72677 v1 Région Moyen-Orient et Afrique du Nord de la Banque mondiale Évolution et perspectives économiques, septembre 2011 RÉSUMÉ ANALYTIQUE La croissance économique dans la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA) devrait s’établir en moyenne à 4,1 % en 2011 et s’améliorer d’un demi point de pourcentage par rapport à nos prévisions de mai pour l’année. Cette évolution positive est attribuable en grande partie aux augmentations des dépenses publiques qui ont activé la demande dans toute la région, aux augmentations de la production de pétrole dans la plupart des pays exportateurs de pétrole de MENA et à une reprise plus rapide que prévu de la production industrielle en Égypte. En outre, les perspectives de croissance de l’Iran se sont améliorées lorsque la réforme des subventions est entrée en vigueur et que les gains d’efficacité ont commencé à se réaliser. La légère décélération de la croissance régionale, à 3,8% en 2012, est essentiellement liée à un ralentissement prévu au plan mondial, qui devrait déprimer la production et les prix du pétrole. Certes les perspectives de croissance régionale de cette année se sont améliorées par rapport aux prévisions de mai, mais les incertitudes à leur sujet ont augmenté en rapport avec les risques croissants d’un ralentissement de l’économie mondiale. La baisse de la demande par l’Europe aurait des répercussions négatives sur les importateurs de pétrole d’Afrique du Nord, car elle compromettrait leurs recettes d’exportation et les envois de fonds de migrants. La baisse des prix du pétrole réduirait la croissance dans les pays exportateurs de pétrole de la région MENA, tout en constituant un soulagement pour les importateurs de pétrole. À la différence de 2008, lorsque les pays de la région MENA disposaient d’une importante marge de manœuvre budgétaire pour faire face aux défis posés la crise économique et financière mondiale, les événements politiques et économiques actuels ont fragilisé les finances publiques de nombreux pays et leur capacité à réagir par des dépenses supplémentaires en cas de nouvelle crise mondiale. Au sein de la région, il est donc essentiel d’engager des initiatives visant à stabiliser la situation politique et macroéconomique afin de réduire l’incertitude régionale et de redynamiser l’investissement et l’activité économique. Certaines données disponibles montrent une expansion de l’activité dans les pays en transition au cours des derniers mois. En Égypte et en Tunisie, la production industrielle a retrouvé ses niveaux d’avant le printemps arabe, ce qui donne à penser que ces pays pourraient suivre la trajectoire classique de la transition politique. En moyenne, la croissance économique reprend rapidement après un passage en douceur à la démocratie. Plus précisément, la croissance a régressé de 3 points de pourcentage au cours des précédentes transitions réussies, mais a repris ensuite pour atteindre voire dépasser, en l’espace d’un à deux ans, les taux d’avant la transition. L’incertitude qui règne pendant la transition a également des répercussions importantes sur l’investissement. Les résultats des transitions réussies permettent de croire que l’investissement régresse avec un retard et met plus de temps à reprendre que l’activité économique. Les baisses sont modérées, de 2 points de pourcentage en moyenne, mais la reprise n’intervient généralement qu’au bout d’au moins 5 ans. À l’image de ces résultats enregistrés dans d’autres régions, l’incertitude croissante découlant des transitions du printemps arabe s’est soldée par des primes de risque plus élevées dans les pays touchés par l’agitation. L’investissement privé et la croissance ont diminué du fait de l’enchérissement du capital. Dans les pays disposant d’une marge de manœuvre budgétaire limitée, comme le Maroc et la Jordanie, on a assisté à l’expansion des programmes sociaux en réponse à la demande populaire, au détriment des programmes d’investissements publics. En revanche, dans les pays du CCG, l’investissement n’a pas été sensiblement touché en raison du rôle dominant de l’investissement public. Au nombre des risques dans ces pays figurent la croissance toujours léthargique du crédit au secteur privé et les obstacles à l’exécution liés aux projets d’investissement public. Compte tenu de cette évolution récente, il est nécessaire de savoir si l’investissement public risque de faciliter l’investissement privé ou d’exercer un effet d’éviction sur l’investissement privé dans les pays MENA au cours de cette période. Afin d’améliorer les perspectives à long terme, il importe également de comprendre pourquoi l’investissement n’est pas parvenu à créer suffisamment d’emplois et à entraîner une croissance robuste dans le passé. Cette édition de l’EDP examine ces questions. Les résultats de MENA en matière d’investissement au cours de la décennie écoulée donnent à penser que la région investit à des taux qui soutiennent favorablement la comparaison avec ceux d’autres régions. Toutefois, dans les pays exportateurs de pétrole, il s’agit essentiellement de gros investissements publics en expansion. Les pays importateurs de pétrole ont affiché de plus solides résultats dans le domaine de l’investissement privé, qui a augmenté ces dernières années. Le rôle de l’investissement public est un sujet de préoccupation dans les pays en développement exportateurs de pétrole, du fait que dans les pays où l’état de droit n’est pas profondément ancré, rien n’indique que l’investissement public stimule l’investissement privé et la croissance. Par contre, dans les pays qui ont un niveau acceptable de protection des droits de propriété, l’éthique de responsabilité et des institutions juridiques, l’investissement public est étroitement lié à la croissance. Par ailleurs, un état de droit satisfaisant contribue à attirer l’investissement privé et les pays qui ont un état de droit satisfaisant enregistrent des niveaux plus élevés d’efficacité de l’investissement. À l’image de l’investissement public démesuré, de nombreux pays de la région ont une grande proportion d’emplois dans les services publics par rapport à d’autres pays. Il y a lieu de se préoccuper de la contribution relativement modeste des services publics au PIB. Par ailleurs, ces dernières années, ce secteur n’a pas été en mesure d’appuyer la création d’emplois ou la croissance du revenu. Le secteur pétrolier affiche une tendance opposée aux services publics, représentant une part importante de valeur ajoutée, mais sans création d’emplois. De ce fait, le nombre d’emplois créés au cours de la dernière décennie a été considérablement inférieur au nombre nécessaire pour faire face aux principaux enjeux, tels que le niveau élevé du chômage des jeunes, les faibles taux de participation de la main-d’œuvre, en particulier parmi les femmes, et l’accroissement rapide de la population active. Le rapport analyse le problème de la création d’emplois dans la région à la lumière de la croissance du revenu. Il ressort de cette analyse que ce problème ne peut pas être attribué uniquement au faible taux de création d’emplois par rapport à la croissance économique. Au cours des années 2000, la région a créé, en moyenne, comparativement à d’autres pays à revenu intermédiaire, des emplois à un rythme supérieur, par rapport à la croissance économique. Toutefois, les résultats diffèrent quelque peu au sein de la région, les pays importateurs de pétrole enregistrant un rythme de création d’emplois plus lent par rapport à la croissance du revenu. Ce rythme rapide de création d’emplois dans les pays exportateurs de pétrole a été associé à plusieurs facteurs. L’emploi informel est très répandu dans les pays en développement de la région MENA. Dans ces pays, les nouveaux venus dans la population active peuvent généralement trouver dans le secteur informel des emplois à faible productivité et de qualité inférieure. Une autre raison est l’utilisation, ces dernières années, de programmes spéciaux d’emplois pour appuyer la création d’emplois. C’est le cas en Algérie et dans d’autres pays qui ont une marge de manœuvre budgétaire suffisante et sont riches en ressources pétrolières. Le rapport indique également que la dernière décennie a été caractérisée par la croissance rapide de plusieurs secteurs à forte intensité de main-d’œuvre, comme le bâtiment, le commerce, le tourisme, la logistique et les services de communication. Toutefois, bon nombre d’emplois n’attirent pas les nationaux des pays exportateurs de pétrole et sont occupés par des résidents étrangers. Ainsi, dans les pays en développement exportateurs de pétrole, le principal problème de l’emploi tient à la croissance insuffisante, alors que les pays importateurs de pétrole ont un problème de création d’emplois. Dans tous les pays, la qualité des emplois est particulièrement préoccupante. Les emplois dans les services publics sont de plus en plus difficiles à trouver, alors qu’il n’est pas facile de trouver des emplois de qualité similaire dans le secteur privé. Le rapport montre que les services autres que les services publics et le secteur manufacturier peuvent servir de moteurs pour la création d’emplois et la croissance du revenu. Les services constituent pour le revenu et les emplois une source de solidité du point de vue des niveaux et de la croissance, en particulier dans les pays importateurs de pétrole. Le secteur manufacturier contribue à la croissance du revenu et de l’emploi, mais sa taille est modeste en moyenne dans la région MENA par rapport à d’autres pays, comme le Br ésil, l’Indonésie, la Malaisie et la Turquie. L’analyse montre que la situation pourrait être encore améliorée. Le rapport montre également, preuves à l’appui, que si la majorité des IED reçue par la région MENA va au secteur de l’immobilier et au secteur pétrolier, la majorité des emplois liés à l’IED est créée dans le secteur manufacturier. Pendant les années 2000, le secteur manufacturier n’a bénéficié que d’un cinquième environ de tous les IED réalisés dans la région, mais a créé 55 % de tous les emplois liés aux IED. Dans l’ensemble, le rapport met en évidence l’importance d’un bon état de droit. Une meilleure gouvernance est nécessaire pour permettre à l’investissement public d’appuyer la croissance du revenu et une meilleure gouvernance attire l’investissement privé dans des domaines comme les services et le secteur manufacturier, qui sont les principaux facteurs de croissance du revenu et de création d’emplois. L’amélioration des institutions publiques est nécessaire à la participation et la responsabilisation, mais aussi à la croissance et à l’utilisation efficace des ressources.