture à des coûts très élevés, y compris des produits tels que l’huile de palme, fabriquée autrefois par la RDC à un prix compétitif. Depuis le début de la guerre en Ukraine, et en vue de réduire leur dépendance à l’égard des importations de blé et de devenir plus autosuffisantes, les entreprises agroalimentaires de la RDC ont commencé à explorer le développement des chaînes de valeur de la farine de maïs (le maïs et la farine de maïs étant en grande partie importés). Des détails supplémentaires sont fournis au Chapitre 2 et dans le Cas d’Étude 2 (sur la chaîne de valeur du manioc) produit en parallèle pour illustrer les principaux défis et expliquer comment attirer des investissements intelligents face au climat dans le secteur agroindustriel. 24Diagnostic pays du secteur privé (CPSD), 2022. 36 36. Les ressources hydroélectriques uniques de la RDC – estimées à environ 100 GW – peuvent fournir une énergie renouvelable flexible et à grande échelle à un coût hautement compétitif. Le pays possède l’un des plus grands potentiels hydroélectriques au monde, soit 13 % du potentiel hydroélectrique mondial, dont seulement 2,5 % sont exploités. Les chutes d’Inga ont à elles seules une capacité potentielle actuelle de 44 GW et pourraient produire de l’hydroélectricité parmi les moins coûteuses au monde, à 2 cents USD/kWh. La réalisation de ce projet très complexe nécessitera une gouvernance forte et un soutien extérieur important en termes d’expertise. Ce projet devra être également développé par étapes, en veillant au respect des politiques environnementales et de sauvegarde. 37. Les grandes forêts de la RDC constituent un atout précieux : elles stockent l’équivalent de 85 milliards de tonnes de CO2 environ, mais elles sont sous-productives et menacées. Environ 67 % de la superficie du pays (environ 152 millions d’hectares) sont couverts de forêts (le bassin du Congo étant la deuxième plus grande forêt tropicale humide au monde et la RDC représentant 60 % de cette forêt). Il s’agit du plus grand puits de carbone des tropiques, éliminant plus de 600 millions de tonnes d’équivalents CO2 par an, soit près de six fois plus que l’Amazonie. Cependant, avec ses tourbières riches en pétrole en sous-sol, il contient 8,1 milliards de tonnes de carbone « irrécupérable » qui, s’il était libéré, ne pourrait être récupéré à temps pour éviter des impacts climatiques dangereux. Les forêts représentent également 66,5 % du capital naturel de la RDC et 27,7 % de sa richesse25. La lutte contre les facteurs de déforestation et de dégradation des forêts permettra au pays de tirer profit de ses forêts grâce au financement climatique pour la réduction des émissions provenant de la déforestation et de la dégradation des forêts (REDD+)26 et au développement potentiel des marchés du carbone. La perte de forêts a un impact négatif significatif sur les régimes de précipitations et les services écosystémiques clés, la qualité de l’eau, le contrôle de l’érosion et la sécurité alimentaire en RDC et dans l’ensemble du bassin du Congo. Le Diagnostic du secteur privé de la RDC (Country Private Sector Diagnostic – CPSD) a mis en évidence la possibilité de tirer parti des mécanismes de financement du carbone pour fournir des incitations basées sur les résultats pour la protection et la restauration des forêts27. Le Rapport national sur le climat et le développement (CCDR) de la RDC, actuellement en préparation, mettra en évidence les principaux défis et potentiels du secteur forestier, et présentera les moyens de mettre en œuvre des politiques stratégiques, efficaces et intelligentes face au climat pour le développement des écosystèmes. 1.5.3. Perspectives de croissance à long terme de la RDC 38. Pour mieux comprendre les différentes manières dont l’économie de la RDC progressera au cours des 30 prochaines années, le rapport utilise l’Extension ressources naturelles du Modèle de croissance à long terme de la Banque mondiale (LTGM-NR)28. Le LTGM-NR décrit la capacité de 25L'évolution des richesses des nations - Gérer les actifs pour le futur, Banque mondiale, 2021. 26 Le Plan national d'investissement REDD+ de la RDC 2015-2020 a mobilisé à ce jour des financements notables, dont près de 250 millions USD de l'Initiative pour les forêts d'Afrique centrale (CAFI) et 130 millions USD de la Banque mondiale. 27Société financière internationale, Diagnostic du secteur privé. Créer des marchés en République démocratique du Congo pour une exploitation productive et durable des ressources naturelles, 2022. Disponible sur : https://www.ifc.org/wps/wcm/connect/publications_ext_content/ifc_external_publication_site/publications_listing_page/cpsd -democratic-republic-of-congo 28 Le modèle de croissance à long terme (LTGM) repose sur le modèle de croissance de Solow-Swan pour générer différentes simulations sur la croissance des revenus, en se basant sur les différents paramètres de la fonction de production de Cobb- Douglas. L'extension des ressources naturelles (RN) est conçue pour une désagrégation de l'économie en secteurs de ressources 37 production à long terme et décompose l’économie de la RDC en deux secteurs économiques (minier et non minier) pour saisir l’hétérogénéité de la dynamique de ces deux secteurs. Le modèle permet un calibrage sectoriel des paramètres clés, des conditions initiales et des trajectoires futures exogènes, suit les effets des découvertes/de l’épuisement des réserves sur la croissance et simule les effets des chocs des prix des matières premières sur l’investissement et la croissance à long terme. 39. Cette section est divisée en quatre sous-sections. La sous-section A examine les hypothèses de base du scénario de maintien du statu quo, dans lesquelles les moteurs de croissance sont censés suivre leur tendance historique récente, et présente la trajectoire de croissance selon le scénario de référence au cours des 30 prochaines années. La sous-section B examine la décomposition de la croissance et la contribution de chaque moteur à la croissance, tandis que la sous-section C fournit une analyse des réformes économiques nécessaires pour stimuler la croissance. Dans la dernière sous-section D, le rapport approfondit le débat sur la diversification et la transformation structurelle et explique comment les réformes peuvent accélérer le processus. A. Hypothèses de base et trajectoire de croissance 40. Le LTGM propose un ensemble de simulations sur différents scénarios économiques, sociaux et démographiques pour chaque moteur de croissance. Dans le cadre du scénario de maintien du statu quo, le LTGM combine des hypothèses sur les fondamentaux de la croissance pour générer une trajectoire de croissance du PIB et du PIB par habitant au cours des 30 prochaines années, en supposant que les tendances historiques récentes continuent sur la même voie, c’est-à-dire en l’absence de futurs chocs ou réformes majeurs. La tendance du secteur non minier repose sur des hypothèses relatives aux moteurs de croissance « standard », telles que la productivité totale des facteurs (PTF), le capital humain, l’investissement et la démographie (croissance de la population, structure par âge et participation au marché du travail). Quant à la croissance du secteur minier, elle dépend de la PTF sectorielle, du capital physique et du niveau des réserves prouvées, donc du profil des découvertes et de l’extraction des produits minéraux. L’Encadré 1 fournit une brève discussion sur les hypothèses de base extrapolées dans les simulations LTGM pour la RDC au cours des 30 prochaines années. Encadré 1.1 LTGM-NR : Résumé des hypothèses clés pour la RDC Cet encadré résume les hypothèses clés du scénario de référence qui fournissent une brève description de tous les paramètres, conditions initiales et trajectoire exogène utilisés pour projeter la croissance de référence à l’aide du LTGM-NR. • Secteur minier. Le scénario de référence pour le PIB minier repose sur des hypothèses relatives aux prix du cuivre et du cobalt. Le prix de référence du cuivre, à 8 000 USD/tm (CMO, 2022), convergerait lentement vers 6 000 USD/tm d’ici 2050 (le 50e centile de la distribution prévue) et le prix du cobalt resterait presque stable à 40 000 USD/tm, similaire aux Perspectives des marchés des matières premières de la Banque mondiale (CMO) 2022 et à la répartition médiane des prévisions. Les réserves de cuivre et de cobalt sont estimées respectivement à 31 millions et 3,5 millions de tonnes en 2020 (USGS). Le scénario de référence suppose que la grande découverte de 2020 deviendra disponible et hors ressources. Le LTGM et ses extensions sont conçus pour des exercices de simulation à long terme au cours des 5 à 30 prochaines années, mais pas pour des prévisions à court terme. Les modèles ne fonctionnent qu’à une fréquence annuelle, n’incluent pas de dimension keynésienne du côté de la demande et sont trop simples pour tenir compte de la multitude de chocs sur la croissance à court terme. De plus amples détails sur le LTGM-NR sont fournis à l’Annexe 1.A de ce chapitre. 38 pour la production sur la période 2020-2030. Sur la base des données fournies par l’USGS sur les réserves et la production de cuivre et de cobalt en RDC, environ 2 500 000 découvertes de cuivre par an de 2030 à 2050 (similaire à la moyenne sur 2010-2019) et 100 000 découvertes de cobalt par an de 2020 à 2050 (en dessous de la moyenne 2010-2020). • Productivité totale des facteurs (PTF). Le modèle construit la trajectoire de la PTF à l’aide des données PWT sur le PIB, le capital physique et humain et l’emploi. La croissance de référence de la PTF dans le secteur non minier devrait correspondre aux prévisions du FMI pour la croissance du PIB non minier jusqu’en 2024 (Article IV) et pour la croissance du PIB total sur la période 2025-2027 (Perspectives de l’économie mondiale, PEM). Après 2035, la croissance de la PTF non minière converge vers 1 %, moyenne de 2010-2019, ce qui est cohérent avec le retard de la transformation structurelle de la RDC. La croissance de la PTF dans le secteur minier devrait correspondre aux prévisions du FMI sur la croissance du PIB minier jusqu’en 2024 (Article IV) et converger vers 0 % après 2030, sur la base de l’expérience chilienne (rapport « Productivité dans l’industrie minière chilienne du cuivre » de 2017). • Capital humain. Cette projection est également fondée sur l’extension du capital humain du LTGM (n’inclut pas l’enseignement supérieur) qui combine des données au niveau des cohortes sur la quantité et la qualité de l’éducation pour retracer le capital humain au fil du temps, mesuré comme la productivité moyenne de la main- d’œuvre en pleine santé et ayant achevé l’éducation secondaire (ICH). Dans le scénario de référence, une forte augmentation des taux de scolarisation entraînera une forte croissance du capital humain, mais qui passera de 1,2 % à 0,4 % d’ici 2050, à mesure que la qualité de l’éducation stagne. Les fermetures d’écoles dues à l’épidémie de COVID-19 ralentiront le rythme de croissance du capital humain, car les moins instruits rejoindront la population active jusqu’en 2035. • L’investissement est présumé conforme aux prévisions des Perspectives de l’économie mondiale jusqu’en 2027, puis constant à 17 % du PIB. Cela semble pessimiste par rapport aux pays pairs, mais historiquement optimiste (la moyenne d’après-guerre est de 14 % du PIB). Basé sur la moyenne d’après-guerre, le scénario de référence prévoit que l’investissement public représentera 20 % de l’investissement total. • Population et participation à la population active (PMT). Intégrant les prévisions des Nations Unies sur les tendances démographiques de la RDC, le LTGM-NR fixe la croissance démographique de référence à décélérer de 3,2 % en 2020 à 2,3 % d’ici 2050. Le taux d’activité est supposé constant à 66 %, avec un léger impact sur la croissance à court terme en raison de la forte dépendance à l’égard du secteur minier, plus intensif en capital. La trajectoire de la population en âge de travailler augmentera lentement, passant d’environ 50 % en 2020 à 60 % d’ici 2050. A. Conditions initiales Valeur Source C. Trajectoire des variables exogènes, 2023-2050 PIB par habitant en 2020 US$500 (real 2015) UN-WDI Prix des produits de base Non-minier 72% of GDP UN-Comtrade Cuivre $7,300→US$6000/tm WB-CMO Cobalt $40,000/tm WB-CMO Minier 28% of GDP UN-Comtrade Investissement: Ratio capital/PIB 3 PWT 10.0 Total 15%→17% of GDP IMF-WEO Non-minier 1.6 Calculs BM Part public 20% IMF-FAD Cuivre 1.1 Equalize MPK Productivity: Cobalt 0.3 PTF non-minier ( 〖PTF〗_t^0) 1% after 2035 TED Réserves: PTF mines cuivre ( 〖PTF〗_t^Cu) 0% after 2030 Cuivre 31 MM metric tons USGS PTF mines cobalt 〖PTF〗_t^Co) 0% after 2030 Capital humain 1%→0.4% LTGM-HC Cobalt 3.5 MM metric tons USGS Démographie: B. Principaux paramètres Croissance population 3.2%→2.3% UN Part travail dans non minier 70% du PIB non minier TED Population en âge d'emploi 51%→58% UN Rentes minières 33% du PIB minier GTAP Taux de participation 66% constant WB-WDI 41. Dans le scénario de référence, la croissance du PIB réel à long terme reviendrait à sa tendance potentielle. En passant de 1,7 % en 2020 en raison des effets de la COVID-19 à 6,2 % en 2021 puis à 8,9 % en 2022, sur la base de données de mai 2023 (à partir d’estimations initiales d’environ 7 %), la croissance en RDC devrait augmenter en moyenne de 6 % dans la seconde moitié des années 2020, avant de ralentir pour atteindre son niveau à long terme de 4,4 % jusqu’en 2050. Néanmoins, en raison d’une croissance démographique rapide, le PIB réel par habitant augmenterait en moyenne de près de 3 % au cours de la seconde moitié des années 2020, mais diminuerait à long terme pour atteindre une fourchette de 1 à 2 %. 39 Ainsi, le PIB réel par habitant passerait de 500 USD en 2020 à environ 685 USD en 2035 et à 880 USD en 2050, soit environ 380 USD seulement en 30 ans. La trajectoire du PIB par habitant est donc encore insuffisante, restant en dessous du seuil (1 000 USD) nécessaire pour devenir un PRITI d’ici 2050. Figure 1.12. Croissance du PIB, % Figure 1.13. Croissance du PIB, % Figure 1.14. Croissance sectorielle du PIB, % Source : Estimations des services de la Banque mondiale fondées sur le LTGM 42. À court terme, le secteur minier a connu une croissance très rapide, avant de ralentir dans la seconde moitié des années 2020. Partant d’une très forte croissance de référence du PIB d’environ 10 % à court terme, la croissance du PIB minier diminue fortement dans la seconde moitié des années 2020, se poursuit à un rythme plus lent dans les années 2030, avant de se contracter dans les années 2040 (figure 1.14). Le PIB minier, qui dépend de la croissance des secteurs du cuivre et du cobalt, atteindra près de 32 % du PIB en 2025 (contre 28 % en 2020), et diminuera à 13 % d’ici 2050, en raison de la baisse des prix et de l’épuisement des réserves minières. Le volume de cuivre devrait augmenter jusqu’en 2030 et se stabiliser à environ 3 millions de tonnes métriques par an jusqu’en 2050 (figure 1.15). La production de cobalt suit une tendance similaire à celle du cuivre et se stabilise à environ 200 000 tonnes métriques par an d’ici 2035 (figure 1.16). 40 Figure 1.15. Production de cuivre, Figure 1.16. Production de cobalt, Milliers de tonnes Tonnes métriques Source : Estimations des services de la Banque Source : Estimations des services de la Banque mondiale fondées sur le LTGM mondiale fondées sur le LTGM 43. Dans la mesure où l’économie tend à se diversifier au-delà du secteur minier, la croissance du PIB non minier devrait se stabiliser au-dessus de 5 % après 2035. Les secteurs non miniers devraient accélérer de 6 % à partir de la seconde moitié des années 2020 ; et décélérer légèrement avant de stagner autour de 5 % à partir de 2035. Cette croissance devrait être stimulée par la réallocation du capital physique, le stock de capital augmentant plus rapidement dans le secteur non minier en raison de ses meilleurs fondamentaux (population active croissante, PTF, et capital humain) par rapport au secteur minier (étant donné l’épuisement des réserves et l’absence de gains en PTF). Ainsi, l’investissement dans le secteur non minier passe de 5,9 % en 2020 à 7,5 % du PIB à court terme ; et s’élèvera à 12,4 % d’ici 2050. De plus, en raison des gains de productivité substantiels dans le secteur non minier – principalement grâce à la productivité totale des facteurs (PTF), mais aussi au capital humain –, l’efficacité de l’investissement (c’est-à-dire le produit marginal du capital) augmente au fil du temps. B. Décomposition de la croissance de référence 44. La croissance de référence est en grande partie attribuable à l’intensification du capital et à la productivité. En plus du scénario de référence, une série de simulations de croissance contrefactuelles ont été réalisées pour montrer la contribution de chaque facteur, fournissant ainsi une décomposition du PIB par habitant. Par exemple, nous évaluons la contribution de la PTF à la croissance de référence en exécutant une simulation contrefactuelle sans croissance de la PTF. Les contrefactuels mettent en évidence deux points principaux. Premièrement, les principaux moteurs de la croissance de référence de la RDC sont l’investissement et la PTF non minière. Ils contribuent respectivement à hauteur de 1,3 et 1,0 point de pourcentage à la croissance moyenne sur la période 2025-2050 (voir 1.17).29 Deuxièmement, les principaux obstacles à la croissance économique sont la croissance démographique et l’épuisement des réserves de cuivre. Plus précisément, la contribution des réserves de cuivre à la croissance se situe en moyenne autour de -0,3 point de pourcentage sur la période 2025-50 ; tandis que les effets néfastes de la croissance démographique passent de -1,7 point de pourcentage à -1,1 point de pourcentage sur la 29La population en âge de travailler et le capital humain ont peu d’effet sur la croissance car le secteur minier est à forte intensité de capital. 41 même période. Dans l’ensemble, le ralentissement est dû à l’épuisement des réserves et à la stagnation de la PTF minière. Figure 1.17. Contribution de chaque moteur à la croissance du PIB par habitant, Points de pourcentage de croissance dus à chaque moteur de croissance Source : Calculs de l’auteur fondés sur le LTGM-pc. Notes : La décomposition est une approximation qui fait abstraction de l’interaction entre les moteurs de croissance. Dans ce cas, la somme des contributions de chaque moteur ne correspond pas exactement aux taux de croissance de référence réels. C. Des réformes économiques pour stimuler la croissance 45. Cette section analyse comment la RDC pourrait stimuler sa croissance potentielle avec des réformes. L’analyse évalue l’impact des réformes économiques et fournit des résultats clés, en fonction de l’intensité des réformes mises en œuvre (modérées ou ambitieuses). L’objectif pour chaque moteur de croissance est basé sur le revenu des pays pairs (tous les pays ayant le RNB par habitant (pc) actuel de la RDC) ainsi que des pairs structurels et ambitieux utilisés dans l’analyse de ce chapitre (Bolivie, Indonésie, etc.). En conséquence, l’effet de chaque réforme sur la croissance dépend : (i) de la sensibilité de la croissance de la RDC au moteur de croissance spécifique, et (ii) du retard de la RDC par rapport aux pays pairs. Plus précisément, l’analyse considère que les réformes économiques devraient stimuler : (a) la PTF non minière, (b) la croissance du capital humain (taux de scolarisation, qualité de l’éducation et mesures de santé), (c) l’investissement public et privé, et (d) la participation de la main-d’œuvre. Pour chaque réforme, deux scénarios sont envisagés : des réformes modérées (plus réalisables, mais moins prometteuses) et des réformes ambitieuses (une mise en œuvre très prometteuse, mais difficile). Les réformes modérées ciblent généralement le 50-75e centile de la répartition des pairs, tandis que les réformes ambitieuses ciblent généralement les centiles supérieurs de la répartition ou certaines économies les plus performantes30. Le Tableau 1.1 donne un aperçu des hypothèses et des résultats des simulations dans le cadre des scénarios de référence et de réformes (modérées et ambitieuses)31. 30 L'échantillon comprend trois ensembles de pays : premièrement, des pays qui avaient autrefois un revenu national brut (RNB) par habitant (pc) similaire à celui de la RDC aujourd'hui. Pour ces pays, la croissance moyenne sur 20 ans est calculée à partir du moment où leur RNB par habitant était d’environ 500 USD. Deuxièmement, les pays à faible revenu dont le RNB par habitant était inférieur à 1 000 USD au cours de la première année de la série chronologique du RNB. Troisièmement, des pays pairs structurels et ambitieux. La méthode Atlas détermine le statut de faible revenu si le RNB par habitant est inférieur à 1 000 USD de 2020. 31 De plus amples détails sur les tableaux et figures de l’exercice LTGM pour la RDC et les différents scénarios de réforme peuvent être trouvés à l’Annexe 1.B du Chapitre 1. 42 Tableau 1.1. des des Aperçu Aperçu scénarios scénarios de réformes de réformes modérées modérées et ambitieuses et ambitieuses Scénario de base Réformes modérées Réformes ambitieuses (A) Croissance PTF hors mines 2%→1% 2%→1% Constant 2% (B) Croissance capital humain: 1.2%→0.4% 1.2%→1% 1.2%→2% •Scolarité attendue 9 ans 10 ans 12 ans •Qualité de l'éducation 0.5 score 0.6 score 0.65 score •Taux de survie des adultes 75% 75% 85% •Pas de retards de croissance 57% 70% 80% (C) Investissement 15%→17% du PIB 15%→20% 15%→28% •Privé 12%→13.5% 12%→14% 12%→18% •Public 3%→3.5% 3%→6% 3%→10% (D) Participation au marché du travail64% des 15-64 ans 69% en 2050 76% en 2050 •Femmes 62% 62% en 2050 70% en 2050 •Hommes 66% 76% en 2050 82% en 2050 (E) Cours miniers Scénario de prix élevés Cuivre $7,300→US$6,000/tm $7,300→$9,000/mt Cobalt $40,000/tm $40K/tm→$60,000/tm Source : Estimations des services de la Banque mondiale fondées sur le LTGM 46. L’économie de la RDC a besoin de réformes plus ambitieuses pour atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire (de la tranche inférieure/supérieure) d’ici 2050. Les simulations montrent que grâce à un programme de réformes ambitieuses, la RDC pourrait espérer un potentiel de hausse de croissance d’ici 2050. Dans le cadre d’une réforme ambitieuse combinant toutes les réformes, le taux de croissance moyen du PIB par habitant pour 2025-2050 passe d’un niveau de référence de 1,8 % à 4,4 % (5,6 % dans le secteur non minier), avec un RNB par habitant dépassant 1 600 USD d’ici 2050 (figure 1.21), permettant ainsi au pays d’atteindre le statut de pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) d’ici 2035. En revanche, le scénario de réformes modérées ne pourrait générer que 2,5 % de croissance du PIB réel par habitant en moyenne sur la période 2025-2050 (figure 1.20). Avec de tels niveaux de taux de croissance, il est peu probable que les objectifs de croissance – devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) d’ici 2035 et un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (PRITS) d’ici 2050 – soient atteints. 47. Un ensemble de réformes est nécessaire pour placer l’économie de la RDC sur la trajectoire de la diversification et de la transformation structurelle ; et une décomposition de la croissance selon chaque scénario met en évidence les facteurs sous-jacents. Chaque moteur de réforme, individuellement, stimulerait considérablement la croissance, mais une combinaison de réformes se renforcerait mutuellement et bénéficierait de la complémentarité, aboutissant ainsi à la meilleure trajectoire de croissance. Celle-ci pourrait être réalisée grâce à une combinaison de tous les moteurs de croissance (abordés individuellement ci-dessus) qui seraient mis en œuvre simultanément, à savoir (a) la PTF non minière, (b) la croissance du capital humain (taux de scolarisation, qualité de l’éducation et mesures de santé), (c) les investissements publics et privés, et (d) la participation au marché du travail. Dans le cadre du programme modéré de réformes, la croissance par habitant est principalement attribuable à la productivité non minière et à un investissement solide. Une décomposition de la croissance selon ce scénario de réforme montre le rôle important attribué à l’investissement public, qui culmine au début des années 2030 et stagne par la suite (figure 1.19). À long terme, la croissance 43 progressive est principalement due aux réformes dans le domaine du capital humain 32 et de la participation au marché du travail. Dans le scénario le plus ambitieux, l’ensemble des réformes génère environ 6,0 % de croissance d’ici 2050. Une décomposition de la croissance dans le cadre de ce scénario de réformes ambitieuses met en évidence l’importance accrue de la PTF non minière et du capital humain (éducation) pour favoriser la croissance à long terme, tout en préservant le rôle clé de la participation au marché du travail. Cependant, aucun scénario de réforme ne permettra d’atteindre l’objectif de la RDC consistant à devenir un pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure (PRITS) d’ici 2050. Néanmoins, des réformes ambitieuses peuvent presque doubler le revenu par habitant d’ici 2050 par rapport au scénario de référence. En conséquence, l’objectif PRITI pourrait être atteint d’ici 2035 dans le cadre du scénario le plus favorable de réformes avec des prix miniers élevés, associé à une règle budgétaire favorable qui réinvestirait toute la manne minière (figure 1.21) 33. Figure 1.18. Paquets de réformes a. Croissance de la PTF non minière, % b. Croissance du capital humain, % c. Participation au marché du travail, d. Investissement, Pourcentage de la population en âge de travailler Pourcentage du RIB Source : Estimations des services de la Banque mondiale fondées sur le LTGM 32 La RDC est loin derrière ses pairs pour la proportion d’enfants sans retard de croissance (voir Annexe 1.B, Figure A2) ; il existe donc un grand potentiel d’amélioration des mesures de santé. Cela permettrait de stimuler l’éducation, le capital humain et la croissance (voir panneau B de la Figure 1.18, la contribution de la santé à la croissance des soins de santé). 33 Des réformes modérées ne permettraient d’atteindre le statut de PRITI qu’en 2050. 44 Figure 1.19. Contribution de chaque réforme à la croissance incrémentale du PIB par habitant a. Réformes modérées, % b. Réformes ambitieuses, % Source : Estimations des services de la Banque mondiale Source : Estimations des services de la Banque fondées sur le LTGM mondiale fondées sur le LTGM 48. Il est essentiel de remédier aux faiblesses de la productivité totale des facteurs (PTF) pour renforcer la croissance potentielle en RDC et accélérer la diversification économique du pays au-delà du secteur minier. De nombreuses études ont révélé l’existence d’une relation positive entre diversification et productivité34. Cela explique également les différences de développement entre les nations. En effet, les différences entre les pays en matière de productivité totale des facteurs (PTF), c’est- à-dire l’efficacité de la combinaison des différents facteurs de production malgré des différences plus importantes dans les dotations en facteurs, expliquent dans une large mesure les différences entre les pays en matière de revenu par travailleur au niveau agrégé.35 Dans le contexte de la RDC, un ensemble de réformes porterait ses fruits immédiatement et conduirait à une croissance plus rapide de la PTF, contribuant de manière significative à sa transition ascendante d’un pays à faible revenu à un pays à revenu intermédiaire. Dans le scénario de réformes ambitieuses, la PTF passerait de 1 % en 2022 à 2,5 % dans la seconde moitié des années 2020 avant de se stabiliser à 2 %. Une réforme ambitieuse de la croissance de la PTF non minière stimulerait la croissance du PIB par habitant de 1,0 point de pourcentage d’ici 2035 et de 1,4 point de pourcentage à long terme (figure 1.19). De plus, des gains de productivité plus élevés dans le secteur non minier – principalement grâce à la productivité totale des facteurs (PTF), mais également au capital humain –, augmenteraient l’efficacité de l’investissement (c’est-à-dire le produit marginal du capital). 49. L’accumulation de capital a un impact important sur la croissance à moyen terme. Les simulations prévoient de forts effets indirects de l’accumulation induite de capital à moyen terme, compte tenu de ses retombées sur les secteurs productifs. En fait, l’effet de l’investissement est plus fort à moyen terme, mais s’estompe avec le temps (figure 1.19). Un vaste ensemble de réformes est nécessaire pour attirer d’importants IDE et renforcer l’investissement privé, tandis que des réformes majeures pourraient améliorer la mobilisation des revenus issus des ressources naturelles afin d’accroître la capacité 34Hall R,Jones C., « Why do some countries produce so much more output per worker than others? », 1999, Q J Econ 114:83- 116, et Rouvinen P., R&D–productivity dynamics: causality, lags and dry holes, (2002, J Appl Econ 5:123-156. 35Calderón César, Stimuler la productivité en Afrique subsaharienne : politiques et institutions pour promouvoir l'efficacité, 2021, Washington, DC : Banque mondiale. 45 d’investissement public. Les investissements publics et privés devraient atteindre 20 % du PIB avec des réformes modérées, et 28 % du PIB (18 % du PIB et 10 % du PIB, respectivement pour les investissements privés et publics) avec des réformes ambitieuses en 2028-2035. L’investissement dans le secteur non minier devrait augmenter considérablement en remplacement de l’investissement dans le secteur minier, suite à l’épuisement des réserves minérales et à la baisse des gains de productivité (figure 1.22). Ces réformes très ambitieuses auraient un impact considérable sur l’économie, augmentant le PIB par habitant à 6,0 % d’ici 2050, soit une augmentation de 4,0 points de pourcentage par rapport au scénario de référence (figure 1.20). Figure 1.20. Croissance du PIB par habitant, % Figure 1.21. Revenu intérieur brut par habitant, USD réels de 2020 Source : Estimations des services de la Banque Source : Estimations des services de la Banque mondiale fondées sur le LTGM mondiale fondées sur le LTGM 50. Les autorités de la RDC peuvent accélérer la croissance du capital humain en augmentant la qualité et la durée de scolarisation de leur population. Le LTGM montre que la durée de scolarité doit être poussée à 12 ans en cas de réformes ambitieuses, et à environ 10 ans si les réformes sont modérées. Les investissements dans l’éducation, bien que n’affectant pas directement la participation au marché du travail (PMT), conduisent néanmoins à une augmentation de la productivité de la main-d’œuvre (et donc des salaires). Le capital humain renforce l’efficacité de la main-d’œuvre dans le processus de production, augmentant ainsi la production par unité de travail. Les effets économiques d’un capital humain accru deviendront plus importants et conduiront à un pic de +1,4 point de pourcentage du PIB d’ici 2044 (et de +0,6 point de pourcentage du PIB d’ici 2050 dans le scénario de réformes modérées), à mesure que le secteur non minier se développe avec des gains importants grâce à l’amélioration de la santé et à une éducation de meilleure qualité et quantité. Pour la RDC, la PMT augmenterait progressivement de 64 % de la population en âge de travailler (PAT) dans le cadre du scénario de référence à 76 % (principalement des hommes) d’ici 2050. D. Une discussion sur la diversification et la transformation structurelle 51. Une stratégie de diversification réussie devrait réduire la dépendance à long terme à l’égard de l’exploitation minière pour les revenus et les opportunités d’emploi. Cela n’implique pas nécessairement l’exclusion totale de l’exploitation minière. Plusieurs économies avancées, comme la Norvège et le Chili, ont effectivement développé des économies fortes et résilientes aux côtés d’importants secteurs de ressources. Ce n’est pas encore le cas pour la RDC. Les réformes économiques ne parviennent pas à 46 promouvoir la croissance des secteurs à forte intensité d’emploi et qui réduisent la pauvreté. Le scénario de maintien du statu quo montre une trajectoire de diversification en « U » en RDC, avec un changement significatif au-delà de 2030. Le manque d’amélioration de la productivité et la diminution des réserves dans le secteur minier réduisent les rendements marginaux du capital, provoquant une réallocation des investissements vers les activités non minières. La contribution du secteur minier au PIB a été réduite de plus de moitié, passant de 30 % à 13,2 % entre 2030 et 2050 selon le scénario de référence. Cependant, dans le scénario de réforme, le chemin vers la diversification est encore plus rapide. Il convient de souligner que la diversification la plus rapide a lieu dans le scénario « le plus favorable », malgré les prix miniers élevés. En effet, les prix élevés augmentent les rendements marginaux, l’investissement et la production dans le secteur minier au cours des années 2030 (comme l’indique le panneau b de la figure 1.22), mais une production et une extraction plus intensives dans les années 2030 se traduisent par des réserves de cuivre rares et, par conséquent, par de faibles réserves de cuivre, et partant, une faible production dans les années 2040. Figure 1.22. Croissance économique et diversification en RDC : scénarios de référence et scénarios de réformes a. Croissance du PIB non minier, % b. Croissance du PIB minier, % c. PIB minier, % du total d. Réserves de cuivre, millions de tonnes métriques Source : Estimations des services de la Banque mondiale fondées sur le LTGM 47 52. Une analyse de la transformation structurelle en RDC confirme également la nécessité de réformes ambitieuses. Le LTGM-NR décompose l’économie de la RDC en deux secteurs économiques (minier et non minier), mais ne désagrège pas le secteur non minier en agriculture, industries manufacturières (non minière) et services. Néanmoins, cette analyse peut déduire les étapes de transformation structurelle selon les scénarios de croissance (du LTGM) sur la base de preuves empiriques. À partir d’un panel de pays africains et de leurs pairs, la figure 1.23 suggère une relation étroite entre les niveaux de revenu et la part du travail dans l’agriculture. En conséquence, un pays avec un revenu par habitant de la RDC de 540 USD en 2020 devrait avoir 35 % de l’emploi dans l’agriculture, ce qui est supérieur au niveau observé en RDC en 2020 (20 %). Mais pour les pays aux revenus plus élevés, comme le Botswana et l’Afrique du Sud, la régression prévoit une part agricole d’environ 5 % seulement. Étant donné que le RNB par habitant de la RDC sera de 880 USD en 2050 selon la trajectoire de croissance de référence du LTGM, la part agricole pertinente est d’environ 28 %, c’est-à-dire toujours supérieure aux 20 % actuels de la RDC. Ceci est conforme à l’hypothèse selon laquelle le scénario de référence a limité la transformation structurelle. Les parts de l’agriculture dans la valeur ajoutée brute (VAB) et l’emploi sont maintenues constantes parallèlement à la trajectoire de croissance de référence 36. Dans le scénario de réformes ambitieuses, le revenu par habitant en RDC atteindra 1 700 USD. À ce niveau de revenu, la régression selon la méthode des moindres carrés ordinaires (MCO) prévoit une part agricole de 18 %. Cela est également cohérent avec l’hypothèse selon laquelle la croissance de la PTF non minière s’accélère, passant de 1 % à 2 % dans le cadre du scénario de réformes ambitieuses. Figure 1.23. RNB par habitant versus part de l’emploi agricole Échantillon : ASS et pairs (intervalles de 5 ans de 1950 à 2020) Notes : Les pairs ambitieux sont la Bolivie, le Cameroun, l’Indonésie, le Kenya et le Nigeria. Les pairs structurels sont le Mozambique, la Zambie, l’Ouganda et Madagascar. Source : Estimations des services de la Banque mondiale 36Il est raisonnable de supposer une part constante de l’agriculture dans le scénario de référence, car les 20 % de la RDC sont déjà très faibles pour son stade de développement actuel. 48 1.6. Recommandations clés 53. Un ensemble complet de réformes en RDC pourrait entraîner une amélioration significative de la transformation économique du pays et de sa capacité à converger vers le statut de PRITI. En l’absence de réformes économiques, le revenu par habitant en RDC devrait croître lentement, de moins de 2 % en moyenne, avec un RNB inférieur à 1 000 USD d’ici 2050. Il existe un potentiel de croissance substantiel grâce aux réformes économiques, en particulier lorsqu’elles combinent différents moteurs. Des réformes modérées et ambitieuses peuvent stimuler la croissance du PIB pc de 2 à 4 % d’ici 2035 et de 3 à 6 % d’ici 2050. Pour cela, les réformes clés suggérées doivent être adaptées à une PTF, des investissements, un capital humain et une participation au marché du travail plus forts, compte tenu des délais à court et à plus long termes ci-dessous : ▪ Les réformes visant la croissance de la PTF non minière ont l’impact le plus fort et le plus durable sur la croissance ; ▪ Les réformes de l’investissement sont très importantes à court et moyen termes, mais elles s’estompent avec le temps ; ▪ Les réformes visant à accroître le capital humain, notamment en ce qui concerne la qualité et la quantité de l’éducation, ont un impact important sur la croissance, mais l’effet ne se fera sentir que dans les années 2040, lorsque les enfants les plus instruits et en meilleure santé entreront sur le marché du travail. Les réformes de la participation au marché du travail ont un effet important et persistant sur la croissance, mais cet effet devrait diminuer rapidement au-delà de 2050, à mesure que la RDC atteint des taux de participation élevés. 49 Références Aterido, Alvaro Gonzalez, Dino Merotto, Carly Petracco et Javier Sanchez-Reaza, « Democratic Republic of Congo : Jobs Dianostic », 2017, Banque mondiale, Washington, DC. Licence Creative Commons Attribution CC BY 3.0 IGO ; et DSP de la RDC (2018). Banque mondiale, Diagnostic systématique pays, 2018. Rapport n° 112733-ZR. Banque mondiale, Examen du développement territorial, phase 2, 2019. Banque mondiale, L’évolution des richesses des nations - Gérer les actifs pour le futur, 2021. Banque mondiale, La zone de libre-échange continentale africaine : effets économiques et redistributifs. Washington, DC : Banque mondiale. Bou-Habib Chadi et Ephraim Kebede, « Democratic Republic of Congo : Product and Market Concentration and the Vulnerability to Exogenous Shocks », 2016, Document de travail sur la recherche politique n° 7700. Washington, DC : Banque mondiale. Calderón César, Boosting Productivity in Sub-Saharan Africa : Policies and Institutions to Promote Efficiency, 2021, Washington, DC : Banque mondiale. FAO Stat 2021, https://www.fao.org/faostat/en/#data/QCL Fonds monétaire international (FMI), 4ème revue de la FEC pour la RDC du FMI. Fonds monétaire international (FMI), Timber legality Risk Dashboard : Democratic Republic of the Congo, 2022. Groupe de la Banque mondiale, Cadre de partenariat pays pour la République démocratique du Congo pour la période 22-26, 2022. Washington, DC : Groupe de la Banque mondiale. Société Financière Internationale (Mars 2022), Diagnostic du secteur privé (CPSD) : Creating markets in the Democratic Republic of Congo. For productive and sustainable exploitation of natural resources. Washington, DC : Groupe de la Banque mondiale. https://www.ifc.org/wps/wcm/connect/publications_ext_content/ifc_external_publication_site/publicat ions_listing_page/cpsd-democratic-republic-of-congo Hall R., Jones C., Why do some countries produce so much more output per worker than others?”, 1999. Q J Econ 114:83–116 et Rouvinen P., R&D–productivity dynamics : causality, lags and dry holes, 2002, J Appl Econ 5:123–156. Inogwabini B.I., Land Rights, Land Use Patterns and Soil Fertility Significantly Contribute to the Two-Decade Long Regional Conflagration in Eastern Congo. In International Yearbook of Soil Law and Policy 2019, Springer. Marivoet Wim ; Ulimwengu, John M. ; et El Vilaly, Mohamed Abd Salam, Understanding the Democratic Republic of the Congo’s agricultural paradox: Based on the eAtlas data platform, 2018, Addis-Abeba, Éthiopie : Institut international de recherche sur les politiques alimentaires (IFPRI). http://ebrary.ifpri.org/cdm/singleitem/collection/p15738coll2/id/132259 Programme alimentaire mondial, RDC, octobre 2022. 50 CHAPITRE 2 ENVIRONNEMENT DES AFFAIRES : S’ATTAQUER AUX PRINCIPAUX DEFIS ET CONTRAINTES REGLEMENTAIRES La ville minière de Kolwezi, capitale de la province du Lualaba au sud-est de la République démocratique du Congo (RDC). Octobre 2022. Par EdwinAlden. 1995. Sous une licence Creative Commons Chapitre 2 : Environnement des affaires : S’attaquer aux principaux défis et contraintes réglementaires Politiques visant les principaux goulets d’étranglement pour une croissance durable et inclusive Ce chapitre se concentre sur les réformes à court terme qui pourraient informer les responsables des politiques et fournit des recommandations principalement pour les réglementation s de l’environnement des affaires, la fiscalité et le cadre fiscal, considérés comme des contraintes clés pour un environnement des affaires favorable. Pour illustrer ces défis, il fournira également des recommandations pour les politiques spécifiques au secteur concernant le développement des chaînes de valeur de l’industrie minière et de l’agro-industrie. Plus de détails sur le développement des chaînes de valeur de l’exploitation minière (pour les batteries de véhicules électriques) et de l’agro-industrie (manioc), y compris les opportunités et défis, sont fournis dans les deux études de cas illustratives jointes au Mémorandum économique du pays. 2.1. Améliorer la réglementation des entreprises 54. Le déblocage d’une croissance tirée par le secteur privé dépend de la capacité d’un pays à mettre en place un environnement des affaires prévisible et transparent encourageant l’investissement productif. La réglementation des affaires répond généralement à un large éventail d’objectifs de politique publique, allant de la protection des droits de propriété à la sécurité des consommateurs, en passant par les préoccupations environnementales. Les réglementations imposent inévitablement des coûts aux entreprises, mais elles sont également essentielles pour remédier aux défaillances du marché, telles que les externalités négatives ou l’asymétrie de l’information. Les réglementations des affaires et la manière dont elles sont mises en œuvre façonnent l’environnement opérationnel d’une entreprise. Elles ont un impact sur le coût et le risque de l’activité, sur la composition des acteurs du marché et sur la nature de la concurrence. 55. Les résultats de l’Enquête 2019 sur la compétitivité de l’investissement mondial (GIC – Global Investment Competitiveness) montrent que les investisseurs classent l’environnement juridique et réglementaire d’un pays parmi les trois principaux facteurs influençant les décisions d’investissement , ce qui confirme l’importance pour les investisseurs d’environnements réglementaires transparents et prévisibles. En outre, comme les réformes de l’environnement des affaires réduisent involontairement les coûts des entreprises, celles-ci peuvent augmenter leurs bénéfices, qui peuvent être réinvestis pour accroître la part de marché, la production et l’emploi. Pour les investisseurs qui considèrent ces facteurs comme « extrêmement importants », les conditions juridiques et réglementaires des pays d’accueil ne viennent qu’après la stabilité politique et macroéconomique, et avant des considérations telles que le faible coût des intrants. 56. Par conséquent, la conception, la mise en œuvre et le suivi efficaces et efficients des réglementations affectant les affaires devraient constituer une priorité importante pour les autorités de la RDC. Ce chapitre donne un aperçu des principales caractéristiques de l’environnement des affaires 52 en RDC, en se basant principalement sur des comparaisons internationales mettant en lumière les contraintes majeures qui le caractérisent. 2.1.1. Perspective internationale 57. Par rapport à ses pairs régionaux et aspirationnels, la RDC est à la traîne en ce qui concerne la qualité de la réglementation et l’environnement concurrentiel. Les indicateurs internationaux fournissent des indications utiles sur la complexité réglementaire à laquelle les entreprises sont confrontées en RDC. Les indicateurs mondiaux de gouvernance (WGI – Worldwide Governance Indicators) collationnent des indicateurs de gouvernance agrégés et individuels pour plus de 200 pays et territoires sur la période 1996-2021, pour six dimensions de la gouvernance. La dimension « qualité de la réglementation » du WGI reflète la perception de la capacité des autorités à formuler et mettre en œuvre des politiques et réglementations saines permettant et encourageant le développement du secteur privé. La figure 2.1 montre une RDC à la traîne par rapport à ses pairs régionaux et aspirationnels et par rapport à la moyenne des pays d’Afrique subsaharienne en ce qui concerne la qualité de la réglementation. Cela suggère qu’à condition qu’elles s’engagent fermement, les autorités de la RDC disposent d’une large marge d’amélioration. En outre, l’environnement concurrentiel de la RDC mesuré par le Rapport sur la compétitivité mondiale se situe dans le 10 e centile parmi 141 économies. La RDC se classe 138e sur 141 économies dans le Rapport sur la compétitivité mondiale (tableau 2.1). Un examen plus approfondi des indicateurs repris dans ce classement révèle certains des défis auxquels sont confrontées les entreprises en RDC en raison de la complexité et de la lourdeur du cadre réglementaire du pays. Par exemple, la RDC est 110e sur 141 économies pour l’indicateur mesurant le poids de la réglementation publique, avec une valeur de 2,4 sur 7, nettement plus bas que tous ses pairs régionaux et aspirationnels qui obtiennent des scores entre 2,9 (Madagascar) et 4 (Indonésie). Figure 2.1. Qualité de la réglementation Zambie Ouganda Mozambique Madagascar Kenya Indonésie Congo, Rép. Congo, Rép. dém. Cameroun Bolivie 0 10 20 30 40 50 60 2021 2016 2011 Source : Indicateurs de gouvernance mondiale. Note : les valeurs les plus élevées correspondent à de meilleurs résultats. 53 Tableau 2.1. Rapport à la compétitivité mondiale : RDC La section suivante analyse les principales charges réglementaires pesant sur les entreprises à différents stades de leur cycle de vie, de l’entrée sur le marché à l’exploitation, et fournit des recommandations pour démêler certains des goulets d’étranglement identifiés. 2.1.2. Entrée sur le marché A. Enregistrement des entreprises 58. Entre 2014 et 2021, le Gouvernement de la RDC a mis en œuvre des réformes majeures pour améliorer l’enregistrement des entreprises, mais le manque d’opérationnalisation reste un problème. Un guichet unique de création d’entreprises (GUCE) a été créé. Il ra ssemble tous les acteurs impliqués dans le processus de création (impôts, RCCM, CNSS, numéro d’identité national, etc.) et fixe à 3 jours le délai de création d’une entreprise. À ce jour, le guichet unique n’est pas pleinement opérationnel et est peu présent à travers le pays, où seules cinq provinces sur 26 sont couvertes. En conséquence, les performances de la RDC en matière d’enregistrement des entreprises se sont détériorées au fil du temps, après les bons résultats obtenus à Kinshasa au cours des premières années qui ont suivi la mise en place du guichet unique. Selon une étude menée par l’ANAPI (Agence de promotion des investissements), il faut 40 jours pour créer une entreprise à Kinshasa et dans les 4 autres villes dotées d’un guichet unique, et deux fois plus de temps dans les autres villes de province. 59. La complexité du processus d’enregistrement des entreprises peut être un facteur contribuant au nombre relativement faible d’entreprises enregistrées en RDC. Selon les indicateurs du développement mondial, la densité de nouvelles entreprises du pays, mesurée par le nombre d’entreprises enregistrées pour 1000 personnes de 15 à 64 ans, est toujours restée inférieure à 1, ce qui est comparable à d’autres pays d’Afrique subsaharienne, y compris Madagascar, le pair aspirationnel de 54 la RDC, mais inférieur à d’autres comparateurs régionaux tels que la Zambie (1,1) et le Zimbabwe (2,5). La médiocre performance de la procédure d’enregistrement des entreprises est due aux facteurs suivants : • Le guichet unique ne fonctionne pas au mieux de ses capacités en raison d’un manque d’interconnexion avec certains services clés tels que la Direction générale des impôts (DGI) ou le ministère de l’Économie nationale, qui continuent à générer manuellement le numéro d’identification national. • Le faible niveau de numérisation des administrations impliquées dans l’enregistrement des entreprises. • Le manque d’autonomie financière du GUCE, qui dépend d’un budget que le ministère des Finances ne débourse souvent pas en totalité et en temps voulu. • La couverture limitée du guichet unique dans l’ensemble du pays. 60. Pour pallier ces problèmes, le Gouvernement de la RDC devrait s’efforcer de parvenir à une intégration complète des composantes du guichet unique, en assurant des interconnexions avec la DGI et le ministère de l’Économie. D’autres recommandations incluent la numérisation des processus des administrations impliquées dans le processus d’enregistrement, le renforcement de l’autonomie financière du GUCE en lui permettant de conserver les ressources qu’il génère (comme le prévoit son cadre juridique) et l’introduction d’un identifiant unique d’entreprise (fournissant les principales informations relatives aux entités juridiques, qui permettent aux autorités et aux entreprises d’identifier de manière unique les entités juridiques dans diverses transactions et interactions réglementaires). B. Licences d’exploitation et inspections 61. Le cadre juridique de la RDC pour l’octroi de licences aux entreprises est fragmenté et trop normatif. En RDC, toutes ou la plupart des activités commerciales nécessitent des autorisations préalables, et le nombre de licences nécessaires pour opérer n’est pas précisément connu.37 Les entreprises n’ont pas facilement et rapidement accès à des conseils clairs et complets sur les licences dont elles ont besoin, les mesures qu’elles doivent prendre et le temps qu’il faudra aux régulateurs pour examiner leurs demandes de licence et y répondre. De même, le cadre juridique des inspections n’est pas clair ; les chevauchements et doubles emplois sont fréquents. Ce manque de transparence conduit souvent à une importante discrétion dans l’application du régime d’inspection, ce qui entraîne des abus, de la corruption et de l’incertitude. Sur la base du nombre de taxes et de redevances imposées aux entreprises opérant en RDC, tant au niveau provincial que national, certains professionnels ont estimé à 300 le nombre de licences exigées du secteur privé en RDC. Un inventaire plus détaillé pourrait révéler un nombre plus élevé de licences. Au Kenya, un inventaire détaillé a révélé plus de 1300 licences commerciales et droits associés imposés par plus de 60 organismes publics et 175 collectivités locales, alors que les estimations initiales faisaient état de 300 licences. 62. Une réforme de l’octroi des licences est absolument nécessaire pour réduire la charge administrative pesant sur les acteurs du secteur privé opérant en RDC. La réforme de l’octroi de licences devrait se concentrer sur la rationalisation et la limitation de l’octroi de licences à un nombre réduit de secteurs et d’activités spécifiques où un contrôle préalable des entreprises est nécessaire pour sauvegarder les préoccupations économiques, sociales, de sécurité ou environnementales. En outre, des 37 L’octroi de licences aux entreprises englobe toutes les autorisations et procédures préalables applicables aux entreprises entrant sur le marché et commençant leurs activités après leur constitution et leur enregistrement auprès de l’administration fiscale. Les inspections d’entreprises se réfèrent aux activités de supervision pertinentes après l’entrée de l’entreprise sur le marché. 55 cadres fondés sur le risque imposant des approches de supervision et d’application proportionnelles, ciblées et cohérentes doivent être envisagés. Les avantages de ces approches sont les suivants : i) atteindre des objectifs de politique publique, tels que la promotion de la santé et de la sécurité de la population et la protection de l’environnement en ciblant les entreprises à haut risque ; ii) réduire la charge réglementaire pesant sur les entreprises à faible risque ; iii) faire un meilleur usage des ressources publiques limitées ; iv) renforcer la redevabilité, la transparence, la prévisibilité et la cohérence dans la prise de décision, en limitant les possibilités d’exercer un pouvoir discrétionnaire. 2.1.3. Opérations A. Paiement des impôts : nécessité de faciliter le processus 63. Le difficile environnement des affaires est caractérisé par un régime fiscal inefficace, complexe et non adapté. Les entreprises du secteur privé sont harcelées par les fonctionnaires, en particulier pour les paiements fiscaux, non fiscaux et parafiscaux. La plupart des investisseurs considèrent que ces paiements sont abusifs, discrétionnaires et ne reflètent pas les services publics rendus, ce qui augmente les coûts, fausse la concurrence et entrave l’esprit d’entreprise. Trois administrations d’État supervisent l’administration des recettes fiscales et non fiscales : la Direction générale des impôts (DGI), qui représente 48 % des recettes fiscales, la Direction générale des douanes et accises (DGDA), qui représente 25 % des recettes, et la Direction générale des recettes administratives judiciaires, domaniales et de participations (DGRAD), qui représente les 27 % restants des recettes publiques. En plus de ces entités, les autorités provinciales ainsi que d’autres entités territoriales décentralisées sont également habilitées à percevoir des impôts. Tableau 2.2 : Processus de paiement des impôts et charge globale UGA MDG ZMB MOZ CMR KEN BOL IND Moyenne COD ASS Pairs structurels Pairs aspirationnels Enquête auprès des entreprises Contrôle par un agent du fisc (% des entreprises) 92,9 75,5 56,1 60,3 70,1 70,6 Fréquence des inspections/réunions avec les agents du fisc 10,3 3,9 1,5 2,2 2,2 3,2 % des entreprises considérant les taux d'imposition comme 4,7 18,5 6,1 5,5 9,4 9,7 une contrainte majeure Doing Business - Réglementation Nombre de paiements 52,0 31,0 23,0 11,0 37,0 44,0 24,0 42,0 26,0 36,6 Durés (heures) 346,0 195,0 183,0 158,0 200,0 624,0 179,5 1025,0 191,0 280,6 Taux de contribution total 50,7 33,7 38,3 15,6 36,1 57,7 37,2 83,7 30,1 47,3 Indice après dépôt (0-100) 27,1 72,3 21,8 85,9 50,2 49,3 62,0 50,0 68,8 55,9 Classement de l'indicateur de paiement des impôts 180,0 92,0 134,0 17,0 127,0 181,0 94,0 186,0 81,0 131,0 64. Un examen plus approfondi du processus de réglementation fiscale place le paiement des impôts et le taux de cotisation total parmi les principaux défis auxquels les entreprises sont confrontées. Le tableau 2.2 résume le processus de réglementation fiscale et la charge fiscale sur la base de l’Enquête auprès des entreprises (EE) et de la méthodologie Doing Business (DB). En 2020, Doing Business a classé la RDC en 180e position pour l’indicateur « Paiement des impôts », loin derrière la plupart de ses pairs structurels ou aspirationnels. Le taux de contribution total, qui combine le niveau d’imposition 56 et la charge administrative, est particulièrement intéressant. 38 Il est estimé à 50,7 %, un taux nettement supérieur à celui de ses pairs et à la moyenne subsaharienne. L’indice des processus postérieurs à la déclaration de revenus39 semble particulièrement problématique en RDC avec un score de 27,07 sur 100, nettement inférieur à celui de tous les autres comparateurs. Le nombre élevé de paiements (52 impôts et taxes identifiés dans le rapport DB en 2019) et les délais relativement longs (346 heures par an) reflètent la lourdeur des procédures que les entreprises doivent accomplir pour se conformer à leurs obligations fiscales. En ce qui concerne les interactions avec l’administration fiscale, les résultats de l’EE 2014 indiquaient une incidence élevée d’entreprises inspectées chaque année par des agents du fisc (92,9 %), ce qui entraîne un nombre excessif de réunions avec ces derniers (environ une par mois). Dans l’ensemble, les impôts et taxes s’appliquant à la plupart des entreprises sont plus lourds que ne l’indique la base de données. Ainsi, plus récemment, la Fédération des entreprises du Congo (FEC) a rapporté l’existence en RDC de 246 taxes et impôts différents au niveau central (principalement administrés par la DGRAD) et de 347 autres taxes et impôts requis par les entités sous-nationales (provinces). 65. Le Gouvernement de la RDC devrait amplifier ses efforts pour réduire les procédures et les délais de déclaration et de paiement des impôts d’une part, et pour réduire davantage le nombre de perceptions non fiscales d’autre part, comme recommandé dans la section 2.3 qui suit. Pour assurer l’efficacité de ces réformes, le Gouvernement devrait clarifier les raisons pour lesquelles les différents impôts sont prélevés, qui y est assujetti, qui les perçoit et comment ils sont calculés, ainsi que leur base juridique. B. Sécurité juridique et judiciaire 66. L’une des principales contraintes pesant sur l’environnement des affaires concerne la sécurité juridique et judiciaire des investissements et des opérations pour les entreprises, ce qui englobe la protection des investissements, les droits de propriété et l’exécution des contrats. Par rapport à ses pairs régionaux et aspirationnels, la RDC n’arrive pas à protéger les investisseurs minoritaires.40 Les droits de propriété et le caractère exécutoire des contrats posent des défis importants à l’investissement, en particulier pour les nouveaux IDE cherchant à entrer dans le pays. Malgré les garanties constitutionnelles de protection de la propriété pour les investisseurs privés, les faits suggèrent que ces protections restent largement sur le papier, avec des registres incomplets et des litiges juridiques récurrents sur les transactions foncières. 67. Ces dernières années, le pays a réalisé des réformes notables dans le domaine de la sécurité juridique des investissements et des opérations des entreprises, notamment en ce qui concerne la justice commerciale. En 2016, la RDC a créé treize tribunaux de commerce dans les principales villes d’affaires de la RDC, dont Kinshasa, Lubumbashi, Matadi, Boma, Kisangani et Mbuji -Mayi. Ces tribunaux sont conçus pour être dirigés par des juges professionnels spécialisés dans les affaires commerciales et 38 Le taux de cotisation total est une simulation incluant les impôts, les accises et les droits prélevés sur une entreprise de taille moyenne au cours d’une année donnée, ainsi que la mesure de la charge administrative liée au paiement des impôts et cotisations et au respect des procédures postérieures à la déclaration de revenus. Les impôts et cotisations mesurés comprennent l’impôt sur le profit ou le revenu des sociétés, les cotisations sociales et les taxes sur le travail payées par l’employeur, les taxes foncières et de transfert de propriété, l’impôt sur les dividendes, l’impôt sur les plus-values, la taxe sur les transactions financières, les taxes sur la collecte des déchets, les taxes sur les véhicules et les routes, et toutes les autres petites taxes ou redevances. 39 Pour la RDC, l’indice des processus postérieurs à la déclaration de revenus a deux composantes – le temps nécessaire pour se conformer à une correction de l’impôt sur le revenu des sociétés et le temps nécessaire pour effectuer une correction de l’impôt sur le revenu des sociétés. Doing Business 2019. 40 L’environnement des affaires de la RDC se classe lamentablement 176e sur 180 pays en ce qui concerne la protection des investisseurs minoritaires. 57 existent parallèlement au système judiciaire. Ces réformes ont également été soutenues par la participation ou l’adhésion officielle du pays à divers accords internationaux, notamment le traité OHADA et le CIRDI, ce qui renforce son engagement à améliorer l’environnement des affaires. 68. Malgré ces améliorations, la résolution des litiges à l’aide du système judiciaire reste extrêmement lente et peu fiable, ce qui conduit les acteurs d u secteur privé à ne pas s’y fier du tout. La résolution des litiges peut durer en moyenne 610 jours, et les résultats sont souvent très défavorables, avec une perte moyenne de 80 % de la valeur en jeu, comme le souligne le rapport Doing Business 2020. Le bon fonctionnement des tribunaux de commerce a été entravé par un manque de personnel qualifié, des ressources financières limitées, des systèmes obsolètes, des infrastructures inadéquates et la réticence de certaines juridictions de la RDC à reconnaître pleinement le droit et les institutions de l’OHADA. 69. Le Gouvernement devrait en priorité accélérer la modernisation et le renforcement des tribunaux de commerce, améliorer la formation des juges, assurer la publication des jugements et mettre en place des systèmes de gestion des dossiers. Ces mesures contribueront à améliorer la transparence dans la gestion des affaires judiciaires ainsi que l’environnement des affaires en RDC. Une nouvelle loi visant à renforcer et à moderniser la justice commerciale pour l ’étendre à un plus grand nombre de provinces est en attente d’approbation par le parlement. Le Gouvernement devrait promouvoir des méthodes alternatives, avec plus de flexibilité, de rapidité et de contrôle par les partis, pour rendre la « justice » dont l’État est responsable. 70. Une nouvelle loi réglementant les mécanismes de résolution alternative des litiges (RAL) découlant de l’exécution des contrats a été adoptée en 2019 avec pour objectif de rationaliser la résolution des litiges commerciaux et d’appo rter une plus grande clarté juridique. Comme dans d’autres juridictions, en RDC, les mécanismes RAL sont enracinés dans le désir des entreprises (elles-mêmes plaideuses régulières) de trouver des mécanismes de résolution des litiges plus axés sur les affaires, mieux adaptés, et ne subissant pas les excès et échecs des tribunaux. La RAL a été introduite pour la première fois en RDC en 2004 par la FEC. Le mécanisme a été reproduit deux ans plus tard par une autre initiative menée par le secteur privé. 71. Après 20 ans, l’arbitrage doit encore être accepté et adopté par le secteur privé opérant en RDC. Au 31 mai 2023, seuls 25 cas avaient été instruits et résolus. La faute en est à plusieurs facteurs, notamment la méconnaissance des règles d’arbitrage par les acteurs clés (avocats, chefs d’entreprise ou équipes juridiques), et l’absence dans les contrats de dispositions acceptant l’arbitrage comme voie de recours en cas de litige. Pour améliorer cette situation et rendre l’arbitrage plus efficace dans la réso lution des litiges commerciaux, il faut renforcer les capacités des acteurs concernés, améliorer la crédibilité des centres d’arbitrage existants, mettre en place des incitations ou des mesures juridiques facilitant le recours à l’arbitrage, et promouvoir une meilleure coordination ou une fusion entre les deux centres d’arbitrage existants. C. Réforme de la gouvernance 72. En RDC, où la capacité des pouvoirs publics et des institutions est faible, les plans de réforme n’atteignent souvent pas leurs objectifs en raison d’un manque de contrôle efficace et de mécanismes de coordination médiocres pour assurer la mise en œuvre. Par exemple, le cadre institutionnel des réformes de l’environnement des affaires est fragmenté et les mécanismes de coordination interinstitutionnelle sont faibles ou inexistants. L’ANAPI, qui dépend du ministère du Plan, la « Cellule du 58 climat des affaires » de la présidence et, dans une moindre mesure, la « Cellule du climat des affaires » du cabinet du Premier ministre, ont des mandats qui se chevauchent en ce qui concerne la coordination et la supervision de la mise en œuvre des réformes de l’environnement des affaires. Dans certains cas, elles prennent des initiatives concurrentes, ce qui entraîne un manque d’efficacité et des retards dans l a mise en œuvre des réformes. Le mécanisme institutionnel des réformes pourrait être modernisé grâce à la structure à trois niveaux commune à la plupart des économies qui ont réformé avec succès leur environnement des affaires : i) Des groupes de travail techniques identifient les contraintes auxquelles les entreprises sont confrontées et élaborent des solutions. ii) Des comités de surveillance de haut niveau ou des conseils public-privé définissent les priorités du programme de réforme et maintiennent l’élan de la réforme. iii) Une équipe spécialisée est désignée pour diriger la coordination de l’ensemble des efforts de réforme. 2.2. Promouvoir l’accès au numérique, à l’électricité et au financement 2.2.1. Accès au numérique : faciliter le développement du secteur numérique 73. Près de la moitié de la population de la RDC n’a pas accès au haut débit, et le pays a des prix de détail parmi les plus élevés et un taux d’adoption parmi les plus faibles de l’Afrique. La pénétration du haut débit est actuellement de 12,8 %, sur la base des abonnements mobiles uniques,41 avec des écarts d’accès marqués entre les hommes et les femmes. Les réseaux mobiles existants couvrent environ la moitié de la population, avec des taux de couverture 3G et 4G de 54 % et 42 % respectivement. La couverture 4G est fortement limitée à Kinshasa, Lubumbashi et Goma, avec des disparités régionales dans la couverture globale du réseau. La RDC a actuellement les prix de détail du haut débit les plus élevés en Afrique : le prix d’un panier de 2 Go de données mobiles uniquement est équivalent à 10,34 % du revenu national brut (RNB),42 nettement plus que l’objectif de 2 % d’accessibilité de la Commission des Nations Unies sur le haut débit. 43 74. Actuellement, la RDC ne dispose d’aucun réseau national de fibre optique capable de distribuer de manière rentable l’internet à haut débit dans tout le pays. Combiné à l’insécurité et au manque d’infrastructure de soutien, le terrain vaste et difficile de la RDC rend très coûteux le déploiemen t du réseau de fibre optique, ce qui a entraîné de nombreuses années de sous-investissements dans un marché du haut débit très peu développé. Cette situation a une incidence sur le coût et la qualité des services offerts aux consommateurs, ce qui contribue à la faiblesse de la demande. Les liaisons de transmission par fibre optique existantes sont concentrées le long du corridor ouest-sud (Muanda-Kinshasa- Lubumbashi) et du corridor ouest-est (Muanda-Kinshasa-Goma). Le déblocage d’investissements supplémentaires pour développer de nouvelles liaisons par fibre optique sera essentiel pour accroître la concurrence et renforcer la résilience du réseau, en particulier dans la région centrale et septentrionale, face à l’augmentation des risques climatiques et des pannes de réseau. 41 GSMA Intelligence, 2022. 42 Paniers de prix TIC de l’UIT. 43 https://www.broadbandcommission.org/advocacy-targets/2-affordability/ 59 75. Le pays ne dispose pas des nombreuses bases numériques et analogiques nécessaires pour mener une transformation numérique transversale. Cela constitue un obstacle important à la création d’un secteur numérique robuste, piloté par le secteur privé, et à l’exploitation du potentiel de création d’emplois et de croissance économique lié à l’utilisation productive des technologies basées sur les données.44 Le Gouvernement a adopté en 2019 le Plan national du numérique (PNN) – qui doit faire l’objet d’une révision intermédiaire en 2025 –, mais de nombreuses initiatives envisagées ne se sont pas concrétisées en raison de la rareté des financements publics. La RDC manque donc encore de nombreux éléments de base pour faire progresser la transformation numérique, notamment l’accès universel au numérique, l’infrastructure publique numérique (IPN) pour faciliter la prestation des services numériques, y compris l’identification numérique, et les compétences numériques. 76. À l’avenir, les priorités pour le développement du secteur devraient inclure des investissements importants dans l’infrastructure de réseau pour combler les lacunes existantes, complétés par des efforts pour stimuler la demande de services numériques et la poursuite de la réforme réglementaire. Les recommandations pour les politiques peuvent être classées en trois grandes catégories : a. Faciliter l’investissement dans le développement du secteur : En 2019, la Commission Haut débit de l’ONU a estimé que 8 à 9 millions de dollars US seraient nécessaires pour atteindre l’accès universel à au haut débit en RDC. Dans le même temps, le PNN visait à construire plus de 30 000 km supplémentaires de réseau en fibre optique.45 Un soutien supplémentaire est nécessaire pour créer un environnement plus propice à l’investissement dans les réseaux, en particulier le long de certaines routes dorsales moins rentables dans les zones rurales. Ce soutien devra être complété par des efforts visant à améliorer les conditions pour les investisseurs, en facilitant un dialogue réglementaire plus fort et plus transparent, en concevant des partenariats public-privé avec des incitations appropriées pour les investissements, et en formant une main-d’œuvre qualifiée pour l’entretien et l’exploitation de l’infrastructure. b. Développer l’infrastructure publique numérique (IPN) pour catalyser l’expansion des services numériques : Accroître l’accès à des services numériques attrayants et perti nents au niveau local serait essentiel pour stimuler une utilisation productive plus large de la technologie numérique, avec des effets positifs sur la création d’emplois, l’innovation et la croissance économique. Cet objectif peut être atteint en investissant dans une IPN partagée et transversale comprenant des plateformes d’interopérabilité fiables, un système d’identification fondamental et des systèmes de paiement numérique pour former les éléments d’un « pilier numérique » permettant l’émergence de services électroniques transactionnels, d’innovations fondées sur les données et d’entreprises numériques. c. Poursuivre la réforme réglementaire et le dialogue : L’adoption de la loi de 2020 sur les télécommunications crée une plateforme pour accroître les investissements du secteur privé, mais il reste encore des moyens d’améliorer la gouvernance sectorielle afin d’accroître l’efficacité du marché. En particulier, les cadres fondamentaux pour l’interconnexion, l’octroi de licences et l’opérationnalisation du Fonds de service universel doivent encore être élaborés. Par ailleurs, la prolifération des taxes et redevances parafiscales a engendré un régime fiscal opaque, créant lui aussi des problèmes pour le secteur privé. La récente adoption du Code du numérique émet un signal positif pour le développement futur de nombreux éléments de l’IPN mentionnés ci -dessus, mais plusieurs textes d’application doivent encore être rédigés, et les nombreux nouveaux organismes prévus dans 44 Begazo, Tania, Moussa P. Blimpo et Mark A. Dutz. 2023. Digital Africa : Technological Transformation for Jobs. Washington, DC : Banque mondiale. 45 Toutefois, les dernières consultations avec le Gouvernement font état d’un besoin total estimé à plus de 50 000 km de réseau de fibres optiques. 60 le cadre du code imposeront à l’administration un fardeau important pour accroître sa capacité et efficacité de gouvernance et de gestion du secteur. 2.2.2. Accès à l’électricité : améliorer l’approvisionnement énergétique 77. Selon l’enquête 2014 auprès des entreprises, l’approvisionnement électrique est peu fiable et coûteux, et le problème persiste aujourd’hui. La chose n’est pas surprenante étant donné la fréquence et l’imprévisibilité observables des coupures de courant dans la partie limitée du pays connectée au réseau. Le réseau hydraulique du pays lui-même a un potentiel de production d’électricité estimé à 13 % de la capacité de production mondiale, capable de couvrir l’ensemble de la demande du continent africain, mais seuls 19 % de la population y a accès, avec une répartition inégale entre les ménages riches (24 %) et pauvres (14 %), et entre les zones rurales (11 %) et urbaines (26 %). Pendant de nombreuses décennies, l’approvisionnement en électricité a été assuré par l’entreprise publique Société nationale d’électricité (SNEL), qui s’est vu retirer son monopole de production et de distribution en 2013, permettant à des dizaines d’entreprises privées d’entrer dans le secteur. 78. L’insuffisance de l’offre énergétique est encore renforcée par la lourdeur des procédures d’obtention de l’électricité. Le pays est classé 177e sur 180 pays en ce qui concerne les procédures, les coûts et le temps requis pour qu’une nouvelle entreprise obtienne une connexion électrique permanente dans ses locaux (Doing Business, 2020). Par rapport à ses pairs structurels, la RDC est longtemps restée en dessous de la moyenne pour l’accès à l’électricité. Le pays a occupé les positions 38 à 45 durant la période 2010-2020 dans le classement Doing Business, loin derrière le Mozambique et la Zambie, mais très proche de son voisin l’Ouganda. Par rapport à ses pairs aspirationnels, la RDC reste loin derrière depuis 2010. 79. Les réformes de libéralisation du secteur de l’énergie ont commencé en 1994, les plus récentes datant de 2021. Depuis 2021, les réformes comprennent la numérisation du système de paiement des factures, l’établissement d’objectifs pour assurer la fiabilité de l’approvisionnement en énergie, et la création du system national de dispatching. À court terme, le Gouvernement devrait s’assurer que les organes de régulation sont opérationnels en les dotant de ressources suffisantes et renforcer la mobilisation d’investissements susceptibles de réaliser le potentiel de la production électrique congolaise. 61 2.2.3. Accès au financement : promouvoir l’inclusion financière 80. Le médiocre environnement des affaires est également entravé par un secteur financier peu profond et une offre de crédit peu diversifiée, en particulier pour les MPME. Selon une enquête de la Banque mondiale de 2017, 62 % des MPME estiment avoir des besoins financiers non satisfaits, compris entre 50 000 et 500 000 dollars US, ce qui est très élevé par rapport à certains pays pairs de la région.46 Le ratio crédit privé par rapport au PIB (7,7 % à la fin de 2021) est l’un des plus faibles du continent (voir la figure 2.2 ci-dessous). Selon les institutions financières, l’encours des prêts aux MPME ne représente que 18 % de l’encours total des prêts, une faible proportion que les institutions de crédit justifient par le fait que 90 % des prêts peu performants seraient généralement ceux accordés aux MPME. Les prêts aux entreprises sont donc principalement utilisés pour financer les besoins à court terme des entreprises et les activités commerciales (exportation et importation). À l’exception de la microfinance, le crédit est principalement limité aux grandes entreprises ou aux entreprises offrant des garanties en espèces, ou encore aux entreprises bénéficiant de garanties offshore. La révision de la loi sur le leasing, un outil de financement spécifiquement adapté aux MPME pour l’acquisition d’équipement, est en cours. En l’absence d’un cadre juridique ad hoc, il n’y a pas non plus d’affacturage, de fina ncement participatif (crowdfunding) ou de financement participatif sous forme de prêts de particuliers (crowdlending), et très peu de financement sous forme de capital-risque ou de capital-investissement. Dans une certaine mesure, cette faible performance reflète également deux caractéristiques intrinsèques de l’économie qui la distinguent de beaucoup de ses comparateurs : une part plus faible du secteur secondaire dans l’économie et une plus grande informalité des entreprises. Figure 2.2. Évolution du crédit privé Pourcentage du PIB Source : base de données de la Banque mondiale 81. Malgré des taux d’inflation élevés, le coût réel du crédit est exorbitant. En effet, les taux d’intérêt sont en moyenne de 17 % pour les banques (pouvant aller jusqu’à 22-23 % pour les financements à court terme) et de 23 à 25 % en moyenne et jusqu’à 60 % pour les IFM. Les banques expliquent généralement ces taux élevés par des coûts élevés d’exploitation et de risque. En outre, les règles 46 Comme le Burundi (16 %), la République centrafricaine (16 %), la Côte d’Ivoire (7 %), la Guinée (18 %) et le Rwanda (16 %). 62 prudentielles de la banque centrale (BCC) imposent une réévaluation semestrielle de tout bien hypothéqué (pour vérifier que sa valeur couvre le prêt accordé), dont le coût est supporté par le client. Le niveau insuffisant des garanties (hypothèques, garanties financières et sûretés), voire leur absence lors de la demande de crédit, conduit également ces institutions financières à ne pas accorder de crédit aux MPME.47 La mise en place d’un registre des garanties mobilières améliorerait l’accès au crédit pour les MPME qui pourraient utiliser leurs actifs mobiliers comme garantie lors d’une demande de prêt. 82. Des réformes ont été initiées ces dernières années pour soutenir le système financier congolais et promouvoir l’inclusion financière. Ces réformes comprennent l’adoption en 2014 de l’Acte uniforme de l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), qui élargit la gamme des biens pouvant être utilisés comme garantie, et la création en 2015 d’un registre des crédits pour améliorer l’accès à l’information sur le crédit. En 2021, le Gouvernement a commencé à envisager de mettre à la disposition des institutions financières des informations sur la solvabilité des emprunteurs et de créer un bureau de crédit qui pourrait faciliter l’accès au financement. Malheureusement, aucun progrès n’a encore été réalisé dans la mise en œuvre de ces réformes en raison du problème de ressources évoqué par la Banque centrale du Congo.48 Étant donné le rôle important joué par le manque de garanties dans l’impossibilité d’accéder au crédit, les actions critiques comprennent l’amélioration du système de garanties pour le financement, notamment les droits de propriété, le crédit-bail et les bureaux de crédit privés, et la fourniture de garanties de crédit partielles et de lignes de crédit à long terme (DSPP de la RDC, 2022). 83. Le segment du crédit aux MPME reste largement inexploité en raison des lacunes de l’infrastructure de crédit et de l’absence de politiques publiques adéquates. Les principales contraintes de financement pour les MPME sont : i) une asymétrie de l’information sur le crédit, due à l’inadéquation du système d’information sur le crédit – il n’existe pas de bureau de crédit privé, et le registre public des crédits ou « centrale des risques » (qui ne couvre que 1,5 % de la population adulte et dont la base de données n’est pas fiable) doit être modernisé ; ii) des institutions et des politiques publiques insuffisantes (y compris l’absence d’un mécanisme de partage des risques de crédit) ; et iii) un mécanisme insuffisant de résolution des problèmes d’insolvabilité et de crédit. Les autres contraintes sont : i) un faible capital bancaire couplé à un taux élevé de créances douteuses ; ii) un accès limité aux produits spécifiquement destinés aux PME, tels que l’affacturage et le crédit-bail, l’absence de financement à long terme, voire l’absence de projets bancables limités due au manque d’états financiers et à un niveau élevé d’informalité (lié à un système fiscal particulièrement complexe et coûteux pour les entreprises). 84. Il existe plusieurs entités publiques dans le domaine du financement des MPME, mais il n’y a pas de cadre interministériel formel de suivi, de coordination et d’évaluation. Plusieurs institutions publiques mènent des actions en faveur du financement des MPME en RDC : le Fonds congolais de garantie de l’entrepreneuriat (FOGEC), le Fonds national de microfinance (FNM), la Société de développement financier (SOFIDE), et le Fonds de promotion de l’industrie (FPI), pour ne citer que les principales. Bien qu’il existe des relations bilatérales entre les différents ministères pour certains projets, un cadre de coordination plus formalisé est nécessaire pour i) mieux contrôler les risques de chevauchement ; ii) mesurer l’additionnalité de ces programmes ; et surtout iii) maximiser la mobilisation 47 Le montant des garanties exigées est élevé (souvent 150 % du montant du prêt demandé en moyenne, selon les institutions financières). 63 des fonds issus des institutions financières privées. Par ailleurs, alors que le Gouvernement envisage la création d’une banque publique d’investissement pour le financement à moyen et long terme des entreprises, il est impératif d’envisager i) de mettre en place une gouvernance professionnelle et indépendante ; ii) de veiller à attirer systématiquement les co-investissements privés (au lieu de les évincer) ; et iii) de mettre en place des indicateurs de performance financière, économique, sociale, environnementale, etc. afin de justifier l’utilisation des fonds publics. Cette entité devrait également être supervisée par la BCC. 85. Les mécanismes de partage des risques tels que les systèmes de garantie partielle du risque de crédit destinés aux MPME ne sont pas très répandus en RDC. Contrairement à celles de nombreux pays, les institutions de crédit de la RDC ont peu recours à ce type de garantie. Quelques institutions financières utilisent les fonds de garantie internationaux ou africains, mais de manière très limitée, en raison de leurs conditions d’éligibilité restrictives et de leur coût élevé. Le FOGEC, créé en 20 20, est tout juste opérationnel, tandis que le processus d’adhésion au FAGACE (Fonds africain de garantie et de coopération économique) n’est pas encore achevé. La situation est en train de changer, car le Gouvernement vient de donner à FPM SA (un établissement de crédit privé) les moyens financiers nécessaires pour lancer une garantie partielle de portefeuille avec l’assistance financière et technique de la Banque mondiale à travers le projet TRANSFORME. 86. Deux autres politiques publiques pourraient avoir un impact sur l’accès au crédit des MPME : la simplification de la fiscalité et la mise en place de Centres de gestion agréés. Selon diverses organisations patronales, dont la Fédération des entreprises congolaises (FEC), la fiscalité des entreprises est d ’une complexité et d’un coût tels qu’ils découragent les entrepreneurs de sortir de l’informalité (privant ainsi un nombre important de structures productives de l’accès au crédit). En outre, les institutions financières notent qu’elles rencontrent des difficultés pour évaluer les risques des MPME, car très souvent, les états financiers ne sont pas certifiés. La mise en place de Centres de gestion agréés et d’un bureau de crédit privé pourrait aider les institutions de crédit à surmonter partiellement ces difficultés (notamment par la notation). 2.3. Remédier à l’inefficacité de la fiscalité et de la politique fiscale : contraintes et défis 87. Cette section présente brièvement les principaux défis et contraintes de la politique fiscale de la RDC que le Gouvernement devrait aborder en priorité, car ils constituent des goulets d’étranglement importants pour le développement économique. Les figures et tableaux49 montrent que le système de recettes publiques est clairement sous-performant (1), en raison de certaines déficiences des systèmes de recettes fiscales (2) et non fiscales (3), mais aussi en raison des faiblesses de l’administration fiscale 49Les données présentées par l’OCDE diffèrent légèrement de celles fournies par le FMI pour la RDC. Pour des raisons de comparaison, nous avons opté pour les données de l’OCDE. La moyenne africaine est constituée des données des 31 pays africains ayant participé au projet de l’OCDE sur les statistiques des revenus. 64 (4). Les principales recommandations pour les politiques, formulées sur différents horizons temporels (court, moyen et long terme), sont résumées dans la dernière sous-section (5). 2.3.1 Un système de recettes publiques peu performant 88. Par rapport à ses pairs africains, la RDC affiche un très faible ratio global ressources publiques/PIB. Le total des ressources publiques (recettes fiscales et non fiscales et dons) en pourcentage du PIB pour 2020 (9,6 %) est inférieur à la moitié de la moyenne africaine (22,8 %), et assez loin derrière celui des pays pairs, tels que le Rwanda, le Cameroun, le Ghana ou la Côte d’Ivoire, à l’exception du Nigeria. Ce ratio global a atteint son maximum en 2014 (16,1 %) et diminue régulièrement jusqu’en 2020 (9,6 %). Les prévisions du FMI pour 2021 montrent toutefois une nette augmentation, puisque le ratio devrait atteindre 13,7 % du PIB. Figure 2.3 : Recettes totales et dons (en % du PIB) Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr 89. Les ratios recettes fiscales/PIB et recettes non fiscales/PIB de la RDC sont faibles et à la traîne par rapport à ceux des pays pairs. Les recettes fiscales totales en pourcentage du PIB (ratio recettes fiscales/PIB) pour 2020 sont également inférieures à la moitié de la moyenne africaine (16 %), et assez loin derrière les pays pairs (figure 2.4). Ce ratio n’a pas évolué de manière significative au cours des dix dernières années et a même eu tendance à diminuer lentement entre 2012 (avec 10,8 %, le pic suivant l’introduction de la TVA) et 2020 (avec 7,3 %).50 Les prévisions du FMI pour 2021 montrent toutefois une légère augmentation avec un ratio qui devrait atteindre 8,1 % du PIB. En tout état de cause, la RDC fait partie du groupe des pays africains dont le ratio impôts/PIB est inférieur à 10 % (avec le Congo, la Guinée équatoriale, le Niger et le Nigeria). Le FMI considère qu’un ratio impôts/PIB inférieur à 16 % est trop faible pour qu’un pays puisse financer les dépenses supplémentaires requises pour atteindre les objectifs 50 La crise de la COVID-19 a eu un impact important sur un pays riche en ressources naturelles tel que la RDC. Les fortes fluctuations des prix des minerais en 2020 ont affecté le PIB de la RDC et le ratio moyen impôts/PIB a diminué de 0,4 p.p. entre 2019 et 2020. 65 de développement durable (ODD).51 Par ailleurs, la part des recettes non fiscales dans le PIB a presque été divisée par trois en dix ans (de 6,2 % en 2010 à 2,3 % en 2020) et représente aujourd’hui près d’un tiers de la moyenne africaine (6,8 %) (figure 2.5). Les dons d’États étrangers ou d’organisations internationales52 constituent la principale source de recettes non fiscales de la RDC (0,9 %), légèrement devant les revenus de la propriété (0,81 %), qui comprennent les loyers et redevances sur les ressources naturelles (telles que les redevances pétrolières ou minières) et les télécommunications. Cette situation peut sembler paradoxale puisque, selon les estimations de la Banque mondiale sur la contribution des ressources naturelles à la production économique, la RDC est un pays pour lequel les ressources naturelles du sous-sol ont contribué à hauteur d’au moins 17 % du PIB à la production économique en 2020. 53 Figure 2.4 : Recettes fiscales totales Figure 2.5 : Total des recettes non fiscales, Pourcentage du PIB subventions comprises Pourcentage du PIB Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr 1) Les données présentées par l’OCDE diffèrent légèrement de celles fournies par le FMI pour la RDC. Pour des raisons de comparaison, nous avons opté pour les données de l’OCDE. 2) La moyenne africaine est constituée des données des 31 pays africains ayant participé au projet de l’OCDE sur les statistiques des revenus. Tableau 2.3 : Structure des recettes non fiscales en RDC (2020) Pourcentage du Montant en Pourcentage total des recettes millions de CDF du PIB non fiscales Dons 930,571 44 0,90 Revenus de la propriété 828,625 39 0,81 Ventes de biens et services 267,178 13 0,26 Amendes, pénalités et confiscations 80,584 3,5 0,08 Recettes diverses et non identifiées 11,821 0,5 0,01 Source : Auteurs ; Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022. 51 Gaspar, V. et coll. (2019), Fiscal Policy and Development : Human, Social, and Physical Investments for the SDGs, https://www.imf.org/en/Publications/Staff-Discussion-Notes/Issues/2019/01/18/Fiscal-Policy-and- Development-Human-Social- and-Physical-Investments-for-the-SDGs-46444 (consulté le 30 mars 2023). 52 Cela comprend l’aide budgétaire, l’aide alimentaire, les transferts de capitaux, les transferts courants, les subventions de projets, les subventions de programmes, l’allègement de la dette internationale, etc. 53 Banque mondiale (2022), Indicateurs du développement dans le monde, https://data.worldbank.org/ (consulté le 10 mai 2023) ; https://stat.link/98rud7 66 2.3.2 Les défis du système de recettes fiscales 90. La sous-performance du système de recettes publiques en RDC est en partie due aux déficiences du système fiscal, qui est très fragmenté (1). La fiscalité tant directe (2) qu’indirecte (3) reste en effet largement inefficace en ce qui concerne la mobilisation des recettes, tandis qu’en même temps, le système fiscal comprend des exonérations fiscales très généreuses (4). A. Fragmentation de la législation fiscale 91. Les sources juridiques du système fiscal congolais n’ont jusqu’ici pas encore été codifiées. Deux ordonnances-lois fixent la nomenclature des impôts, droits, taxes et redevances des provinces, des ETD et du pouvoir central54 qui rendent compte de l’ensemble de la fiscalité applicable en RDC, mais les sources juridiques sous-jacentes (les règles d’assiette, de taux, de calcul, de recouvrement, de procédures, etc.) sont dispersées dans le système juridique. La raison en est, en partie, le modèle de décentralisation fiscale adopté en RDC, qui superpose deux niveaux d’imposition (pouvoir central et province s) avec un certain degré d’autonomie. La répartition des compétences fiscales entre le pouvoir central et les provinces est définie dans la Constitution, mais reste complexe et incertaine, et elle entraîne des difficultés de coordination. Une meilleure coordination entre les autorités fiscales centrales et provinciales par l’institutionnalisation d’un dialogue permanent serait en effet bénéfique pour la RDC. 92. Le processus de codification a été lancé. La fiscalité de l’État est basée sur un « code » des impôts qui n’est en fait qu’une simple compilation de textes juridiques adoptés en 1969 à propos des impôts réels, des impôts cédulaires sur le revenu, de la TVA (qu’une loi de 2010 a mis à la place de la taxe sur le chiffre d’affaires) et des taxes exceptionnelles sur les rémunérations des expatriés. Un code de procédure fiscale distinct a été adopté en 2003. Des dispositions fiscales spécifiques (à l’État) existent également dans les législations sectorielles (mines, pétrole, forêts, zones économiques spéciales, investissements, etc.) À la fiscalité de l’État s’ajoute la fiscalité provinciale, composée d’une multitude d’impôts, de droits et de taxes de nature fiscale et parafiscale, dont les sources juridiques sont également dispersées dans des centaines de textes juridiques différents. Cette fragmentation des sources juridiques de la fiscalité contribue sans aucun doute à la complexité du système fiscal, et une codification de cette législation s’impose d’urgence. Le Gouvernement s’est en effet engagé dans un processus de codification de la législation fiscale et non fiscale avec l’aide de la Banque mondiale et du FMI respectivement. Cette réforme est déjà en cours, puisque des commissions ont déjà été mises en place et travaillent actuellement. Les nouveaux codes sont attendus pour 2024. 93. Le système fiscal est clairement peu performant. Les tableaux et figures ci-dessous montrent que par rapport à la moyenne des pays africains, le système fiscal de la RDC présente un écart fiscal important, au niveau de la fiscalité tant directe qu’indirecte. Même si la part des recettes des taxes sur les biens et services (principalement la TVA et les droits d’accises) dans les recettes fiscales totales de la RDC (51 %) se situe dans la moyenne africaine (50,4 %) et montre que le système fiscal congolais ne repose pas uniquement sur la fiscalité indirecte, ces recettes (3,7 % du PIB) représentent la moitié de la moyenne des pays africains (8 % du PIB), et sont loin de celles de tous les pays de notre étude comparative (à l’exception du Nigeria). Il s’agit d’un point très préoccupant, car en RDC, les recettes fiscales dépendent principalement de la fiscalité indirecte sur les biens et services. La même conclusion s’applique aux recettes de l’impôt direct sur les personnes physiques et morales : même si elles représentent une part importante des recettes fiscales totales (33,1 %), leur rendement (2,4 % du PIB) est inférieur à la moyenne 54Ordonnance-loi n° 13/001 du 23 février 2013 fixant la nomenclature des impôts, droits, taxes et redevances des provinces et des entités territoriales décentralisées ainsi que leurs modalités de répartition. 67 africaine (6,2 % du PIB), mais aussi à celle de la majorité des pays de l’étude comparative. Des études spécifiques récemment réalisées sur cette question confirment cette situation, notamment en ce qui concerne la TVA et l’impôt sur le revenu.55 Tableau 2.4 : Structure des impôts (en % du total et du PIB) – 2020 RWA UGA NGA RDC GHA CAM CIV Afrique (31) En % des recettes fiscales Revenus et bénéfices (IRP+IRS) 41,3 36,2 49,1 33,1 40,5 28,7 12,3 39,1 Sécurité sociale 6,2 – 11,5 11,1 8,0 11,7 11,6 8,1 Salaires 0,0 0,0 0,8 2,7 0,0 1,2 11,6 0,8 Propriété 1,8 – – 0,8 – 0,9 2,9 1,7 Biens et services (TVA et accises incluses) 51,6 63,1 32,5 51,0 51,1 58,5 60,9 50,4 Autres taxes 0,0 0,7 6,0 1,2 0,0 2,7 0,7 1,3 En % du PIB Revenus et bénéfices (IRP+IRS) 7,0 4,0 2,7 2,4 5,5 3,7 1,6 6,2 Sécurité sociale 1,0 – 0,6 0,8 1,1 1,0 1,6 1,5 Salaires 0,0 0,0 0,0 0,2 0,0 0,2 1,6 0,1 Propriété 0,2 – – 0,1 – 0,1 0,4 0,3 Biens et services (TVA et accises incluses) 8,7 7,0 1,8 3,7 6,9 7,5 8,2 8,0 Autres taxes 0,0 0,1 0,3 0,1 0,0 0,3 0,1 0,2 Source : OCDE, Statistiques des revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr B. Principales questions relatives à la fiscalité directe a) Considérations générales 94. Un système multicédulaire obsolète. La fiscalité directe est actuellement régie par l’Ordonnance- Loi n° 69/009 du 10 février 1969 qui institue un système d’impôt sur le revenu multicédulaire incluant les revenus locatifs, les revenus de capitaux mobiliers et les revenus professionnels. Le système fiscal est purement territorial et exonère les revenus de source étrangère. Comme dans tout système cédulaire, chaque catégorie de revenus a ses propres règles d’assiette et taux. Les revenus d’entreprise réalisés par les particuliers et les sociétés sont imposés au titre des revenus professionnels selon un ensemble de règles communes. 95. Une performance stagnante en termes de revenus. Les recettes totales tirées des revenus et des bénéfices dans la structure fiscale fluctuent au fil des ans, mais restent régulièrement bien en dessous de la moyenne africaine (voir figure 2.7). Le ratio des recettes tirées des revenus et des bénéfices par rapport au PIB suit une tendance similaire, avec des variations significatives d’une année à l’autre, mais toujours une mobilisation des recettes globalement décevante. L’imposition des revenus et des bénéfices est donc inefficace en RDC. 96. Efforts de réforme en cours. Le Gouvernement travaille à un projet de réforme de la fiscalité directe avec le soutien de la Banque mondiale. Ce projet – qui a été validé par le Gouvernement et devrait sous peu être soumis au parlement – a tenté de remédier aux lacunes de la législation actuelle de l’impôt 55Leif Jensen et Grégoire Rota-Graziosi, Étude sur les écarts fiscaux en République démocratique du Congo , Washington DC : Banque mondiale, 2017. 68 sur le revenu, en introduisant une séparation claire entre l’impôt sur le revenu des particuliers (IRP) et l’impôt sur le revenu des sociétés (IRS). En ce qui concerne l’imposition sur le revenu des personnes physiques, la réforme devrait suivre la double approche de l’impôt sur le revenu, généraleme nt considérée comme une bonne pratique.56 En effet, à l’exclusion de l’impôt locatif qui est un impôt provincial, le projet prévoit d’imposer séparément les revenus du capital et les revenus du travail (emploi/entreprise) dans deux barèmes différents auxquels un taux unique est appliqué (taux faible sur les revenus du capital et barème progressif sur les salaires et les revenus de l’entreprise). Cette approche est à la fois plus simple et plus équitable. Figure 2.6 : Revenus et bénéfices totaux, 2015- Figure 2.7 : Revenus et bénéfices totaux, 2015-2020 2020 Pourcentage du PIB Pourcentage des recettes fiscales Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr b) Imposition des personnes physiques 97. Une performance en baisse en ce qui concerne de mobilisation des recettes. Après un pic en 2014-2016, le ratio de l’impôt total sur le revenu et les bénéfices des personnes physiques par rapport au PIB est en baisse constante et reste nettement inférieur à la moyenne africaine, avec 1,1 % en 2020. Ce faible ratio par rapport au PIB n’est pas unique en Afrique, mais la tendance à la baisse est préoccupante et il n’y a aucun signe d’amélioration. 56 Banque mondiale, Étude sur la politique fiscale en Afrique de l’Ouest – Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire et Togo. Options de réforme dans une perspective sous-régionale, Washington DC : Banque mondiale, 2019. 69 Figure 2.8 : Total des impôts sur le revenu et les bénéfices des personnes physiques, 2015-2020 Pourcentage du PIB Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr 98. La structure et les taux de l’imposition individuelle sont conformes aux p ratiques modèles. La RDC a récemment simplifié et rationalisé le système d’imposition des salaires, qui ne comporte plus que quatre tranches, conformément aux pratiques modèles. Les revenus du travail sont soumis à une retenue à la source selon un barème progressif comme suit : ▪ 3 % pour les revenus de 0 à 1 944 000 francs congolais (CDF) ▪ 15 % pour les revenus de 1 944 001 CDF à 21 600 000 CDF ▪ 30 % pour les revenus compris entre 21 600 001 et 43 200 000 CDF ▪ 40 % pour les revenus supérieurs à 43 200 000 CDF ▪ L’impôt dû est plafonné à 30 % du revenu total du contribuable. 99. Le potentiel fiscal lié à l’imposition des salaires n’est pas négligeable, dans la mesure où l’administration fiscale éprouve encore des difficultés à identifier le niveau de rémunération et à évaluer les avantages en nature qui font souvent l’objet de pratiques abusives. Il existe un régime fiscal spécifique pour les rémunérations des expatriés (IERE) mis en place pour décourager les employeurs d’embaucher du personnel expatrié. Les employeurs de salariés expatriés sont soumis à un impôt de 25 % sur la rémunération des expatriés (10 % pour les sociétés minières). Ce régime fiscal discriminatoire ne semble pas justifié et devrait être supprimé, car il n’est pas propice à un bon climat des affaires. 100. Les revenus locatifs sont gérés par une administration décentralisée, alors que le potentiel de l’impôt foncier est sous-exploité. L’impôt sur les revenus locatifs est géré au niveau des autorités fiscales provinciales. Les revenus locatifs bruts sont imposés à un taux forfaitaire. Chaque province détermine son propre taux (par exemple, 22 % dans la province de Kinshasa). Cette situation est très inhabituelle, car la gestion des revenus locatifs nécessite des ressources importantes et un niveau élevé d’expertise (en matière de collecte et d’audit) dont les collectivités locales ne disposent pas toujours. Il est préférable de réintégrer les revenus locatifs dans l’imposition des revenus du capital par l’État et de transférer au x provinces l’imposition du capital immobilier (au lieu des revenus immobiliers), dont le potentiel fiscal n’est pas suffisamment exploité. Plus précisément, l’impôt foncier s’applique aux constructions et terrains situés en RDC, avec de nombreuses exonérations en fonction du statut du propriétaire. La structure des 70 taux d’imposition est complexe et varie en fonction de la nature du bien et du rang de la localité. L’imposition du capital immobilier est donc très compliquée, tant pour le contribuable que pou r l’administration fiscale, ce qui en fait en fin de compte une source inefficace de recettes fiscales. Un ensemble simple de règles d’imposition et un cadastre fiscal sont des éléments essentiels à l’efficacité de l’impôt foncier. c) Imposition des sociétés 101. Les règles relatives à l’impôt sur les personnes physiques et à l’impôt sur les sociétés se chevauchent. L’imbrication des règles relatives à l’impôt sur les personnes physiques et à celui sur les sociétés dans l’IPR rend très difficiles la lecture et la compréhension du régime fiscal applicable à chaque catégorie de contribuables. Un ensemble séparé et spécifique de règles relatives à l’IRS est essentiel pour une meilleure compréhension du régime de l’impôt sur les sociétés. 102. Les taux d’imposition des revenus professionnels et non professionnels sont conformes aux pratiques modèles et à ceux des pays pairs. Les revenus professionnels et non professionnels sont imposés à un taux unique et proportionnel de 30 % (avec un impôt minimum sur le revenu de 1 % du chiffre d’affaires annuel). Tableau 2.5 : Taux d’IRS dans quelques pays Pays Taux Rwanda 30 % Ouganda 30 % Nigeria 30 % pour les grandes entreprises ; 20 % pour les entreprises moyennes ; 0 % pour les petites entreprises RDC 30 % Ghana 25 % Sénégal 30 % Côte d’Ivoire 25 % Source : Auteurs 103. Les performances de la mobilisation des recettes sont extrêmement fluctuantes en ce qui concerne l’impôt sur le revenu des sociétés. Bien que le taux d’imposition de l’impôt sur le revenu soit conforme aux normes internationales, les recettes correspondantes fluctuent fortement ces dernières années, tant au niveau de la structure fiscale qu’en termes de PIB. Il est clair que les recettes de l’IRS dépendent largement du contexte international, et la forte baisse de 2020 peut être attribuée à la pandémie de Covid-19. Cependant, les recettes globales de l’IRS sont nettement inférieures à la moyenne africaine, et l’IRS est donc également peu performant en RDC . 71 Figure 2.9 : Recettes de l’IRS, 2015-2020 Figure 2.10 : Recettes de l’IRS, 2015-2020 Pourcentage des recettes fiscales Pourcentage du PIB Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr d) Un problème d’étroitesse de l’assiette fiscale 104. La faible mobilisation des recettes est due à l’étroitesse de l’assiette fiscale. Les taux d’imposition des particuliers et des entreprises ne sont pas significativement inférieurs à ceux appliqués par les pays pairs. Cependant, la fiscalité directe génère moins de recettes en RDC, en partie à cause d’une définition très étroite de l’assiette fiscale. Des mesures spécifiques devraient être envisagées pour résoudre ce problème. 105. Les exonérations fiscales généreuses et souvent non justifiées, ainsi que les lacunes en matière d’imposition des revenus constituent un obstacle à un accroissem ent de la mobilisation des recettes. Le Gouvernement devrait revoir le système fiscal de la RDC afin de limiter, dans la mesure du possible, les exonérations fiscales non justifiées. L’évaluation des dépenses fiscales doit être l’outil de référence à cet égard. Il est essentiel de combler les lacunes en vue de l’imposition complète des revenus des personnes physiques. Les plus-values des personnes physiques devraient être soumises à l’impôt en RDC. 106. Les instruments juridiques ne permettent pas de protéger l ’assiette de l’impôt sur les sociétés. La protection de la base d’imposition contre la fraude et l’évasion fiscales est une préoccupation majeure, à la suite des travaux de l’OCDE dans ce domaine et du cadre inclusif (Projet BEPS). Il s’agit notamment de plafonner la déductibilité de certaines dépenses qui font souvent l’objet d’abus (systèmes de sous - capitalisation, accords sur les prix de transfert, etc.) Par ailleurs, la RDC accuse un retard important en matière de coordination fiscale régionale et internationale. Elle n’est pas membre du Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales, piloté par l’OCDE, qui compte à ce jour 168 États membres, dont la majorité des pays du continent africain.57 De même, la RDC n’a pas demandé à adhérer à la Convention sur l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale, élaborée conjointement par l’OCDE et le Conseil de l’Europe, qui ne compte pas moins de 147 juridictions, dont de nombreux pays africains.58 La RDC ne dispose donc pas d’instruments juridiques suffisants pour échanger des informations avec d’autres pays et protéger efficacement son assiette fiscale de l’évasion fiscale internationale. 57 https://www.oecd.org/tax/transparency/ 58 https://www.oecd.org/tax/exchange-of-tax-information/convention-on-mutual-administrative-assistance-in-tax-matters.htm 72 107. Le haut degré d’informalité est un obstacle majeur à la mobilisati on des recettes fiscales. Il existe des régimes fiscaux spécifiques pour les micros et petites entreprises qui ont été introduits pour faciliter la formalisation des petits opérateurs économiques, étant donné le degré élevé d’informalité dans l’économie (plus de 60 % des opérateurs sont informels). Ces régimes suivent les pratiques modèles régionales, mais n’atteignent que partiellement leur objectif. Le nombre de contribuables enregistrés reste très faible par rapport à la population active et aux opérateurs économiques travaillant dans le pays. Malheureusement, l’évasion fiscale est devenue une norme bien établie en RDC, et cela est dû à la perte de crédibilité de l’administration fiscale, qui peine à faire respecter les règles fiscales sur le terrain. L’administration fiscale devrait mettre en place une stratégie globale de contrôle fiscal des petits opérateurs économiques, en partenariat avec les collectivités locales, et organiser l’échange d’information avec les institutions sociales (CNSS, INPP et ONEP ) pour identifier, par recoupement, les activités informelles échappant à l’impôt. D’autres initiatives pourraient également être menées, comme la mise en place d’un réseau de centres de gestion agréés, qui a fait ses preuves dans l’UEMOA, et auquel l’adhésion est obligatoire pour accéder à des marchés publics ou à des services spécifiques. 108. Les autorités de la RDC doivent renforcer les efforts de réforme en cours. Comme mentionné ci- dessus, un projet de loi sur l’impôt sur le revenu (IRP et IRS) est en cours d’adoption et devrait remédier à ces lacunes. Cette réforme devrait permettre d’augmenter le niveau des recettes fiscales, à condition que la gestion de ces impôts par l’administration fiscale soit renforcée de manière concomitante. C. Principales questions relatives à la fiscalité indirecte a) Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) 109. La performance de la TVA est également en baisse au fil des ans. La TVA a été introduite en RDC en 2010 (mais n’est entrée en vigueur qu’en janvier 2012), remplaçant la taxe sur le chiffre d’affaires. Depuis 2012, le ratio des recettes de la TVA par rapport au PIB diminue régulièrement, passant de 4,2 % du PIB en 2012 à 2,3 % en 2020. Récemment, en 2022, il a été estimé à 2,8 % du PIB, ce qui reste nettement inférieur à la moyenne africaine de 4,5 %. De tous les pays pairs, seul le Nigeria affiche une performance inférieure à celle de la RDC. Figure 2.11 : Recettes de la TVA dans quelques pays, 2012-2020 Pourcentage du PIB Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022. 73 110. Les taux d’imposition et le seuil de TVA sont similaires à ceux des pays pairs. Il existe actuellement trois taux de TVA en RDC : le taux normal de 16 %, un nouveau taux réduit de 8 % pour une liste de produits de base, et un taux de 0 % pour les exportations et les transactions assimilées. Par conséquent, la faible mobilisation des recettes ne peut être attribuée à des taux de TVA peu élevés. Le seuil de TVA est de 80 millions de CDF, ce qui n’est pas non plus très élevé. Tableau 2.6. Taux et seuil de TVA dans quelques pays Pays Seuil (en dollars US)* Taux Rwanda 17 800 18 % / 0 % Ouganda 40 200 18 % / 0 % Nigeria 70 000 7,5 % RDC 35 000 16 % / 8 % / 0 % Ghana 17 900 15 % Sénégal pas de seuil 18 % / 10 % (secteur du tourisme) Côte d’Ivoire 41 000 pour les services 18 % / 9 % 82 000 pour les marchandises Source : Codes des impôts. * Le taux de conversion est celui en vigueur au 26 mai 2023. 111. Le système de TVA est dysfonctionnel. En RDC, le système de TVA ne fonctionne pas bien, et ce pour les raisons suivantes : ▪ La faiblesse de l’administration de la TVA due aux autorités fiscales, qui n’arrivent ni à contrôler la liste des contribuables ni à vérifier le respect des obligations fiscales des contribuables (retenue à la source et reversement de la TVA au Trésor). Dans ces conditions, le contrôle fiscal de la TVA ne peut être qu’inefficace. ▪ La faiblesse du contrôle aux frontières des biens de consommation importés, qui entraîne une perte importante de TVA qui devrait s’améliorer grâce à la récente introduction aux frontières de systèmes informatiques tout nouveaux numérisant complètement le processus et comprenant une solution de portail électronique, en plus d’un guichet unique aux principales frontières, par l’administration douanière et tous les organismes opérant aux frontières. ▪ L’élargissement de la liste des produits bénéficiant d’une réduction ou d’une exonération fiscale en raison de chocs externes (crise de la Covid et crise ukrainienne), mais aussi du lobbying exercé par les différents groupes concernés par ces avantages. Au-delà de la simple perte de recettes due à l’exonération, les autorités fiscales ont des difficultés à maîtriser l’assiette de la TVA, en raison de la multiplicité des taux d’imposition, ce qui accroît la charge de gestion de cet impôt. ▪ Les difficultés de l’État à rembourser les crédits de TVA, qui réduisent encore le rendement de celle - ci. Le renforcement de la gestion de la TVA et la limitation des exonérations sont les seuls moyens d’améliorer la mobilisation des recettes de la TVA. b) Accises 112. La performance des droits d’accises est également en baisse. Avec un ratio des recettes des droits d’accises par rapport au PIB de 0,6 en 2020, la RDC est également peu performante en ce qui 74 concerne les droits d’accises. Depuis 2013, ce ratio est en baisse constante et est maintenant bien en dessous de celui de tous les pays pairs et de la moyenne africaine de 1,5. Figure 2.12 : Recettes des droits d’accises dans quelques pays, 2012-2020 Pourcentage du PIB Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022. 113. Le nombre des droits d’accises est élevé, mais les accises ne sont ni rationalisées ni correctement ciblées. Les taux d’accises varient énormément, de 5 % à 80 %. En outre, certains produits taxés sont très inhabituels (dentifrices, déodorants corporels, savons, shampooings, etc.) Les accises devraient être recentrées sur les produits traditionnellement taxés, tels que le tabac, les boissons alcoolisées et non alcoolisées, les produits de décoloration ou de défrisage des cheveux, l’essence, les voitures ou les télécommunications, qui représentent 90 % des recettes totales des accises. Le taux de taxation de ces produits pourrait augmenter pour compenser la suppression de toutes les autres accises, voire pour augmenter les recettes totales des accises. En fait, la majorité des pays de la sous-région ont beaucoup moins de droits d’accises 59 qui fournissent autant ou plus de recettes fiscales. 114. Des efforts sont actuellement déployés pour rationaliser les droits d’accises grâce à l’introduction du système de suivi des droits d’accises. Ce système améliorera le suivi et le recouvrement. Parallèlement, la DGDA travaille sur un plan de rationalisation visant à supprimer les droits d’accises sur certains produits. D. Dépenses fiscales 115. Les dépenses fiscales de la RDC sont nombreuses et excessivement généreuses. Une contrainte commune à la mobilisation des recettes est l’utilisation incontrôlée d’avantages fiscaux à des fins de politique économique et sociale. Ces mesures peuvent être conjoncturelles (par exemple pour lutter contre l’inflation) ou structurelles (pour attirer les investissements ou encourager une activité particulière). Ces avantages fiscaux entraînent des pertes de recettes (appelées « dépenses fiscales ») qui devraient théoriquement être compensées par un gain correspondant de croissance, d’emploi, etc. La 59Le nombre des droits d’accises est limité et strictement contrôlé dans les États membres de l’UEMOA, de la CEDEAO, de la CEMAC et de la CAE, qui ont harmonisé les droits d’accises au sein de leur communauté. 75 perte de recettes pouvant être importante, il est important d’évaluer le coût budgétaire de ces mesures, mais aussi leur impact socioéconomique pour s’assurer de leur pertinence. C’est pourquoi l’évaluation des dépenses fiscales fait désormais partie de la bonne gestion des finances publiques et constitue un exercice imposé à la plupart des États. La RDC a mis en place de nombreux régimes fiscaux dérogatoires, notamment dans le code des investissements, le code minier et le code des hydrocarbures. Elle a également mis en place de nombreux avantages fiscaux à des fins sociales et économiques. L’introduction d’exonérations de toute nature (généralement la TVA) devrait être l imitée autant que possible, car leurs effets sont très incertains et peuvent avoir un coût considérable en termes de pertes de recettes fiscales. Par exemple, l’adoption récente d’une ZES60 ou le nouveau taux de TVA réduit (à 8 %) pour certains produits essentiels peuvent avoir un effet négatif sur la mobilisation des recettes nationales. Tableau 2.7. Dépenses fiscales en RDC (2019-2021) 2019 2020 2021 En millions de FCD 2 222,4 1 916,1 2 142,5 En pourcentage du PIB 2,7 2,1 1,9 En pourcentage des recettes totales 26,6 24,3 16,9 Recettes fiscales 2 198,7 1 907,7 2 135,1 Impôt sur le revenu 102,5 58,2 128,3 Taxes sur les biens et services 1 859,7 1 574,0 1 620,1 En millions de FCD TVA 1 182,0 1 137,0 1 027,7 Accises 677,7 437,0 592,4 Échanges internationaux 236,5 275,5 386,7 Recettes non fiscales 23,7 8,4 7,4 Total 100,0 100,0 100,0 Recettes fiscales 98,9 99,6 99,7 Impôt sur le revenu 4,6 3,0 6,0 En pourcentage du Taxes sur les biens et services 83,7 82,1 75,6 total TVA 53,2 59,3 48,0 Accises 30,5 22,8 27,7 Échanges internationaux 10,6 14,4 18,0 Recettes non fiscales 1,1 0,4 0,3 Source : Autorités de la RDC et calculs des équipes de la Banque mondiale 116. L’évaluation des dépenses fiscales est incomplète. La RDC a déjà réalisé – avec l’aide des PTF – des évaluations annuelles des dépenses fiscales, mais ce travail n’est pas suffisamment complet : par exemple, la perte de recettes liée aux exonérations fiscales accordées dans les secteurs minier et pétrolier n’a pas encore été évaluée. 2.3.3 Les défis du système des recettes non fiscales A. Taxes non fiscales et parafiscales 117. La pression des charges non fiscales et parafiscales est particulièrement élevée en RDC . Alors que les recettes fiscales restent faibles, les opérateurs économiques sont soumis à une multitude de charges non fiscales et parafiscales qui pèsent lourdement sur l’économie congolaise. En effet, en plus de 60Décret n° 20/004 du 5 mars 2020 (d’application de la Loi n° 14/022 du 7 juillet 2014 fixant le régime des zones économiques spéciales en RDC). 76 l’impôt sur le revenu et de la TVA, qui relèvent de la DGI, une entreprise peut être soumise à plus de 400 taxes parafiscales collectées par la DGRAD pour les entités territoriales décentralisées (ETD) et à plus de 300 prélèvements supplémentaires collectés par les provinces. Il s’agit là d’une caractéristique assez unique du système fiscal congolais. Ces taxes sont généralement de faible montant et sont justifiées par un service rendu par l’État ou une entité décentralisée ou locale, mais dans de nombreux cas, elles ne le sont pas (par exemple, sur les marchandises importées ou exportées). De plus, ces prélèvements n’ont pas toujours de base légale et peuvent être perçus de manière discrétionnaire, ce qui soumet les opérateurs économiques à une forte insécurité fiscale. Ils peuvent ainsi décourag er l’investissement et nuire gravement au climat des affaires, qui nécessite un minimum de simplicité et prévisibilité. Bien que toutes ces taxes ne représentent qu’une petite partie des recettes totales (0,3 % du PIB), elles ont pris une dimension disproportionnée en ce qui concerne la conformité et la charge financière pour les PME et oivent être remaniées. En 2022, le Gouvernement s’est engagé, avec le soutien du FMI, à rationaliser et codifier dans un document juridique unique ces charges non fiscales et parafiscales. C. Contribution des secteurs extractifs aux recettes non fiscales Figure 2.13 : Recettes tirées de l’extraction des ressources, 2015-2020 Pourcentage du PIB Source : Statistiques de l’OCDE sur les revenus en Afrique, 2022 ; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr 117. Une faible contribution des secteurs extractifs aux recettes non fiscales. La contribution des secteurs extractifs aux recettes nationales est très faible par rapport à celle d’autres pays riches en ressources, tels que la République du Congo, la Mauritanie, la Guinée équatoriale, le Nigeria ou encore le Cameroun, où les rentes et redevances issues de l’extraction des ressources équivalent, en moyenne, à 6,4 % du PIB. Le manque de diversification de l’économie congolaise peut également expliquer cette faible mobilisation des recettes. Par exemple, en RDC, la richesse générée par les forêts représente près de 10 % du PIB, mais ne contribue pas de manière significative aux recettes nationales. Certains pays africains (le Cameroun ou le Ghana, par exemple) ont introduit dans leur législation fiscale des taxes, redevances et droits spécifiques sur l’exploitation forestière. Ces exemples peuvent également être une source d’inspiration pour la RDC. 77 Encadré 2.5. Principales taxes, redevances et droits du secteur forestier au Ghana Redevances basées sur la superficie : ▪ Redevance sur les droits de coupe (TRF – Timber rights fee) : redevance de concession payée par les titulaires d’un contrat d’utilisation du bois (TUC – timber utilization contract), établi à travers un processus d’appel d’offres. Au départ, il s’agissait d’une redevance annuelle, mais celle-ci a été remplacée en 2017 par une redevance unique. ▪ Frais de location de terres (contrat de location de surfaces) : payés aux propriétaires fonciers par les détenteurs d’un TUC. Ces droits sont perçus par la Commission des forêts qui verse ces loyers aux propriétaires fonciers par l’intermédiaire du Bureau de l’administrateur des stool lands (terres de chefferies). ▪ Distribution : Pour les forêts situées dans les réserves, 60 % reviennent à la Division des services forestiers de la Commission des forêts et 40 % aux autorités traditionnelles et aux pouvoirs publics locaux. Pour les forêts extérieures aux réserves, la totalité va aux autorités traditionnelles et aux pouvoirs publics locaux. Redevances basées sur le volume : ▪ Droits de coupe : payés sur le volume du bois récolté dans le cadre d’un TUC. Ces droits doivent être révisés tous les trimestres, sur la base des prix du bois franco à bord (FOB). ▪ Distribution : 50 % sont conservés par la Commission des forêts et 50 % sont redistribués aux autorités traditionnelles et aux pouvoirs publics locaux. Taxes et prélèvements sur les exportations de bois : ▪ Taxes à l’exportation : elles sont basées sur la valeur facturée des exportations, à un taux de 1,5 % depuis 2007 ; des taxes spéciales et des prélèvements sur les primes à l’exportation ont été introduits en 2014 pour les espèces menacées de grande valeur et pour les exportations de bois d’œuvre dépassant une certaine épaisseur (différents taux) ; l’exportation de bois d’œuvre séché à l’air est soumise à un prélèvement de 10 %. ▪ Distribution : 0,5 % du prélèvement « de base » sur l’exportation est destiné au Fonds de développement des plantations forestières ; toutes les autres recettes sont conservées par la Division du développement de l’industrie du bois (TIDD) de la Commission des forêts. 118. Les défis liés aux secteurs extractifs. La RDC rencontre d’importantes difficultés pour taxer les secteurs extractifs, principalement en raison d’exonérations fiscales de longue date ou de contrats entre le pays et les industries extractives profitant aux élites locales.61 En outre, la RDC ne dispose pas des institutions indispensables pour garantir que les ressources naturelles participent pleinement à la croissance du pays, étant donné que les pouvoirs et les compétences sont fragmentés entre différents ministères et administrations publiques. La rationalisation de la taxation des secteurs extractifs pourrait être bénéfique à la mobilisation des recettes nationales. 2.3.4. Les défis liés à l’administration des recettes 119. L’existence parallèle de différentes administrations fiscales entrave l’application et la mise en application de la législation et l’action coordonnée. En RDC, la gestion des impôts de l’État est partagée entre la Direction générale des impôts (DGI), la Direction générale des recettes administratives (DGRAD) et la Direction générale des douanes et accises (DGDA). Même s’il est de bonne pratique de séparer la gestion des droits de douane et des impôts de l’État, confier la gestion des prélèvements non fisc aux à 61Odd-Helge Fjeldstad, Morten Bøås, Julie Brun, Bjørkheim Frida et Margrethe Kvamme, Building tax systems in fragile states. Challenges, achievements and policy recommendations , Rapport du CMI, numéro 3, mars 2018. 78 une administration spécifique autre que la DGI est plutôt atypique en droit comparé et peut être à l’origine de difficultés de coordination susceptibles d’entraver l’efficacité du système fiscal. Dans la pratique, les contribuables ont affaire à de multiples interlocuteurs, avec des procédures administratives et fiscales différentes, ce qui est lourd et peut les décourager d’opérer dans le secteur formel. 120. La numérisation de la chaîne des recettes est en cours en RDC. La RDC a récemment reçu l’aide de l’AFD, de l’UE et du FMI pour numériser la chaîne des recettes avec de nouveaux logiciels et matériels informatiques (ISYS-Régies, Data warehouse, et LOGIRAD) qui sont actuellement opérationnels. Bien qu’il soit encore trop tôt pour mesurer l’impact réel, on s’attend à ce que la mobilisation des recettes bénéficie grandement de cette réalisation. 121. L’administration fiscale est hypertrophiée, mais sous -productive. Toutes les administrations gérant les impôts de l’État disposent d’un personnel pléthorique, mais mal formé. Combinées à une gestion incohérente des ressources humaines, leurs performances globales sont sous-optimales. 122. L’administration fiscale doit être améliorée. Une évaluation TADAT de 2016 a identifié de nombreuses faiblesses dans les systèmes et pratiques de l’administration fiscale, y compris dans la collecte d’informations et l’analyse des données. À ce niveau, de nombreuses actions sont nécessaire s pour amener l’administration fiscale de la RDC au niveau de certains pays de la sous -région (Rwanda, par exemple). Il s’agit principalement de : - la mise en place de mécanismes d’amélioration de la conformité fiscale afin d’obtenir un bon taux de déclarations fiscales déposées dans les délais ; et - l’introduction de procédures électroniques (déclaration numérique et paiement numérique à l’aide d’applications de téléphonie mobile) pour tous les impôts et tous les contribuables 123. L’organisation et les procédures internes de l’administration des recettes doivent également être améliorées, notamment par les moyens suivants : - Modernisation de l’outil informatique de gestion intégrée de la DGI et de la DGRAD (sur le modèle de la DGDA). Disposer d’une base de données unique pour l’ensemble des services. Intranet. - Amélioration de la communication (échange d’information) entre la DGI, la DGRAD et la DGDA, avec la nécessité d’un système de données partagé ; - Mise en place d’une gestion de l’audit fiscal basée sur le risque qui permettrait de réorganiser les activités de l’audit fiscal (planification). - Rationalisation du processus de contrôle fiscal en coordonnant les autorités compétentes afin d’éviter le harcèlement fiscal des contribuables ; - Amélioration de l’audit interne. 124. Ces améliorations pourraient contribuer à l’élargissement de l’assiette fiscale , permettant ainsi une meilleure mobilisation des recettes nationales tout en évitant une charge fiscale excessive sur un petit groupe de contribuables opérant dans le secteur formel, susceptible de décourager l’investissement. 125. La RDC devrait envisager d’introduire une autorité fiscale unique. La RDC pourrait s’inspirer de l’expérience de certains pays d’Afrique francophones qui ont récemment fusionné leurs administrations financières en une seule régie des recettes. Il s’agit du modèle dit d’autorité fiscale semi-autonome (SARA – semi-autonomous revenue authority), qui consiste à fusionner les administrations fiscale et douanière en une seule entité et à lui accorder une certaine autonomie de gestion par rapport au ministère des Finances, auquel elle rend compte sur la base d’un contrat global de performance. L’agence fonctionne 79 alors comme une entreprise, non seulement dans sa gestion et son fonctionnement interne, mais aussi dans sa culture, qui fait du contribuable un client. En RDC, une agence des recettes pourrait regrouper en un seul organe administratif la DGI, la DGRAD et la DGD sous une même direction et résoudre ainsi les actuels problèmes de coordination. Les expériences du Rwanda et du Togo ont montré que ce projet pourrait considérablement améliorer les performances de la gestion fiscale et de la mobilisation des recettes. Par exemple, au Rwanda, la collecte des recettes fiscales et douanières a augmenté de 700 % entre 1997, date de la création de l’Office rwandais des recettes, et 2020. 2.3.5. Recommandations pour les politiques 127. Les défis évoqués dans cette section peuvent être relevés grâce aux recommandations suivantes, regroupées en fonction de leur faisabilité à court et à long terme. A. Recommandations à court terme • Achever la codification de la législation fiscale. • Achever la réforme en cours de l’impôt sur le revenu en élargissant l’assiette fiscale et en réduisant les exonérations. En particulier, o Mettre en place un ensemble spécifique de règles relatives à l’impôt sur les sociétés afin de mieux comprendre et adapter le régime de l’impôt sur les sociétés. o Mieux protéger l’assiette de l’impôt sur les sociétés en plafonnant la déductibilité de certaines dépenses faisant souvent l’objet d’abus (régimes de sous-capitalisation, accords sur les prix de transfert, etc.) o Examiner, évaluer et limiter les exonérations fiscales non justifiées. o Intégrer les revenus locatifs dans l’imposition des revenus du capital de l’État et transférer aux provinces l’imposition des biens immobiliers. o Combler les lacunes de l’imposition complète des revenus des particuliers, notammen t en taxant les plus-values des personnes physiques. • Rendre opérationnel le système de suivi des droits d’accises et établir un plan de rationalisation pour éliminer les droits d’accises sur certains produits. • Achever l’évaluation des dépenses fiscales en évaluant la perte de recettes liée aux exonérations fiscales accordées dans les secteurs minier et pétrolier. • Rationaliser et codifier dans un document juridique unique les charges non fiscales et parafiscales. • Numériser la chaîne des recettes. B. Recommandations à moyen terme • Renforcer la coordination fiscale régionale et internationale en : o Participant au Forum mondial sur la transparence et l’échange de renseignements à des fins fiscales, dirigé par l’OCDE. o Demandant à adhérer à la Convention sur l’assistance administrative mutuelle en matière fiscale élaborée conjointement par l’OCDE et le Conseil de l’Europe. 80 • Lutter contre l’informalité en mettant en place une stratégie globale de contrôle fiscal pour les petits opérateurs économiques. • Supprimer le régime discriminatoire pour les expatriés. • Renforcer la gestion de la TVA et revoir les exonérations. • Concevoir et lancer la réforme des droits d’accises. • Rationaliser la fiscalité des secteurs extractifs. • Réexaminer les régimes fiscaux dérogatoires et les supprimer si nécessaire. • Renforcer l’administration fiscale en o Introduisant des procédures électroniques (déclaration numérique et paiement numérique à l’aide d’applications de téléphonie mobile) pour tous les impôts et tous les contribuables. o Modernisant l’outil informatique de gestion intégrée de la DGI et de la DGRAD (sur le modèle de la DGDA). Disposant d’une base de données unique pour tous les services. Intranet. o Améliorant la communication (échange d’information) entre la DGI, la DGRAD et la DGDA, avec la nécessité d’un système de données partagé. o Mettant en place une gestion de l’audit fiscal basée sur le risque qui permettrait de réorganiser les activités de l’audit fiscal (planification). o Améliorant l’audit interne. C. Recommandations à long terme • Fusionner la DGI, la DGRAD et la DGD en une seule autorité fiscale en s’inspirant de l’expérience du Rwanda ou du Togo. 2.4 Encourager la décentralisation fiscale 128. Cette section examine les principaux défis et opportunités associés à la décentralisation fiscale en RDC. Elle s’appuie sur les défis fiscaux décrits dans la section précédente et étudie le potentiel et les conditions sous-jacentes associées au transfert de ressources financières des pouvoirs publics centraux vers des autorités sous-nationales subordonnées ou semi-indépendantes. Une analyse plus détaillée est effectuée dans la Revue des dépenses publiques de la Banque mondiale (RDP, 2023). 2.4.1 Un processus de décentralisation fiscale inachevé en RDC 129 Au cours des 17 dernières années, la RDC a poursuivi les trois dimensions de la décentralisation : i) politique, ii) administrative et iii) fiscale, dans le but d’accroître la redevabilité et d’améliorer la prestation des services publics. Ces dimensions couvrent le transfert de l’autorité politique, administrative et fiscale et de la responsabilité de contrôle des pouvoirs publics centraux vers les provinces et les entités territoriales décentralisées (ETD). L’objectif de ce processus de décentralisation était de transférer le pouvoir du centre afin d’accroître la redevabilité, la représentation politique et d’améliorer la prestation des services publics au niveau local. La décentralisation fiscale examine le transfert de l’autorité et de la responsabilité fiscales, ainsi que des ressources financières des pouvoirs publics centraux vers des autorités sous-nationales subordonnées ou semi-indépendantes. En RDC, la 81 Constitution confère de nombreuses responsabilités fiscales aux autorités provinciales et locales. Par exemple, les pouvoirs publics centraux ne sont pas les seuls à être responsables de la collecte des recettes publiques. Les provinces et les ETD sont autorisées à mobiliser leurs propres revenus à l’aide de la collecte d’impôts locaux. Plus précisément, sur le plan fiscal, la Constitution de 2006 autorise les provinces et les ETD à percevoir au niveau local 40 % des recettes collectées au niveau national, les 60 % restants étant laissés à la discrétion des pouvoirs publics centraux.62 La Constitution prévoit également un Fonds national de péréquation destiné à renforcer la marge de manœuvre fiscale aux niveaux provincial et local en versant 10 % des recettes nationales collectées au niveau local aux entités infranationales. Les mêmes taux de transfert doivent être appliqués pour les transferts des provinces vers les ETD. La figure 2.14 ci- dessous fournit une carte fiscale simplifiée de la situation de jure des transferts versés par les pouvoirs publics centraux aux prestataires de services en RDC. En théorie, cela signifierait que la majeure partie des dépenses publiques effectuées pour la prestation de services serait supportée par les provinces et les ETD. Figure 2.14. Carte fiscale de la RDC Source : Auteurs (sur la base d’un modèle ainsi que d’info rmations et de codes juridiques collectés en RDC) 130 Les réformes de décentralisation ont un potentiel considérable d’aide à la réduction de la pauvreté et de contribution à la prospérité partagée en RDC. Plusieurs des défis de développement les plus aigus de la RDC – identifiés dans le dernier CPP du pays – sont étroitement liés à sa capacité à transférer avec succès les responsabilités de gouvernance et à établir des mécanismes de transfert fiscal à la fois efficaces, transparents et soutenant la fourniture des services publics aux citoyens. Les réformes 62 Art 51, 51 de la Constitution 82 de décentralisation sont connues pour promouvoir i) des gains d’efficacité ; ii) l’inclusion et la réactivité ; iii) la restructuration des forces de l’économie politique dans des contextes de fragilité, conflit et violence ; et iv) le développement durable et l’amélioration de la prestation des services publics.63 Plus spécifiquement, les réformes de décentralisation peuvent contribuer au développement humain en renforçant les systèmes d’amélioration de l’accès et de la qualité des services publics de base, aider à protéger l’environnement de la RDC et renforcer le système de gouvernance du pays. La décentralisation peut également contribuer à réduire les conflits et à contrer la fragilité grâce à une transparence et une redevabilité accrues et à une meilleure prestation des services au niveau local. 2.4.2. Contexte actuel et défis rencontrés dans les efforts de décentralisation fiscale en RDC 131 À l’heure actuelle, en RDC, les pouvoirs publics centraux collectent toutes les recettes nationales et en redistribuent une partie aux provinces et aux ETD, sous forme de transferts opérationnels, d’investissements et de salaires. Selon la loi n° 08/016 du 7 octobre 2008, les recettes collectées éligibles au transfert vers les provinces se répartissent en deux catégories (A et B). 64 Bien que leur utilisation ne soit officiellement soumise à aucune condition, dans la pratique, les transferts fiscaux intergouvernementaux les pouvoirs publics centraux aux provinces et aux ETD sont classés en frais de fonctionnement, investissements et salaires. Les pouvoirs publics centraux couvrent les salaires des fonctionnaires locaux et les investissements en capital pour des projets spécifiques, pour le compte des provinces et des ETD. Les transferts pour les salaires constituent de loin la part la plus importante de tous les paiements de transfert aux collectivités locales (figure 2.15). Les transferts opérationnels sont la deuxième plus importante catégorie de transferts, avec environ 11 % du total des transferts en 2022. Les transferts pour les investissements en capital ne représentaient que 1 % des transferts totaux en 2022. Les subventions aux ministères déconcentrés constituent un poste budgétaire distinct. Avec la collecte des impôts locaux, les frais d’utilisation et le financement des donateurs, elles constituent le revenu brut des provinces. 63Pour plus de détails, voir la Revue des dépenses publiques (RDP) de la Banque mondiale, 2023. 64Catégorie A (recettes administratives, judiciaires et publiques perçues dans les provinces ; recettes fiscales perçues là où elles sont générées) et catégorie B (recettes administratives, judiciaires, publiques et de participation perçues au niveau des pouvoirs publics centraux ; recettes douanières et des accises ; recettes fiscales perçues auprès des grandes entreprises ; recettes provenant des producteurs de pétrole). 83 Figure 2.15. Répartition des paiements de transfert aux entités décentralisées par catégorie en 2022 Transferts opérationnels aux provinces et aux ETD, 11 % Salaires; 88% Transferts d’investissement aux provinces et aux ETD; 1% Subventions aux services déconcentrés; 0.09% Figure 2.16. Transferts aux provinces et aux ETD par habitant au titre de la masse salariale, du fonctionnement et des dépenses d’investissement de 2016 à 2022 4,000 Transferts opérationnels 1,000 Transferts de salaires Transferts d’investissements 3,500 800 40,000 3,000 2,500 600 30,000 2,000 400 20,000 1,500 1,000 200 10,000 500 0 0 0 2019 2016 2017 2018 2020 2021 2022 2016 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2016 2019 2022 2017 2018 2020 2021 Source : données du ministère du Budget 132 Le système actuel souffre d’un manque d’équité dans les transferts des ressources et de fortes disparités dans leur exécution . Si l’on prend comme base l’année 2019, la dernière année pour laquelle les chiffres démographiques provinciaux sont disponibles,65 les pouvoirs publics ont transféré 13 dollars US par habitant aux provinces et aux ETD. Comme l’illustrent les chiffres suivants, on constate toutefois un manque d’équité dans le traitement des provinces, en particulier en ce qui concerne les salaires, qu i représentent de loin la plus grande part de tous les paiements de transfert. En 2019, la province de l’Équateur a reçu 45 dollars US par habitant contre moins de 50 cents US pour le Tanganyika. Près de 78 fois moins par habitant. Les différences sont un peu moins prononcées pour les transferts opérationnels, mais restent marquées en ce qui concerne les dépenses par habitant, qui vont de 2 dollars US dans la province du Maniema à seulement 0,5 dollar US dans la province du Kwilu, soit quatre fois moins par habitant. Certaines provinces reçoivent peu de transferts opérationnels, mais s’en sortent bien en ce qui concerne les transferts de salaires, tandis que d’autres reçoivent peu de transferts dans les trois catégories. Dans ces conditions, les dépassements budgétaires et les dépenses d’urgence récurrentes sont très préoccupants et peuvent contribuer à l’exécution relativement faible du budget pour ces transferts. Par exemple, alors que les transferts de salaires ont dépassé de 14 % le budget 2022, seuls 2,19 % des transferts d’investissement budgétisés ont été effectivement dépensés. 65 UNDP-CD-ANNUAIRE STAT. 2020 84 Figure 2.18. Taux d’exécution du budget dans les provinces en 2022 Source : Données du ministère du Budget 133 Il existe une grande incohérence entre les systèmes fiscaux intergouvernementaux de facto et de jure, mais l’élan politique en faveur d’une accélération des réformes s’intensifie . Malgré le cadre juridique existant, les mécanismes de transfert aux provinces ne sont pas clairs dans la pratique. Un décret interministériel signé par les ministres des Finances et du Budget déterminera les modalités de transfert des ressources nationales de catégorie A et B aux provinces en fonction de leur capacité de contribution aux pouvoirs publics centraux et de leur démographie. Ces deux mesures ont été adoptées en mai 2023 et publiées ultérieurement sur la base d’une stratégie de réforme des finances publiques. En attendant leur mise en œuvre et sur la base des critères élaborés par le ministère du Budget et approuvés par l e Parlement en tant qu’autorité budgétaire, un plan de transfert des ressources collectées au niveau national est en cours d’élaboration et d’exécution par les ministères des Finances et du Budget. Même si les nouvelles modalités de transfert étaient pleinement introduites, de sérieuses questions concernant la méthode de calcul subsistent et devraient être mises à la disposition du public. Si l’on fait abstraction des transferts de salaires, les pouvoirs publics centraux n’ont jamais réussi à transférer les 40 % requis aux provinces. Les transferts décentralisés et déconcentrés sont fortement conditionnés, mais les conditions sont mal codifiées et ne sont pas transparentes pour le public. Comparé à celui des pays voisins, le mécanisme de transfert de la RDC ressemble plus à celui de l’Ouganda ou de la Tanzanie qu’à celui du Kenya ou de l’Afrique du Sud (figure 2.17). 85 Figure 2.17. Équilibre entre les financements conditionnels et inconditionnels destinés aux collectivités locales dans différents pays Source : Subventions conditionnelles : A Primer. Hadley, Williamson, Yilmaz (2022) 134 Des réformes doivent d’urgence être entreprises au niveau local en vue de mieux rendre compte des dépenses publiques et d’exercer un contrôle sur les provinces. Même si elle a régulièrement augmenté ces dernières années grâce à l’introduction de nouvelles taxes, la collecte des recettes locales reste insuffisante pour compenser les déficits des paiements de transfert des pouvoirs publics centraux. En ce qui concerne le contrôle, l’absence de chambres des comptes au niveau provincial limite les efforts de redevabilité et de gouvernance au niveau provincial. La création de telles chambres, inscrite dans la réforme de la gestion des finances publiques qui débutera dans les provinces du Kasaï dans le cadre du projet ENCORE (Enhancement of Revenue Collection and Expenditure Management – Amélioration de la collecte des recettes et de la gestion des dépenses) de la Banque mondiale, devrait leur permettre d’exercer sur les comptes des provinces et des ETD, tous les pouvoirs de contrôle dévolus à la Cour des comptes. La Constitution prévoit que le rapport annuel de la Cour soit publié et remis au président de la République, au Parlement et au Gouvernement.66 Dans ses rapports précédents, la Cour a relevé de graves lacunes dans les procédures budgétaires des provinces.67 Dans son dernier rapport de janvier 2023, elle a relevé les points suivants concernant les procédures budgétaires au sein des provinces : i) le recours à une procédure d’urgence non réglementée pour le paiement de certaines dépenses ; ii) le recours excessif à la procédure de mise à disposition de fonds pour des dépenses importantes ; et iii) des dépenses récurrentes excessives. 2.4.3. Recommandations pour l’avenir 135 Le Gouvernement s’est engagé à poursuivre ses efforts de décentralisation fiscale en élaborant une stratégie sur six ans. Le sombre tableau de la décentralisation fiscale a incité le Gouvernement à concevoir une stratégie sur six ans pour le renforcement de la décentralisation financière. Cette stratégie vise à renforcer la gouvernance au niveau infranational grâce à une gestion efficace des finances publiques, conformément aux objectifs de développement durable. Une version révisée de la stratégie a été finalisée lors d’un atelier organisé en mai 2023 à Lubumbashi, au cours duquel elle a été validée et signée par le ministre des Finances. Les efforts de réforme en cours sont complétés par le Comité de 66 Constitution de la RDC. Art. 180 67 Journal officiel (plusieurs années, 2011:31-177, passim). 86 pilotage et d’orientation de la réforme des finances publiques (convoqué par le COREF avec l’appui du projet ENCORE de la Banque mondiale, et présidé par le ministre des Finances).68 Le Gouvernement a de plus récemment finalisé un arrêté interministériel sur le transfert des recettes collectées au niveau national (catégorie B) vers les provinces et une instruction permanente sur l’affectation des recettes de catégorie A. L’arrêté et l’instruction permanente ont été approuvés par le Conseil des ministres. Ils devraient tous deux être signés par les ministres des Finances et du Budget pour la fin du mois de juin 2023. Il sera opportun de définir une méthode de calcul claire et transparente de la répartition des recettes entre les provinces. 136 Compte tenu des expériences des dernières décennies, y compris en RDC, les recommandations suivantes peuvent être émises pour encourager un processus de décentralisation favorable : 1. Instaurer un dialogue fréquent pour dissiper les malentendus, corriger le tir et s’adapter aux circonstances en constante évolution d’un environnem ent de gouvernance fragile. Le dialogue doit être centré sur les résultats souhaités plutôt que sur les moyens mis en œuvre, c’est-à-dire moins sur les ressources fiscales que sur la manière dont les collectivités locales peuvent fournir les services qu’elles sont chargées d’offrir aux citoyens. 2. Identifier un résultat final commun que la décentralisation devrait atteindre et le placer au centre des réformes. La décentralisation ne doit jamais être considérée comme un moyen de parvenir à une fin. Un engagement fort de tous les acteurs politiques en faveur d’un tel résultat peut aider à créer l’environnement favorable nécessaire et fournir des réponses à des questions complexes susceptibles de déterminer le succès ou l’échec d’une réforme de décentralisation. Les parties prenantes à tous les niveaux de gouvernement peuvent répondre à des questions telles que : i) quels rôles les ministères déconcentrés doivent-ils jouer par rapport aux ministères décentralisés ; ii) quels sont les fonds nécessaires pour que les ETD puissent fonctionner conformément à leur mandat ; et iii) quels acteurs ont-ils besoin d’un encouragement supplémentaire pour contribuer aux réformes ? 3. Fournir des efforts supplémentaires pour renforcer la représentation des bénéficiaires finaux des réformes et demander aux pouvoirs publics locaux et centraux de rendre des comptes. Les réformes de décentralisation sont censées accroître la transparence et la redevabilité en rapprochant du citoyen la prise de décision politique et les dépenses des pouvoirs publics pour les services publics. Les activités de terrain, telles que les mécanismes de budgétisation participative, ont permis de renforcer la gestion financière locale, y compris en RDC.69 70 71 Ces interventions apportent une contribution importante aux efforts globaux de réforme de décentralisation dans de nombreux pays. 4. Il est essentiel de renforcer les capacités à tous les niveaux de gouvernement. Le renforcement des capacités institutionnelles reste un aspect crucial de toute réforme de décentralisation réussie. Le manque de capacités et de personnel entrave la mise en place d’institutions locales infranationales, crée des goulets d’étranglement dans la prestation des services et ouvre la porte à la corruption et au gaspillage. La RDC a déjà eu du mal à déléguer des fonctions de gouvernement aux ministères provinciaux en raison d’un manque de personnel adéquat et d’efforts pour former et renforcer les fonctionnaires. Toute réforme axée sur le renforcement des capacités doit s’inscrire dans une approche de gouvernance à plusieurs niveaux. Cela inclut le centre des pouvoirs publics, d’où les 68 Le COREF met en œuvre un projet ENCORE de la Banque mondiale d’un montant de 250 millions de dollars US, dont la principale composante est axée sur le renforcement de la décentralisation du pays. D’autres bailleurs de fonds techniques et financiers soutiennent également certains aspects de la décentralisation. 69 https://www.worldbank.org/en/news/feature/2012/09/10/participatory-budgeting-an-experience-in-good-governance 70 https://www.ned.org/region/africa/congo-democratic-republic-2021/ 71 https://www.opengovpartnership.org/stories/participatory-budgeting-spreading-across-the-globe/ 87 fonctionnaires formés peuvent ensuite être envoyés dans les provinces pour soutenir la mise en place d’institutions provinciales et locales. 2.5 Attirer le développement de chaînes de valeur : études de cas illustratives 137. Cette section vise à résumer le potentiel de développement des chaînes de valeur de l’exploitation minière et de l’agro-industrie et à souligner l’importance d’un environnement politique favorable pour encourager la diversification économique, la création d’emplois et une croissance plus rapide grâce à la transformation structurelle et au renforcement du commerce et de l’intégration régionale. L’accent est mis sur deux secteurs clés, moteurs de la croissance potentielle (l’exploitation minière et l’agro-industrie), qui offrent de grandes possibilités d’expansion dans le contexte de la transition énergétique mondiale, de l’insécurité alimentaire et de la poursuite de l’intégration régionale. Les opportunités et contraintes présentées sont spécifiques à des études sur les chaînes de valeur de l’exploitation minière pour les batteries de véhicules électriques et du manioc (incluant une dimension climatique), mais la plupart des défis et recommandations illustrés pourraient s’appliquer à d’autres produits ou secteurs de l’économie. L’objectif des études de cas est de souligner à quel point l’environnement général des affaires est peu attractif pour l’investissement privé, l’expansion des PME et la compétitivité des produits. Une analyse détaillée de chaque chaîne de valeur est fournie dans les deux études de cas jointes au présent CEM. 2.5.1. Développement de la chaîne de valeur de l’exploitation minière pour les batteries de véhicules électriques A. Opportunités dans l’industrie minière 72 138. L’industrie minière internationale subit une profonde transformation en raison de la transition énergétique mondiale. Cette transition offre des opportunités aux entreprises et aux États hôtes avec l’accroissement de l’intérêt pour le développement de l’offre de minéraux utiles à la transition énergétique, mais elle pose également des défis réglementaires et technologiques, car les pays et les entreprises cherchent également à décarboner leurs chaînes de valeur pour tenir les engagements de l’Accord de Paris. Dans un monde où les consommateurs finaux et les fabricants de technologies d’énergie renouvelable cherchent de plus en plus à produire des produits propres, où les références « vertes » sont mesurées tout au long de la chaîne de valeur, la RDC est bien placée pour être un « fournisseur de choix ». La RDC et la Zambie disposent toutes deux d’un cuivre et d’un cobalt parmi les plus propres de la planète, en partie grâce à la grande quantité d’énergie renouvelable (hydroélectrique) utilisée dans la production, mais aussi à la haute teneur des gisements. 139. La demande de « minéraux pour batteries » devrait être multipliée par dix au cours de la prochaine décennie, et la RDC est bien placée pour fournir une part importante de ces minéraux si les conditions favorables sont réunies. L’analyse des données publiques et des projections publiées par les constructeurs automobiles mondiaux indique qu’ils produiraient 5 819 GWh de capacité de batterie et 55 millions de voitures avec un investissement total de 1,2 trillion de dollars US d’ici 2030. Pour certains minéraux, cela représente une augmentation massive de la demande (et de l’offre correspondante) d’ici 72Le cas pratique 1 du CEM fournit une analyse détaillée de la chaîne de valeur de l’exploitation minière pour les batteries de véhicules électriques. 88 2040, par rapport aux niveaux de 2020. Le lithium, le graphite et le cobalt connaîtront les plus fortes augmentations de la demande, même si la base de production est faible en 2020. Même si le cuivre ne subit qu’une faible augmentation de 2,6 %, il part d’une base très large et représente un défi important pour l’industrie, car il ne peut être remplacé par d’autres minéraux. Figure 2.19. Croissance de la demande de minéraux entre 2020 et 2040 selon le scénario de développement durable (en multiple de la demande de 2020) 140. La transition énergétique offre plusieurs opportunités à la RDC, entre autres, la fourniture d’une offre supplémentaire de minéraux utiles à la transition énergétique nécessaire à l’atténuation du changement climatique et la contribution à deux biens publics mondiaux. La demande de divers minéraux utiles à la transition énergétique devrait croître de manière exponentielle. Plus précisément, l’avenir est plus intensif en minéraux que le passé : depuis 2010, la quantité moyenne de minéraux nécessaires pour une nouvelle unité de capacité de production d’électricité a augmenté de 50 % à mesure que la part des énergies renouvelables s’est accrue (AIE, 2021). Contrairement aux précédentes flambées des matières premières, cette augmentation est structurelle et non transitoire, et il est donc temps pour la RDC de réaliser des investissements à long terme dans ses opportunités d’approvisionnement en minerais. Ce faisant, la RDC en bénéficiera, mais cela pourra, en plus, conduire à des investissements transformationnels dans des infrastructures de transport et d’énergie, qui pourraient engendrer des biens publics et contribuer à la diversification de l’économie, s’ils sont correctement réalisés. Avec l’augmentation de l’offre de minéraux utiles à la transition énergétique en RDC, et la diversification de la chaîne d’approvisionnement, la RDC a l’opportunité de contribuer à deux biens publics mondiaux : aider à l’approvisionnement en minéraux nécessaires au déploiement des technologies nécessaires à l’atténuation du changement climatique ; et diversifier les chaînes d’approvisionnement en énergie renouvelable, ce qui améliorera la résilience de ces chaînes et réduira les tensions géopolitiques. B. Défis 141. La RDC reste malgré tout pauvre et la gouvernance du secteur minier demeure un défi. Un nouveau code minier a été adopté en 2018 après de nombreux débats avec le secteur privé et la société civile. Si les dispositions fiscales ont été révisées pour garantir davantage de retombées financières de l’exploitation minière, le Code a également créé certains problèmes à cet égard. Surtout, et comme dans de nombreux pays en développement, les capacités sont limitées pour appliquer pleinement le nouveau Code. L’évaluation de la capacité institutionnelle à mettre en œuvre des politiques, à contrôler ou à appliquer la loi reste faible, tout comme la capacité des pouvoirs publics à tirer parti du secteur pour développer et diversifier l’économie. 142. Alors que le secteur minier de la RDC se prépare à une nouvelle vague d’investissements et à une transition vers des activités à plus forte intensité énergétique, il est temps de jeter les bases d’une 89 chaîne d’approvisionnement résiliente, responsable et propre. La composition de l’actionnariat du secteur évolue et se diversifie, de plus en plus d’entreprises envisageant de prendre plus de risques. En outre, l’approfondissement des mines existantes entraînera l’apparition d’une nouvelle géologie et déclenchera une vague de nouveaux investissements à plus forte intensité énergétique. 143. Un environnement favorable doit être créé pour que le secteur puisse : i) se décarboner avant que l’industrie ne s’enferme dans des technologies à forte intensité de carbone ; ii) attirer une nouvelle vague d’investissements pour soutenir les opérations existantes ; et iii) permettre à la RDC de bénéficier du développement dans des parties de son territoire jusqu’alors inexplorées. L’amélioration de la gouvernance, de la stabilité, de la prévisibilité et des infrastructures énergétiques et de transport est un élément clé pour soutenir cette transition, diversifier les économies dans des clusters et le long des corridors économiques afin de promouvoir une croissance inclusive durable et à long terme. 144. L’attention portée aux problèmes socioéconomiques et environnementaux causés par l’exploitation minière artisanale non réglementée devra être accélérée. L’impact de l’exploitation minière artisanale est lié à la pauvreté, au manque de développement rural et aux faibles niveaux de contrôle et de gestion des pouvoirs publics. La note globale de risque du pays est affectée par ces facteurs et l’investissement dans le développement de minerais essentiels par un secteur minier à grande échelle peut être compromis si ces défis ne sont pas pris en compte. C. Recommandations 145. La RDC pourrait énormément bénéficier de la transition énergétique si elle est soutenue pour saisir cette opportunité ; et un agenda en six points pour l’exploitation minière et la création de valeur ajoutée en RDC est donc proposé pour l’aider à saisir ce tte chance. Au-delà de la génération de devises, de recettes fiscales, d’achats locaux, de valeur ajoutée et d’emplois, la demande croissante en minerais essentiels augmente de manière significative les bénéfices potentiels du secteur. En outre, investir dans la capacité de la RDC à saisir les opportunités de la chaîne de valeur des minéraux est conforme à l’Accord de Paris, en soutenant le programme mondial de décarbonation tout en tirant parti d’une formidable opportunité de développement. Avec son envergure et ses multiples agences de développement, le GBM est particulièrement bien placé pour soutenir le programme suivant en six points visant l’exploitation minière et la création de valeur ajoutée en RDC : i. Augmenter les capacités de réponse de la RDC en matière d’approvisionnement en soutenant les investissements miniers. ii. Débloquer des opportunités de développement transformationnel à long terme grâce à des investissements stratégiques dans des infrastructures de transport liées aux ressources minérales. iii. Soutenir les investissements dans les énergies renouvelables pour décarboner les chaînes de valeur minières, réaliser les CDN de la RDC et réduire la pauvreté énergétique en milieu rural. iv. Soutenir l’ajout de valeur au-delà de l’exploitation minière afin de capturer plus de valeur pour la RDC (et l’Afrique) et de diversifier l’économie et les chaînes de valeur mondiales des minéraux utiles à la transition énergétique. v. Investir dans la formation de capital humain pour permettre aux Congolais de saisir les opportunités de revenus offertes par le secteur en plein essor, sa chaîne de valeur en aval et la diversification économique. vi. Renforcer la gouvernance, les communautés affectées par l’exploitation minière et la gestion de l’environnement pour s’assurer que le développement de l’exploitation minière et des métaux profite à la RDC et à ses citoyens dans un contexte de durabilité. 90 Le tableau ci-dessous classe les six recommandations décrites plus haut par ordre de priorité en fonction de la rapidité potentielle de leur mise en œuvre et de leur impact sur le développement : 146. L’adoption de l’agenda en six points peut procurer de multiples avantages à la RDC. Certains lui reviendront entièrement, comme la mobilisation des recettes nationales et les avantages macroéconomiques, les possibilités d’emploi de qualité et la diversification économique. D’autres seront partagés au niveau international dans la mesure où ils génèrent des biens publics mondiaux tels que l’amélioration de la capacité mondiale à atténuer le changement climatique, l’accroissement de la résilience des minéraux utiles à la transition énergétique, la réduction de l’intensité des émissions des chaînes de valeur, et l’amélioration de l’intégration dans l’économie mondiale. Recommandations spécifiques visant la création de valeur ajoutée dans les chaînes de valeur du cuivre et du cobalt 147. Le cobalt et le cuivre sont des composants essentiels de la chaîne de valeur de la transition énergétique avec une production minière bien établie en RDC ; et l’expansion des chaînes de valeur de ces industries devrait être une priorité absolue pour la création d’emplois et les exportations, même si la valeur ajoutée ne produira que très peu de recettes fiscales supplémentaires. Deux domaines d’intérêt particuliers sont la fabrication de câbles en cuivre et le traitement des minéraux précurseurs pour les batteries des véhicules électriques. 148. La première option de valeur ajoutée pour la RDC consisterait à développer la fabrication de produits à base de cuivre dans la région de l’ex-Katanga, en mettant l’accent sur la transformation de la région en un pôle de fabrication avec une concentration locale d’industries similaires ou complémentaires. Par rapport à la fonte et au raffinage, la fabrication de produits à base de cuivre ne nécessite pas autant d’énergie et, comme l’ont démontré les opérateurs existants, la fabrication est déjà économiquement et techniquement faisable en RDC. Les opportunités dans la chaîne de valeur du cuivre vont de la production de produits électriques, à partir de fils, câbles et autres semi-conducteurs en cuivre, jusqu’à des produits tels que les moteurs électriques, les transformateurs, les énergies renouvelables et 91 potentiellement les feuilles de cuivre utilisées dans les cellules des batteries des véhicules électriques. La production de 500 millions de dollars US de produits à base de cuivre par an se traduirait par 112 millions de dollars US d’exportations supplémentaires, peut-être 1 300 à 2 000 emplois supplémentaires, mais seulement 9 millions de dollars US de recettes annuelles imposables, car les marges sont faibles. 149. La chaîne de valeur des batteries pour véhicules électriques est en revanche beaucoup plus complexe et difficile à mettre en place, car elle nécessite des compétences hautement techniques dans une grande partie de la chaîne de valeur, bien qu’elle ait le potentiel de quadrupler la valeur finale des minerais de batteries extraits en Afrique. Le développement de l’ensemble de la chaîne de valeur nécessitera une approche régionale, chaque pays d’Afrique australe apportant sa contribution en termes de métaux spécifiques et de capacités à entreprendre une fabrication complexe et à attirer les investissements nécessaires. Pour la RDC, la production de précurseurs tels que l’hydroxyde de cobalt peut constituer le premier pas d’un voyage long et compliqué. Le saut entre le développement des capacités de production de précurseurs et le développement des capacités de fabrication de batteries est énorme. La production de précurseurs n’en constitue pas moins une première étape très importante qui pourrait contribuer à générer un léger avantage de coûts à court terme et ouvrir la voie à une production à plus long terme d’autres produits de la chaîne de valeur. 150. Pour ce faire, la RDC doit relever des défis spécifiques en matière de déficit de compétences, d’accès au financement et d’infrastructures telles que l’énergie et les transports. Pour combler le déficit de compétences, une stratégie à plusieurs volets est nécessaire : i) faciliter l’accès aux travailleurs étrangers qualifiés avec des exigences proportionnelles de programmes et obligations de transfert de compétences ; et ii) renforcer le propre réservoir de compétences de la RDC, en commençant par les compétences STEM avec un accent inclusif sur les femmes, les filles et les personnes handicapées, pour renforcer les compétences professionnelles, et enfin améliorer le réservoir de diplômés de qualité. 151. Si ces défis sont relevés, la construction en RDC d’une usine de précurseurs de batteries « pourrait » être rentable – toutefois, les principales préoccupations seront le taux de rendement minimum ajusté requis et les risques ESG associés à l’approvisionnement en minerais de cobalt. Les risques économiques et politiques peuvent être atténués par de bonnes opérations et une assurance contre les risques, mais les risques ESG sont plus difficiles à atténuer et constituent actuellement un facteur de dissuasion majeur, non seulement pour les investissements en RDC, mais aussi pour l’utilisation à long terme des batteries au cobalt dans les véhicules électriques. 152. Ainsi, en examinant les diverses opportunités, contraintes et études de cas nationales, plusieurs recommandations clés peuvent être émises pour aider la RDC à capturer davantage de valeur ajoutée dans les chaînes de valeur du cuivre et du cobalt. Ces recommandations sont énumérées ci-dessous et détaillées avec des exemples de pays (EP) dans la section des recommandations à la fin du chapitre sur les études de cas miniers : 1. Améliorer les infrastructures et la logistique : Investir dans le développement des infrastructures, y compris les réseaux de transport, l’approvisionnement en électricité (en tirant parti des ressources vertes) et la logistique, afin de faciliter la circulation des matières premières et des produits finis (EP : Chine et Vietnam). 2. Accélérer le développement des zones économiques spéciales de Kinsevere consacrées au traitement et à la fabrication du cuivre et du cobalt : Ces zones devraient offrir des incitations telles que des allègements fiscaux, des réglementations simplifiées et un accès à des services publics fiables 92 afin d’attirer les investisseurs nationaux et étrangers. Lorsqu’il existe des déficits d’infrastructures, les responsables des politiques devraient s’entretenir dès maintenant avec la communauté internationale afin d’aligner les projets sur les objectifs du Gouvernement (EP : Chine, Éthiopie, Singapour, Mexique). 3. Encourager le transfert de technologies et la recherche et forger des partenariats public-privé : Promouvoir le transfert de technologie en établissant des partenariats avec des entreprises ou des institutions internationales pour faciliter l’échange de connaissances et renforcer les capacités locales de traitement du cuivre et du cobalt ; et investir dans la recherche et le développement pour améliorer les techniques d’extraction, les processus d’affinage des métaux et le développement de produits destinés à des applications à plus forte valeur ajoutée. Le principal fabricant européen de batteries, Northvolt, a fait part à la Banque mondiale de son intérêt pour le développement d’une relation avec les pouvoirs publics de la RDC, ce qui pourrait constituer un domaine de coopération, au même titre que le programme de développement des compétences dont il est question ci-après. Engagez-vous également avec des associations industrielles, des instituts de recherche et des pouvoirs publics étrangers pour tirer parti de leur expertise, de leurs réseaux et de leurs possibilités de financement (EP : Corée du Sud, Inde). 4. Améliorer le développement des compétences et de la main-d’œuvre : Investir dans des programmes de formation technique et professionnelle pour former une main-d’œuvre qualifiée capable de faire fonctionner des machines de pointe, de gérer des processus de production et de mener des recherches. Une bonne façon de procéder consiste à collaborer avec des établissements d’enseignement et des experts de l’industrie pour concevoir des programmes de formation répondant aux besoins des chaînes de valeur du cuivre et du cobalt (EP : Allemagne, Malaisie). 5. Soutenir l’accès au financement : Faciliter l’accès au financement des petites et moyennes entreprises (PME) impliquées dans des activités de valorisation en mettant en place des fonds spécialisés, des subventions ou des programmes de prêts pour soutenir les entrepreneurs et les entreprises intéressés par l’établissement d’installations de production de fils et de feuilles de cuivre ou la fabrication de composants à base de cobalt pour les industries de véhicules électriques (EP : Malaisie, Brésil). 6. Renforcer les normes environnementales et sociales : Le respect des normes internationales de durabilité renforcera la réputation de la RDC et attirera des investisseurs éthiques. L’opérationnalisation des plans gouvernementaux pour la formalisation de l’exploitation du cobalt ainsi que les programmes de traçabilité pourraient figurer parmi les activités relevant de cette recommandation (EP : Norvège, Costa Rica). 7. Promouvoir la transformation et la fabrication locales : En dehors de la loi sur les zones économiques spéciales, le Gouvernement devrait encourager la transformation et la fabrication locales en offrant des incitations aux entreprises pour qu’elles créent des installations de production en RDC. Ceci peut être réalisé en mettant en œuvre des politiques accordant la priorité aux achats nationaux de fils de cuivre, de feuilles et de composants à base de cobalt afin de promouvoir la valeur ajoutée et de générer des opportunités d’emploi pour la population locale (EP : Brésil, Thaïlande). 8. Soutenir le développement du marché intérieur et travailler au niveau régional : Faciliter le développement du marché en promouvant activement les produits de cuivre et de cobalt à valeur ajoutée de la RDC, d’abord au niveau régional en participant à des foires commerciales internationales, et travailler en collaboration dans la région de la SADC pour soutenir les ambitions d’autres pays en matière de valeur ajoutée. En outre, tirez parti de l’évolution prochaine du secteur de la construction automobile en Afrique du Sud pour garantir la demande continentale des futurs 93 produits à valeur ajoutée de la RDC dans la chaîne de valeur des batteries de véhicules électriques. Explorer les possibilités de partenariats stratégiques avec les fabricants de VE et les producteurs de batteries (EP : Allemagne, Kenya). 9. Mettre en place des réglementations et des politiques claires : Élaborer des réglementations et des politiques claires et cohérentes soutenant la création de valeur dans les chaînes de valeur du cuivre et du cobalt en fournissant un cadre transparent, complet et facile d’accès pour l’investissement et la croissance de l’industrie (avec des directives pour les licences, la fiscalité et les procédures d’exportation) afin de créer un environnement favorable aux investisseurs et de favoriser la stabilité à long terme dans le secteur. Veiller à ce que tous les contrats à négocier soient normalisés afin d’éviter toute incertitude inutile et de permettre les investissements en RDC (EP : Royaume-Uni, Afrique du Sud). 2.5.2. Développement de la chaîne de valeur agro-industrielle du manioc 153. La section suivante examine les contraintes et les défis spécifiques auxquels sont confrontées les MPME dans le secteur agro-industriel, illustrés par l’analyse de la chaîne de valeur du manioc. De plus, une évaluation a été menée auprès des grands acteurs du manioc pour distinguer leurs défis de ceux des petits exploitants, qui sont les acteurs les plus communs. 73 A. Opportunités 154. Le manioc est en train de devenir l’un des principaux féculents alimentaires de l’Afrique subsaharienne. Cette culture est de plus en plus importante pour assurer la sécurité alimentaire, réduire la pauvreté, promouvoir l’emploi et favoriser le commerce. Elle est connue comme une super culture en raison de : i) sa capacité de stockage qui permet une considérable flexibilité du moment de récolte à travers les semaines et les saisons ; ii) sa résistance aux conditions climatiques difficiles ; et iii) sa tolérance à la limitation des intrants. En outre, la biofortification du manioc et la fortification de ses produits dérivés peuvent alléger le fardeau de la malnutrition auquel de nombreux pays de la région, y compris la RDC, sont confrontés. 155. Afin de réduire sa dépendance aux importations de blé et devenir plus autosuffisante, la RDC recherche des produits de substitution pour pérenniser la sécurité alimentaire. Le renforcement de sa balance commerciale est un mécanisme important pour stimuler la croissance et la diversification économiques et réduire la pauvreté, comme le souligne le rapport de la Banque mondiale74 sur le rôle du commerce dans l’éradication de la pauvreté. Alors que la RDC se concentre sur son programme de diversification, elle a le potentiel pour jouer un rôle important dans la chaîne de valeur mondiale du manioc aux stades de la production et de la transformation. Libérer cette opportunité en améliorant l’environnement favorable au développement du secteur privé, en attirant p lus rapidement les investissements étrangers, en réduisant les coûts administratifs et en améliorant la productivité peut donner lieu à une augmentation des recettes fiscales pour l’État, une amélioration de la rentabilité des entreprises et une croissance plus durable du secteur avec de meilleures opportunités d’emploi pour les MPME et les travailleurs ruraux. Ceci est d’autant plus crucial que dans le pays environ 62 % de la 73 Le cas pratique 2 du CEM fournit une analyse détaillée du développement de la chaîne de valeur du manioc. 74 https://www.worldbank.org/en/topic/trade/publication/the-role-of-trade-in-ending-poverty 94 population75 continue à vivre dans la pauvreté et un Congolais sur six continue à vivre dans l’extrême pauvreté malgré une des populations les plus jeunes du monde. 156. La chaîne de valeur du manioc offre des opportunités inexploitées pour que la RDC dépende moins des exportations de céréales et devienne une chaîne de valeur agricole prioritaire aux côtés du maïs et de la pêche. En 2021, la production de manioc du pays76 était la deuxième au monde après celle du Nigeria, avec 45,67 millions de tonnes de manioc frais et un taux de croissance annuel composé (TCAC) de 3,91 %. Cette culture est de plus en plus importante pour assurer la sécurité alimentaire, réduire la pauvreté, créer des emplois, s’adapter au changement climatique et équilibrer le commerce. Face à la volatilité économique mondiale, la RDC peut prendre des mesures proactives pour développer la chaîne de valeur du manioc afin de répondre à la croissance rapide de la population et à la détérioration chronique des conditions de vie à cause de laquelle quelque 26,4 millions de personnes étaient confrontées à une insécurité alimentaire aiguë, 5,7 millions de personnes étaient déplacées à l’intérieur du pays et 2,8 millions d’enfants souffraient de malnutrition aiguë au cours de la première moitié de 2023.77 L’impact de la guerre en Ukraine a accéléré les efforts pour réduire les importations de blé et de céréales et devenir plus autosuffisant, favorisant ainsi le développement de l’agro -industrie, et notamment la chaîne de valeur du manioc. 157. Accélérer le développement d’une industrie autour du manioc, une culture résistante au climat, soutiendrait également les efforts nationaux de la RDC pour améliorer l’adaptation au changement climatique et son atténuation. En développant cette valeur prioritaire et en incorporant des méthodes et des technologies agricoles intelligentes par rapport au climat, le rendement du manioc peut être multiplié par deux ou quatre par rapport à un rendement de 8,15 MT/ha en 2021, selon FAO STAT. Malgré sa résistance au climat, le manioc frais se gâte dans les 48 à 72 heures suivant la récolte, avec une moyenne de plus de 50 % de perte de la récolte annuelle mondiale. Une fois transformés, les produits dérivés tels que le fufu ont une durée de conservation de 18 mois. L’augmentation des rendements et la réduction des pertes post-récolte peuvent multiplier par 2 à 4 les revenus des petits exploitants. Si la sécurité alimentaire est assurée sur l’ensemble de son territoire, la RDC peut tirer parti de sa situation stratégique au centre du continent africain et de ses frontières avec neuf pays pour commencer à orienter une plus grande partie de sa production agricole, y compris celle de manioc, vers une industrie tournée vers l’exportation. La demande croissante des pays occidentaux où le manioc devient un ingrédient alimentaire de base constitue une opportunité croissante de cibler les ports stratégiques des Pays-Bas et de la Belgique qui servent de grands centres de distribution pour la majeure partie du continent. B. Défis 158. L’environnement favorable au développement du secteur privé et à la modernisation du secteur public de la RDC est essentiel pour améliorer la gouvernance et la capacité institutionnelle. Malgré une volonté politique croissante démontrée par les cadres stratégiques en place pour le développement des secteurs productifs clés de l’économie, tels que la nouvelle vision de l’économie numérique décrite dans le Plan78 national du numérique (PNN) de 2019, la mise en œuvre reste un défi majeur. Le consensus politique et le renforcement de la présence et de la crédibilité des pouvoirs publics, notamment par 75 https://www.worldbank.org/en/country/drc/overview 76 FAO Stat 2021 https://www.fao.org/faostat/en/#data/QCL 77 https://www.wfp.org/countries/democratic-republic-congo 78 https://presidence.cd/services/1/plan_national_du_numerique_horizon_2025 95 l’amélioration de la gouvernance, seront essentiels pour assurer la stabilité et la poursuite des réformes structurelles nécessaires pour attirer les investissements et créer des emplois. Jusqu’à présent, les contraintes structurelles ont maintenu le secteur privé dans un état sous-développé et encouragé l’économie informelle. 159. La volatilité persistante de l’économie mondiale et la fragilité sociale et climatique i mposent des réformes urgentes de l’environnement des affaires pour attirer le secteur privé. Dans les chaînes de valeur prioritaires de l’agro-industrie et plus spécifiquement pour le manioc, une stratégie nationale de développement en partenariat avec le secteur privé doit être associée à une coordination et un engagement solides aux niveaux national, régional et local pour relever efficacement les défis et contraintes clés qui empêchent la RDC, le deuxième producteur mondial de manioc, d’atteindre la sécu rité alimentaire pour ses citoyens et éventuellement de s’attaquer aux marchés d’exportation. En fait, les défis structurels, en particulier l’accès à des infrastructures fiables ( électricité, transport routier et réseaux de télécommunications) et les contraintes de l’environnement des affaires pour les MPME, affectent négativement l’accélération de la croissance nécessaire pour atteindre la sécurité alimentaire nationale, améliorer les moyens de subsistance et l’inclusion sociale, construire une industrie orientée vers l’exportation et faire face aux effets du changement climatique. L’établissement de partenariats avec le secteur privé est une étape cruciale étant donné que les MPME emploient 88,6 % de la population active.79 En outre, les plans d’action doivent être bien adaptés aux entreprises de différentes tailles, des petits exploitants aux entreprises commerciales, afin de créer une accélération soutenue de la croissance avec un triple gain pour le secteur public, le secteur privé et l’environnement. 160. Les récents entretiens structurés sur les chaînes de valeur agricoles menés par le GBM pour l’analyse CEM80 ont confirmé certains des principaux défis discutés dans le rapport associés au développement d’une industrie stratégique comme celle du manioc. Il s’agit notamment de la fiscalité (charges fiscales et parafiscales), des principaux coûts de gestion administrative, de l’accès à la terre, de l’infrastructure et de la logistique, de l’accès au financement, de l’entrepreneu riat féminin, du changement climatique parmi d’autres contraintes : - En ce qui concerne la fiscalité, le fardeau pèse de manière disproportionnée sur le secteur privé, qui se plaint unanimement de la pression fiscale. Environ 52 paiements sont exigés chaque année des entreprises, contre une moyenne de 37,4 en Afrique subsaharienne, et le taux d’imposition total est de 54,6 % des bénéfices, contre 46,8 % dans le reste de l’Afrique et 39,8 % dans les pays de l’OCDE. Cette situation rend la gestion administrati ve complexe, ce qui se traduit par des frais comptables et juridiques supplémentaires de 20 à 35 %, pour la prise en charge des formulaires et les frais administratifs. - En ce qui concerne l’accès à la terre, tous les participants à l’enquête ont convenu q ue les principaux obstacles à l’accès à la terre comprenaient i) le coût élevé de l’achat ; ii) la sécurité de la propriété foncière ; iii) la fréquence des conflits fonciers qui peuvent affecter la sécurité de la propriété foncière ; et iv) les défis d’infrastructure posés au développement des terres agricoles. - En ce qui concerne les contraintes d’infrastructure, l’électrification, l’irrigation, les conditions de transport routier après la récolte et la logistique restent des obstacles majeurs pour aller au-delà de l’agriculture de subsistance. 79 Groupe de la Banque mondiale. 2022. Cadre de partenariat pays pour la République démocratique du Congo pour la période Ex.22-26. Washington, DC : Groupe de la Banque mondiale. 80 En collaboration avec la Société financière internationale (SFI) 96 - En ce qui concerne l’accès au financement, seuls 30 % des agriculteurs commerciaux et des transformateurs ont déclaré avoir un prêt en cours et 30 % qu’ils ne pouvaient pas contracter de prêt bancaire, ni auprès des banques traditionnelles, ni auprès des institutions de microfinance, ce qui est le problème de la majorité des MPME. - En ce qui concerne les défis spécifiques au genre , les principales contraintes limitant l’accès des femmes à l’entrepreneuriat sont : i) leur faible accès aux ressources financières ; ii) leur autonomie de décision restreinte par rapport aux hommes ; iii) leur manque de formation à l’entrepreneuriat ; iv) leur peur du harcèlement sexuel ; et v) leur accès difficile au financement. - Enfin, pour atténuer les effets du changement climatique et ses répercussions sur la productivité et la rentabilité, les agriculteurs, en particulier les petits exploitants, ont tendance à s’adapter en privilégiant des solutions à court terme qui ne leur permettent pas toujours d’obtenir des résultats durables en matière de rotation des cultures, de lutte contre les épidémies, de fertilité des sols, de gestion de l’eau et de prévention des inondations, ainsi que de prévisions météorologiques. C. Recommandations pour les politiques 161. Ce qui suit considère les recommandations spécifiques visant les contraintes et les défis rencontrés par les MPME et la réalisation du potentiel de la chaîne de valeur du manioc :81 1. Définir un environnement favorable aux entreprises pour accélérer les investissements privés dans les chaînes de valeur prioritaires. Exemples de pays : L’environnement des affaires de la Côte d’Ivoire a considérablement évolué au cours de la dernière décennie. Le fort dynamisme de l’économie, la stabilité croissante de l’environnement politique, la convivialité du cadre juridique et réglementaire et la compétitivité des coûts des intrants sont autant de facteurs clés contribuant au développement du secteur privé et aux investissements étrangers. Le Gouvernement politiquement stable de la Sierra Leone a réussi à contrôler la corruption et à offrir des incitations adéquates pour diversifier son économie avec des activités accrues dans l’agriculture et la construction ainsi que la reprise de la production et des exportations de minerai de fer. 2. Réduire la charge fiscale et rationaliser les procédures administratives afin de promouvoir l’accès à la terre, le développement du marché privé et la croissance durable des MPME dans les chaînes de valeur prioritaires. Exemples de pays : Le Maroc, le Nigeria et le Ghana peuvent fournir des études de cas de consolidation fiscale82 pour améliorer la viabilité des finances publiques en réduisant la trajectoire de la dette et les coûts du service de la dette tout en minimisant les effets négatifs sur l’économie. La Sierra Leone offre des taux d’imposition favorables et le Liberia des processus administratifs à faible coût pour les entreprises, ce qui a contribué à rendre ces pays respectivement attrayants pour le développement du secteur privé et les investissements étrangers. 3. Améliorer l’accès à un financement adapté aux MPME, des pe tits exploitants aux producteurs commerciaux/agrégateurs. 81 Le cas pratique 2 du CEM contient plus de détails et un partage d’expériences nationales. 82 https://ifs.org.uk/publications/fiscal-consolidation-after-covid-19-issues-and-policy-options-sub-saharan-africa 97 Exemple de pays : Dans le cadre d’une réforme du secteur financier et d’un plan de développement du secteur agricole s’étalant sur une décennie, le Maroc a constamment amélioré l’accès au financement par le biais d’outils adaptés au secteur agricole grâce à un partenariat solide entre l’État et le Groupe Crédit agricole du Maroc. 4. Renforcer la capacité du soutien à l’entrepreneuriat existant et adapter les programmes d’entrepreneuriat aux groupes vulnérables, y compris les femmes et les jeunes. Exemples de pays : La Tunisie et le Sénégal ont mis en œuvre le Startup Act accompagné de politiques visant l’administration des entreprises en phase de démarrage et l’accès au financement et au marché. Pour les politiques plus axées sur l’agriculture, on peut citer le Maroc et la Côte d’Ivoire avec leurs programmes en cours de modernisation et numérisation de la chaîne de valeur de l’agro - industrie. 5. Étendre le développement et l’accès aux zones économiques spécialisées afin d’attirer davantage d’investissements étrangers. Exemples de pays : Le Kenya, le Nigeria, le Maroc, l’Égypte et l’Éthiopie sont des chefs de file sur le continent africain, malgré des différences dans les définitions et les statistiques relatives aux zones économiques spéciales (ZES). En effet, la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED) indique qu’en 2020, le Kenya comptait 61 ZES, suivi du Nigeria et de l’Éthiopie avec respectivement 38 et 18 ZES. D’autre part, l’Organisation des zones économiques africaines (AEZO) fait état de chiffres différents, le Maroc arrivant en tête du continent avec 26 ZES, le Nigeria et l’Égypte suivant avec 23 et 16 ZES, respectivement. 6. Accélérer la modernisation des infrastructures et la transformation numérique du pays, y compris celle des chaînes de valeur agricoles prioritaires. Exemple de pays : Le Ghana est l’une des économies les plus compétitives d’Afrique grâce à ses institutions solides et aux importants investissements réalisés dans son infrastructure TIC (technologies de l’information et de la communication), ainsi qu’à l’accès à une main -d’œuvre et à une énergie à faible coût. Le Kenya et le Maroc sont également des études de cas en cours en ce qui concerne la transformation numérique de leur secteur agricole, depuis la connectivité numérique jusqu’aux plateformes numériques publiques, en passant par les services financiers, les entreprises et les compétences numériques. 7. Catalyser les opportunités de développement du marc hé pour promouvoir l’intégration régionale à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Exemple de pays : Les principaux pays producteurs de manioc sont le Nigeria, le Brésil, la Thaïlande, le Mozambique, le Vietnam, le Ghana et la Côte d’Ivoire, entre autres. Pour l’intégration régionale au sein du pays, la RDC peut donner la priorité aux centres urbains et aux cinq zones économiques mises en évidence dans l’annexe I. L’intégration régionale à l’extérieur du pays peut se concentrer sur les partenaires commerciaux traditionnels de la RDC dans ses frontières immédiates et sur les pays leaders à travers le continent qui cherchent à renforcer le leadership de l’Afrique dans la chaîne de valeur mondiale du manioc. 8. Étendre les programmes d’adaptation au changement climatique. Exemple de pays : La Tunisie, le Maroc et le Botswana sont les pays africains les plus performants pour l’indice mondial d’adaptation de l’université Notre-Dame de 2020. Parmi les critères les plus importants à prendre en compte dans les études de cas des pays, il faudrait combiner le 98 développement durable du secteur agricole et un plan bien exécuté pour l’énergie renouvelable et l’efficacité énergétique renforçant leur contribution déterminée au niveau national (CDN). Le tableau 2.8 résume les recommandations pour les politiques au fil du temps : Tableau 2.8 : Recommandations prioritaires pour les politiques Gains rapides Définir un environnement favorable aux entreprises afin d’accélérer les investissements privés dans les chaînes de valeur prioritaires. Réduire la charge fiscale et rationaliser les procédures administratives afin de promouvoir l’accès à la terre, le développement du marché privé et la croissance durable des MPME dans les chaînes de valeur prioritaires. Améliorer l’accès à un financement adapté aux MPME, depuis les petits exploitants jusqu’aux producteurs commerciaux/agrégateurs. Renforcer la capacité du soutien à l’entrepreneuriat existant et adapter les programmes d’entrepreneuriat aux groupes vulnérables, notamment les femmes et les jeunes. Priorité élevée Accélérer la modernisation des infrastructures et la transformation numérique du pays, y compris dans les chaînes de valeur agricoles prioritaires. Étendre le développement des zones économiques spécialisées et l’accès à celles-ci afin d’attirer davantage d’investissements étrangers. Catalyser les opportunités de développement du marché pour promouvoir l’intégration régionale à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Développer les programmes d’adaptation au changement climatique. 99 Références Banque mondiale (2022), World Development Indicators, https://data.worldbank.org/ (accessed on 10 May 2023); https://stat.link/98rud7 Banque mondiale, Étude sur la politique fiscale en Afrique de l'Ouest - Benin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire et Togo. Options de réforme dans une perspective sous-régionale, Washington DC : Banque Mondiale, 2019. Begazo, Tania, Moussa P. Blimpo, and Mark A. Dutz. Digital Africa: Technological Transformation for Jobs. Washington, DC: World Bank, 2023. Gaspar, V. et al. (2019), Fiscal Policy and Development: Human, Social, and Physical Investments for the SDGs, https://www.imf.org/en/Publications/Staff-Discussion-Notes/Issues/2019/01/18/Fiscal-Policy-and- Development- Human-Social-and-Physical-Investments-for-the-SDGs-46444 (accessed on 30 March 2023) https://www.broadbandcommission.org/advocacy-targets/2-affordability/ https://www.oecd.org/tax/exchange-of-tax-information/convention-on-mutual-administrative-assistance-in-tax- matters.htm https://www.oecd.org/tax/transparency/ Leif Jensen & Grégoire Rota-Graziosi, Étude sur les écarts fiscaux en république démocratique du Congo, Washington DC: Banque mondiale, 2017. Odd-Helge Fjeldstad, Morten Bøås, Julie Brun, Bjørkheim Frida and Margrethe Kvamme, Building tax systems in fragile states. Challenges, achievements and policy recommendations, CMI Report, number 3, March 2018. OECD Revenue Statistics in Africa, 2022; https://doi.org/10.1787/7f54581d-fr 100 CHAPITRE 3 INTEGRATION ET DIVERSIFICATION DES ECHANGES AU NIVEAU REGIONAL : L'INTEGRATION DE LA RDC DANS LES MARCHES REGIONAUX, LES PERSPECTIVES DE L'ADHESION A LA CAE ET LA ZONE DE LIBRE-ECHANGE CONTINENTALE AFRICAINE Directeur général et COO de la Banque mondiale rencontre des commerçantes transfrontalières. 101 Chapitre 3 : Intégration et diversification des échanges au niveau régional : L'intégration de la RDC dans les marchés régionaux, les perspectives de l'adhésion à la CAE et la Zone de libre-échange continentale africaine 3.1. Les perspectives d'intégration régionale ouvriront-elles la porte à la diversification ? 3.1.1 Une géographie difficile pour le commerce 162. La RDC est un vaste pays, le troisième selon la taille sur le continent africain, qui partage ses frontières avec 9 pays voisins, l’Angola, le Burundi, l’Ouganda, la République centrafricaine, la République du Congo, le Rwanda, le Soudan du Sud, la Tanzanie et la Zambie. Bien que la RDC ne soit pas enclavée, son accès maritime est très limité, avec un littoral de seulement 37 km de long. Le pays ne dispose que d'une capacité portuaire maritime extrêmement limitée : Matadi sur le fleuve Congo est un port de transbordement, principalement via Pointe Noire en République du Congo, et représente 95 % du trafic maritime de la RDC. Outre le corridor Pointe Noire-Matadi, la RDC est desservie par 13 corridors terrestres qui s'appuient sur les ports des pays voisins qui servent de portes d'entrée naturelles. Cinq de ces corridors ont actuellement un rôle économique prédominant : à travers l'Afrique de l'Est (corridor central et nord), l'Afrique du Sud (corridor nord-sud), et l'Angola (corridor de Luanda) (CPSD, 2020).83 Cette géographie se traduit par des coûts commerciaux très élevés, aggravés par des infrastructures délabrées, des sociétés d’État comme opérateurs et une mise en conformité aux frontières onéreuse. 163. Les connexions avec l'arrière-pays sont difficiles ou inexistantes, ce qui signifie que les principaux centres économiques du pays font peu de commerce entre eux et dépendent plutôt de leurs échanges avec les pays voisins. 3.1.2 Le commerce de la RDC est très concentré 164. Les exportations de la RDC sont très concentrées, les produits miniers, le cuivre et le cobalt, représentant 96 % des exportations totales (2019-2021). Cette concentration s'est accrue au fil du temps, à cause d’une diminution considérable de la part des produits autres que les produits miniers et métalliques. Il y a dix ans, les produits alimentaires et les légumes représentaient en moyenne 1,4 % des exportations totales, mais n'en représentent plus que 0,7 % aujourd'hui. Il en va de même pour les produits du bois qui sont passés de 2,3 % à 0,7 % du total (figure 3.1). 165. Le degré de transformation des exportations de la RDC a augmenté. Il y a dix ans, les produits minéraux représentaient 44 % des exportations totales, alors qu'aujourd'hui ils n’en représentent plus que 8,4 %. Depuis 2013, la RDC vise à limiter les exportations de concentré de cuivre, mais l'insuffisance des capacités de fusion a conduit le gouvernement à accorder des dérogations, mais cette situation 83Le corridor de Lobito avec l'Angola, qui n'est pas encore économiquement significatif, est considéré comme une voie d'exportation supplémentaire potentielle via l'Angola pour l'exploitation minière. 102 pourrait bientôt changer avec l’entrée en service de nouvelles fonderies.84 En ce qui concerne le cobalt, les investissements dans la production d'hydroxyde de cobalt ont entraîné une augmentation des exportations du produit transformé et la quasi-élimination des exportations de minerai de cobalt (figure 3.2). Auparavant, le minerai était exporté vers la Zambie. Figure 3.1. Composition des exportations de la RDC 100.0% 90.0% Autre 80.0% Transport 70.0% Légumes 60.0% Produits alimentaires 50.0% Bois 40.0% Métaux précieux 30.0% Produits chimiques 20.0% 10.0% Minéraux 0.0% Métaux 2019-21 2009-11 Source : Base de données BACI du CEPII : Base de données BACI du CEPII de l'OEC Figure 3.2. Exportations de minerais de cuivre et de cobalt et de produits raffinés, 2009-2021 11.0 10.5 Minerai de cuivre 10.0 9.5 Cuivre brut 9.0 8.5 Cuivre affiné 8.0 7.5 Minerai de cobalt 7.0 Mille milliards 6.5 Oxydes et hydroxydes de cobalt 6.0 5.5 Cobalt 5.0 4.5 4.0 3.5 3.0 2.5 2.0 1.5 1.0 0.5 0.0 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Source : Base de données BACI du CEPII : Base de données BACI du CEPII de l'OEC 84Depuis 1980, GECAMINES exploite la fonderie de cuivre de Lubumbashi, qui a longtemps été la seule fonderie du pays. En 2021, la fonderie de cuivre de Lualaba a été ouverte suite à l'ouverture de la mine de Deziwa. Ivanhoe Mines, qui exploite la concession de Kamoa-Kakula, a également annoncé qu'elle construirait une fonderie d'une capacité de production de 250 000 tonnes par an, triplant presque la capacité actuelle de la RDC. Le début de la construction a été annoncé pour mai 2022 et la livraison pour 2024. 103 166. Au cours de la même période, le nombre de partenaires a diminué . La Chine reste de loin le principal partenaire commercial et a consolidé cette position au cours de la dernière décennie, recevant en moyenne entre 2019-2021, 50 % des exportations, contre 45 % dix ans plus tôt. La Chine a également presque doublé sa part dans les importations de la RDC, passant de 12,7 à 24,7 % au cours de la même période. La RDC commerce principalement avec des pays qui ne sont pas dans son voisinage immédiat. Ceci est plus vrai pour les exportations que pour les importations. Au total, un tiers des importations de la RDC proviennent d'Afrique, et 18,6 % de ses exportations sont destinées à l'Afrique. Dans ce dernier cas, il s'agit principalement de la valeur des exportations de minerais et de produits métalliques vers la Zambie et la Tanzanie. 167. Le commerce international en RDC se caractérise par différents segments de l'économie, fonctionnant presque en isolement les uns des autres, révélant ainsi leur nature multiforme. Outre l'inefficacité des postes-frontières, les différentes provinces du pays sont connectées à différentes régions du continent, commercent indépendamment les unes des autres (et peu les unes avec les autres), et sont soumises à des conditions différentes. ▪ Les provinces du Kivu, et probablement aussi du Tanganyika commercent intensément avec l'Ouganda, le Rwanda et la Tanzanie, qui agissent tous comme des zones de transit, mais aussi comme des fournisseurs/clients d'un commerce actif à petite échelle. Les statistiques des pays voisins donnent dans certains cas une image détaillée de la nature de ce commerce, qui consiste principalement en biens de consommation. ▪ La province du Haut Katanga est reliée à la Zambie et, à travers elle, à l'Afrique australe. Les échanges commerciaux sont dominés par les importantes exportations minières85 de la province (et celle de la Lualaba voisine), et par des importations de maïs en provenance de Zambie. ▪ Kinshasa et Kongo central sont proches de la principale porte d'entrée du pays : le port de Matadi, lui-même alimenté par le port de Pointe Noire. Les provinces commercent également avec la République du Congo de l'autre côté du fleuve. Le transport interne sur le fleuve Congo relie ensuite les provinces de l'Équateur, de la Mongala et du Tshopo. 168. Les différentes réalités géographiques et géomorphiques des provinces éloignées ont conduit (ou seraient susceptibles de conduire) à divers degrés de spécialisation économique . Par conséquent, elles peuvent être confrontées à des défis différents, mais aussi à des opportunités différentes qui doivent être prises en compte dans la stratégie de diversification du pays. La composition des exportations de la RDC vers ses différents voisins peut être un indicateur de « spécialisation ». Les exportations enregistrées de la RDC vers les voisins régionaux montrent ce qui suit : 1) les exportations vers la Zambie sont presque exclusivement constituées de produits minéraux, cuivre, cobalt et zinc, qui sont ensuite fondus en Zambie, et de reventes de machines ; les exportations sont très peu diversifiées ; 2) les exportations vers l'Angola sont modestes et constituées de produits de consommation, légumes et huiles ; 3) les exportations vers la République du Congo sont également modestes, malgré la proximité des deux capitales, et comprennent principalement des produits manufacturés qui peuvent être des reventes de produits précédemment importés ; 4) les exportations vers les pays de la Communauté d’Afrique de l’Est (CAE) sont comparativement plus importantes, dominées par le bois scié, les déchets métalliques, l'huile et les graisses alimentaires et certains minéraux. Les statistiques sur le commerce des services avec les pays voisins ne sont pas disponibles : des preuves anecdotiques suggèrent que les exportations intégrées de 85https://www.reuters.com/world/africa/congo-plans-border-post-expansion-mining-trucks-endure-up-60-km-queues-2022-07- 12/ 104 services de transport sont susceptibles d'être relativement importantes (en particulier avec la Zambie, car le cuivre est transporté par camion). La RDC a également exporté de l'électricité vers ses voisins. Tableau 3.1. Exportations totales et 5 premières catégories de produits exportés par la RDC vers les voisins régionaux CONGO (2019) ANGOLA (2019) ZAMBIA (2020) EAC 5 (2021) hs product 000 usd hs product 000 usd hs product 000 usd hs product 000 usd 89 SHIPS, BOATS 2,757 33 ESSENTIAL OILS AND RESINOIDS 1,404 26 ORES, SLAG AND ASH 62,140 44 WOOD AND ARTICLES OF WOOD 25,024 87 VEHICLES OTHER THAN RAILWAY 475 7 EDIBLE VEGETABLES AND CERTAIN ROOTS 399 28 INORGANIC CHEMICALS 4353 72 IRON AND STEEL 6881 70 GLASS AND GLASSWARE 406 34 SOAP, ORGANIC SURFACE-ACTIVE AGENTS 330 84 MACHINERY 2813 12 OIL SEEDS AND OLEAGINOUS FRUITS 6016 84 MACHINERY 275 84 MACHINERY 222 87 VEHICLES OTHER THAN RAILWAY 658 15 ANIMAL OR VEGETABLE FATS AND OILS 4253 28 INORGANIC CHEMICALS 134 15 ANIMAL OR VEGETABLE FATS AND OILS 180 78 LEAD AND ARTICLES THEREOF 373 26 ORES, SLAG AND ASH 2427 OTHERS 605 OTHERS 1,653 OTHERS 647 OTHERS 9,206 TOTAL 4,652 4,189 70,984 53,807 Source : Données Comtrade de l'ONU utilisant des statistiques commerciales miroirs 169. Le commerce régional est important avec environ 20 % des importations de la RDC provenant de ses voisins de l'Est, la Zambie et la CAE. La part des importations en provenance des pays de la CAE est restée assez stable, avec une légère baisse de 10,2 % à 9,6 % des importations totales entre 2009-2011 et 2019-2021, mais avec des variations plus importantes de la part des importations provenant des membres individuels de la CAE, le Rwanda étant devenu le principal fournisseur d'importations formelles. Les importations en provenance de Zambie sont passées de 8 % à 10 % des importations totales. Les importations en provenance d'Afrique du Sud, un autre voisin régional pas trop éloigné, ont augmenté pour atteindre 5 % du total. Contrairement à d'autres pays d'Afrique subsaharienne, la RDC a tendance à dépendre davantage des importations en provenance de partenaires commerciaux du continent, ce que démontre une comparaison de la Banque mondiale (2020) montrant que la RDC fait partie des pays dont les importations en provenance du continent sont les plus intensives. Les autres membres de la CAE ont également tendance à dépendre relativement plus des importations en provenance du reste de l'Afrique. Figure 3.3. Origine des importations de la RDC et destination des exportations de la RDC (part du total) 90% 90% Reste de la CAE Reste de la CAE 80% 80% France 70% 70% Mozambique Pays-Bas 60% EAU 60% Zambie 50% Belgique 50% Corée du Sud Rwanda 40% 40% Inde 30% 30% Arabie Saoudite Zambie 20% Afrique du Sud 20% Singapour 10% États-Unis 10% Afrique du Sud Chine 0% 0% 2009-11 2019-21 2009-11 2019-21 Source : Base de données BACI du CEPII : Base de données BACI du CEPII de l'OEC 105 170. Les statistiques officielles sur les flux commerciaux avec la région ne tiennent pas compte d’importants flux commerciaux informels, notamment dans la partie orientale du pays . Pour ces derniers, seules des données partielles sont disponibles, provenant d'enquêtes sur le petit commerce frontalier menées par certains voisins de la RDC. Le tableau 3.2. résume les données disponibles pour les pays de la CAE. Ces chiffres montrent des importations à petite échelle substantielles en provenance de la région de la CAE qui s'élèvent approximativement à 430 millions d’USD en moyenne. Elles proviennent principalement de l'Ouganda et du Rwanda, et équivalent approximativement 13 % du montant des importations formellement enregistrées en provenance de l'Afrique subsaharienne, et près de la moitié (47 %) des importations formelles enregistrées en provenance des partenaires de la CAE.86 Les chiffres des exportations sont plus modestes, avec seulement environ 40 millions de dollars d'exportations à petite échelle. Tableau 3.2. Petit commerce frontalier au sein de la CAE (en millions USD, 2018, 2019 ou 2021) Importateur Exportateur Burundi*** Ouganda** Rwanda Kenya Tanzanie RDC Burundi*** 0 - - 7,1 9,3 Ouganda** 0,5 11 97,5 32 329,8 Rwanda* 11,3 11,3 - - 101,5 Kenya 0 23,3 - - - Tanzanie 37,3 5,3 - - - RDC 0,7 23,5 - - - * 2021 source : Rapport semestriel sur le corridor nord ** 2019 source : Enquête annuelle ICBT (à l'exception des importations en provenance du Rwanda, 2021) ***2018 source : Rapport sur le commerce transfrontalier informel (à l'exception des importations en provenance du Rwanda, 2021). Le corridor nord cite 47,4 millions au total pour le Burundi en 2018, dont 56 % pour la RDC. 171. Les exportations de services sont très modestes et leur part dans le commerce total est faible. Historiquement, la contribution des exportations de services à la balance des paiements a été très modeste, ne représentant en 2021, que 168,7 millions de dollars, soit seulement 0,75 % des exportations totales de biens et de services (figure 3.4). 86Pour ces calculs, la moyenne des importations en RDC pour l'année 2019-2021 a été utilisée. Source : données BACI de l'OEC : Données BACI de l'OEC. 106 Figure 3.4. Exportations de biens et services de la RDC (balance des paiements) en $US 25 Billions 20 15 services biens 10 5 0 Source : Banque mondiale WDI 3.2 Politiques du commerce : première évaluation de la CAE et de la ZLECAF 3.2.1. Politiques de stimulation du commerce : une première évaluation de la manière dont l'adhésion à la CAE et à la ZLECAF pourrait favoriser une réforme du commerce 172. La faible connectivité et la faible intégration des politiques commerciales avec les pays voisins sont deux des principaux obstacles à une intégration plus étroite de la RDC dans les marchés mondiaux . Ces deux obstacles s'ajoutent à d'importants problèmes de compétitivité qui affectent également l'économie du pays. 173. Les droits à l'importation en RDC sont relativement bas, à 10,9 % pour la moyenne simple de la NPF et à 8,4 % en 2020 lorsqu'ils sont pondérés par la valeur des importations . La RDC est membre de la SADC (16 membres) et du COMESA (21 membres), offrant ainsi une réciprocité en termes d'accès au marché en franchise de droits avec ces marchés. Cinq pays de la CAE sont également membres du COMESA (le Soudan du Sud ne fait pas partie du COMESA). 174. La signature de l'accord sur la Zone de libre-échange continentale africaine et l'entrée de la RDC dans la CAE vont modifier substantiellement ses perspectives d'intégration régionale . La RDC a adhéré au traité de la CAE le 8 avril 2022, devenant membre à part entière le 11 juillet 2022.87 Les modalités complètes de l'adhésion à la CAE font actuellement l'objet de discussions, la feuille de route de l'adhésion de la RDC étant en cours de négociation. L'objectif final de la CAE est d'établir une fédération et une union monétaire (le protocole pour l'établissement de l'union monétaire de la CAE est en vigueur depuis 2014). 175. Si la RDC a déjà accès aux marchés voisins de la CAE en vertu de l'accord du COMESA, l'adhésion à la CAE devrait néanmoins avoir des implications immédiates en termes d'accès au marché . Le taux moyen d'utilisation des préférences de 77,9 % dans la CAE est de loin supérieur à celui des autres communautés économiques régionales avec 39,8 % pour le COMESA et 25,3 % pour la SADC (CNUCED et 87 Source : CAE 107 COMESA, 2023). Par exemple, le taux d'utilisation des exportations du Rwanda vers la CAE s'élève à 83,7 %, alors que seulement 7 % de ses exportations vers le COMESA bénéficient de taux préférentiels. Les taux d'utilisation de l'Ouganda sont presque inexistants pour le régime commercial du COMESA, avec 1,4 %, alors qu'ils sont de 53,8 % pour la CAE. Le Burundi affiche également un taux d'utilisation élevé pour les préférences commerciales de la CAE (82,9 %) et un taux d'utilisation nettement inférieur pour les préférences commerciales du COMESA (15,8 %). 176. Dans l'ensemble, la RDC a tendance à imposer des droits relativement élevés à ses partenaires commerciaux africains alors que d'autres pays d'Afrique tendent à offrir de meilleurs taux préférentiels, ce qui prouve également que le pays utilise peu les régimes commerciaux préférentiels . Le calcul par la Banque mondiale (2020) des droits de douane moyens prélevés sur les partenaires commerciaux africains pour 25 pays du continent, montre que l'imposition moyenne de la RDC, qui s'élève à environ 9 %, est l'une des plus élevées, avec seulement 4 pays imposant des droits plus élevés. Ce taux moyen est assez proche du taux de la nation la plus favorisée (NPF) moyen de la RDC, ce qui confirme également que les préférences tarifaires sont rarement appliquées ou accordées. Lorsqu’on sait que la RDC fait également partie des pays dont la part des importations en provenance d'Afrique est la plus élevée dans cet échantillon de 25 pays, il est clair que l'effet potentiel d’une libéralisation régionale pourrait être élevé. Tableau 3.3. Répartition des taux tarifaires dans le tarif extérieur de la RDC en 2020 (pourcentage du total) NPF 2020 Agricole Non agricole zéro 3,7 0,4 5% 18,6 39,0 10 % 54,3 31,6 20 % 23,4 29,0 Total 100,0 100,0 Source : Profil tarifaire de l'OMC 202288 Tableau 3.4. Répartition des taux tarifaires dans le tarif extérieur commun de la CAE en 2022 (pourcentage du total) CAE 2022 Agricole Non agricole zéro 15,6 41,0 10 % 15,9 20,3 25 % 24,9 34,2 35 % 39,5 3,7 50 % 0,4 0,3 60 % 1,9 0,0 Autre 1,8 0,5 Total 100,0 100,0 Source : tarifs de la CAE et calculs des auteurs 88 https://www.wto.org/english/res_e/statis_e/daily_update_e/tariff_profiles/cd_e.pdf 108 177. L'adhésion à la Communauté de l’Afrique de l’Est (CAE) entraînera une modification du régime tarifaire de la nation la plus favorisée (NPF) de la RDC, vers un régime plus protecteur. Cette adhésion devrait en effet obliger la RDC à adopter le tarif extérieur commun (TEC) de la CAE mis en œuvre depuis 2010 dans le cadre de son protocole d'union douanière. Une révision complète du TEC a été menée par les pays membres et s'est achevée en mai 2022 avec l’adoption de la nouvelle grille tarifaire du TEC, qui a été mise en œuvre à partir du 1er juillet 2022. Le principal résultat de cette révision a été l'adoption d'un nouveau taux tarifaire maximal, qui est passé de 20 % à 35 %. Près de 500 produits relèvent désormais de la nouvelle fourchette maximale de 35 % et la moyenne tarifaire simple passe de 12,7 % à 13,5 % (tableau 3.5). Les produits concernés sont principalement des produits de consommation : aliments et boissons, meubles et cuir, et textiles. La révision élimine également la pratique des sursis d'application qui permettait aux membres de la CAE de s'écarter temporairement du TEC. Tableau 3.5. Comparaison du TEC CAE révisé avec le TEC 2017 TEC 2022 % TEC 2017 % zéro 2,244 37,7 2,128 37,3 10 % 1,175 19,7 1,159 20,3 25 % 1,964 33,0 2,297 40,2 35 % 496 8,3 12 0,2 50 % 19 0,3 18 0,3 60 % 16 0,3 15 0,3 autres 39 0,7 82 1,4 Total 5,953 100,0 5,711 100,0 Moyenne simple NPF 13,5 % 12,7 % 178. Les tarifs de la CAE ont une structure très différente de ceux de la RDC , comme le montrent les tableaux 3.3 et le tableau 3.4. Les droits maximums du tarif de la CAE sont plus élevés avec un taux maximum de 35 %, ainsi que certains régimes s’appliquant à des produits sensibles, alors que le droit tarifaire maximum de la RDC n'est que de 20 %. D'autre part, la CAE a une proportion plus élevée de lignes tarifaires exemptes de droits, alors que la RDC n'en a aucune. La moyenne simple du nouveau tarif de la CAE est de 13,5 %, avec une forte différence entre les tarifs sur les produits agricoles (25,4 % en moyenne) et les produits non agricoles (11,2 %), ce qui est nettement supérieur à la moyenne NPF actuelle de la RDC de 10,9 %, avec également presque aucune différence entre les tarifs moyens appliqués aux produits agricoles (11 %) et aux produits non agricoles (10,9 %). 179. L'adhésion de la RDC à la CAE devrait contribuer à moderniser et à libéraliser son régime commercial. L’ambition de la CAE est un effort d'intégration profonde, même si dans la pratique la portée des politiques qu'elle couvre et des engagements qu'elle exige de ses membres sont plus limités. Les disciplines de la CAE sont cependant plus étendues que celles du COMESA et de la SADC, les deux accords dont la RDC est actuellement membre (tableau 3.6.). Plusieurs initiatives ont été prises pour renforcer l'intégration entre ses membres. En 2007, un mécanisme commun de notification et d'élimination des barrières non tarifaires (BNT) a été institué. Ce mécanisme a permis de résoudre les problèmes liés aux 109 BNT sur le marché de la CAE et de réduire le nombre de problèmes signalés.89 En ce qui concerne les normes et la métrologie, la loi de 2006 sur l’élaboration des normes, l'assurance de la qualité, la métrologie et les essais (SQMT) et le protocole SQMT de 2001 fournissent un cadre pour une politique commune de la CAE (OMC, 2019). Plusieurs réformes ont également été entreprises dans les domaines des douanes et de la facilitation des échanges, avec la mise en place de postes frontaliers communs, d'un système régional pour les opérateurs économiques agréés et l'interconnexion des systèmes douaniers. Un protocole de marché commun (PMC) a été signé en 2010, prévoyant la liberté de circulation des personnes, des biens, des services, de la main-d'œuvre et des capitaux, bien que plusieurs aspects de ce protocole restent à mettre en œuvre (par exemple, il n'y a pas de régime d'investissement commun dans la CAE). Tableau 3.6. Feuille de route pour la mise en œuvre de l'adhésion de la RDC à la CAE Union douanière – Adoption des règles d'origine de la CAE (2022-2023) – Intégration et adoption d'accords commerciaux négociés avec des parties tierces (2022-2023) – Libre circulation du commerce des services dans la CAE (2022-2023) – Au moins 50 % des barrières non tarifaires (BNT) signalées sont résolues dans la région (juin 2023) – Facilitation de l'accès des MPME au marché transfrontalier de la CAE (juin 2023) – Participation de la RDC à l'harmonisation des normes de la CAE + adoption des normes harmonisées de la CAE (2022-2025) Marché commun – Opérationnalisation du cadre de suivi de la mise en œuvre du PMC en RDC (2022-2024) – Harmonisation des politiques d'investissement, initiatives de développement du secteur privé ; automatisation du registre des entreprises (2022-2024) – Développement et hiérarchisation des projets et programmes d'infrastructure bancables (y compris la liaison de la RDC avec les corridors central et nord dans le cadre du protocole d'accord conclu entre la CAE et la CEEAC) (2022-2025) – Mise en œuvre de la politique d'industrialisation de la CAE (valeur ajoutée minérale et secteurs extractifs) (2022-2023) Union monétaire/fédération politique et autres domaines transversaux – Mise en œuvre de la feuille de route pour la réalisation de l'Union monétaire de la CAE (2022-2023) – Adoption d'un modèle de confédération politique de la CAE » (2022-2024) – Nomination d'un juge + création d'un sous-registre de la Cour de justice de l'Afrique de l'Est à Kinshasa (2022-2023) – Adhésion et participation de la RDC à l'Assemblée législative de l'Afrique de l'Est (2022-2023) Source : Byiers et coll. (2023) à partir de sources non publiées de la CAE 89 Trademark Africa, How Non-tariff Barriers Affect Trade in the EAC (Comment les barrières non tarifaires affectent le commerce dans la CAE), https://www.trademarkafrica.com/how-non-tariff-barriers-affect-trade-in-the-eac/ 110 Figure 3.5 Couverture politique des accords du COMESA, de la SADC et de la CAE COMESA SADC EAC COMESA SADC EAC Agriculture Information Society Anti-dumping Investment Approx. Legislation Labour Markets Competition Policy Movement of Capital Countervailing measures Political Dialogue Cultural Cooperation Public Administration Economic Policy Dialogue Public Procurement Education and Training Regional Cooperation Energy Research and Technology Environmental Laws SPS Export Restrictions Services Financial Assistance Social Matters FTA Agriculture Statistics FTA Industrial Subsidies Health TBT Human Rights Trade Facilitation Illicit Drugs TRIPS Industrial Cooperation TRIMS Visa and Asylum Note : rouge = pas de couverture ; orange = règles non contraignantes ; vert = règles contraignantes Source : Base de données des accords commerciaux approfondis 2.0 180. La RDC est relativement ouverte au commerce des services, obtenant un score plus élevé que les membres de la CAE dans la plupart des catégories selon les derniers scores de l'indice de restriction du commerce des services (figure 3.6). La CAE a fait des progrès significatifs dans la libéralisation des secteurs des services au sein de la communauté, comme le montrent Dihel et Goswami (2016). Elle a lancé plusieurs initiatives telles que la reconnaissance mutuelle des qualifications, la facilitation de la circulation au sein de la CAE avec le visa touristique unique, et un mécanisme de suivi avec le tableau de bord du marché commun de la CAE, qui n'avait guère d'équivalent dans d'autres communautés économiques régionales d'Afrique. Cependant, la libéralisation pouvait en même temps réaliser des gains supplémentaires, comme l'ont noté Hoekman et Shepherd (2015), mais ces gains n'ont peut-être pas encore été réalisés. Dans le cas de la RDC, l'absence de barrières commerciales à la fourniture de services ne peut cacher les importantes restrictions qui existent sur les marchés domestiques de services. Par exemple, la Banque mondiale (2019) rapporte d'importantes distorsions et défaillances du marché dans plusieurs secteurs de services tels que le transport et la fourniture d'électricité. Ainsi, malgré l’agenda potentiel pour une libéralisation plus poussée des marchés de services, les exportations de services ne jouent pas un rôle important dans la balance extérieure de la RDC comme discuté précédemment. Étant donné l’affaiblissement du dynamisme initial de la réforme de la CAE dans le commerce des services, il semble peu probable que le commerce des services puisse à court terme jouer un rôle important dans le contexte de l'adhésion à la CAE. 181. Il y a peu d’informations sur les barrières non tarifaires en RDC. L'utilisation par la RDC de l'inspection avant expédition est un exemple de mesures non tarifaires (MNT), mais dans l'ensemble, il n'y a pas de données sur la RDC dans la base de données WITS des Nations Unies. Par conséquent, l'analyse des BNT en RDC doit s'appuyer sur des estimations. Nous utilisons ici les mêmes estimations que celles 111 utilisées dans World Bank (2020), lesquelles proviennent de la méthodologie proposée par Kee, Nicita et Olarreaga (2009). Ces estimations montrent que les BNT sont relativement élevées en RDC, équivalant à environ 10 % ad valorem. Figure 3.6 Restrictions au commerce des services en RDC par rapport aux pays de la CAE Professional 75 65 Computer And Transport 55 Related 45 35 25 Tourism And 15 Communication Travel Related 5 -5 Construction And Health Related Engineering Financial Distribution Burundi RDC Kenya Rwanda Tanzanie Ouganda Source : Base de données STRI de l'OMC et de la Banque mondiale 112 Figure 3.7. Barrières non tarifaires pondérées en fonction des échanges et imposées aux importations de la zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), par pays, 2020 et 2035 Source : Rapport ZLECAF, Banque mondiale 2020 182. Les principales barrières au commerce pour la RDC sont la facilitation insuffisante du commerce et les carences logistiques, dues à une combinaison de conditions géographiques entraînant des coûts élevés auxquelles s’ajoute un niveau de performance généralement faible . Les coûts déclarés du commerce en RDC sont très élevés, comme en témoignent les prix suivants sur les corridors desservant les trois principaux centres économiques du pays : • Sur le corridor Matadi-Kinshasa, l’Étude diagnostique sur l'intégration commerciale (EDIC) du Cadre Intégré Renforcé (CIR) (2019) rapporte que le coût d'expédition d'un conteneur de vingt pieds EVP de Rotterdam à Matadi est proche du double (3 800 € - 4 270 $ US) du coût d'expédition à Pointe Noire ou à Luanda (2 100 € - 2 359 $ US)90 à cause du transbordement des marchandises de ces ports en eau profonde sur des bateaux capables de remonter le fleuve jusqu'au port de Matadi, moins profond. Ensuite, à partir de Matadi, l’expédition de ces marchandises se fait par train ou par camion, entraînant des coûts supplémentaires. Selon Le CIR (2019), l’expédition d’un conteneur de 20 pieds de Matadi à Kinshasa coûte entre 3 376 et 3 677 USD. Au total, le coût de l'expédition d'un conteneur vers Kinshasa pourrait être estimé à environ 7 600-7 950 USD, soit plus de 4 fois le coût de l'expédition vers Pointe Noire. Pour les expéditions vers l'arrière-pays, sur le fleuve Congo, ce montant sera encore plus élevé (SFI, 2022). 90 Taux de change de € 0,89 pour US $ 1 au 31/12/2019. 113 • Sur le corridor de Mombasa desservant l'est de la RDC, la Kenya Competition Authority (2019) rapporte que l’expédition d'un conteneur de vingt pieds de Mombasa à Goma coûtait 6 127 USD en 2017. 91 • Lubumbashi est principalement desservie par deux corridors : celui qui la relie, à travers la Zambie, au port de Durban en Afrique du Sud (42 % des volumes selon Afreximbank, 2021) et à Dar Es-Salaam à travers la CAE (50 % des volumes). Selon le rapport, les coûts moyens de transport vers Lubumbashi se situent entre 6 370 USD (Durban) et 8 300 USD (Dar Es-Salaam) pour un conteneur de 20 pieds EVP.92 183. La mauvaise qualité des infrastructures de transport et le manque de compétitivité des marchés de transport (FEI, 2019) contribuent au coût élevé du commerce . Le FEI (2019) et la SFI (2022) font état de la faible efficacité des services de transport, de la forte présence d'entreprises publiques inefficaces qui ont un impact sur la faible performance du transport, quel qu’en soit le mode (maritime, ferroviaire, routier et fluvial). 184. L'indice de performance logistique (IPL) de 2023 montre que la performance des frontières et de la logistique reste faible en RDC. En 2023, la RDC était classée 97 th dans le monde sur 140 pays avec un score de 2,5, soit 58 % du niveau du pays le plus performant. La performance IPL de la RDC n'est pas atypique des pays africains à faible revenu d'Afrique, qui sont tous confrontés à des défis considérables, et elle se compare relativement favorablement à ses pairs, avec un IPL global supérieur ou égal à celui de plusieurs pays voisins et à la moyenne de l'Afrique subsaharienne. Cependant, les performances de la RDC sont nettement inférieures à celles du Rwanda, le pays le plus performant parmi les PMA africains. Sans surprise, l'écart de la RDC par rapport au Rwanda est le plus prononcé pour les infrastructures, suivi par les compétences logistiques. 185. L’IPL montre également l'absence de progrès significatifs en RDC au fil des ans. Après une régression initiale, les progrès ont été lents. En 2023, la RDC a régressé dans deux catégories par rapport à 2018 (compétences logistiques et douanes), mais sa performance globale s'est améliorée de façon marginale. Puisque l’IPL évalue les performances des pays les uns par rapport aux autres, le manque de progrès de la RDC en matière d’IPL souligne que malgré les réformes entreprises, elle n'a pas su rattraper les pays plus performants. 186. La RDC a progressivement modernisé ses processus, avec un nouveau code des douanes en 2010 reflétant la Convention de Kyoto révisée, la mise en place d'un guichet unique en 2018 (GUICE), et plusieurs accords d'assistance mutuelle avec les pays voisins (12 au total). L'introduction de procédures douanières informatisées avec SYDONIA World a permis de réduire les délais de dédouanement de 10 jours à 3 jours (CIR, 2019). Parmi les défis auxquels la RDC continue d'être confrontée figurent l'interconnexion électronique des petits postes frontaliers (52 bureaux de douane sur 98 ont été connectés) (CIR, 2019), l'intégration de SYDONIA World dans le GUICE et la possibilité de paiements électroniques pour le dédouanement (FMI, 2021), l'extension du GUICE à certaines procédures (CIR, 2019), et la question de la double inspection des marchandises par le BIVAC et l'OCC (CIR, 2019). 91 Autorité de la concurrence du Kenya (2019). 92 À titre de comparaison, le coût d'expédition vers Lusaka sur le corridor ferroviaire de Durban est deux fois moins élevé (3 174 USD) et plus de la moitié du coût correspondant (3 555 USD) sur le corridor de Dar Es-Salaam (Afreximbank, 2021). 114 187. L'adhésion à la CAE qui conférera des avantages à la RDC devrait contribuer à accélérer la facilitation des échanges et la modernisation des douanes . Depuis juillet 2019, la RDC adhère au système régional de transit électronique des marchandises de la CAE, avec pour résultat des gains de temps significatifs et l'amélioration de la sécurité sur les corridors de la CAE. 93 La participation de la RDC aux initiatives de la CAE telles que le Territoire douanier unique de la CAE, les programmes d'opérateurs économiques agréés, la surveillance des barrières non tarifaires et les systèmes de suivi électronique des cargaisons, ainsi que la dispense de visas de voyage, devraient également réduire les coûts du commerce. Figure 3.8. 1Indice de performance logistique 2023, performance de la RDC par rapport à ses pairs et dans le temps Customs Customs 3.5 3.5 3 3 Timeliness Infrastructure Infrastructur 2.5 Timeliness 2.5 e 2 2 1.5 1.5 Tracking & International Tracking & International tracing shipments tracing shipments Logistics Logistics competence competence 2023 2010 2012 Angola RCA RDC 2014 2016 2018 Congo SSA Rwanda Source : IPL Banque mondiale (2023) 3.2.2. Questions commerciales et chaîne de valeur minière 188. Plusieurs des politiques discutées jusqu'ici pourraient jouer un rôle important dans la stratégie de la RDC pour monter dans la chaîne de valeur minière , à savoir les politiques commerciales en faveur des intrants, l'intégration régionale et la logistique des transports. 189. La RDC interdit depuis 2013 les exportations de concentrés de cuivre et de cobalt afin de stimuler la première transformation en métal raffiné dans le pays, mais cette interdiction fait l'objet de fréquentes exemptions, car le pays manque de capacité de raffinage. Ce régime semble avoir été mis en œuvre sans une attention suffisante aux besoins de l'industrie, avec pour résultat de l’incertitude quant aux conditions de son application parmi les opérateurs économiques94 et la possibilité de contestations par l'OMC (le cas pratique sur la chaîne de valeur minière à publier discute également de cette question et se réfère à 93Voir par exemple https://www.trademarkafrica.com/country-eac/ 94Pour les développements récents, voir par exemple https://www.reuters.com/article/congo-copper-idAFL2N2NF1OK https://www.fastmarkets.com/insights/exclusive-drc-bans-cobalt-copper-concentrate-exports-cutting-off-zambia-trade 115 l'exemple de l'Indonésie qui avait interdit les exportations du minerai de nickel).95 En ce qui concerne le cuivre, avec l'ajout de deux nouvelles fonderies à la capacité du pays, 96 la RDC devrait bientôt être en mesure d'exporter uniquement des produits transformés à base de cuivre. 190. Certains des intrants nécessaires à la transformation des produits minéraux sont importés , notamment d'autres minéraux nécessaires à la production de produits en aval tels que les précurseurs pour les batteries. L'approvisionnement en manganèse du Gabon et en nickel de Madagascar est par exemple pris en compte dans l'étude de Bloomberg (2021). Alors que le prix élevé du nickel rend son approvisionnement relativement insensible aux coûts de transport, le manganèse serait plus sensible aux considérations logistiques. La facilité d'organiser les expéditions entre bien sûr aussi en ligne de compte. 191. La logistique pour l'évacuation des produits métalliques est compliquée et a une forte incidence sur leur compétitivité. Les coûts de transport élevés des principaux corridors desservant Lubumbashi, mentionnés plus haut, représentent un coût d'exploitation important pour les sociétés minières. Par exemple, Naveed et Nazir (2023) rapportent les chiffres d'Ivanhoe, l'un des grands opérateurs miniers en RDC, montrant que les coûts logistiques représentent 39 % des coûts de trésorerie de la production de cuivre, un point de pression selon la société minière (les coûts logistiques ont été ramenés à 32 % des coûts au premier trimestre 2023).97 Il en va de même pour le lithium, un autre métal stratégique, pour lequel les coûts de transport représentent 68 % des coûts d'exploitation selon une étude de faisabilité d'AVZ Minerals.98 En ce qui concerne les précurseurs de batteries, le coût relativement élevé du produit fini (11-15 USD par kg) pourrait absorber les coûts de transport élevés auxquels la RDC est confrontée. 99 192. Une partie des coûts logistiques est due à des échecs politiques . Divers frais et taxes sont prélevés sur les camions qui traversent la frontière entre la RDC et la Zambie. Ces frais pour chaque véhicule sont importants et peuvent ajouter plusieurs centaines de dollars au coût du fret. Ils découragent également les transports routiers de franchir la frontière et incitent au déchargement et au rechargement des cargaisons. Le fret de cuivre est également pénalisé par des problèmes de sécurité le long des corridors routiers.100 193. Les délais d'acheminement des produits miniers sont longs . Les principaux itinéraires actuels passent par la Zambie jusqu'au port de Durban, par la Tanzanie jusqu'au port de Dar Es-Salaam ou par le Mozambique jusqu'au port de Beira. Les temps de transport varient de deux semaines à un mois, ce dernier étant le temps qu'il faut pour atteindre Durban depuis les mines du Katanga, selon un récent rapport de Bloomberg.101 Les récents problèmes de congestion à la frontière zambienne dus aux horaires 95 La CNUCED (2017) propose une discussion sur les coûts-avantages de ces interdictions. 96 Cf. note1 ci-dessus. 97 https://ivanhoemines.com/news/2023/ivanhoe-mines-issues-2023-first-quarter-financial-results-and-overview-of- construction-and-exploration-activities/ https://www.reuters.com/article/mining-copper-ivanhoe-idAFL5N2VX4RA 98 Notant que l'un des deux itinéraires pris en compte dans l'étude, le corridor de Lobito, n'est pas encore opérationnel. 99 Un calcul rapide basé sur le coût du fret indiqué précédemment pour Durban pour un conteneur à pleine charge (25 tonnes) montre que les coûts de transport s'élèveraient à moins de 2 % des autres coûts de production. 100 Des exemples récents sont donnés dans des articles de presse : Freight News, 6 juin 2022. https://www.freightnews.co.za/article/drc-zambia-cross-border-freight-costly-business Africa News, 9 mars 2023, https://www.africanews.com/2022/03/09/drc-cobalt-copper-cross-border-transport-nightmare/ 101 https://www.bloomberg.com/news/audio/2022-11-04/the-copper-you-need-is-stuck-in-a-30-mile-traffic-jam-podcast 116 d'ouverture de la frontière soulignent la fragilité relative des chaînes d'approvisionnement logistiques à destination et en provenance de la RDC,102 aggravée par la disponibilité insuffisante de camions et l’insécurité. 3.3. Estimation des gains d'une intégration régionale plus poussée avec la CAE et la ZLECAF 194. En l'espace de quelques mois, la RDC a ratifié le traité ZLECAF et est devenue membre de la CAE, avec des conséquences importantes pour les perspectives de développement du pays . La ZLECAF étant conçue comme une consolidation des efforts d’intégration régionale en Afrique, les objectifs de la ZLECAF et de la CAE se recoupent. Cependant, la trajectoire de mise en œuvre de la RDC dans ces deux accords dictera largement les avantages que la RDC peut tirer d’une intégration plus profonde avec ses pays voisins proches. 195. L’adhésion à la CAE et la signature de la ZLECAF poursuivent des objectifs similaires, bien qu'à une échelle géographique différente et avec des modalités de libéralisation différentes . Plusieurs aspects de ces modalités font encore l’objet de négociations, et leur mise en œuvre doit encore se faire. Par conséquent, ce rapport utilise plusieurs scénarios prospectifs pour évaluer l'impact des réformes politiques associées aux deux accords. 196. La révision du tarif de la CAE, adoptée en 2022 et discutée ci-dessus, a augmenté la protection commerciale dans la CAE. Elle pourrait donc avoir un impact négatif sur le bien-être des pays de la CAE, ainsi que des retombées négatives modérées sur la RDC. Ce changement récent a entraîné une mise à jour du scénario de base du modèle de façon à refléter le nouveau tarif de la CAE, avant de simuler les scénarios de politiques commerciales discutés dans cette section. Le tableau 3.7 ci-dessous résume l'impact du nouveau tarif de la CAE sur le bien-être, les exportations et les importations des pays de la CAE et de la RDC. Tableau 3.7. Impact en 2035 sur la CAE et la RDC du nouveau TEC 2022 par rapport à la situation de référence Gain en Exportations Importations bien-être RDC -0,01 % -0,01 % -0,04 % Kenya -0,03 % -0,29 % -0,02 % Rwanda -0,10 % -0,24 % -0,13 % Tanzanie -0,06 % -0,83 % -0,53 % Ouganda -0,13 % -0,47 % -0,27 % Reste de -0,24 % -0,66 % -0,76 % la CAE Source : auteurs 102 https://www.bloomberg.com/features/2022-africa-copper-supply-chain-snarls/ 117 3.3.1. Scénarios de modélisation A. Adhésion de la RDC à la CAE 197. Scénario 1 : Libre échange entre la RDC et la CAE (« Adhésion RDC »). Ce scénario modélise l'impact de l'adoption du TEC de la CAE et du démantèlement tarifaire avec l'entrée de la RDC dans la CAE. En l'absence d'informations détaillées sur le calendrier d'adoption du TEC de la CAE par la RDC (en cours de négociation au moment de la rédaction de ce rapport) et d'indications sur la rapidité du processus d'adoption des engagements de la CAE (Byers et coll., 2023), on suppose une mise en œuvre immédiate par la RDC du tarif de la CAE à la signature de l'accord, ainsi que son offre simultanée de préférences tarifaires complètes aux autres membres de la CAE. De même, en l'absence d'informations sur le calendrier de libéralisation, l’hypothèse est une libéralisation immédiate. 198. Scénario 2 : effets d'intégration plus profonde de l'adhésion à la CAE (« Adhésion profonde de la RDC »). En rejoignant la CAE, la RDC bénéficiera de plusieurs mécanismes qui ont été mis en œuvre avec succès par les membres de la CAE. La mise en œuvre des engagements de la CAE devrait entraîner une réduction des MNT et une facilitation du commerce. La réduction des MNT et des barrières commerciales en RDC uniquement est modélisée de la même manière que dans les scénarios de sa participation à la ZLECAF ci-dessous, avec pour hypothèse des réductions sur la base de la nation la plus favorisée. En ce qui concerne la facilitation des échanges, vu le retard de la RDC sur les membres de la CAE les plus performants,103 l’hypothèse est que sa participation à la CAE entraîne la moitié de la baisse de ses coûts commerciaux qui serait réalisée avec sa participation à la ZLECAF. Par conséquent, nous simulons un scénario dans lequel les coûts commerciaux de la RDC sont réduits de 5 points de pourcentage sur une base NPF (c'est-à-dire la moitié de la réduction de 10 points de pourcentage découlant de sa participation à la ZLECAF, voir ci-dessous), et que les équivalents ad valorem des MNT sont réduits sur une base bilatérale pour les membres de la CAE. B. Scénarios types de la ZLECAF 199. Scénario 3 : Intégration de la ZLECAF avec réduction des droits de douane, des MNT sur les biens et les services et facilitation des échanges (« intégration ZLECAF profonde »). La ZLECAF sera accompagnée de mesures visant à faciliter les échanges par la mise en œuvre d'un accord sur la facilitation des échanges (AFE). Melo et Sorgho (2019) fournissent des estimations de l'ampleur de ces barrières commerciales, qui sont réduites de moitié dans ce scénario, tout en étant plafonnées à 10 points de pourcentage. Le scénario intègre également une augmentation des entrées nettes d'IDE, telles qu'estimées par François et coll. (2022) : • Impacts sur les IDE : simule l'impact des dispositions dans les domaines politiques supplémentaires qui seront couverts par la ZLECAF, notamment en matière de politique d'investissement, de politique de concurrence et de droits de propriété intellectuelle, 103Ceci a été noté précédemment en relation avec le LPI. Cela est également lié au fait que les coûts commerciaux (qui comprennent à la fois des facteurs géographiques et politiques) en RDC, tels que mesurés par la base de données des coûts commerciaux de la Banque mondiale en 2018, sont supérieurs de 26 % à ceux du Rwanda, le pays le plus performant parmi les pays de la CAE représentés dans la base de données. Les estimations utilisées par la Banque mondiale (2020) pour évaluer les gains de facilitation des échanges pour la RDC sont nettement inférieures à celles des autres membres de la CAE et une réduction de 5 points de pourcentage place toujours la RDC derrière la moyenne de la CAE. 118 • Réduction des coûts commerciaux, également estimée par Francois et coll., et simulée en plus de la diminution des coûts commerciaux due à la facilitation des échanges. 200. Scénario 4 : Intégration profonde de la ZLECAF et adhésion de la RDC à la CAE. Ce dernier scénario combine l'effet de l'adhésion de la RDC à la CAE (scénario 1) avec celui de son adhésion dans la ZLECAF (scénario 3), en notant que les avantages de l'intégration approfondie de la RDC dans la ZLECAF seront simultanés à ceux de la mise en œuvre de son adhésion à la CAE. 3.3.2. L'impact de l'adhésion de la RDC à la CAE 201. Dans l'ensemble, l'effet de l'adhésion au marché commun de la CAE devrait apporter des avantages modérés à la RDC, malgré l’adoption du TEC nominalement plus élevé de la CAE . L'adhésion à la CAE permettra à la RDC d'accéder à un marché de 188 millions de personnes et aux consommateurs de la RDC de s'approvisionner en produits de l'espace régional en franchise de droits. Les gains liés à l'adhésion à la CAE uniquement pour l'accès au marché en franchise de droits devraient se traduire par une augmentation de la croissance de 0,14 % du PIB et des exportations de 0,51 %. La figure 3.8 isole les effets de l'adhésion de la RDC à la CAE, montrant l'impact partiel de l'adoption du TEC et de l'adhésion à une zone de libre-échange au sein de la CAE. Pour la RDC, l'impact négatif d'une protection accrue sur le bien-être (colonne la plus à gauche) est compensé par l'accès accru au marché (deuxième colonne), avec pour résultat un impact globalement positif. L’effet du seul changement tarifaire reste modeste, ce qui reflète la faiblesse du commerce formel avec la CAE par rapport à la position extérieure globale de la RDC. Les volumes commerciaux formels des secteurs susceptibles de bénéficier de l'intégration dans le marché de la CAE, tels que les produits agricoles et alimentaires, sont insuffisants que pour générer un fort impact d’une libéralisation tarifaire. L'adoption du TEC a également un effet sur la perception des recettes provenant des droits de douane : malgré des tarifs extérieurs soient lus élevés, la libéralisation des tarifs avec les partenaires de la CAE suite à l'adhésion à la CAE aura un effet global négatif, car il entraînera une diminution de 9,9 % des recettes fiscales provenant des tarifs. 104 104D'autres analyses utilisant un modèle d'équilibre général calculable (EGC) (voir par exemple Banque mondiale (2020)) font également état de faibles gains résultant de la libéralisation tarifaire, ce qui pourrait s'expliquer par le fait que les gains potentiels dynamiques résultant de la libéralisation tarifaire ne sont pas pris en compte, tels que les changements dans la productivité ou dans l'investissement. 119 Tableau 3.8. Impact de l'adhésion de la RDC au TEC de la CAE — Variation du revenu réel en 2035 en pourcentage par rapport au scénario de base Adoption du TEC par la Zone de libre-échange Adhésion RDC RDC* dans la CAE** (scénario 1) Congo, DR -0,10 % 0,23 % 0,14 % Kenya -0,03 % -0,04 % -0,04 % Rwanda -0,10 % -0,01 % -0,01 % Tanzanie -0,06 % 0,08 % 0,09 % Ouganda -0,13 % -0,10 % -0,10 % Reste de la CAE -0,24 % -0,24 % -0,24 % Notes : * impact de la modification du tarif extérieur de la RDC au TEC de la CAE sans tenir compte du libre accès au marché de la CAE ** impact du libre accès au marché de la CAE incluant la RDC sans impact de la modification du tarif extérieur pour la RDC. Source : auteurs 202. Les gains d'une intégration plus profonde avec la CAE devraient être beaucoup plus importants . Le scénario d'intégration profonde de la RDC dans la CAE avec pour résultat une amélioration de ses processus frontaliers et de ses mesures non tarifaires montre une augmentation des gains potentiels de bien-être estimés de 8,0 % du PIB par rapport au scénario de base. Ceci démontre qu’une meilleure intégration de la RDC dans les économies mondiales et continentales africaines pourrait commencer par son adhésion à la CAE, en adoptant les mesures d'intégration plus profondes et les disciplines offertes par la CAE. Dans les domaines d'une intégration commerciale plus profonde, la rationalisation des échanges de la RDC avec ses partenaires de la CAE en matière de mesures non tarifaires, de politiques de services et de facilitation des échanges profiterait également aux échanges de la RDC avec le reste du continent et avec le monde en général. Tableau 3.9. Gains de l'adhésion profonde de la RDC à la CAE (scénario 2) Impact sur le revenu Impact sur le Impact sur le réel volume des volume des exportations importations Congo, DR 8,04 % 12,48 % 31,50 % Kenya 0,00 % -0,35 % -0,06 % Rwanda 0,62 % 4,18 % 4,24 % Tanzanie 0,58 % 0,52 % 1,76 % Ouganda 0,34 % 2,80 % 4,20 % Reste de la CAE -0,24 % -0,61 % -0,53 % Source : auteurs 203. Le commerce augmentera de manière significative si la RDC s'intègre profondément à la CAE, et en particulier avec le Rwanda et l'Ouganda. Dans un tel scénario, les exportations augmenteraient de 12,5 % en volume, et les importations de près d'un tiers par rapport à un scénario de base avec statu quo. Vu que ces deux pays sont déjà les deux des partenaires régionaux les plus importants, les échanges de la RDC avec le Rwanda et l'Ouganda bénéficieront le plus d’une intégration profonde. On notera que les estimations ne tiennent pas compte de son effet sur les volumes importants de flux informels soulignés 120 plus tôt : ce commerce informel bénéficiera également de ces améliorations, car la modernisation et la rationalisation des processus et politiques frontaliers sont également associées à la formalisation et à la facilitation du commerce informel. 204. Au niveau sectoriel, la RDC pourrait enregistrer une augmentation significative des exportations d’aliments transformés, de produits du bois et de certaines industries manufacturières légères, bien que partant d’une base faible dans certains cas (industries manufacturières). Cela souligne les opportunités potentielles découlant d'un meilleur accès à des marchés importants et à croissance rapide dans les pays voisins. Le secteur qui se développe le plus, à la fois en termes relatifs et absolus, est celui des industries manufacturières à forte intensité énergétique, qui comprend les minéraux non métalliques, le fer et l'acier, et les métaux non ferreux. Tableau 3.10. Impact sur les exportations sectorielles de la RDC en volume Adhésion Adhésion Adhésion profonde RDC + CAE TEC + RDC profonde RDC ZLECAF Scénario 1 Scénario 2 Scénario 4 Agriculture 1,9 % 3,9 % -5,5 % Combustibles fossiles 0,1 % -10,9 % -13,3 % Minéraux N.D.A. 0,2 % -5,1 % 1,3 % Aliments transformés 2,4 % 23,8 % 34,8 % Produits du bois et du papier -1,1 % 11,8 % 30,1 % Textiles et vêtements 8,0 % 25,2 % 38,2 % Industrie manufacturière à forte consommation d'énergie 0,3 % 14,8 % 28,3 % Produits du pétrole et du charbon 0,0 % -1,1 % -12,8 % Produits chimiques, caoutchouc, plastique 0,0 % 0,1 % 14,0 % Fabrications, N.D.A. 0,1 % 0,5 % -11,7 % Construction 0,7 % 12,9 % 12,3 % Services commerciaux 186,7 % 597,1 % 524,5 % Services de transport routier et ferroviaire -0,2 % 4,4 % 21,1 % Services de transport par eau 2,1 % 27,2 % 31,1 % Services de transport aérien -1,0 % 10,6 % 30,9 % Services de communication 0,1 % 1,9 % -3,3 % Autres services financiers -0,2 % 0,8 % -4,6 % Assurances, services immobiliers -0,2 % 3,9 % 12,1 % Autres services aux entreprises 0,1 % -2,8 % 4,4 % Services d'accueil 0,3 % 1,3 % -4,2 % Autres services 8,8 % 34,6 % 45,4 % Source : auteurs 121 3.3.3. Scénarios de participation à la ZLECAF 205. Les études de la Banque mondiale sur l'impact d’une participation à la ZLECAF ont souligné que la RDC devrait être l'un des pays bénéficiant le plus de l'intégration continentale, vu les coûts élevés du commerce et l’importance de son marché en raison de sa population. Cette section donne des estimations actualisées pour les scénarios de politiques étudiés dans Banque mondiale (2020) et Banque mondiale (2022), auxquels s’ajoute l’estimation des effets de l'adhésion de la RDC à la CAE, que les analyses précédentes n’intégraient pas. 206. Une mise en œuvre complète de la ZLECAF par la RDC, y compris une réduction des coûts commerciaux et des obstacles à l'investissement, devrait se traduire par des gains de bien-être supplémentaires de 13 %, faisant de la RDC l'un des pays qui a le plus à gagner avec la mise en œuvre complète de l'accord continental. Avec l'avantage supplémentaire de l'adhésion à la CAE, on peut s'attendre à ce que la RDC gagne encore plus : 13,7 % de gain en revenu réel par rapport au scénario de base. Tableau 3.11. Gains de bien-être grâce à la ZLECAF . Pourcentage de changement par rapport à la base 2035 Adhésion profonde Adhésion CAE + ZLECAF ZLECAF Scénario 3 profonde Scénario 4 Congo, DR 13,0 % 13,7 % Kenya 12,8 % 12,3 % Rwanda 4,3 % 4,3 % Tanzanie 12,2 % 12,0 % Ouganda 6,2 % 5,6 % Reste de la CAE 4,5 % 4,3 % Source : Banque mondiale (2022) et auteurs : Banque mondiale (2022) et auteurs 207. La ZLECAF devrait donc ajouter des avantages substantiels à ce que la RDC gagnera en s'intégrant dans l'espace de la CAE. Les pays voisins de la CAE devraient également enregistrer des gains importants grâce à la ZLECAF . Cela signifie qu'en termes d'objectifs politiques, la poursuite de l'intégration de la CAE (et l'inclusion de la RDC) doit se faire en gardant à l'esprit les gains futurs qu’apportera la ZLECAF 208. La RDC et ses partenaires de la CAE reconnaissent les avantages de la réalisation des objectifs de la CAE et de l'intégration dans la ZLECAF . Toutefois, ces objectifs pourraient être confrontés à une certaine résistance à la libéralisation au sein de la sphère CAE. Le marché de la CAE a en effet enregistré de fortes pressions pour suspendre les applications du TEC de la CAE afin de poursuivre la protection de secteurs stratégiques. Ces pressions ont finalement débouché sur une révision du TEC qui a duré sept ans et a finalement conduit à la création d'un tarif extérieur plus élevé de 35 % destiné à protéger ces secteurs (près de 500 produits stratégiques). Il est probable que la liste des produits sensibles de la CAE exclus d’une libéralisation par la ZLECAF englobe les produits soumis aux taux tarifaires les plus élevés. 122 3.4. Conclusions et recommandations 209. La nature très concentrée du commerce de la RDC, dominé par les produits miniers, signifie que les perspectives d'une diversification commerciale efficace prendront du temps à se concrétiser. Les produits miniers, le cuivre et le cobalt, représentent 96 % des exportations totales. Le commerce est également très concentré géographiquement puisque le principal partenaire commercial est la Chine, qui représente 50 % des exportations de la RDC selon des statistiques commerciales récentes. La recherche de nouveaux partenaires commerciaux prend également du temps. 210. Une caractéristique importante du commerce de la RDC est que la taille de son commerce régional est importante par rapport à d'autres pays d'Afrique. Ce commerce régional est également concentré sur un petit nombre de pays voisins, principalement à l'est du pays. Les exportations, principalement de minerais et de produits métalliques, sont destinées à la Zambie et à la Tanzanie, tandis que les importations proviennent des membres de la CAE et de la Zambie. Les flux commerciaux informels avec les pays voisins, principalement l'Ouganda et le Rwanda, sont assez importants. Les enquêtes sur le petit commerce frontalier menées par certains pays voisins de la RDC estiment qu’ils représentent 47 % des importations formelles en provenance des partenaires de la CAE. 211. L'une des raisons possibles de l'importance du commerce régional est que la RDC est confrontée à des barrières commerciales très élevées. Recentrer les échanges à un niveau proche peut être la seule option économique lorsque l'accès aux marchés lointains a un coût prohibitif. Les estimations des barrières non tarifaires placent la RDC parmi les pays ayant les équivalents ad valorem les plus élevés du continent. De plus, le pays est confronté à une combinaison de contraintes géographiques coûteuses et d'un niveau de performance généralement faible en matière de facilitation du commerce et de logistique, ce qui se traduit par des coûts logistiques extrêmement élevés pour le pays. 212. Par conséquent, la RDC devrait poursuivre une stratégie à deux objectifs complémentaires : i) améliorer le commerce régional pour offrir de nouvelles opportunités de diversification des exportations et de réduction des coûts d'importation, et ii) tirer parti du secteur minier et créer des conditions permettant de capturer une part plus importante de la chaîne de valeur , comme le précise les recommandations figurant au chapitre 2. En ce qui concerne le premier objectif, la décision de la RDC d'adhérer à la Zone continentale africaine et à la Communauté économique de l'Afrique de l'Est est un développement très positif et devrait créer les conditions d'une intégration plus poussée dans les économies régionales tout en réduisant les coûts commerciaux. 213. Les perspectives les plus immédiates de réforme et d'intégration commerciales sont susceptibles de se concrétiser dans le cadre de l'adhésion à la CAE . Cette dernière possède en effet une base institutionnelle solide et a élaboré un large ensemble de politiques d'intégration qui ont été mises en œuvre par ses membres. La RDC devrait être en mesure de se mettre rapidement au niveau des normes de la CAE, ce qui devrait lui procurer des gains significatifs provenant de la facilitation des échanges avec les membres de la CAE et de l'accès à un marché élargi de la CAE. La facilitation des échanges devrait être une priorité pour la RDC, tant dans le contexte de la CAE que dans celui de la ZLECAF. Les simulations du modèle EGC suggèrent que l'ampleur de ces gains pourrait être très importante pour la RDC si des politiques ambitieuses de libéralisation du commerce sont mises en œuvre. Dans la pratique, la RDC a 123 déjà commencé à adopter des mesures frontalières de manière à moderniser ses processus et les aligner sur ceux des pays voisins de la CAE. 214. Les gains de l'intégration dans la CAE surviendront malgré l’augmentation de son tarif NPF moyen (actuellement faible) du fait de son adhésion à la CAE , avec des conséquences négatives sur le bien-être et le commerce avant l'augmentation du coût des importations. Les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la récente réforme des tarifs de la CAE ont mis en évidence les pressions contre la libéralisation qui existent au sein de la communauté, lesquelles pourraient finir par ralentir et diminuer les perspectives d'une plus grande intégration régionale. Il sera donc important de suivre de près les progrès de la RDC et de ses partenaires dans la mise en œuvre des réglementations de la CAE. La RDC pourrait également se faire un porte-parole d'une libéralisation accrue au sein de la communauté de la CAE. 215. La signature de l'accord sur la zone de libre-échange continentale africaine et l'entrée de la RDC dans la CAE vont modifier considérablement ses perspectives d'intégration régionale . Les résultats des simulations du modèle d'équilibre général montrent que l'adhésion à la CAE pourrait avoir un impact positif sur le revenu réel, malgré une augmentation des tarifs extérieurs de certains produits. L'impact négatif de l'augmentation des droits de douane — qui ne doit pas être négligé — est compensé par les gains apportés par l'accès au marché régional. Ces gains s’accroîtront fortement si l’intégration est plus profonde et couvre également la facilitation des échanges et la réduction des barrières non tarifaires. Un tel scénario favoriserait une augmentation significative du commerce avec les partenaires de la CAE, principalement le Rwanda et l'Ouganda, avec un effet positif sur la diversification des échanges des partenaires. 216. Comme indiqué plus haut, l'élargissement de la CAE et la mise en œuvre de la ZLECAF sont complémentaires. Ce chapitre apporte une mise à jour aux estimations de deux études précédentes de la Banque mondiale pour la RDC et la région et confirme l'importance des gains que pourrait entraîner une libéralisation. Avec l'élargissement de la CAE, ces gains augmenteront et confirment les études antérieures de la Banque mondiale sur l'impact de la ZLECAF pour la RDC qui devrait être l'un des pays bénéficiant le plus de l'intégration continentale du fait des coûts élevés de son commerce, et de l’importance de son marché en raison de sa population. 217. La ZLECAF devrait donc ajouter des avantages substantiels pour la RDC en plus de ceux qui proviendront de son intégration à l'espace CAE . Les pays voisins de la CAE devraient également enregistrer des gains importants grâce à la ZLECAF. Cela signifie qu'en termes d'objectifs politiques, la poursuite de l'intégration de la CAE (et l'inclusion de la RDC) sera mieux réalisée en gardant à l'esprit les gains futurs conférés par la ZLECAF. 124 Références Afreximbank. 2021. Study on Trade-Carrying Infrastructure Gap in Southern African Development Community (SADC). Autorité de la concurrence du Kenya. 2019. Competition in Shipping, Trucking and Haulage Sector Study in East Africa. https://cak.go.ke/sites/default/files/Competition%20in%20Shipping%20Trucking%20and%20Haulage%2 0Sector%20Market%20Inquiry%20Report%202019.pdf AVZ Minerals Ltd. 2020. AVZ Delivers Highly Positive Definitive Feasibility Study for Manono Lithium and Tin Project. Banque mondiale. 2020. The African Continental Free Trade Area: Economic and Distributional Effects. Washington. Washington, DC : Banque mondiale. doi:10.1596/978-1-4648-1559-1. Banque mondiale. 2022. Making the Most of the African Continental Free Trade Area: Leveraging Trade and Foreign Direct Investment to Boost Growth and Reduce Poverty . Washington, DC : Banque mondiale. Bruce Byiers, Poorva Karkare, Frederick Golooba-Mutebi, Bossissi Nkuba et Christelle Balegamire Karut, 2023. Security through market integration? The political economy of the DRC’s accession to the EAC, Document de travail N°341ECDPM. Cadre intégré renforcé. 2019. Étude diagnostique sur l'intégration du commerce : République Démocratique du Congo. CNUCED et COMESA. 2023. The Utilization of Trade Preferences by COMESA Member States Intra-Regional Trade and North South Trade. https://unctad.org/system/files/official-document/aldc2022d1_en.pdf Dihel, N. et A. Goswami. 2016. The Unexplored Potential of Trade in Services in Africa . Banque mondiale. FMI. 2021. Democratic Republic of the Congo, Technical Assistance Report—Governance and Anti- Corruption Assessment. Rapport pays du FMI n° 21/95 Hoekman, B. et B. Shepherd. 2015. Services, firm performance, and exports: The case of the East African Community. Document de travail de l’International Growth Center, octobre. Kee, H. L., A. Nicita, et M. Olarreaga. 2009. « Estimating Trade Restrictiveness Indices ». Economic Journal 119 (534) : 172-99. Li, M. 2018. CARD Trade War Tariffs Database. https://www.card.iastate.edu/china/trade-war-data/ 125 ANNEXES Annexe 1.A. - Modèle de croissance à long terme de la Banque mondiale (LTGM) utilisant l'extension des ressources naturelles (NR) 105 Le LTGM est un ensemble d'outils basés sur Excel pour analyser les scénarios de croissance à long terme futurs, et basé sur le célèbre modèle de croissance Solow-Swan (1956). Ces outils sont conçus pour être simples, transparents et n’exigent que peu de données. Ce modèle de croissance à long terme s'appuie sur des hypothèses concernant les fondamentaux ou moteurs de la croissance, tels que l'investissement et la productivité, pour générer une trajectoire de croissance économique au cours des trois prochaines décennies. L'annexe donne un bref aperçu du LTGM, qui permet une décomposition en secteurs liés aux ressources (l'exploitation minière pour la RDC) et secteurs non liés aux ressources. Le PIB est donné par une simple fonction de production Cobb-Douglas : 1− () = (ℎ ) Équation 1 où est la productivité totale des facteurs (PTF), est le stock de capital physique, et ℎ est le travail effectif utilisé dans la production, dans lequel ℎ représente le capital humain par travailleur (examiné plus en détail ci- dessous), et est le nombre de travailleurs. Le paramètre est la part du travail. = où est le taux de participation (rapport entre la population active et la population totale en âge de travailler), est le rapport entre la population en âge de travailler et la population totale, et est la population totale. L’évolution du stock de capital physique est déterminée par: +1 = (1 − ) + , où est l'investissement et le taux de dépréciation. Le PIB par habitant s’exprime en divisant l'équation 1 par : = / = ( ⁄ )1− (ℎ ) Équation 2 Après transformations, l’équation 2 exprime la croissance du PIB par habitant en fonction des moteurs de la croissance (PTF, capital humain, taux d'activité, population en âge de travailler, croissance démographique et investissement) : 106 ℎ ) ] +1 ≈ +1 + (+1 + +1 + +1 + (1 − ) [ ⁄ − − +1 où +1 représente le taux de croissance annuel de la variable X au cours de la période + 1. Effet direct des moteurs de la croissance à court terme. La croissance de la PTF a l'effet direct le plus important sur la croissance : une augmentation de 1 point de pourcentage (ppt) de la croissance de la PTF (+1 ) entraîne à court terme une augmentation exacte de 1ppt de la croissance du PIB par habitant. Une augmentation de 1 point de ℎ pourcentage de la croissance du capital humain (+1 ) de la croissance du taux de participation à la population active (+1 ) ou de la croissance de la part de la population en âge de travailler (+1 ) augmente la croissance du PIB par habitant de ppt. La croissance démographique et la dépréciation réduisent la croissance du PIB par habitant de 1 − parce qu'elles réduisent le capital par travailleur, soit en réduisant la quantité de capital () soit en augmentant le nombre de travailleurs (+1 ). L'effet d'une augmentation du taux d'investissement ( ⁄ ) dépend à la fois de la part de capital (1 − )ainsi que du ratio capital-production ( ⁄ ). Pour la Croatie, 1 − = 0.4, et donc une forte augmentation de 10 ppts du PIB 105Pour plus d'informations, visitez le site web du modèle de croissance à long terme : www.worldbank.org/LTGM 106Pour plus de détails, consultez la documentation du modèle ici : https://thedocs.worldbank.org/en/doc/133191589476085869-0050022020/original/ModelOutlineV43.pdf 126 du taux d'investissement augmente la croissance à court terme de 2 ppts par an si ⁄ = 2, mais seulement de 1ppt si ⁄ = 4. Par conséquent, une stratégie de croissance fondée sur l'investissement entraînant une accumulation de capital plus rapide que le PIB deviendra rapidement moins efficace, à moins qu'elle ne s'accompagne d'autres réformes visant à stimuler la productivité, le capital humain ou la participation afin d'atténuer l'augmentation de K/Y. Effets à long terme des moteurs de croissance. À long terme, l'effet direct des moteurs de croissance est amplifié s'il induit une nouvelle accumulation de capital. Ceci peut se démontrer en réécrivant le PIB par habitant (équation 1/ 2) avec un ratio capital/production fixe "permanent", soit = ( / )(1−)⁄ ℎ . Dans ce cas, une augmentation de 1ppt de la croissance de la PTF stimulerait la croissance du PIB par habitant de 1/ppts, et il y ℎ aurait un effet univoque de +1 , +1 soit +1 . Toutefois l'ajustement du capital est très lent et le PIB met plusieurs décennies à converger. Cependant, les effets à long terme constituent une limite supérieure utile, et les effets des moteurs de la croissance tout au long de notre période de simulation de trois décennies (2021-2050) se situeront entre "l'effet direct à court terme" et "l'effet à long terme". 127 Annexe 1.B. - Résumé des tableaux et figures des différents scénarios de réforme pour l'exercice de modélisation de la RDC Tableaux et figures Tableau A1 : Résumé des simulations des taux de croissance du PIB (LTGM) A. Scénario de base B. Réformes modérées C. Réformes ambitieuses Croissance RNB PH Part Croissance RNB PH Part Croissance RNB PH Part PIB PH en 2050, mines du PIB PH en 2050, mines du PIB PH en 2050, mines du (2025- 2020 US$ PIB en (2025- 2020 US$ PIB en (2025- 2020 PIB en I. Ensemble de l'économie Scénario de base 1.8% 880 13% Croissance progressive due aux réformes (une à une): A. Croissance PTF autre que mines 1.8% 880 13% 2.6% 1,072 11% B. Croissance capital humain 2.1% 934 12% 1.9% 1,012 11% C. Investissement 2.0% 923 13% 2.1% 1,014 12% D. Participation féminine 2.0% 927 12% 2.3% 1,000 12% Paquet de réformes (A-D) 2.5% 1,035 11% 4.4% 1,670 7% Paquet de réformes + cours miniers élevés 4.3% 1,678 7% Réinvestissement revenus exceptionnels 4.4% 1,740 6% II. Secteur Non-minier Scénario de base 2.8% 764 Paquet de réformes (A-D) 3.5% 917 5.6% 1,552 III. Secteur minier Scénario de base -1.5% 116 Paquet de réformes (A-D) -1.5% 117 -1.5% 118 Source : Estimations des services de la Banque mondiale Figure A1. Taux de Croissance du PIB selon différents scénarios de réforme 10% Baseline Réformes modérées Réformes ambitieuses 9% 8% 7% 6% 5% 4% 3% 2% 1% 0% 2020 2025 2030 2035 2040 2045 2050 Source : Estimations des services de la Banque mondiale 128 Figure A2. Répartition de chaque moteur de croissance dans les pays pairs structurels et ambitieux et dans les pays d'Afrique subsaharienne A. Distribution de la croissance de la PTF sur 20 ans B. Répartition des taux de scolarisation en 2020 C. Répartition de la qualité de l'éducation en D. Distribution de la fraction d'enfants ne 2020 (ou date la plus récente) souffrant pas de retard de croissance en 2020 (ou la plus récente) F. Répartition de l'investissement public E. Distribution des taux de survie des adultes en 2020 (ou plus récent) 129 H. Répartition de la participation au marché du G. Répartition de l'investissement privé travail pour les hommes I. Répartition de la participation au marché du travail pour les femmes Source : Estimations des services de la Banque mondiale 130 Annexe 3.A. Méthodologie de modélisation EGC Pour évaluer l'impact des changements de politique commerciale sur les perspectives économiques de la RDC, le présent rapport a utilisé le modèle d'équilibre général calculable (modèle EGC) ENVISAGE, qui a aussi été utilisé par la Banque mondiale pour estimer l'impact de la ZLECAF (Banque mondiale, 2019 et Banque mondiale, 2022). Une présentation du modèle est présentées dans van der Mensbrugghe (2019) ; voir également l'annexe 3.B ci-dessous. Les spécifications du modèle appliquées sont les mêmes que dans les rapports précédents sur la ZLECAF (Banque mondiale, 2019 et Banque mondiale, 2022). Cependant, les données de référence sont différentes, car elles ont été mises à jour avec les dernières informations disponibles sur les droits de douane, en tenant compte des changements de tarifs attendus à l’issue des accords commerciaux en cours de ratification dans le monde. Pour actualiser ces informations, la base de données prospectives sur les droits de douane de MacMap a été utilisée. Les changements des droits de douane résultant de la dénommée « guerre commerciale » entre la Chine et les États-Unis en 2018 sont également reflétés (Li, 2018). La modélisation EGC est soumise à des limitations qui doivent être prises en compte lors de l'interprétation des résultats. Tout d'abord, la qualité des simulations dépend étroitement de la qualité des données sur les comptes nationaux. Dans le cas de la RDC, un fait qui conditionne la plupart des résultats est la taille du secteur des métaux, qui est particulièrement large par rapport aux autres secteurs de l'économie. Une analyse de sensibilité (décrite en détail ci-dessous) évalue comment les secteurs de l’économie autres que le secteur des métaux sont affectés par les changements de politique commerciale : l’analyse consiste en un scénario alternatif supposant que la réponse de l'offre des métaux est limitée (reflétant la rareté des ressources minérales et leur long délai de mise en production). Une autre limitation est que les flux commerciaux informels ne sont pas pris en compte, en l'absence de données suffisantes. L'impact sur les flux commerciaux dans le modèle se traduit uniquement par l'augmentation de la marge intensive mais pas de la marge extensive, étant donné que les flux commerciaux initialement nuls restent constants dans le modèle, indépendamment de l'évolution des prix relatifs. Enfin, le choix de certaines élasticités peuvent expliquer dans une large mesure les résultats obtenus. Nous avons introduit une analyse de sensibilité avec différentes élasticités pour montrer comment l'impact au niveau sectoriel peut changer. Analyse de sensibilité Dans la spécification principale du modèle, les élasticités des échanges appliquées dans le modèle GTAP sont utilisées, conformément à l’approche des deux rapports sur l’impact de la ZLECAF réalisés par la Banque mondiale avec le modèle ENVISAGE. Cependant, il est à noter que les impacts sectoriels pourraient être sensibles aux valeurs des élasticités utilisées. Le scénario approfondi de la ZLECAF combiné à l'adhésion à la CAE, est recalculé en prenant l’hypothèse alternative que l'élasticité de la demande d'importation pour le secteur manufacturier à forte intensité énergétique est plus faible, ainsi que l'élasticité de l'offre pour les secteurs de l'énergie primaire. Cette hypothèse semble plus proche d'une réalité dans laquelle l'offre de minéraux, intrants clés des secteurs à forte intensité énergétique, est relativement inélastique parce qu'elle dépend de la disponibilité de réserves souterraines. 131 L'hypothèse d'élasticités plus faibles n'a pas d'impact significatif sur les résultats macroéconomiques, ce qui confirme la conclusion selon laquelle des gains importants seront tirés de la libéralisation des échanges. Avec la contrainte d’élasticités plus faible dans certains des secteurs présentant un avantage comparatif, le revenu réel augmente légèrement moins, ce qui pourrait être interprété comme une estimation un peu plus réaliste. Soulignons cependant à nouveau que les différences entre les deux estimations (analyse de sensibilité par rapport aux scénarios précédents) ne sont pas réellement significatives. Cette analyse montre cependant des impacts très différents au niveau sectoriel et met en évidence des secteurs de diversification potentiels pour la RDC. Comme le montre le tableau A.3.1. Tableau A.3.11 ci- dessous, lorsque l'approvisionnement en intrants du secteur manufacturier à forte intensité énergétique est limité, nous constatons toujours une expansion importante, mais la croissance est plus faible. D'autres secteurs, en revanche, se développent beaucoup plus. Cela signifie que les ressources sont moins dirigées vers le secteur à forte intensité de ressources, et que d'autres secteurs tels que l'agriculture, les produits du bois et du papier (ce secteur important est évoqué plus en détail dans le Rapport à venir sur le climat et le développement en RDC de la Banque mondiale), le textile et l'habillement, ainsi que les secteurs de services se développent grâce à la baisse des coûts commerciaux. I l s’agit des secteurs dans lesquels la RDC pourrait exploiter le potentiel de son avantage comparatif. Tableau A.3.11. Impact sur la production, pourcentage de variation par rapport au niveau de référence, 2035 Adhésion profonde CAE + Adhésion profonde CAE + ZLECAF ZLECAF, élasticités Scénario 4 inférieures Agriculture -0,1 % 6,5 % Combustibles fossiles -13,4 % -12,9 % Minéraux N.D.A. 1,2 % 1,2 % Aliments transformés -2,5 % 1,8 % Produits du bois et du papier -15,0 % 7,0 % Textiles et vêtements -6,1 % 5,6 % Industries manufacturières à forte intensité énergétique 22,9 % 12,2 % Produits du pétrole et du charbon -13,5 % 11,3 % Produits chimiques, en caoutchouc et en plastique -37,5 % -13,3 % Industries manufacturières N.D.A. -35,9 % -13,6 % Construction 7,5 % 11,9 % Services commerciaux 1,0 % 4,6 % Services de transport routier et ferroviaire 2,6 % 4,6 % Services de transport par voie d’eau 3,5 % 3,4 % Services de transport aérien -4,9 % 2,0 % Services de communication 4,0 % 9,5 % Autres services financiers -2,7 % 4,1 % Assurances, services immobiliers -21,4 % -10,5 % Autres services aux entreprises 1,1 % 5,1 % Services d’accueil 9,1 % 11,8 % Autres services 1,0 % 4,0 % Source : auteurs 132 Annexe 3.B. Description du modèle ENVISAGE Le modèle d’équilibre général appliqué sur la durabilité et l’impact environnemental (ENVISAGE – Environmental Impact and Sustainability Applied General Equilibrium ) suit le paradigme du flux circulaire d'une économie. Les entreprises achètent des facteurs de production (tels que le travail et le capital) pour produire des biens et des services. Les ménages reçoivent des revenus des facteurs, et achètent à leur tour les biens et services produits par les entreprises. L'égalité entre l'offre et la demande détermine les prix d'équilibre des facteurs, des biens et des services. Le modèle est résolu comme une séquence d'équilibres statiques comparatifs dans lesquels les facteurs de production sont exogènes pour chaque période et liées entre les périodes par des formules représentant leur accumulation. La production est mise en œuvre sous la forme d'une série de fonctions imbriquées à élasticité de substitution constante (CES – constant-elasticity-of-substitution) visant à capturer la substituabilité entre les intrants. Trois grands types de production sont considérés : (1) pour les cultures agricoles, le modèle reflète l'intensification des intrants par rapport à l'intensification des terres ; (2) pour le bétail, il distingue la production en pâturage et celle en exploitation ; et (3) la production par défaut dépend largement de la substituabilité capital/travail. Certaines activités de production mettent l'accent sur des intrants spécifiques (par exemple, les produits chimiques agricoles pour les cultures et les aliments pour le bétail), et toutes les activités incluent l'énergie et ses composantes dans le cadre de la contrainte de minimisation des coûts. La production est également identifiée en fonction de l’ancienneté des investissements, qui distingue capital ancien et nouveau, avec des possibilités de substitution généralement plus faibles associées au capital ancien. Chaque activité de production peut produire plus d'un produit de base, par exemple, le secteur de l'éthanol peut produire de l'éthanol et des drêches sèches de distillerie avec solubles (DDGS – distiller’s dried grains with solubles). Les produits peuvent être issus de la production d'une ou plusieurs activités (comme l'électricité). ENVISAGE utilise donc une classification différente pour les activités et les produits. L'une des caractéristiques de ce modèle est qu'il intègre la nouvelle base de données sur l'électricité du Global Trade Analysis Project (GTAP), qui décompose le secteur de l'électricité du GTAP (« ely ») en 11 sources d'énergie différentes, auxquelles s’ajoutent le transport et la distribution de l'électricité. Bien que la base de données comprenne l’offre et celui de la demande pour chacune des 11 sources d'énergie, la fonction d'agrégation permet de regrouper la demande d'électricité et en faire une seule marchandise ; tandis que la matrice « make » du modèle combine les productions des différentes activités d'énergie en un seul produit, l'électricité. Le revenu est issu des paiements aux facteurs de production et est alloué aux ménages (après impôts). Le secteur public perçoit tous les paiements d'impôts nets et achète des biens et des services. Le modèle intègre des fonctions d'utilité multiples pour déterminer la demande des ménages. Un ensemble de trois fonctions de demande des ménages est lié au système linéaire de dépenses (SLD) : (1) le SLD standard ; (2) le SLD étendu (SLDE) qui incorpore l'épargne des ménages à la fonction d'utilité ; et (3) un système de demandes de type AIDAS (implicitly directly additive demand system) qui permet l’intégration de courbes d'Engel non linéaires dans le cadre du SLD. La quatrième option repose sur la fonction d'utilité à différences constantes d’élasticités (CDE – constant differences in elasticity) utilisée dans le modèle GTAP de base (Corong et coll., 2017 ; Hertel, 1997). Le SLDE intègre la décision d'épargner dans une fonction d'utilité de niveau supérieur. Les autres systèmes de demande supposent que l'épargne est une proportion exogène du revenu disponible dans la clôture par défaut. La fonction d'utilité du 133 consommateur détermine les demandes de groupe de produits des consommateurs qui sont ensuite convertis en biens produits à l'aide d'une matrice de transition ou « make » de la demande des consommateurs. L'investissement est déterminé par l'épargne, et équivaut à l'épargne nationale ajustée par les flux nets de capitaux. Le commerce est modélisé en utilisant la spécification dite d'Armington, qui suppose que la demande de biens est différenciée par région d'origine. Le modèle permet l’approvisionnement national et l’importation au niveau agrégé (après avoir totalisé l'absorption domestique de tou s les agents) ainsi qu’au niveau de l'agent. Dans la spécification standard, un second nid d'Armington répartit la demande globale d'importation entre toutes les régions exportatrices en utilisant une spécification d'agent représentatif. Une version plus récente, mais peu testée du modèle, connue sous le nom de spécification MRIO, prend en charge l'approvisionnement des importations par agent. Les exportations sont modélisées de manière analogue à l'aide d'une spécification d'élasticité de transformation constante (CET – constant-elasticity- of-transformation) imbriquée. L'offre intérieure de chaque marchandise est fournie au marché intérieur et à un ensemble d'exportations agrégées en utilisant une fonction CET de niveau supérieure. Cet ensemble est réparti entre les régions de destination à l'aide d'une fonction CET de deuxième niveau. Chaque nœud commercial bilatéral est associé à quatre prix : (1) le prix au producteur ; (2) le prix à la frontière du pays exportateur, également appelé prix franco à bord (FAB) ; (3) le prix à la frontière du pays importateur, également appelé le prix coût, assurance et fret (CAF) ; et (4) le prix payé par l'utilisateur final, qui comprend toutes les taxes commerciales en vigueur. L'écart entre le prix au producteur et le prix FAB représente la taxe à l'exportation (ou la subvention s’il est négatif), et l'écart entre le prix CAF et le prix payé par l'utilisateur final représente les droits de douane à l'importation (et éventuellement d'autres distorsions liées à l'importation). Enfin, l'écart entre les prix CAF et FAB constitue les marges du commerce international et du transport. Ces marges représentent à leur tour l'utilisation des ressources réelles fournies par chaque région. Le secteur mondial du commerce international et du transport achète ces services à chaque région afin de minimiser le coût global. Le modèle comporte deux marchés fondamentaux pour les biens et les services : (1) les biens produits dans le pays et vendus sur le marché intérieur et (2) les biens produits dans le pays et vendus aux différentes régions de destination. Tous les autres biens et services sont des ensembles composites de ces biens. Deux conditions d'équilibre du marché sont nécessaires pour compenser ces deux marchés. Le modèle intègre cinq types de facteurs de production : (1) le travail (jusqu'à cinq types) ; (2) le capital ; (3) la terre ; (4) une ressource naturelle spécifique au secteur (comme les réserves de combustibles fossiles) ; et (5) l'eau. La segmentation du marché du travail est possible (mais non obligatoire), typiquement entre la main-d’œuvre agricole et non agricole. Le modèle permet également le changement de régime du marché du travail, de la flexibilité totale à la flexibilité partielle des salaires. Dans cette version du modèle qui intègre le genre, le travail est composé de quatre types de mains-d’œuvre : la main-d’œuvre qualifiée et non qualifiée, chacune différenciée par genre. Dans un premier temps, l'ensemble du travail global est composé de la main-d’œuvre qualifiée et non qualifiée. Dans le paramétrage par défaut, l'élasticité de substitution est de 0,5. Chaque ensemble défini par les compétences (main-d’œuvre non qualifiée et qualifiée) comprend le groupe des hommes et celui des femmes. L'élasticité de substitution par défaut est de 0,5 entre les genres. Cela implique que les quatre types de mains-d'œuvre sont identiquement substituables dans la configuration par défaut. 134 Le capital est réparti entre les secteurs afin d'égaliser le taux de rendement du capital. Si tous les secteurs sont en expansion, le capital ancien est supposé recevoir le taux de rendement de l’ensemble de l’économie. Dans les secteurs en contraction, le capital ancien est vendu sur les marchés secondaires à l’aide d’une courbe d'offre croissante, ce qui implique que le capital n'est qu’imparfaitement mobile entre les secteurs. L'offre globale de terres et d'eau est spécifiée à l'aide de courbes d'offre. Bien qu'il y ait plusieurs options, la courbe d'offre préférée est une fonction logistique avec une limite supérieure. La demande d'eau comprend également des composantes exogènes liées aux usages environnementaux et à la recharge des nappes phréatiques. Les terres et l'eau sont allouées entre les activités en utilisant une spécification CET imbriquée. Les ressources naturelles sont fournies à chaque secteur à l'aide d'une fonction d'offre isoélastique, avec la possibilité d'élasticités différenciées en fonction des conditions du marché. ENVISAGE intègre les principaux gaz à effet de serre : carbone, méthane, oxyde nitreux et gaz fluorés. Il incorpore également dix gaz ne produisant pas d’effet de serre qui peuvent avoir un impact sur l'atmosphère et le changement climatique, mais qui ont aussi souvent des impacts locaux importants, en particulier sur la santé. Les émissions sont générées par la consommation de produits de base (tels que les carburants) et l'utilisation des facteurs (tels que la terre dans la production de riz et les troupeaux dans la production de bétail). Il existe également des émissions de base traitées, telles que le méthane provenant des décharges. 135 République Démocra�que du Congo Mémorandum Économique Pays Voies d’accès à la diversifica�on économique et l’intégra�on commerciale régionale Favoriser la diversification économique et l'intégration régionale pour accélérer la croissance, la création d'emplois et la réduction de la pauvreté LA BANQUE MONDIALE