AFRIQUE DE L’EST ET AUSTRALE UNION DES COMORES Groupe de la Banque mondiale RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT COUNTRY CLIMATE AND DEVELOPMENT REPORT COMOROS i © 2025 Groupe de la Banque mondiale 1818 H Street NW, Washington, DC 20433 Téléphone : 202-473-1000 ; site internet : www.worldbank.org Ce rapport a été établi par les services de la Banque internationale pour la reconstruction et le développement (BIRD), de l’Association internationale de développement (IDA), de la Société financière internationale (IFC) et de l’Agence multilatérale de garantie des investissements (MIGA) qui, ensemble, prennent le nom Groupe de la Banque mondiale, avec le concours de contributeurs externes. Groupe de la Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude, la fiabilité ni l’exhaustivité des informations présentées dans ce rapport ou des conclusions et jugements qui y sont formulés. Il décline toute responsabilité en cas d’omissions ou d’erreurs (y compris, sans s’y limiter, les erreurs typographiques et techniques) pouvant figurer dans le rapport, et pour l’utilisation qui pourrait en être faite. Les frontières, les couleurs, les dénominations, les liens/notes de bas de page et toute autre information figurant sur les cartes du présent document n’impliquent de la part de l’une quelconque des institutions membres de Groupe de la Banque mondiale aucun jugement quant au statut juridique d’un territoire quelconque et ne signifient nullement que l’institution reconnaît ou accepte ces frontières. La citation d’ouvrages d’autres auteurs ne signifie pas que Groupe de la Banque mondiale approuve les points de vue de ces auteurs ou le contenu de leurs ouvrages. Les observations, interprétations et conclusions exprimées dans ce rapport ne reflètent pas nécessairement l’opinion de la BIRD, de l’IDA, d’IFC et de la MIGA, de leurs Administrateurs respectifs et des pays qu’ils représentent. Ce rapport a été conçu uniquement à des fins d’information générale et son contenu n’a nullement vocation à constituer des conseils sur des aspects juridiques, des titres de placement ou des investissements ni à constituer un avis sur l’opportunité d’un investissement quelconque ou une sollicitation de quelque nature que ce soit. Certaines institutions de Groupe de la Banque mondiale ou les organisations qui y sont rattachées peuvent avoir un investissement dans quelques entreprises et entités citées dans le présent rapport, ou fournir des conseils ou des services auxdites entreprises et entités, ou autrement détenir un intérêt financier dans celles-ci. Aucune disposition dans le présent rapport ne peut constituer ou être interprétée ou considérée comme une limitation ou une renonciation aux privilèges et immunités de la BIRD, de l’IDA, d’IFC et de la MIGA, qui sont tous spécifiquement réservés. Droits et licences Le contenu de ce rapport fait l’objet d’un dépôt légal. Parce que Groupe de la Banque mondiale encourage la diffusion de ses connaissances, ce rapport peut être reproduit, en tout ou en partie, à des fins non commerciales, à condition qu’il soit pleinement cité comme étant la source et que toutes les autres autorisations requises à cette fin (comme indiqué dans les présentes) aient été obtenues. Groupe de la Banque mondiale ne garantit pas que le contenu de ce rapport ne porte pas atteinte aux droits de tierces parties, et décline toute responsabilité à cet égard. Toutes les demandes de renseignements sur les droits et licences doivent être adressées à World Bank Publications, The World Bank, 1818 H Street, NW Washington, DC, 20433, USA ; courriel : pubrights@worldbank.org. AFRIQUE DE L’EST ET AUSTRALE UNION DES COMORES Groupe de la Banque mondiale RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT iii TABLE DES MATIÈRES 1. CHANGEMENT CLIMATIQUE ET DÉFIS ET PRIORITÉS EN MATIÈRE DE DÉVELOPPEMENT 11 1 1.1. Contexte et défis en matière de développement 11 1.2. Principaux risques et impacts du changement climatique 14 1.3. Les impacts du changement climatique sur l'agenda du développement 17 1.4. Principaux leviers pour un développement résilient au changement climatique et vert 20 2. ENGAGEMENTS, POLITIQUES, INSTITUTIONS ET CAPACITÉS DU PAYS EN MATIÈRE DE CLIMAT 23 2 2.1. Engagements juridiques et réglementaires en matière de changement climatique 23 2.2. Cadre institutionnel pour l'action climatique 24 2.3. Lacunes et défis de mise en œuvre 25 2.4. Moyens d'améliorer la résilience du cadre institutionnel 28 3. IMPLICATIONS SECTORIELLES ET OPPORTUNITÉS DU CHANGEMENT CLIMATIQUE 31 3 3.1. Améliorer la productivité et la résilience de l'agriculture et de la pêche 32 3.2. Investir dans un réseau d'infrastructures résilientes au changement climatique 43 3.3. Préserver l'approvisionnement en eau face à la demande croissante et au changement climatique 50 3.4 Augmentation de la capacité de production d’énergie renouvelable 59 4. CONSIDÉRATIONS MACROBUDGÉTAIRES EN RAPPORT AU CHANGEMENT CLIMATIQUE : ORIENTER L’ÉCONOMIE VERS UNE CROISSANCE RÉSILIENTE  66 4 4.1. Modélisation macrobudgétaire et scénarios de développement  66 4.2. Évaluation des impacts du changement climatique et de l’adaptation au changement climatique sur l’économie 67 4.3. Considérations macrobudgétaires dans la gestion des impacts du changement climatique 71 5. FINANCEMENT DE LA TRANSITION CLIMATIQUE AUX COMORES 75 5.1. Principales sources de financement climatique pour les Comores 75 5 5.2. Gestion des risques financiers liés au changement climatique  78 5.3. Assurances, produits de gestion des risques et diaspora 79 5.4. Tirer parti des marchés du carbone et des opportunités de financement de la lutte contre le changement climatique  79 5.5. Recommandations politiques pour le financement de la transition climatique des Comores 81 6. MARCHE À SUIVRE : PROGRAMMES D’ACTION PRIORITAIRES ET MESURES DE FINANCEMENT 84 RÉFÉRENCES  90 iv RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT LISTE DES FIGURES § Figure E1. Variations annuelles moyennes du PIB par rapport aux scénarios de référence du statu quo et de réforme sans mesures d’adaptation 3 § Figure E2. Variations annuelles moyennes du PIB par rapport aux scénarios de référence du statu quo et de la réforme 3 § Figure 1. Indicateurs sélectionnés de déséquilibre macroéconomique (à gauche) et taux de pauvreté réels et projetés et PIB réel par habitant (à droite) aux Comores 12 § Figure 2.Manifestations et émeutes aux Comores (2020-2023) 14 § Figure 3. Scénarios de températures moyennes de l'air enregistrées et projetées aux Comores (1990-2100) 15 § Figure 4. Niveau historique de la mer pour les zones côtières des Comores (1993-2015) basé sur des données satellites, avec anomalies enregistrées (mm) par rapport à la moyenne (1993-2012) 15 § Figure 5. Aperçu des catastrophes naturelles fréquentes et du nombre de personnes touchées (1980-2020) 16 § Figure 6. Nombre de villages touchés par le cyclone Kenneth et incidence de la pauvreté 17 § Figure 7. Superficies moyennes des cultures, production et revenus, 2017-2021 32 § Figure 8. Principales espèces de poissons capturés, 1950-2010 33 § Figure 9. Évolution annuelle moyenne des rendements des cultures pluviales par rapport à la référence historique (1995-2020) en raison des changements dans la disponibilité de l'eau et de la hausse des températures dues au changement climatique 34 § Figure 10. Impacts des changements dans la disponibilité de l'eau et de la hausse des températures sur les rendements des cultures pluviales par île pour 2041-2050 35 § Figure 11. Choc sur la production halieutique dû au changement climatique 39 § Figure 12. Evolution du potentiel de capture maximal dans la zone économique exclusive des Comores 40 § Figure 13. Impact de la productivité du travail par île, 2041-2050 42 § Figure 14. Coûts routiers annuels moyens dans le cadre d'un scénario de référence sans adaptation et d'un scénario d'adaptation, 2041-2050 44 § Figure 15.. Nombre moyen d'heures de retard sur la route dans les scénarios de référence et d'adaptation sans adaptation, 2041-2050 45 § Figure 16. Plaine inondable historique centennale  47 § Figure 17. Chocs sur la capitale du pays dus à l'élévation du niveau de la mer et aux inondations côtières dans un futur climatique pessimiste (SSP3–7,0, 80e percentile) 48 § Figure 18. Prévision d’évolution du niveau moyen de la mer selon différents scénarios climatiques 49 § Figure 19. Profil de risque de sécheresse par île, basé sur des données satellites 52 § Figure 20. Projections de la demande en eau par secteur à Ngazidja 54 § Figure 21. Projections de la demande en eau par secteur sur Mwali 54 § Figure 22. Projections de la demande en eau par secteur à Ndzuwani 54 § Figure 23. Courbe de rendement effectif du stockage pour tous les bassins de Ngazidja 55 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT v § Figure 24. Courbe de rendement effectif du stockage pour tous les bassins de Mwali 55 § Figure 25. Courbe de rendement effectif du stockage pour tous les bassins de Ndzuwani 55 § Figure 26. Analyse de sensibilité pour tous les bassins de Ngazidja à 20 pour cent du ruissellement exploitable 56 § Figure 27. Analyse de sensibilité pour tous les bassins de Ngazidja à 10 pour cent du ruissellement exploitable 56 § Figure 28. Analyse de sensibilité pour tous les bassins de Mwali à 60 pour cent du ruissellement exploitable 56 § Figure 29. Analyse de sensibilité pour tous les bassins de Ndzuwani à 50 pour cent du ruissellement exploitable 56 § Figure 30. Choc en matière d’’offre de main-d’œuvre dû à l’impact de la hausse des températures suite au changement climatique sur les maladies d’origine hydrique (à gauche) et à l’augmentation des investissements dans l’eau, l’assainissement et l’hygiène (à droite) 58 § Figure 31. Déploiement optimal de l’énergie produite dans le cadre du plan de développement à moindre coût 62 § Figure 32. Politiques actuelles en matière de changement climatique : Variations annuelles moyennes dans les scénarios de référence SQ et REC 68 § Figure 33. Politiques actuelles en matière de changement climatique : Évolution du taux de pauvreté dans les scénarios de référence SQ et REC 69 § Figure 34. Politiques actuelles en rapport au changement climatique : Pertes économiques cumulées dues au changement climatique par canal d’impact 69 § Figure 35. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation au changement climatique : Variations annuelles moyennes dans les scénarios de référence SQ et REC 70 § Figure 36. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation au changement climatique : Évolution du taux de pauvreté dans les scénarios de référence SQ et REC 70 § Figure 37. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation : Pertes économiques cumulées dues au changement climatique par canal d’impact 71 § Figure 38. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation : Évolution de la dette publique dans les scénarios de référence SQ et REC (Pourcentage du PIB) 72 LISTE DES TABLEAUX § Tableau E1. Recommandations clés du RNCD des Comores 8 § Tableau 1. Scénarios climatiques sélectionnés et évolution attendue des précipitations et des températures d'ici 2041-2050 par rapport à la référence historique (1995-2020) 31 § Tableau 2. Volumes estimatifs des ressources en eau renouvelables et taux d'exploitation par île 50 § Tableau 3. Évolution du débit moyen par île en raison du changement climatique 53 § Tableau 4. Opportunités de contribution du secteur privé 76 § Tableau 5. Plan d’action pour des mesures prioritaires en faveur d’un développement résilient et à faibles émissions de carbone aux Comores 84 vi RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT REMERCIEMENTS Le Rapport national sur le climat et le développement des Comores (CCDR) examine les interactions entre le développement, le changement climatique et les politiques climatiques. Élaboré par des membres du personnel du Groupe de la Banque mondiale (GBM), en collaboration avec le gouvernement des Comores (GdC), ce rapport vise à promouvoir un développement durable et résilient face aux impacts du changement climatique. Ce rapport a été préparé sous la direction de Berina Uwimbabazi (Cheffe de programme et Spécialiste principale de la gestion des ressources en eau), Steve Loris Gui- Diby (Économiste principal) et Atsushi Iimi (Spécialiste principal des transports). Les personnes suivantes ont apporté des contributions essentielles à ce rapport : Min Ji Sohn (Spécialiste en environnement), Ana Elisa Bucher (Spécialiste principale en environnement), Almedina Music (Économiste principale), Andry Herizaka Rakotoarisoa (Spécialiste en infrastructures), Atishay Abbhi (Spécialiste principal en gestion des risques de catastrophe), Ben Ahmed Abdou Aboubacar (Spécialiste urbain, Consultant), Benjamin Billard (Économiste agricole principal), Cecilia Paradi -Guilford (Spécialiste principale en développement numérique), Chung Gu Chee (Économiste principal), Clément Gévaudan (Spécialiste en développement numérique), Deea Ariana (Spécialiste en énergie), Eliane Razafimandimby Ramiandrison (Spécialiste principale en santé), Ezgi Canpolat (Spécialiste en développement social), Fanjaniaina Prisca Mamitiana (Spécialiste en développement du secteur privé), Francis Muamba Mulangu (Économiste principal, Statisticien), Gaël Fetraniaina Raserijaona (Spécialiste urbain principal), Heather Jane Ruberl (Économiste), Hiska Noemi Reyes (Spécialiste principale en développement social), Iangotiana Andy Ramamonjisoa (Analyste en secteur public, Associé professionnel junior), Ibrahim El Ghandour (Spécialiste en secteur public), Joanna P. De Berry (Spécialiste principale en développement social), Julia Rachel Ravelosoa (Économiste principale en protection sociale), Justin Marie Bienvenu Beleoken Sanguen (Spécialiste principal en énergie), Kabinet Kaba (Économiste), Komenan Koffi (Spécialiste principal en énergie), Lewnida Sara (Spécialiste principale en approvisionnement en eau et assainissement), Lira Hariravaka Rajenarison (Spécialiste principale en secteur public), Lorenzo Bertolini (Économiste principal), Luisa Texeira De Melo De C Felino (Chargée en gestion des risques, MIGA), Mamadou Tanou Balde (Économiste), Mampionona Amboarasoa (Économiste principal en agriculture), Marcos Vaena (Chargé en stratégie principal, IFC), Mark Dimmer (Chargé principal en investissements, IFC), Mohamed Abdel Jelil (Économiste principal en protection sociale), Neelam Nizar Verjee (Chargé principal en opérations) , Noro Aïna Andriamihaja (Spécialiste principal en secteur financier), Patrick John McCartney (Économiste principal), Sachiko Kondo (Spécialiste principal en gestion des ressources naturelles), Sinafikeh Asrat Gemessa (Économiste, Consultante), Tsiry Andriantahina (Spécialiste principal en énergie) et Weiyi Wang (Chargé en opérations, IFC). Les personnes suivantes ont apporté des appuis dans ce travail : Andrianina Noro Rafamatanantsoa (Assistante principale en programme), Matoiri Boina Ramlat (Assistante d’équipe) et Sitti Fatouma Ahmed (Assistante principale en programme). vii RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT vii L’équipe tient à remercier le gouvernement des Comores pour ses commentaires techniques, en particulier le Ministère des Finances, du Budget et de la Planification, le Ministère des Affaires étrangères, le Ministère de l’Intérieur, le Ministère des Transports, des Postes et Télécommunications, le Ministère de la Santé, le Ministère de l’Agriculture et de la Pêche. & Environnement et Ministère de l’Énergie. Les personnes suivantes ont fourni des orientations générales : Idah Pswarayi-Riddihough (Directrice pays, Comores), Claudia Conceicao (Directrice régionale, IFC), Iain Shuker (Directeur régional), Afrique Olojoba (Directeur sectoriel), Abdelaziz Lagnaoui (Directeur sectoriel), Marco Hernandez (Directeur sectoriel), Boubacar Sidiki Walbani (Chargé principal des opérations), Boubacar-Sid Barry (Représentant résident, Comores), Mehita Fanny (Directrice pays, IFC), Ram Akers (Représentant résident, IFC), Hiroyuki Hatashima (Chargé d’évaluation en chef, MIGA), Kate Wallace (Cheffe de secteur, MIGA), Ian Forde (Chef de programme) et Aida Assiata Amada Adamou (Chargée des opérations).. L’équipe souhaite remercier les paires évaluateurs : Benedicte Baduel (Économiste-pays principal), Christian Borja-Vega (Économiste principal), Dominic Ben Khotatso Milazi (Spécialiste principal en énergie), Diji Chandrasekharan Behr (Économiste principal en environnement), Gabriel Roberto Zaourak (Économiste principal), John Bryant Collier (Chef de programme), Martin Heger (Économiste principal en environnement), Dominick Revell de Waal (Économiste principal, SAEW3), Drita Dade (Spécialiste principal en environnement, SAWE4) et Giovanni Ruta (Spécialiste principal en environnement, SEAE1), ainsi que l’équipe centrale du groupe sur les changements climatiques du RNCD, l’UVP de la transformation numérique, l’UVP de la prospérité, LEGEN , l’UVP des personnes et l’UVP des infrastructures. Industriel Economics Inc. a mené des recherches techniques de base et une modélisation de l’impact climatique, apportant une contribution précieuse à ce RNCD. Le rapport a été financé en partie par le Fonds fiduciaire PROBLUE. viii RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT ACRONYMES °C Degrés Celsius SQ Scénario de développement du statu quo ou sans réforme (contrairement au REC) CC- MFMod Modèle macro-budgétaire des Comores sur le changement climatique CDN Contribution déterminée au niveau national CO2 Dioxyde de carbone gCO2 eq Grammes d’équivalent dioxyde de carbone GWh Gigawattheure Ha Hectares km Kilomètre km2 Kilomètre carré kV Kilovolt kW Kilowatt kWh Kilowattheure LCE Loi-cadre sur l’environnement MCM Des millions de mètres cubes mm Millimètres MW Mégawatt MWh Mégawattheure PIB Produit intérieur brut RCP Parcours de concentration représentatif REC Scénario de développement de la réforme (contraire au scénario de statu quo) REPAIR Projet régional de préparation aux situations d’urgence et d’accès à un redressement inclusif SONELEC Société Nationale d’Électricité des Comores SSP Parcours socioéconomique partagé RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT ix x RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT © Clement Gevaudan RÉSUMÉ EXÉCUTIF Introduction L’Union des Comores (« les Comores ») est particulièrement vulnérable aux risques climatiques, mais peut saisir d’importantes opportunités pour renforcer sa préparation et sa résilience face à ces défis. Selon l’indice mondial d’adaptation de Notre Dame, les Comores sont le 29e pays le plus vulnérable au changement climatique et se situent au 163e rang en ce qui concerne la préparation à l’adaptation, sur 191 pays évalués. L’archipel est exposé à de nombreuses catastrophes naturelles qui affectent gravement le capital naturel, la population et les infrastructures physiques. En 2014, le coût économique des catastrophes climatiques a été évalué à 5,7 millions USD par an, soit 9,2 pour cent du produit intérieur brut (PIB). Entre 2018 et 2023, le pays a subi 11 dépressions tropicales ou cyclones, le cyclone Kenneth ayant provoqué les plus lourds dégâts. Ces dommages ont représenté 14 pour cent du PIB, entraînant une baisse de la croissance économique de 3,6 pour cent en 2018 à 1,9 pour cent en 2019. Plus de 345 000 personnes, soit 40 pour cent de la population, ont été affectées par le cyclone, dont 185 000 gravement affectées et 12 000 déplacées. Malgré ces défis, les Comores disposent d’importantes opportunités pour renforcer leur résilience face aux crises climatiques. Le pays peut devenir plus robuste et réactif aux chocs, notamment en mettant en place des mécanismes de financement prépositionnés afin d’améliorer les efforts de réponse aux crises à venir. Les principaux axes d’intervention pour les Comores face au changement climatique sont l’adaptation et le développement résilient, le pays devant faire face à des coûts supplémentaires de 836 millions USD d’ici 2050 en raison des impacts climatiques. Dans ses plans d’adaptation actuels, les Comores pourraient améliorer la gestion de l’eau, renforcer la protection côtière et développer des pratiques agricoles climato- intelligentes. Il sera essentiel de protéger ces ressources contre les effets du changement climatique pour promouvoir une croissance et un développement résilients. Outre le renforcement de la capacité d’adaptation des secteurs liés aux ressources naturelles, il sera indispensable de mettre en œuvre une diversification économique stratégique afin de limiter les impacts climatiques futurs. De plus, les activités de développement seront menées de manière à générer des co -avantages à faible émission de carbone. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 1 L’Union des Comores s’est engagée à lutter contre le changement climatique à travers sa Contribution déterminée au niveau national (CDN) et ses priorités nationales. La CDN du pays, révisée en 2021 pour un horizon de dix ans, fixe des objectifs ambitieux visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 23 pour cent d’ici 2030. Le pays prévoit également d’augmenter significativement la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique afin d’atteindre 33 MW à l’horizon 2030. Cette transition favorisera non seulement un développement à faible émission de carbone, mais permettra également de réduire la dépendance du pays aux importations de pétrole et de charbon, qui représentent actuellement 95 pour cent du bouquet énergétique du pays. Par ailleurs, les Comores ont déclaré leur intention d’augmenter les absorptions de CO2 de 47 pour cent d’ici 2030 par rapport au statu quo. Le Plan Comores Émergent 2030, adopté en 2019 comme plan d’action stratégique national à long terme, décrit les interventions et projets à grande échelle visant à stimuler la transformation économique et assurer la durabilité. Le programme de développement présenté dans ce cadre avec l’accent sur : (i) la pêche et la gestion côtière, afin d’élever les Comores au rang de destination touristique dans l’océan Indien et de promouvoir les projets liés à l’économie bleue ; (ii) les énergies renouvelables et l’approvisionnement énergétique, afin de soutenir le mix énergétique des Comores ; (iii) les transports, afin de renforcer la connectivité maritime entre les îles ; (iv) le développement numérique, afin de faire de Moroni une ville financière intelligente et un district administratif numérique ; et v) l’agriculture, afin de promouvoir l’agro- industrie, notamment à travers le développement des chaînes de valeur. Les restrictions budgétaires freinent les efforts des Comores pour assurer la durabilité environnementale, stimuler la croissance économique et améliorer le niveau de vie. Avec l’augmentation du taux de pauvreté à 39 pour cent en 2022, la résolution de ces problèmes demeure une priorité essentielle. En outre, le pays fait face à un risque élevé de surendettement, la dette représentant 32,7 pour cent du PIB en 2022, soit près du double de la valeur enregistrée en 2017. Les entreprises publiques, quant à elles, ont généralement affiché de faibles performances, restreignant la marge de manœuvre budgétaire nécessaire pour répondre efficacement aux catastrophes naturelles. Pour redynamiser le modèle de croissance des Comores, il sera nécessaire de se concentrer sur la consommation, de réduire l’intervention de l’État dans l’économie et de mettre en œuvre des politiques d’accélération de la croissance de la productivité. Prenant en compte ce contexte de développement, ce rapport analyse l’impact des risques liés au changement climatique sur l’ensemble de l’économie. La modélisation macroéconomique et budgétaire dans le cadre de ce RNCD est axée sur l’étude des impacts du changement climatique et des politiques d’adaptation sur les performances économiques et la réduction de la pauvreté, comparant un scénario de statu quo (SQ), sans réformes liées au climat, à un scénario de réformes climatiques (REC) intégrant des mesures d’adaptation.1 Comme le montrent les résultats de la modélisation, les mesures d’adaptation peuvent réduire de manière significative les impacts du changement climatique sur l’économie comorienne. Par exemple, dans un scénario de statu quo (SQ), les impacts du changement climatique devraient entraîner une baisse du PIB estimée entre 5,1 pour cent (dans un scénario optimiste humide/chaud) et 6,6 pour cent (dans un scénario pessimiste sec/ très chaud) d’ici 2050. Dans un scénario de réformes du développement (REC) sans adaptation, les pertes économiques dues au changement climatique seraient réduites, avec une baisse du PIB estimée entre 4,4 pour cent (dans un scénario optimiste humide/chaud) et 5,8 pour cent (dans un scénario pessimiste sec/très chaud) (Figure E1). Par ailleurs, les taux de pauvreté pourraient augmenter jusqu’à 5,4 points de pourcentage dans le scénario climatique sec/très chaud en l’absence de mesures d’adaptation et de réforme. 1 Les impacts du changement climatique ont été estimés à travers huit différents canaux d’impact, à savoir : les impacts du stress thermique sur la productivité du travail ; les impacts de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène sur l’offre de main-d’œuvre ; la production agricole pluviale ; les impacts de l’érosion des sols sur la production agricole ; les impacts sur les routes et les ponts ; les dommages causés par les inondations intérieures ; les dommages dus à l’élévation du niveau de la mer et aux inondations côtières ; et les impacts sur la pêche. 2 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure E1 Figure E1. Variations annuelles moyennes du PIB par rapport aux scénarios de référence du statu quo et de réforme sans mesures d’adaptation Statu quo Scénario de réforme sans adaptation 0.0 0.0 -1.0 -1.0 -1.1 -1.1 -1.0 -1.0 -2.0 -1.7 -2.0 -1.6 -1.6 -1.7 -3.0 -3.0 -2.7 -2.7 -3.1 -3.2 -4.0 -4.0 -3.7 -3.6 -4.1 -4.3 -4.4 -4.3 -5.0 -4.8 -5.0 -5.1 -6.0 -6.0 -5.7 -5.8 -6.3 -7.0 -6.6 -7.0 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2023 2024 2023 2024 2023 2024 2023 2024 Sec et très chaud Humide et Chaud Sec et très chaud Humide et Chaud PIB rèel Consommation par habitant du ménage PIB rèel Consommation par habitant du ménage Avec l'intégration des options d'adaptation dans un scénario de réforme du développement (REC- adaptation) d'ici 2050, les pertes de PIB seraient réduites d'environnement 2,1 pour cent (Figure E2, volet droit) lorsque des mesures d'adaptation sont mises en œuvre dans le cadre d'un scénario climatique sec/très chaud ou pessimiste ou de 0,8 pour cent dans le cadre d'un scénario climatique humide/chaud optimiste. Par conséquent, la mise en œuvre de réformes politiques climato-intelligentes et de mesures d'adaptation peut contribuer à limiter la perte de PIB, par rapport au scénario habituel sans réformes. Figure E2 Figure E2. Variations annuelles moyennes du PIB par rapport aux scénarios de référence du statu quo et de la réforme Statu quo Scénario de réforme sans adaptation 0.0 0.0 -0.5 -0.5 -0.7 -0.7 -0.6 -0.7 -1.0 -0.7 -0.8 -0.8 -1.1 -1.1 -1.0 -0.8 -1.2 -1.5 -1.3 -1.3 -1.3 -1.2 -1.3 -1.5 -2.0 -1.7 -1.7 -2.1 -2.1 -2.5 -2.0 -2.1 -2.2 -2.8 -2.7 -3.0 -2.5 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2023 2024 2023 2024 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES Sec et très chaud Humide et Chaud 2023 2024 2023 2024 Sec et très chaud Humide et Chaud PIB rèel Consommation par habitant du ménage PIB rèel Consommation par habitant du ménage Cependant, bien que l'adaptation limite les impacts du changement climatique, certaines pertes économiques résiduelles sont encore attendues, la plus grande proportion de ces pertes étant dues à la baisse de la productivité du travail due au stress thermique et à la baisse de la productivité agricole. Un taux de pauvreté résiduel signifierait également une augmentation allant jusqu'à 1,1 pour cent dans le scénario climatique sec/très chaud avec des mesures d'adaptation et de réforme d'ici 2050. L'adaptation au changement climatique pourrait représenter un coût de plus de 100 millions USD au cours des 25 prochaines années, RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 3 Changements dans le cadre institutionnel de l'action climatique Reconnaissant l'importance d'une action climatique coordonnée, le gouvernement a créé le Comité national sur le changement climatique en 2018 pour coordonner les initiatives liées au climat. Les Comores ont également adopté la Politique nationale de l'environnement, qui vise à intégrer les considérations climatiques dans la planification du développement et à renforcer la gouvernance environnementale. En outre, des politiques nationales stratégiques, notamment le Programme d'action national d'adaptation au changement climatique et la Stratégie nationale de réduction des risques et des catastrophes, ont été élaborées et sont prêtes à être adoptées en 2024. Cependant, la Loi- cadre sur l'environnement ainsi que la Politique nationale de l'environnement doivent encore être mises à jour et, bien qu'un projet technique de cette dernière soit disponible, il n'a pas encore été finalisé et adopté. Bien que les Comores aient pris des engagements louables en matière d'adaptation et d'atténuation du changement climatique, le renforcement des cadres réglementaires et institutionnels ainsi que la résolution des problèmes de mise en œuvre sont essentiels pour pouvoir aller plus en avant. La faiblesse des dispositifs institutionnels, le manque de ressources et les contraintes de capacité entravent la coordination et la mise en œuvre efficaces des politiques nationales sur le changement climatique, la gestion des risques de catastrophe et la gestion des ressources naturelles, entre autres. Le suivi et l'évaluation des changements, ainsi que les fonctions de gestion des connaissances climatiques, offrent de précieuses opportunités d'amélioration aux Comores, qui pourraient à leur tour renforcer l'efficacité des interventions, optimiser l'efficience des investissements, accroître l'efficacité des interventions. et améliorer l’'accès au financement international. Bien que les mesures politiques et réglementaires aient proliféré dans certains secteurs, le renforcement de l'engagement politique, la promotion de la collaboration interinstitutionnelle et l'amélioration de la capacité institutionnelle à appliquer les réformes peuvent combler efficacement les lacunes existantes dans la mise en œuvre. En outre, le renforcement de la gouvernance pourrait considérablement améliorer la capacité des Comores à répondre efficacement aux crises. Depuis 2018, les capacités de gouvernance du pays sont mises à l'épreuve par une centralisation croissante du pouvoir exécutif. L'évolution des dynamiques de pouvoir après 2019 a introduit de nouveaux défis, tels que des décisions politiques et budgétaires cloisonnées et prises au gré des circonstances, ainsi qu'un manque de coordination institutionnelle, soulignant la nécessité de prioriser les efforts d’amélioration de la qualité de la gouvernance publique. Il est également crucial de renforcer la répartition des mandats et des ressources entre les différents niveaux de gouvernance, notamment en prenant en compte la réduction des transferts budgétaires aux gouvernements insulaires et le soutien limité aux communes décentralisées, pourtant essentiels pour assurer une prestation de services efficace. Néanmoins, les progrès réalisés dans la mise en place d’un cadre institutionnel pour faire face au changement climatique offrent une opportunité précieuse de croissance. En renforçant le système politique et en améliorant la gouvernance publique, les Comores pourraient réduire de manière significative les risques liés à l'inaction politique sur les questions climatiques et favoriser un avenir plus résilient. Pour combler ces lacunes et relever les défis liés à la mise en œuvre des politiques climatiques, il est nécessaire d’adopter une approche coordonnée et multisectorielle. Une telle approche implique un engagement significatif avec les institutions informelles au niveau local, élément essentiel pour favoriser des solutions efficaces et garantir des progrès durables. Le renforcement des dispositifs institutionnels, la clarification des rôles et des responsabilités, ainsi que l'amélioration des mécanismes de coordination pourraient considérablement améliorer l'efficacité des structures de gouvernance climatique. Plus précisément, la clarification des mandats du Comité national sur les changements climatiques, à travers la structuration de ses membres en groupes de travail en fonction de leurs domaines d'expertise et de leurs compétences, permettrait de favoriser la collaboration et d'améliorer l'efficacité des actions menées. Il est recommandé de créer un groupe de travail dédié à l'observation nationale du climat, chargé de coordonner et centraliser le suivi, l'évaluation et la gestion des connaissances en lien avec les engagements climatiques du pays, notamment dans le cadre des Contributions déterminées au niveau national (CDN). En outre, il est 4 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT essentiel d'investir dans des initiatives de renforcement des capacités, de fournir une assistance technique et de mobiliser des ressources financières pour permettre la mise en œuvre efficace des politiques et programmes climatiques. Dans un contexte où les institutions formelles de l'État central peinent à aller au-delà de la capitale Moroni, et où les institutions insulaires et municipales disposent de ressources financières et humaines insuffisantes, les organisations communautaires jouent un rôle clé dans la résilience et l'adaptation au changement climatique. Les recherches sur l'adaptation climatique ont montré qu'un fort capital social renforce la capacité d'adaptation des communautés. La solidité des associations communautaires locales et des structures de gouvernance traditionnelles, telles que les « conseils des sages », met en lumière leur potentiel à soutenir les efforts d'adaptation au changement climatique. Compte tenu du rôle central que jouent les villages et les communautés locales, l’exploitation et le renforcement de ces capacités organisationnelles pourraient améliorer les efforts d'adaptation, la collecte et la transmission des informations sur le terrain, ainsi que la mobilisation des groupes de femmes, des jeunes et des chefs traditionnels. Étant donné la structure de gouvernance des Comores, il est également essentiel d'impliquer les autorités insulaires et de les autonomiser sur les questions climatiques, afin de leur permettre d'intégrer efficacement les mesures d'atténuation et d'adaptation dans leurs politiques locales. Le renforcement des flux de financement climatique vers les niveaux locaux contribuera également à soutenir les actions climatiques menées par les communautés. Financement de la transition climatique Une part importante des flux de financements liés au climat et à la croissance verte aux Comores provient du secteur public et a été principalement allouée aux activités d'adaptation. Entre 2019 et 2020, le pays a mobilisé jusqu'à 163 millions USD par an, soit près de 12 pour cent du PIB, dont 96 pour cent provenaient du secteur public. Parmi les fonds reçus pour le climat, 68,2 pour cent ont été octroyés sous forme de subventions, 25,3 pour cent sous forme de projets financés par la dette à des conditions concessionnelles, et seulement 4 pour cent ont été mobilisés par le secteur privé. Le financement public provient principalement des institutions financières multilatérales, représentant 69 pour cent du total, notamment de la Banque mondiale, tandis que le reste est constitué de financements bilatéraux (20 pour cent), de financements gouvernementaux (9 pour cent) et de fonds climatiques (2 pour cent). Selon la Contribution déterminée au niveau national (CDN) des Comores, le besoin de financement climatique est estimé à environ 1,7 milliard USD entre 2020 et 2030, soit un coût moyen de 154 millions USD par an, dont 53 pour cent destinés à l'atténuation, 24 pour cent à l'adaptation et 23 pour cent aux pertes et dommages. Cependant, il est probable que ces estimations sous-évaluent les coûts réels de l'adaptation, en raison d'un manque de données et d'une expertise technique limitée sur les méthodes de calcul des coûts d'adaptation. Si le gouvernement devait prendre en charge seul les coûts de l'adaptation au changement climatique, la dette publique des Comores pourrait augmenter en moyenne de 4 pour cent du PIB d'ici 2050, en l'absence de réformes économiques. Par conséquent, des réformes macro-budgétaires seront nécessaires pour maintenir la stabilité macroéconomique. Même avec la mise en œuvre de ces réformes, la dette publique pourrait encore croître de 2,9 pour cent du PIB d'ici 2050. En 2024, les Comores disposent d'une faible marge de manœuvre budgétaire, en raison d'une faible mobilisation des ressources intérieures, de contraintes budgétaires importantes et d'un risque élevé de surendettement. Cette situation exige l'adoption d'approches innovantes pour financer l'adaptation au changement climatique, notamment par une mobilisation accrue des ressources nationales, le renforcement de la participation du secteur privé, une gestion efficace des risques liés au climat et une utilisation stratégique des financements concessionnels. Compte tenu du faible espace budgétaire pour l'investissement public, le secteur privé joue un rôle essentiel dans le financement de la transition vers une économie durable et résiliente au changement climatique aux Comores, en maximisant l'utilisation des ressources publiques disponibles et en mobilisant des capitaux privés, de l'expertise et de l'innovation, ainsi qu'en débloquant des financements climatiques. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 5 Les partenariats public-privé (PPP) peuvent également permettre une répartition des risques équilibrée et bien informée entre les acteurs publics et privés, garantissant une visibilité et une stabilité à long terme tout au long de la durée des contrats. Cette prévisibilité contractuelle peut aider à gérer l'incertitude liée aux impacts du changement climatique. Il est donc essentiel d’établir un cadre adéquat de partenariats public-privé pour attirer des investissements privés dans les secteurs clés exposés aux risques climatiques, notamment les infrastructures critiques telles que l'eau, l'électricité, les transports et la connectivité des technologies de l'information et de la communication. Aux Comores, des opportunités de partenariat public- privé pourraient être explorées dans le domaine des technologies d'énergie renouvelable, ainsi que pour encourager les industries à adopter des technologies vertes, développer l'écotourisme et investir dans des infrastructures résilientes au climat. Pour parvenir à une plus grande implication du secteur privé, il sera nécessaire de mettre en œuvre non seulement de nouveaux investissements, mais aussi des politiques et des réglementations efficaces visant à favoriser le développement du secteur privé. Cela inclut la sensibilisation aux risques et opportunités liés au changement climatique, l'amélioration du climat général d'investissement, l'élaboration d'un plan national d'investissement pour l'adaptation, ainsi que la mise en œuvre de réformes réglementaires axées sur le climat. Les Comores pourraient explorer les possibilités de mobiliser des financements par le biais des marchés du carbone. Le pays a exprimé son intention de devenir un puits de carbone, avec pour objectif de réduire ses émissions nettes de CO2 de 23 pour cent et d'augmenter son absorption nette de CO2 de 47 pour cent d'ici 2030, principalement par le biais de pratiques de boisement, de reboisement, d'agroforesterie et d'arboriculture. La réalisation de ces objectifs pourrait permettre au pays d'accéder aux mécanismes internationaux d'échange de crédits carbone. Cependant, les Comores ne disposent actuellement pas d'un cadre institutionnel permettant de faciliter la commercialisation de ces crédits. Par ailleurs, le pays pourrait renforcer ses initiatives en matière de finance verte en rejoignant des réseaux internationaux tels que le Réseau pour le verdissement du système financier et le Réseau bancaire et financier durable, afin d'améliorer l'accès aux financements verts et de favoriser des pratiques financières durables. Dans le cadre de son Projet régional de résilience climatique pour l'Afrique de l'Est et australe, la Banque mondiale apportera son appui aux Comores pour mobiliser des instruments de financement climatique, tout en promouvant une gouvernance climatique multisectorielle et en attirant des financements provenant de diverses sources. Le projet vise également à renforcer la sensibilisation et les capacités des autorités du secteur financier et de l'industrie en matière de développement de programmes de finance verte, ainsi qu'à élargir les mécanismes d'adaptation au changement climatique. Par ailleurs, des instruments financiers tels que le financement mixte et les fonds fiduciaires pour la conservation présentent un potentiel pour débloquer des financements bleus aux Comores. Le pays pourrait également envisager la mise en place de mécanismes d'échange dette-nature, permettant de réduire le fardeau de la dette publique tout en libérant des ressources pour renforcer les efforts de résilience et d'adaptation au changement climatique. Changement climatique et défis et priorités en matière de développement Les Comores ont besoin d’un large éventail d'investissements, de réformes politiques et d'autres interventions est nécessaire pour renforcer la résilience et atteindre les objectifs de développement du pays face aux défis posés par le changement climatique. Le changement climatique a des implications significatives sur le développement de divers secteurs, nécessitant des actions ciblées pour atténuer ses impacts. Compte tenu des contraintes budgétaires du pays et de l'ampleur des mesures requises, il sera crucial de définir et de prioriser les interventions nécessaires, comme résumé ci-dessous 6 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Domaine d'intervention 1 : Améliorer la productivité et la résilience de l'agriculture et de la pêche Les Comores peuvent tirer parti de leur cadre réglementaire existant dans le secteur de la pêche, défini par le Code de la pêche et de l'aquaculture de 2007, pour établir un cadre de gouvernance plus complet en matière de gestion durable de la pêche. Le pays possède déjà un secteur de la pêche important, qui, s'il est développé de manière durable, pourrait contribuer significativement à la sécurité alimentaire et aux moyens de subsistance des populations. Parmi les interventions proposées, certaines stratégies d'agriculture climato-intelligentes et les solutions fondées sur la nature identifiées présentent des coûts relativement faibles, les rendant plus accessibles financièrement à court terme. Par ailleurs, le développement de flux de financement et de programmes spécifiquement destinés aux femmes et aux jeunes offre plusieurs opportunités d'investissement dans ce secteur, tout en contribuant à une meilleure équité dans l'agriculture et en favorisant des avancées vers les objectifs de développement du pays. Domaine d'intervention 2 : Investir dans un réseau d'infrastructures résilientes au changement climatique Les Comores disposent d'un réseau de transport qui peut servir de base à une future expansion et réhabilitation. L'intégration de mesures de résilience dans la construction d'infrastructures entraîne généralement un surcoût marginal par rapport aux infrastructures conçues uniquement pour faire face aux risques climatiques actuels. Le pays pourrait également explorer des opportunités de « faire un bond en avant » dans les domaines où des infrastructures sont développées pour la première fois, en tirant parti des leçons apprises d'autres pays en matière de développement résilient au changement climatique, par exemple en utilisant des routes en béton dans les zones sujettes aux inondations. Par ailleurs, la mise en place de systèmes de transport résilients peut soutenir d'autres secteurs clés et contribuer à la réalisation d'objectifs de développement plus larges, notamment en matière de sécurité alimentaire, de sécurité énergétique, de santé, d'éducation et de création d'emplois. Domaine d'intervention 3 : Assurer l'approvisionnement en eau face à la demande croissante et au changement climatique Les Comores disposent déjà d’un système de gestion des ressources en eau à partir des aquifères côtiers, qui peut être élargi de manière durable à l’avenir. Le pays bénéficie également d’un cadre opérationnel définissant les objectifs de gestion de l’eau. Il a la possibilité de choisir parmi une large gamme de solutions d’approvisionnement et de gestion de l’eau, adaptées aux différentes conditions hydroclimatiques propres à chaque île. Cette flexibilité offre aux Comores l’opportunité de décentraliser les systèmes d’approvisionnement en eau, en privilégiant des solutions mieux adaptées aux spécificités locales. Domaine d'intervention 4 : Augmenter la capacité de production d'énergie renouvelable Les Comores disposent d’un important potentiel de production d’énergie renouvelable, notamment dans les domaines de l’éolien, du solaire et de la géothermie. Par ailleurs, le développement des énergies renouvelables locales pourrait renforcer l’autosuffisance énergétique du pays, en permettant une réduction progressive de sa dépendance aux combustibles fossiles importés. Enfin, la récente adoption de la réglementation sur les énergies renouvelables constitue une base solide pour poursuivre la mise à jour et le renforcement du cadre réglementaire national dans ce domaine. Prenant en compte les limites en matière de ressources et de la dynamique complexe entourant les mesures politiques et d'investissement décrites dans ce rapport, le tableau ci-dessous résume les principales recommandations. Celles-ci sont classées en fonction du type d'intervention (connaissances, investissement ou institutions) ainsi que selon leur niveau de priorité (court, moyen ou long terme). RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 7 Tableau E1. Recommandations clés du RNCD des Comores TYPE ACTIONS PRIORITAIRES URGENCE D’INTERVENTION Domaine d’intervention 1 : Améliorer la productivité et la résilience de l’agriculture et de la pêche Améliorer la résilience agricole en évaluant le potentiel d’irrigation, en améliorant la précision des données Moyen terme et en donnant la priorité à une expansion rentable de l’irrigation. Irrigation Améliorer le capital physique en réhabilitant les infrastructures agricoles, en particulier les Moyen terme infrastructures de collecte et de stockage des eaux en soutien à l’agriculture irriguée. Appliquer une approche plus large de l’économie bleue Solutions fondées sur et intégrer des solutions fondées sur la nature pour Moyen terme la nature promouvoir une croissance économique durable et inclusive. Améliorer l’agriculture climato-intelligente, les Agriculture Long terme connaissances agricoles et l’innovation. Améliorer la résilience climatique dans le secteur de la pêche à travers des réformes de gouvernance et en explorant des moyens de subsistance et des activités Court terme économiques alternatives, notamment l’écotourisme Pêcheries côtier. Améliorer le secteur de la pêche du pays à travers l’élargissement des infrastructures de la chaîne Court terme d’approvisionnement. Améliorer l’inclusion économique et la résilience Protection sociale communautaire en promouvant des systèmes Long terme alimentaires sensibles au climat et des emplois verts. Améliorer l’environnement favorable au développement Finance Moyen terme de l’agriculture et de l’agro-industrie. Domaine d’intervention 2 : Investir dans un réseau d’infrastructures résilientes au changement climatique Accroître les investissements dans les infrastructures résilientes au changement climatique et les mesures de réduction de la vulnérabilité, notamment en donnant la Court terme priorité à l’entretien des principales routes nationales et Itinéraires en relocalisant les actifs vulnérables. Opérationnaliser pleinement le Fonds routier. Court terme Améliorer la résilience climatique dans la gestion des Système d’alerte infrastructures en créant des services climatiques pour Moyen terme précoce des systèmes d’alerte précoce efficaces. Améliorer la capacité d’adaptation grâce à une meilleure connectivité entre les îles et l’Afrique continentale à Ports et Aéroport Moyen terme travers l’expansion du réseau de transport intelligent face au climat. Renforcer la mise en œuvre et la gestion des solutions Court terme fondées sur la nature. Développer un cadre de suivi et d’évaluation pour Gestion des zones quantifier les avantages des solutions fondées sur la Moyen terme côtières nature. Soutenir les services d’infrastructure grise traditionnels Moyen terme avec des solutions fondées sur la nature côtière. 8 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT TYPE ACTIONS PRIORITAIRES URGENCE D’INTERVENTION Développeur des infrastructures éducatives résilientes Éducation Court terme aux chocs climatiques. Renforcer les systèmes et infrastructures de santé Santé Court terme résilients au changement climatique. Domaine d’intervention 3 : Assurer l’approvisionnement en eau face à la demande croissante et au changement climatique Augmenter les investissements dans l’approvisionnement, le stockage et la distribution Approvisionnement en de l’eau pour garantir un approvisionnement sûr en Moyen terme eau eau dans un contexte de risques liés au changement climatique. Améliorer la qualité de l’eau en renforçant le contrôle de la qualité de l’eau, en élargissant les programmes d’eau, Qualité de l’eau Court terme d’assainissement et d’hygiène et en améliorant les mesures de protection de l’environnement. Élaborer des plans directeurs de l’eau à l’échelle de Gestion des ressources l’île, intégrant les principes de la gestion intégrée des Court terme en eau ressources en eau et s’appuyant sur le plan d’action SCA2D. Renforcer les stratégies de santé et améliorer les Moyen terme capacités du personnel de santé. Santé Renforcer les capacités de surveillance et de détection Moyen terme des maladies. Domaine d’intervention 4 : Augmenter la capacité de production d’énergie renouvelable Développer la production d’énergie renouvelable dans le pays, conformément à la réalisation du Plan de Moyen terme Production d’énergie développement au moindre coût du pays. renouvelable Mettre en œuvre le plan de transition en renforçant les Court terme rôles institutionnels. Tarif de l’électricité Mener des réformes sur les tarifs de l’électricité. Moyen terme Améliorer le cadre juridique réglementaire et Finance À long terme réglementer le secteur de l’énergie. Développer une stratégie nationale du secteur Coût de l’électricité Court terme énergétique. Légende Type d’intervention = Connaissances = Investissement = Institutions Urgence : Court terme = 1 à 2 ans ; Moyen terme = 3 à 5 ans ; Longue durée = 5 ans et plus RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 9 10 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT © Sachiko Kondo 1. Changement climatique et défis et priorités en matière de développement 1.1. Contexte et défis en matière de développement L'Union des Comores (« Les Comores ») est un petit pays archipélagique composé de trois îles (Ngazidja, Ndzuwani et Mwali) qui se situe au large de la côte est de l'Afrique à l'entrée nord du canal du Mozambique dans l 'océan Indien. La superficie terrestre totale du pays (1 860 km²) parait minuscule au regard de sa zone économique exclusive qui fait 160 000 km². En 2020, la population des Comores se chiffrant environ à 870 000 habitants et connaît une croissance constante depuis 1960, en particulier en milieu rural. Malgré cette croissance démographique, les Comores n'ont pas encore pleinement profité des bénéfices du dividende démographique. Les Comores ont enregistré une croissance économique modérée mais le pays est confronté à des défis budgétaires qui limitent le développement durable sur le long terme. Entre 2011 et 2020, la croissance du PIB a été en moyenne de 2,7 pour cent, ce qui a permis de réaliser une croissance moyenne du produit intérieur brut (PIB) par habitant de seulement 0,4 pour cent. L'économie repose largement sur la consommation, tirée par les transferts de fonds de la diaspora, et manque de diversité, le secteur privé étant de petite taille et essentiellement informel contribuant très peu à l’ajout de valeur. Les dons étrangers n’ont fait aggraver l’absence d'incitations à l'investissement dans le capital humain et le stock d’investissement. Les taux de chômage sont relativement élevés, surtout chez les jeunes. En 2014, la moitié de la population jeune en âge de travailler était au chômage, et seuls 3 pour cent d'entre eux occupaient un emploi formel. Les conditions budgétaires limitent la durabilité environnementale, la croissance économique et l'amélioration du niveau de vie, alors que les entreprises publiques, dont la performance est faible, restreignent la marge de manœuvre budgétaire pour répondre aux catastrophes naturelles à mesure que la dette augmente. La pauvreté constitue un véritable défi : selon les estimations, 39 pour cent de la population vivait sous le seuil de pauvreté en 2022 (Figure 1). Cette situation est aggravée par des taux d'inflation élevés, culminant à 12,4 pour cent en 2022 avant de redescendre à 9,2 pour cent en 2023 puis à 2,2 pour cent en 2024 selon les prévisions. Si la consommation privée, financée en grande partie par les transferts de fonds des migrants, stimule l'économie, elle souligne le manque d'investissements et d'innovations robustes au niveau du pays, ce qui conduit à un déficit croissant du commerce extérieur à mesure que le volume des importations continue d’augmenter plus rapidement que celui des exportations. Le manque d'investissements publics dans des infrastructures propices à la productivité a conduit à une baisse de l'efficacité opérationnelle des entreprises, étouffant ainsi le développement du secteur privé. Cette stagnation limite la marge de manœuvre budgétaire, aggravant par conséquent la dette publique. La dette a atteint 38 pour cent du PIB en 2023, soit plus du double de ce qu'elle était en 2017 (Figure 1), et cette situation limite davantage la capacité du gouvernement à investir dans les infrastructures essentielles. La forte présence des entreprises publiques, qui contribuent à hauteur de 43 pour cent au budget de l'État, exacerbe ce cycle : l’insuffisance des investissements privés ne permet plus de stimuler les secteurs à forte productivité. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 11 FIGURE 1 Figure 1. Indicateurs sélectionnés de déséquilibre macroéconomique (à gauche) et taux de pauvreté réels et projetés et PIB réel par habitant (à droite) aux Comores Pourcenatge du PIB Pourcenatge du PIB Taux de pauvreté (%) PIB réel par habitant (UMN constante) 60 0 80 550000 -1 70 50 540000 -2 60 530000 40 -3 50 520000 30 -4 40 510000 -5 30 20 500000 -6 20 10 -7 10 490000 0 -8 0 480000 2018 2019 2020 2021 2022e 2023f 2024f 2025f 2014 2016 2018 2020 2022 2024 TAUX PAUVRETÉ INTERNATIONAL TAUX DE PAUVRETÉ PRITI DETTE BALANCE DES PAIEMENTS COURANT (AXE DROITE) TAUX DE PAUVRETÉ PRITS PIB RÉEL PAR HABITANT SOLDE BUDGÉTAIRE (AXE DROITE) Source : Estimations et prévisions des autorités nationales et Source : Banque mondiale des services de la Banque mondiale Pour briser ce cycle, il est urgent de rééquilibrer la croissance en faveur de l'investissement privé, des exportations et des investissements publics stratégiques qui pourraient stimuler le développement du secteur privé. Par exemple, les pays pairs structurels et aspirationnels des Comores ont atteint des niveaux d'investissement en capital de 27,8 et 27,7 pour cent du PIB, respectivement, entre 2011 et 20202. En adoptant des politiques ciblés et en réalisant des investissements ciblés visant à améliorer la productivité et stimuler la croissance dans des secteurs clés, les Comores pourraient sortir de ce cycle et améliorer le bien-être de sa population. Le secteur primaire – constitué de l'agriculture et de la pêche, représente toujours une part importante et croissante du PIB des Comores, ce qui met en lumière le potentiel d’une transformation structurelle future. Le secteur primaire a contribué à 36,4 pour cent du PIB en 2022, contre environ 30 pour cent en 2010. Cette progression résulte principalement d'une augmentation de la contribution du secteur de la pêche, qui est passée de 7,3 pour cent du PIB en 2010 à 13,1 pour cent en 2022. Cependant, la dynamique de croissance du secteur de la pêche a été perturbée par des problèmes de gouvernance, qui ont conduit l’Union européenne à émettre un carton rouge3 et à suspendre l’accord de partenariat de pêche en 2018, entraînant une perte d'accès au marché européen. La croissance de ce secteur a ainsi ralenti, passant de 9,4 pour cent sur la période 2016-2018 à 3 pour cent sur la période 2021-2022. En parallèle, le secteur agricole a connu un rebond, avec une croissance de 3 pour cent sur la période 2021-2022, contre -0,4 pour cent entre 2016 et 2019. 2 Le Mémorandum économique de pays de 2023 a identifié un ensemble de pays pairs structurels et aspirationnels pour les Comores. Les pays structurellement comparables comprennent les petits pays insulaires qui partagent les mêmes fondamentaux économiques que les Comores : Sao Tomé-et-Principe, Timor-Leste et Îles Salomon. Les pays pairs aspirationnels ont des caractéristiques structurelles similaires à celles des Comores mais ont enregistré une croissance par habitant plus rapide et ont réussi à développer leur secteur touristique : Tonga, Samoa, Fidji, Cap-Vert, Maurice et Seychelles. 3 L’émission d’un carton rouge est une sanction imposée par l’Union européenne aux pays exportateurs de poisson qui ont été avertis (par un carton jaune préalable) qu’ils n’ont pas pris de mesures correctives pour lutter contre la pêche illicite, non réglementée et non déclarée. Les Comores n’ont pas pris de mesures correctives lorsqu’elles ont reçu un carton jaune et ont depuis été sanctionnées par une interdiction d’importation de poisson dans l’Union européenne, et par la suspension de l’accord de partenariat de pêche durable avec les Comores, ainsi que par l’appui structurel au secteur de la pêche de la part de l’Union européenne. 12 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Le manque de capital humain et physique freine la croissance des secteurs à fort potentiel d’emploi, tout en accentuant une dépendance excessive aux importations. Pourtant, les Comores bénéficient d’un sol volcanique fertile et de ressources marines abondantes. La vaste zone économique exclusive du pays le place parmi les 10 premiers au monde en termes de contribution de la pêche à la richesse nationale et au capital naturel bleu (notamment les mangroves et les pêcheries de capture marines) 4. Cependant, le pays peine à exploiter pleinement son potentiel agricole et halieutique ne serait-ce que pour répondre à la demande locale en raison du faible niveau d’investissements dans les infrastructures physiques et la formation des travailleurs. Par conséquent, les importations alimentaires représentent environ 41 pour cent des importations de marchandises. À titre de comparaison, ce taux est de 25 pour cent dans les pays structurellement comparables, 12 pour cent en Afrique subsaharienne et 10,6 pour cent dans les pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure. La faiblesse de l’espace budgétaire et l’inefficacité des dépenses publiques, notamment l’absence d’intégration du changement climatique dans les investissements publics, représentent un défi majeur pour un développement résilient. Le pays reste fortement dépendant des dons et des transferts de fonds étrangers, ce qui a entraîné une détérioration progressive du stock de capital physique et humain. De multiples chocs, tels que les catastrophes naturelles, la pandémie de COVID-19 et les fluctuations des prix, ont davantage fragilisé les performances macro-budgétaires, creusant davantage le déficit fiscal. La sous-performance des entreprises publiques accentue la pression sur les finances publiques et entrave la capacité du gouvernement à répondre de manière efficace aux chocs climatiques. En outre, les mauvaises performances financières de ces entreprises freinent la croissance de la productivité, réduisent les recettes publiques et compromettent la viabilité budgétaire. Pour relever ces défis, il est essentiel d’améliorer la gestion des entreprises publiques, de renforcer la gestion de la dette et d’adopter une loi sur les énergies renouvelables afin de stimuler la performance financière et d’améliorer l’accès à des sources d’énergie à moindre coût. En outre, les Comores présentent une histoire marquée par la fragilité5, un phénomène dont de nombreux facteurs se sont aggravés au cours des dernières années. Depuis son indépendance en 1975, le pays a connu plus de 20 tentatives de coup d'État réussies et huit révisions constitutionnelles. Bien que l'indice des États fragiles montre une amélioration des indicateurs de fragilité depuis les réformes constitutionnelles de 2018, ceux-ci restent nettement inférieurs aux niveaux observés en 2017, avant ces réformes. Cependant, la trajectoire institutionnelle et politique suivie depuis 2018 a été caractérisée par une plus forte centralisation du pouvoir exécutif et une exacerbation des inégalités et des tensions interinsulaires. Les évolutions actuelles présentent des risques croissants d’instabilité sociale et politique, notamment la possibilité d’une mobilisation violente de groupes marginalisés. Malgré des mesures répressives, le mécontentement social et politique reste palpable. La vague de protestations politiques de 2018-2019, qui a suivi la réforme constitutionnelle et l’élection présidentielle, a été fermement réprimée, entraînant une diminution notable des manifestations menées par des civils. Cependant, bien que le nombre de protestations ait baissé en raison de la répression, des expressions régulières de mécontentement social persistent6. La Figure 2 illustre les tendances des manifestations et des émeutes depuis 2020.7 Une part importante de ces manifestations, dont certaines ont dégénéré en violences, a été motivée par des revendications des citoyens en faveur d’un meilleur accès aux services publics, notamment l’eau et l’électricité, ainsi que 4 Banque mondiale. 2021 Résumé exécutif. Vol. 2 sur 2. Washington, DC : Groupe de la Banque mondiale. 5 Voir Banque mondiale. 2018 Évaluation des risques et de la résilience. 6 Données du projet sur la localisation et les événements des conflits armés ; Freedom House, Comores 2021 Country Report, (Washington DC : Freedom House), Département américain de la Défense. Rapport 2021 sur les droits de l’homme aux Comores . Publié en avril 2022. 7 Les données sur la localisation et les événements des conflits armés commencent en 2020, sans enregistrement systématique des émeutes et des manifestations aux Comores avant cette date. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 13 FIGURE 2 par des préoccupations liées à l’inflation, en particulier la hausse des prix du riz.8 Des manifestations ont également éclaté à l’occasion de l’élection présidentielle de 2024, les partis d’opposition contestant les résultats du scrutin.9 10 Figure 2.Manifestations et émeutes aux Comores (2020-2023) 25 Couche de points Affrontements 20 Violence contre les civils Explosion/violence à distance 15 Émeutes Manifestations Évolutions stratégiques 10 Types d’évènements multiples 5 0 2020 2021 2022 2023 Source : Données sur l'emplacement et les événements des conflits armés 1.2. Principaux risques et impacts du changement climatique Le changement climatique devrait entraîner une hausse des températures, avec des conséquences négatives sur l'agriculture, la production alimentaire, la gestion côtière, les infrastructures et l'approvisionnement en eau. Aux Comores, la température moyenne annuelle a déjà augmenté de 0,9°C au cours du 20e siècle. Depuis 2014, elle dépasse systématiquement 23,8°C et a atteint plus de 24,2°C à partir de 2019. Cette tendance au réchauffement devrait se poursuivre, les projections indiquant une augmentation de la température comprise entre 0,8°C et 2,1°C d'ici 2060, et entre 1,2°C et 3,6°C d'ici 2090 (Figure 3). 11 Par ailleurs, le changement climatique risque d’accroître la fréquence des sécheresses, affectant gravement l'agriculture et la sécurité alimentaire. Le pays a déjà subi de longues périodes de sécheresse à la fin des années 1990 et au début des années 2000, ce qui a eu un impact négatif sur la disponibilité des ressources en eau. Ces risques de pénurie d'eau sont exacerbés par l'origine volcanique des Comores, où les rivières pérennes sont rares et les infrastructures de stockage d'eau insuffisantes. L'érosion côtière constitue également une menace importante, puisqu’elle pourrait endommager environ 29 pour cent des routes et infrastructures stratégiques, et entraîner le déplacement d’au moins 10 pour cent de la population côtière d’ici 205012. Ces projections mettent en évidence la nécessité urgente de prendre des mesures pour atténuer les impacts du changement climatique et renforcer les capacités d’adaptation afin de protéger les infrastructures et la population des Comores à court et à long terme. 8 Données sur la localisation et les événements des conflits armés. 9 Le contenu des textes législatifs n’est pas entièrement connu mais devrait couvrir des questions telles que la définition de l’opposition politique et les droits de l’opposition. https://www.rfi.fr/fr/afrique/20220322-le-pr%C3%A9sident-assoumani-a-re%C3%A7u-les- conclusions-du-dialogue -inter-comorien 10 Unité de renseignement de l’Economist. 2022 Rapport national sur les Comores. Créé le 14 novembre 2022 11 Portail de connaissances sur le changement climatique de la Banque mondiale 12 FMI. 2010 Union des Comores : Document de stratégie pour la réduction de la pauvreté et la croissance. https://doi. org/10.5089/9781455203383.002 14 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT FIGURE 3 Figure 3. Scénarios de températures moyennes de l'air enregistrées et projetées aux Comores (1990-2100) 31 Projecte dAverage Mean SurfaceAir Temperatute 30 Comoros; (Ref. Period: 1995-2024)), Multi-Model Ensemble 29 28 27 26 25 24 1960 1980 2000 2020 2040 2060 2080 2100 HIST. REF. PER., 1950-2024 SSP1-2.6 SSP2-4.5 SSP3-7.0 SSP5-8.5 Source : Portail de connaissances sur le changement climatique de la Banque mondiale L'érosion des zones côtières et des terres arables constitue un problème qui se pose déjà et risque d'être aggravé par le changement climatique. Depuis 1993, le niveau de la mer augmente à un rythme de 1 à 6 mm par an (Figure 4), avec des projections indiquant des hausses pouvant atteindre 4 mm par an13, entraînant une plus forte érosion côtière14 au fil du temps. Les effets de cette élévation du niveau de la mer sont déjà visibles à Mwali et Ndzuwani, où l'érosion côtière dégrade les zones littorales, les plages, les terres agricoles et les forêts. Par ailleurs, cette montée des eaux a provoqué une augmentation de la salinité des ressources en eaux souterraines, réduisant leur qualité et leur disponibilité, et a causé des dommages significatifs aux infrastructures situées le long des côtes.15 FIGURE 4 Figure 4. Niveau historique de la mer pour les zones côtières des Comores (1993-2015) basé sur des données satellites, avec anomalies enregistrées (mm) par rapport à la moyenne (1993-2012) 300 Average Historical Level Anomaly 200 100 0 -100 -200 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 ANOMALIE MOYENNE MENSUELLE ANOMALIE MOYENNE ANNUELLE JANVIER Source : Banque mondiale (2021). 13 Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. 2002 Communication nationale initiale sur les changements climatiques. Union des Comores. https://unfccc.int/sites/default/files/resource/Comoros%20INC_Exec.%20Summary_English.pdf 14 Banque mondiale (2016). Fonds pour l’environnement mondial. (2009). 15 Banque mondiale. 2019 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 15 En outre, les catastrophes naturelles ont toujours constitué une menace importante pour le développement des Comores et continueront de l’être. L'archipel est exposé à de nombreux aléas naturels, notamment les tempêtes, les cyclones tropicaux, les longues périodes de sécheresse, les inondations, les tremblements de terre et l’activité volcanique, qui affectent négativement le capital naturel, la population et les infrastructures physiques du pays (Figure 5) 16. Selon les estimations, 54 pour cent de la population comorienne est exposée à ces catastrophes naturelles17. Le pays a été touché par plus de 18 catastrophes au cours des 40 dernières années, dont 11 dépressions tropicales ou cyclones entre 2018 et 2023. En 2019, le cyclone tropical Kenneth a causé des dégâts équivalant à 14 pour cent du PIB, entraînant une baisse de la croissance économique totale de 3,6 pour cent en 2018 à 1,9 pour cent en 201918. Le changement climatique et ses impacts sur l’océan Indien viendront encore aggraver les aléas hydrométéorologiques déjà existants, exposant le pays à des phénomènes climatiques extrêmes de plus en plus fréquents et intenses. FIGURE 5 Figure 5. Aperçu des catastrophes naturelles fréquentes et du nombre de personnes touchées (1980-2020) 1M 100K NOMBRE DE PERSONNES 10K 1K 100 10 1980 1985 1990 1995 2000 2005 2010 2015 SÈCHERESSE TEMPÊTE ÉPIDÉMIE ACTIVITÉ VOLCANIQUE INONDATION SÉISME Source : Portail de connaissances sur le changement climatique, pour les praticiens du développement et les décideurs politiques, pays Comores, Banque mondiale 2021 (https://climateknowledgeportal.worldbank.org/country/comoros/ vulnerability) Les populations pauvres et vulnérables sont généralement les plus affectées face aux phénomènes climatiques extrêmes, mais les systèmes de protection sociale en place aux Comores restent limités. Selon les estimations, en 2023, 367 700 personnes vivent dans la pauvreté, soit un taux de pauvreté de 44,8 pour cent19. Le taux de pauvreté est encore plus élevé en milieu rural (50,6 pour cent) et atteint 49,4 pour cent à Ndzuwani. Le cyclone tropical Kenneth a particulièrement affecté les zones les plus pauvres du pays, endommageant 241 villages et 45 communes20, dont les trois quarts présentaient des taux de pauvreté supérieurs à 50 pour cent (Figure 6). Plus de 345 000 personnes ont été affectées par le passage du cyclone, mais le pays ne disposait ni d'un programme de réponse aux chocs ni d'un mécanisme de financement prépositionné pour gérer la crise. Cette situation met en lumière la nécessité de renforcer le système de protection sociale, notamment à travers la mise en place de systèmes d'alerte précoce 16 Les Nations Unies. 2021 Document de programme pays. Comores. Conseil économique et social. https://documents.un.org/doc/ undoc/ltd/n21/214/02/pdf/n2121402.pdf 17 Analyse environnementale du pays (CEA, 2022) 18 Banque mondiale (2016). Note conceptuelle : Rapport sur le climat et le développement des Comores (ID : P500418) : Comores (Afrique de l’Est et du Sud) 19 Banque mondiale. 2021 Rapport d’évaluation de la pauvreté et de l’équité, Washington DC : Banque mondiale. 20 Comité interministériel – DGSC Comores – PNUD, 2019. 16 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT et de FIGURE 6dispositifs permettant une réponse rapide et efficace de la part du gouvernement face aux chocs climatiques.21 Figure 6. Nombre de villages touchés par le cyclone Kenneth et incidence de la pauvreté 70 30% 60 27% 25% 50 20% 40 15% 15% 30 13% 11% 12% 10% 20 10% 5% 6% 5% 10 2% 0 0% 11-20 21-30 31-40 41-50 51-60 61-70 71-80 81-90 91-100 NOMBRE DE VILLAGE AFFECTÉS VILLAGES AFFECTÉS (%) Source : DGSC ; Institut national de la statistique, des études économiques et démographiques (INSEED) ; et calcul de l'auteur. Les Comores seront confrontées à des coûts économiques considérables liés au changement climatique, estimés à 836 millions USD d'ici 2050. 22Ce montant représente une augmentation significative par rapport à l'estimation annuelle de 5,7 millions USD en 2014, correspondant au coût économique des aléas naturels, soit 9,2 pour cent du PIB23. La vulnérabilité actuelle du pays face aux catastrophes naturelles souligne l'urgence de mettre en œuvre des mesures efficaces pour atténuer leurs impacts et renforcer la résilience du pays. 1.3. Les impacts du changement climatique sur l'agenda du développement Le Plan Comores Émergent 2030, adopté en 2019 comme plan d'action stratégique national à long terme, définit les interventions nécessaires pour favoriser la transformation économique et garantir la durabilité. L'agenda de développement énoncé dans ce plan est axé sur: (i) la pêche et la gestion côtière, afin de positionner le pays comme une destination touristique dans l'océan Indien et de promouvoir les projets liés à l'économie bleue ; (ii) les énergies renouvelables et l'approvisionnement énergétique, afin de soutenir le secteur énergétique des Comores et d’améliorer la sécurité énergétique ; (iii) les transports, afin de renforcer la connectivité inter-îles par voie maritime ; (iv) le développement numérique, afin de transformer Moroni en une ville « intelligente » sur le plan financier et en un district administratif numérique ; et (v) l’agriculture, afin de développer l’agro-industrie et de renforcer les chaînes de valeur agricoles. Le changement climatique aura un impact considérable sur le développement urbain et la gestion des risques de catastrophe aux Comores. L'expansion urbaine non réglementée, combinée aux défaillances dans la planification de l'utilisation des terres, aggrave les dommages causés par l'élévation du niveau de la mer et l'érosion côtière, tandis que le développement urbain contribue également au changement climatique par la déforestation et une gestion inadéquate des déchets. Il est essentiel de prendre en 21 Le projet de filets de sécurité sociale (P150754) a été restructuré pour permettre une riposte au cyclone Kenneth. L’intervention s’est concentrée sur les 118 villages les plus touchés. 22 Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 2015. 23 Banque mondiale (2016). Estimation rapide des dommages post-catastrophe à l’échelle mondiale (GRADE) – Cyclone Kenneth aux Comores : Rapport préliminaire, Banque mondiale : Washington DC. Banque mondiale (2016). Profil de risque de catastrophe aux Comores, Banque mondiale : Washington DC. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 17 compte les considérations climatiques dans la planification du développement, d’encourager la mise en œuvre de pratiques durables de gestion des déchets et de construire des infrastructures résilientes. Il est également nécessaire de renforcer les systèmes d'information et d’améliorer les cadres de gestion des risques de catastrophe, notamment en intégrant la gestion des risques dans la planification de l'utilisation des terres, si l'on veut accroître la capacité du pays à se préparer et à réagir aux risques climatiques. Enfin, il est indispensable de développer des systèmes efficaces de gestion des déchets et de construire des infrastructures urbaines et côtières résilientes pour réduire les impacts des aléas climatiques et protéger les communautés vulnérables. Les groupes les plus pauvres et marginalisés des Comores sont plus vulnérables aux impacts climatiques, ce qui entraîne une augmentation de la pauvreté, des inégalités et de l'exclusion sociale. L'ampleur de la pauvreté et de l'exclusion sociale varie selon les îles, Ndzuwani étant particulièrement exposée aux impacts climatiques en raison de sa dépendance à la pêche et à l'agriculture artisanale. En revanche, Ngazidja fait preuve d'une plus grande résilience grâce à son économie diversifiée et à une meilleure connectivité. Cependant, l'accès à l'emploi, notamment pour les jeunes, pose un problème pour le renforcement de la résilience des ménages. La perte d'infrastructures de transport due aux chocs climatiques exacerbe la marginalisation et entraine les efforts de redressement. La migration, tant interne qu'externe, constitue une stratégie d'adaptation essentielle, ayant un impact positif sur la réduction de la pauvreté et les revenus des ménages grâce aux transferts de fonds. Cependant, cette situation a des conséquences sociales telles que l'absence des hommes et la séparation des familles, mettant à rude épreuve les réseaux sociaux qui servent de filets de sécurité aux ménages vulnérables en période de crise. Les migrations internes peuvent également avoir des effets économiques et sociaux négatifs sur les communautés d'accueil, et la probabilité de déplacements forcés devrait augmenter en raison du changement climatique. La protection sociale est essentielle pour la gestion des risques liés aux chocs climatiques, dans la mesure où elle permet de s'attaquer à la pauvreté chronique, de fournir un appui régulier et/ou temporaire pendant les crises, de renforcer la résilience et d’améliorer la capacité d'adaptation des ménages. La capacité des Comores à mettre en œuvre des programmes de protection sociale a considérablement progressé, les initiatives devenant de plus en plus réactives aux chocs climatiques. Cette évolution positive joue un rôle crucial, permettant aux ménages pauvres de mieux gérer les risques tout en saisissant de nouvelles opportunités. Les programmes comprennent des interventions de sécurité sociale de base mises en œuvre de manière continue, ainsi que des dispositifs de réponse aux crises activés ou renforcés lors d’événements climatiques. Le gouvernement a réalisé des progrès louables dans le développement de ces programmes en appui aux populations pauvres et vulnérables. Cependant, le système reste fragile, la couverture ayant atteint seulement 10 pour cent de la population entre 2020 et 2023. Il est essentiel d'élargir et d'améliorer ces dispositifs de protection sociale pour réduire davantage la pauvreté, renforcer la résilience des ménages et accroître la capacité de réponse aux chocs climatiques. Les technologies numériques jouent un rôle crucial dans l'atténuation des perturbations provoquées par les chocs climatiques. Les Comores peuvent améliorer la résilience de la connectivité et de l'infrastructure de données en intégrant des installations de redondance et de sauvegarde pour les communications, le stockage réseau critique, ainsi que l'hébergement et le traitement des données, afin de maintenir l'opérationnalité des systèmes de communication pendant et après une catastrophe, assurant ainsi le flux d'informations et garantissant des temps de réponse rapides. La mise en œuvre de normes à l'échelle de l'industrie pour la robustesse des infrastructures, la redondance, les télécommunications d'urgence et la planification de la reprise après sinistre peut renforcer davantage la résilience des infrastructures numériques face aux événements liés au climat. En outre, il est important de favoriser la coopération et de mettre en place des mécanismes d'incitation, pour parvenir à une disponibilité maximale des services numériques et faciliter une reprise rapide après une catastrophe. L'écologisation du secteur numérique impliquera le déploiement d'équipements économes en énergie, l'utilisation de sources d'énergie renouvelables et la mise en œuvre 18 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT de pratiques efficaces de gestion des déchets électroniques. 24 Cependant, avec un forfait de données de 2 gigaoctets représentant 6,9 pour cent du revenu individuel mensuel moyen en 2023, le coût élevé des services numériques reste une contrainte pour garantir un accès constant aux données climatiques et environnementales. Les impacts du changement climatique posent également des défis majeurs au secteur financier des Comores dans la mesure où ils peuvent affaiblir la capacité des institutions financières à fournir un financement adéquat pour le développement. Les catastrophes naturelles et les événements climatiques peuvent avoir de graves conséquences sur la stabilité et le fonctionnement des institutions financières. À l'inverse, le secteur financier joue un rôle crucial en fournissant les financements nécessaires à l'adaptation au changement climatique. Cependant, l'état actuel de sous-développement du secteur financier limite le flux de fonds vers les efforts d'atténuation et d'adaptation. Il est essentiel de donner la priorité à l'inclusion financière et de renforcer les institutions et les marchés financiers, si l'on veut permettre aux particuliers d'accéder à des services financiers pour faire face aux impacts climatiques et créer un environnement propice aux investissements durables et à l'allocation de fonds à des projets respectueux du climat. Le système éducatif des Comores ne dispose pas des mécanismes nécessaires pour faire face aux effets immédiats et à long terme des chocs climatiques25, ce qui peut avoir des conséquences durables sur les enfants. Il a également été démontré que les températures plus élevées nuisent aux résultats d’apprentissage. Il est essentiel d’intégrer des informations clés sur le changement climatique, la gestion des catastrophes et la réduction des risques dans les programmes scolaires de manière à intégrer les principes liés au climat dans l’éducation. Une telle intégration peut être réalisée sans pour autant réduire la part de l’apprentissage fondamental. En effet, les sujets liés au climat peuvent être utilisés pour enseigner et renforcer les compétences de base. Le programme scolaire de base peut également contribuer à sensibiliser les élèves au changement climatique et à encourager l’adoption de comportements résilients face à ses impacts. L’éducation climatique permet de sensibiliser tant les enseignants que les élèves et étudiants, ce qui peut favoriser des comportements favorables au climat et un appui aux politiques publiques dans ce domaine. La sensibilisation au climat par le biais du système éducatif augmentera la probabilité que les communautés comoriennes, particulièrement vulnérables aux impacts climatiques, réclament des politiques en faveur du climat et que les décideurs politiques adoptent les solutions nécessaires. Il est impératif de donner la priorité au développement du secteur éducatif pour faire face au changement climatique, notamment en intégrant l’éducation climatique dans les programmes scolaires, en apportant un appui aux familles vulnérables et en construisant des infrastructures scolaires et sanitaires résilientes. Le changement climatique a des conséquences directes sur la santé humaine et risque d'aggraver la charge de morbidité dans le pays ainsi que les inégalités d'accès aux services de santé. Les Comores sont exposées aux épidémies de maladies infectieuses, et l'augmentation des températures ainsi que les perturbations climatiques sont susceptibles de provoquer une hausse de la transmission du paludisme et d'autres maladies à transmission vectorielle. La plus grande fréquence et la plus forte sévérité des tempêtes et des inondations pourraient entraîner une augmentation des décès, des blessures, de l'insécurité alimentaire et hydrique, ainsi que la propagation de maladies diarrhéiques et d'autres maladies d'origine hydrique, affectant nettement plus les populations pauvres et vulnérables. En outre, bien que le secteur de la santé joue un rôle essentiel dans la gestion des situations d'urgence liées aux phénomènes météorologiques extrêmes et dans le soutien des communautés touchées, il reste particulièrement 24 L’exploitation des technologies numériques peut également contribuer à l’atténuation du changement climatique, au renforcement des capacités d’adaptation, à la diversification économique, à la décarbonisation et à l’optimisation des systèmes de transport et d’énergie. 25 Par exemple, 465 salles de classe, 147 réservoirs d’eau et 9 établissements de santé ont été endommagés par le cyclone Kenneth en 2019. Parmi ceux-ci, 157 salles de classe et 71 réservoirs d’eau ont été réhabilités à travers le projet de filet de sécurité sociale (P150754). RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 19 vulnérable aux perturbations causées par ces événements. Il est indispensable de renforcer la résilience du système de santé, si l'on veut garantir la continuité des services face aux risques climatiques croissants et mieux protéger les populations vulnérables contre les impacts sanitaires du changement climatique. Le changement climatique aura un impact significatif sur les conditions de vie des ménages. La perte des récoltes et des terres cultivées emportées par les pluies, ainsi que le non-renouvellement des eaux souterraines, affecteront la production agricole, ce qui limitera l'accès aux produits agricoles, provoquera une hausse des prix, aggravera l'insécurité alimentaire et la malnutrition, réduira le pouvoir d'achat, freinera les investissements, dégradera les infrastructures et entraînera une hausse du chômage. En outre, la destruction des infrastructures physiques perturbera les services essentiels, limitant l'accès aux écoles ainsi qu'aux centres de santé et de nutrition. Il est indispensable de disposer de ressources prêtes à être mobilisées immédiatement après les événements climatiques, si l'on veut assurer une réponse rapide aux crises, tout comme de mettre en place des programmes de protection sociale flexibles, capables d'être rapidement déployés. Pour renforcer la résilience aux risques climatiques, il est essentiel de soutenir les populations pauvres et vulnérables, étant donné que les chocs climatiques peuvent exacerber les vulnérabilités existantes. Les populations les plus vulnérables dépendent souvent de l'agriculture pour leurs moyens de subsistance. Alors que le taux de pauvreté se situe à 44,8 pour cent au niveau national en 2023, les ménages impliqués dans l'élevage affichent un taux de pauvreté de 60,8 pour cent, tandis que ceux engagés dans l'agriculture présentent un taux de 54,9 pour cent, deux activités particulièrement exposées aux chocs climatiques. Il est nécessaire de promouvoir la diversification des moyens de subsistance pour réduire la vulnérabilité climatique de ces groupes. La diversification peut offrir des revenus alternatifs pendant la basse saison, augmenter le revenu global des ménages et réduire leur dépendance à une source unique de revenus. Le changement climatique risque d'exacerber les inégalités et les griefs entre les îles, ceux-ci constituant pourtant un facteur clé d'instabilité politique et de conflits latents. Les impacts climatiques devraient varier selon les îles, Ndzuwani étant plus affectée que Ngazidja, en partie en raison de sa plus grande dépendance à la pêche artisanale et à l'agriculture. Cependant, le système politique actuel n'est pas en mesure de répondre efficacement aux effets différenciés de la crise climatique sur les îles. La révision constitutionnelle de 2018 n’a pas seulement mis fin au système de présidence « tournante » qui permettait aux trois îles de se partager la présidence de l’Union, mais elle a également restreint leur autonomie en affaiblissant les prérogatives des gouvernements insulaires et en réduisant dans leur quasi intégralité les transferts financiers vers Ndzuwani et Mwali, ce qui a accru les tensions interinsulaires et ravivé les griefs historiques.26 Ces changements ont déclenché une vague de protestations en 2018 et 2019, ainsi qu'une tentative d'insurrection avortée après les élections de mars 2019. Ces évolutions ont accentué les inégalités entre les îles et généré des risques latents d'instabilité sociale et politique, notamment des risques de coups d'État ou de mobilisation politique violente. 1.4. Principaux leviers pour un développement résilient au changement climatique et vert Pour les Comores, l'adaptation au changement climatique et le développement résilient figurent parmi les principales priorités en matière d'action climatique, d'autant que le pays devrait faire face à des coûts supplémentaires estimés à 836 millions USD d'ici 2050 en raison des impacts climatiques. 27 L'engagement des Comores dans la lutte contre le changement climatique a été formalisé par leur adhésion à l'Accord 26 Depuis la révision constitutionnelle de 2018, le pouvoir exécutif est de plus en plus concentré entre les mains du président Assoumani, originaire de Ngazidja et dont le pouvoir s’est encore lors de consolidé des récentes élections de janvier 2024. 27 Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques, 2015. 20 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT de Paris. À travers sa Contribution déterminée au niveau national (CDN), le pays s'engage à augmenter la part des énergies renouvelables et à renforcer sa résilience face aux impacts climatiques en adoptant des mesures telles qu'une meilleure gestion des ressources en eau, une protection renforcée contre les catastrophes naturelles et des pratiques agricoles adaptées au climat. En outre, les Comores ambitionnent de devenir un puits de carbone et de réduire significativement leurs émissions de gaz à effet de serre d'ici 2030. Étant donné la forte dépendance des Comores à l'égard de leurs ressources naturelles pour assurer leur croissance économique, il est essentiel de protéger ces ressources contre les impacts du changement climatique si l'on veut promouvoir une croissance et un développement résilients. Environ 35 pour cent de la population comorienne travaille dans les secteurs de l'agriculture, de la foresterie et de la pêche, des secteurs qui contribuent à une part similaire du PIB national28. Ces secteurs économiques sont particulièrement vulnérables aux changements climatiques, notamment en raison de l'érosion, de la hausse des températures océaniques, de l'élévation du niveau de la mer et des modifications des régimes climatiques. Il est indispensable de mettre en place des programmes et des cadres opérationnels qui rehaussent la capacité d'adaptation de ces secteurs pour atténuer les impacts climatiques et préserver les moyens de subsistance des populations. Les stratégies et cadres existants seront renforcés et élargis pour garantir une résilience adéquate et soutenir la croissance future29 du pays. En parallèle, la diversification économique stratégique jouera un rôle clé, dans la mesure où elle permettra de réduire la dépendance aux ressources naturelles et de minimiser les impacts climatiques à venir. Le renforcement des capacités sera également essentiel compte tenu de l'évolution rapide des connaissances en matière de changement climatique et de la nécessité pour les Comores de renforcer leurs capacités institutionnelles. Plusieurs programmes de formation destinés à diverses parties impliquent sont déjà prévus et, depuis 2023, des cours sur le changement climatique ont été judicieusement intégrés au programme universitaire en tant que matière obligatoire pour les étudiants de première et de deuxième année, démontrant ainsi l'engagement du gouvernement à lutter contre le changement climatique au niveau national. L'élargissement de telles initiatives contribuera à garantir que les compétences et capacités techniques nécessaires sont disponibles pour parvenir à un développement vert et résilient au changement climatique. En fin de compte, les activités de développement pourraient être axées sur le renforcement de la résilience, la protection des populations et des infrastructures, ainsi que la réalisation de co-avantages à faible émission de carbone, dans la mesure du possible. À titre d'exemple, le récent Plan de développement à moindre coût de l'électricité trace une voie vers une réduction significative des émissions de gaz à effet de serre, en promouvant le passage à des sources d'énergie plus durables et renouvelables. Il est essentiel de mettre l'accent sur la résilience de ces activités et sur les émissions liées aux objectifs de développement économique du pays, si l'on veut garantir que les mesures d'adaptation atteignent leurs objectifs. 28 Banque mondiale, 2021a ; Banque mondiale, 2021b. 29 Par exemple, le Projet de développement intégré et de compétitivité, en partenariat avec la Banque mondiale, vise à renforcer la capacité d’adaptation au changement climatique des producteurs agricoles afin de réduire les risques liés aux conditions météorologiques extrêmes. En outre, le Plan national de gestion des pêches du pays pour 2020 fournit un cadre opérationnel aux pêcheurs qui cherchent à promouvoir une gestion durable des pêches ; cependant, un cadre similaire sera nécessaire pour fournir des orientations sur les opérations de pêche à la suite du changement climatique. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 21 22 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT © Ali Alwahti 2. Engagements, politiques, institutions et capacités du pays en matière de climat 2.1. Engagements juridiques et réglementaires en matière de changement climatique Les Comores ont démontré leur engagement en faveur de l'action climatique mondiale en ratifiant plusieurs accords internationaux clés, notamment la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques en 1994, le Protocole de Kyoto révisé en 2022 et l'Accord de Paris en 2016, témoignant ainsi du fait que le pays reconnait l'urgence des défis climatiques et de sa volonté de coopérer à l'échelle internationale. La Contribution déterminée au niveau national (CDN) des Comores définit les objectifs et les stratégies du pays pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et s'adapter aux impacts climatiques. La CDN fixe des objectifs ambitieux, notamment réduire les émissions de gaz à effet de serre de 18 pour cent d'ici 2025 et de 40 pour cent d'ici 2030. Le pays prévoit également d'augmenter la part des énergies renouvelables dans son mix énergétique à 50 pour cent d'ici 2030, non seulement pour favoriser un développement à faibles émissions de carbone, mais aussi pour réduire sa dépendance au pétrole et au charbon importés. Bien que les émissions de gaz à effet de serre des Comores soient négligeables à l'échelle mondiale — en 2020, le pays se classait au 176e rang mondial pour les émissions nationales —, elles ont augmenté à un taux de croissance annuel composé de 3 pour cent entre 1990 et 2020. En 2020, le secteur de l'énergie était responsable de 48,3 pour cent des émissions totales, suivi par l'agriculture (40,8 pour cent) et le changement d'affectation des terres et la foresterie (8,8 pour cent).30 Les Comores ont également adopté une Politique nationale de l'environnement, dont l'objet est d'intégrer les considérations climatiques dans la planification du développement et de renforcer la gouvernance environnementale. En complément, des projets de politiques stratégiques nationales, tels que le Programme d'action national d'adaptation au changement climatique et la Stratégie nationale de réduction des risques et des catastrophes, sont en cours d'élaboration et devraient être adoptés en 2024. Par ailleurs, l'adoption de la Loi-cadre de l'environnement (LCE) en 1994 a fourni une base juridique aux secteurs environnementaux et a introduit des processus d'évaluation d'impact environnemental pour les projets de développement. Une mise à jour de la Politique nationale de l'environnement a été réalisée, mais elle n'a pas encore été finalisée ni adoptée. Reconnaissant l'importance d'une action climatique coordonnée, le gouvernement a créé le Comité national sur le changement climatique en 2018, dont l'objet est de coordonner les initiatives liées au climat31. Ce Comité est chargé (i) de superviser l'intégration de l'agenda climatique dans la planification nationale, (ii) de coordonner le développement et la gestion des connaissances sur le changement climatique, et (iii) de suivre les activités et programmes en appui aux efforts de lutte contre le changement climatique.32 En outre, en avril 2024, le pays a mis en place une Autorité nationale désignée pour le Fonds vert pour le climat, conformément à ses engagements dans le cadre de la CDN.33 30 Indice d’émission, 2024 31 Le Comité national sur les changements climatiques a été créé par l’arrêté 18-009/MEAPE/CAB du 17 septembre 2018. 32 L’Autorité Nationale Désignée pour le Fonds Vert pour le Climat a été créée par l’Arrêté n° 24-103/MAPETA/CAB du 1er avril 2024. 33 L’Autorité nationale désignée est placée sous la tutelle du Ministère de l’Environnement et constitue un groupe de travail dédié servant d’interface et de point de contact avec le Fonds vert pour le climat. L’Autorité est chargée (i) d’assurer la mise en œuvre des décisions prises par le Conseil d’administration du Fonds vert pour le climat, (ii) de contribuer à la mobilisation des fonds, (iii) de veiller à la conformité des projets proposés avec les normes d’éligibilité du Fonds vert pour le climat et à leur alignement avec les priorités nationales en matière de changement climatique, (iv) d’évaluer et de fournir une non-objection aux projets à soumettre au Fonds vert pour le climat et (v) de coordonner le suivi de l’évaluation des projets financés. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 23 Le Plan Comores Émergent 2030, dont l'objet est de transformer le pays pour qu'il devienne résilient aux chocs dans tous les aspects du développement durable, reconnaît la protection sociale comme un catalyseur essentiel du développement. Comme énoncé dans le Plan, le renforcement de la résilience et du capital humain est une condition préalable à la réalisation de cette vision. En conséquence, le gouvernement comorien s'engage à prendre des mesures d'atténuation et d'adaptation au changement climatique, notamment en renforçant la résilience des groupes vulnérables, tels que les femmes et les jeunes, les mécanismes de protection sociale et la création d'emplois. En 2016, le pays a adopté sa première Politique nationale de protection sociale, dont l'objet est de garantir que tous les citoyens puissent satisfaire leurs besoins fondamentaux en facilitant l'accès aux services sociaux essentiels et en mettant en place des filets de sécurité sociale pour soutenir les populations les plus vulnérables. 2.2. Cadre institutionnel pour l'action climatique Les Comores ont mis en place un cadre institutionnel pour régir la politique climatique à travers différents niveaux de gouvernance. Au niveau du gouvernement central, le Ministère de l'Agriculture, de la Pêche, de l'Environnement, du Tourisme et de l'Artisanat formule des politiques, conçoit des programmes et supervise les initiatives concernant le changement climatique et la résilience climatique. Doté d'un mandat large, ce ministère a mis en place des systèmes d'enregistrement environnemental, surveille les efforts de mise en œuvre et s'efforce de remplir les obligations internationales. La Direction Générale de l'Environnement et des Forêts supervise les actions de protection de l'environnement aux niveaux international, national et infranational, et assure la coordination avec la Direction Nationale des Stratégies agricoles et d'Élevage. Cette direction opère à travers des bureaux régionaux sur chacune des trois îles, promouvant et coordonnant les activités gouvernementales et non gouvernementales liées à l'environnement. La Direction Générale de la Sécurité Civile, 34 qui relève du ministère de l'Intérieur, est chargée d'assurer l'élaboration d'une politique nationale de gestion des risques de catastrophe et de veiller à sa mise en œuvre, ainsi que de coordonner la préparation, les secours et la réponse aux catastrophes. Les gouvernorats représentant chaque île participent à l'exécution des initiatives environnementales et sont les seuls responsables de la mise en œuvre du Plan Comores Émergent. Bien que ces gouvernorats disposent d'une autonomie administrative, leur capacité opérationnelle reste limitée en raison de leur dépendance vis-à-vis des institutions centrales pour le financement. Au niveau des îles, les Directions Régionales supervisent directement la mise en œuvre des politiques, la gestion des ressources naturelles et les efforts de protection de l'environnement. Par ailleurs, les îles sont subdivisées en 21 préfectures, chacune dirigée par un préfet nommé par le gouvernement central. Les préfets sont chargés d'appliquer les lois et les règlements, d'assurer la liaison entre les communes et le gouvernorat, et de représenter les intérêts de l'administration locale. Cependant, les préfectures sont souvent confrontées à des pénuries de ressources humaines et financières, ce qui entrave leur efficacité opérationnelle. Au niveau local, les communes, qui regroupent plusieurs villages et sont dirigées par un maire, constituent l'autorité locale principale. Bien que les communes disposent d'un statut officiel, elles sont souvent confrontées à des défis du fait du peu de ressources administratives et financières à leur disposition, ce qui affecte leur capacité à s’acquitter efficacement de leurs fonctions. Parallèlement, les institutions informelles, telles que les organisations non gouvernementales, les villages et les organisations professionnelles, jouent un rôle crucial dans les communautés locales. Ces institutions, ancrées dans les structures de pouvoir traditionnelles, jouissent d'une grande crédibilité auprès de la population. Les villages, en tant qu'unités centrales de l'organisation sociétale, regroupent diverses associations axées sur la protection de l'environnement et le développement durable, mobilisant des fonds pour améliorer les services de gestion environnementale. 34 La Direction générale de la sécurité civile a été créée le 9 mars 2012 par le décret n° No. 12-054/PR 24 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Dans un contexte où les institutions formelles de l'État central peinent à s'étendre au-delà de la capitale Moroni, et où les institutions insulaires et municipales souffrent d'un manque de ressources financières et humaines, 35 les organisations communautaires jouent un rôle essentiel dans la gouvernance quotidienne et le bien-être des villages, étant ainsi des acteurs clés de la résilience et de l'adaptation au changement climatique. Les associations villageoises et communautaires peuvent grandement contribuer à renforcer la résilience des communautés face aux impacts du changement climatique, notamment en prenant en charge des initiatives locales d’adaptation. Alors que la décentralisation fiscale vers les communes reste faible, le rôle des associations villageoises s'avère crucial, ces dernières étant souvent financées par la diaspora et par les contributions des communautés locales, y compris à travers des fonds villageois. Leur implication a été largement documentée en matière de financement et de gestion de la prestation de services de base au niveau des villages36. Selon les constats d’un chercheur, « les nombreuses crises qui ont jalonné la vie de l'archipel ont révélé les défaillances de l'État, mais elles ont également mis en lumière l'efficacité des stratégies d'entraide des communautés. »37 La mise à profit et le renforcement des capacités organisationnelles au sein des villages et des communautés améliorent considérablement les efforts d'adaptation, d'atténuation et de suivi des informations sur le terrain. Comme le montrent les recherches sur l'adaptation au changement climatique, un fort sentiment de capital social renforce la capacité d'adaptation des communautés. La participation aux activités communautaires et la perception des menaces pesant sur le groupe social constituent des éléments clés du capital social, qui joue un rôle central dans la détermination de cette capacité d’adaptation. 38 La solidité des associations communautaires locales et des structures de gouvernance traditionnelles, telles que les « conseils des sages », témoigne de leur potentiel à soutenir efficacement l'adaptation des communautés aux impacts du changement climatique. 2.3. Lacunes et défis de mise en œuvre Bien que les Comores aient pris des engagements importants et louables en matière d'adaptation et d'atténuation du changement climatique, les cadres réglementaires sont encore en évolution, et des défis de mise en œuvre persistent. La Loi-cadre de l'environnement (LCE) adoptée en 1994 présente des lacunes importantes et est actuellement en cours de révision, les mises à jour devant être finalisées d'ici la fin de 2024. La version révisée de la LCE pourrait introduire des normes et bonnes pratiques internationales, tout en prenant en compte la stratégie révisée du gouvernement en matière de réduction des émissions, ainsi que les objectifs d'atténuation et d'adaptation définis dans les plans existants. Bien que la LCE de 1994 n'intègre pas explicitement les considérations liées au changement climatique dans les lignes directrices sur l'évaluation de l'impact environnemental, le gouvernement a déjà commencé à inclure ces aspects dans la pratique. En outre, la révision de la LCE représente une opportunité de renforcer la coordination institutionnelle en matière de changement climatique et de clarifier les mandats des différentes institutions impliquées, afin de mieux prendre en charge la multiplicité des acteurs. Idéalement, la mise à jour de la LCE devrait permettre également d’intégrer des dispositions liées au financement climatique en appui 35 Comme le souligne le CEA 2022 des Comores publié par la Banque mondiale, l’absence de lois et de réglementations pour mettre en œuvre la Constitution de 2018 – notamment dans les domaines de la gestion financière et de la délimitation des mandats de prestation de services – perpétue la sous-performance de la gouvernance locale et la dépendance aux investissements menés par la communauté. 36 Banque mondiale. 2018 Évaluation des risques et de la résilience des Comores ; Banque mondiale. 2019 Étude diagnostique systématique des Comores ; Banque mondiale. 2020 Revue de l’urbanisation des Comores, 37 Halidi, Adjimaël. 2020 « Situation de crise et résilience sociale aux Comores ». Presses universitaires de Bordeaux. Les Cahiers d’Outre- Mer. N° 282. Traduction de l’auteur. La solidarité communautaire a été essentielle, par exemple, pour financer la reconstruction après le cyclone Kenneth ainsi que pour mettre en œuvre des mesures de santé publique pendant la crise de la COVID-19, notamment la distanciation sociale et la sensibilisation aux mesures visant à prévenir la propagation du virus. 38 LC Hagedoorn, LM Brander, PJH van Beukering, HM Dijkstra, C. Franco, L. Hughes, I. Gilders et B. Segal (2019). Community-based adaptation to climate change in small island developing states: an analysis of the role of social capital.” Climate and Development, 11:8, 723-734 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 25 à l'engagement du gouvernement à mieux mobiliser les financements climatiques à l'avenir. Enfin, les mécanismes de vérification, de rapport et de suivi nécessitent des améliorations considérables, et un engagement plus fort de la part du gouvernement dans ces domaines sera crucial pour garantir une mise en œuvre efficace des politiques climatiques. Il sera essentiel de renforcer les dispositifs institutionnels, si l'on veut améliorer la coordination et la mise en œuvre efficace des politiques nationales en matière de changement climatique, de gestion des risques de catastrophe et de gestion des ressources naturelles. Par exemple, bien que le Comité national sur le changement climatique ait été créé en 2018, des ressources techniques et financières supplémentaires sont nécessaires pour le rendre pleinement opérationnel. Bien que la composition et la taille du Comité soient comparables à celles d'autres structures similaires à travers le monde, il est possible d'en améliorer l'efficacité en clarifiant les mandats, en renforçant les procédures organisationnelles et en traitant la question des chevauchements de responsabilité avec la Direction Générale de l'Environnement et des Forêts. Le Comité pourrait également tirer une valeur ajoutée importante d'une meilleure participation des instituts de recherche, des universités, du secteur privé et de la société civile, en particulier pour la gestion des données climatiques, le plaidoyer climatique et le suivi-évaluation. Par exemple, la consultation régulière de ces parties lors de la mise à jour de la Loi-cadre de l'environnement (LCE) et d'autres stratégies nationales pourrait aboutir à des politiques plus globales et inclusives. Le Comité national sur le changement climatique et l'Autorité nationale désignée récemment créée sont censés remplir des mandats complémentaires, et les actions visant à rendre ces structures pleinement opérationnelles vont dans le bon sens. Il existe des opportunités d'améliorer les mécanismes de financement existants pour augmenter les ressources disponibles en faveur des politiques de lutte contre le changement climatique et renforcer l'accès du pays au financement international. Par exemple, les Comores disposent d'un mécanisme centralisé de financement routier reposant sur une taxe sur les carburants, qui représente à la fois une source majeure de recettes internes et un levier d'atténuation des émissions dans le secteur des transports. En 2019, l'ancien Fonds d'entretien des routes a été remplacé par un nouveau Fonds routier de troisième génération, destiné à financer les investissements et l'entretien des infrastructures routières. Cependant, ce fonds n'est pas encore pleinement opérationnel. Bien qu'il élargisse les sources de financement pour l'entretien des routes, il présente des faiblesses inhérentes 39: la taxe sur les carburants étant pratiquement fixe, les recettes du fonds ont diminué en termes réels, sous l'effet de l'inflation et de la baisse de la consommation de carburant. Par conséquent, le Fonds routier est limité dans sa capacité à assurer une gestion efficace des infrastructures routières, à planifier les investissements et les travaux d'entretien, et à allouer les ressources en temps voulu. Il sera essentiel de renforcer la gouvernance pour améliorer la capacité des Comores à répondre efficacement aux crises et à en limiter les impacts. Depuis 2018, la plus forte centralisation du pouvoir exécutif pose des défis importants, réduisant l’efficacité du gouvernement à répondre aux crises et en atténuer les impacts.40 L’évolution des dynamiques politiques après 2019 met en évidence la nécessité de donner la priorité à l’amélioration de la qualité de la gouvernance publique. Les principaux défis incluent des décisions politiques et budgétaires arbitraires et prises au gré des circonstances, la fragmentation de l’élaboration de politiques, la concurrence entre structures de gouvernance aux niveaux national et régional, ainsi qu’un manque de coordination institutionnelle. Il est également nécessaire de mieux répartir les mandats et les ressources entre les différents niveaux de gouvernance, en particulier face aux réductions des transferts financiers vers les gouvernements insulaires et au peu d’appui aux communes 39 Cependant, il n’est pas certain que le Fonds routier soit financièrement autonome pour recevoir les ressources désignées provenant de la taxe sur les carburants, et il dépend des paiements tardifs et irréguliers du Trésor. 40 La Revue des dépenses publiques de la Banque mondiale (2022) a mis en évidence la nécessité de « renforcer la mobilisation des recettes intérieures, améliorer l’efficacité des dépenses publiques pour obtenir de meilleurs résultats économiques et sociaux, et renforcer la gouvernance des entreprises publiques afin de réduire les vulnérabilités liées à la dette ». 26 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT décentralisées, qui jouent pourtant un rôle clé dans la prestation des services de base. Le renforcement des capacités des organismes gouvernementaux, notamment aux niveaux régional et local, est indispensable pour améliorer leur efficacité. Ces faiblesses sont mises en lumière par les dernières évaluations de la Banque mondiale, qui pointent une détérioration de la gestion budgétaire et financière, une baisse de la qualité de l’administration publique, ainsi que des insuffisances en matière de transparence, de redevabilité et de lutte contre la corruption dans le secteur public.41 Le système politique des Comores présente des défis particuliers qui peuvent freiner les avancées en matière d'action climatique. Caractérisé par un processus décisionnel centralisé et exclusif, il ne permet pas les consultations et les délibérations ouvertes nécessaires à l'élaboration de politiques globales et inclusives. Le gouvernement ne dispose pas, à ce jour, de mécanismes transparents de prise de décision politique et budgétaire fondés sur des données factuelles, bien que cela soit essentiel pour accélérer la mise en œuvre du programme climatique. En renforçant l'engagement politique en faveur de ce programme et en adoptant des pratiques de délibération ouvertes, les Comores pourraient réaliser des progrès significatifs dans leurs initiatives climatiques. La fragmentation institutionnelle compromet actuellement la capacité des Comores à répondre efficacement aux objectifs de protection sociale dans le contexte du changement climatique. Le gouvernement, des bailleurs et des organisations non gouvernementales mettent en œuvre différents programmes de protection sociale, mais ces efforts sont largement éparpillés, donnant une réponse fragmentée et insuffisante. Cette fragmentation affecte directement l'efficacité du système de protection sociale, limitant sa capacité à atteindre les populations les plus vulnérables. Il est nécessaire de renforcer la coordination intersectorielle, notamment avec la gestion des risques de catastrophe et d'autres secteurs clés, afin de favoriser une planification conjointe et globale. Un tel renforcement implique un renforcement des capacités des institutions gouvernementales aux niveaux national et infranational pour assurer une meilleure intégration et une réponse plus efficace aux défis climatiques et sociaux. L'amélioration de l'efficacité des systèmes de surveillance des risques aux Comores nécessitera l'intégration des systèmes existants, notamment ceux axés sur le climat et la météorologie, les activités volcaniques, le paludisme et les flambées de maladie. Il sera essentiel de combler les lacunes en matière de ressources financières, logistiques et techniques, si l'on veut que ces systèmes puissent répondre aux besoins nationaux. La Direction de la Météorologie collecte des données climatiques et maintient une base de données complète, accompagnée de bulletins réguliers. Cependant, la mise en place de services climatiques opérationnels et l'utilisation des informations climatiques dans les différents secteurs restent limitées. Par exemple, aucun mécanisme n'assure que les données climatiques soient intégrées dans les processus décisionnels de préparation et de réponse aux événements liés au climat au sein du Ministère de la Santé. De plus, la capacité à réaliser des modélisations climatiques, à préparer des prévisions saisonnières et à émettre des alertes précoces reste faible. Bien que le système d'information de gestion de la santé DHIS2 ait récemment été déployé, le Système national d'information sanitaire continue d’avoir une faible performance, la collecte de données étant incomplète et la capacité d'analyse faible. Il est également nécessaire de renforcer la collaboration multisectorielle et de développer un plan stratégique de communication des risques basé sur l'approche « Une seule santé ». Bien que les écosystèmes marins jouent un rôle vital pour les Comores, une gouvernance fragmentée et des structures réglementaires inadéquates limitent la capacité du pays à les protéger efficacement. Ces écosystèmes soutiennent des secteurs clés tels que la pêche, le tourisme et la biodiversité, essentiels à la stabilité économique et aux moyens de subsistance des communautés locales. Cependant, ces ressources sont de plus en plus menacées par la surpêche, la pollution et le changement climatique. Les responsabilités en matière de gouvernance marine sont actuellement réparties entre plusieurs organismes 41 https://data.worldbank.org/indicator/IQ.CPA.TRAD.XQ?locations=KM. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 27 gouvernementaux, notamment le Ministère de l'Agriculture et de la Pêche, le Ministère de l'Environnement et les autorités locales. Cette fragmentation entraîne des incohérences, des inefficacités et une application insuffisante des réglementations existantes. De plus, l'absence d'un cadre politique maritime unifié entrave les efforts visant à atteindre les objectifs internationaux de conservation, affaiblissant ainsi la position des Comores dans les accords environnementaux mondiaux et limitant l’impact des initiatives locales de protection. Le renforcement des cadres institutionnels et réglementaires est donc essentiel pour assurer la protection des ressources marines, promouvoir une croissance économique durable et renforcer la résilience face aux menaces environnementales. 2.4. Moyens d'améliorer la résilience du cadre institutionnel Pour combler ces lacunes et relever les défis liés à la mise en œuvre, il est nécessaire d'adopter une approche coordonnée et multisectorielle, incluant un engagement actif avec les institutions informelles au niveau local. Afin de renforcer l'efficacité des politiques et des pratiques climatiques aux Comores, plusieurs recommandations sont proposées : Renforcer et actualiser le cadre juridique et réglementaire § Finaliser et adopter des documents clés tels que la LCE révisée et la Politique nationale de l'environnement. Alors que le gouvernement mettra à jour la LFE, il sera essentiel d'y intégrer des lignes directrices et des benchmarks pertinents, tels que ceux du Guide de référence des lois-cadres sur les changements climatiques de la Banque mondiale, afin de garantir que la révision soit bien réalisée. Une attention particulière pourrait être accordée aux domaines dans lesquels le gouvernement est actuellement peu engagé.42 § Finaliser et adopter des stratégies clés, notamment le Programme d'action national d'adaptation au changement climatique et la Stratégie nationale de réduction des risques et des catastrophes, en assurant une consultation appropriée avec les niveaux de gouvernance infranationaux et villageois afin de prendre en compte leurs besoins et leurs contributions. § Développer un cadre réglementaire complet, adapté aux écosystèmes marins des Comores, intégrant des mesures exécutoires pour une utilisation durable et inclusive des ressources marines. Comme première étape, une planification spatiale marine impliquant de multiples parties pourrait être réalise. Ensuite, étant donné le rôle de la pêche comme moyen de subsistance et activité économique majeure, des quotas de capture pourraient être établis sur la base d'évaluations scientifiques, de zones de protection des habitats et de lignes directrices en matière de tourisme durable. L'inclusion des acteurs locaux dans la conception de la réglementation permet en rehausser à la fois la pertinence et l'adhésion des communautés.43 Améliorer les dispositifs institutionnels et politiques § Clarifier les mandats, rôles et fonctions en matière de changement climatique et renforcer la coordination horizontale et verticale entre les secteurs et les niveaux de gouvernement (y compris pour les niveaux infranationaux et villageois). En particulier, les mandats du Comité national sur les changements climatiques pourraient être clarifiés en organisant ses membres en groupes de travail en fonction de leur expertise.44 42 Il s’agit notamment (i) de mécanismes de coordination, (ii) de surveillance, de mesure, de vérification et de rapport sur les progrès réalisés en matière de changement climatique, (iii) d’instruments politiques d’adaptation et de réduction des émissions de carbone, en particulier sur les mesures d’accès à l’information/publication, les mesures fiscales et la gestion fiscale, (iv) la mise en œuvre les mesures de financement et de gestion financière publique appropriée en réponse au changement climatique, (v) des mandats des niveaux infranationaux relatifs à l’atténuation et à l’adaptation au changement climatique 43 FAO 2015. Directives volontaires visant à assurer la durabilité de la pêche artisanale dans le contexte de la sécurité alimentaire et de l’éradication de la pauvreté. 44 Parmi les autres groupes de travail, il est recommandé de créer un observatoire national du climat chargé de coordination et de centraliser le suivi, l’évaluation et la gestion des connaissances pour respecter l’engagement du pays en matière de CDN. 28 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT § Opérationnaliser l'Autorité nationale désignée pour le Fonds vert pour le climat en renforçant ses capacités et en fournissant des ressources financières et techniques, notamment un manuel des opérations et un plan d'action. § Centraliser la coordination de l'action climatique à un niveau élevé de l’autorité gouvernementale pour assurer la visibilité et l'impact, tout en mettant en place des mécanismes de redevabilité et de suivi adéquats. Rationaliser le nombre d'entités impliquées aux niveaux national et infranational pour une plus grande efficacité et clarifier leurs mandats pour assurer la synergie. Les agences pourraient fonctionner en toute transparence, en suivant des mécanismes de reporting clairs. § Mener une planification, une gestion et une conservation intégrées de l'espace marin, en s'appuyant sur les principes de gestion axés sur les données et de gestion adaptative, afin d'être en mesure de répondre aux changements des écosystèmes et aux menaces émergentes. Les parties prenantes de divers secteurs, ministères et groupes locaux pourraient être impliquées. Renforcer les institutions et développer les capacités § Donner la priorité au renforcement des capacités internes dans les domaines qui auront l'impact le plus immédiat, notamment le renforcement des compétences locales en matière de planification de l'adaptation au changement climatique, de réponse aux situations d'urgence, d’intégration des risques climatiques dans les stratégies de développement et du financement de la lutte contre le changement climatique. Si une expertise spécialisée dans l’analyse des risques est nécessaire, envisager de tirer parti de partenariats externes pour combler les lacunes de manière efficace. Allouer des ressources financières pour fournir une formation pratique et des outils aux autorités infranationales, aux agences sectorielles et aux entreprises publiques, en mettant l'accent sur les mécanismes de financement climatique et les stratégies pratiques de résilience. § Opérationnaliser pleinement le Fonds routier. L'autonomie de gestion et financière du Fonds routier pourrait être confirmée, avec la garantie d'un transfert intégral des recettes issues des taxes sur les carburants. En outre, le mécanisme actuel de transfert de la taxe sur les carburants à montant fixe devrait, dans l’idéal, être ajusté de manière à garantir la pérennité des recettes, en tenant compte de l'inflation, de la hausse des prix et de la consommation réelle de carburant. Avec une meilleure prévisibilité des ressources disponibles, il sera possible de mettre en œuvre une gestion holistique des actifs routiers avec une priorisation stratégique axée sur la résilience climatique et la connectivité du réseau, plutôt que d'investir et de réinvestir dans les infrastructures routières de manière fragmentée, comme c'est le cas actuellement. § Renforcer la sensibilisation au changement climatique et à l'adaptation au changement climatique au niveau des îles et des communautés/ villages. Compte tenu de la structure de gouvernance des Comores, il est essentiel que les autorités insulaires soient sensibilisées, formées et habilitées sur les questions climatiques et soutenues pour intégrer des mesures d'atténuation et d'adaptation au niveau de l'île. De même, compte tenu du rôle crucial que jouent activement les villages et les communautés dans la lutte contre le changement climatique (le plus souvent avec leurs propres ressources), le gouvernement pourrait capitaliser et développer leurs capacités organisationnelles pour améliorer les actions d'adaptation, d'atténuation et de suivi de l'information sur le terrain, notamment par la mobilisation des groupes de femmes, des groupes de jeunes et des groupes de chefs traditionnels. Le renforcement des flux de financement de la lutte contre le changement climatique vers les niveaux locaux permettra de mieux renforcer l'action climatique au niveau local. § Évaluer annuellement l'efficacité du programme d'études axé sur les changements climatiques mis en place par l'Université des Comores. § Poursuivre des programmes de certification internationaux pour constituer le vivier national de personnes possédant les compétences et les capacités nécessaires. Des mécanismes incitatifs pourraient être envisagés pour assurer la rétention des personnes formées. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 29 30 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT © Ali Alwahti 3. Implications sectorielles et opportunités du changement climatique Afin de comprendre les impacts du changement climatique sur les secteurs économiques clés, une modélisation d'impact détaillée a été menée. Compte tenu de l'incertitude entourant l'évolution future du climat, les impacts ont été évalués dans le cadre de plusieurs scénarios climatiques plausibles, incluant trois modèles décrivant des futurs climatiques secs/très chauds45, et trois autres décrivant des futurs climatiques humides/chauds46. À l’horizon 2041-2050, les scénarios secs/très chauds prévoient une augmentation moyenne de la température de +1,2 °C, ainsi qu'une diminution des précipitations de -3,7 pour cent par rapport à la référence historique. En revanche, les scénarios humides/chauds projettent une augmentation moyenne de la température de +0,9 °C et une hausse des précipitations de +7,9 pour cent. Le Tableau 1 présente les modèles climatiques mondiaux utilisés pour ces scénarios, ainsi que les variations attendues par rapport aux données historiques.47 Tableau 1. Scénarios climatiques sélectionnés et évolution attendue des précipitations et des températures d'ici 2041-2050 par rapport à la référence historique (1995-2020) Pourcentage Pourcentage Modèle Changement Modèle Changement de change- de change- Scénario climatique de tempéra- Scénario climatique de tempéra- ment dans les ment dans les mondial ture mondial ture précipitations précipitations Futures SSP3 – 4.5 Futur secs/ SSP2 – 4.5 -5,7 pour +9,4 pour +1,2°C humides/ CMCC-CM2- +1,0°C très chauds ACCÈS-CM2 cent cent chaudes SR5 SSP3 – 7.0 -2,0 pour SSP2 – 4,5 +7,4 pour +1,2°C +0,8°C TAIESM1 cent FGOALS-G3 cent SSP2 – 4,5 SSP3 – 7.0 -3,5 pour +7,1 pour +1,2°C CMRM- +1,0°C ACCÈS-CM2 cent cent EMS2-1 Dans les différents scénarios climatiques évalués, les conditions futures sèches/très chaudes sont généralement associées à des impacts plus graves (pessimistes) que les conditions humides/chaudes (optimistes). Cependant, certaines exceptions sont notées, notamment en ce qui concerne l'érosion et les cultures pluviales. L'érosion devrait s'aggraver davantage dans les scénarios humides/chauds, en raison de précipitations plus intenses. Par ailleurs, les impacts sur les cultures pluviales devraient être d'une ampleur comparable dans les années 2040, qu'il s'agisse de scénarios de climat sec/très chaud ou humide/chaud. Tout au long de ce chapitre, les impacts liés à des futurs climatiques pessimistes et optimistes sont présentés, bien que les scénarios climatiques sous-jacents ne soient pas cohérents pour tous les canaux d'impact analysés. 45 Les scénarios ont été sélectionnés autour du 90e percentile de changement de température moyenne et du 10e percentile de changement de moyennes prélevées sur deux voies socioéconomiques partagées (SSP), à savoir SSP2–4,5 et SSP3–7,0. 46 Autour du 10e percentile de changement de température moyenne et du 90e percentile de changement de précipitations moyennes. 47 Ces mêmes scénarios climatiques sont utilisés dans toutes les analyses présentées dans ce chapitre, à l’exception des suivants : § Pour la pêche, les résultats sont exploités sur des analyses de modélisation qui ont été préalablement réalisées dans le cadre d’une étude de la Banque mondiale (Groupe de la Banque mondiale, 2019. Changement climatique et pêche maritime en Afrique) et, à ce titre, sont pris en compte les RCP2.6 et RCP8.5 de la série de résultats du modèle CMIP5. § Pour les inondations côtières, l’analyse s’appuie sur les variations du niveau moyen de la mer, qui ne sont disponibles qu’au niveau du SSP. Par conséquent, les valeurs d’élévation du niveau de la mer du 50e et du 80e percentile pour SSP2-4,5 et SSP3-7,0 ont été utilisées, les résultats pour le 80e percentile sous SSP3-7,0 étant présentés dans ce rapport comme un cas pessimiste représentatif. § Pour l’analyse des routes, les impacts ont été évalués pour 55 futurs climatiques SSP2–4.5 et SSP3–7.0. § L’analyse des inondations intérieures et de leurs impacts sur les ponts s’appuie sur des données relatives à l’ampleur et à la fréquence des maximales recueillies sur une journée, qui ne sont disponibles que pour les agrégats d’ensemble SSP. Ces analyses sont donc complétées pour le 50e percentile de SSP2–4,5 et SSP3–7,0. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 31 Sur la base de l'ampleur attendue des impacts climatiques, ce chapitre examine les mesures pouvant être mises en œuvre pour renforcer la résilience des îles face au changement climatique, tout en situant ces actions dans un cadre politique plus large visant à promouvoir un développement à faible émission de carbone. La modélisation d'impact prend en compte deux scénarios de développement et d'adaptation possibles : 1. Le scénario actuel des politiques de changement climatique suppose que le pays sera confronté à un changement climatique au cours des prochaines décennies, mais qu'aucun investissement majeur en matière d'adaptation ne sera réalisé pour faire face aux impacts climatiques. 2. Le scénario de renforcement des capacités et des politiques d'adaptation suppose que le pays sera également confronté à un changement climatique au cours des prochaines décennies, mais qu'il adoptera une approche proactive en intégrant des mesures d'adaptation climatique dans ses politiques de croissance économique et en investissant dans des interventions adaptées pour renforcer sa résilience face aux impacts climatiques. 3.1. Améliorer la productivité et la résilience de l'agriculture et de la pêche Les terres fertiles des Comores, combinées à la vaste zone économique exclusive du pays, créent des conditions favorables à l'agriculture et offrent un environnement marin riche pour la pêche. Ensemble, l'agriculture et la pêche ont contribué à environ 36,4 pour cent du PIB en 2022.48 La Figure 7 présente les principales cultures en termes de superficie, de production et de revenus, parmi lesquelles la noix de coco, le manioc et la banane figurent comme les plus importantes pour la production locale et les revenus agricoles. Environ 70,4 pour cent de la superficie du pays est consacrée à l'agriculture, tandis que les cultures commerciales — notamment l'ylang-ylang, le clou de girofle et la vanille — représentent 90 pour cent des recettes d'exportation du pays.49 La pêche joue également un rôle essentiel dans l'économie des Comores, représentant 7,5 pour cent du PIB et fournissant des emplois directs et indirects à environ 8 500 personnes, soit 4,2 pour cent de la population active. Le pays bénéficie d'une grande diversité d'espèces de poissons capturées (Figure 8). Cependant, le secteur de la pêche est confronté à de nombreux défis. La production totale de la pêche en 2020 était de 13 089 tonnes, un volume insuffisant pour répondre à la demande nationale, obligeant le pays à importer des produits de la mer. Par ailleurs, les écosystèmes côtiers et marins sont gravement dégradés en raison de pratiques de pêche non durables, de la pollution et des impacts du changement climatique.50 Figure 7. Superficies moyennes des cultures, production et revenus, 2017-2021 100% 5% 8% 8% 8% 9% 80% 10% 21% 11% MAÏS 20% 14% TUBERCULES 60% 10% GIROFLE 5% MANIOC 14% 15% RIZ HARICOT 40% COCO 33% 19% BANANE 29% ND 20% 19% 15% 7% 4% 4% 6% 0% SUPERFICIE (HA) PRODUCTION (TONNES) REVENUS (USD) Source : FAOStat , 2017 – 2021 48 Banque mondiale (2016). 49 Banque mondiale (2016). 50 Country Environmental Analysis Investing in Natural Capital for Sustainable Development 32 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure 8. Principales espèces de poissons capturés, 1950-2010 25000 KATSUWONUS PELAMIS THUNNUS ALBACARES POISSON MARINS NON IDENTIFIÉS 20000 SARDINELLA ENGRAULIDAE THUNNUS OBESUS CARANGIDAE XIPHIAS GLADIUS 15000 CATCH (METRIC TONS) ISTIOPHORUS PLATYPTERUS RASTRELLIGER AUTRES 10000 5000 0 1950 1960 1970 1980 1990 2000 2010 Source : Institut des océans et des pêches, 2024 La productivité agricole aux Comores reste inférieure à celle de nombreux autres pays en développement présentant des conditions agro-climatiques similaires, en raison de pratiques agricoles obsolètes, de la faible disponibilité et du coût élevé des intrants améliorés, tels que les semences et les engrais, ainsi que de la faible productivité de la main-d'œuvre agricole et de la dégradation des ressources naturelles. De plus, la faible connectivité à l'intérieur des îles et entre elles isole les agriculteurs travaillant dans les zones de production excédentaire des marchés urbains en croissance. Le manque d'infrastructures accentue ces difficultés, créant des lacunes dans les chaînes de valeur agricole. Par conséquent, malgré des ressources naturelles abondantes, le pays n'a pas réussi à exploiter pleinement son potentiel agricole et halieutique pour répondre à la demande locale, ce qui le contraint à dépendre des importations alimentaires, qui représentent 41 pour cent des produits alimentaires consommés. En outre, les Comores restent très vulnérables aux catastrophes climatiques, tout en étant parmi les pays les moins préparés à y faire face. Par exemple, le cyclone Kenneth a détruit près de 80 pour cent des exploitations agricoles du pays, affectant 63 pour cent des cultures vivrières et 35 pour cent des cultures commerciales, et entraînant ainsi des pertes considérables pour les communautés rurales, particulièrement dépendantes de l'agriculture 51 et le changement climatique devrait aggraver ces impacts. En ce qui concerne les cultures pluviales, le changement climatique devrait entraîner des décalages dans la saison des pluies et une plus grande irrégularité des régimes de précipitations. La production agricole aux Comores repose presque exclusivement sur les cultures pluviales, moins de 1 pour cent des terres arables étant irriguées. Les impacts du changement climatique liés à la disponibilité de l'eau et à l'augmentation des températures sur la production des cultures pluviales ont été modélisés pour les îles.52 La Figure 9 51 UNICEF. (2019). Comores : Rapport sur la situation humanitaire n°2 – Cyclone Kenneth. 52 52 Pour estimer les impacts du changement de la disponibilité de l’eau, les méthodes documentées dans le document de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture sur l’irrigation et le drainage (Steduto et al. 2012) ont été appliquées. Dans ces méthodes, les rendements des cultures pluviales sont améliorés en appliquant des coefficients de sensibilité à l’eau spécifiques à chaque culture au rapport entre les précipitations effectifs et l’évapotranspiration potentielle de la culture. Pour le stress thermique, les impacts sur le rendement des cultures dus à la chaleur extrême ont été modélisés à l’aide de l’approche d’AquaCrop (Salman et al. 2021) qui considère une relation négative entre les températures supra-optimales pendant la phase de floraison du développement des cultures. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 33 présente les projections d’impacts climatiques pour huit grandes cultures, selon les scénarios pessimistes (sec/très chaud) et optimistes (humide/chaud). Globalement, toutes les cultures montrent une baisse de rendement due au changement climatique, avec des pertes de productivité allant d'environ -5 pour cent en moyenne pour les clous de girofle, la noix de coco, le manioc et la banane, à -15 pour cent en moyenne d'ici 2050 pour le maïs. En regroupant ces impacts à l'échelle du secteur des cultures pluviales, les baisses de production agricole sont estimées à -7,6 pour cent et -7,4 pour cent d'ici les années 2040 dans les scénarios moyens sec/très chaud et humide/chaud, respectivement.53 Bien que les scénarios humides/ chauds indiquent une hausse des précipitations annuelles moyennes, la répartition saisonnière de ces précipitations reste irrégulière, entraînant des effets négatifs sur la production agricole. Par conséquent, les résultats des scénarios humides/chauds restent similaires à ceux des scénarios secs/très chauds, qui projettent une baisse globale des précipitations annuelles. Figure 9. Évolution annuelle moyenne des rendements des cultures pluviales par rapport à la référence historique (1995-2020) en raison des changements dans la disponibilité de l'eau et de la hausse des températures dues au changement climatique 0% -10% -20% BANANE HARICOT MANIOC GIROFLE COCO MAÏS RIZ TUBERCULES GAMME DE SCÉNARIOS GAMME DE SCÉNARIOS SCÉNARIO SCÉNARIO PESSIMISTES (EX: OPTIMISTES (EX: PESSIMISTES OPTIMISTES GAMME DE MCG GAMME DE MCG (EX: MOYENNE (EX: MOYENNE SEC/TRÈS CHAUDS) HUMIDES/CHAUDS) SECS/TRÈS CHAUD) HUMIDES/CHAUD) Source : Calculs de la Banque mondiale La plus grande fréquence et la plus forte intensité des cyclones, ainsi que la prolongation de la saison sèche, exercent une pression croissante sur les systèmes agricoles, avec des conséquences négatives potentielles sur la sécurité alimentaire et la pauvreté rurale.54 La diversification et l'amélioration de la productivité agricole restent un défi majeur aux Comores, où le secteur primaire est encore dominé par une agriculture de subsistance à petite échelle. Cette situation contribue à maintenir la pauvreté rurale et l'insécurité alimentaire, tandis que le pays reste fortement dépendant des importations alimentaires, le rendant vulnérable aux chocs macroéconomiques et aux risques inflationnistes.55 La pression inflationniste provoquée par la flambée des prix mondiaux des denrées alimentaires et du carburant pèse lourdement sur 53 Les chocs présentés représentent les changements dans les revenus des cultures pluviales par rapport à la référence historique (c’est-à-dire 1995-2020) modélisés par les changements de rendements dus aux changements de disponibilité en eau et au stress thermique. 54 Le coût annuel moyen du changement climatique a été évalué à 23 millions USD en 2014. Banque africaine de développement. 2022 Perspectives économiques en Afrique. 55 Banque mondiale. Revue des dépenses publiques des Comores 2022. 34 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT l'économie depuis 2021, une situation aggravée par le conflit entre l'Ukraine et la Russie.56 En conséquence, l'inflation s’est élevée au niveau national à 12,5 pour cent en 2022.57 Le changement climatique risque d'exacerber l'insécurité alimentaire et la pauvreté rurale, deux facteurs susceptibles d'alimenter l'instabilité politique. Les impacts du changement climatique sur la productivité agricole devraient varier selon les îles, ce qui implique que les interventions d'adaptation devront être ciblées au niveau local. La Figure 10 présente les impacts agrégés sur les rendements des cultures pluviales par île. Mwali et Ndzuwani, qui représentent respectivement 8 pour cent et 29 pour cent des revenus agricoles, devraient connaître des baisses de rendements plus importantes que Ngazidja,58 la majeure partie de ces pertes étant imputable aux pénuries d'eau pendant la saison de croissance, plutôt qu'à la hausse des températures. Ces différences d'impacts entre les îles s'expliquent principalement par la variabilité des précipitations mensuelles projetées, ainsi que par des disparités dans la répartition des cultures. Par exemple, Ngazidja compte relativement plus de bananeraies et moins de cultures de haricots que les deux autres îles, les bananeraies étant susceptibles de mieux résister au changement climatique que les cultures de haricots. Figure 10. Impacts des changements dans la disponibilité de l'eau et de la hausse des températures sur les rendements des cultures pluviales par île pour 2041-2050 GAMME DE SCÉNARIOS PESSIMISTES (EX: GAMME DE MCG SEC/TRÈS CHAUDS) GAMME DE SCÉNARIOS OPTIMISTES (EX: GAMME DE MCG HUMIDES/CHAUDS) -10% SCÉNARIO PESSIMISTES (EX: MOYENNE SECS/TRÈS CHAUD) SCÉNARIO OPTIMISTES (EX: MOYENNE HUMIDES/CHAUD) NGAZIDJA NDZUWANI MWALI Source : Calculs de la Banque mondiale Les interventions d'adaptation proactives visant à renforcer la résilience face aux impacts de la chaleur et de la disponibilité de l'eau pourraient réduire les effets du changement climatique sur le secteur agricole. Davantage d'investissements dans les infrastructures d'irrigation pourraient considérablement atténuer les impacts négatifs sur les cultures pluviales. Cependant, le potentiel total d'irrigation du pays reste incertain : selon les estimations basées sur les données existantes, ce potentiel serait de 300 hectares, dont 259 hectares (soit 86 pour cent) sont déjà irrigués, ce qui voudrait dire qu’il y reste peu de possibilités 56 Selon la Revue des dépenses publiques 2022, « Avec l’augmentation subséquente des produits pétroliers sur les marchés internationaux, les autorités comoriennes ont relevé le prix des produits hydrocarbonés jusqu’à 44 pour cent sur le marché local en mai 2022, et les tarifs de l’électricité ont également augmenté de 44 pour cent en 2022. » 57 Economist Intelligence Unit. 2022. Comoros Country Report. Créé le 14 novembre 2022 58 FAO 2023. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 35 d'expansion59. En revanche, certaines estimations indiquent que ce potentiel pourrait être bien plus élevé, atteignant jusqu'à 1 700 hectares pour les seules cultures maraîchères60. Le manque de données fiables dans le pays empêche donc une évaluation précise du potentiel d’irrigation actuel. Un scénario d'adaptation ambitieux a été étudié pour quantifier l'expansion nécessaire afin de neutraliser les impacts climatiques sur l'agriculture pluviale d'ici 2050. Selon ce scénario, l’élargissement des surfaces irriguées à 474 hectares d’ici 2050 permettrait de réduire presque à zéro les chocs sur la production des cultures pluviales. Cependant, des interventions de cette ampleur nécessiteraient des investissements considérables, estimés à 65 millions USD sur la période 2021-2050, et pourraient s'avérer irréalisables compte tenu des contraintes financières et institutionnelles. Les interventions de protection sociale, telles que les subventions et les formations, peuvent renforcer la productivité et la résilience tout en améliorant la production agricole. Parmi les initiatives récentes figure le Projet de filets de sécurité des Comores. Une évaluation menée auprès des bénéficiaires à la fin du projet révèle qu'après deux ans de mise en œuvre, plus de 87 pour cent des activités génératrices de revenus mises en place étaient toujours sur la bonne voie. Moins de 13 pour cent des bénéficiaires ont rencontré des risques dans le développement de leurs activités, et des solutions, telles qu'une assistance technique pour faire face à des maladies affectant le bétail, ont été apportées dans le cadre du projet. Ce dernier a également permis de dispenser des formations techniques sur les pratiques agricoles, tout en facilitant la mise en relation des communautés bénéficiaires avec les autorités locales et les organisations non gouvernementales, dans le but d'améliorer leur accès au marché. D'autres interventions, axées sur le renforcement du capital physique et des capacités locales, pourraient aider à réduire les risques climatiques pesant sur le secteur agricole. En particulier, la réhabilitation des systèmes de stockage des eaux de pluie permettra de mieux répondre aux variations de la disponibilité en eau induites par le changement climatique. La Stratégie de croissance accélérée et de développement durable du pays prévoit également l'installation de systèmes de canalisations pour les eaux usées et les eaux pluviales61. L'adoption de technologies agricoles et de pratiques de gestion climato-intelligente, telles que l'irrigation goutte à goutte ou la gestion intégrée des ravageurs et des maladies, pourrait non seulement améliorer la productivité, mais aussi promouvoir la conservation des sols et encourager des pratiques plus durables. Par ailleurs, l’appui à la production locale de semences, par la multiplication commerciale et communautaire, ainsi que la recherche et le développement de variétés améliorées, pourraient réduire la dépendance des agriculteurs aux semences importées. Ces efforts permettraient également de promouvoir des variétés de cultures plus résistantes aux inondations et aux ravageurs. Ces mesures figurent dans le Programme d'action national d'adaptation au changement climatique du pays.62 La faiblesse de la gouvernance foncière, particulièrement en milieu rural, constitue une préoccupation majeure et entrave la mise en œuvre des politiques publiques visant à renforcer la résilience climatique dans le secteur agricole. La gouvernance foncière est marquée par l’absence de titres de propriété, une administration foncière inefficace et une politique foncière ambiguë, résultant de la coexistence et de la superposition de trois systèmes fonciers : coutumier, islamique et colonial. Cette situation complexe engendre des conflits et des différends fonciers et complique la mise en œuvre des stratégies d’aménagement du territoire. Une grande partie des terres est traditionnellement détenue collectivement, et le droit coutumier prévaut souvent sur le droit moderne. Par exemple, les terres sont généralement transmises au sein des familles selon des pratiques culturelles spécifiques, fortement influencées par les normes matrilinéaires à Ngazidja et patrilinéaires sur les autres îles. Cette fragmentation foncière fait qu'il est difficile d'identifier les propriétaires légaux dans bien des cas. 59 FAO 2023 ; FAO GAEZ 2010. Cette estimation du potentiel d’irrigation prend en compte les terres disponibles, la disponibilité de l’eau et d’autres caractéristiques économiques du pays. 60 Groupe de la Banque mondiale, (2019a). 61 Union des Comores. 2018 Le coût estimé de ces mesures s’élève à environ 4,3 millions USD. 62 Union des Comores. 2006 Le coût estimé de ces mesures s’élève à environ 0,63 million de USD. 36 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Avec la croissance démographique, la fragmentation des parcelles et la dépendance continue à l'agriculture, la concurrence pour accéder à des terres agricoles inexploitées, qui sont souvent déjà propriété de particuliers, engendre des conflits et des différends. En raison des coûts élevés liés à l'acquisition de terres (coût du terrain, frais, démarcation), le marché foncier repose principalement sur des contrats verbaux de métayage et de location entre agriculteurs d’un même village, d’une même communauté ou d’une même famille. Cependant, comme le montre l'expérience de pays tels que Madagascar, la pleine propriété foncière a un impact plus significatif sur la productivité agricole que la location des terres. Par ailleurs, l'utilisation des terres agricoles entre fréquemment en conflit avec les objectifs de préservation des écosystèmes, les pratiques agricoles actuelles contribuant à la déforestation et à la dégradation des sols. Des interventions telles que l’adoption de pratiques agricoles durables, le reboisement et la gestion intégrée des ressources naturelles pourraient renforcer la résilience du secteur agricole, tout en favorisant une coexistence harmonieuse avec les objectifs de conservation et de protection de l’environnement. La dégradation des terres entraîne une perte de productivité et une baisse de la production agricole, aggravant ainsi la pauvreté, l'insécurité alimentaire et le chômage en milieu rural. Les pratiques agricoles actuelles restent dominées par la culture sur brûlis et la monoculture, des pratiques qui dégradent les sols et réduisent leur fertilité. Selon les estimations, 57 pour cent des terres arables sont dégradées,63 les zones côtières ayant subi les baisses les plus importantes de la capacité de production des terres entre 1999 et 2013.64 Cette dégradation s’est accompagnée d’une expansion progressive des terres utilisées à des fins agricoles. Pour compenser la dégradation des parcelles, les petits exploitants agricoles sont contraints d'élargir les surfaces cultivées afin de maintenir leurs niveaux de récolte. Cependant, cette expansion des terres cultivées n'a pas suivi le rythme de la croissance démographique, ce qui a entraîné une baisse d'environ 43 pour cent de la surface cultivée par habitant entre 1995 et 2018.65 Par ailleurs, la dégradation des écosystèmes côtiers et marins a également un impact négatif sur la production halieutique et la protection naturelle des côtes. À mesure que les phénomènes météorologiques extrêmes deviennent plus fréquents, le changement climatique devrait accentuer l'érosion des sols, avec des conséquences négatives sur la production agricole totale en raison de la perte de la couche arable fertile. L'impact du changement climatique par le biais de l’érosion des sols sur la productivité des cultures a été modélisée dans l’analyse66. D'ici les années 2040, les changements dans les régimes de précipitations devraient entraîner une augmentation de l'érosion de la couche arable, provoquant des chocs estimés à -2,3 pour cent et -4,2 pour cent sur la production agricole dans les scénarios climatiques sec/très chaud et humide/chaud, respectivement. Bien que les précipitations plus abondantes dans les scénarios humides/chauds soient favorables à la croissance et au développement des cultures, elles peuvent également avoir des effets négatifs en emportant la couche arable et les nutriments essentiels, ce qui limite la productivité agricole à long terme. Les interventions d'adaptation s’attaquant à la perte de la couche arable peuvent contribuer à réduire les pertes de production agricole causées par l'érosion. Plus précisément, l'adoption de pratiques d'agriculture de conservation, telles que le labour minimum du sol et l'utilisation de résidus de culture comme le paillis, pourrait limiter l'érosion en nappe et en rigoles provoquée par des précipitations plus intenses dues au changement climatique. Ces pratiques sont considérées comme neutres en termes de coûts pour les 63 Bourgoin et al. (2016). 64 Commission européenne. (2021). Forêts des Comores | Observatoire numérique des aires protégées Explorer. 65 Banque mondiale (2016). Analyse environnementale du pays : Investir dans le capital naturel pour le développement durable. 66 Pour estimer les futurs taux d’érosion, on utilise l’Équation universelle révisée des pertes de sol, qui prend en compte l’érosivité des précipitations et du ruissellement, les facteurs climatiques et les caractéristiques des sols, ainsi que les pratiques agricoles et les méthodes de gestion à l’échelle des exploitations. Afin de traduire les effets de l’érosion liée au changement climatique sur la production agricole dans le pays, une méthode développée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) est employée. Cette approche repose sur un taux de perte tolérable au fil du temps et varie en fonction du niveau des apports d’engrais ainsi que de la sensibilité des sols à la perte de productivité. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 37 agriculteurs parce qu’elles réduisent la main-d'œuvre nécessaire et diminuent l'utilisation des tracteurs, bien qu'elles puissent accroître le besoin en pesticides ou en autres intrants. Ces interventions s'inscrivent dans les objectifs définis par le Programme d'action national d'adaptation au changement climatique du pays, qui souligne la nécessité de restaurer les terres arables dégradées afin d'améliorer la productivité des sols, de diversifier la production agricole et de renforcer la sécurité alimentaire pour les populations les plus vulnérables67. Parmi les mesures définies dans le programme figurent l'identification des zones dégradées, la plantation d'arbres et la production de cultures fourragères. Ces efforts sont également en cohérence avec les interventions d'adaptation mises en œuvre dans d'autres petits États insulaires en développement, qui cherchent à limiter la dégradation des terres face aux impacts du changement climatique. Les solutions fondées sur la nature, adaptées aux spécificités biophysiques des îles, peuvent offrir des mesures d’atténuation et d’adaptation au changement climatique à la fois efficaces et peu coûteuses en réponse aux défis agricoles exacerbés par ce phénomène. Par exemple, l’intégration de la foresterie dans les systèmes agricoles peut contribuer à améliorer la fertilité des sols, à prévenir l'érosion et à renforcer la capacité des sols à retenir l'eau. De plus, la lutte intégrée contre les ravageurs constitue une méthode éprouvée pour réduire la dépendance aux pesticides chimiques, tout en favorisant l'équilibre écologique. Les techniques d'agriculture de conservation, telles que l’agriculture à zéro labour, peuvent également être mises en œuvre pour limiter l’érosion des terres et améliorer la santé des sols, contribuant ainsi à la résilience du secteur agricole face aux impacts du changement climatique. En outre, la gestion et le développement intégrés des paysages forestiers, adaptés au changement climatique, seront essentiels pour les Comores. Les forêts constituent une ressource inestimable, fournissant du bois d'œuvre, du combustible et des ressources non ligneuses. Elles soutiennent également l'agriculture et l'élevage en régulant les cycles de l'eau et des sols, en stockant le carbone, en prévenant les glissements de terrain et en offrant des services écosystémiques, ainsi que des habitats pour la flore et la faune. Ces fonctions, à leur tour, contribuent à la sécurité alimentaire et à la nutrition des populations. En 2018, les forêts représentaient 21 pour cent de la valeur du capital naturel par habitant aux Comores. 68 Cependant, le capital forestier par habitant a diminué de 22 pour cent entre 1995 et 2018, la déforestation et la dégradation des forêts continuant d'affecter la biodiversité, la qualité des sols et la productivité agricole. La mise en œuvre d’une approche de gestion intégrée du paysage, incluant la gestion durable des forêts, est donc fortement recommandée. Le changement climatique devrait également entraîner une baisse de la productivité du secteur de la pêche aux Comores. Plus précisément, la vie marine sera affectée par la hausse des températures des océans, l'élévation du niveau de la mer, les perturbations des niveaux d'oxygène dissous, les modifications des régimes de vents et de tempêtes océaniques, ainsi que les changements dans les courants et la circulation océaniques. Comme une analyse de modélisation l’indique, sans mesures d'adaptation, le changement climatique pourrait avoir d'ici les années 2040 des impacts sur la production halieutique compris entre +0,4 pour cent et -10,5 pour cent dans un scénario optimiste, et entre -8,3 pour cent et -12,2 pour cent dans un scénario pessimiste. Comme le montre la Figure 11, ces impacts ont été quantifiés à l'aide de deux modèles écologiques différents69, qui évaluent les effets du changement climatique sur la pêche sous la forme d'un choc (exprimé en pourcentage) sur le potentiel de capture maximal dans la zone économique exclusive du pays, en raison des variations de la température de la surface de la mer.70 67 des Comores. 2006) 68 La pêche représente un supplément de 15,5 pour cent. 69 Groupe de la Banque mondiale, 2019a. 70 Les chocs sont calculés par rapport à une situation de référence de 2015. 38 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure 11 Figure 11. Choc sur la production halieutique dû au changement climatique Modele d’enveloppe bioclimatique dynamique Modèle écologique à spectre de tailles multi-espèces 2% 0% -2% Choc moyen -4% SCÉNARIO OPTIMISTE -6% (EX: RCP 2.6) -8% SCÉNARIO PESSIMISTE (EX: RCP 8.5) -10% -12% -14% 2031-2040 2041-2050 2031-2040 2041-2050 Source : Calculs de la Banque mondiale Les impacts estimatifs du changement climatique sur le secteur de la pêche aux Comores varient considérablement selon les études disponibles. Alors que les résultats présentés dans la Figure 11 indiquent que des baisses significatives de la production halieutique sont probables d'ici 2050, selon des recherches menées par l'Institut des océans et des pêches, en collaboration avec la Banque mondiale, la zone économique exclusive du pays pourrait au contraire connaître de légères augmentations du potentiel de capture maximal à l'horizon 2050 en raison du changement climatique (Figure 12). Cependant, selon les prévisions de cette même étude, d'ici la fin du siècle, les réductions du potentiel de capture maximal seront plus importantes, le potentiel étant réduit de moitié dans un scénario climatique pessimiste (RCP8.5).71 71 Institut des océans et des pêches. 2024 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 39 FIGURE 12 Figure 12. Evolution du potentiel de capture maximal dans la zone économique exclusive des Comores72 20% 0% -20% RPC 2.6 -40% RPC 4.5 -60% RPC 8.5 -80% -100% 2000 2010 2020 2030 2040 2050 2060 2070 2080 2090 2100 Source : Institut des océans et des pêches, 2024. Il sera crucial de s'attaquer aux problèmes de gouvernance pour assurer une exploitation durable des ressources halieutiques et d’investir dans les infrastructures afin d'augmenter la productivité du secteur. La mise en œuvre de pratiques de pêche durables et le développement de meilleurs mécanismes de suivi seront bénéfiques, permettant d’évaluer la santé des pêcheries côtières et d’améliorer l'adaptabilité limitée du sous-secteur face aux impacts du changement climatique. Le renforcement des capacités scientifiques et statistiques sera également nécessaire pour surveiller l'état des pêcheries et envisager la réorientation de l'effort de pêche vers différentes espèces en fonction des évolutions climatiques. En outre, les documents de planification stratégique ont souligné l'importance de moderniser la production et la distribution du secteur grâce à l'adoption de techniques et d'infrastructures de pêche modernes. La mise en place de normes et de certifications pourrait également favoriser l'accès à de nouveaux marchés. Plus largement, pour garantir la durabilité à long terme des pêcheries, d'autres petits États insulaires en développement ont mis en place des aires protégées marines73, ont restauré des récifs coralliens et des mangroves74, et ont amélioré les méthodes de post-récolte afin de prolonger la durée de conservation des prises75. Cependant, la mise en œuvre efficace des aires protégées marines nécessite des plans de gestion détaillés, un financement garanti et le développement de capacités techniques et institutionnelles. De manière générale, la gestion durable des pêcheries exigera de poursuivre les efforts de renforcement des capacités et d’appliquer de manière stricte des règles aux pêcheurs afin d’assurer la préservation des ressources à long terme. Bien que le Code de la pêche et de l'aquaculture adopté en 2007 constitue une base solide pour le développement durable du secteur, il est encore possible d’apporter des améliorations. Ce Code établit les règles encadrant les activités de pêche et d'aquaculture afin d'assurer une gestion durable des ressources 72 Les valeurs du potentiel maximal de capture ont fluctué autour de la moyenne de la période de référence jusqu’en 2070. Cependant, après 2080, les projections commencent à diverger considérablement. Selon les scénarios SSP1-2,6 et SSP2-4,5, la moyenne devrait rester par rapport à la période de référence d’ici la fin du siècle. En revanche, le scénario SSP5-8.5 prévoit une forte baisse, avec une chute de près de 60% entre 2070 et 2080, puis un maintien à ce niveau réduit de -60% d’ici 2100. Cependant, l’incertitude dans les changements projetés pour SSP5-8.5 est très développé pour la fin du siècle en raison du désaccord dans les prédictions entre les différents modèles du Laboratoire de dynamique des fluides géophysiques et le modèle de l’Institut Pierre-Simon Laplace. 73 Hagedoorn et al. 2019 74 Thomas et al. 2020 75 Bell et al. 2018 40 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT halieutiques. Il stipule que les ressources halieutiques présentes dans les eaux sous souveraineté ou juridiction comorienne font partie du domaine public de l'État et qu'en conséquence, leur exploitation, récolte, utilisation ou suppression ne peut être réalisée sans autorisation préalable. Le titre 2 du Code est consacré à la gestion durable des ressources halieutiques et pourrait inclure des dispositions telles qu'un programme de développement du secteur de la pêche et de l'aquaculture, la gestion des pêcheries et l'exploitation des ressources en accord avec une série de principes définis.76 Les Comores s'engagent actuellement à renforcer le suivi, le contrôle et la surveillance du secteur de la pêche afin de garantir le respect des dispositions du Code d'ici 2024. Le Plan Comores Émergent 2030 reconnait en l'économie bleue l'un des cinq domaines stratégiques sur lesquels le pays doit se concentrer pour favoriser la transformation structurelle et atteindre les Objectifs de développement durable. Cependant, bien qu’un cadre stratégique pour l'économie bleue ait été élaboré, celui-ci n'est pas encore opérationnel. À ce jour, il n'existe ni indicateurs de performance ni système de mesure standardisé pour évaluer le capital naturel, social et humain lié à l'économie bleue. L'élaboration d'un système de mesure reposant sur un cadre de comptabilité du capital naturel ou des océans, adapté aux besoins spécifiques des Comores et intégré au système de comptabilité nationale, constituera une étape essentielle pour mettre en œuvre des actions significatives en faveur des écosystèmes de carbone bleu et des récifs coralliens. Par ailleurs, le Plan d'action stratégique national pour la biodiversité (PASNB, 2016) peut servir de point d'entrée pour faire le suivi du rôle des mangroves, des herbiers marins et des récifs coralliens dans la fourniture de solutions fondées sur la nature, contribuant ainsi à renforcer la résilience climatique et la sécurité alimentaire. L'agriculture et la pêche représentent des sources de subsistance particulièrement importantes pour les femmes, ce qui signifie que les impacts du changement climatique sur ces secteurs ont des conséquences majeures en matière d'égalité des sexes. Près d’un tiers des femmes participent travaillent dans l’agriculture, principalement en tant que petites productrices et agricultrices de subsistance. Beaucoup d'entre elles sont également engagées dans la pêche artisanale, généralement aux niveaux inférieurs des chaînes de valeur, pour en tirer leur source principale ou secondaire de revenus. Cependant, les femmes travaillant dans ces secteurs sont particulièrement vulnérables aux effets du changement climatique, dans la mesure où elles disposent de moins de ressources et de capacités pour s'adapter aux chocs climatiques. Contrairement aux hommes, elles ont un accès plus limité aux intrants agricoles, aux informations techniques et aux ressources financières, ce qui réduit leurs possibilités d'adopter des stratégies d'adaptation ou de se tourner vers des activités non agricoles en cas de crise. Les femmes, les habitants en milieu rural et les personnes vivant dans la pauvreté sont également plus susceptibles de travailler dans le secteur informel, qui est particulièrement vulnérable aux catastrophes climatiques en raison de leur faible capital, de leur faible accès au crédit et de leur faible capacité à se relever des crises. Il est significatif que les actifs des activités économiques dirigées par des femmes soient généralement de 33 pour cent inférieurs à ceux des activités gérées par des hommes. En outre, les femmes ont un moindre accès aux prêts financiers : seuls 20 pour cent d'entre elles peuvent accéder à des prêts en dehors du cercle familial, ce qui est de 4 points de pourcentage moins que leurs homologues masculins. De plus, l'inégalité d'accès aux services financiers est accentuée par le fait que seules 29 pour cent des femmes possèdent un compte bancaire ou utilisent les services d'un fournisseur d'argent mobile, contre 40 pour cent des hommes, une situation qui limite leur capacité à sécuriser leur épargne et à faire face aux urgences. . Il sera nécessaire de renforcer le capital humain et d'améliorer la productivité du travail, en particulier dans le secteur agricole, pour compenser les impacts prévus du stress thermique sur les travailleurs. Dans 76 Parmi les dispositions du titre figurent des mesures visant à lutter contre la pêche illicite, non déclarée ou non réglementée, ainsi que des mesures du ressort de l’État du port. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 41 l'ensemble, les résultats de la modélisation77 indiquent que l'augmentation des températures de l'air due au changement climatique devrait entraîner des baisses de productivité du travail agricole comprises entre -4,8 pour cent et -7,3 pour cent, selon les scénarios climatiques et les îles concernées (voir volet gauche de la Figure 13). Bien que les travailleurs de tous les secteurs soient susceptibles d'être affectés par la hausse des températures (les volets du milieu et de droite de la Figure 13 montrent les impacts estimés sur les travailleurs de l'industrie et des services), les travailleurs agricoles seront les plus touchés en raison de la nature de leur travail, qui exige une forte main-d’œuvre et est exercé principalement en extérieur. Les impacts devraient également varier d'une île à l'autre, Mwali étant celle où la baisse de productivité due à la chaleur sera la plus prononcée. Figure 13. Impact de la productivité du travail par île, 2041-2050 AGRICULTURE INDUSTRIE SERVICES 1.0% 0.0% GAMME DE SCÉNARIOS PESSIMISTES (EX: -1.0% GAMME DE MCG SEC/TRÈS CHAUDS) -2.0% GAMME DE SCÉNARIOS -3.0% OPTIMISTES (EX: GAMME DE MCG HUMIDES/CHAUDS) -4.0% -5.0% SCÉNARIO PESSIMISTES -6.0% (EX: MOYENNE SECS/TRÈS CHAUD) -7.0% -8.0% SCÉNARIO OPTIMISTES (EX: MOYENNE HUMIDES/CHAUD) NGAZIDJA NDZUWANI MWALI NGAZIDJA NDZUWANI MWALI NGAZIDJA NDZUWANI MWALI Source : Calculs de la Banque mondiale Compte tenu de la forte proportion de la population active engagée dans le secteur agricole (35 pour cent), les interventions d'adaptation visant à accroître la mécanisation agricole pourraient avoir des effets particulièrement bénéfiques dans la mesure où elles atténueraient les impacts du stress thermique sur la productivité du travail. En réduisant la dépendance à une main-d'œuvre exposée aux conditions extérieures, la mécanisation permettrait aux travailleurs vulnérables de se réorienter vers d'autres activités économiques moins sensibles aux aléas climatiques. Plus précisément, les résultats de la modélisation indiquent qu'une augmentation de la mécanisation de 0 pour cent à 15 pour cent pourrait réduire d'environ un tiers l'ampleur du choc de productivité dans le secteur agricole. Par ailleurs, toutes les stratégies d'adaptation destinées au secteur agricole devraient intégrer une approche tenant compte de la dimension de genre, afin de garantir que les interventions soient accessibles aux agricultrices, qui dépendent particulièrement des ressources naturelles du pays comme sources d’opportunités économiques. 77 Pour modéliser les impacts du stress thermique au travail dû au changement climatique, les températures du thermomètre-globe humide pendant la journée de travail ont été calculées comme mesure du stress thermique de manière à pouvoir établir des courbes de perte de productivité du travail sur trois niveaux d’activité physique. Pour chaque secteur (agriculture, services et industrie), les chocs de productivité du travail sont adaptés sur les heures de travail relatives par profession au sein de chaque secteur et sur la mesure dans laquelle ces professions sont exposées au travail en extérieur. 42 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 3.2. Investir dans un réseau d'infrastructures résilientes au changement climatique Le développement économique des Comores est freiné par la faiblesse des infrastructures, notamment l’insuffisance et la dégradation des réseaux de transport, l’inefficacité des systèmes de gestion des déchets et la vulnérabilité des infrastructures côtières. Bien que le pays possède d'importantes opportunités de croissance encore inexploitées, telles que le tourisme et le secteur agroalimentaire, les marchés intérieurs restent fortement fragmentés, isolant ainsi les communautés rurales. Les vols intérieurs, essentiels pour relier les îles, sont peu fiables, avec des retards et des annulations fréquents pour des raisons techniques ou climatiques. En l'absence de liaisons aériennes régulières, les ferries et bateaux de passagers informels constituent une alternative, mais ils restent fortement dépendants des conditions météorologiques et peuvent présenter des risques pour la sécurité. Par ailleurs, le réseau routier est en mauvais état, entraînant des perturbations fréquentes dans les transports et limitant l'approvisionnement en marchandises des zones reculées, aggravant ainsi l'isolement des communautés rurales. Le changement climatique menace d'aggraver la fragmentation territoriale et de restreindre davantage la connectivité, constituant ainsi une contrainte majeure à l'intégration économique et politique des îles. La multiplication des catastrophes naturelles risque de détériorer davantage les infrastructures, déjà insuffisantes et de mauvaise qualité (notamment les routes et les ports) pourtant essentielles à la connectivité du pays. Depuis 1993, le niveau de la mer s’est élevé à un rythme de 1 à 6 mm par an et devrait continuer à croître de 4 mm par an, entraînant une plus grande érosion côtière. Cette érosion devrait endommager environ 29 pour cent des routes et des infrastructures stratégiques du pays78. Ces dégâts auront un impact négatif sur la connectivité intra- et inter-îles, limitant la mobilité fiable des personnes et des biens et aggravant le manque d'intégration nationale. Le manque d’entretien du réseau routier des Comores accroît la vulnérabilité du pays aux événements climatiques extrêmes. La majorité des routes (58 pour cent) se trouve à Ngazidja, tandis que Ndzuwani et Mwali détiennent respectivement 30 pour cent et 12 pour cent du parc routier national. 79 Cependant, seuls 20 pour cent du réseau routier sont en bon état, 30 pour cent sont jugés en état moyen et le reste est en mauvais ou très mauvais état, rendant ces infrastructures particulièrement sensibles aux dommages causés par les événements climatiques. 80 Ce constat est plus préoccupant que dans d'autres pays de la région, tels que l'île Maurice, l'Eswatini ou le Lesotho. La situation est encore plus critique en milieu rural, où environ 35 pour cent de la population n'a pas accès à un réseau routier fiable81. L'érosion côtière représente également une menace majeure pour les routes, entraînant des dégâts importants sur certaines portions du réseau. En l'absence d'itinéraires alternatifs, plusieurs routes sont directement exposées aux risques climatiques et économiques, 82 Dans l’ensemble, les infrastructures routières jouent un rôle clé dans l'accès aux opportunités d'emploi, notamment pour les femmes et les jeunes, en facilitant les déplacements vers les zones urbaines. En réponse à l'insuffisance et à la dégradation des infrastructures routières, le gouvernement comorien a fixé des objectifs ambitieux dans le cadre du Plan Comores Émergent, notamment ceux de construire 100 km de nouvelles routes et de réhabiliter 800 km de routes existantes au cours des dix prochaines années. Bien que peu de ressources soient disponibles, la réalisation de ces projets pourrait significativement améliorer la connectivité entre les zones urbaines et rurales, réduisant ainsi l'isolement des communautés les plus éloignées.83 78 Banque mondiale (2016). Fonds pour l’environnement mondial. 2009 79 Pôle logistique.2019 80 Banque mondiale. 2023 81 Groupe de la Banque mondiale, 2019). De nombreuses routes sont situées le long du littoral et dans des zones inondables. En conséquence, environ 29, 17 et 23 pour cent des routes principales de Ngazidja, Ndzuwani et Mwali, respectivement, sont situées dans des zones vulnérables aux inondations pluviales. 82 En avril 2019, le cyclone Kenneth a dévasté le réseau routier du pays, notamment 62 km de routes principales, 16 km de routes régionales et 12 km de routes rurales. Ces routes représentaient 10 pour cent du réseau routier total. 83 Union des Comores Ministère du Développement rural, de la Pêche, de l’Artisanat et de l’Environnement 2006. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 43 Le changement climatique pourrait avoir un impact sur les infrastructures routières des Comores, notamment en raison de l'augmentation des températures, des précipitations et des inondations. Le système d’appui à la planification des infrastructures a été utilisé pour estimer les impacts potentiels du changement climatique sur le réseau routier du pays. 84 Concernant les routes, l’analyse s’est d’abord concentrée sur les coûts supplémentaires de réparation et d’entretien découlant des dommages liés au climat. En parallèle, une analyse du coût des perturbation a été menée pour évaluer les retards causés par les itinéraires endommagés nécessitant des réparations, ces perturbations ayant des conséquences directes sur la productivité de la main-d’œuvre. L'analyse des perturbations prend en compte la durée pendant laquelle des réparations sont effectuées sur chaque itinéraire ou la durée pendant laquelle l’itinéraire est hors service en raison des impacts climatiques. Les Figure 14 et Figure 15 illustrent les coûts annuels moyens de réparation et d’entretien, ainsi que les heures de retard provoquées par les dommages climatiques sur les routes. Ces coûts représentent les dépenses supplémentaires différentielles liées aux dégâts causés par le changement climatique, comparés aux niveaux de référence historiques. Figure 14. Coûts routiers annuels moyens dans le cadre d'un scénario de référence sans adaptation et d'un scénario d'adaptation, 2041-2050 RÉFÈRENCE ADAPTATION 4 3 SSP3-7.0 25ÈME-75ÈME PERCENTILE TOTAL ANUAL COST (USD) SSP2-4.5 25ÈME-75ÈME PERCENTILE 2 SCÉNARIO PESSIMISTE (EX: SSP2-4.5) 1 SCÉNARIO OPTIMISTE (EX: SSP3-7.0) 0 Source : Calculs de la Banque mondiale SSP2-4.5 SSP3-7.0 SSP2-4.5 SSP3-7.0 84 Le système d’appui à la planification des infrastructures a déjà été appliqué à l’étude sur le renforcement de la résilience climatique des infrastructures africaines (Cervigni et al. 2015). 44 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure 15.. Nombre moyen d'heures de retard sur la route dans les scénarios de référence et d'adaptation FIGURE 15 sans adaptation, 2041-2050 BASELINE ADAPTATION 0.3 SSP3-7.0 25ÈME-75ÈME PERCENTILE TOTAL ANUAL DELAYS (MIL HRS) SSP2-4.5 25ÈME-75ÈME PERCENTILE 0.2 SCÉNARIO PESSIMISTE (EX: SSP2-4.5) SCÉNARIO 0.1 OPTIMISTE (EX: SSP3-7.0) SSP2-4.5 SSP3-7.0 SSP2-4.5 SSP3-7.0 Source : Calculs de la Banque mondiale Cette analyse montre que, sans mesures d'adaptation, les Comores pourraient souffrir d’une augmentation des dommages aux routes, estimée en moyenne à 2,8 millions USD par an dans un scénario climatique pessimiste (SSP3–7.0). Par ailleurs, les perturbations des infrastructures routières dues au changement climatique entraîneraient environ 0,27 million d'heures de retard supplémentaires par an, ce qui se traduirait par une baisse totale de l'offre de main-d'œuvre de -0,05 pour cent dans ce même scénario pessimiste. Pour limiter les dommages que la hausse des températures, les précipitations extrêmes et les inondations liées au changement climatique causent aux routes, le scénario d'adaptation suppose la mise en œuvre de mesures proactives de résilience climatique sur l'ensemble du réseau routier. Les mesures proactives signifient que les itinéraires routiers soient modernisés selon des normes de construction plus élevées lorsqu'ils arrivent en fin de vie, afin de mieux résister aux impacts climatiques. Comme l'analyse le montre, si l'on considère les dommages annuels moyens causés aux routes, ces interventions d'adaptation seraient suffisantes pour presque entièrement éliminer les dommages liés au changement climatique (voir Figure 14). Cependant, même avec des investissements dans des mesures d'adaptation proactives, des retards résiduels dans l’utilisation des routes sont attendus dans les deux scénarios climatiques évalués (voir Figure 15). En ce qui concerne les infrastructures de franchissement (ponts), le changement climatique devrait également provoquer une dégradation des ouvrages existants, entraînant une augmentation des coûts de réparation et des retards pour les usagers. Étant donné le manque de données précises sur l'emplacement des ponts existants, l'analyse s'est appuyée sur un ensemble de données géographiques repérant les franchissements artificiels en croisant les itinéraires routiers avec les voies navigables. Les dommages potentiels causés aux ponts par les inondations fluviales ont été évalués à l'aide de fonctions de dommages- profondeur, permettant d'estimer les retards associés aux travaux de réparation. Sans mesures d'adaptation, les dommages annuels attendus sur les ponts, dus aux inondations intérieures, pourraient représenter 0,45 million de USD d'ici 2050 dans un scénario climatique pessimiste (SSP3–7.0). Ces dommages entraîneraient également des retards supplémentaires ayant un impact sur l'offre de main-d'œuvre, avec un choc annuel estimé à -0,07 pour cent en raison des interruptions de circulation sur les ponts en réparation. Dans le cadre du scénario d'adaptation, l'impact de l'amélioration des normes de conception des ponts a été évalué. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 45 Ces mesures permettraient de réduire de près de 50 pour cent les dommages différentiels par rapport à un scénario sans adaptation. De la même manière, l'adaptation permettrait de limiter l’impact sur l'offre de main-d'œuvre, ramenant le choc annuel à -0,03 pour cent d'ici le milieu du siècle, soit moins de la moitié de la baisse prévue dans un scénario sans adaptation (-0,07 pour cent). Reconnaissant les limites de son réseau de transport, le gouvernement a défini des stratégies pour renforcer ses infrastructures et améliorer la gestion des transports de manière résiliente face aux défis du changement climatique. Dans le cadre de la Stratégie nationale de croissance et de développement accélérés, des plans ont été élaborés afin de moderniser le réseau maritime et portuaire, d'étendre les infrastructures routières et de développer le transport aérien, avec pour objectif de stimuler la croissance économique et de favoriser l’intégration entre les différentes îles. Avec l’appui de la communauté des bailleurs internationaux et en partenariat avec le secteur privé, des travaux de réhabilitation sont actuellement en cours au port de Boingoma, principal port de l'île de Mwali, afin de le rendre pleinement opérationnel indépendamment des conditions météorologiques. À ce jour, le port reste inutilisable environ 60 jours par an et ne peut accueillir ni grands navires ni ferries. La construction de brise-lames supplémentaires ainsi que l'agrandissement des quais, pour un coût estimé à 63 millions USD, permettront d'améliorer sa fiabilité et sa résilience. Par ailleurs, le port de Moroni, le plus grand port du pays situé sur l'île de Ngazidja, fera également l'objet d'un agrandissement avec des investissements estimés à 100 millions USD. Simultanément, le gouvernement s'engage à rendre le transport de passagers entre les îles plus sûr et plus fiable en modernisant les infrastructures portuaires de débarquement et en introduisant des navires plus récents et mieux sécurisés. Ces nouveaux bateaux, de plus grande capacité, offrent un rendement énergétique par passager supérieur de 32 pour cent à celui des petites embarcations actuellement utilisées. En outre, ces projets ouvrent des perspectives de collaboration avec le secteur privé, notamment dans l’exploitation et la maintenance des infrastructures portuaires.85 Au-delà des routes et des ponts, d'autres infrastructures physiques du pays sont également vulnérables aux inondations. D'ici 2050, les impacts des inondations liées au changement climatique pourraient engendrer des pertes supplémentaires représentant jusqu'à 0,12 pour cent du capital national, soit environ 13,5 millions USD de dommages par an. Pour mieux comprendre les effets des inondations intérieures, des cartes des risques d'inondation ont été élaborées afin de repérer les zones présentant une probabilité d'inondation selon deux scénarios : le scénario de référence historique et celui prenant en compte les impacts du changement climatique futur. Ces cartes mettent en évidence l'étendue et la profondeur des inondations, données essentielles qui ont ensuite été utilisées pour estimer les dommages potentiels causés aux infrastructures sur les différentes îles. Globalement, dans la situation de référence historique, les impacts des inondations intérieures varient selon les îles, avec des inondations plus marquées sur l'île de Ngazidja (Figure 16). Cependant, comme les projections le montrent, les îles de Ndzuwani et de Mwali devraient subir une augmentation plus importante des dégâts liés aux inondations en raison du changement climatique, les impacts prévus étant légèrement plus élevés pour Ndzuwani que pour Mwali. Ces projections permettent d'éclairer la planification d'infrastructures plus résilientes au changement climatique et peuvent servir de base à des évaluations sectorielles plus approfondies à l'avenir. Dans le cadre de ces évaluations, on pourrait analyser les impacts des inondations sur les infrastructures énergétiques et numériques, les centres de population ainsi que les points d'intérêt stratégiques, tels que les écoles et les formations sanitaires. 85 Les ports de Moroni et de Mousamudu sont actuellement exploités par des opérateurs privés. 46 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure 16. Plaine inondable historique centennale Les investissements dans des mesures d'adaptation peuvent considérablement réduire les impacts des inondations intérieures. En l’absence de mesures d'adaptation, il est supposé que les nouvelles infrastructures soient construites à proximité des infrastructures existantes, sans prendre en compte les risques liés aux plaines inondables connues. Dans le scénario d'adaptation évalué, il est prévu que les nouvelles infrastructures seront construites en dehors des plaines inondables identifiées au cours des 20 dernières années. Par ailleurs, les ouvrages existants qui sont les plus exposée à des dommages annuels élevés en cas d'inondation bénéficieraient d'une protection contre les inondations, notamment sur le premier mètre de l’ouvrage. La mise en œuvre de ces mesures d'adaptation commencerait dès 2025, avec une protection qui augmenterait progressivement pour atteindre 0,03 pour cent de tous les bâtiments aux Comores d'ici 2050. Dans un scénario climatique pessimiste (SSP3 – 7,0), ces mesures d'adaptation permettraient, d'ici 2050, d'inverser complètement les dommages supplémentaires prévus en raison du changement climatique. Le coût total de ces investissements est estimé à 31 millions USD sur la période allant de 2025 à 2050. Les infrastructures côtières sont également gravement menacées par l'élévation du niveau de la mer, le niveau médian devant augmenter de plus de 0,20 mètre d'ici 2050 selon les projections du scénario SSP3-7,0. Cette élévation estimative entraînera des impacts croissants, notamment la perte permanente de capital côtier en raison de l'augmentation du niveau moyen de la mer, ainsi que des dommages réparables causés par des inondations périodiques liées aux marées extrêmes. Comme illustré à la Figure 17, dans un scénario climatique pessimiste (SSP3-7,0, avec un 80e percentile de l’élévation du niveau de la mer), les dommages annuels pourraient atteindre 22,4 millions USD, soit environ 0,20 pour cent du capital national. Ces impacts seraient principalement causés par des inondations permanentes dues à l'élévation du niveau de la mer, par opposition aux coûts annuels de réparation liés à la récession des ondes de tempête. Ces impacts sont particulièrement préoccupants, étant donné que 88 pour cent de la population vit dans RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 47 les zones côtières, où les inondations sont déjà une réalité et où l'élévation actuelle du niveau de la mer contribue à la salinisation progressive des ressources en eau du pays.86 Figure 17. Chocs sur la capitale du pays dus à l'élévation du niveau de la mer et aux inondations côtières dans un futur climatique pessimiste (SSP3–7,0, 80e percentile) 0.2 0.18 PERTES DÉFINITIVES 0.16 COÛTS ANNIEL RÉPAR. % choc sur le capitale 0.14 0.12 0.1 008 0.06 0.04 0.02 0 2020 2030 2040 2050 Source : Calculs de la Banque mondiale En matière d'adaptation aux inondations côtières, l'association de la planification des zones inondables à des normes de conception d'infrastructures améliorées pourrait permettre de réduire les dommages causés par ces inondations de 70 pour cent dans un scénario climatique pessimiste (c'est-à-dire SSP3- 7,0), par rapport à une situation de référence sans adaptation. Ces mesures d'adaptation reposent sur deux principales hypothèses : les nouvelles infrastructures seraient construites au-dessus du niveau de la marée haute centennale, en tenant compte de l'élévation prévue du niveau de la mer, et les ouvrages existants les plus exposés à des dommages annuels élevés seraient protégés contre les inondations jusqu’à un mètre au-dessus de leur base. Cependant, cette dernière mesure protège uniquement les ouvrages contre les marées extrêmes et les ondes de tempête périodiques, sans offrir de solution face aux inondations permanentes provoquées par la montée progressive du niveau de la mer. Parmi les stratégies d’adaptation souvent adoptées par les petits États insulaires en développement figure également la construction de digues et d’autres infrastructures de prévention des inondations. Cependant, la mise en place de ces mesures peut se heurter à des limites financières et techniques87 qui compliquent leur mise en œuvre. De plus, le coût et la complexité de leur entretien peuvent constituer des défis importants. À plus long terme, au-delà de 2100, les protections physiques telles que les digues pourraient devenir insuffisantes face à l’élévation importante du niveau de la mer attendue entre 2050 et 2100 dans les scénarios d’émissions les plus élevés. (Figure 18). 88 86 Banque mondiale. 2016. 87 Thomas et al., 2020. 88 GIEC 2018. 48 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT FIGURE 18 Figure 18. Prévision d’évolution du niveau moyen de la mer selon différents scénarios climatiques 2 MOYENNE SSP5-8.5 1.8 CHANGE IN MEAN SEA LEVEL (M) MOYENNE SSP3-7.0 1.6 MOYENNE SSP2-4.5 MOYENNE SSP1-2.6 1.4 MOYENNE SSP1-1.9 1.2 SSP119 CONFIANCE 80% 1 SSO585 CONFIANCE 80% 0.8 0.6 0.4 0.2 0 2020 2030 2040 2050 2060 2070 2080 2090 2100 Source : Calculs de la Banque mondiale En outre, la mise en place de cadres réglementaires encadrant l’aménagement du territoire sera essentielle pour prévenir toute nouvelle expansion urbaine dans les zones exposées aux risques d’inondation ou d’érosion côtière. À Mutsamudu et à Moroni en particulier, l’expansion urbaine se poursuit souvent sans prendre en compte les normes de construction résistantes aux tempêtes et aux inondations, ce qui expose davantage les communautés locales aux impacts climatiques futurs. L’introduction d’un cadre réglementaire spécifique, comprenant la délimitation de zones non constructibles dans les secteurs à risque, ainsi que l’intégration de critères de résilience climatique dans les normes de construction, apparaît comme une mesure indispensable pour réduire la vulnérabilité. Les solutions fondées sur la nature dans les paysages côtiers, telles que les mangroves, les récifs coralliens et les herbiers marins, peuvent également constituer une approche rentable pour renforcer la résilience face aux inondations et à l’érosion côtière. Par exemple, la protection et la restauration des mangroves peuvent mettre en place une barrière naturelle contre les ondes de tempête et l’érosion, alors qu’elles nécessitent moins investissements que la mise en place d’infrastructures traditionnelles telles que les digues ou les brise-lames en béton. Aux Comores, il y a environ 120 hectares de mangroves, dont près de 75 pour cent se trouvent le long de la côte sud de l’île de Mwali, notamment dans les régions de Damou et de Mapiachingo. Par ailleurs, les récifs coralliens frangeants occupent environ 60 pour cent de la côte de Ngazidja, 80 pour cent de la côte de Ndzuwani et 100 pour cent de la côte de Mwali. Ces récifs, formant une plateforme étroite s’étendant sur une courte distance à partir du rivage, offrent également une protection naturelle contre les vagues et les tempêtes, à condition d’être gérés et conservés efficacement. Par ailleurs, les aléas naturels ont un impact significatif sur le secteur de l'éducation dans la mesure où elles causent des dommages aux infrastructures scolaires, dommages qui risquent de s'aggraver sous l'effet du changement climatique. Par exemple, le passage du cyclone Kenneth a directement affecté le système éducatif en endommageant 465 salles de classe, ce qui a perturbé la scolarité d’environ 44 800 élèves. De telles interruptions peuvent avoir des conséquences durables sur la qualité de l'apprentissage, RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 49 notamment lorsqu'elles s'ajoutent à d'autres crises, telles que la pandémie de COVID-19, durant laquelle chaque mois de fermeture d’école se traduisait par un mois de pertes d’apprentissage. Par ailleurs, les fermetures d’écoles peuvent être prolongées lorsque les infrastructures scolaires sont utilisées comme centres d’évacuation lors de catastrophes naturelles. Dans ce contexte, le développement de modèles d'apprentissage à distance peut constituer une stratégie d'adaptation clé pour garantir la continuité éducative pendant les périodes de fermeture. De plus, la mise en place de programmes de rattrapage ciblés peut aider les élèves les plus touchés à combler leurs retards d'apprentissage. Les dommages subis par les infrastructures scolaires, ainsi que les perturbations de l’éducation qui en découlent, ont des conséquences profondes sur les perspectives à long terme et la vulnérabilité de la population, en particulier dans le contexte des petits États insulaires, où la capacité de réponse des institutions publiques et des structures de gouvernance reste faible. 3.3. Préserver l'approvisionnement en eau face à la demande croissante et au changement climatique L'eau joue un rôle essentiel dans l'économie et les moyens de subsistance des Comores, bien que les ressources en eaux de surface et souterraines varient d'une île à l'autre. Les trois îles sont toutes confrontées à des problèmes croissants de disponibilité en eau. À Ngazidja, les communautés côtières dépendent principalement des ressources en eaux souterraines, tandis que les communautés rurales s'appuient sur une récupération limitée des eaux de pluie. Cependant, de nombreux puits d'eau souterraine ne fournissent pas d'eau potable en raison de l'intrusion d'eau salée dans les nappes phréatiques le long des côtes (entre 2018 et 2020, seuls 9 des 44 puits explorés ont produit de l'eau potable). À Ndzuwani et Mwali, les ressources en eaux souterraines sont encore plus faibles qu'à Ngazidja. L'utilisation de l'eau sur ces deux îles repose sur une forte dépendance à la fois aux eaux souterraines et aux eaux de surface (Tableau 2). Cependant, la disponibilité des eaux de surface est affectée par la nature de plus en plus saisonnière des rivières, dont beaucoup ne coulent plus de manière fiable tout au long de l'année.89 À Ndzuwani, par exemple, on dénombrait 40 rivières permanentes il y a cinquante ans, mais elles se sont asséchées depuis. (World Bank, 2019) Tableau 2. Volumes estimatifs des ressources en eau renouvelables et taux d'exploitation par île Ressources en Eau de surface eaux souterraines Ressources renou- renouvelable (mil- Eaux de sur- Eaux souter- renouvelables Île velables totales liards m 3 /an) face exploitées raines exploitées (milliard m 3 /an) (milliard m 3 /an) (pourcentage du (pourcentage) (pourcentage) (pourcentage du total de l’île) total de l’île) Ngazidja 1.254 0,124 (10%) 1 130 (90%) 1.9 0,5 Ndzuwani 0,514 0,213 (42%) 0,299 (58%) 2.3 0,6 Mwali 0,117 0,078 (67%) 0,038 (33%) 1.2 0,5 Source : Tshimanga 2015 Étant donné que moins de 3 pour cent des ressources disponibles en eau douce sont actuellement exploitées, le pays ne fait pas face à une pénurie physique absolue d'eau. Les problèmes de disponibilité en eau sont plutôt principalement dus à l’irrégularité des régimes pluviométriques et aux impacts négatifs de l’activité humaine (pollution, surexploitation des ressources, déforestation), à l'intrusion d'eau salée dans les aquifères résultant de l'élévation du niveau de la mer, aux conflits entre villages et communes, au manque d'entretien des infrastructures hydrauliques existantes et à l'insuffisance de financements pour 89 Bourgoin et al. 2016 50 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT développer le stockage et la distribution d'eau. Le stockage à grande échelle est difficile à cause de la nature des jeunes sols volcaniques des îles dont les taux d'infiltration sont très élevés, limitant ainsi la capacité à retenir l'eau. L'érosion de ces sols fragiles, notamment lors d'événements climatiques extrêmes tels que les cyclones tropicaux, perturbe les cours d'eau en augmentant les charges sédimentaires, aggravant à la pénurie d'eau et la dégradation de sa qualité. À cela s'ajoutent les hausses de température prévues à l'avenir, qui intensifieront l'évaporation des eaux de surface. Les problèmes actuels de disponibilité de l'eau sont exacerbés par l'apparition périodique de sécheresses (Figure 19) et les changements dans la saison des pluies. De longs épisodes de sécheresse se sont produits à la fin des années 1990 et au début des années 2000, entraînant des pénuries d'eau importantes, une perturbation des réseaux hydrographiques et des menaces directes pour l'agriculture ainsi que la sécurité alimentaire. Par ailleurs, la saison des pluies est devenue de plus en plus erratique, sa durée s’étant réduite de six à environ trois mois par an90. Selon les projections, les précipitations pendant la saison sèche pourraient diminuer jusqu'à 47 pour cent d'ici 209091. Ces changements auront un impact majeur sur la disponibilité de l'eau, notamment en raison de la faiblesse des infrastructures de stockage actuellement existantes sur les îles. Cette situation est particulièrement préoccupante pour les nombreuses communautés qui dépendent de petits réservoirs de récupération des eaux de pluie pour leur approvisionnement en eau. En outre, la dégradation des sols, intensifiée par les sécheresses et les variations des régimes de précipitations, a des conséquences lourdes pour le pays. Les terres dégradées perdent leur capacité à retenir l'eau et à faciliter l'infiltration dans les nappes souterraines, réduisant ainsi la quantité d'eau souterraine disponible. 90 90 MAPÊTA. (2021). Contribution Déterminée au Niveau National (CDN actuelle), Rapport de synthèse. 91 PNUD. Adaptation au changement climatique. https://www.adaptation-undp.org/projects/ensuring-climate-resilient-water-splies- comoros-islands#:~:text=United%20Nations%20models%20indiquent%20a,the%20Comores%20is%20a%20challenge . RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 51 Figure 19. Profil de risque de sécheresse par île, basé sur des données satellites Source : SADRI 2019 La disponibilité des eaux de surface devrait évoluer sous l'effet du changement climatique, en raison de modifications des régimes de précipitations. Les impacts sur les futurs approvisionnements en eau de surface ont été modélisés à l’aide d’un modèle pluie-ruissellement92 appliqué à 16 bassins répartis sur les trois îles, en prenant en compte une gamme de scénarios climatiques futurs93. Parmi les trois îles, Ngazidja devrait enregistrer le plus faible changement dans le ruissellement annuel d’ici 2050, avec une variation moyenne de -0,1 pour cent sur l’ensemble des scénarios climatiques prévus (Tableau 3). En revanche, les îles de Mwali et Ndzuwani devraient connaître des changements plus notables, avec des augmentations moyennes du ruissellement estimées à +0,9 pour cent pour Mwali et +1,7 pour cent pour Ndzuwani. Bien que les variations moyennes prévues soient relativement faibles, les projections individuelles des scénarios climatiques montrent une fourchette beaucoup plus large, allant de -5,4 pour cent à +6,4 pour cent pour Ngazidja, de -6,2 pour cent à +10,5 pour cent pour Mwali et de -7,4 pour cent à +10,4 pour cent pour Ndzuwani. 92 Le modèle pluie-débit utilisé était CLIRUN. 93 L’analyse de l’eau à pris en compte le climat historique et 55 futurs climatiques, dont 29 projections SSP2-4.5 et 26 projections SSP3-7.0. Le ruissellement historique a été valorisé à l’aide des données d’HydroAtlas et désagrégé en valeurs mensuelles à l’aide du ruissellement de la base de données GRUN. 52 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Tableau 3. Évolution du débit moyen par île en raison du changement climatique Variation du Ruisselement historique Variation du Île Bassin ruisseaulement (1995-2020) (MCM) ruissellement (MCM/an) (pourcentage) Hamahamet-Mboinkou 26 0,1 (-1,2, 1,6) 0,3% (-4,6%, 6,2%) Hambou 26 0,0 (-1,4, 1,7) 0,0% (-5,5%, 6,7%) Itsandra-Hamanvou 45 0,0 (-2,5, 3,0) 0,0% (-5,5%, 6,7%) Mbadjini Est 41 0,0 (-2,2, 2,8) 0,0% (-5,5%, 6,8%) Ngazidja Mbadjini Ouest 18 0,0 (-1,0, 1,2) 0,0% (-5,5%, 6,7%) Mitsamiouli-Mboudé 44 0,2 (-1,9, 2,6) 0,4% (-4,3%, 5,9%) Moroni -Bambao 35 0,0 (-2,0, 2,4) 0,0% (-5,5%, 6,7%) Oichili-Dimani 45 0,0 (-2,5, 3,0) 0,0% (-5,5%, 6,7%) Total de l’île de Ngazidja 280 -0,4 (-15,2, 17,9) -0,1% (-5,4%, 6,4%) Djando 13 0,1 (-0,8, 1,3) 0,9% (-6,2%, 10,5%) Fomboni 22 0,2 (-1,4, 2,3) 0,9% (-6,2%, 10,5%) Mwali Nioumachioi 18 0,2 (-1,1, 1,9) 0,9% (-6,2%, 10,5%) Total de l’île de Mwali 52 0,5 (-3,2, 5,5) 0,9% (-6,2%, 10,5%) Domoni 39 0,7 (-2,9, 4,2) 1,8% (-7,4%, 10,5%) Mremani 15 0,2 (-1,2, 1,6) 1,4% (-8,0%, 10,6%) Ndzuwani Mutsamudu 15 0,3 (-1,0, 1,5) 2,2% (-7,1%, 10,1%) Ouani 10 0,2 (-0,7, 1,0) 2,2% (-7,1% 10,1%) Sima 30 0,7 (-2,2, 3,1) 2,2% (-7,1%, 10,1%) Total de l’île de Ndzuwani 110 1,8 (-8,1, 11,4) 1,7% (-7,4%, 10,4%) Note : Les variations du ruissellement montrent la « médiane (10e percentile, 90e percentile) » Source : Calculs de la Banque mondiale La demande en eau devrait augmenter de manière significative à l’avenir, risquant ainsi d'accentuer le déséquilibre entre l'offre et la demande. Actuellement, les précipitations annuelles à l'échelle nationale sont estimées à environ 19 millions de m³.94 À Ngazidja et Ndzuwani, la majeure partie de cette ressource est destinée à un usage domestique, suivi des usages agricoles et industriels (Figure 20et Figure 22). En revanche, à Mwali, la majorité des précipitations est consacrée à l’agriculture, suivie par les usages domestiques et industriels (Figure 21). D'ici 2050, la demande annuelle totale en eau devrait augmenter sur les trois îles, atteignant environ 8,5 millions de m³ par an à Ngazidja, 9,2 millions de m³ à Mwali et 11,29 millions de m³ à Ndzuwani. Cette augmentation correspond à une hausse de plus de 50 pour cent de la demande nationale en eau d'ici 2050.95 94 Groupe de la Banque africaine de développement. (2023). « Union des Comores : Etude Economique et Sectorielle : Profil Sectoriel Eau et Assainissement Des Comores ». 95 On suppose que les prélèvements actuels et futurs conservent la même répartition sectorielle. La population actuelle est estimée à 821 000 habitants, et devrait atteindre 1,25 million d’ici 2050 (Perspectives démographiques des Nations Unies). La demande en eau projetée en 2050 est tirée de l’Union des Comores (2002), telle que rapportée dans le SADRI. La demande industrielle et domestique était répartie entre les îles en fonction des populations insulaires. La demande agricole a été répartie en fonction des besoins en eau d’irrigation pour chaque île. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 53 Figure 20. Projections de la demande en eau par Figure 21. Projections de la demande en eau par secteur à Ngazidja secteur sur Mwali 9.00 10.00 8.00 9.00 8.00 Demande (Mm³/AN) 7.00 Demande (Mm³/AN) 7.00 6.00 6.00 5.00 5.00 4.00 4.00 3.00 3.00 2.00 2.00 1.00 1.00 - - Historical 2050 Historical 2050 INDUSTRIELLE 0.48 0.73 INDUSTRIELLE 0.06 0.10 DOMESTIQUE 4.56 6.96 DOMESTIQUE 0.62 0.95 AGRICOLE 0.53 0.82 AGRICOLE 5.36 8.16 INDUSTRIELLE DOMESTIQUE AGRICOLE INDUSTRIELLE DOMESTIQUE AGRICOLE Source : Calculs de la Banque mondiale Source : Calculs de la Banque mondiale Figure 22. Projections de la demande en eau par secteur à Ndzuwani 12.00 Demande (Mm³/AN) 10.00 8.00 6.00 4.00 2.00 - Historical 2050 INDUSTRIELLE 0.41 0.63 DOMESTIQUE 3.94 6.01 AGRICOLE 3.03 4.65 INDUSTRIELLE DOMESTIQUE AGRICOLE Source : Calculs de la Banque mondiale La comparaison des projections de la demande future avec les rendements en eau de surface au niveau du bassin peut aider à repérer les bassins qui ont le plus besoin de stockage supplémentaire. 96 Au niveau des îles, le ruissellement total à Ngazidja, Mwali et Ndzuwani est suffisant pour répondre à la fois aux demandes actuelles en eau et à celles à l’horizon 2050, même pendant les mois les plus secs (Figure 23, Figure 24 et Figure 25), étant donné que les lignes de demande en pointillés ne croisent jamais les lignes de rendement du bassin, même si le changement climatique réduit les rendements dans certains scénarios climatiques futurs. Les rendements en eaux de surface sont généralement les plus élevés à Ngazidja et les plus faibles à Mwali. Les projections de demande pour Mwali sont celles qui se rapprochent le plus des rendements en eau de surface de l’île. 96 Cette analyse s’appuie sur l’élaboration de courbes mensuelles de rendement de stockage pour chaque bassin. Cet exercice fournit des informations sur le rendement fiable en eau de surface qu’un certain bassin peut fournir compte tenu d’une certaine ampleur de ruissellement et d’un certain volume de stockage. Si les rendements du bassin ne parviennent pas à répondre à la demande, cela indique qu’il faudrait éventuellement envisager des investissements supplémentaires dans les infrastructures de stockage. 54 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure 23. Courbe de rendement effectif du Figure 24. Courbe de rendement effectif du stockage pour tous les bassins de Ngazidja stockage pour tous les bassins de Mwali 25 3.5 RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) 3 20 2.5 15 2 10 2050 2050 HISTORIQUE 1.5 HISTORIQUE PRÉLÈVEMENTS (2019) PRÉLÈVEMENTS (2019) 5 PRÉLÈVEMENTS (2050) 1 PRÉLÈVEMENTS (2050) 0.5 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 0 2 6 6 8 10 12 STOCKAGE DU BASSIN (MM³) STOCKAGE DU BASSIN (MM³) Source : Calculs FIGURE 25 de la Banque mondiale Source : Calculs de la Banque mondiale Figure 25. Courbe de rendement effectif du stockage pour tous les bassins de Ndzuwani 12 RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) 11 10 9 8 7 6 2050 HISTORIQUE 5 PRÉLÈVEMENTS (2019) 4 PRÉLÈVEMENTS (2050) 3 2 1 0 20 40 60 80 100 STOCKAGE DU BASSIN (MM³) Source : Calculs de la Banque mondiale Cependant, le ruissellement rapide sur les pentes abruptes des Comores et la forte infiltration dans les sols volcaniques limitent probablement la part du ruissellement qui peut être exploitée pour répondre à la demande en eau. En raison de l’incertitude concernant la part du ruissellement réellement disponible pour utilisation, le rendement effectif par bassin a été évalué en supposant que différentes proportions des eaux de ruissellement sont exploitables. À l’échelle de l’île, le ruissellement total à Ngazidja devient insuffisant pour couvrir les demandes actuelles et projetées à l’horizon 2050 (lignes horizontales en pointillés) lorsque moins de 20 pour cent du ruissellement est disponible pour utilisation (Figure 26), nécessitant alors au moins 4 millions de m³ (MCM) de stockage pour répondre de manière fiable à la demande future. Si l’on suppose que seulement 10 pour cent du ruissellement est exploitable, les rendements futurs des bassins ne seront pas suffisants pour couvrir la demande, quelle que soit la capacité de stockage développée (Figure 27). Comme les travaux du Programme des Nations Unies pour le développement le font ressortir, la part de ruissellement réellement disponible pourrait être encore plus faible à Ngazidja, avec jusqu’à 95 pour cent du ruissellement s’infiltrant dans les sols. 97 À Mwali (Figure 28) et Ndzuwani (Figure 29), le ruissellement total est plus limité qu’à Ngazidja, devenant insuffisant pour répondre aux demandes actuelles et projetées à l’horizon 2050 lorsque moins de 60 pour cent et 50 pour cent du ruissellement, respectivement, sont supposés être disponibles pour utilisation. À mesure que la part des eaux de ruissellement exploitables diminue, il faut augmenter les capacités de stockage pour répondre à la demande future dans un contexte de changement climatique. 97 Programme des Nations Unies pour le développement. 2018 Assurer un approvisionnement en eau résilient au changement climatique aux Comores. https://www.undp.org/sites/g/files/zskgke326/files/migration/km/FP-UNDP-230518-5740-Annex_VI_b- ESMF-EN.pdf {ut } RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 55 FIGURE 26 FIGURE 27 Figure 26. Analyse de sensibilité pour tous Figure 27. Analyse de sensibilité pour tous les bassins de Ngazidja à 20 pour cent du les bassins de Ngazidja à 10 pour cent du ruissellement exploitable ruissellement exploitable RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) 1 0.7 0.6 0.8 0.5 0.6 0.4 2050 HISTORIQUE PRÉLÈVEMENTS (2019) 0.4 0.3 PRÉLÈVEMENTS (2050) 2050 HISTORIQUE PRÉLÈVEMENTS (2019) 0.2 0.2 PRÉLÈVEMENTS (2050) 0.1 20% DES RUISSELLEMENT DEVRAIENT ÊTRE RÉCUPÉRABLES 10% DES RUISSELLEMENT DEVRAIENT ÊTRE RÉCUPÉRABLES 0 0 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 STOCKAGE DU BASSIN (MM³) STOCKAGE DU BASSIN (MM³) FIGURE Source 28 : Calculs de la Banque mondiale FIGURE Source 29 : Calculs de la Banque mondiale Figure 28. Analyse de sensibilité pour tous les Figure 29. Analyse de sensibilité pour tous bassins de Mwali à 60 pour cent du ruissellement les bassins de Ndzuwani à 50 pour cent du exploitable ruissellement exploitable 1.8 3 RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) RENDEMENT DU BASSIN (MM³/MOIS) 1.6 2.5 1.4 1.2 2050 2 HISTORIQUE 2050 1 PRÉLÈVEMENTS (2019) PRÉLÈVEMENTS (2050) HISTORIQUE 1.5 0.8 PRÉLÈVEMENTS (2019) PRÉLÈVEMENTS (2050) 0.6 1 0.4 0.5 0.2 60% DES RUISSELLEMENT DEVRAIENT ÊTRE RÉCUPÉRABLES 50% DES RUISSELLEMENT DEVRAIENT ÊTRE RÉCUPÉRABLES 0 0 0 2 4 6 8 10 12 14 16 0 10 20 30 40 50 STOCKAGE DU BASSIN (MM³) STOCKAGE DU BASSIN (MM³) Source : Calculs de la Banque mondiale Source : Calculs de la Banque mondiale En matière d’approvisionnement en eau, le pays souffre d’un manque de prises d’eau protégées et de systèmes de distribution efficaces, tant sur le plan des infrastructures que de la technologie. Les fournisseurs de services d’eau ne parviennent pas à assurer des niveaux adéquats de fonctionnement et d’entretien des infrastructures existantes. Dans la région urbaine et périurbaine de Ngazidja, seulement 34 pour cent du volume total d’eau est mesuré. Les pertes d’eau dues aux fuites ne font pas l’objet d’une surveillance rigoureuse, mais elles sont estimées à environ 50 pour cent à Ngazidja et Ndzuwani.98 Étant déjà peu disponible, l’eau potable aux Comores est de mauvaise qualité. Le stockage de l’eau, qu’il soit individuel ou collectif, présente souvent des risques sanitaires en raison de la contamination bactérienne, de la prolifération des moustiques et de la présence de déchets ou de poussières, autant de facteurs qui accroissent le risque de maladies d’origine hydrique, les coûts de traitement de l’eau et le temps que les ménages doivent consacrer à rendre l’eau potable. Ces problèmes de qualité sont aggravés par le manque de surveillance adéquate des paramètres chimiques et microbiologiques, les analyses étant limitées à une fois par semaine et réalisées dans un petit nombre de sites. Par ailleurs, à mesure que les sources d’eau potable deviennent plus rares, les femmes et les filles en milieu rural auront à consacrer 98 World Bank 2023e 56 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT davantage de temps à la collecte de l’eau et du bois de chauffage, au détriment des activités productives ou de l’éducation. Actuellement, les femmes et les filles passent jusqu’à deux heures par jour à aller chercher de l’eau, ce qui réduit le temps dont elles peuvent disposer pour le travail ou les études d’environ 25 pour cent. Malgré les progrès réalisés en matière d’assainissement et d’hygiène suite à l’émergence de la COVID-19, l’accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène reste faible.99 Selon le profil du secteur de l’eau et de l’assainissement aux Comores, en 2022, seulement 30 pour cent de la population avait accès à une eau potable gérée en toute sécurité, tandis que 55 pour cent bénéficiaient d’un assainissement géré en toute sécurité100. En 2019, l’accès aux services de base en matière d’eau potable atteignait environ 80 pour cent, un taux supérieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne. Cependant l’accès aux services d’assainissement de base reste inférieur aux moyennes régionales et cette situation appelle à des investissements importants. Bien que l’accès à l’eau potable soit plus élevé en milieu urbain qu’en milieu rural, la dégradation des infrastructures d’approvisionnement, la forte croissance démographique et l’urbanisation rapide entravent l’accès à une eau de qualité et aggravent les problèmes d’assainissement. Les causes actuelles des maladies d’origine hydrique aux Comores sont multiples et incluent la faible disponibilité de sources d’eau, la mauvaise qualité de l’eau potable, le manque d’installations sanitaires et les mauvaises pratiques d’hygiène. Tous ces facteurs peuvent être aggravés par les pressions exercées par le changement climatique, telles que les inondations, les glissements de terrain, la modification de la disponibilité des ressources en eau et l’augmentation des températures. Le pays connaît déjà une forte prévalence des maladies diarrhéiques, avec un taux de 17 pour cent. Les périodes de forte pluviométrie ont été suivies par le passé d’une augmentation des maladies diarrhéiques et d’autres maladies d’origine hydrique, en raison de la contamination des sources d’eau et de la destruction des infrastructures d’approvisionnement en eau et d’assainissement. Par exemple, après les fortes pluies d’avril 2024, les Comores ont enregistré une hausse des cas de choléra, avec un total de 1 111 nouveaux cas signalés entre le 9 et le 12 mai, compte tenu de la forte dépendance aux eaux de surface. L’augmentation des températures due au changement climatique entraînera une hausse de la prévalence des maladies d’origine hydrique, avec des conséquences négatives sur le capital humain et en matière de pauvreté. Il est connu que la pollution bactériologique de l’eau potable, déjà préoccupante aux Comores, s’aggrave lorsque les températures ambiantes augmentent, étant donné que les taux de croissance des bactéries sont plus élevés dans ces conditions. L’analyse modélisée101 présentée ci-dessous tient compte des impacts de l’augmentation des températures en termes de maladies d’origine hydrique dans le cadre du changement climatique. Sans investissements supplémentaires dans les secteurs de l’eau, de l’assainissement et de l’hygiène, les Comores devraient subir un choc de -0,5 pour cent en matière d’offre de main-d’œuvre d’ici 2050, en raison de la recrudescence des maladies d’origine hydrique (volet gauche de la Figure 30). Ces chocs climatiques risquent d’aggraver la vulnérabilité et la pauvreté des segments les plus défavorisés de la population. Le développement d’infrastructures hydrauliques résilientes au changement climatique sera essentiel pour le bien-être socioéconomique des Comores et la réalisation des objectifs de développement. Les principaux axes d’intervention incluent l’amélioration de l’accès à l’eau et à l’assainissement à travers le renforcement du système de distribution d’eau, le développement des infrastructures d’assainissement, 99 Nations Unies.2020 100 Groupe de la Banque africaine de développement. 101 Plus précisément, la méthodologie appliquée par Wolf et al. (2019) est appliquée. Cette méthodologie repose sur une relation statistique entre un indice composite de contamination fécale et le risque relatif de maladies diarrhéiques. L’indice utilise une rubrique pour attribuer une valeur 0, 1 ou 2 à huit indicateurs liés à l’accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène. Les risques relatifs résultants sont ensuite calibrés pour les Comores à l’aide de données rapportées sur la mortalité et la morbidité liées à l’inadéquation des infrastructures d’eau, d’assainissement et d’hygiène. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 57 l’amélioration de la qualité de l’eau et l’expansion des infrastructures de stockage. Une modélisation a été réalisée pour évaluer les gains potentiels en matière d’offre de main-d’œuvre suite aux investissements dans l’élargissement de la couverture des services d’eau, d’assainissement et d’hygiène. Plus précisément, des investissements en faveur de la couverture universelle en eau, assainissement et hygiène d’ici 2050 permettraient d’augmenter l’offre de main-d’œuvre d’environ 2,2 pour cent à l’horizon 2050 (volet droite de la Figure 30), contre une baisse projetée d’environ -0,5 pour cent en raison des impacts climatiques, en l’absence d’investissement supplémentaire (volet gauche de la Figure 30). Cet objectif est conforme aux ambitions du pays de parvenir aux cibles fixées par l’Objectif de développement durable (ODD) 6, à savoir garantir à tous un accès universel et équitable à une eau potable sûre, ainsi qu’à des services d’assainissement et d’hygiène adéquats d’ici 2030. Cependant, compte tenu des défis actuels, il est peu probable que cet objectif soit réalisé à l’échéance de 2030102, et l’analyse de modélisation repose sur une date cible fixée à 2050. Figure 30. Choc en matière d’’offre de main-d’œuvre dû à l’impact de la hausse des températures FIGUREau suite 30 changement climatique sur les maladies d’origine hydrique (à gauche) et à l’augmentation des investissements dans l’eau, l’assainissement et l’hygiène (à droite) Référence Adaptation 2.5% 2.0% 1.5% 1.0% 0.5% 0.0% -0.5% 2020 2030 2040 2050 2020 2030 2040 2050 MCG Secs/Très chauds MCG Humides/Chauds Moyenne Moyenne individuels individuels Secs/très chauds Humides/Chauds Source : Calculs de la Banque mondiale En outre, les solutions fondées sur la nature, telles que la conservation des zones humides communautaires, la reforestation et l’élargissement de la collecte des eaux de pluie, peuvent contribuer à l’adaptation aux problèmes d’approvisionnement en eau et de qualité de l’eau exacerbés par le changement climatique. Les zones humides jouent un rôle essentiel dans la régulation de l’approvisionnement en eau et dans l’amélioration de sa qualité, du fait qu’elles soutiennent la biodiversité et en offrent un moyen de lutte naturel contre les inondations. Leur conservation peut permettre de réduire les risques d’inondation et de favoriser la recharge des nappes souterraines sur l’ensemble des îles du pays. Le reboisement contribue à augmenter la couverture forestière, à améliorer la recharge des eaux souterraines et à stabiliser les berges des rivières. Par ailleurs, le recours accru aux techniques de collecte et de stockage des eaux de pluie permet d’accroître le volume d’eau disponible. 102 Présidence de L’Union des Comores. 2020 58 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Un développement résilient au changement climatique nécessitera un renforcement des institutions et la mise en place de systèmes fiables de collecte de données numériques en temps réel pour éclairer la prise de décision. À ce jour, la gestion efficace de l’eau a été entravée par un cadre institutionnel et juridique fragmenté et peu performant. La Constitution de 2011 a introduit un processus de décentralisation, transférant la gestion de l’eau aux acteurs locaux, ce qui a conduit à une fragmentation institutionnelle et à des résultats globalement inefficaces. Bien que des efforts soient en cours pour renforcer les cadres existants dans le secteur de l’eau, des améliorations restent nécessaires. Par ailleurs, les Comores présentent d’importantes lacunes en matière de collecte d’informations sur des indicateurs clés, essentiels pour orienter les décisions fondées sur des données factuelles, planifier les investissements et assurer une gestion durable de l’eau et de l’assainissement. Ces lacunes concernent notamment les données sur la disponibilité des eaux de surface et des eaux souterraines, leur qualité physique et chimique, ainsi que l’accès à l’eau potable et aux services d’assainissement, particulièrement dans les zones urbaines. Des solutions numériques, telles que les systèmes d’information géographique (SIG), les données satellitaires et les technologies de télédétection, peuvent être utilisées pour améliorer la gestion des catastrophes en temps réel et la diffusion de l’information, comme l’illustrent les projets de la Banque mondiale aux Maldives. 103 Enfin, bien que cela ne relève pas directement de la gestion de l’eau, le renforcement du secteur de la santé sera également indispensable pour limiter les impacts des maladies d’origine hydrique, en parallèle aux investissements dans les infrastructures d’eau, d’assainissement et d’hygiène. Certains efforts sont déjà en cours, notamment la modernisation de l’hôpital El-Maarouf à Ngazidja, le renforcement des services de santé communautaires et la subvention des traitements médicaux pour les populations à faible revenu, dans le cadre d’un programme d’investissement de 90 millions USD. Le développement résilient au changement climatique dans le secteur de l’eau reposera idéalement sur les principes de gestion intégrée des ressources en eau, visant à encourager le développement et la gestion coordonnée de l’eau, des terres et des ressources connexes, afin de maximiser le bien-être économique et social de manière équitable, tout en préservant la durabilité des écosystèmes vitaux. Ce cadre est inscrit dans la Stratégie de croissance accélérée et de développement durable des Comores pour la période 2018- 2021, qui met l’accent sur la restauration des paysages et la gestion durable des bassins versants, comme une approche globale pour renforcer la sécurité de l’eau dans le pays, tout en tenant compte de la gestion du capital naturel des îles. 3.4 Augmentation de la capacité de production d’énergie renouvelable Le secteur énergétique des Comores est particulièrement vulnérable en raison de la forte dépendance du pays aux combustibles fossiles importés pour la production d’électricité. Selon l’Agence internationale pour les énergies renouvelables, les sources d’énergie non renouvelables, principalement le pétrole, représentent 62 pour cent de l’approvisionnement énergétique total des Comores, contre seulement 38 pour cent provenant de sources renouvelables.104 Entre 2018 et 2023, le volume des importations de pétrole et de gaz a augmenté d’environ 24,5 pour cent105en raison de la demande croissante de carburant. La capacité potentielle de production d’électricité sur les trois îles est estimée à environ 39,6 MW, dont seulement 18,81 MW (soit 47,5 pour cent) ont été développés. Cette capacité inclut 6 MW d’énergie solaire fournis par des producteurs indépendants et 607 kW d’énergie hydraulique. Cependant, la capacité installée actuelle reste insuffisante pour répondre à la demande nationale de pointe, estimée à 26,2 MW. La production thermique représente 95 pour cent (106 GWh) de l’électricité produite, tandis que les énergies renouvelables ne contribuent qu’à hauteur de 5 pour cent (6,2 GWh). 103 https://blogs.worldbank.org/en/endpovertyinsouthasia/maldives-turning-digital-innovations-tackle-climate-change 104 IRENA 2024 Comores : Profil énergétique. https://www.irena.org/-/media/Files/IRENA/Agency/Statistics/Statistical_Profiles/Africa/ Comoros_Africa_RE_SP.pdf 105 FMI. 2024 Entreprises d’État : Pétrole et gaz aux Comores. https://doi.org/10.5089/9798400263125.002 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 59 Le coût élevé de la production d’électricité aux Comores entraîne des tarifs élevés pour les utilisateurs finaux, qui restent toutefois inférieurs aux niveaux nécessaires pour assurer le recouvrement des coûts. Le tarif moyen facturé aux consommateurs est de 0,43 USD par kWh, alors que le coût de production s’élève à 0,76 USD par kWh106. Cette situation s’explique principalement par les coûts de production élevés, en raison de la forte dépendance du pays à la production d’électricité thermique au diesel. En tant que petit archipel, les Comores disposent d’un faible accès aux marchés internationaux des matières premières, en raison des faibles économies d’échelle et des contraintes liées à la chaîne d’approvisionnement en carburant. L’incapacité de la Société Nationale d’Électricité des Comores (SONELEC) à recouvrer ses coûts via les tarifs d’électricité rend l’entreprise dépendante des subventions publiques. Le gouvernement consacre environ 22 millions USD par an à la SONELEC pour financer les subventions au carburant, le budget de fonctionnement et l’achat d’équipements, tels que des générateurs. Malgré ces subventions, la SONELEC continue d’accumuler d’importantes dettes, à la fois envers ses fournisseurs et envers les administrations fiscales. La SONELEC encourt des pertes importantes en raison de la vétusté des infrastructures, et les services d’électricité restent mauvais malgré un taux d’accès relativement élevé. Les pertes techniques et commerciales cumulées sont estimées à 31 pour cent, en raison d’un système de gestion de l’information défaillant, du manque de surveillance à distance, des temps d’arrêt accumulés dus à des surtaxes localisées du réseau et de l’absence de lignes de transmission et de distribution alternatives pour faciliter la maintenance de routine. Cette situation entraîne des interruptions de service prolongées, qu’elles soient programmées ou non. En outre, l’absence de cadres institutionnels, notamment d’un organisme de régulation énergétique actif, représente un défi supplémentaire pour la gouvernance du secteur. Le taux d’accès à l’énergie est de 94,7 pour cent à Ngazidja, 48,8 pour cent à Ndzuwani et 86,8 pour cent à Mwali. Malgré ces taux d’accès, la qualité des services d’électricité reste médiocre. Bien que les Comores disposent d’un fort potentiel de développement des énergies renouvelables, notamment solaires, ces ressources restent sous-exploitées. Les systèmes solaires photovoltaïques et de stockage offrent un important potentiel pour contribuer à la réduction des coûts de production de la SONELEC et à l’amélioration de la qualité de ses services. Malgré ce potentiel, l’utilisation des énergies renouvelables reste limitée à moins de 970 kW de capacités hydroélectriques, principalement sous forme de microcentrales à Ndzuwani et Mwali, et à 6 MW d’énergie solaire développés par deux producteurs d’électricité indépendants. En outre, 3 MW supplémentaires d’énergie solaire sont actuellement en construction, tandis que des efforts préliminaires sont en cours pour le développement à long terme de l’énergie géothermique. Par ailleurs, le projet d’accès à l’énergie solaire aux Comores, financé par la Banque mondiale, soutient le développement de 9 MW d’énergie solaire photovoltaïque supplémentaires, accompagnés de systèmes de stockage d’énergie par batterie d’une capacité totale de 19 MWh, dont l’achèvement est prévu pour décembre 2025. Les infrastructures énergétiques des Comores, notamment les installations de production d’électricité ainsi que les lignes de transport et de distribution, sont particulièrement vulnérables aux risques climatiques, mettant en lumière la nécessité de concevoir des infrastructures électriques résilientes. Les inondations, les glissements de terrain, les tempêtes tropicales107 et les épisodes de chaleur extrême devraient s’intensifier avec le changement climatique, augmentant ainsi les risques de dommages aux infrastructures. Dans ce contexte, il sera essentiel pour les Comores d’intégrer les considérations de résilience et d’adaptation climatique dans leurs plans de transition vers un secteur énergétique à faible émission de carbone. À cet effet, le gouvernement a finalisé son Plan de développement à moindre coût pour la période 2024-2043. 106 GMI Rapport pays I n° 24/5. Union des Comores. 107 Le cyclone Kenneth de 2019 a causé des dommages importants aux infrastructures de la SONELEC, le budget du redressement étant évalué à environ 3,5 millions USD. Les implications d’une transition énergétique pour la résilience nécessaire des études plus approfondies. 60 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Ce plan vise à accroître la production d’énergies renouvelables (solaire, hydroélectrique et géothermique) à hauteur de 33 MW d’ici 2030, afin de réduire la dépendance locale aux combustibles fossiles. 108 Le volcan Karthala, situé sur l’île de Ngazidja, est reconnu comme un site potentiel d’exploration géothermique. Bien que des études de surface aient déjà été réalisées, le manque d’expertise technique et les coûts élevés liés à l’exploration demeurent des obstacles majeurs au développement de projets géothermiques. Le taux de croissance moyen de la production d’énergie sur la période couverte par le Plan est estimé à 7,5 pour cent pour Ngazidja, 10 pour cent pour Ndzuwani et 8,7 pour cent pour Mwali. Cependant, malgré la baisse des coûts de production des énergies renouvelables à l’échelle mondiale, les Comores continueront à produire de l’électricité à partir de combustibles fossiles pour répondre à la demande de pointe, en raison du caractère intermittent des énergies renouvelables, qui les rend peu adaptées à la fourniture de la charge de base. Des simulations d’optimisation ont été réalisées en vue de l’élaboration d’un plan de production optimal pour les trois îles, permettant d’équilibrer les besoins futurs en énergie électrique tout en assurant la stabilité et la résilience du réseau (Figure 31). Pour Ngazidja, la stratégie optimale met l’accent sur l’adoption de l’énergie géothermique comme élément central du mix énergétique, avec une transition progressive vers l’énergie solaire soutenue par des systèmes de stockage sur batterie. En parallèle, il est recommandé de moderniser l’infrastructure de production thermique avec des technologies de pointe capables d’adapter dynamiquement la production d’énergie à la demande des consommateurs, tout en gérant les fluctuations rapides associées à la production solaire. Pour Ndzuwani, la stratégie optimale prévoit une intégration progressive des systèmes solaires photovoltaïques combinés à des solutions de stockage sur batterie, ainsi qu’une expansion de la capacité de production thermique. Cette expansion inclut une transition des centrales thermiques actuelles vers l’utilisation de bioliquides et/ou de biomasse solide, principalement importés, à mesure que ces technologies deviennent plus accessibles. À Mwali, la stratégie optimale repose sur une augmentation substantielle de la capacité solaire, qui devrait représenter 55 pour cent de la capacité totale installée et environ 30 pour cent de la production énergétique. Cette capacité solaire serait accompagnée du déploiement de solutions de stockage pour prendre en charge l’intermittence de la production. Cependant, la production thermique restera essentielle à court terme pour Mwali et Ndzuwani afin de garantir une alimentation électrique fiable et d’atténuer les impacts des variations intermittentes de l’offre d’énergie renouvelable. Enfin, l’excédent d’électricité produit par les énergies renouvelables, qui pourrait dépasser 50 pour cent de la demande à certains moments, devra être soit stocké, soit plafonné afin d’éviter toute surcharge du système électrique. La modernisation des infrastructures de transmission d’électricité sera un levier essentiel pour encourager les investissements dans la production d’énergie. À Ngazidja, il est recommandé de remplacer les conducteurs existants, de renforcer le réseau 20 kV, de construire sept nouveaux postes de transformation 63/20 kV et d’établir un réseau de transport de 63 kV afin d’améliorer l’efficacité du transport d’électricité, de maintenir une tension stable sur l’ensemble de l’île et de réduire les pertes. À Ndzuwani, le réseau de transport devra être idéalement renforcé par l’installation de nouveaux conducteurs, la création d’un réseau de transport de 63 kV et la construction de nouvelles sous-stations 63/20 kV à des emplacements stratégiques. Pour Mwali, le système actuel de transport d’électricité est jugé suffisant pour répondre aux besoins de l’île. La division du réseau en deux lignes d’alimentation permettrait d’optimiser la distribution de l’électricité. La construction d’un réseau de transport de 63 kV n’est pas considérée comme nécessaire, compte tenu des prévisions de consommation de pointe relativement faibles à court et à long terme. 108 Registre de la CDN des Comores. Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 61 Figure 31. Déploiement optimal de l’énergie produite dans le cadre du plan de développement à moindre coût NGAZIDJA 500 450 400 350 DÉFAILLANCE 300 Gwh DIESEL FUTUR DIESEL EXISTANT 250 HFO FUTUR SOLAIRE 200 GEOTHERMIE FUTUR 150 DEMANDE 100 50 0 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030 2031 2032 2033 2034 2035 2036 2037 2038 2039 2040 2041 2042 2043 NDZUWANI 250 200 Gwh 150 DÉFAILLANCE EnR 100 DIESEL FUTUR DIESEL EXISTANT TRATINGA 50 LINGONI MARAHANI DEMANDE 0 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030 2031 2032 2033 2034 2035 2036 2037 2038 2039 2040 2041 2042 2043 MWALI 40 35 30 25 Gwh DÉFAILLANCE 20 DIESEL FUTUR DIESEL EXISTANT 15 SOLAire DEMANDE 10 5 0 2024 2025 2026 2027 2028 2029 2030 2031 2032 2033 2034 2035 2036 2037 2038 2039 2040 2041 2042 2043 Source : Calculs de la Banque mondiale 62 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT La mise en œuvre du Plan de développement à moindre coût aux Comores nécessitera un investissement total estimé à 902 millions USD entre 2024 et 2043. 109 Les coûts de production d'électricité sur cette période sont évalués à 822 millions USD, avec une production cumulée atteignant 4 520 GWh et un coût moyen de 18,2 cents par kWh. Sur la même période, les coûts liés au transport d'électricité sont estimés à 80 millions USD, pour une demande totale prévue de 4 295 GWh, ce qui correspond à un coût actualisé de transport et de distribution de 1,9 cent par kWh110. L'augmentation de la part des énergies renouvelables dans le mix énergétique pourrait contribuer à réduire le coût moyen de production d'électricité, actuellement estimé à 35 centimes de dollar par kWh, diminuant ainsi les transferts financiers de l'État vers la SONELEC. Les émissions de CO2 projetées dans le cadre du Plan de développement à moindre coût varient selon les îles. Pour Ngazidja, elles sont estimées à 1 148 tonnes de CO2, soit environ 197 gCO2 eq/kWh en fonction de la demande anticipée. À Ndzuwani, les émissions sont évaluées à 1 018 tonnes de CO2, soit 448 gCO2 eq/kWh, tandis qu’à Mwali, elles atteignent environ 221 tonnes de CO2, soit 526 gCO2 eq/kWh. Malgré le potentiel important des Comores en matière d’énergies renouvelables, plusieurs obstacles freinent leur déploiement. À ce jour, le pays ne dispose que de deux installations combinant énergie solaire et stockage sur batterie, d'une capacité de 3 MW chacune. Elles sont exploitées par des producteurs d'électricité indépendants (PPI) : l'une à Ngazidja, gérée par Innovent, et l'autre à Ndzuwani, exploitée par Vigor. Si ces projets témoignent d’un début de participation du secteur privé, les tarifs pratiqués restent élevés et difficilement soutenables, en raison de la concurrence limitée entre les PPI, des risques liés à la situation financière fragile de la SONELEC et de l'absence d'un cadre institutionnel et réglementaire adéquat pour attirer de nouveaux investisseurs. Par ailleurs, les services publics manquent de ressources financières pour investir dans de nouvelles capacités de production, en raison des pertes techniques et commerciales récurrentes111. Pour surmonter ces défis, les Comores pourraient envisager d'explorer des solutions viables en matière d’énergies renouvelables, telles que l’énergie géothermique, tout en accordant la priorité à l’amélioration des infrastructures de transport et de distribution afin de faciliter l'intégration des énergies renouvelables. Il serait également nécessaire de combler les lacunes en termes de compétences et de connaissances spécifiques indispensables au développement des énergies renouvelables dans le pays. En outre, l'expansion de la production d'énergie renouvelable devrait idéalement s'accompagner d'une suppression progressive des subventions aux combustibles fossiles. En 2022, les subventions aux prix des produits pétroliers représentaient 2,5 pour cent du PIB112, la SONELEC étant le principal bénéficiaire de ces subventions. Par ailleurs, les exonérations d'impôts intérieurs, considérées comme des subventions fiscales, représentaient près de 1 pour cent du PIB. 113 À terme, il serait nécessaire de réaliser une analyse détaillée des options envisageables pour supprimer progressivement ces subventions aux combustibles fossiles aux Comores. Une telle analyse permettrait d'examiner l'impact des réductions de ces subventions sur le développement des énergies renouvelables, de définir des pistes viables pour réformer les subventions et de discuter des mécanismes de compensation possibles pour les ménages, en particulier ceux à faible revenu et les populations les plus vulnérables. 109 Pour 2024-2030, le Plan de développement au moindre coût Selon les estimations, un investissement se chiffrant à 318 millions USD sera nécessaire, avec une capacité totale atteignant 110 MW, dont 48 MW d’énergie solaire photovoltaïque avec stockage d’énergie par batterie, 15 MW d’énergie géothermique et 47 MW d’énergie thermique. 110 Les coûts ont été calculés en utilisant un taux d’actualisation de 6 pour cent, et les coûts de production et de transmission ne prennent pas en compte des coûts associés aux nouvelles infrastructures et aux mises à niveau du réseau. 111 BAD. 2018 Plan directeur du secteur de l’électricité aux Comores. 112 FMI. 2024. Entreprises d’État : Pétrole et gaz aux Comores. https://doi.org/10.5089/9798400263125.002 113 FMI. 2024. Entreprises d’État : Pétrole et gaz aux Comores. https://doi.org/10.5089/9798400263125.002 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 63 La transition vers un développement à faible émission de carbone aux Comores constitue un objectif à long terme qui pourrait apporter des bénéfices tangibles, notamment à travers la réduction de la dépendance aux combustibles fossiles importés. En particulier, la diminution des importations de combustibles fossiles pourrait améliorer la balance commerciale du pays en réduisant les pressions financières liées aux coûts d'importation de l'énergie, permettant ainsi de libérer des ressources nationales pour financer des actions climatiques locales. Si cette transition s'accompagne d'une plus grande promotion des énergies renouvelables, elle pourrait non seulement réduire les émissions de gaz à effet de serre, mais également créer des opportunités économiques locales. Cependant, compte tenu du contexte économique actuel et des défis urgents en matière de résilience climatique, cette transition ne peut pas être considérée comme une priorité immédiate. Néanmoins, une approche progressive du déploiement des énergies renouvelables pourrait être envisagée, parallèlement au renforcement de la résilience des communautés et à l'optimisation des financements internationaux et des programmes de transition énergétique. Ainsi, bien que l'accent soit actuellement mis sur la résilience et la réponse aux catastrophes, une planification stratégique à long terme en faveur d'un développement à faible émission de carbone serait bénéfique pour assurer la durabilité financière et environnementale du pays. 64 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 65 © Sachiko Kondo 4. Considérations macrobudgétaires en rapport au changement climatique : orienter l’économie vers une croissance résiliente 4.1. Modélisation macrobudgétaire et scénarios de développement Dans ce chapitre, les impacts du changement climatique sur l’économie sont analysés à l’aide du Modèle macrobudgétaire du changement climatique aux Comores (CC-MFMod). La modélisation macroéconomique effectuée est axée sur l’analyse de l’impact des politiques de lutte contre le changement climatique et d’adaptation sur les résultats économiques et sur la réduction de la pauvreté, examinant les secteurs réel, budgétaire et extérieur. Deux scénarios de développement ont été examinés dans la modélisation macroéconomique. Dans le scénario « sans réforme », aucune réforme majeure n’est entreprise, et l’économie suit sa trajectoire habituelle, se maintenant dans le statu quo. Dans le scénario alternatif « avec réformes », l’Union des Comores met en œuvre des réformes favorisant la croissance du PIB et réalisant une expansion plus inclusive, en accord avec ses plans et stratégies de développement. Aucun des deux scénarios de développement ne prend directement en compte les impacts du changement climatique ou les politiques d’adaptation. Ces effets sont ajoutés à ces scénarios de développement par le biais de huit canaux distincts d’impact climatique, décrits dans le chapitre 4.2. Le scénario sans réforme (Statu quo ou SQ) est basé sur les performances historiques de croissance du pays. Dans ce scénario, la productivité reste faible ou négative, le taux de participation à la population active reste inférieur à 50 pour cent, et l’investissement privé est faible en raison de l’absence d’amélioration de l’environnement des affaires. De plus, l’Union des Comores ne parvient pas à renforcer la mobilisation de ses ressources nationales. En conséquence, la croissance du PIB atteindrait en moyenne 3,2 points de pourcentage entre 2025 et 2050, soit à peine au-dessus du taux de croissance démographique, tandis que le PIB par habitant augmenterait en moyenne de 1,5 pour cent sur la même période. Le PIB par habitant atteindrait 1 891 USD à l’horizon 2050, tandis que le taux de pauvreté s’établirait à environ 27 pour cent à cette même échéance. Le scénario « avec réformes » (REC) propose une trajectoire permettant au pays de se rapprocher des ambitions définies dans le Plan Comores Émergent qui est la stratégie nationale de développement. Selon les hypothèses de ce scénario, les réformes nécessaires sont mises en œuvre et l’investissement privé augmente significativement. De plus, il est supposé que l’Union des Comores renforce sa capacité à mobiliser ses ressources internes. La création de cet espace budgétaire permet de financer de nouveaux investissements, tandis que l’accès à des financements concessionnels pourrait en réduire le coût. Dans ce scénario, il est supposé que l’Union des Comores amorce sa transformation économique, marquée par une diminution de la part de la valeur ajoutée agricole dans le PIB, une expansion des activités de pêche et de tourisme, ainsi qu’une augmentation de la productivité. En conséquence, la croissance du PIB atteindrait en moyenne 4,6 points de pourcentage entre 2025 et 2050, tandis que le PIB par habitant augmenterait de 2,9 pour cent par an. Dans cette trajectoire de développement, le taux de pauvreté devrait s’établir à environ 13 pour cent d’ici 2050. Pour modifier la trajectoire de développement des Comores, il est nécessaire d’agir dans trois domaines clés : mobiliser l’investissement privé, renforcer les institutions et accroître la résilience économique. Pour mobiliser l’investissement privé, il faudrait améliorer l’environnement des affaires, renforcer l’intermédiation financière afin de faciliter l’accès au crédit, attirer les flux d’investissements directs étrangers ainsi que concevoir et mettre en œuvre des réglementations favorisant la concurrence entre les entreprises publiques et privées. Le renforcement des institutions englobe plusieurs actions : améliorer le cadre de redevabilité des hauts fonctionnaires pour favoriser la réalisation des résultats des programmes ; accroître 66 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT l’efficience des dépenses publiques ; mettre en place des réglementations et des mécanismes garantissant un financement durable pour le développement du tourisme ainsi qu’un accès régulier aux données de veille commerciale ; développer les capacités nationales à évaluer les ressources halieutiques ; et mettre en œuvre les engagements pris dans le cadre des accords de l’Organisation mondiale du commerce. Le renforcement de la résilience économique passe par des investissements dans les services de base et les infrastructures de gestion des déchets, l’amélioration du capital humain, la gestion durable des ressources naturelles, la restauration des écosystèmes et de la biodiversité, ainsi que par le renforcement de l’inclusion financière. L’un des aspects clés du renforcement de la résilience économique consiste à améliorer la gestion budgétaire, notamment à travers une plus grande mobilisation des ressources internes, ainsi que la gestion et les politiques de la dette publique.114 4.2. Évaluation des impacts du changement climatique et de l’adaptation au changement climatique sur l’économie Les effets du changement climatique sont évalués à travers différents canaux d’impact, qui s’ajoutent aux scénarios de développement « sans réforme » et « avec réforme » décrits précédemment. Les canaux d’impact évalués couvrent quatre catégories thématiques : § Santé humaine et développement : Ces canaux sont centrés sur l’impact des chocs climatiques sur la productivité du travail et l’offre de main-d’œuvre. Dans le premier canal, l’analyse porte sur l’impact négatif de la hausse des températures sur la capacité des travailleurs à accomplir leurs tâches, et donc sur la productivité du travail. Dans le deuxième canal, elle porte sur l’effet de la hausse des températures sur l’incidence et la mortalité des maladies d’origine hydrique, ainsi que le rôle des investissements dans les infrastructures d’eau, d’assainissement et d’hygiène dans l’atténuation de ces impacts sur l’offre de main-d’œuvre. § Eau, agriculture et terre : Cette catégorie de canaux porte sur l’impact du changement climatique sur la production agricole, notamment à travers les variations de rendement et l’érosion de la couche arable. La production agricole repose sur des fonctions de réponse des rendements spécifiques à chaque culture, définies par la disponibilité en eau et le stress thermique. Les variations des précipitations affectent l’érosion de la couche arable (érosivité), qui à son tour affecte la production agricole. § Infrastructures : Le changement climatique peut provoquer une détérioration des infrastructures à travers une augmentation de la fréquence, de l’intensité, de la durée et de l’ampleur des phénomènes extrêmes ; ces derniers peuvent entraîner des inondations intérieures, une élévation du niveau de la mer et des dégâts matériels, notamment aux routes et aux ponts. Ces dommages peuvent entraîner une augmentation des coûts de réparation et d’entretien des infrastructures, tout en ayant des répercussions sur l’offre de main-d’œuvre suite aux retards liés à l’usage des infrastructures. § Capital naturel : Le changement climatique peut affecter le capital naturel marin et la production halieutique qui en dépend. Dans ce canal, les variations du potentiel de prise maximale dues à la hausse des températures des océans sont estimées. Selon les résultats de la modélisation, les mesures de mise en œuvre des réformes atténueront légèrement l’ampleur des impacts climatiques par rapport à un scénario sans réformes ; cependant, les impacts résiduels resteront significatifs vers les années 2050. Sans mesures d’adaptation, dans le scénario SQ, les variations annuelles moyennes du PIB et de la consommation par habitant des ménages oscillent entre -4,8 pour cent et -6,6 pour cent d’ici les années 2040, les impacts étant plus prononcés dans le scénario de climat sec/très chaud (pessimiste) (volet gauche de la Figure 32). Dans le scénario de climat sec/très chaud, 114 Pour explorer des options politiques supplémentaires en appui à la transformation économique, consultez la Banque mondiale (2023). Country Economic Memorandum : Boosting Growth for Greater Opportunities. Washington DC : Banque mondiale. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 67 sans mesures d’adaptation mais avec réformes, les taux de pauvreté pourraient augmenter à concurrence de 5,4 points de pourcentage (volet gauche de la Figure 33). Sans mesures d’adaptation, le scénario « avec réformes » (REC) présente des variations annuelles moyennes du PIB et de la consommation par habitant des ménages allant de -4,3 pour cent à -5,8 pour cent d’ici les années 2040, l’impact étant moins prononcé que celui observé dans le scénario SQ (volet droite de la Figure 32). Au cas où seules des mesures de réforme pour le développement sont mises en œuvre, la pauvreté aux Comores devrait augmenter d’environ 2,7 points de pourcentage d’ici 2050 dans le cadre du scénario climatique pessimiste (volet droite de la Figure 33). En comparant les scénarios SQ et REC, il semblerait que les réformes pour le développement peuvent contribuer à renforcer la résilience des Comores face aux impacts du changement climatique ; cependant, les impacts climatiques récurrents et de plus en plus fréquents d’ici 2050 restent significatifs, même dans le cadre du REC, en particulier dans un scénario de climat sec/très chaud très pessimiste. Les contributions aux pertes économiques totales varient selon les différents canaux d’impact (Figure 34). Dans les scénarios SQ et REC, les pertes économiques les plus significatives en rapport au changement climatique proviendraient de la baisse de la productivité du travail causée par le stress thermique (canal d’impact du stress thermique sur le travail) et de la diminution de la productivité agricole (canaux d’impact sur le rendement des cultures et l’érosion des sols). FIGURE 32 Figure 32. Politiques actuelles en matière de changement climatique : Variations annuelles moyennes dans les scénarios de référence SQ et REC SQ REC 0.0 0.0 -1.0 -1.0 -1.1 -1.1 -1.0 -1.0 -2.0 -1.7 -2.0 -1.6 -1.6 -1.7 -3.0 -3.0 -2.7 -2.7 -3.1 -3.2 -4.0 -4.0 -3.7 -3.6 -4.1 -4.3 -4.4 -4.3 -5.0 -4.8 -5.0 -5.1 -6.0 -6.0 -5.7 -5.8 -6.3 -7.0 -6.6 -7.0 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2023 2024 2023 2024 2023 2024 2023 2024 Sec et très chaud Humide et Chaud Sec et très chaud Humide et Chaud PIB rèel Consommation par habitant du ménage PIB rèel Consommation par habitant du ménage Source : Projections de la Banque mondiale 68 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT FIGURE 33 Figure 33. Politiques actuelles en matière de changement climatique : Évolution du taux de pauvreté dans les scénarios de référence SQ et REC SQ REC 6.0 4.0 5.4 3.6 3.5 5.0 4.6 4.1 3.0 2.7 4.0 2.4 2.5 3.1 2.2 1.9 3.0 2.0 2.2 1.5 1.5 2.0 1.7 1.0 1.0 0.5 0.0 0.0 2030 2040 2050 2030 2040 2050 Sec et très chaud Humide et chaud Sec et très chaud Humide et chaud Source : Projections de la Banque mondiale Figure 34. Politiques actuelles en rapport au changement climatique : Pertes économiques cumulées dues Figure au 34 changement climatique par canal d’impact Scénario à climat sec/très chaud Scénario à climat humide/chaud 22 20 17 15 12 10 7 5 2 0 2024-30 2024-30 2031-40 2031-40 2041-50 2041-50 2024-30 2024-30 2031-40 2031-40 2041-50 2041-50 SQ RÉFORME SQ RÉFORME SQ RÉFORME -3 SQ RÉFORME SQ RÉFORME SQ RÉFORME Rendement agricole Érosion Du Sol Rendement agricole Érosion Du Sol Pêche Stress thermique dur la main-d'oeuvre Pêche Stress thermique dur la main-d'oeuvre Inondation Coastal Inondation Inondation Coastal Inondation Wash Wash Source : Projections de la Banque mondiale RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 69 Comme discuté au Chapitre 3, les mesures d’adaptation peuvent contribuer à réduire considérablement l’impact du changement climatique sur l’économie des Comores. Comme la Figure 32 précédente le montre, sans investissements supplémentaires dans l’adaptation, l’impact du changement climatique sur le PIB d’ici les années 2040 est estimé à -6,6 pour cent dans le scénario SQ et à -5,8 pour cent dans le scénario REC, dans le cadre d’un scénario futur pessimiste à climat sec/très chaud. Les investissements dans les mesures d’adaptation permettent de réduire ces pertes à -2,8 pour cent dans le scénario SQ et à -2,1 pour cent dans le scénario REC d’ici les années 2040, dans le contexte d’un scénario futur pessimiste à climat sec/très chaud (Figure 35). Dans le scénario optimiste à climat humide/chaud, les mesures d’adaptation permettent de limiter la perte de PIB à -1,2 pour cent dans le scénario SQ et à -0,8 pour cent dans le scénario REC. La mise en œuvre de mesures de réforme et d’adaptation limite l’augmentation du taux de pauvreté à 0,5 à 1,1 point de pourcentage d’ici 2050, en comparaison à une situation de référence sans ces interventions (Figure 36). Bien que l’adaptation permette de réduire les impacts du changement climatique, des pertes économiques résiduelles sont encore prévues ; la majeure partie de ces pertes devrait, une fois de plus, provenir de la baisse de la productivité du travail causée par le stress thermique et de la diminution de la productivité agricole (Figure 37). Figure 35 Figure 35. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation au changement climatique : Variations annuelles moyennes dans les scénarios de référence SQ et REC SQ REC 0.0 0.0 -0.5 -0.5 -0.7 -0.7 -0.6 -0.7 -1.0 -0.7 -0.8 -0.8 -1.1 -1.1 -1.0 -0.8 -1.2 -1.5 -1.3 -1.3 -1.3 -1.2 -1.3 -1.5 -2.0 -1.7 -1.7 -2.1 -2.1 -2.5 -2.0 -2.1 -2.2 -2.8 -2.7 -3.0 -2.5 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2023 2024 2023 2024 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES Sec et très chaud Humide et Chaud 2023 2024 2023 2024 Sec et très chaud Humide et Chaud PIB rèel Consommation par habitant du ménage PIB rèel Consommation par habitant du ménage Source : Projections de la Banque mondiale Figure 36 Figure 36. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation au changement climatique : Évolution du taux de pauvreté dans les scénarios de référence SQ et REC SQ REC 2.5 2.3 1.6 1.5 2.2 1.4 1.4 2.0 1.2 1.1 1.5 1.5 1.4 1.0 1.0 1.1 0.8 1.0 0.7 1.0 0.6 0.5 0.4 0.5 0.2 0.0 0.0 2030 2040 2050 2030 2040 2050 Sec et très chaud Humide et chaud Sec et très chaud Humide et chaud Source : Projections de la Banque mondiale 70 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Figure 37 Figure 37. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation : Pertes économiques cumulées dues au changement climatique par canal d’impact Scénario à climat sec/très chaud Scénario à climat humide/chaud 20 12 15 10 7 5 2 0 2024-30 2024-30 2031-40 2031-40 2041-50 2041-50 2024-30 2024-30 2031-40 2031-40 2041-50 2041-50 SQ RÉFORME SQ RÉFORME SQ RÉFORME -3 SQ RÉFORME SQ RÉFORME SQ RÉFORME Rendement agricole Érosion Du Sol Pêche Rendement agricole Érosion Du Sol Pêche Stress thermique Inondation Inondation du littoral Stress thermique dur la main-d'oeuvre Inondation Inondation du littoral dur la main-d'oeuvre Source : Projections de la Banque mondiale Note : Les pertes sont cumulées par décennie sur les périodes 2023-2030, 2031-2040 et 2041-2050 et présentées respectivement exprimées en pourcentage du PIB en 2022, du PIB moyen des années 2030 et du PIB moyen des années 2040. Un taux d’actualisation de 6 pour cent a été appliqué pour calculer la valeur actuelle des pertes futures. 4.3. Considérations macrobudgétaires dans la gestion des impacts du changement climatique Étant donné que l’adaptation au changement climatique pourrait coûter plus de 100 millions USD aux Comores au cours des 25 prochaines années, la dette publique pourrait augmenter jusqu’à 4 pour cent du PIB ; ainsi, un programme d’action de réformes macrobudgétaires serait nécessaire pour préserver la stabilité macroéconomique (Figure 38). Même avec la mise en œuvre de ces réformes, la dette publique pourrait encore augmenter de 2,9 pour cent du PIB d’ici 2050. De plus, en 2024, l’espace budgétaire des Comores est déjà restreint, en raison d’une faible mobilisation des ressources internes, d’une rigidité budgétaire et d’un risque élevé de surendettement. Cette situation exigera des approches innovantes pour financer l’adaptation, notamment une plus grande mobilisation des ressources nationales, y compris en créant davantage d’espace budgétaire et en intégrant les considérations environnementales à la gestion des finances publiques ; le renforcement de la participation du secteur privé en favorisant son développement ; le financement et la gestion des risques associés au changement climatique ; la gestion des risques résiduels ; et la mobilisation des financements concessionnels. Cependant, il est essentiel de renforcer la capacité du gouvernement à mettre en œuvre les solutions de base pour renforcer la résilience du pays au changement climatique. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 71 Figure 38. Renforcement des capacités et des politiques d’adaptation : Évolution de la dette publique dans les scénarios de référence SQ et REC (Pourcentage du PIB) 4.50 4.00 3.50 3.00 2.50 2.00 1.50 1.00 0.50 0.00 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2024-2030 ANNÉES ANNÉES 2030 2040 2030 2040 Humide et chaud Sec et très chaud SQ REC Source : Projections de la Banque mondiale L’espace budgétaire des Comores est étroit, marqué par de faibles recettes fiscales, un risque élevé de surendettement et une performance insuffisante des entreprises publiques ; il sera donc essentiel d’élargir cet espace budgétaire afin de permettre l’écologisation de la gestion des finances publiques. La capacité des Comores à assurer la fourniture de biens et services publics est limitée par un espace budgétaire restreint, résultant de la faiblesse des recettes fiscales. Celles-ci ont représenté en moyenne 8 pour cent du PIB sur la période 2020-2023, bien en deçà du seuil minimal requis de 12,8 pour cent. La faiblesse des recettes fiscales est due aux lacunes dans l’administration fiscale, notamment en ce qui concerne l’intégrité de la base de contribuables enregistrés, la gestion des risques, la promotion de la conformité volontaire, le respect des délais pour le dépôt des déclarations fiscales, l’exactitude des déclarations, la gestion des recettes, ainsi que la redevabilité et la transparence. En conséquence, les différents instruments fiscaux ont une faible efficacité. Compte tenu des instruments fiscaux déjà en place, les Comores pourraient explorer des options pour générer des recettes basées sur le carbone. De plus, les entreprises publiques peu performantes bénéficient de subventions en plus de représenter une charge pour les recettes fiscales étant donné qu’elles sont partiellement exonérées de paiement de l’impôt, et elles rencontrent des difficultés dans le recouvrement de leurs propres recettes. Enfin, en raison du risque élevé de surendettement, l’Union des Comores est contrainte de s’appuyer exclusivement sur des financements concessionnels pour financer ses projets de développement. L’intégration des marchés publics dans l’exécution budgétaire et l’amélioration de la gestion des flux de trésorerie pourraient permettre de réaliser des économies budgétaires tandis que des réformes supplémentaires de la gestion des finances publiques pourraient renforcer l’efficience des dépenses publiques. Bien que l’adoption d’une nouvelle loi sur les marchés publics en 2023 ait introduit la numérisation des procédures de passation, il reste nécessaire de renforcer cette fonction et d’assurer une meilleure intégration dans le processus d’exécution budgétaire. Une plateforme en ligne pour la passation des marchés publics est en cours de finalisation, et son déploiement pourrait améliorer l’efficience des 72 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT dépenses publiques. De plus, l’amélioration de la gestion de l’investissement public pourrait générer des économies budgétaires en intégrant les considérations de changement climatique dans la sélection des projets et en améliorant leur exécution pour limiter les dépassements de coûts115. En outre, la gestion de l’investissement public, par exemple à travers le Programme d’investissement public des Comores (2016-2020), pourrait permettre de renforcer l’intégration des mesures liées au changement climatique. L’absence de prise en compte du changement climatique et de l’analyse des risques dans la sélection des projets révèle des failles dans les processus d’investissement en infrastructures. Cette insuffisance risque d’entraîner une hausse des coûts et une baisse de l’efficacité des mesures d’adaptation face aux défis climatiques. Une approche similaire, intégrant les enjeux liés au changement climatique, devrait également être adoptée pour l’entretien des biens publics. Il existe des opportunités pour intégrer les considérations en rapport au changement climatique dans les processus de gestion des finances publiques, et pour promouvoir la budgétisation verte, l’étiquetage budgétaire et la passation des marchés verte. Cette approche consisterait à évaluer la pertinence et la faisabilité des outils de gestion des finances publiques vertes disponibles et à les intégrer à chaque étape du cycle budgétaire. Par exemple, le gouvernement pourrait élaborer des documents de planification verte et des cadres macroéconomiques prenant en compte le changement climatique, mettre en place une budgétisation verte transversale, réaliser des revues des dépenses vertes, assurer le suivi des dépenses liées au changement climatique et effectuer des audits verts a posteriori. L’étiquetage budgétaire et la passation des marchés verte sont considérés comme particulièrement adaptés aux pays à faible revenu et contribuent à la mobilisation des financements internationaux. L’étiquetage budgétaire permet aux gouvernements de suivre et d’affecter des fonds à des interventions prenant en compte le changement climatique spécifiquement. La passation des marchés verts favorise l’adoption de produits et de services respectueux de l’environnement, contribuant ainsi à la décarbonation des activités et des infrastructures publiques. Le secteur privé joue un rôle essentiel dans le financement de la transition des Comores vers une économie plus durable et plus résiliente au changement climatique. Compte tenu de l’étroitesse de l’espace budgétaire pour l’investissement public, la mobilisation du secteur privé sera essentielle pour appuyer les efforts d’adaptation. Pour assurer la réussite de la mise en œuvre de ces stratégies, il sera indispensable non seulement de réaliser de nouveaux investissements, mais également de garantir une coordination efficace et d’adopter des politiques et des réglementations appropriées afin de favoriser le développement du secteur privé.116 Ces politiques incluent la sensibilisation aux risques et opportunités en rapport au changement climatique, l’amélioration du climat général d’investissement, l’élaboration d’un plan national d’investissement pour l’adaptation, la mise en œuvre de réformes réglementaires axées sur le climat (notamment à travers un cadre de partenariat public-privé approprié) et l’adoption de mesures incitatives encourageant le secteur privé à investir en appui à la réalisation des objectifs de transition verte117. 115 Des facteurs tels que l’existence d’importants déficits de financement dès le lancement des projets, affectant leur mise en œuvre, ou des lacunes dans leur conception, ont contribué à l’apparition de dépassements de coûts ; à cela s’ajoutent des facteurs exogènes, tels que la pandémie de COVID-19 ou les chocs inflationnistes de 2022. 116 https://www.greenclimate.fund/document/support-union-comoros-increase-access-climate-finance-under-green-climate-fund-gcf. 117 https://www.un.org/africarenewal/magazine/march-2023/comoros-has-huge-untapped-investment-potential. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 73 74 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT © Tim Kelly 5. Financement de la transition climatique aux Comores 5.1. Principales sources de financement climatique pour les Comores Le secteur financier des Comores est en développement mais reste vulnérable, et la microfinance et les envois de fonds de l’étranger y occupent une place importante. Le système financier comprend neuf institutions financières dont quatre banques commerciales et quatre institutions de microfinance, ainsi qu’une institution financière publique, la Société Nationale des Postes et des Services Financiers. Alors que le secteur financier est en cours de restructuration, le gouvernement reste le principal actionnaire de deux banques commerciales, et moins de la moitié des institutions financières respectent les ratios prudentiels. L’entité financière la plus importante est une institution de microfinance, dont l’encours de prêts représente plus d’un tiers du crédit total à l’économie. Compte tenu de l’importance des envois de fonds de la diaspora comorienne, se chiffrant à 13 pour cent du PIB, les agences internationales de transfert d’argent, telles que Western Union, opèrent aux Comores ; elles agissent indirectement à travers des partenariats avec des banques ou des réseaux de microfinance agréés. Ces agences sont complétées par une entité locale de transfert d’argent et de change, la Maison Comorienne de Transfert des Valeurs, et deux opérateurs de monnaie mobile. Le secteur financier a octroyé au secteur privé des crédits équivalant à seulement 18 pour cent du PIB, et se trouve confronté à un important volume de prêts non productifs et à une forte exposition aux entreprises publiques. Les institutions financières nationales n’ont pas encore mis en place d’instruments dédiés au financement de la lutte contre le changement climatique. De plus, le pays ne dispose pas d’un marché intérieur pour les bons du Trésor, et le cadre réglementaire actuel ne permet pas l’émission formelle d’obligations du Trésor. Du fait qu'elles ne disposent pas de suffisamment de ressources à long terme, les banques sont limitées dans leur capacité à financer des projets d’investissement de longue durée. À ce jour, aucune institution financière nationale n’émet d’instruments liés au financement de la lutte contre le changement climatique. De plus, le secteur de l’assurance n’est pas réglementé et reste sous-développé : il compte seulement six sociétés, dont les activités se concentrent principalement sur l’assurance automobile et les polices d’assurance voyage, opérant dans le secteur informel. Actuellement, la majorité des financements de la lutte contre le changement climatique et de la croissance verte proviennent du secteur public et sont principalement orientés vers des initiatives d’adaptation. Entre 2019 et 2020, l’Union des Comores a mobilisé jusqu’à 163 millions USD par an, soit environ 12 pour cent du PIB. Parmi ces financements, 96 pour cent provenaient du secteur public : 68,2 pour cent étaient sous forme de dons ; 25,3 pour cent représentaient des projets financés par emprunt à des conditions concessionnelles ; et seulement 4 pour cent provenaient du secteur privé. Le financement du secteur public provient principalement d’institutions financières multilatérales, représentant 69 pour cent du total, notamment de la Banque mondiale. Il inclut également des financements bilatéraux à hauteur de 20 pour cent, des fonds publics à concurrence de 9 pour cent, et des fonds climatiques pour 2 pour cent. Selon les estimations des CDN, les besoins de financement de la lutte contre le changement climatique entre 2020 et 2030 s’élèveront à environ 1,7 milliard USD au total, soit un coût moyen annuel de 154 millions USD : 53 pour cent sont destinés à l’atténuation, 24 pour cent à l’adaptation, et 23 pour cent à la prise en charge des pertes et dommages. L’insuffisance de données, combinée au manque d’expertise technique locale pour estimer avec précision les coûts d’adaptation, entraîne probablement une sous-évaluation des besoins financiers réels liés à l’adaptation. Pour répondre à ces besoins, l’Union des Comores a mobilisé plusieurs programmes de financement concessionnels avec le soutien de partenaires au développement. Ces initiatives visent à soutenir des programmes verts et bleus de résilience environnementale, des projets de préservation des écosystèmes insulaires, ainsi que la mise en place d’une gouvernance institutionnelle territoriale inclusive prenant en compte les enjeux climatiques. Le Projet régional pour la résilience RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 75 climatique en Afrique de l’Est et australe, financé par la Banque mondiale, en est un exemple : ce projet vise à promouvoir la gouvernance climatique multisectorielle et à mobiliser des financements pour la lutte contre le changement climatique provenant de différentes sources. L’Union des Comores pourrait également tirer profit de l’assistance technique au niveau régional pour renforcer sa capacité à accéder aux financements des mécanismes d’atténuation et d’adaptation, par exemple en accédant aux fonds des Biens publics mondiaux ou en tirant parti des opportunités du marché du carbone. Si le pays n’a pas encore mobilisé de financements privés pour compléter les ressources publiques, les partenariats public-privé pourraient jouer un rôle essentiel dans le financement de l’action climatique aux Comores. Ils permettraient de maximiser le peu de ressources publiques disponibles, de mobiliser des capitaux privés, de tirer parti de l’expertise et de l’innovation, et de débloquer des financements de la lutte contre le changement climatique118. Les partenariats public-privé peuvent également assurer une répartition des risques équilibrée et réfléchie entre les acteurs publics et privés, tout en offrant visibilité et stabilité à long terme pendant toute la durée du contrat. Cette prévisibilité contractuelle peut contribuer à compenser les incertitudes liées au changement climatique. La mise en place d’un cadre réglementaire adapté aux partenariats public-privé est donc essentielle pour attirer les investissements privés dans les secteurs clés particulièrement vulnérables aux risques climatiques. De plus, bien que le Plan Comores Émergent ait déjà défini les secteurs prioritaires (à savoir l’agriculture, le tourisme et la pêche) et identifié les principaux catalyseurs (exemple : énergie, transport, administration centrale et connectivité aux technologies de l’information et de la communication) (Tableau 4), le pays ne dispose pas encore d’une stratégie de croissance verte. Cette lacune représente un autre obstacle à la mobilisation de financements pour la croissance verte et l’action climatique par le secteur privé, obstacle qui s’ajoute au manque d’infrastructures de base, à la faible capacité technique, humaine et institutionnelle, à la petite taille du marché intérieur et aux perturbations provoquées par les récents chocs externes. Malgré les limites posées par le manque de données sectorielles, 23 pour cent du financement dédié à la lutte contre le changement climatique est orienté vers le secteur de l’énergie, principalement vers les énergies renouvelables, en particulier l’énergie solaire. Le secteur des transports reçoit 14 pour cent du financement, tandis que l’agriculture, la foresterie, la pêche et les autres activités liées à l’utilisation des terres ne bénéficient que de 8 pour cent du financement formel total, alors même que la majorité de ces activités restent informelles. Une série d’actions liées à la croissance verte et à la lutte contre le changement climatique, susceptibles de stimuler les investissements privés, est présentée dans le Tableau 4 ci-après. Tableau 4. Opportunités de contribution du secteur privé119 DOMAINE PRIORITAIRE OPPORTUNITÉS DE CONTRIBUTION DU SECTEUR PRIVÉ Le développement du tourisme concernera tous ses segments, y compris l’écotourisme. Des projets d’économie bleue durable seront menés dans différents secteurs, notamment l’aquaculture, le tourisme côtier, la biotechnologie, l’énergie marine, etc. Jusqu’à présent, les projets prioritaires sélectionnés incluent : Faire des Comores une § l’aménagement d’une zone d’écotourisme autour du Parc de Nioumachioua à destination touristique phare Mwali et le développement du tourisme autour de Karthala et du cœlacanthe ; de l’espace de l’océan Indien et § ·des projets de promotion de niches basées sur des produits pour lesquels le promouvoir les projets axés sur pays bénéficie d’avantages comparatifs, tels que les fruits de mer, les huiles l’économie bleue. essentielles (girofle, ylang-ylang) et les cosmétiques naturels ; § des projets de bouclier climatique, intégrant des mesures visant à valoriser, préserver, restaurer et renforcer la couverture et la représentativité de la biodiversité, tout en assurant une gestion durable des aires protégées. 118 Banque mondiale. 2021. Unlocking Private Investment in Climate Adaptation and Resilience. https://www.worldbank.org/en/news/ feature/2021/03/04/unlocking-private-investment-in-climate-adaptation-and-resilience. 119 Tous les domaines d’intervention mentionnés dans cette partie du document, à l’exception de ceux en rapport au secteur de l’eau, sont issus du Plan Comores Émergent. 76 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT L’Union des Comores s’efforce d’être indépendante sur le plan énergétique par le biais du développement de la production d’énergie renouvelable, notamment à partir Appuyer le cercle énergétique de l’énergie solaire, hydroélectrique et géothermique ; ces initiatives encouragent les des Comores investissements du secteur privé dans les technologies d’énergie renouvelable et incitent les industries à adopter des technologies vertes120. Le pays aspire à connecter tous les principaux ports des trois îles afin de faciliter la Unifier les îles de l’Union des libre circulation des personnes et des biens dans des conditions plus sûres, à des Comores à l’aide des voies coûts réduits et à une fréquence plus régulière. Ce projet contribuera à faciliter la maritimes mise en œuvre d’autres projets de croissance verte et à attirer l’investissement privé. L’ambition de faire de Moroni un district administratif numérique vise à réduire son empreinte carbone en centralisant les services administratifs en un seul lieu et en diminuant ainsi les déplacements. L’amélioration de l’efficience dans le partage de l’information, devenue possible suite au renforcement de la communication et l’adoption d’une approche à l’échelle de l’ensemble du gouvernement, basée sur la collecte, le partage et l’analyse avancée de données en temps réel, renforcera Développer Moroni pour la collaboration interministérielle. Ce renforcement de la collaboration contribuera la transformer en une ville à son tour à un renforcement de l’efficience de l’administration publique et à une financière intelligente et un amélioration de la qualité des services pour les particuliers et les entreprises. De district administratif numérique. plus, le projet de « ville financière intelligente » de Moroni vise à positionner la ville en tant que pôle d’investissement privé arabe en Afrique et à en faire la première plateforme financière du continent. Ce centre financier proposera une vaste gamme de services, incluant des services d’investissement transfrontaliers, des services bancaires internationaux, la gestion des actifs transfrontaliers pour les particuliers, ainsi que des prestations pour les sociétés internationales d’assurance de fintech. Il s’agira d’accroître la productivité en réorganisant la production rurale, en Promouvoir l’agro-industrie, y promouvant l’irrigation, en utilisant des intrants et des technologies de mécanisation compris le développement des avancés, en renforçant les chaînes de valeur de l’agro-industrie et de la pêche, et en chaînes de valeur développant l’agriculture et la finance bleue. Le déficit de financement dans le secteur de l’eau peut être comblé en : § réhabilitant et élargissant les réseaux de distribution pour réduire les pertes en eau, renforcer l’efficience et garantir un accès durable à l’eau potable pour les populations dont les initiatives créeront également des opportunités d’investissement privé dans le cadre de partenariats public-privé. § mettant en place des systèmes de collecte et de réutilisation des eaux de pluie, aménageant des infrastructures de traitement et de gestion des eaux usées, et promouvant la réutilisation des eaux usées dans le secteur agricole où les investissements dans des technologies de collecte innovantes pourraient être cofinancés par des entreprises spécialisées dans les infrastructures hydrauliques. § construisant des usines de dessalement alimentées par des énergies renouvelables, telles que l’énergie solaire, afin d’assurer une source durable Combler le déficit de d’eau douce, en particulier pour les zones côtières. Les investisseurs privés financement dans le secteur de pourraient y voir une opportunité de combiner la technologie de dessalement l’eau avec des solutions énergétiques vertes. § investissant dans la protection et la gestion des bassins versants pour prévenir l’érosion, contenir les inondations et favoriser la recharge des nappes phréatiques. Cela inclut la restauration des zones humides et des forêts, qui sont essentielles à la régénération des ressources en eau, avec des opportunités d’investissement pour le secteur privé dans le reboisement et la conservation écologique. § promouvant l’installation de systèmes d’irrigation efficaces, tels que les systèmes d’irrigation goutte-à-goutte, et l’adoption de technologies de gestion de l’eau agricole pour optimiser l’utilisation des ressources en eau. L’investissement privé peut être mobilisé dans le cadre de solutions agritech et de services techniques aux exploitants agricoles. 120 https://ppp.worldbank.org/public-private-partnership/climate-smart-ppps-further-reading-and-resources. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 77 5.2. Gestion des risques financiers liés au changement climatique Le secteur financier est particulièrement vulnérable au risque climatique, en raison des risques physiques, mais également des risques de transition liés au passage vers une économie à faibles émissions de carbone. Concernant les risques physiques, l’impact financier du changement climatique aux Comores provient des dommages causés par des événements météorologiques et climatiques extrêmes, le pays figurant parmi les plus exposés au monde à ces risques (tels que les tempêtes, les inondations, l’élévation du niveau de la mer, les éruptions volcaniques, les cyclones, etc.). Bien que le principal canal de transmission des risques physiques soit l’agriculture (représentant 35 pour cent de l’emploi total)121, il n’existe pas de données permettant d’évaluer avec précision l’exposition des institutions financières à ces risques. Cette exposition pourrait être faible, d’ailleurs, étant donné qu’une grande partie du secteur agricole est constitué de l’agriculture de subsistance sans accès aux services financiers. La transition vers une économie à moindres émissions de carbone comporte également des risques, notamment en raison de la dépendance actuelle du pays aux importations de combustibles fossiles et de l’objectif déclaré de réduire les émissions de gaz à effet de serre de 84 pour cent d’ici 2030. Bien qu’il n’existe pas de données sectorielles précises pour évaluer l’exposition des institutions financières au risque de transition, plusieurs canaux de transmission probables sont identifiés : les impacts directs sur l’importateur national de produits pétroliers, les conséquences sur la société nationale d’électricité (SONELEC), et la forte dépendance du pays aux importations, qui couvrent 55 pour cent des besoins de base. Par ailleurs, l’entreprise publique chargée de réguler le marché du riz, l’Office National d’Importation et de Commercialisation du Riz (ONICOR), joue un rôle dans l'augmentation des prêts non productifs, ce qui accentue l’instabilité financière du pays. Les Comores ont engagé un processus de préparation financière face aux chocs climatiques, un processus qui pourrait être renforcé et intégré dans le cadre d’une politique nationale de développement. Si le pays a récemment souscrit une assurance contre les cyclones tropicaux, il ne dispose actuellement d’aucun autre instrument pour faire face aux chocs. Par ailleurs, l’Union des Comores participe à l’initiative de la Banque mondiale intitulée « Projet régional pour la préparation aux situations d’urgence et d’accès à une reprise inclusive » (REPAIR)122, qui a pour objectif de mettre à la disposition des pays un éventail complet d’instruments financiers préétablis pour répondre aux catastrophes dans les meilleurs délais. Cet instrument régional offrira un accès à des réserves pour faire face aux chocs modérés et à un crédit d’urgence en cas de chocs sévères, évitant ainsi au pays de devoir recourir à des mesures budgétaires extrêmes. Il contribuera également à renforcer la capacité des systèmes nationaux à répondre aux catastrophes et favorisera les opportunités d’apprentissage entre pairs. L’utilisation de cette plateforme régionale pour répondre aux chocs financiers et opérationnels permettra aux Comores d’accéder à une meilleure assurance contre les catastrophes à travers la mutualisation de risques ; elle offrira également des garanties adaptées, un portefeuille plus diversifié et une gouvernance renforcée. Pour les Comores, REPAIR est en adéquation avec les canaux de distribution nationaux, tels que le de Fonds National de Résilience et le Projet de sécurité sociale. Un fonds national de renforcement de la résilience financière offrirait au gouvernement des Comores un instrument de financement viable pour appuyer les initiatives de gestion des catastrophes. La Banque mondiale et d’autres partenaires au développement appuient le gouvernement dans la création de ce Fonds National de Résilience. La disponibilité de ce fonds permettra de répondre rapidement aux situations d’urgence, tout en surmontant les obstacles liés à l’insuffisance ou à la lenteur de mobilisation des ressources financières. Le fonds contribuera au financement des actions de préparation immédiate, de réponse, ainsi que des actions de renforcement de la résilience des Comores face aux catastrophes définies dans le plan 121 Organisation internationale du travail. « Base de données des estimations modélisées de l’OIT » ILOSTAT. www.ilostat.ilo.org/data 122 REPAIR sera administré par l’African Risk Capacity, une institution financière régionale africaine, afin de réduire le coût de mobilisation du financement des risques de catastrophe pour les pays, d’accroître le volume de capitaux privés disponibles et de renforcer les systèmes nationaux pour une réponse sans délai aux chocs climatiques. 78 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT national d’urgence. À travers ce Fonds National de Résilience, le gouvernement pourra centraliser tous les financements qui peuvent être rapidement mobilisés pour répondre aux situations d’urgence liées aux aléas naturels. Le cadre institutionnel du Fonds National de Résilience reste à définir, offrant ainsi l'opportunité d'y intégrer des principes de flexibilité et de redevabilité. Bien qu’encore en discussion, la proposition actuelle prévoit de positionner le Fonds en tant que sous-compte du Compte unique du Trésor, sous la forme d’un compte d’affectation spéciale. Le Fonds serait rattaché à la Direction Générale de la Sécurité Civile, qui est responsable de la préparation et de la gestion des situations d'urgence, et son fonctionnement serait encadré par les règles en vigueur en matière de passation des marchés publics. 5.3. Assurances, produits de gestion des risques et diaspora Alors qu’elle est classée au 163e rang sur 191 pays à l’indice de vulnérabilité et de capacité d’adaptation, l’Union des Comores dispose actuellement de peu ressources en matière de produits d’assurance et de gestion des risques123. Entre 1980 et 2022, le pays a enregistré 39 incidents majeurs, ayant affecté au total 839 721 personnes et causé 944 décès. Le marché de l’assurance est presque inexistant : il n’existe que six sociétés dont les activités sont limitées à l’assurance automobile et de l’assurance voyage, ces produits étant utilisés de manière sporadique. Bien que de nouveaux produits voient le jour suite à l’appui des partenaires au développement, le pays ne dispose pas encore d’une politique durable de financement des risques. À travers la Banque africaine de développement, l’Union des Comores a souscrit une assurance paramétrique contre les inondations auprès de l’African Risk Capacity ; par ailleurs, avec l’appui de la Banque mondiale, le pays bénéficie également du volet d’assurance paramétrique proposé dans le cadre de l’initiative REPAIR, intégrée au programme de financement des risques mis à sa disposition. Le Programme des Nations Unies pour le développement travaille également à la mise en place d’une assurance inclusive, nécessitant un cadre réglementaire approprié ainsi que la mise en œuvre d’un programme d’éducation financière axé sur le marché de l’assurance. La diaspora comorienne contribue à la gestion des risques au niveau communautaire, en compensant les défaillances du marché et du gouvernement. L’Union des Comores reçoit de sa diaspora des envois de fonds représentant au total près de 13 pour cent du PIB. La diaspora joue non seulement un rôle de filet de sécurité en cas de catastrophe, mais elle contribue également de manière significative à l’appui aux activités économiques et sociales des communautés locales et des villages. Ces dynamiques au niveau communautaire sont cependant mal quantifiées, la majorité des envois de fonds échappant au secteur financier formel. Presque tous les ménages comoriens ont un membre de leur famille à l’étranger qui envoie des fonds qui aident les familles à s’adapter et à atténuer les risques auxquels elles sont confrontées. Les envois de fonds sont généralement utilisés pour réparer des dégâts minimes, la consommation locale, le règlement des factures d’électricité et l’éducation. Cela dit, certaines communautés de la diaspora, bien organisées, financent activement des infrastructures locales telles que les routes communautaires, la construction d’écoles, les services de santé, les barrages, les digues, les activités agricoles, le commerce informel, l’électrification rurale et l’approvisionnement en eau. 5.4. Tirer parti des marchés du carbone et des opportunités de financement de la lutte contre le changement climatique Les Comores disposent d’opportunités prometteuses pour mobiliser des financements à travers les marchés du carbone. Le pays a exprimé son ambition de devenir un puits de carbone, en s’engageant à réduire ses émissions nettes124 de CO2 de 23 pour cent et à augmenter son absorption nette de CO2 de 47 pour cent d’ici 2030. La réalisation de ces objectifs pourrait ouvrir aux Comores l’accès aux mécanismes 123 Indice mondial d’adaptation Notre Dame, 2022. The NDD-GAIN Matrix : Comoros. 124 Selon le profil des Comores, ses émissions de gaz à effet de serre se répartissent comme suit : énergie (9 pour cent) ; agriculture (28 pour cent) ; et utilisation des terres, changement d’affectation des terres et foresterie (63 pour cent). RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 79 internationaux d’échange de crédits carbone. Le gouvernement a défini des mesures d’atténuation à court terme, comprenant : (i) la consolidation du réseau électrique ; (ii) l’amélioration de la collecte des déchets ; (iii) la réduction de la consommation de bois de chauffage et de bois à usage industriel en favorisant des sources d’énergie alternatives et en protégeant les forêts ; (iv) la réduction de la consommation de bois de chauffage résidentiel en utilisant des poêles à bois à haut niveau d’efficacité ;(v) la promotion du compostage des déchets organiques. Les priorités en matière d’atténuation à moyen et long terme incluent : (i) la poursuite des projets de développement de centrales photovoltaïques ; (ii) le lancement de l’exploitation de la géothermie ;(iii) le boisement, le reboisement, l’agroforesterie et l’arboriculture ; et (iv) une gestion plus efficace des aires protégées. De grandes lacunes ont été mises en évidence lors d'une évaluation préliminaire de l’état de préparation des Comores à accéder aux marchés du carbone. L’Union des Comores est encore en train d’élaborer un cadre juridique pour le carbone, celui-ci indispensable pour accéder à la finance carbone à grande échelle et pour introduire les crédits carbone sur le marché. Dans le cadre du Projet régional pour la résilience climatique en Afrique de l’Est et australe, la Banque mondiale a évalué le potentiel sectoriel de l’Union des Comores et son attractivité pour les projets carbone125. En matière de préparation, les Comores sont caractérisées par un faible niveau global, une connaissance limitée du fonctionnement du marché du carbone, l’absence d’un cadre institutionnel approprié et un manque d’expertise pour évaluer le potentiel du pays dans ce domaine.126. Jusqu’à présent, l’expérience des Comores en matière de marchés du carbone se limite exclusivement au secteur de l’énergie127. Bien que les instruments de filet de sécurité soient bien établis et fonctionnels, l’insuffisance des financements nécessaires pour élargir la portée des programmes reste une contrainte majeure. L’Union des Comores alloue environ 0,7 pour cent de son PIB aux filets de sécurité, contre en moyenne 0,9 pour cent pour les pays à faible revenu et 1,3 pour cent pour les États africains fragiles128. Les filets de sécurité sont principalement financés par des sources externes, en grande partie la Banque mondiale. Face au changement climatique, aux autres sources d’incertitude mondiales et aux chocs récurrents auxquels le pays est exposé, l’Union des Comores aurait tout intérêt à renforcer sa capacité de mobilisation des financements afin de mieux absorber les chocs futurs susceptibles de compromettre sa trajectoire de croissance économique et ses efforts de réduction de la pauvreté. Les systèmes de protection sociale pourraient jouer un rôle essentiel en répondant aux risques actuels et futurs, limitant ainsi le recours aux interventions humanitaires. Ainsi, il est essentiel de concevoir une stratégie de financement durable pour la protection sociale, qui mette l’accent sur l’augmentation des financements nationaux, l’harmonisation des contributions des bailleurs de fonds et l’instauration d’un mécanisme de financement conditionnel visant à soutenir un système de protection sociale capable de répondre efficacement aux chocs. De plus, l’Union des Comores n’en est encore qu’aux premières phases d’exploration des options de financement liées aux écosystèmes de carbone bleu, principalement axées sur la valorisation des pêcheries côtières ainsi que sur la génération de revenus par le biais de la pêche et de l’aquaculture. Les modèles potentiels de génération de revenus pour la protection et la restauration des écosystèmes de carbone bleu sont en train de se s’élargir ; ils exploitent à la fois des canaux existants, tels que les ventes de pêcheries et les redevances, et des canaux émergents, tels que les marchés de la nature, notamment le carbone bleu et la biodiversité. Il est indispensable de disposer de capacités techniques et d’un savoir-faire spécialisé pour explorer et tester ces opportunités de revenus à travers les marchés liés aux ressources naturelles. À ce jour, les efforts visant à renforcer les capacités de comptabilisation du carbone se limitent à un projet pilote de foresterie mené au sein du parc national de Mwali.129 125 Les pays participants sont le Mozambique, le Malawi, Madagascar, l’Union des Comores et le Soudan du Sud. 126 Neyen, Capril. 2024. 127 Neven, 2024. 128 ASPIRE, 2018. 129 Communication personnelle, Mousa Ben Anthoy, Parc National de Mohéli. 80 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT Des instruments financiers tels que les financements mixtes et les fonds fiduciaires pour la conservation peuvent jouer un rôle clé dans la mobilisation du financement bleu aux Comores. Le financement mixte est une stratégie de plus en plus adoptée par les investisseurs d’impact, le secteur privé et les gouvernements. Il s’agit d’une approche stratégique qui mobilise la philanthropie, l’aide au développement et les investissements publics pour attirer des capitaux privés en appui au développement durable. Il combine des capitaux présentant différents niveaux de risque pour catalyser des investissements ajustés au risque et répondant aux attentes de rendement du marché, tout en générant des impacts sur l’environnement, le social et la gouvernance. Le financement mixte peut venir en appui à des activités à échelles et niveaux de rentabilité différents, permettre de porter à l’échelle voulue des projets pilotes, financer des startups et des initiatives à différents stades d’investissement ; il permet également de déployer le capital à travers d’autres instruments, tels que la dette, les fonds propres patients, les garanties/premières pertes, l’assistance technique, la souscription de risques, entre autres. De nombreuses plateformes d’investissement dans l’économie bleue privilégient le financement mixte comme modèle pour mobiliser des capitaux.; parmi celles-ci figurent le Sustainable Ocean Fund géré par Mirova, le Meloy Fund for Sustainable Community Fisheries, et le Fonds mondial pour les récifs coralliens. La création d’un Fonds fiduciaire pour la conservation pourrait permettre de disposer d’une méthode structurée de canalisation des ressources financières vers des initiatives environnementales et des aires protégées, en mettant l’accent sur la conservation et la gestion durable des écosystèmes côtiers et marins. Dans le cadre de la Stratégie des parcs nationaux approuvée en 2017, le gouvernement a créé un fonds fiduciaire destiné à mobiliser des ressources financières pour les nouveaux parcs nationaux envisagés dans les zones marines et côtières. Cependant, le fonds n’est pas encore opérationnel, et les discussions sur une éventuelle collaboration avec la Fondation pour les Aires Protégées et la Biodiversité de Madagascar130 n’ont pas progressé. Des plateformes dont l’objet est d’améliorer la préparation à l’investissement sont essentielles pour porter à l’échelle voulue la mariculture multi-espèces ou pour générer des revenus du carbone et de la biodiversité ; ces initiatives devraient être axées sur les investissements en phase de démarrage, tout en renforçant les capacités et en apportant un appui technique aux projets à base communautaire. 5.5. Recommandations politiques pour le financement de la transition climatique des Comores Il est crucial de renforcer la sensibilisation et les capacités des autorités du secteur financier et de l’industrie en vue de l’élaboration d’un programme d’action pour la finance verte et de l’élargissement de la portée des mécanismes d’adaptation au changement climatique. Selon les données des enquêtes effectuées, aucune des banques ou institutions de microfinance des Comores, y compris celles à participation étrangère, n’a encore élaboré d’instrument financier en rapport à la finance verte. De plus, l’exposition du gouvernement aux risques, à travers les secteurs de l’énergie, du pétrole et du riz, accroît le risque de passifs conditionnels, ce qui fragilise l’ensemble du système. Sur le plan institutionnel, le Ministère des Finances, du Budget et du Secteur Bancaire a commencé à intégrer le risque climatique dans sa gouvernance, sa stratégie, sa gestion des risques et ses opérations en créant une unité spéciale en charge du changement climatique, de l’adaptation et de l’atténuation au sein de la Direction Générale du Budget. Cependant, la Banque centrale des Comores, chargée de la supervision des banques et des institutions de microfinance, n’a pas encore intégré le risque climatique dans sa stratégie ni dans l’élaboration de ses politiques financières et monétaires. Elle ne dispose d’aucune évaluation et d’aucun suivi de l’exposition de l’ensemble des institutions financières au risque climatique ; de plus, elle n’a émis aucune directive de surveillance et n’a engagé aucun dialogue avec le secteur financier à ce sujet. Les assurances sont limitées et le pays n’est membre d’aucun réseau international dont il pourrait tirer profit, notamment le Réseau pour le verdissement du système financier ou le Réseau de la banque et de la finance durables. 130 La Fondation pour les Aires Protégées et la Biodiversité de Madagascar est un fonds fiduciaire dédié à la conservation de la biodiversité de Madagascar. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 81 Les Comores pourraient adopter un cadre intégrant les catégories de risques associés au changement climatique (risque physique, risque de transition et risque de responsabilité) avec celles généralement évaluées par les marchés financiers (risque de marché, risque de crédit, risque de liquidité et risque opérationnel) 131. Il s’agirait notamment de comprendre et d’évaluer les risques associés au changement climatique de promouvoir leur publication par les institutions financières en toute transparence, et de renforcer les cadres de prévision et d’analyse associés132. Le pays pourrait également étudier le potentiel des mécanismes d’assurance pour gérer les risques de catastrophe. Cela pourrait inclure une assurance paramétrique (indexée), au titre de laquelle des indemnités sont versées non pas en fonction des pertes réelles, mais en fonction de la survenue d’un événement déclencheur, tel qu’un cyclone atteignant une certaine catégorie de force. L’Union des Comores pourrait explorer les possibilités d’échanges dette-nature avec ses créanciers, afin de libérer des ressources pour renforcer les efforts de résilience et d’adaptation au changement climatique133. Les échanges dette-nature consistent à alléger le fardeau de la dette d’un pays en échange de ses engagements en faveur de la conservation de l’environnement. Il sera nécessaire d’avoir un mécanisme coordonné pour élaborer et mettre en œuvre un programme d’action pour le financement de la lutte contre le changement climatique ainsi que les politiques et financements sectoriels. Les politiques de financement de la lutte contre le changement climatique sont complexes et requièrent une coordination rigoureuse. Bien que le Ministère des Finances, du Budget et du Secteur Bancaire ait mis en place une unité dédiée au climat et à la résilience, placée sous la tutelle de la Direction Générale du Budget, il n’existe véritablement pas de mécanisme de coordination. Le mécanisme de coordination pourrait être solidement ancré dans des entités publiques et privées, nécessitant des liens étroits avec les différents secteurs, ainsi qu’une évaluation précise des domaines du financement public pouvant être complétés par des financements privés. En prenant le secteur de l’énergie comme exemple, un tel mécanisme pourrait permettre d’analyser et de renforcer les synergies entre l’amélioration de la performance des services publics d’électricité et la participation du secteur privé au développement des énergies renouvelables ; cela permettrait au secteur de mieux cerner les lacunes en matière de financement et de mieux exploiter les opportunités d’investissement. Le mécanisme de coordination pourrait également permettre de cerner les obstacles freinant la participation du secteur privé et à s’y attaquer, notamment en améliorant la solvabilité des acquéreurs et en réduisant les risques auxquels ils sont exposés. Enfin, le financement de la transition climatique des Comores reposera sur l’engagement ferme du pays à renforcer la gouvernance et les systèmes de gestion des finances publiques de manière à pouvoir mobiliser des financements privés dans les secteurs- lés. La mise en place d’un mécanisme de redevabilité, visant à démontrer la bonne utilisation des fonds publics grâce à une gouvernance transparente et une gestion efficiente des finances publiques, renforcera la confiance du secteur privé et encouragera ainsi la mobilisation de financements en faveur des secteurs clés. La transparence et l’efficience des opérations et des politiques publiques renforceront l’intérêt pour le financement privé dans les secteurs prioritaires tels que l’énergie et l’eau ; elles fourniront également une base solide pour la mobilisation, la coordination et la mise en œuvre des financements et investissements du secteur privé. 131 https://www.imf.org/en/Publications/Departmental-Papers-Policy-Papers/Issues/2024/02/12/Preparing-Financial-Sectors-for-a- Green-Future-Managing-Risks-and-Securing-Sustainable-540602 132 https://www.theguardian.com/environment/2023/jun/21/are-debt-for-nature-swaps-way-forward-for-conservation-aoe 133 https://www.chicagofed.org/publications/chicago-fed-letter/2020/448 82 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 83 © Steve Loris Gui-Diby 6. Marche à suivre : Programmes d’action prioritaires et mesures de financement Les Comores ont besoin d'un large éventail d'investissements, de réformes politiques et d'autres interventions afin de renforcer leur résilience et d'atteindre leurs objectifs de développement face aux défis posés par le changement climatique. Selon l’analyse présentée dans ce rapport, le changement climatique pourrait avoir d’importantes implications sur le développement des différents secteurs du pays. Il est donc crucial de définir et de prioriser les interventions nécessaires, en tenant particulièrement compte des contraintes budgétaires du pays. Le Tableau 6 ci-après présente les mesures prioritaires proposées dans un Plan d’action qui couvre quatre domaines d’intervention : 1. Améliorer la productivité et renforcer la résilience de l’agriculture et de la pêche afin de développer ces secteurs, tout en appuyant les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire face à l’incertitude des conditions climatiques futures. 2. Investir dans un réseau d’infrastructures résilientes au changement climatique, capable de répondre aux besoins de la population et de l’économie tout en étant résilient aux impacts incertains du changement climatique, qu’il s’agisse de l’élévation du niveau de la mer, des ondes de tempête, des inondations, de l’intensification des précipitations ou de la plus grande fréquence des phénomènes extrêmes. 3. Assurer la préservation de l’approvisionnement en eau face à la demande croissante et aux impacts du changement climatique, afin de garantir un accès sûr et fiable aux ressources en eau ; cela inclut la nécessité de gérer de manière durable les ressources face au changement climatique qui peut diminuer la quantité et altérer la qualité de l’eau. 4. Renforcer la capacité de production d’énergie renouvelable afin de gagner en autonomie énergétique, de respecter la CDN du pays et de réduire les impacts du changement climatique. Tableau 5. Plan d’action pour des mesures prioritaires en faveur d’un développement résilient et à faibles émissions de carbone aux Comores ACTIONS PRIORITAIRES AVANTAGES URGENCE DOMAINE D’INTERVENTION 1 : AMÉLIORER LA PRODUCTIVITÉ ET RENFORCER LA RÉSILIENCE DE L’AGRICULTURE ET DE LA PÊCHE Irrigation / connaissances : Renforcer la résilience agricole en évaluant le potentiel Croissance ++ d’irrigation, en améliorant la précision des données et en priorisant l’expansion d’une Atténuation irrigation rentable. Alors que les estimations indiquent que le potentiel d’irrigation Moyen terme Adaptation supérieur serait aux 259 hectares actuels, une évaluation fiable pourrait orienter des +++ investissements efficaces d’adaptation au changement climatique. Irrigation / investissement : Améliorer le capital physique en réhabilitant les infrastructures agricoles, notamment celles dédiées à la récupération et au stockage Croissance des eaux, pour appuyer l’irrigation agricole. La réhabilitation et l’expansion des +++ systèmes de récupération et de stockage des eaux de pluie pour faire face à la pénurie Atténuation Moyen terme d’eau à cause du changement climatique favoriseront l’expansion de l’irrigation. Le Adaptation coût d’un système de canalisations d’eaux usées et d’eaux pluviales, tel que décrit +++ dans la stratégie nationale, est estimé à 4,3 millions USD. 84 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT ACTIONS PRIORITAIRES AVANTAGES URGENCE Solutions fondées sur la nature / investissement : Adopter une approche élargie de l’économie bleue et intégrer des solutions fondées sur la nature afin de promouvoir une croissance économique durable et inclusive. L’adoption de cette approche peut stimuler une croissance durable en améliorant la qualité des sols, la recharge des Croissance + nappes phréatiques et la résilience des zones côtières. Les interventions telles que Atténuation + Moyen terme le labour en suivant les courbes de niveau, la plantation d’arbres et la restauration Adaptation ++ des zones côtières permettent d’appuyer l’agriculture, la pêche et la lutte contre l’érosion, tandis que les pratiques agricoles climato-intelligentes favorisent une meilleure conservation des sols et réduisent les pertes de récoltes face aux conditions météorologiques extrêmes. Agriculture / investissement : Renforcer l’agriculture climato-intelligente, développer les connaissances agricoles et encourager l’innovation. Le renforcement de l’agriculture climato-intelligente et la capacité des exploitants agricoles peut améliorer la productivité, la résilience et la sécurité alimentaire. L’agroécologie, qui inclut des Croissance + pratiques telles que les cultures intercalaires, l’agroforesterie et l’agriculture naturelle, Atténuation Long terme contribue au piégeage du carbone, à la préservation des écosystèmes et à l’adaptation Adaptation + au changement climatique. Le développement de la production locale de semences et de variétés de cultures résilientes permettra de réduire la dépendance aux importations et de renforcer la résilience agricole face au changement climatique. Pêche / institutions : Renforcer la résilience du secteur de la pêche au changement climatique en mettant en œuvre des réformes de gouvernance et en explorant des alternatives pour les moyens de subsistance et les activités économiques, notamment l’écotourisme côtier. Pour promouvoir une pêche durable, il sera essentiel de renforcer Croissance les capacités scientifiques et de développer les systèmes de suivi, de contrôle et de +++ Court terme surveillance afin de garantir le respect des pratiques durables. À travers l’Initiative Atténuation pour la transparence des pêches en cours, l’Union des Comores peut tirer parti de Adaptation ++ l’expérience d’autres petits États insulaires en mettant en place des aires protégées marines, en restaurant les récifs coralliens et en améliorant les techniques post- récolte. Pêche / investissement : Renforcer le secteur de la pêche du pays en développant les infrastructures de la chaîne d’approvisionnement L’investissement dans les infrastructures, les normes et la certification du secteur de la pêche peut améliorer Croissance la productivité et ouvrir de nouveaux marchés, tandis que la modernisation de la +++ Court terme production et de la distribution renforcera la résilience du secteur. Une approche Atténuation globale de l’« économie bleue », intégrant les énergies renouvelables et les Adaptation ++ infrastructures de transport, appuiera la durabilité de la croissance tout en préservant la santé des océans. Protection sociale / institution : Renforcer l’inclusion économique et la résilience des communautés en promouvant les systèmes alimentaires qui tiennent compte du changement climatique, et les emplois verts. Les systèmes de protection sociale Croissance + existants peuvent être exploités pour mettre en accord les politiques et renforcer la Atténuation collaboration intersectorielle entre l’agriculture et le marché du travail. En promouvant Long terme +++ les systèmes alimentaires qui tiennent compte du changement climatique et les Adaptation + emplois verts, le pays peut accompagner les ménages vulnérables dans leur transition vers des secteurs plus durables, tout en préservant les ressources naturelles et en réduisant les disparités de genre. Finances / institutions : Renforcer le cadre habilitant pour favoriser le développement de l’agriculture et de l’agro-industrie. Pour exploiter pleinement le potentiel de Croissance ++ l’agriculture en matière de création d’emplois et d’investissement, le gouvernement Atténuation Moyen terme pourrait simplifier la réglementation relative aux intrants, au financement et à l’accès Adaptation au marché, tout en appliquant sa législation alimentaire existante afin d’améliorer la sécurité sanitaire des aliments et de renforcer la compétitivité. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 85 ACTIONS PRIORITAIRES AVANTAGES URGENCE DOMAINE D’INTERVENTION 2 : INVESTIR DANS UN RÉSEAU D’INFRASTRUCTURES RÉSILIENTES AU CHANGEMENT CLIMATIQUE Routes / investissement : Accroître les investissements dans des infrastructures résilientes au changement climatique et dans des mesures de réduction de la Croissance vulnérabilité, y compris en priorisant l’entretien des principales routes nationales et +++ en relocalisant les actifs vulnérables. Un programme routier national complet, qui Atténuation + Court terme consolide les ressources et est axé sur l’investissement durable, nécessitera environ Adaptation 17,5 millions USD par an et permettra de mobiliser plus efficacement les ressources +++ internes et externes. Routes / institution : Opérationnaliser pleinement le Fonds Routier. Renforcer l’autonomie de gestion et financière du Fonds Routier en veillant au transfert intégral Croissance ++ de la taxe sur les carburants collectée et en ajustant le mécanisme de transfert du Atténuation ++ montant fixe de cette taxe pour prendre en compte l’inflation et la consommation réelle Court terme Adaptation de carburant. Ces mesures garantiront un flux de revenus plus prévisible, favorisant +++ la mise en œuvre d’une approche globale de gestion des actifs routiers, priorisant la résilience climatique et la connectivité du réseau. Système d’alerte précoce / connaissances : Renforcer la résilience au changement climatique dans la gestion des infrastructures en créant des services climatiques pour veiller à l’efficacité des systèmes d’alerte précoce. La mise en place d’un système Croissance + d’alerte précoce robuste permettra de réduire la vulnérabilité et de renforcer les Atténuation capacités de réponse aux catastrophes, en améliorant la planification d’urgence, en Moyen terme Adaptation établissant une salle de contrôle nationale et en élaborant des plans d’action locaux +++ de préparation. Ce système pourrait intégrer et diffuser les données climatiques entre les ministères, assurant une prise de décision efficace en cas d’urgence climatique et une planification stratégique à long terme. Port et aéroport / investissement : Renforcer la capacité d’adaptation en améliorant Croissance + la connectivité entre les îles et l’Afrique continentale à travers l’expansion du réseau Atténuation de transport climato-intelligent. Cette approche renforcera la capacité d’adaptation de Moyen terme Adaptation la population et de l’économie face au dérèglement climatique, tout en appuyant la +++ réalisation des objectifs de développement du pays. Gestion du littoral / institution : Renforcer la mise en œuvre et la gestion des solutions fondées sur la nature en établissant des directives et des normes claires pour les Croissance projets visant à améliorer la santé des sols, la recharge des eaux souterraines et la Atténuation Court terme protection du littoral, tout en assurant une coordination efficace des efforts entre les +++ secteurs. Ensemble, ces mesures peuvent contribuer à la réalisation des objectifs de Adaptation ++ résilience climatique et des cibles en matière de biodiversité. Gestion du littoral / investissement : Appuyer les infrastructures grises traditionnelles à travers des solutions fondées sur la nature pour le littoral, y compris la protection et la restauration des écosystèmes de carbone bleu, tels que les mangroves, les herbiers Croissance + marins et les récifs coralliens ; ces écosystèmes renforcent la résilience du littoral Atténuation Moyen terme tout en réduisant le besoin d’infrastructures coûteuses. Ces mesures permettront Adaptation de protéger le littoral contre les tempêtes et l’érosion, tout en favorisant le piégeage +++ du carbone et en appuyant les moyens de subsistance ainsi que le développement économique. Gestion du littoral / connaissances : Élaborer un cadre de suivi et d’évaluation pour quantifier les avantages à tirer des solutions fondées sur la nature ; une fois intégrées Croissance + à la gouvernance, ces solutions permettraient aux décideurs de mesurer leur impact Atténuation Moyen terme sur les taux de recharge des eaux souterraines, la qualité des sols et la résilience du Adaptation littoral, tout en fournissant des données essentielles pour orienter les investissements +++ et les politiques futurs. 86 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT ACTIONS PRIORITAIRES AVANTAGES URGENCE Éducation / investissement : Aménager des infrastructures éducatives résilientes aux chocs climatiques. La reconstruction des écoles endommagées pourrait être priorisée, avec une réhabilitation des infrastructures affectées et l’acquisition de Croissance ++ terrains destinés aux constructions résilientes au changement climatique. La mise en Atténuation Court terme œuvre de méthodes de construction résilientes aux catastrophes et l’entretien des +++ infrastructures de santé, notamment les installations WASH contribueront à créer des Adaptation + environnements d’apprentissage durables, préservant ainsi l’avenir des élèves aux Comores. Santé / investissement : Renforcer les systèmes et les infrastructures de santé Croissance résilients au changement climatique. L’élaboration et l’application de normes +++ résilientes au changement climatique pour les infrastructures de soins de santé, ainsi Atténuation + Court terme que pour les systèmes d’eau, assainissement et hygiène, combinées à la rénovation Adaptation des installations existantes, contribueront à la résilience des systèmes de santé au +++ changement climatique. DOMAINE D’INTERVENTION 3 : ASSURER LA PRÉSERVATION DE L’APPROVISIONNEMENT EN EAU FACE À LA DEMANDE CROISSANTE ET AU CHANGEMENT CLIMATIQUE. Approvisionnement en eau / investissement : Accroître les investissements dans l’approvisionnement, le stockage et la distribution d’eau afin de garantir un accès sûr Croissance à l’eau dans un contexte de risques associés au changement climatique. Cela inclut +++ Moyen terme notamment la réhabilitation du réseau d’eau vieillissant de Moroni et la lutte contre Atténuation l’insécurité hydrique en milieu rural, en appuyant différents usages tels que l’eau Adaptation ++ potable, l’agriculture, la pêche et l’hydroélectricité. Qualité de l’eau / investissement : Améliorer la qualité de l’eau en renforçant les contrôles de sa qualité, en élargissant les programmes d’eau, assainissement Croissance et hygiène, et en renforçant les mesures de protection de l’environnement. Cela +++ nécessitera la construction et l’équipement de nouveaux laboratoires pour effectuer Court terme Atténuation des analyses régulières de la qualité de l’eau, en collaboration avec les autorités Adaptation ++ sanitaires, y compris un laboratoire sous la tutelle de l’Institut National de Recherche pour l’Agriculture, la Pêche et l’Environnement. Gestion des ressources en eau / institution : Élaborer des schémas directeurs Croissance de l’eau au niveau des îles, en intégrant les principes de la Gestion intégrée des +++ ressources en eau et en s’appuyant sur le plan d’action de la SCA2D. Cet exercice Atténuation + Court terme permettra de définir et de prioriser les investissements nécessaires pour assurer un Adaptation approvisionnement en eau potable résilient et valoriser les ressources en eau sur les +++ trois îles. Santé / connaissances : Renforcer les stratégies de santé et la capacité du personnel de santé en le formant aux risques sanitaires associés au changement climatique, Croissance + notamment aux maladies d’origine hydrique ; ce renforcement inclut l’élaboration de Atténuation plans d’urgence pour les formations sanitaires et la création d’une ligne budgétaire Moyen terme Adaptation dédiée aux activités d’adaptation au changement climatique. Ces mesures garantiront +++ une attention continue et des ressources durables pour améliorer les résultats en matière de santé face aux impacts du changement climatique. Santé / connaissances : Renforcer les capacités de surveillance et de détection des maladies en établissant un système national d’alerte précoce multialéas ; ce Croissance + système intégrera les dispositifs existants de surveillance des maladies et améliorera Atténuation l’allocation des ressources. Le renforcement des liens entre les données climatiques Moyen terme Adaptation et les processus décisionnels en santé, associé à la promotion de la collaboration +++ multisectorielle et à l’élaboration d’un plan stratégique de communication sur les risques, permettra d’améliorer la préparation et la réponse aux risques sanitaires. RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 87 ACTIONS PRIORITAIRES AVANTAGES URGENCE DOMAINE D’INTERVENTION 4 : ACCROÎTRE LA CAPACITÉ DE PRODUCTION D’ÉNERGIE RENOUVELABLE Production d’énergie renouvelable / investissement : Développer la production Croissance d’énergie renouvelable dans le pays, en accord avec les objectifs du Plan de +++ développement au moindre coût du pays. La transition des combustibles fossiles vers Atténuation Moyen terme les sources d’énergie renouvelables renforcera la résilience au changement climatique +++ et réduira la dépendance aux importations coûteuses, tout en capitalisant sur les Adaptation + partenariats internationaux pour le financement et le renforcement des capacités. Production d’énergie renouvelable / institution : Mettre en œuvre le plan de transition en renforçant les rôles institutionnels. La mise en place d’un comité technique et Croissance ++ financier dédié au sein du Ministère de l’Énergie, de l’Eau et des Hydrocarbures Atténuation ++ Court terme assurera un suivi rigoureux et une mise en œuvre efficace du plan de transition, tout en Adaptation + renforçant les cadres réglementaires et en encourageant l’innovation nationale dans les technologies énergétiques propres. Tarification de l’électricité / institution : Réformer la tarification de l’électricité. La priorisation de la réforme de la tarification de l’électricité permettra de réduire les subventions énergétiques élevées, d’améliorer l’accessibilité et de garantir la fiabilité Croissance ++ du service, tout en ciblant spécifiquement les ménages vulnérables et les petites et Atténuation ++ Moyen terme moyennes entreprises. Il sera crucial de réaliser une évaluation détaillée des coûts de Adaptation production de l’électricité et de faire participer les principales parties prenantes aux consultations afin de dégager un consensus et mener à bien la mise en œuvre des ajustements tarifaires nécessaires. Finances / institution : Améliorer le cadre juridique et réglementaire régissant le secteur de l’énergie. La mise à jour du cadre juridique et réglementaire permettra une intégration rentable tout en renforçant la transparence et la concurrence dans Croissance ++ le secteur de l’électricité. Les règlements d’application de la loi sur les énergies Atténuation ++ Long terme renouvelables récemment adoptée, ainsi que la mise en place d’un cadre pour Adaptation les Producteurs d’électricité indépendants avec des contrats d’achat d’électricité standardisés, attireront les investisseurs nationaux et étrangers, tout en favorisant la participation du secteur privé aux projets d’énergies renouvelables. Coût de l’électricité / connaissances : Élaborer une stratégie nationale du secteur de l’énergie. L’élaboration d’une stratégie énergétique bien coordonnée, appuyée par une Croissance ++ vision commune aux principales parties prenantes, sera essentielle pour promouvoir Atténuation ++ Court terme l’expansion de l’électricité à moindre coût, tout en tenant compte des conditions et Adaptation contraintes locales, et en veillant à ce qu’elle soit durable et équitable. Légende Court terme : 1 à 2 ans ; moyen terme : 3 à 5 ans ; long terme : 5 ans et plus. 88 RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT RAPPORT NATIONAL SUR LE CLIMAT ET LE DÉVELOPPEMENT 89 © Steve Loris Gui-Diby Références 1. Groupe de la Banque africaine de développement. (2023). « Union des Comores : étude économique et sectorielle : Profil sectoriel eau et assainissement des Comores ». 2. Bell, J. et al (2018). « Adaptations to maintain the contributions of small-scale fisheries to food security in the Pacific Islands ». Politique maritime. https://doi.org/10.1016/j.marpol.2017.05.019 3. Bourgoin, C. et al (2016). « A spatially explicit assessment of climate change vulnerability in the agricultural sector of the Union of the Comoros ». Document de travail du CCAFS. https://cgspace. cgiar.org/items/2cfaa7a6-60e5-43d4-82cb-6524328ff7d8 4. Cervigni, Raffaello, Rikard Liden, James E. Neumann et Kenneth M. 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