De la connectivité à l’OPPORTUNITÉ Exploiter les corridors régionaux pour soutenir la croissance et le développement en Guinée CIIP Competitive Industries and Innovation Program Design et visualisations par Voilà: | chezVoila.com De la connectivité à l’OPPORTUNITÉ Exploiter les corridors régionaux pour soutenir la croissance et le développement en Guinée TABLE DES MATIÈRES Remerciements p.6 Résumé exécutif p.9 1Vue Quelles 2 sont les d’ensemble opportunités? p.15 p.25 3 4 Quelles Que contraintes? faut-il faire? p.39 p.59 Annexes p.79 De la connectivité à l’opportunité Remerciements Ce rapport a été préparé par une équipe dirigée par Ernest Sergenti (écono- miste principal) et Megha Mukim (économiste urbaine principale), et composée de Puja Guha (consultant), Alex Chunet (spécialiste des terres et du géospatial), Mathilde Sylvie Maria Lebrand (économiste principale) et Boulel Touré (économiste principal pays). Ce rapport a bénéficié de nombreux échanges et conseils avec des fonctionnaires et des experts du gouvernement national, notamment le Ministère du Plan et de la Coopération Internationale (MPCI), le Ministère de l’Urbanisme, de l’Habitat et de l’Aménagement du Territoire, le Ministère de l’Administration du territoire et de la Décentralisation (MATD), le Ministère des Travaux Publics (MTP), le Ministère de l’Economie et des Finances (MEF), le Ministère du Budget, le Ministère de l’Envi- ronnement et du Développement Durable (MEDD), le Ministère des Transports, le Ministère des Mines et de la Géologie, le Ministère de l’Agriculture et de l’Élevage, le Ministère de l’Energie, de l’Hydraulique et des Hydrocarbures, et le Ministère chargé des Investissements et du Partenariat Public-Privé. Parmi les responsables et experts des collectivités locales qui ont apporté leur éclai- rage, on peut citer les mairies de Mamou, Kankan, Nzérékoré et Boké et la repré- sentation locale de l’Agence régionale des PME et de l’industrie, de la Direction de l’habitat et de l’urbanisme, de l’Agence Guinéenne Pour la Promotion de l’Emploi, des Collectivités, de l’Aide à la jeunesse, de la Formation technique, de l’Électricité de Guinée, de la Société d’Eau de Guinée, du Ministère de l’Agriculture et de l’Éle- vage, du Syndicat guinéen des transports, ainsi que la Fédération des producteurs de fruits, la Fédération du Linyam et du Sésame, la Fédération des producteurs de beurre de karité, la Guinéenne des Terroirs et la Bourse de sous-traitance de Boké. Nous tenons à remercier tous les fonctionnaires et experts que nous avons ren- contrés au cours de la recherche, de la conceptualisation et de la rédaction de ce rapport pour leur temps, leurs idées et leur générosité. L’équipe est également très reconnaissante à l’Union européenne (Alexandre Serres et Veerle Smet) et à la Banque africaine de développement (Driss Belamine), pour le partage d’études et d’idées ; aux membres du projet PAST (René Cousin, Eliot Simpson) pour avoir partagé le projet de Plan de Déplacements Urbains (PDU) et pour nous avoir permis d’utiliser ses résultats ; à Jacques Maffre et à la Direction Nationale des Impôts pour le partage d’informations sur la localisation des activités commerciales ; à Sory Kouyaté pour ses riches conversations et sa connaissance encyclopédique de l’histoire des projets et interventions urbains à Conakry ; et à Catherine Farvacque-Vitkovíc pour avoir discuté des conclusions du rapport et de son compte rendu des interventions de la Banque mondiale à Conakry. 6 Remerciements Nous tenons également à remercier les collègues d’autres pratiques mondiales qui ont participé au brainstorming et aux discussions avec l’équipe tout au long du projet, notamment Marc Navelet (spécialiste principal des transports, IAET2), Federico Antoniazzi (économiste des transports), El Hadji Adama Touré (économiste agricole principal), Marie Caroline Paviot (économiste agricole principale, SLCAG), Mariama Altine Mahamane (économiste agricole principale, SAWA4), Nicolas Perrin (Practice Manager, SAWS1), Kaori Oshima (Senior Social Development Specialist, SEAS1), Abel Bove (Senior Public Sector Specialist, EMNGU), Roy Katayama (Senior Economist, ELCPV), Ibrahim Magazi (Health Economist), Assane Dieng (Senior Education Specialist, HAWE2), Djamali Ibrahime (Senior Energy Specialist, IAWE2), Boubacar Bocoum (Lead Mining Specialist, IEEXI), Ellysar Baroudy (Lead Natural Resources Management Specialist, SAWE1), Idriss Deffry (Environmental Spécialiste, SAWE1) et Mamady Kobele Keita (spécialiste de l’environnement, SAWE1). L’équipe remercie ces collègues pour les examens par les pairs et les contribu- tions de ces collègues : Somik Lall (Conseiller économique, Banque mondiale), Michele Ruta (Chef adjoint, Département de la stratégie et de l’examen des poli- tiques, Fonds monétaire international), Aiga Stokenberga (économiste principale des transports, ILCT1), Anca Cristina Dumitrescu (Consultante, IAWT4), Soraya Goga (Spécialiste urbaine principale, SAEU3), Thierno Hamidou Diallo (Analyste des opérations, AWMGN), Thierno Samba Sy (Consultant, IFC CEMIA), Saramory Kampo (Chargée principale des opérations, IFC CEMIA), Julie Babinard (Chargée princi- pale des opérations, AFEDE), Khaleda Atta, Diana Hristova (Consultante, EAEF1), Micky Ananth (Responsable des opérations, EAWM1) et Susana M. Sanchez (Économiste principale, OPSCE). La haute direction de la Macroéconomie, du Commerce et de l’Investissement, et des Pratiques mondiales en milieu urbain, résilience et foncier et de l’Unité de gestion par pays a fourni des conseils et un soutien solide tout au long de la recherche, notamment Theo David Thomas (Practice Manager), Sylvie Debomy (Practice Manager), Nestor Coffi (Country Manager), Coralie Gevers (ex-Country Director, maintenant Chief of Staff), Andrea Coppola (Program Leader), Lars Christian Moller (Practice Manager), et Meskerem Brhane (Directeur régional, SMNDR). Connie Kok Shun (ex-adjointe principale de programme, maintenant à la retraite), Theresa Adobea Bampoe (adjointe de programme), Maude Jean-Baptiste (adjointe de programme), Ngamet Touré (adjointe de programme) et Aissatou Tidiane Diallo (adjointe de programme) ont fourni une excellente aide administrative. Voilà: était responsable de la conception, de la mise en page et de la visualisation du rapport. Ces travaux ont bénéficié d’un généreux soutien financier du Programme des indus- tries compétitives et de l’innovation. 7 Résumé exécutif Les objectifs de cette étude sont (1) d’évaluer l’impact de la connectivité régionale et interne sur les emplois et l’accès aux services et (2) de fournir des recommandations pour les réformes politiques et les investissements. Cette analyse utilise des approches quantitatives et qualitatives pour comprendre les opportunités qu’une meilleure connectivité offre aux villes secondaires en Guinée, les facteurs qui pourraient limiter le potentiel de croissance et, comment les décideurs politiques à différents niveaux de gouvernement devraient réagir pour maximiser les avantages des corridors économiques. Cette analyse vise également à fournir une meilleure compréhen- sion de l’impact relatif des améliorations du transport et des réformes directes de facilitation du commerce. Enfin, l’étude évalue les réformes complémentaires, les investissements et les politiques globales afin d’élaborer des recommandations pratiques et applicables qui pourraient être déployées pour accroître les bénéfices d’un meilleur commerce et d’une meilleure connectivité des zones urbaines en Guinée. 9 De la connectivité à l’opportunité L’analyse et les recommandations présentées ici soutiennent également la transition de la Guinée vers une économie plus diversifiée et à plus forte valeur ajoutée. L’un des objectifs sous-jacents de cette étude est de déterminer comment renfor- cer et exploiter le solide secteur minier de la Guinée pour soutenir le développe- ment d’autres secteurs dans et autour des villes secondaires du pays. Les secteurs économiques tels que l’agriculture, la transformation des biens et les autres services ont un fort potentiel. Cependant, la faible gestion des agglomérations urbaines secondaires de la Guinée et le potentiel mal compris de ces régions empêchent le pays d’atteindre son potentiel de diversification, tant au niveau sectoriel que spatial. Comme le développe ce rapport ci-dessous, pour se préparer à une diversification potentielle, y compris l’entrée sur le marché d’autres biens commercialisables, les villes secondaires doivent réduire le coût des affaires et attirer davantage d’investis- sements dans tous les secteurs. Le rapport commence par une analyse quantitative, qui identifie les impacts attendus des investissements potentiels dans les infrastructures routières ou les réformes de facilitation du commerce, ainsi que les opportunités qu’ils représen- teraient pour les villes secondaires de Guinée. Des modèles quantitatifs sont utilisés pour estimer ces impacts en comparant un scénario de base (représentatif des temps de parcours actuels) et les coûts associés à différents scénarios intégrant soit (i) des améliorations d’infrastructures, soit (ii) une réduction des temps de parcours et/ou des délais aux frontières. Les modèles quantifient les gains (ou les pertes) d’un point de vue spatial, en désagrégeant les impacts pour chaque ville guinéenne, et en évaluant l’impact de ces facteurs séparément et en combinaison. L’analyse quantitative utilise deux approches : premièrement, un modèle gra- vitationnel d’accès au marché (MA) basé sur la méthodologie de Donaldson et Hornbeck (2016), et deuxièmement, un modèle d’équilibre général (GE) spatial pour estimer les gains plus larges et les effets d’entraînement basé sur Lebrand (2021).1 Les deux modèles se complètent, avec des perspectives spatiales, structu- relles et temporelles différentes. Le modèle MA mesure l’accès entre les villes de Guinée et avec les autres villes d’Afrique de l’Ouest, tandis que le modèle GE spatial se concentre sur l’accès au niveau sous-national (ou préfecture) en Guinée et dans la région d’Afrique de l’Ouest. Avec le modèle MA, nous nous concentrons sur les gains des villes guinéennes, et nous utilisons le modèle GE pour faire des comparai- sons transnationales. En outre, le modèle MA fournit une image statique de l’impact des réformes du transport et du commerce, tandis que le modèle spatial GE utilise une approche dynamique qui incorpore des ajustements à plus long terme de l’équilibre général des salaires et de la population. Nos résultats indiquent que les gains globaux liés aux investissements en infrastruc- tures sont faibles, à moins qu’ils ne soient accompagnés de mesures de facilitation des échanges. Avec les deux modèles, les gains liés à l’amélioration des infrastruc- tures de transport sont plus élevés au sein des pays qu’entre les pays. En revanche, les gains liés aux mesures de facilitation des échanges sont beaucoup plus impor- tants et ont un impact plus uniforme dans les villes. Alors que les investissements dans les infrastructures seules génèrent une augmentation maximale de 2,1 % des salaires réels, lorsqu’ils sont combinés à des mesures de facilitation des échanges, les gains sont beaucoup plus élevés, soit plus de 8 %. En fait, les gains résultant de la réduction des délais aux frontières amplifient les gains de la modernisation des routes. Cela souligne un point important : la modernisation des infrastructures phy- siques et la création de frontières plus fluides devraient faire partie d’un ensemble de politiques visant à améliorer la connectivité nationale et régionale. 1.  Lebrand (2021). Les gains économiques de l’investissement dans les corridors routiers en Afrique de l’Ouest. 10 Résumé executif L’analyse qualitative illustre les conditions locales préexistantes dans les villes secondaires qui permettraient (ou empêcheraient) d’exploiter les possibilités offertes par une meilleure connectivité. Quatre villes secondaires sont sélection- nées pour des études de cas approfondies - servant d’archétypes de l’ensemble des zones urbaines du pays. La méthodologie des études de cas est basée sur des entretiens avec les autorités locales, les entreprises locales et d’autres parties pre- nantes. Ces entretiens permettent de plonger plus profondément dans la matière, là où les données empiriques font défaut, et fournissent ainsi une compréhension plus complète des réalités et des capacités locales. Ainsi, des recommandations poli- tiques concrètes peuvent être fournies, ce qui permet de les détailler davantage et de s’assurer qu’elles sont applicables. Quatre villes d’étude de cas (Kankan, Mamou, Boké et Nzérékoré) ont été choisies pour cette analyse. Ces villes sont largement représentatives des villes secondaires de Guinée, et leur sélection a été réitérée par les parties prenantes en Guinée. Ces villes présentent un potentiel de gains grâce à une meilleure connectivité, elles sont bien réparties dans les différentes régions de la Guinée et elles représentent différentes typologies. Kankan est la deuxième plus grande ville de Guinée, située le long du corridor de transport reliant la Guinée au Mali. Mamou est située au centre du pays et constitue une plaque tournante pour la plupart des principaux corridors de transport en Guinée. Comme Conakry, Boké est située dans la région maritime, près de la côte, et est un important centre minier. Nzérékoré se trouve en Guinée forestière, près de la frontière avec la Côte d’Ivoire et le Liberia. Les contraintes qui entravent la croissance économique dans les villes étudiées comprennent un manque de planification spatiale et d’investissements coor- donnés, ce qui contribue à la fragmentation urbaine, à un accès faible et inégal aux services publics et, surtout, à un manque de capacités et de financement au niveau du gouvernement local. L’absence de planification spatiale signifie que les économies d’agglomération ne sont pas réalisées. Les vastes expansions urbaines ont fait peser un fardeau encore plus lourd sur la prestation des services publics en raison de cette fragmentation, car les surfaces se sont étendues sans contact direct avec les parties mieux desservies de la ville. Une faible concentration d’activités commercialisables amplifie également le manque de compétitivité, notamment en raison de l’absence de services publics fiables (en particulier l’approvisionnement en électricité et en eau courante). Les niveaux limités de services publics rendent les terrains viabilisés rares, ce qui constitue une contrainte majeure pour les entreprises locales. Les exportations potentielles de produits agricoles et autres sont entravées par le mauvais entretien des routes et le manque d’équipements et d’infrastructures d’entreposage frigorifique. En outre, les initiatives locales entreprises par les villes de Guinée sont entravées par un mandat administratif restreint, une capacité limitée à mettre en œuvre ce mandat et un manque de financement des investissements. Les contraintes de capacité et les contraintes juridiques entravent les initiatives politiques des collectivi- tés locales. En d’autres termes, le « coin du maire », c’est-à-dire le pouvoir politique dont disposent les dirigeants locaux, est faible. En vertu du code communal, les communes disposent de quatorze pouvoirs distincts en matière d’administration locale, y compris la capacité de fournir des services publics à petite échelle et des dispositions en matière d’infrastructures, telles que la réhabilitation des bâtiments scolaires et hospitaliers. Cependant, malgré les pouvoirs explicitement décentralisés par le Code Communal, dans la pratique, les gouvernements locaux sont fortement dépendants des structures gouvernementales nationales opérant au niveau local. Les transferts du gouvernement national vers les GL sont basés sur des règles opaques, ce qui signifie que les communautés ont rarement bénéficié de ces trans- ferts, sauf dans les zones minières où des transferts réels ont permis le développe- ment de nouvelles infrastructures.2 2.  UNECA (2009). Finances publiques locales : Expérience Guinéenne. Lien 11 De la connectivité à l’opportunité Sur la base de l’analyse des opportunités et des contraintes sous-jacentes, l’étude donne la priorité aux améliorations politiques suivantes - réformes et investis- sements. Celles-ci sont présentées dans le tableau 1. Les recommandations sont organisées en 3 catégories - actions nécessaires (surlignées en rouge), actions sou- haitables (surlignées en orange), et paris stratégiques (surlignés en bleu). a. Institutions et réglementation : Pour attirer les investissements privés, la Guinée devrait achever les réformes en cours du cadre des partenariats public-privé (PPP), y compris la création d’une nouvelle unité spécialisée pour aider à faire avancer les nombreux projets PPP en cours, notamment dans les secteurs de l’énergie et des transports.3 En outre, plusieurs interventions peuvent contribuer à renforcer les capacités des collectivités locales, notamment en augmentant les sources de recettes fiscales propres4 et d’autres recettes locales. Enfin, l’amélioration des réglementations en matière de normes et des installations associées aidera les entreprises agricoles à répondre aux exigences des acheteurs en aval. Au niveau national, la mise en œuvre complète d’un système de guichet unique pour les douanes (à Conakry et aux frontières terrestres du pays) rationalisera les impor- tations et les exportations afin de soutenir les entreprises de tous les secteurs. La mise en œuvre des réformes de la politique commerciale permettra également d’améliorer la politique de concurrence, ainsi que la promotion, la protection et la rétention des investissements.5 b. Infrastructures et terrains : Une meilleure planification spatiale ainsi que la réduc- tion et l’amélioration des réglementations relatives à l’utilisation des terres amélio- reront l’environnement pour les investisseurs potentiels et permettront de dresser un inventaire des terrains, bâtiments et infrastructures publics. Des dispositions telles que des réformes dans les secteurs de l’énergie et de l’eau et l’utilisation de contrats basés sur les performances pour garantir une meilleure qualité des infrastructures construites peuvent également contribuer à lever les contraintes qui pèsent sur la prestation des services publics. c. Compétences et innovation : Des programmes de formation professionnelle pour la population locale afin de répondre aux besoins en main-d’œuvre qualifiée du secteur minier. L’agriculture étant un secteur à fort potentiel, les services de vulgarisation aideront à améliorer la qualité de la production pour des cultures spécifiques ayant une demande en aval (par exemple, les provisions alimentaires pour les sociétés minières). d. Soutien et financement des entreprises : Les dispositions relatives à la promotion des investissements contribueront à attirer les investisseurs potentiels. En outre, un soutien devrait être apporté aux petites et moyennes entreprises (PME) locales, notamment en matière de financement et de formation technique, de gestion et de développement commercial de base. 3.  C’est également une des principales recommandations du Diagnostic du secteur privé national (CPSD) 2020 de la Guinée. 4.  Les recettes propres des collectivités locales sont définies comme les recettes perçues par une collectivité locale à partir de sa propre imposition d’une taxe, d’une licence, d’un droit ou de toute autre charge. 5.  Mattoo, Aaditya ; Rocha, Nadia ; Ruta, Michele. 2020. L’évolution des accords commer- ciaux approfondis. Document de travail pour la recherche sur les politiques ; n° 9283. Banque mondiale, Washington, DC. 12 Résumé executif TABLEAU 1 Résumé des recommandations Institutions Infrastructures & Compétences & Soutien & Finance- & réglementation terrains innovation ment des entreprises Mise en œuvre Réglementation de Programmes de Promotion des inves- complète d’un environ- l’utilisation des sols développement tissements nement plus favorable des compétences aux PPP Aménagement du Accès au financement territoire Soutien ciblé sur et programmes de Normes et certifications l’industrie développement des Gouvernement nationales Amélioration de PME central l’infrastructure des Réforme de l’environ- services publics nement des entreprises Réformes de la poli- tique commerciale Renforcement des Amélioration des Programmes de Accès au financement capacités des GL services publics développement et programmes de Gouvernement locaux des compétences développement des local PME Soutien ciblé sur l’industrie Clé : Actions nécessaires, actions souhaitables et paris stratégiques. Plusieurs questions restent ouvertes et dépassent le cadre de cette étude. Les actions visant à évaluer et à soutenir une meilleure durabilité environnementale, ainsi que les interventions visant à mieux s’adapter au changement climatique et à l’atténuer, n’ont pas été prises en compte dans le cadre de ces analyses. L’étude ne comprend pas non plus d’évaluations détaillées de la chaîne de valeur pour les villes étudiées ou les régions environnantes. Ces domaines devraient être pris en compte dans le cadre de travaux futurs visant à informer le développement des villes secon- daires en Guinée. 13 1 Vue d’ensemble 15 De la connectivité à l’opportunité 1.1 Quels sont les objectifs de cette étude ? Les principaux objectifs de cette étude sont (1) d’évaluer l’impact de la connecti- vité régionale et interne sur les emplois et l’accès aux services, et (2) de fournir des recommandations pour les réformes politiques et les investissements. Tout d’abord, l’analyse examine l’impact relatif des améliorations apportées aux transports et des réformes directes de facilitation du commerce. Deuxièmement, et c’est important, l’étude évalue également les réformes complémentaires, les investissements et les politiques globales à déployer dans les zones urbaines pour améliorer les rende- ments d’un meilleur commerce et d’une meilleure connectivité. Elle se concentre sur la manière dont ces interventions peuvent être classées par ordre de priorité et dont les coalitions peuvent être développées pour la mise en œuvre. Les recommanda- tions se veulent pratiques, applicables et réalisables dans le contexte actuel du pays. 16 Vue d’ensemble 1.2 Pourquoi, où et comment ? La Guinée est dotée de ressources naturelles considérables par rapport à son PIB mais reste l’un des pays les plus pauvres et les moins compétitifs du monde. Bien que la Guinée bénéficie d’importants gisements de minerai de fer, de bauxite, d’or et de diamants, et d’un grand potentiel hydroélectrique, 43.7 % de sa population vit sous le seuil de pauvreté national, avec un taux de pauvreté d’environ 55 % en milieu rural et avec environ 35 % de la population en situation d’extrême pauvreté. L’accès aux services de base est faible, seule une petite partie de la population bénéficiant d’un accès à l’électricité (33 %)6 et à des installations sanitaires améliorées (20 %). L’inégalité entre les sexes est un défi, avec seulement 40 pour cent de filles inscrites dans l’enseignement secondaire (contre 50 pour cent pour les garçons). Selon le rapport 2018 sur la compétitivité mondiale, la Guinée se classe 126e sur 140 pays, avec de grands écarts dans la qualité des institutions publiques et privées, des infrastructures (transport, électricité, télécommunications), de l’éducation, de la taille du marché et de la capacité d’innovation. Pour que le secteur privé national s’épanouisse et crée des emplois, la Guinée doit de toute urgence (i) tirer parti des ressources de son secteur minier pour dévelop- per d’autres secteurs de l’économie et (ii) améliorer la connectivité économique nationale. L’exploitation minière représente une part importante du PIB et des exportations de la Guinée, mais fournit peu d’emplois, et les revenus du secteur ne sont pas correctement répartis dans le pays. En revanche, la majorité de la popu- lation est employée dans le secteur agricole, qui souffre d’une faible productivité. Conakry fonctionne comme le principal centre économique du pays, tandis que la connectivité économique vers et entre les villes secondaires est limitée par la faiblesse des infrastructures routières et de transport. L’agriculture et l’agro-industrie sont freinées par la faiblesse des infrastructures le long des corridors domestiques critiques entre les villes secondaires et Conakry. Les corridors domestiques critiques sont généralement congestionnés en raison des inondations, du mauvais entretien des routes et des ponts à une seule voie, ce qui décourage les activités com- merciales.7 L’amélioration de la connectivité économique entre le réseau de villes secondaires de la Guinée est nécessaire pour le développement du secteur privé et l’amélioration de la productivité. Avec une masse terrestre d’environ 246 000 kilomètres carrés, la Guinée est le 77e plus grand pays du monde, plus grand que le Royaume-Uni. Selon plusieurs entreprises locales, une meilleure connectivité entre les villes secondaires du pays et avec Conakry pourrait favoriser le développement des échanges et de la croissance, rendant ces villes plus attrayantes pour les investisseurs et contribuant à réduire la pauvreté dans ces régions. Ce dernier mécanisme pourrait également servir de frein à l’exode rural vers Conakry, qui a du mal à répondre aux besoins croissants de ses citoyens. 6.  Direction National des Investissements Publics, Guinée 7.  Entretien réalisé avec des responsables du gouvernement local à Nzérékoré 17 De la connectivité à l’opportunité Les8 difficultés d’accès aux villes secondaires, telles que Kankan et Mamou, ont été citées comme la principale raison pour laquelle plusieurs entreprises agricoles ne peuvent pas être situées plus près des zones de production idéales.9 Dans le contexte des investissements de connectivité prévus et potentiels, les agglomérations urbaines de la Guinée représentent une importante opportunité inexploitée de transformation structurelle du pays.10 L’examen du secteur urbain de la Guinée de 2019 a révélé que les zones urbaines du pays ne jouent actuellement pas le rôle de moteurs de la croissance et de la compétitivité et ne parviennent pas à fournir des services publics à leurs habitants. Outre Conakry (qui compte plus de 1,8 million d’habitants), la densification au sein des villes secondaires de la Guinée se poursuit à un rythme élevé, notamment à partir de l’augmentation des liens entre zones urbaines et rurales. Conakry et d’autres regroupements urbains ont le poten- tiel de fournir des opportunités de croissance basées sur des économies d’échelle et des marchés profonds. Cependant, la compréhension du potentiel de marché de ces agglomérations urbaines reste limitée, y compris les possibilités de liens verti- caux entre différents types de villes et de zones rurales. Les agglomérations urbaines en Guinée doivent encore générer les bénéfices attendus des économies d’échelle productives et devenir les moteurs de la croissance et de la création d’emplois. Malgré les avantages géographiques, le coût élevé et l’inefficacité de la logis- tique commerciale limitent l’intégration régionale et mondiale de la Guinée. Les principaux partenaires commerciaux de la Guinée se trouvent en dehors de la région (70 % en Asie et 26 % en Europe) et moins de 7 % de ses importations officielles et 2,6 % de ses exportations ont lieu en Afrique. Parmi les principaux obstacles au commerce régional, on peut citer l’extrême faiblesse du réseau routier et le manque d’harmonisation des systèmes douaniers avec les pays limitrophes. Pour le commerce extérieur, le port de Conakry est parmi les plus chers de la région. Abidjan, Dakar et Nouakchott sont moins chers. Le port est également très encombré, avec des taux d’occupation supérieurs à 70 % pour tous les postes d’amarrage, sauf deux, et il est situé sur la péninsule surpeuplée de la ville, ce qui contribue à des embouteillages importants. En outre, les infrastructures commerciales et de transport de la Guinée ont pris du retard par rapport à celles de ses pairs. Selon l’indice de performance logistique (IPL, 2018) de la Banque mondiale, qui mesure l’efficacité de la logistique à travers les ports, les chemins de fer, les routes et les technologies de l’information, les performances de la Guinée ont fortement diminué ces dernières années, se situant derrière les moyennes des pairs de la région et des groupes de revenus. Cette baisse est principalement dû à la baisse de la qualité des routes et des infrastruc- tures, en particulier par rapport aux autres pays de la région. En outre, avec 2,9 km pour 100 kilomètres carrés, la densité routière nationale de la Guinée est bien en deçà des critères de référence (5,1 km en Côte d’Ivoire, 6,2 km au Ghana et 6,8 km en moyenne en Afrique subsaharienne). En outre, moins d’un tiers des routes natio- nales sont revêtues, et celles qui le sont se détériorent au fil du temps. En 2004, seu- lement 35 % des routes nationales revêtues de la Guinée étaient en bon état, selon les données disponibles. Cette part est tombée à 25 pour cent en 2012, et à seule- ment 16 pour cent en 2014. Ces défis sont confirmés par le très faible classement de la Guinée dans l’IPV (129e sur 160 pays), avec des scores faibles pour la qualité de ses infrastructures liées au commerce et au transport, ainsi que pour l’efficacité du processus de dédouanement par les agences de contrôle des frontières.11 8.  Avner, P. et Mukim, M. 2019. « Examen du secteur urbain en Guinée : planification, connexion, financement à Conakry », Groupe de la Banque mondiale. Lien 9.  Entretiens réalisés avec trois entreprises agroalimentaires guinéennes dont le siège est situé dans les environs de Conakry. 10.  Avner, P. et Mukim, M. 2019. « Examen du secteur urbain en Guinée : planification, connexion, financement à Conakry », Groupe de la Banque mondiale. Lien 11.  Banque mondiale (2020). Diagnostic du secteur privé en Guinée (CPSD) 18 Vue d’ensemble FIGURE 1 Les infrastructures Figure 1 commerciales et de transport de la Guinée ont pris du retard par rapport à celles de ses pairs. les infrastructures commerciales et de transport de la Guinée ont pris du retard par rapport à celles de ses pairs. Indice de performance logistique (IPL, 2018) Côte d'ivoire Mali Sénégal Libéria Guinée 3 3.08 2.59 2.5 Pays à faible revenu 2.25 2.23 2.20 2 1.5 1 2010 2018 2010 2018 2010 2018 2010 2018 2010 2018 En outre, la Guinée devrait dépenser davantage pour l’entretien de son réseau routier existant. En 2019, le gouvernement a alloué environ 289 milliards GNF (30 millions USD ou 0,25 % du PIB) à l’entretien des routes, alors qu’un minimum de 1 % du PIB est normalement requis et plus si les routes se sont détériorées et que le réseau est étendu. L’entretien courant des routes détériorées nécessite des réparations de surface qui sont plus coûteuses. Il existe également une corréla- tion entre la taille d’un réseau routier correctement entretenu et le PIB du pays. Les pays en développement dont le PIB est d’environ 10 milliards USD peuvent raisonnablement se permettre d’entretenir correctement un réseau d’environ 20 000 km, et non 45 000 km comme en Guinée. Pour la Guinée, en 2020, le ratio investissement routier/entretien a atteint 8:1 en raison du grave sous-financement de l’entretien routier. 19 De la connectivité à l’opportunité L’examen de cas historiques montre que le développement des corridors de transport peut avoir un impact important sur le développement économique des villes et des régions, mais que les résultats sont largement déterminés par des politiques et des investissements complémentaires. Les études sur les chocs positifs de connectivité font état d’impacts généralement positifs sur le revenu réel, la pauvreté, la consommation et l’emploi, même s’il existe des exceptions. Les cas montrent également que les politiques complémentaires façonnent et définissent la transformation économique : l’ampleur de l’impact, les lieux où l’impact se fait sentir et la transformation industrielle qui a lieu. Ainsi, les recommandations quant aux investissements et aux interventions politiques qui devraient accompagner les inves- tissements dans les transports doivent être fondées sur le contexte local. L’encadré 1 présente un résumé des différentes options politiques complémentaires appliquées dans plusieurs cas historiques. ENCADRÉ 1 Description des cas historiques considérés a. Vietnam : La route nationale n° 5 (NH-5) a été d’une autoroute pour relier le port à Bangkok. développée dans les années 1990 comme un Les investissements dans les transports ont été corridor de transport reliant Hanoi au port de accompagnés d’incitations industrielles pour les Hai Phong à l’est. Ce cas souligne l’importance constructeurs automobiles et de réformes de des réformes de l’environnement des affaires, l’environnement commercial, ainsi que du déve- combinées à une promotion proactive des inves- loppement de zones industrielles privées le long tissements, et l’utilisation de parcs industriels pour de la nouvelle autoroute, ce qui souligne l’impor- remédier aux goulets d’étranglement de l’effica- tance des politiques ciblées sur l’industrie et des cité des marchés fonciers. réformes de l’environnement commercial. b. Mozambique et Afrique du Sud : Le corridor de e. Malaisie : La région économique du Corridor Maputo relie plusieurs provinces sud-africaines à Nord tente de résoudre les problèmes d’inégalité Maputo et est également utilisé par le Swaziland et spatiale en reliant les centres industriels aux inves- le Zimbabwe pour accéder à la mer.12 Les inves- tissements dans les transports. Cette approche met tissements dans ce corridor soulignent l’impor- l’accent sur les réformes de l’environnement des tance des investissements axés sur l’industrie pour affaires, en particulier la réforme douanière, en améliorer l’efficacité des entreprises et l’utilisation plus du développement du marché du travail. de grappes de développement spatial et de parcs f. Chine : Le développement d’une ligne ferroviaire industriels pour attirer les investissements. à grande vitesse à travers la province de Gui Zhou, c. Inde : Le Quadrilatère d’or et les réseaux autorou- dans l’ouest de la Chine, a permis de relier cette tiers Nord-Sud-Est-Ouest ont été lancés en 2001 dernière aux 88 comtés de l’ouest du pays. Grâce pour relier les quatre plus grands centres éco- à des politiques nationales et provinciales, cette nomiques de l’Inde : Delhi, Mumbai, Chennai et infrastructure ferroviaire, ainsi que le développe- Kolkata. Ce cas souligne l’importance du dévelop- ment d’autoroutes et d’aéroports, ont contribué pement de l’industrie de la logistique, ainsi que la à stimuler la mutation industrielle de la province prise en compte des contraintes sur les marchés de Gui Zhou. Ce cas illustre l’utilisation de la fonciers et la nécessité de soutenir le capital planification du développement spatial, comme humain par des programmes de développement les zones économiques et les parcs industriels, des compétences. pour répondre aux contraintes du marché foncier, d. La Thaïlande : À la fin des années 1980, la parallèlement aux efforts de promotion des inves- Thaïlande a entamé la construction de plusieurs tissements et de développement des PME. infrastructures, notamment un nouveau port en eau profonde à Laem Chabang et la construction 12.  Sequeria, S., O. Hartman, et C. Kunaka. 2014. “Reviving Trade Routes : Evidence from the Maputo Corridor “. Document de travail 4, Programme de politique des transports en Afrique subsaharienne (SSATP), Washington, DC. 20 Vue d’ensemble La portée géographique de cette étude est limitée aux corridors qui sont essen- tiels pour mieux intégrer la Guinée dans la région de l’Afrique de l’Ouest. Il existe plusieurs corridors potentiels, proposés et existants, en Afrique de l’Ouest.13 Pour que l’étude reste gérable, seuls les corridors qui traversent la Guinée ou touchent les frontières guinéennes, et qui pourraient donc avoir un impact direct14 sur les villes de Guinée, sont pris en compte. La Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA) et la Banque africaine de développement (BAD) ont désigné plusieurs corridors de transport comme étant prioritaires pour améliorer l’accès dans la région. La Guinée est membre de la CEDEAO, mais pas de l’UEMOA. La sélection des corridors affec- tant la Guinée couvre ceux qui passent par son territoire, ce qui inclut les corridors définis par la CEDEAO et l’extension éventuelle des corridors dans le cas de certains corridors de l’UEMOA, comme le corridor Conakry-Abidjan. L’étude s’intéresse éga- lement à l’univers des corridors définis par l’Union africaine et au réseau de la route transafricaine,15 fruit de la coopération entre la Commission des Nations Unies pour l’Afrique, l’Union africaine et la BAD. Par conséquent, après un examen attentif, les corridors suivants ont été sélection- nés pour l’étude (voir la Figure 2 et l’annexe 1 pour plus de détails sur les motiva- tions de la sélection de chaque corridor) : FIGURE 2 Corridors sélectionnés Dakar Senegal Mbour Tambacounda Mali Gambia Bamako Banjul Guinea-Bissau Bissau Labé Boké Kindia Kankan Conakry Faranah Mamou Sierra Leone Kissidougou Guéckédougou Nzérékoré Côte d’Ivoire Abidjan Monrovia Liberia 13.  Pour une liste complète, voir l’annexe 1 et les cartes associées. 14.  Les villes guinéennes pourraient également être affectées indirectement, par exemple par le détournement des échanges commerciaux par des corridors situés en dehors de son terri- toire. Cependant, ces corridors ne font pas partie du champ géographique de l’étude. 15. Wikipedia Lien 21 De la connectivité à l’opportunité 1.3 Comment ? Cette analyse utilise une approche quantitative et qualitative combinée pour identifier les opportunités et les contraintes pour différents endroits en Guinée. Pour établir des explications causales, l’étude cherche à établir les effets causaux (c’est-à-dire la corrélation entre les causes et les résultats) et les mécanismes causaux (c’est-à-dire expliquer le « comment » et le « pourquoi » des processus par lesquels les causes déterminent les résultats). L’analyse quantitative vise à identifier les impacts que l’on pourrait attendre d’in- vestissements potentiels dans les infrastructures routières ou de mesures de facili- tation du commerce et donc les opportunités que cela représenterait pour les villes de Guinée. Les modèles quantitatifs utilisés dans l’étude pour quantifier les impacts comparent un scénario de base (représentatif des temps de parcours actuels) et les coûts associés à différents scénarios intégrant soit (i) des améliorations d’infrastruc- tures, soit (ii) une réduction des temps de parcours et/ou des délais aux frontières. Les modèles quantifient les gains (ou les pertes) d’un point de vue spatial, en désagrégeant les impacts pour chaque ville guinéenne. Les données de luminosité nocturne ont été agrégées au niveau des villes, ce qui permet d’intégrer le PIB des zones urbaines dans le modèle pour prendre en compte le niveau de revenue local. L’analyse des études de cas complète les analyses quantitatives en fournissant le contexte local direct concernant les opportunités et les contraintes rencontrées par chaque ville. Cette méthodologie est basée sur des entretiens avec les auto- rités locales, les entreprises locales et d’autres acteurs concernés. Ces entretiens permettent une approche plus approfondie et une meilleure compréhension des réalités et des capacités locales. Ainsi, les recommandations politiques peuvent être fournies avec plus de détails et de manière plus concrète. Ces entretiens donnent également un aperçu de la manière dont les différents niveaux de gouverne- ment interagissent et travaillent ensemble. Ils donnent également aux parties prenantes l’occasion de présenter leurs idées sur les contraintes au niveau local, qui peuvent différer considérablement des contraintes citées par les responsables au niveau national. L’utilisation de cette approche méthodologique mixte peut également aider à identifier des interventions politiques spécifiques pour faire face aux contraintes ou tirer parti des opportunités. L’équilibre entre l’analyse quantitative et qualitative permet une compréhension plus nuancée du potentiel, de ce qui pourrait être fait pour atteindre ce potentiel, de qui pourrait mettre en œuvre les changements de politique, et comment. Compte tenu des multiples demandes qui pèsent sur un petit budget public et des faibles capacités, l’étude se concentre sur les interven- tions les plus prometteuses qui devraient et, surtout, pourraient être mises en œuvre au niveau local, avec des exemples de la manière dont elles pourraient fonctionner dans le contexte local et national. 22 Vue d’ensemble 1.4 Qu’est-ce que cela signifie pour les décideurs politiques ? Cette étude fournit des éléments essentiels pour soutenir le programme de la Guinée visant à créer des pôles de croissance centrés sur les villes secondaires. Pour que la Guinée puisse tirer parti des investissements prévus dans les corridors, des investissements complémentaires coordonnés sont nécessaires pour obtenir des avantages économiques plus larges. Comme le précise la stratégie d’aide à l’intégration et à la coopération régionales de la Banque mondiale,16 pour soutenir la transformation de l’Afrique, il faut combler les lacunes en matière d’infrastructures matérielles et immatérielles, et aider le secteur privé à tirer parti de ces opportunités. Un examen récent des projets de corridors suggère de s’attaquer conjointement à une série d’obstacles non liés aux infrastructures, notamment les réformes doua- nières et le ciblage des contraintes des producteurs et des transformateurs, afin de tirer parti des avantages d’une meilleure connectivité physique.17 Cela peut à son tour attirer des financements privés supplémentaires dans les secteurs productifs, générer des échanges commerciaux et soutenir la création d’emplois. Le contexte de la pandémie de COVID-19 amplifie l’importance de cette étude. La pandémie a entraîné des perturbations de l’approvisionnement mondial et est susceptible d’exacerber les facteurs de fragilité préexistants et de creuser les inégalités et les déséquilibres. Comme indiqué dans le document d’approche de la réponse à la crise du GBM, les investissements dans les infrastructures matérielles et immatérielles pour soutenir le commerce régional et les chaînes de valeur locales sont essentiels pour stimuler la reprise.18 Les politiques complémentaires (c’est-à-dire les infrastructures douces) contribueront à assurer la croissance des entreprises et la création d’emplois, en renforçant la résilience économique et en stimulant la reprise du secteur privé. 16.  Banque mondiale. 2018. Soutenir l’intégration de l’Afrique : Stratégie d’intégration et de coopération régionales FY18-23. Banque mondiale. La stratégie suggère (i) de « construire la connectivité des infrastructures régionales » en se concentrant sur le développement de corridors économiques ; et (ii) de « promouvoir le commerce et l’intégration des marchés », en se concentrant sur l’accélération du commerce intra-régional, le développement de chaînes de valeur régionales et la résolution des déséconomies des petits marchés financiers. 17.  Melecky, Martin, Bougna, Xu. 2018. « Les corridors de transport et leurs avantages écono- miques plus larges : A Critical Review of the Literature » Document de travail de recherche sur les politiques n° 8302, Banque mondiale. 18.  Groupe de la Banque mondiale COVID-19 Document d’approche de la réponse à la crise : Saving Lives, Scaling-up Impact and Getting Back on Track (anglais). Washington, D.C. : Groupe de la Banque mondiale. Lien 23 2 Quelles sont les opportunités? 25 De la connectivité à l’opportunité 2.1 Comprendre la théorie et les modèles. Les coûts de transport intra-nationaux et régionaux se sont avérés être un obstacle majeur au commerce régional en Afrique de l’Ouest.19 Le manque historique d’investissements explique la disponibilité et la qualité limitées des routes dans la région et, en raison de l’héritage colonial, de nombreux pays ont hérité de réseaux qui restent déformés vers l’accès aux principaux ports au détriment de la connecti- vité régionale.20 Des décennies de colonisation ont façonné le réseau de transport en fonction des exportations de ressources brutes vers le reste du monde. Peu de choses ont été faites pour accroître la connectivité régionale en dehors des corridors qui atteignent la mer. Ainsi, la répartition des corridors régionaux reste sous-optimale pour la géographie et la distribution des avantages comparatifs des économies actuelles.21 D’autre part, les points de contrôle et les frictions aux frontières représentent un autre obstacle important.22 Les temps de trajet entre les villes dépendent moins de la vitesse moyenne à laquelle un camion roule que des retards aux frontières.23 Par conséquent, plus important que la vitesse lente est le temps d’immobilisation d’un camion en attendant que les procédures administratives soient effectuées (aux frontières ou aux terminaux pendant le chargement ou le déchargement). Par exemple, de nombreux points de contrôle le long de la route de la ceinture côtière Ghana-Togo-Bénin réduisent l’accessibilité de plusieurs villes frontalières (Aflao, Lomé, Come et Aneho). Ces points de contrôle constituent des obstacles à la mise en œuvre effective du corridor de transport Abidjan-Lagos tel que prévu à l’avenir par les États et les institutions régionales.24 En favorisant le commerce entre des pays aux frontières épaisses, en particulier dans des endroits qui ont été physiquement et économiquement éloignés des marchés mondiaux, les grands investissements dans les transports peuvent amélio- rer le bien-être, mais ils créent également des défis internes. Il est bien établi que l’investissement dans les transports réduira les coûts, ce qui entraînera une aug- mentation de la productivité et fera passer l’économie à un équilibre de croissance plus élevé.25 19.  Atkin, David et Dave Donaldson, “Who’s Getting Globalized ? The Size and Implications of Intra-national Trade Costs”, NBER Working Papers 21439, National Bureau of Economic Research, Inc July 2015 ; Teravaninthorn, Supee et Gael Raballand, « Transport Prices and Costs in Africa : Un examen des corridors internationaux », Num. 6610, Banque mondiale, 2009. 20.  Bonfatti, Roberto, Yuan Gu, et Steven Poelhekke, “Priority Roads : The Political Economy of Africa’s Interior-to-Coast Roads”, rapport technique 2019. 21. Ibid 22.  OCDE, « Accessibilité et infrastructures dans les villes frontalières », West African Papers 23, Éditions OCDE avril 2019. 23.  Teravaninthorn, Supee et Gael Raballand, Transport Prices and Costs in Africa : A Review of the International Corridors number 6610. Dans ‘Publications de la Banque mondiale’, Banque mondiale, novembre 2009. 24.  BAD-UEMOA, « Projet multinational Bénin/Togo d’aménagement de l’axe Lomé-Cotonou et de facilitation du commerce et du transport sur le corridor Abidjan-Lagos », 2017. 25.  Voir Murphy et al, 1989, et Agenor, 2010. 26 Quelles opportunités? En Afrique subsaharienne, Dorosh et al. (2012) ont constaté que la réduction du temps de trajet vers le marché le plus proche (représenté par une ville d’au moins 100 000 habitants) entraîne une augmentation de la production agricole. Toute- fois, en raison des coûts de transport et des frictions liées à la mobilité de la main- d’œuvre au sein des pays, toutes les régions et tous les travailleurs ne bénéficient pas de manière égale d’une plus grande intégration aux marchés mondiaux. Les travailleurs se déplacent vers de meilleures opportunités, profitant ainsi des régions qui peuvent offrir de meilleures commodités et des salaires plus élevés. Cepen- dant, les frictions liées à la mobilité de la main-d’œuvre empêchent les travailleurs de bénéficier de manière égale de ces nouvelles opportunités, certains ayant plus facilement accès aux nouveaux gains économiques que d’autres.26 Pour analyser les effets des infrastructures et de la facilitation des échanges, nous utilisons deux approches. La première approche applique un modèle gravitation- nel d’accès au marché (AM) basé sur la méthodologie de Donaldson et Hornbeck (2016). Alors que l’évaluation des projets de transport se concentre généralement sur les avantages directs d’un projet (par exemple, la réduction du temps de trajet, des coûts d’exploitation des véhicules, des émissions de carbone et des accidents, etc.), l’approche de l’accès au marché peut quantifier les avantages économiques plus larges : à savoir que des politiques commerciales et des investissements nouveaux ou améliorés relient les centres de population, qui ont alors plus de possibilités de commercer.27 Calculer les gains en termes d’accès au marché résultant de l’améliora- tion des infrastructures ou des mesures de facilitation du commerce, cette approche repose uniquement sur les données suivantes : (i) une carte SIG du réseau de trans- port, (ii) des estimations du PIB pour chaque nœud (ville) du réseau, et (iii) des para- mètres définissant les vitesses, les coûts de fret et les retards associés au commerce, tels que les retards aux passages de frontières. Voir l’annexe 2 pour plus de détails.28 Pour compléter l’analyse, un modèle d’équilibre général (EG) spatial a été déve- loppé pour estimer les gains plus larges et les effets d’entraînement des grands investissements dans les infrastructures de transport et frontalières en Afrique de l’Ouest. L’analyse s’est concentrée sur quatre corridors régionaux et s’inspire de Lebrand (2021).29 Ce modèle utilise le cadre de géographie économique quantita- tive de Redding (2016) avec le commerce à l’intérieur et entre les pays, et la mobilité des personnes à l’intérieur des pays pour évaluer les impacts économiques d’une réduction des coûts du commerce à partir des investissements dans les infrastruc- tures routières et frontalières.30 De meilleures routes améliorent les conditions de conduite, mais de nombreuses heures restent perdues autour des frontières ter- restres et aux destinations finales pour que les marchandises parviennent aux clients finaux. Cette analyse fait la distinction entre les retards de transit encourus par les camions qui traversent les frontières en cours de route et les retards aux frontières finales encourus sur le lieu de destination. Cette analyse complète donc les gains estimés de l’amélioration des infrastructures de transport en estimant les gains de la réduction des délais aux frontières terrestres. L’analyse considère un sous-ensemble de quatre corridors qui amélioreraient la connectivité régionale : Conakry-Bamako, Bamako-Monrovia, Conakry-Abidjan, Labé-Dakar. Voir l’annexe 4 pour une descrip- tion détaillée du modèle et de ses hypothèses. 26.  Lall, Somik V. et Mathilde Lebrand, ”Who wins, who loses ? Understanding the spatially differentiated effects of the belt and road initiative“, Journal of Development Economics, 2020, 146 (C). 27.  Roberts, Mark et Bougna, Théophile et Melecky, Martin et Xu, Yan, Les corridors de trans- port et leurs avantages économiques plus larges : Une revue critique de la littérature (17 janvier 2018). Document de travail de recherche sur les politiques de la Banque mondiale n° 8302. 28.  Donaldson et Hornbeck (2016) ont développé cette approche pour étudier les effets de l’expansion du réseau ferroviaire aux États-Unis à la fin du XIXe siècle. 29.  Lebrand (2021). Les gains économiques de l’investissement dans les corridors routiers en Afrique de l’Ouest 30.  Redding, Stephen J., “Goods trade, factor mobility and welfare“, Journal of International Economics, 2016, 101 (C), 148-167. 27 De la connectivité à l’opportunité Si le GE spatial fournit des informations importantes, il est également important de noter les hypothèses formulées et certaines des limites du modèle, notamment en raison des contraintes liées aux données. Dans un scénario idéal, le modèle aurait été calibré en utilisant les données existantes sur les flux commerciaux. Malheureuse- ment, les flux commerciaux dans la plupart des pays d’Afrique de l’Ouest ne sont, au mieux, que très imparfaitement observables. Lorsque des données sur le commerce entre pays existent, elles ne couvrent que le commerce officiel qui est légalement enregistré. En outre, les données relatives au commerce à l’intérieur d’un pays sont très rarement disponibles, ce qui limite la quantité de données pouvant être utili- sées pour créer une base de référence. Si l’on considère que certaines études ont souligné que le commerce informel peut représenter jusqu’à 40 % du commerce total, les données officielles existantes ne donnent qu’une très faible idée du commerce non capturé existant entre les pays de la région. Dans ce cas, s’appuyer sur des hypothèses de modélisation basées sur les forces de gravité qui ont été véri- fiées dans de nombreux contextes est une hypothèse acceptable.31 Enfin, le modèle mis en œuvre ici ne différencie pas les secteurs économiques et repose donc sur une hypothèse de secteur unique. Il privilégie la granularité géographique, et tous les échanges commerciaux possibles, au détriment d’une structure économique plus détaillée. Les deux modèles se complètent, avec des perspectives spatiales, structurelles et temporelles différentes. Le modèle d’accès au marché (MA) est un modèle gravita- tionnel, qui s’appuie sur le PIB des villes pour mesurer l’accès au marché. Le modèle d’équilibre général spatial (EG), en revanche, examine les unités infranationales (ou préfectures), en32 intégrant des variables d’utilisation des terres et le PIB au niveau infranational (y compris le secteur agricole). Ainsi, le modèle MA mesure l’accès entre les villes de Guinée et avec les autres villes d’Afrique de l’Ouest, tandis que le modèle GE spatial se concentre sur l’accès au niveau sous-national (ou préfecture) en Guinée et dans la région d’Afrique de l’Ouest. Avec le modèle MA, nous nous concentrons sur les gains des villes guinéennes, et nous utilisons le modèle GE pour faire des comparaisons transnationales. En outre, le modèle MA offre une image statique des impacts des investissements dans les infrastructures de transport et de la réduction des délais aux frontières, tandis que le modèle GE spatial est dynamique et permet des ajustements dans les salaires et des déplacements de populations. Par conséquent, le premier modèle se concentre sur les effets immédiats, tandis que le second examine les effets d’équilibre général à moyen et long terme. 31.  Banque mondiale (2015). Les femmes et le commerce en Afrique : Réaliser le potentiel 32.  Pour la Guinée, le niveau infra-national utilisé est la « préfecture ». La Guinée est divisée en 33 préfectures plus Conakry. 28 Quelles opportunités? 2.2 Qu’est-ce que les résultats illustrent ? ...pour les investissements en infrastructures Si la Guinée semble être l’un des pays qui profitent le plus des investissements potentiels dans les infrastructures de la région, l’impact de ces investissements reste marginal. Le modèle spatial GE met en évidence les gains importants de la Guinée par rapport à ses pairs de la région. Alors que certains pays comme la Mauritanie, le Niger et le Mali sont perdants dans les investissements d’infrastructure, en termes d’avantage comparatif relatif lorsque l’activité économique se déplace dans l’espace, la Guinée bénéficie de toutes les interventions. Toutefois, les gains sont marginaux, avec un maximum de 2,1 pour cent d’augmentation des salaires réels associés au corridor Conakry-Abidjan, suivi des corridors Conakry-Bamako et Labé-Dakar. Les gains sur le corridor Bamako-Monrovia sont minimes (Figure 3). FIGURE 3 Les bénéfices Figure 3 des investissements potentiels dans les infrastructures de Lesla région resteront bénéfices pour la Guinée marginaux potentiels des investissements , tandis dans les que infrastructures de la certains pays pourraient même être perdants. région resteront marginaux pour la Guinée, tandis que certains pays pourraient même être perdants. Augmentation des salaires réels (%) -1% 0 1% 2% 3% Autres pays Guinée Conakry-Abidjan Côte d'Ivoire Dakar-Labe Bamako-Conakry Liberia Bamako-Monrovia 29 De la connectivité à l’opportunité De même, les gains en termes d’accès aux marchés résultant des investissements qui se concentrent exclusivement sur les infrastructures sont minimes, variant entre 0 et 4 pour cent pour la Guinée, et tendent à être fortement ségrégués sur le plan spatial, les villes situées sur les corridors améliorés bénéficiant de la plus grande augmentation de l’accès aux marchés (Figure 4). FIGURE 4 Figure 4 Plus les villes sont proches d’un corridor, Plus levilles les plus sont proches gain d’accès d'un au marché corridor, sera important pour elles. plus le gain d'accès au marché sera important pour elles. Gain moyen d'accès au marché (%) 4.5% 3% Avg gain 1.5% 1.65 1.23 1.16 0.94 0 Moins d’1 km 1 à 75 km 75 à 150 km Plus de 150 km Si les gains globaux liés aux investissements en infrastructures sont faibles, les impacts sont fortement ségrégués spatialement et les améliorations des corridors reliant Conakry à l’est du pays génèrent les gains les plus élevés en termes d’accès aux marchés, ce qui se traduit par des gains plus importants pour Nzérékoré, Kankan et Macenta (Figure 5). Lorsque l’on considère les gains moyens d’accès aux marchés par ville pour chaque corridor et les gains moyens pour chaque ville, les trois corridors Conakry - Abidjan 1, Conakry - Abidjan 2 et Bamako - Conakry affichent l’impact le plus élevé sur l’accès aux marchés avec des gains moyens par ville supérieurs à 1,5 pour cent pour les villes de Guinée. 30 Quelles opportunités? En outre, si l’on considère l’impact moyen de tous les scénarios pour chaque ville de Guinée, les trois villes de Nzérékoré, Kankan et Macenta, situées dans la partie orientale du pays, enregistrent les plus fortes augmentations de l’accès au marché (plus de +1,8 pour cent). Voir l’annexe 3 pour une description plus détaillée des résultats. FIGURE 5 Figure 5 Les améliorations des corridors vers la partie orientale du pays génèrent Les les gains les importants des améliorations plus corridors en termes vers la d’accès aupartie marché. orientale du pays génèrent les gains les plus importants en termes d'accès au marché. Gain moyen d'accès au marché (%) Par couloir 0 1% 2% Conakry - Abidjan 1 Conakry - Abidjan 2 Bamako - Conakry Conakry - Monrovia TAH7 Dakar - Conakry Conakry - Bissau Bamako - Monrovia Par ville 0 1% 2% Nzérékoré Kankan Macenta Siguiri Guéckédougou Kissidougou Dinguiraye Faranah Pita Labé Mamou Kindia Sangarédi Boké Kamsar Fria Conakry 31 De la connectivité à l’opportunité Le modèle d’équilibre spatial, qui tient compte des ajustements de salaires et des déplacements de population, suggère également que la distribution spatiale des effets est inégale. Les régions centrales de Mamou et Kindia concentrent des gains plus élevés, liés à leur proximité de la capitale et au fait qu’elles sont toutes deux situées à la jonction de plusieurs nœuds de transport. Les différences de résultats entre les deux modèles indiquent que, si Nzérékoré, Kankan et Macenta bénéficie- raient à court terme de gains élevés en termes d’accès au marché, les ajustements des salaires et les mouvements de populations favoriseront finalement les régions plus centrales de Pita, Mamou et Kindia (Figure 6). Cependant, les gains restent très faibles, à peine supérieurs à 2%. FIGURE Figure 6 6 Gainsmoyens Gains moyensen matièrede enmatière salaires réels desalaires réels à à partir du modèle partir du d’équilibre modèle d'équilibre généralspatial général spatialen neconsidérant enne considérant que les investissements investissements en que les infrastructures en infrastructures Gains salariaux moyens 2 - 2.5% 1.5 - 2% 1 - 1.5% 0.5 - 1% En dessous de 0.5% (Source : Lebrand 2019)33 33.  Le modèle a été calculé au niveau de la « préfecture » pour la Guinée, qui correspond au deuxième niveau administratif national. Afin de garantir une granularité géographique relative- ment similaire pour chaque pays. Le deuxième niveau administratif a été choisi comme niveau par défaut pour tous les pays, à l’exception de la Gambie, de la Guinée-Bissau, du Liberia et du Nigeria, pour lesquels le premier niveau administratif (régions) a été choisi car leur taille était la plus proche des unités de deuxième niveau administratif des autres pays. 32 Quelles opportunités? .... et pour les mesures de facilitation des échanges Le temps perdu à la frontière ou en transit reste un obstacle important à l’accès aux marchés. Bien que les corridors étudiés relient et intègrent les pays de la sous- région, ils servent également à mieux relier les villes au sein de la Guinée. Dans les modèles, les gains découlant de l’amélioration des infrastructures de transport entraînent des améliorations de l’accès au sein des pays plutôt qu’entre les pays. Par exemple, dans le modèle d’accès au marché, pour les corridors Conakry-Monrovia et Bamako-Monrovia, les gains en termes d’accès au marché sont limités du côté libérien et malien (moins de 2 %) par rapport aux résultats obtenus pour les villes de Guinée. Des résultats similaires apparaissent pour le corridor Conakry-Bissau. Contrairement aux améliorations de l’infrastructure, les gains liés aux mesures de facilitation du commerce sont beaucoup plus importants et ont un impact plus uniforme dans toutes les villes (Figure 7). Selon le modèle de l’EM, des réductions de 10 %, 30 % et 50 % des délais de passage des frontières sont associées à des gains d’accès au marché de 3 %, 9 % et 15 %, respectivement, pour chaque ville de Guinée. En effet, comme le montre la Figure 6, les gains pour chaque scénario varient très peu d’une ville à l’autre. Même avec une réduction de 50 pour cent, qui est le scénario présentant la plus grande variation, l’écart entre la ville ayant le gain le plus élevé et la ville ayant le gain le plus faible est à peine supérieur à 1 point de pourcentage. 33 De la connectivité à l’opportunité FIGURE 7 Figure 7 Les gains liés à la réduction des délais de passage des frontières Les gains sont réduction liés à la plus beaucoup des délais importants et ont de passage un impact des plus frontières sont beaucoup uniforme plus importants dans et ont les villes que les un impact plus améliorations uniforme des dans les infrastructures . villes que les améliora- tions des infrastructures. Scénario de réduction des retards aux frontières : 10% 30% 50% Gain moyen d'accès au marché (%) 0 5% 10% 15% 0 5% Conakry Siguiri Nzérékoré Kankan Macenta Guéckédougou Kissidougou Faranah Dinguiraye Labé Mamou Pita Kindia Fria Kamsar Sangarédi Boké De même, avec le modèle d’équilibre spatial, les gains en salaires réels sont beaucoup plus importants grâce aux mesures de facilitation des échanges pour chaque pays et, les régions de Guinée semblent particulièrement bien placées pour bénéficier de ces améliorations (Figure 8). Alors que les investissements en infrastructures seules ont généré une augmentation maximale de 2,1 % des salaires réels, la combinaison avec les mesures de facilitation des échanges permet d’at- teindre des gains supérieurs à 8 %. En outre, la variation des gains entre les corridors est beaucoup plus faible avec la réduction des délais aux frontières et en transit que sans (Figure 9). Ces résultats confortent l’idée que le temps pendant lequel un camion tourne au ralenti en attendant que les procédures administratives soient effectuées (aux frontières ou aux terminaux pendant le chargement ou le décharge- ment) est aussi, voire plus, important que la vitesse réduite sur les routes des régions. Les34 gains résultant de la réduction des retards aux frontières amplifieraient les gains de la nécessaire modernisation des routes. L’amélioration des routes et la fluidifi- cation des frontières sont des investissements complémentaires pour accroître le commerce intérieur et régional. 34.  Teravaninthorn, Supee et Gael Raballand, Transport Prices and Costs in Africa : Un examen des couloirs internationaux. Num. 6610. Banque mondiale, 2009. 34 Quelles opportunités? FIGURE 8 Les gains en termes de salaires réels sont beaucoup plus importants Figure 8 dans le cadre des mesures de facilitation du commerce que dans celui Les gains des en termes de investissements salaires dans réels sont les corridors beaucoup routiers plus , et la importants Guinée semble dans le cadre des mesures de facilitation particulièrement du commerce bien placée que dans pour bénéficier de ces celui des investissements dans améliorations. les corridors routiers, et la Guinée semble particulièrement bien placée pour bénéficier de ces améliorations. Gain moyen en termes d'accès au marché (%) grâce aux Investissements du corridor Facilitation du commerce Bamako-Conakry Bamako-Monrovia Conakry-Abidjan Dakar-Labe Guinea-Bissau Liberia Togo Guinea 1.24 4.08 0.35 3.25 2.11 5.08 1.52 4.35 Sierra Leone Senegal Niger Gambia Burkina Faso Benin Mali Ghana Mauritania Cote d'Ivoire Cameroon Nigeria (Source : Lebrand 2019) 35 De la connectivité à l’opportunité FIGURE 9 Modèle GE : Gains spatiaux en salaires réels provenant des investissements en infrastructures, avec ou sans mesures de facilitation Figure 9 des échanges : Corridor Bamako-Conakry (en pourcentage). Modèle GE Gains spatiaux en salaires réels Sans mesures de facilitation des échanges provenant des investissements en infrastructures : Corridor Bamako - Conakry (en pourcentage) 20% 10% 0 Avec mesures de facilitation des échanges La Guinée (Source : Lebrand 2019) 36 Quelles opportunités? 2.3 Résumé des résultats. Les résultats des modèles montrent que les villes guinéennes sont bien placées pour bénéficier de coûts de transport inférieurs à ceux des villes d’autres pays. Cela est davantage dû aux mesures de facilitation des échanges qu’aux seuls investissements dans les infrastructures. Les résultats des deux modèles indiquent que la Guinée est l’un des pays les mieux placés pour bénéficier des améliorations apportées aux infrastructures et à la facilitation des échanges. Si l’effet des améliora- tions des infrastructures sans facilitation des échanges reste marginal, la combinaison des améliorations des infrastructures avec une réduction des délais aux frontières et en transit a un fort impact sur les salaires réels, générant des gains significatifs en Guinée. Si l’on décompose les résultats dans l’espace à l’intérieur de la Guinée, alors que les villes de l’est du pays sont celles qui bénéficient le plus de l’accès au marché, une fois que les ajustements de salaires et les mouvements de population sont pris en compte, ce sont les parties centrales du pays qui affichent les gains les plus élevés. Enfin, si les résultats du modèle constituent un bon point de départ pour montrer l’ampleur des gains inexploités, des analyses plus approfondies au niveau sectoriel seraient nécessaires pour identifier les opportunités spécifiques de réforme et d’investissement. 37 3 Quelles contraintes? Ce chapitre évalue les contraintes sous-jacentes qui limitent les impacts positifs potentiels des politiques et des investis- sements en matière de commerce et de transport le long du corridor. L’impact potentiel d’une meilleure connectivité pour les villes de Guinée sera déterminé conjointement - par les améliorations de la facilitation du commerce et les investisse- ments dans les infrastructures - et par les conditions initiales. Ces conditions initiales comprennent l’environnement insti- tutionnel et politique existant qui a un impact sur les marchés des intrants et des produits. Un accent particulier est mis sur la dynamique des économies locales des agglomérations urbaines secondaires, afin d’aider à identifier les interven- tions politiques potentielles pour amplifier les impacts positifs associés aux améliorations de la connectivité du corridor. 39 De la connectivité à l’opportunité Comme le démontre le chapitre précédent, les améliorations de la connectivité sont susceptibles d’avoir un impact sur plusieurs villes de Guinée. La facilitation du commerce, cependant, favorise les grandes villes et celles qui sont plus proches de la frontière. Sur la base de cette analyse, plusieurs villes ont été choisies pour des études de cas approfondies. Les villes faisant l’objet d’une étude de cas ont été choisies selon une série de critères de sélection (détaillés dans le tableau 2) et résumés ci-dessous35 : a. Résultats de l’accès au marché : Toutes les villes considérées ont montré un gain d’accès au marché d’au moins 0,5 % dans l’analyse quantitative. b. Couverture régionale et population : Les villes ont été choisies parmi les 10 pre- mières villes de Guinée par leur population, chacune comptant au moins 250 000 habitants, et pour assurer une couverture de toutes les régions naturelles de la Guinée. Conakry, la plus grande ville, a été exclue car elle a fait l’objet de plusieurs autres études récentes. c. Autres facteurs : Les villes choisies pour l’étude de cas comprennent un éventail de démographies ethniques provenant de toute la Guinée. Ces villes ont également une incidence élevée de pauvreté. TABLEAU 2 Critères pour les études de cas, par ville considérée 35.  Conakry n’a pas été considérée comme candidat pour une étude de cas car d’autres études ont souligné son importance en tant que principale ville commerciale et financière de la Guinée. Cf. Rapport d’examen de l’urbanisation, Banque mondiale, juin 2018. 40 Quelles contraintes? Au total, quatre villes d’étude de cas ont été choisies pour cette analyse. Chacune de ces villes peut tirer parti des interventions locales en matière de transport en raison de son emplacement et de divers autres facteurs. Les facteurs importants qui ont contribué au choix des études de cas, en plus de ceux indiqués dans le tableau 2, sont résumés ci-dessous. La Figure 10 montre l’emplacement géogra- phique de ces villes. a. Kankan : La deuxième plus grande ville de Guinée, située le long du corridor de transport reliant la Guinée au Mali, un important partenaire commercial régional. b. Mamou : Mamou est une ville plus petite, mais qui est située au centre de la Guinée et sert de plaque tournante le long de la plupart des principaux corridors qui traversent la Guinée. c. Boké : En tant que principal centre minier de Guinée, Boké a été choisi en raison de sa proximité avec la capitale Conakry et la frontière avec la Guinée-Bissau. L’analyse s’est concentrée sur le corridor Sangaredi-Boké Centre-Kamsar car il représente le couloir de déplacement des marchandises minières qui tra- versent la région. d. Nzérékoré : Nzérékoré est situé dans la région de la Guinée forestière, à la frontière avec la Côte d’Ivoire et le Liberia, et se trouve donc sur les principaux corridors reliant Conakry à Abidjan et Monrovia. 41 De la connectivité à l’opportunité FIGURE 10 10 des villes des études de cas. Localisation Figure Localisation des villes des études de cas SÉNÉGAL MALI GUINÉE-BISSAU Population du centre urbain Boké Pôle minier, proche de Conakry. Situé 63 k sur le couloir vers la Guinée-Bissau et le Sénégal SIERRA LEONE Population totale de la préfecture 460 k CÔTE D’IVORE Mamou 84 k Hub pour plusieurs LIBERIA routes principales du pays 323 k Kankan Deuxième ville 199 k située sur le couloir vers le Mali 482 k Nzérékoré 198 k Région forestière, à la frontière de la Côte d'Ivoire et du Liberia 403 k La structure économique des régions où se trouvent ces villes est représentative de l’énorme potentiel agricole du pays, chaque région étant spécialisée dans une gamme de produits différents. Les préfectures de Mamou, Kankan et Nzérékoré ont des structures économiques similaires, avec l’agriculture comme secteur primaire. Alors que la préfecture de Boké accueille d’importantes activités du secteur minier, la main-d’œuvre travaille encore majoritairement dans le secteur agricole, ce qui souligne le potentiel des secteurs de l’agriculture et de l’élevage autour de cette ville également.36 La Figure suivante montre la répartition sectorielle de la main- d’œuvre pour les quatre villes. Chacune d’entre elles est caractérisée par plusieurs produits agricoles à fort potentiel, mais la production à valeur ajoutée ou l’agro- transformation sont minimes. 36.  Stratégie de développement durable Boké, 2018. 42 Quelles contraintes? FIGURE 11 La structure Figure 11 économique des régions où se trouvent chacune de ces villes est représentative de l’énorme potentiel agricole du pays. La structure économique des régions où se trouvent chacune de ces villes est représentative de l'énorme potentiel agricole du pays. Décomposition sectorielle du travail par préfecture Kankan Mamou Boké Nzérékoré Agriculture 58% 73% 50% 46% Commerce de gros 16% 11% 17% 22% et de détail Industrie 6% 5% 7% 8% manufacturière Transport 5% 3% 5% 6% Éducation 3% 2% 3% 4% Construction 2% 2% 3% 4% Autre 9% 4% 15% 11% Source : Recensement Général de la Population et de l’Habitat (RGPH) 2014 Plusieurs contraintes entravent la croissance économique dans les villes étudiées. Il s’agit notamment de l’absence de planification spatiale et d’investissements coordonnés, qui contribue à la fragmentation urbaine, à un accès faible et inégal aux services publics et, surtout, à un manque de capacités et de financement au niveau des collectivités locales. Chacune de ces contraintes est examinée plus en détail ci-dessous. 43 De la connectivité à l’opportunité 3.1 Les économies d’agglomération ne sont pas réalisées. Les villes ont connu une expansion urbaine rapide depuis 1985, les quatre villes ayant en moyenne doublé de taille depuis 1985 (Figure 12). Cette croissance semble avoir été particulièrement importante ces dernières années, 10 % de l’empreinte urbaine totale de Kankan ayant émergé entre 2015 et 2019. Bien que ce taux d’ex- pansion urbaine soit élevé, il reflète l’expansion considérable d’autres villes de la région. À titre de comparaison, la ville de Freetown ne s’est étendue que de 43 % entre 1975 et 2014, tandis que la ville de Bamako a décuplé sa taille initiale. Dans le contexte d’une telle expansion urbaine, cependant, la fourniture adéquate de services publics devient encore plus importante. La rapidité de l’expansion urbaine a fait peser un fardeau encore plus lourd sur les services publics car une grande partie de ce développement a été fragmentée, avec des augmentations importantes de la superficie des villes sans contact direct avec les parties mieux desservies de la ville. La Figure 13 montre l’importance de la fragmentation du bâti urbain au cours des dernières années à Kankan. FIGURE 12 Figure 12 villes secondaires Les villes Les secondaires ont un pourcentage ont un pourcentage considérablement considérablement plus plus élevé de con- élevé de constructions modernes (post-2000) que Conakry. structions modernes (post-2000) que Conakry. Total actuel accumulé enregistré pour chaque période (%) 1985 2000 2015 Kankan 37% Boké 36% Nzérékoré 34% Mamou 24% Conakry 19% Source : FSM 44 Quelles contraintes? FIGURE 13 Expansion urbaine Figure 13 Expansion urbaine Depuis 1985 2000 2015 2019 Boké Kankan Mamou Nzérékoré Source : FSM 45 De la connectivité à l’opportunité En même temps, le noyau urbain de ces villes est caractérisé par la prédominance des activités non commerciales, qui ne sont pas propices à une croissance éco- nomique significative. Dans chaque ville, l’emploi est dominé par les activités non marchandes, principalement les activités de commerce de gros et de détail, qui représentent environ 40 pour cent de l’emploi à Kankan, Mamou et Nzérékoré, et 25 pour cent à Boké. Ainsi, les activités non marchandes représentent environ 70 à 80 % de l’emploi. FIGURE 14 Figure 14 Le noyau urbain de ces villes est caractérisé par la prédominance d’activités non noyau urbain Lecommerciales de ces , qui villes ne sont estpropices pas caractérisé par à une la prédominance croissance économique significative. d'activités non commerciales, qui ne sont pas propices à une croissance économique significative. Décomposition sectorielle du travail par sous-préfecture (noyau urbain) Services non marchands Services commerciaux Commerce de gros et de détail Transports Enseignement Industrie manufacturière Construction Agriculture Administration publique Autres services Services sociaux Autres 0 25% 50% 75% 100% Nzérékoré Mamou Kankan Boké Source : RGPH 2014 46 Quelles contraintes? BOÎTE Les négociables et la ville La décision commerciale d’une entreprise de hausses de coûts sur les consommateurs du marché produire des biens et services négociables à urbain. Mais ces hausses de prix augmentent encore l’échelle internationale dépendra du coût de ses le coût de la vie dans une ville, contribuant ainsi intrants. Parmi ces coûts d’intrants figurent les coûts aux coûts urbains des travailleurs. Cette séquence urbains, c’est-à-dire les coûts supplémentaires peut devenir un cercle vicieux qui maintient les auxquels les travailleurs doivent faire face lorsqu’ils villes africaines en dehors du secteur des biens vivent dans une ville. Les coûts urbains comprennent échangeables et limite leur croissance économique. le loyer, les frais de déplacement et le prix élevé Souvent, les solutions proposées aux défis urbains de nombreux biens. Pour attirer les travailleurs, les de l’Afrique se concentrent simplement sur l’aug- entreprises doivent augmenter les salaires afin de mentation des investissements dans les structures compenser (ou de compenser partiellement) ces ou sur la réforme de la planification urbaine. Ces coûts. Pourtant, même si les salaires nominaux aug- actions sont nécessaires et urgentes, mais elles ne mentent pour refléter les coûts urbains élevés ou en suffisent pas à sortir les villes du piège des biens non rapide augmentation, les salaires réels restent faibles échangeables. Pourquoi ? Outre des réglementa- (voir le chapitre 4 pour une discussion détaillée). tions nationales et/ou des politiques commerciales Lorsque les coûts urbains font grimper les salaires mal conçues, les défaillances de la coordination au nominaux à un niveau trop élevé, les entreprises niveau local pourraient empêcher la formation de ne peuvent être compétitives dans le secteur des nouveaux pôles d’activité économique, qui sont biens échangeables et ne produisent que des biens nécessaires à une production efficace de biens non échangeables. échangeables. Compte tenu de la dynamique décrite ci-dessus, aucune entreprise ne souhaite Le secteur non échangeable comprend certains être la première à entrer dans le secteur des biens biens (par exemple la bière locale ou le ciment), échangeables. Pourtant, de nombreuses entreprises le commerce de la construction, le commerce de de biens échangeables pourraient s’établir si elles détail et de nombreuses activités du secteur des pouvaient coordonner leur entrée. Pour permettre services, y compris l’emploi dans le secteur informel. cette coordination, une ville a besoin d’un agent de La demande pour ces biens et services provient des coordination crédible : soit un groupe d’entreprises revenus générés au sein de la ville et de son arrière- tournées vers l’avenir qui peuvent harmoniser leurs pays - mais aussi des revenus transférés de l’exté- plans et agir ensemble, soit un promoteur immobi- rieur, tels que la rente des ressources, les recettes lier à grande échelle ou une administration munici- fiscales et l’aide étrangère. pale qui peut concrétiser sa vision par des investisse- ments majeurs dans les infrastructures. La raison pour laquelle une entreprise d’un secteur non échangeable peut se permettre de payer des salaires plus élevés - alors qu’une entreprise d’un Sources : Henderson et Venables (2009) ; Banque secteur échangeable ne le peut pas - est que le pro- mondiale (2017) : Les villes d’Afrique : Ouvrir les ducteur non échangeable peut augmenter ses prix portes du monde. dans toute la ville. Ce faisant, il répercute ses propres La très faible concentration d’activités marchandes est un signe de faible compé- titivité, qui peut être lié à différents facteurs, dont le manque de services publics fiables. Pour chaque ville, la part de la population raccordée au réseau électrique se situe au mieux autour de 50 pour cent, alors qu’elle peut descendre jusqu’à 18 pour cent à Nzérékoré et 9 pour cent à Kankan. De même, l’eau du robinet (à l’intérieur ou à l’extérieur du logement) n’est accessible qu’à 50 % de la population à Kankan, et l’accès est encore plus faible dans les trois autres villes. Par exemple, seulement 17 % de la population a accès à l’eau courante à Nzérékoré. De plus, les chiffres de l’accès, bien que médiocres, masquent l’ampleur du problème, car l’étendue et la qualité de l’accès sont extrêmement faibles. Par exemple, les zones connectées au réseau à Mamou et Nzérékoré ne peuvent avoir accès à l’électricité de manière fiable que pendant environ six heures par jour. À Kankan, la qualité de l’accès à l’électricité est encore pire, avec un accès fiable limité à environ deux heures par jour. 47 De la connectivité à l’opportunité FIGURE Figure 15 15 Le manque de Le manque de services publics fiables services publics fiables est est un facteur contribuant contribuant à un facteur la très à la très faible concentration faible des activités concentration commercialisables, des activités signe d’une commercialisables, d'une compétitivité. signe faible faible compétitivité. Part de la population ayant accès à chaque source d'électricité (en haut) et d'eau (en bas) Électricité Connecté au réseau | Lampe à huile, lampe à gaz, bois | Générateur | Panneau solaire | Autre Boké 51% Mamou 46% Nzérékoré 17% Kankan 10% Eau potable Eau du robinet à l'extérieur | Eau du robinet (à l'intérieur) | Fontaine publique | Forage de puits | Puits ordinaire | Eaux de surface | Eaux minérales Kankan 30% 21% 3% Boké 25% 17% 4% Mamou 20% 13% 2% Nzérékoré 11% 5% 2% Source : RGPH 2014 L’accès limité aux services publics rend plus rares les terrains viabilisés, dont les entreprises ont besoin pour fonctionner. Seule une petite partie de chaque ville est connectée au réseau électrique ou au réseau d’eau. À Kankan, l’accès à l’eau et à l’électricité est extrêmement ségrégué géographiquement, moins de 15 % de la surface bâtie totale se trouvant dans des zones où l’accès à l’électricité est supé- rieur à 20 % (Figure 16). Par conséquent, les nouveaux propriétaires d’entreprises sont souvent contraints de s’installer à la périphérie de la ville car les terrains dans le centre urbain ne sont pas disponibles. Les attributions de terrains viabilisés sont souvent basées sur un processus non transparent, selon plusieurs propriétaires d’entreprises locales dans les deux villes. Pour desservir les terrains dans ces endroits plus éloignés, les entreprises doivent investir dans des générateurs et forer des puits pour garantir l’accès à l’électricité et à l’eau. L’acheminement d’autres fournitures vers ces endroits éloignés est également entravé par le manque de routes d’accès et le mauvais entretien de ces routes lorsqu’elles existent. 48 Quelles contraintes? Figure 16 16 FIGURE Couverture Couverture géographique services desservices géographique des publics publics d’électricité et d’eau à Kankan. d'électricité et d'eau à Kankan Accès à l'électricité Le Milo Au dessus de 80% 60-80% 40-60% 20-40% En dessous de 20% Accès à l'eau 49 De la connectivité à l’opportunité Ainsi, le manque d’accès à l’électricité et à l’eau courante a été continuellement cité comme une contrainte majeure dans les villes étudiées. L’agro-industrie est limitée par le manque de services publics, notamment d’infrastructures pour l’électricité et l’eau courante, et par la rareté des terrains viabilisés. Ce point a également été souligné dans le Diagnostic du secteur privé en Guinée, récemment publié. Les entreprises des quatre villes ont indiqué que l’électricité était l’un de leurs principaux coûts et que ce coût, ainsi que l’investissement nécessaire dans des générateurs, empêchait l’expansion de leurs entreprises et le développement de nouveaux centres de transformation. Comme l’explique le propriétaire d’une usine de trans- formation agroalimentaire, « faire tourner mon générateur tous les jours est très coûteux, mais sans cela, il n’y aurait même pas d’usine ». Les contraintes susmentionnées en matière d’électricité et d’eau courante s’étendent à la conservation à grande échelle des produits agricoles, qui est en outre entravée par le manque de possibilités de stockage à froid (entrepôts et transport). Pour le secteur de l’élevage, il existe peu d’abattoirs pour la transforma- tion, et le coût de l’approvisionnement en électricité et en eau limite le dévelop- pement de nouvelles usines. Cela s’applique également aux sociétés minières, qui ont souligné que les services publics étaient l’une des principales contraintes pour les grandes sociétés minières évaluant des investissements potentiels en Guinée forestière autour de Nzérékoré. Toutes les villes étudiées soulignent également que les communautés situées à la périphérie des villes ne sont pas connectées au réseau électrique ou aux canalisations d’eau des villes. Même pour les communautés qui sont connectées au réseau et aux canalisations d’eau, l’accès n’est disponible qu’une partie de la journée (environ 6-12 heures, selon la ville et le quartier), et parfois limité à certains jours de la semaine. L’insuffisance de la fourniture de services publics peut être liée à un manque plus général d’aménagement du territoire. La part du gridiron (voir encadré 2) peut être utilisée comme une métrique pour mesurer le niveau de planification spatiale dans chaque ville. En comparant les quatre villes sélectionnées à d’autres villes de la région, il est évident que l’aménagement du territoire a été insuffisant, Nzérékoré, Boké et Mamou affichant des parts de gridiron inférieures à 10 pour cent. Cela reflète des tracés irréguliers du réseau routier, conséquence d’une planification urbaine inadéquate et inexistante, qui, comme nous l’avons vu précédemment, impose des coûts sur la mobilité des entreprises et des ménages, et sur la fourniture de services essentiels. 50 Quelles contraintes? FIGURE 17 Par rapport Figure 17 aux autres villes de la région, l’aménagement du territoire a été insuffisant dans les quatre villes sélectionnées, Par rapport , Nzérékoré aux Bokéautres villes de et Mamou sela région, situant enl'aménagement dessous de 10 %.du territoire a été insuff- isant dans les quatre villes sélectionnées, Nzérékoré, Boké et Mamou se situant en dessous de 10 %. Proportion de gridiron par ville Bobo-Diou. 56% Touba 50% Ouagadougou 47% Ndjamena 46% Brazzaville 42% Niamey 38% Abidjan 31% Kankan 29% Bamako 28% Conakry 27% Douala 11% Nzérékoré 8% Mamou 7% Boké 5% Source : Calculs des auteurs et Baruah, Henderson et Peng (2017) 51 De la connectivité à l’opportunité ENCADRÉ 2 La méthodologie Gridiron pour mesurer l’aménagement du territoire La méthodologie gridiron a été utilisée pour générer une métrique liée à la planification spatiale pour chaque ville. Elle est basée sur l’utilisation des données OSM (du réseau routier) qui sont ensuite classées en fonction de l’indice de rectangularité de chaque bloc. En termes simples, pour être un bloc de type gridiron, un bloc doit avoir un indice de rec- tangularité supérieur ou égal à 0,9. Voir les figures ci-dessous. Cette méthode est basée sur Baruah, Henderson et Peng (2017). Illustration de grils à Kankan et Mamou Kankan Mamou : Mamou road network Kankan road network Gridiron Non-gridiron Routes principales Routes locales La complexité et la rigidité des marchés fonciers jouent un rôle important dans le manque de planification et l’utilisation inefficace des terres. Alors qu’un système foncier formel avec des droits de propriété transférables existe dans certaines parties du pays, la plupart des systèmes et types de tenure en Guinée sont basés sur le droit informel et coutumier. Les structures foncières coutumières comprennent une gamme de formes de tenure, y compris la propriété individuelle et communau- taire, les droits d’utilisation et les droits pastoraux. La complexité et l’opacité de ces lois se traduisent par des marchés fonciers très rigides, ce qui décourage l’utilisation efficace des terres, d’où une densité urbaine plus faible et des recettes fiscales potentielles plus faibles grâce à un recouvrement efficace des impôts. 52 Quelles contraintes? 3.2 Une faible connectivité et des infrastructures médiocres entravent également un développement efficace. Les exportations potentielles de produits agricoles et autres sont entravées par le mauvais entretien des routes et le manque d’équipements et d’infrastructures de stockage à froid. Au-delà des services publics, les contraintes les plus importantes pour la croissance potentielle du secteur agricole sont la mauvaise connectivité générale et le manque d’infrastructures clés (telles que les entrepôts frigorifiques). Ceci est lié au manque de terrains viabilisés, car l’électricité est nécessaire pour faire fonctionner les équipements d’entreposage frigorifique. Si des terres non viabilisées sont généralement disponibles, ces parcelles sont souvent mal connec- tées aux principaux marchés et entourées d’infrastructures routières de mauvaise qualité. Les données sur la qualité des routes collectées le long du corridor Conakry- Kankan (Figure 18) mettent en évidence la très faible qualité et densité des ralen- tisseurs le long de ce corridor. Comme on peut le voir, de vastes zones présentent une forte densité de bosses et certaines sections du corridor, comme le tronçon Mamou-Dabola, sont de très mauvaise qualité, 26 % de la route étant en mauvais ou très mauvais état. 53 De la connectivité à l’opportunité FIGURE 18 Figure Qualité18 des routes sur chaque section du corridor Conakry-Kankan  (décembre 2020) Qualité des routes sur chaque section du corridor Conakry-Kankan (décembre 2020) Très Moyenne Bonne bonne Qualité Très Mauvaise mauvaise état Mamou - Dabola Dabola - Kankan Kindia - Mamou Dabola Conarky - Kindia Kindia Mamou Kankan Conarky La densité des ralentisseurs 54 Quelles contraintes? 3.3 Le coin du maire dans les villes guinéennes est faible. Les initiatives locales entreprises par les villes de Guinée sont entravées à la fois par (i) un mandat administratif restreint et (ii) une capacité limitée à mettre en œuvre ce mandat. Les contraintes de capacité et les contraintes juridiques entravent les initiatives politiques du gouvernement local. En d’autres termes, le « coin du maire », c’est-à-dire le pouvoir politique dont disposent les dirigeants locaux, est restreint. En vertu du Code Communal, les communes (ou sous-préfectures) disposent de quatorze pouvoirs distincts en matière d’administration locale, y compris la capacité de fournir des services publics et des infrastructures à petite échelle, comme la réhabilitation des bâtiments scolaires et hospitaliers. L’un des principaux pouvoirs accordés aux gouvernements locaux (GL) est le développement et l’administration de plans d’investissement annuels pour l’inventaire et l’entretien des actifs locaux, bien que ces plans soient soumis à l’approbation du gouvernement central. Cependant, malgré les pouvoirs explicitement décentralisés par le Code Communal, dans la pratique, les gouvernements locaux sont fortement dépendants des structures gouvernementales nationales opérant au niveau local. Les entretiens avec les préfectures et sous-préfectures des villes étudiées ont montré que les bureaux des maires s’adressent systématiquement au « prefet » (qui est directement nommé par le président et représente le gouvernement national au niveau local) pour obtenir un soutien dans la gestion des biens locaux et des services publics à petite échelle. Au sein des bureaux du gouvernement local, l’attitude consistant à attendre de l’État qu’il mène la politique imprègne la culture ; les discussions sont souvent centrées sur des déclarations commençant par des phrases telles que « L’État doit faire37... ». En outre, la corruption et la bureaucratie extrême au sein des administrations locales ont été citées comme des défis majeurs lors des entretiens avec les propriétaires d’entreprises. Les transferts liés au secteur minier sont une exception où le gouvernement central a transféré des fonds aux communes locales, avec des transferts réels permettant le développement de nouvelles infrastructures.38 Par exemple, le Fonds National de Développement Local (FNDL) est un fonds de 50 millions de dollars américains provenant des revenus miniers, qui est alloué aux communes du pays dans le cadre d’une stratégie nationale de soutien aux infrastructures et aux capacités institution- nelles communales. Ce fonds est administré par l’Agence Nationale de Financement des Collectivités (ANAFIC) et reçoit 15 pour cent des revenus miniers nationaux et les réaffecte aux gouvernements locaux. Cette réaffectation est basée sur le plan d’investissement annuel (PAI) de chaque collectivité, élaboré à travers un processus de consultation communautaire. Les Fonds de Développement Economique Local (FODELs) ne sont actuellement disponibles que pour les communes situées à proxi- mité d’une mine, mais il est prévu de les fusionner avec le FNDL. 37.  Traduit - Le gouvernement national devrait faire... 38.  Guinea Country Private Sector Diagnostic (CPSD, 2020) et UNECA (2009). Finances publiques locales : Expériennce Guinéenne. Lien 55 De la connectivité à l’opportunité L’intention est que ces fonds combinés augmentent considérablement l’accès des collectivités locales au financement des services publics, mais ils ne seront dispo- nibles que pour les communes qui font preuve de budgétisation participative, de suivi participatif et d’un mécanisme de retour d’information des citoyens. Malgré les fonds nationaux utilisés pour fournir des allocations aux gouvernements locaux, les collectivités locales restent contraintes par un manque de financement pour les investissements. Le code des collectivités locales fixe le principe d’un transfert financier entre le gouvernement central et les collectivités locales basé principalement sur une dotation globale couvrant les dépenses de fonctionnement. En théorie, le système doit compenser l’augmentation des charges supportées par les collectivités locales : le montant fixé dans la loi de finances est ensuite indexé sur le PIB ou réajusté en cas de transfert de nouvelles compétences. Cependant, dans la pratique, les transferts de ressources du gouvernement central vers les gouverne- ments locaux ont souvent été basés sur des règles opaques, les rendant aléatoires et incertains, surtout en termes de délais. Les transferts financiers étaient liés aux opérations et concernaient principalement les rabais accordés par le gouvernement central (subventions spécifiques, subventions de fonctionnement). Par conséquent, les communautés ne bénéficient qu’en partie de ces transferts. 56 4 Que faut-il faire? 59 De la connectivité à l’opportunité L’amélioration de la connectivité interne et externe, via les corridors économiques, a le potentiel d’apporter de grands avantages aux zones urbaines en Guinée. Pour réitérer l’objectif fourni au début, l’étude vise à démêler l’effet des améliorations possibles le long des corridors choisis sur des villes (ou régions) spécifiques en Guinée, et comment les décideurs politiques locaux et nationaux pourraient mettre en place des interventions pour amplifier les effets positifs des investissements dans la connectivité. Comme le démontre le chapitre 2, les améliorations en matière de facilitation des échanges et les investissements dans les corridors de transport pour- raient soutenir les économies locales, en augmentant les possibilités de commerce à travers le pays. Dans le chapitre 3, les conditions initiales au sein de ces aggloméra- tions urbaines secondaires ont été examinées plus en détail par le biais de multiples études de cas, et les obstacles à l’exploitation des opportunités ont été identifiés. Compte tenu des demandes concurrentes de ressources fiscales, que ce soit au niveau national ou local, comment les villes et les régions doivent-elles se préparer à saisir les opportunités et à minimiser les chocs pour leurs économies locales et leurs ménages ? Cette section présente les recommandations politiques découlant de la recherche : ce qui devrait être fait, par qui et comment. Elle s’attache à fournir des actions plus concrètes sur la manière dont chaque recommandation peut être mise en œuvre, y compris les acteurs clés impliqués. Cette section est organisée comme suit: a. Quelles sont les interventions politiques à mettre en œuvre et pourquoi ? Les interventions politiques qui ont le potentiel de maximiser les gains associés aux investissements potentiels et aux activités visant à accroître l’intégration interne et externe. Ces interventions ont été classées selon le cadre des villes compétitives,39 et classées par ordre de priorité (dans le tableau 3 ci-dessous) comme suit : i) Actions nécessaires - actions qui répondent aux impacts qui sont très susceptibles de se produire avec une connectivité accrue (augmentation du trafic de transit, croissance de la population, croissance globale de l’activité du secteur privé, etc.), ou qui sont nécessaires pour éviter des conséquences très négatives. ii) Actions souhaitables - actions associées à des effets probables mais non garantis d’une connectivité accrue (par exemple, aug- mentation des IDE dans le secteur manufacturier), ou considérées comme hautement bénéfiques compte tenu de la trajectoire de développement globale de la ville ou des villes). iii) Les paris stratégiques - actions visant à tirer profit des impacts de la connectivité accrue qui sont très incertains (impacts sur un cluster logistique, une industrie agroalimentaire). b. Comment et par qui ? Pour chacune des interventions politiques, l’accent est mis sur la manière dont une telle intervention pourrait être mise en œuvre, y compris les principaux acteurs impliqués, notamment les gouvernements locaux, régio- naux et nationaux. 39.  Le cadre des villes compétitives est utilisé pour catégoriser les interventions recomman- dées comme étant liées à : (i) les institutions et les réglementations ; (ii) les infrastructures et les terrains ; (iii) les compétences et l’innovation ; et (iv) le soutien aux entreprises et les finances. 60 Que faire? 4.1 Institutions et règlements. La mise en œuvre complète de la loi-cadre nationale sur les PPP et la création d’une nouvelle unité spécialisée pour aider à faire avancer les nombreux projets de PPP en cours seront essentielles pour jeter les bases d’une consolidation des gains issus de l’activité d’investissement privé. Les gains économiques découlant des inves- tissements dans la connectivité dépendent de l’attraction d’investissements accrus, ce qui nécessite un cadre juridique approprié dans lequel les investisseurs peuvent participer, ce qui en fait une action nécessaire hautement prioritaire. Un tel cadre a récemment été approuvé par le Parlement ; toutefois, un effort concerté sera nécessaire pour le mettre en œuvre, notamment l’opérationnalisation des organisa- tions nécessaires au bon fonctionnement de la loi.40 Une mise en œuvre appropriée de ce cadre permettra de s’assurer que les villes guinéennes sont en mesure de capter les investissements potentiels au fur et à mesure que les améliorations de la connectivité sont planifiées et mises en œuvre. Par exemple, Boké et Nzérékoré ont toutes deux un fort potentiel de croissance dans la chaîne de valeur de l’huile de palme. À Boké, l’investissement initial nécessaire pour commencer à récolter environ 20 millions de litres d’huile de palme est de 30 à 40 millions de dollars US, pour un revenu annuel de l’ordre de 25 millions de dollars US.41 Un cadre approprié pour recevoir et superviser un tel investissement au niveau national aiderait à la fois à attirer l’investissement et à gérer la relation continue avec l’investisseur. Un tel cadre permettrait également d’améliorer la protection et la rétention des investissements. Bien que les grands projets d’infrastructures soient gérées au niveau national, l’amélioration des capacités des collectivités locales par une combinaison de soutien technique et financier et de réformes visant à accroître les fonctions et les responsabilités des collectivités locales permettra d’augmenter les investissements au niveau local. Par exemple, les communes qui peuvent planifier et gérer les actifs locaux et augmenter les sources de revenus propres seront en mesure de réinvestir ces revenus, améliorant ainsi l’état des infrastructures locales et des services publics. Par exemple, les communes gèrent la qualité des services publics locaux tels que la santé, l’éducation et l’eau potable ; l’amélioration de ces services ont notamment tendance à accroitre l’attractivité de la région pour les nouvelles entreprises et les investissements potentiels. La première étape vers une meilleure capacité de générer les recettes propres des collectivités consiste à dresser un inventaire des actifs, puis à explorer les mécanismes de revenus tels que l’augmentation des tarifs et des taxes et/ou la création d’un meilleur cadastre fiscal pour améliorer la cou- verture et la collecte. Bien que cela ne soit pas nécessaire pour accroître les inves- tissements, l’amélioration des capacités des administrations locales est une priorité de second rang. 40.  Diagnostic dusecteur privé en Guinée (CPSD), 2020. 41.  Stratégie de développement durable Boké, 2018. 61 De la connectivité à l’opportunité Les programmes de renforcement des capacités des collectivités locales doivent également inclure la gestion des recettes propres, la numérisation, ainsi qu’une meilleure administration et maintenance des actifs existants. Ces besoins ont été soulignés par les gouvernements locaux dans l’ensemble des villes ayant fait l’objet d’une étude de cas, étant donné leur faible connaissance de la manière d’investir et de gérer leurs revenus. Ce manque de capacité s’étend à la capacité des GL à admi- nistrer, entretenir et gérer les actifs locaux, notamment l’entretien du réseau routier local et les prestations de services publics. Par exemple, les réseaux d’électricité et d’eau de Sangaredi ont été financés et construits par des sociétés minières opérant localement ; cependant, ni les sociétés minières ni les GL concernées ne peuvent gérer efficacement ces infrastructures. Les administrations locales n’ont pas non plus accès à des technologies informatiques et numériques adéquates. Par exemple, les bureaux du gouvernement local de Mamou disposent d’une infrastructure informa- tique obsolète, et plusieurs employés doivent partager un seul ordinateur. Dans les régions minières, le soutien du GL doit inclure une meilleure planification des investissements miniers, un soutien pour mieux faire respecter les exigences environnementales et sociales, et une meilleure communication concernant le contenu local. Une meilleure planification peut être utilisée pour attirer et améliorer l’engagement avec les investisseurs potentiels. Les GL ont également exprimé le besoin d’améliorer l’application des consultations environnementales et sociales et des évaluations d’impact. Actuellement, ces consultations et évaluations sont obligatoires, mais les réunions avec les administrations locales ont mis en évidence le fait que le suivi et l’application dans ces domaines ont été limités. Le manque de connaissance et de compréhension des exigences de contenu local pour les contrats miniers contribue également à l’instabilité civile - un facteur important contribuant aux fréquentes protestations politiques dans la région de Boké. Une meilleure communication et un meilleur engagement des citoyens sur la nature des exigences de contenu local, ainsi que sur la manière dont ces contrats sont émis et gérés, contribueraient à résoudre ce problème. Un meilleur engagement sur le contenu local concerne également la manière dont les administrations locales gèrent leurs relations avec les sociétés minières opérant localement. Pour soutenir les industries à fort potentiel telles que l’agriculture et l’élevage, il convient de développer des normes nationales et un processus de certification associé. Cela implique la mise en place d’un bureau national des normes, ainsi que des investissements dans des laboratoires pour permettre de tester les produits. Actuellement, les entreprises d’exportation doivent payer pour envoyer leurs échan- tillons à tester dans d’autres pays de la région ouest-africaine. Dans l’idéal, les labora- toires d’essai des normes devraient être décentralisés dans les différentes régions de la Guinée afin que les entreprises locales ne soient pas obligées de transporter leurs marchandises à l’étranger ou à Conakry pour les essais. À court terme, ce problème pourrait être résolu par des subventions destinées à compenser le coût de l’expédi- tion de ces échantillons, qui pourraient être administrées par le budget du gouver- nement local, ou par des structures de financement existantes telles que le FNDL. Soutenir l’accès aux standards et certifications requises permettra d’améliorer la concurrence dans le cadre d’un ensemble plus large de réformes commerciales, un pari stratégique pour soutenir ces secteurs. Des réunions régionales, comme au sein de la CEDEAO, ont lieu pour soutenir et améliorer les réglementations régio- nales. L’amélioration des systèmes de résolution des conflits et de recours au sein de ces organisations contribuerait à améliorer les procédures et par conséquent à faciliter le commerce régional. Les systèmes de traçabilité contribueraient également à améliorer particulièrement l’application des standards et les processus de certifica- tion, tout comme des investissements dans la chaîne du froid et d’autres installations de stockage aux principaux points commerciaux. L’utilisation de guichets uniques à ces points commerciaux peut faciliter la mise à disposition de documentation pour les exportations et les importations et contribuer également à faciliter le commerce particulièrement pour les produits agricoles de base. 62 Que faire? Ces mesures devraient également être accompagnées par des programmes de for- mation pour les acteurs locaux afin d’assurer qu’ils sont capables d’aborder et d’uti- liser ces types de systèmes. Le Programme de Résilience du Système Alimentaire de l’Afrique de l’Ouest (FSRP) vise à soutenir ce type d’intégration régionale améliorée en renforçant les capacités de prévention et gestion des crises alimentaires, de promotion de la résilience et la productivité agricoles, et améliorer l’intégration des marchés et le développement des chaînes de valeur alimentaires régionales. Même si la première phase du programme n’inclut pas la Guinée, la Guinée fera partie de la phase suivante. Des analyses détaillées des chaînes de valeur devraient être entreprises pour mieux comprendre les secteurs où la Guinée a un avantage concurrentiel et comment le développement de ces secteurs pourrait être soutenu par le gouvernement. L’Analyze détaillée de L’agro-industrie guinéenne (Guinea Agribusiness Deep Dive [2018]) et Le diagnostic du secteur privé en Guinée (Guinea Country Private Sector Diagnostic[2020]) ont mis en évidence plusieurs chaînes de valeur agro-industrielles potentielles que la Guinée pourrait développer, telles que : les mangues, les ananas, le fonio, le riz, le café et les œufs. Une analyse plus approfondie est nécessaire pour comprendre les opportunités et les contraintes liées au développement de ces chaînes et à l’établissement de pôles agrologistiques dans les principales villes secondaires de la Guinée, en fonction de leur connectivité, de la disponibilité du capital humain et des services publics d’appui, et des obstacles réglementaires. Ces analyses devraient également quantifier le temps et les coûts financiers associés aux différentes parties des chaînes d’exportation agricole. Les analyses pourraient également évaluer le potentiel du développement agro-logistique dans les villes secondaires pour générer des impacts transformationnels sur les économies locales en réduisant la pauvreté, en augmentant l’inclusion et le nombre d’emplois formels rémunérés, en particulier pour les femmes. La mise en œuvre complète d’un système de guichet unique pour les douanes afin de faciliter le commerce (à Conakry et aux frontières terrestres du pays) soutiendrait les entreprises de toutes les industries, en allégeant les contraintes tant du côté des importations que des exportations. Les entreprises ayant un meilleur accès au capital peuvent payer des tarifs élevés aux compagnies maritimes internationales pour faciliter les exportations de produits. Ces agents maritimes offrent un soutien consi- dérable pour répondre aux exigences du commerce, mais le processus est lent et lourd. Pour les petites entreprises, ces services sont hors de portée, ce qui limite leur potentiel d’exportation malgré la demande. Par exemple, un transformateur local de confitures et de jus de fruits a noté que, sur la base de discussions informelles avec des distributeurs et des supermarchés potentiels, il existe une demande considé- rable pour son produit dans la région ouest-africaine au sens large, mais qu’il est incapable d’exporter en raison de l’étendue et du manque de clarté des exigences commerciales. Du côté des importations, les entreprises qui créent des installations industrielles doivent se procurer la plupart de leurs équipements à l’étranger, et ces importations peuvent subir des retards considérables aux douanes. Comme ces équipements sont essentiels à la mise en place des opérations, les longs délais représentent un manque à gagner, ce qui pourrait pousser certaines entreprises à cesser leurs activités et/ou retarder leur capacité à honorer les contrats des ache- teurs. Un système de guichet unique permettrait de rationaliser le calendrier de ces processus et de fournir un lieu unique pour le traitement de toutes les demandes liées au commerce. En tant que telle, la mise en œuvre de cette action est une action hautement souhaitable pour soutenir de multiples secteurs en Guinée. Ce type de système est en cours de mise en œuvre à Conakry et a déjà démontré des augmentations importantes des redevances douanières ; en janvier 2021, les rede- vances douanières s’élevaient à environ 8,4 milliards de francs guinéens par rapport à 370 millions de francs guinéens en janvier 2020. 63 De la connectivité à l’opportunité L’extension de ce système à d’autres villes frontalières est envisagée à court terme, notamment Kamsar dans le corridor Sangaredi-Boké-Kamsar, Dieke à la frontière avec la Côte d’Ivoire et Kouremalé à la frontière avec le Mali. Les sites de Kamsar et Dieke bénéficieront à Boké et Nzérékoré en raison de leur proximité avec ces sites. Bien que Kankan ne soit pas une ville frontalière, elle est susceptible de bénéficier du guichet unique de Koremalé en raison de sa situation sur le corridor reliant la Guinée au Mali. En plus des diverses recommandations de facilitation du commerce discutées ici, un soutien plus large aux réformes de la politique commerciale et des fron- tières contribuerait à compléter les infrastructures de transport.42 Alors que de telles réformes devraient normalement inclure un examen des tarifs douaniers, des barrières non tarifaires et des accords commerciaux régionaux, cela n’est pas faisable étant donné les restrictions de la CEDEAO. Cependant, la mise en œuvre de réformes de la politique commerciale qui soutiennent une meilleure politique de concurrence, en particulier dans les secteurs de la logistique et des services, pourrait aider à résoudre les contraintes et les lacunes de compétences qui s’appliquent à tous les secteurs. Par exemple, l’amélioration des services de transport contribue- rait à réduire les coûts de production des biens commercialisables, y compris dans les secteurs à fort potentiel comme l’agriculture, l’élevage et la pêche. Le secteur de la logistique en Guinée est actuellement dominé par les syndicats de transport, qui contrôlent généralement le transport des marchandises et des passagers. Les43 mesures visant à améliorer la protection et la rétention des investissements, discutées à un niveau plus détaillé dans la section sur le soutien et le financement des entre- prises, relèvent également de réformes plus larges de la politique commerciale qui viendraient compléter les infrastructures de transport. Comme l’indique l’analyse quantitative, les réformes frontalières favoriseraient le développement des villes secondaires en Guinée. Ces réformes pourraient inclure une meilleure collaboration entre les agences frontalières pour une gestion plus intégrée des frontières, ainsi que la réingénierie des processus et procédures douaniers pour simplifier le passage des frontières. Avant de telles actions, cepen- dant, une évaluation détaillée des processus frontaliers actuels serait nécessaire pour identifier les interventions les plus importantes et la manière dont elles pourraient être mises en place. 42.  Mattoo, Aaditya ; Rocha, Nadia ; Ruta, Michele. 2020. L’évolution des accords commer- ciaux approfondis. Document de travail pour la recherche sur les politiques ; n° 9283. Banque mondiale, Washington, DC. Lien 43.  Basé sur des entretiens menés avec le Syndicat des Transporteurs à Mamou, en Guinée. 64 Que faire? 4.2 Infrastructures et terrains. Les villes de Guinée peuvent tirer parti des possibilités offertes par les améliora- tions de la connectivité en améliorant l’aménagement du territoire, notamment en coordonnant l’utilisation des terres et des infrastructures de connexion. Cela implique d’améliorer l’inventaire des terrains, des bâtiments et des infrastructures publics, en améliorant ultérieurement le cadastre légal. Un tel inventaire permettrait une meilleure fourniture des services publics et une expansion urbaine plus harmo- nieuse, deux conditions importantes pour qu’une ville puisse absorber la croissance économique. La planification urbaine et la gestion coordonnée de l’utilisation des sols jouent un rôle important dans l’identification et l’exécution des investissements les plus nécessaires dans les services publics et les infrastructures de base, ainsi que dans les pratiques d’exploitation et d’entretien appropriées. Les plans d’aménage- ment urbain présentent également une vision et une stratégie pour les investisse- ments d’une ville, ainsi que des interventions potentielles pour atteindre cette vision, et contribuent à favoriser l’engagement de la communauté et les processus de prise de décision - tous ces éléments favorisant une meilleure planification et prestation des services publics, en particulier dans le contexte de la croissance de la population urbaine. En tant que telle, il s’agit d’une action hautement souhaitable pour résoudre les contraintes à l’investissement. La plupart des villes secondaires de Guinée ont des plans directeurs urbains dépassés ou non appliqués, les gouvernements locaux ne faisant généralement pas usage de ces documents. Cela a d’importantes répercussions financières, car la fourniture d’infrastructures et de services publics est beaucoup plus coûteuse si elle est mise en œuvre dans le cadre de la modernisation des établissements infor- mels, par opposition à la planification des infrastructures et de l’utilisation des sols. Par exemple, un programme de modernisation en Tunisie visant à réduire l’habitat insalubre a nécessité des investissements massifs dans les infrastructures d’eau et d’égouts, qui auraient pu être réduits avec un meilleur développement préalable de la planification urbaine.44 Un facteur majeur contribuant au mauvais état actuel des services publics dans les villes secondaires de Guinée est que la répartition actuelle des services publics n’a pas été planifiée ou a été planifiée pour des populations beaucoup plus petites, et cette planification n’a pas suivi la croissance des villes. Par exemple, le réseau électrique de Sangaredi a été construit pour une population de 10 à 15 000 habitants ; la population de Sangaredi dépasse aujourd’hui 65 000 habi- tants. De même, l’infrastructure de l’eau à Nzérékoré a été construite en 1972 ; depuis lors, la population a triplé, laissant la capacité installée inadéquate pour la croissance de la ville. La mise à jour des codes fonciers pertinents, y compris dans les zones rurales, est également cruciale pour le développement économique local. Les représentants des autorités locales des villes étudiées ont souligné la nécessité de mettre à jour le code foncier, qui ne concerne actuellement que les zones urbaines. 44.  Avner, P. et Mukim, M. 2019. « Examen du secteur urbain en Guinée : Planification, connexion, financement à Conakry », Groupe de la Banque mondiale. Lien 65 De la connectivité à l’opportunité Outre la mise à jour du code lui-même, de meilleures campagnes de communica- tion et une meilleure éducation sont nécessaires pour que la population locale et les investisseurs potentiels/actuels puissent répondre à ses exigences. Les popu- lations rurales ne sont pas conscientes des exigences réglementaires, sécuritaires et autres associées à la propriété foncière. Cette asymétrie informationnelle contribue également aux conflits fonciers, en particulier entre les individus opérant dans les secteurs de l’agriculture, de l’élevage et des mines. La rationalisation et l’actualisation du Code Pastoral, qui n’a pas été mis à jour depuis 1989, contribueraient également à améliorer cette situation. Des investissements visant à améliorer la qualité des routes et leur entretien seront également nécessaires. Une meilleure connectivité des transports vers les villes améliorerait les liens entre les producteurs locaux et les marchés au centre de la ville. Cela est particulièrement important pour les paris stratégiques dans les secteurs de l’agriculture et de l’élevage, car les producteurs des zones rurales doivent pouvoir accéder aux marchés urbains pour vendre leurs produits. Des améliorations routières seront également nécessaires pour permettre le transport de marchandises péris- sables à forte valeur ajoutée, notamment celles qui peuvent être exportées par le port de Conakry et qui nécessitent une logistique efficace de la chaîne du froid. Ces investissements font partie d’une série d’améliorations nécessaires aux services publics locaux, ce qui en fait des actions hautement prioritaires. Les investissements visant à améliorer le réseau routier permettraient également de faciliter l’accès aux marchés. Cela s’applique à la fois à l’amélioration des routes d’accès aux zones rurales, en particulier les zones de production agricole, et aux investissements dans la construction de routes de raccordement plus importantes. Étant donné la grande étendue géographique de la Guinée, les décisions concer- nant la manière et l’endroit où investir dans le réseau routier doivent être planifiées de manière stratégique. Cela s’applique particulièrement à la planification de l’amélioration des routes d’accès. Ces investissements peuvent être choisis stratégi- quement pour soutenir des chaînes de valeur spécifiques à fort potentiel en reliant les zones de production aux points de vente. Par ailleurs, les décisions relatives aux investissements dans les routes d’accès pourraient également être motivées par la population locale, afin d’accroître la connectivité des zones rurales les plus peuplées, les plus nécessiteuses, etc. De plus, les pluies saisonnières dans les différentes régions rendent les villes guinéennes plus vulnérables aux pertes économiques liées aux inondations. Une étude sur l’impact des inondations à Kinshasa démontre que les perturbations dues aux inondations ont des coûts économiques substantiels en raison de canaux tels que le réacheminement des transports en commun, la diminution de la vitesse de déplacement et l’accessibilité réduite aux emplois. Cette étude estime à 1,2 million de dollars US le coût quotidien des perturbations dues aux inondations pour les déplacements des banlieusards à Kinshasa.45 Les villes guinéennes sont confrontées à des problèmes similaires, et probablement à des coûts similaires ; pendant le système pluvial, parcourir une distance de 2 km peut prendre plus d’une heure en raison des inondations et de la congestion des routes dans la ville de Nzérékoré.46 La résolution de ce problème nécessitera à la fois des investissements pour améliorer la qualité des routes et des pratiques d’entretien améliorées. 45.  He, Yiyi, Stephan Thies, Paolo Avner, et Jun Rentschler, The Impact of Flooding on Urban Transit and Accessibility - A Case Study of Kinshasa. Dispositif mondial de la Banque mondiale pour la prévention des catastrophes et le relèvement, décembre 2020. 46.  Entretien réalisé avec des fonctionnaires du gouvernement local à Nzérékoré. 66 Que faire? Pour faire face aux opportunités de croissance, les villes de Guinée doivent augmenter la disponibilité de terrains viabilisés, une action nécessaire pour alléger les contraintes d’investissement critiques. Il s’agit tout d’abord de réduire et d’améliorer les réglementations relatives à l’utilisation des terres, notamment en rationalisant l’achat et l’utilisation de terrains privés pour les investisseurs potentiels. Cela pourrait impliquer l’amélioration de la sécurité d’occupation et du cadastre général, ainsi que la réduction du nombre d’étapes et des coûts associés à l’acqui- sition de terres. L’amélioration de la sécurité foncière au Sénégal, mise en œuvre dans le cadre de la loi sur le régime foncier de 2011, a permis de convertir gratui- tement les permis d’occupation temporaire dans les zones urbaines en titres de propriété permanents, contribuant ainsi à accroître l’activité sur le marché foncier formel, à augmenter les investissements dans le logement et à améliorer l’accès au financement du logement ; ces améliorations sur le marché foncier s’appliquent également aux entreprises.47 Cette rationalisation s’applique à tous les secteurs et contribuera à encourager les investissements. Ces dispositions permettent égale- ment de soutenir la protection et la rétention des investissements, favorisant ainsi une meilleure politique de concurrence dans le cadre d’un ensemble plus large de réformes commerciales. Les zones économiques spéciales ont le potentiel pour aider à relever ces défis dans un format géographiquement condensé. Elles nécessitent toutefois d’impor- tants investissements initiaux pour construire l’infrastructure de base (par exemple, les réseaux d’électricité et d’eau, les routes d’accès, etc.) et peuvent rester vacantes pendant de longues périodes jusqu’à ce qu’elles soient pleinement occupées.)48 et peuvent rester vacantes pendant de longues périodes jusqu’à ce qu’elles soient pleinement occupées. Malgré les difficultés liées au développement et à l’exploita- tion des zones industrielles, un certain nombre de projets en Guinée utilisent cette méthode pour résoudre les contraintes liées aux terrains viabilisés. La Banque afri- caine de développement finance une zone industrielle pour l’agro-transformation, près de Boké, avec une extension potentielle près de Kankan. Ce projet financera l’infrastructure de base, complétée par une assistance technique visant à soutenir l’environnement réglementaire pour attirer les investisseurs potentiels. Cependant, son succès reste à déterminer.49 La simplification du régime foncier et une meilleure application des règles exis- tantes permettraient une utilisation plus efficace des terres. En simplifiant et en assurant l’application de ces règles, les gouvernements nationaux et locaux béné- ficieraient d’un marché foncier plus efficace, d’une utilisation plus efficiente des terres et d’une perception plus facile des impôts. Ces mesures pourraient impliquer (1) la mise en place d’un système de gestion foncière et immobilière consensuel, équitable, durable et basé sur une coexistence non conflictuelle du droit moderne et des pratiques traditionnelles ; (2) la mise en place d’un cadre de concertation approprié pour les différents acteurs concernés par la question foncière et immobi- lière en milieu urbain et rural ; (3) l’apport de solutions appropriées aux problèmes institutionnels, réglementaires et opérationnels pour minimiser les risques de conflits ; (4) et enfin le renforcement des capacités des services en charge du foncier aux niveaux central, déconcentré50 et décentralisé. Par exemple, le cadre juridique de la Guinée délègue l’autorité sur de nombreuses questions foncières aux commissions foncières et à d’autres entités locales. 47.  République de Guinée : Revue de l’urbanisation, Banque mondiale, juin 2018. 48.  Par exemple, la zone de Tema au Ghana, située à deux heures de route d’Accra, fonctionne aujourd’hui à environ 98 % de sa capacité ; il a toutefois fallu plusieurs années et des investisse- ments considérables de la part du gouvernement pour atteindre ce taux d’occupation. Ghana Economic Transformation Project, Project Appraisal Document, Banque mondiale. 49.  Entretien avec un spécialiste de la Banque africaine de développement. 50.  Les représentants locaux des agences nationales. 67 De la connectivité à l’opportunité L’effort de déconcentration et de décentralisation de l’administration foncière n’a pas été couronné de succès jusqu’à présent, en grande partie à cause du manque de capacité des institutions. Il est nécessaire de renforcer davantage les capacités administratives locales. Toutes ces mesures sont essentielles si les gouvernements municipaux veulent encourager une plus grande efficacité des marchés fonciers, ce qui se traduira par une plus grande densité et des revenus plus élevés provenant des taxes locales. Un autre moyen de réduire et d’améliorer les réglementations relatives à l’uti- lisation des terres consiste à améliorer le cadre national d’allocation des terres publiques aux grands investissements. Plusieurs structures différentes pourraient être utilisées pour allouer des terres dans des conditions qui incitent à ces inves- tissements. Par exemple, un modèle de construction-exploitation-transfert (BOT) (entre autres) pourrait être utilisé de sorte que le titre foncier soit remis à un opé- rateur privé à un taux gratuit ou concessionnel, à condition que tous les investisse- ments dans le site lui-même soient pris en charge par l’opérateur. De même, une structure de « bail emphytéotique » pourrait étendre les mêmes dispositions dans le cadre d’un bail à long terme. La structure BOT peut cependant être plus apte à attirer les investisseurs puisque le titre foncier peut être utilisé comme garantie pour l’accès au crédit. Plusieurs actions pourraient contribuer à améliorer l’approvisionnement local en services publics, considérées comme des actions nécessaires et hautement prioritaires. À court terme, les gouvernements locaux pourraient fournir des sub- ventions à petite échelle pour encourager la fourniture locale d’électricité et d’eau courante, comme les entreprises privées qui ont investi dans des générateurs ou des panneaux solaires pour fournir de l’énergie supplémentaire à des communautés spécifiques. De nombreuses entreprises de ce type sont déjà établies dans les villes étudiées, mais dans la plupart des cas, les consommateurs doivent payer des tarifs élevés pour l’électricité fournie. À Nzérékoré, cependant, en attendant le lancement du projet d’interconnexion,51 Éléctricité de Guinée (EdG) a accordé des subventions à des groupes locaux disposant de générateurs pour améliorer l’approvisionnement en électricité. Bien que cette action fournisse beaucoup moins d’énergie que ce que l’on attend du projet d’interconnexion, qui devrait fournir 15 à 20 MW supplé- mentaires à la ville en plus des 6,9 MW de capacité actuelle, elle permet tout de même une amélioration critique de l’approvisionnement local en électricité.52 Une telle action pourrait être utilisée à court terme pour compléter l’approvisionnement en électricité d’autres villes guinéennes. Pour les communautés à la périphérie des villes qui ne sont pas connectées au réseau ou aux canalisations d’eau des villes, une façon de résoudre ce problème plutôt que d’étendre les lignes de transmission est de permettre et d’encourager l’utilisation de l’énergie hors réseau et des solutions de micro-puits. Comme la plupart des communautés locales sont prêtes à payer pour de tels services, du moins en partie, ces investissements pourraient également être financés par des paiements communautaires. Pour encourager les améliorations à long terme, le gouvernement pourrait accé- lérer les études de faisabilité pour les sites publics qui ont été identifiés pour des infrastructures clés. Cela permettrait d’accélérer le processus de vérification associé à la sélection du site et de réduire les exigences initiales de la part de l’investisseur. L’existence de telles études peut jouer un rôle majeur pour attirer les investisseurs étant donné les valeurs d’investissement élevées et/ou les délais qui sont souvent requis. Par exemple, la construction d’une centrale hydroélectrique peut prendre environ trois ans, auxquels s’ajoute le temps nécessaire à l’obtention des permis, aux études d’impact environnemental et social, etc. 51.  Le projet d’interconnectivité permettra de s’approvisionner en électricité en Côte d’Ivoire et de construire des lignes électriques qui passeront par Nzérékoré. 52.  Entretien avec EdG. 68 Que faire? L’utilisation de sites pré-identifiés avec des études de préfaisabilité associées a permis d’encourager les investissements miniers mais pourrait être reproduite pour la fourniture de services publics. Par exemple, la société minière canadienne SRG Mining a identifié un site d’exploitation de graphite près de Nzérékoré en utilisant le cadastre minier national, qui dispose d’un inventaire des sites miniers avec des études de concept et/ou de préfaisabilité terminées. Cela a depuis conduit à la création de la filiale de SRG Mining, la Société Sama Ressources Guinée, et à un investissement estimé à 110 millions de dollars US.53 Une meilleure coordination entre les différents acteurs contribuerait également à améliorer les prestations de service public. Les collectivités locales ont actuelle- ment une connaissance et une implication limitées dans la planification et la mise en œuvre des grands contrats de service public. Par exemple, la centrale électrique de Souapiti fournira une capacité supplémentaire dans la région de Boké ; cependant, les acteurs des gouvernements locaux de Boké Centre, Sangaredi et Kamsar n’ont pas été impliqués dans le processus de planification et ont une connaissance et une compréhension limitées de la capacité électrique supplémentaire que la centrale de Souapiti fournira à la population et aux entreprises locales. Ainsi, les gouvernements locaux de Boké ne sont pas en mesure de prévoir le calendrier de ces améliorations ou de s’y préparer efficacement. De plus, les provisions d’énergie pourraient ne pas être allouées aux zones qui en ont le plus besoin puisque les GL n’ont pas été impliquées dans le processus de planification. De même, les administrations locales ont une connaissance limitée des investissements prévus dans le domaine des transports, car cette planification se fait au niveau national, bien que les administra- tions locales soient responsables de l’exploitation et de l’entretien des routes locales. Étant donné que les provisions pour l’entretien des routes sont déjà insuffisantes, cette déconnexion rend encore plus difficile pour les GL la planification de ces besoins d’entretien. Il sera essentiel d’encourager les investissements dans des installations électriques à plus grande échelle pour soutenir la croissance potentielle des villes de Guinée. Même dans les cas où des mises à niveau de la capacité électrique sont prévues, comme le projet d’interconnexion à Nzérékoré, le soutien au développement indus- triel nécessitera d’autres mises à niveau de la capacité. Une seule famille de taille petite à moyenne peut utiliser une capacité installée de 1 à 2 MW, ce qui signifie que les 15 à 20 MW supplémentaires qui seront fournis par le projet d’interconnec- tivité pourraient être facilement consommés avec un plus grand développement industriel dans la région. La réforme de la réglementation du secteur pourrait contribuer à améliorer l’attractivité des projets énergétiques pour les investisseurs potentiels ; par exemple, l’élaboration d’une nouvelle loi sur l’énergie au Burundi a contribué à encourager le développement d’une centrale solaire privée dans la province de Gitega. Il est également essentiel de mettre en place des incitations appropriées pour les investisseurs potentiels, car EdG ne dispose pas d’une notation de crédit bien établie pour l’émission de contrats avec des fournisseurs d’énergie indépen- dants privés. Dans l’exemple susmentionné du Burundi, une garantie du ministère des Finances a été utilisée pour garantir le risque de paiement de la compagnie d’électricité locale pour le contrat avec Gigawatt Global, ainsi qu’une garantie de la Banque centrale pour atténuer le risque de change.54 Le programme Scaling Solar mis en œuvre en Zambie fait appel à une garantie de la MIGA pour atténuer le risque de paiement de la société de services publics locale. L’IFC et le Groupe de la Banque mondiale ont également apporté un soutien technique au lancement de ce programme en Zambie, ce qui a permis d’obtenir un tarif de 6,02 cents par kilowattheure, soit une économie importante par rapport au coût moyen du diesel de 20 cents par kilowattheure. 53.  Entretien réalisé avec des experts miniers à Nzérékoré 54.  Entretien avec un IPP privé qui envisage d’entrer sur le marché burundais. 69 De la connectivité à l’opportunité La centrale solaire Neoen S.A. / First Solar Inc. 54 MW a commencé à fonctionner en 2019, alimentant plus de 25 000 foyers en électricité.55 Des garanties de paiement et de devises similaires pourraient jouer un rôle essentiel pour inciter les investisseurs privés à participer aux secteurs de l’énergie et de l’eau en Guinée. Des actions ciblées de la part du gouvernement national pour une promotion proactive des investissements dans les secteurs de l’énergie et de l’eau pourraient contribuer à répondre à la nécessité de renforcer les capacités. Cela inclut l’utilisa- tion d’incitations non fiscales telles que les garanties susmentionnées. De telles inci- tations améliorent les rendements potentiels afin d’attirer les investisseurs, surtout si l’on considère les résultats limités de la Guinée en matière de grands PPP en dehors du secteur minier. 55.  « Le courant passe en Zambie ». https://www.scalingsolar.org/power-on-in-zambia/ 70 Que faire? 4.3 Compétences et innovation. Le développement d’une base de compétences plus solide jouera également un rôle important pour répondre à la demande qui découle de la croissance probable des villes guinéennes. Les programmes de formation technique et professionnelle sont extrêmement limités, surtout en dehors de la capitale, et les entreprises ont du mal à trouver le personnel du calibre dont elles ont besoin, en particulier dans les domaines techniques. Une amélioration dans ce domaine est une action hautement souhaitable qui soutiendrait tous les secteurs d’activité. Une personne interrogée dans l’agro-industrie a déclaré : « Je peux trouver autant d’avocats que j’ai besoin, mais lorsqu’il s’agit de techniciens, la disponibilité est faible ». À Boké, les sociétés minières ont une demande considérable de talents techniques, mais doivent souvent les faire venir d’autres pays. Une formation professionnelle répondant à une telle demande pourrait produire des avantages immédiats pour les écono- mies locales. Dans les endroits qui cherchent à attirer de grands investisseurs (par exemple, Nzérékoré pour les opérations minières), cela pourrait prévenir et atténuer les inquiétudes concernant la qualité de la main-d’œuvre. L’intégration du milieu des affaires local dans les programmes de formation dispo- nibles sera également cruciale. Les programmes qui réunissent les entreprises et les établissements d’enseignement locaux peuvent jouer un rôle important à cet égard ; de nombreuses villes telles que Gaziantep (Turquie) ou Bucaramanga (Colombie) les ont mis en œuvre. Pour les secteurs de l’agriculture et de l’élevage, ce type de soutien peut également cibler les associations professionnelles pour un appui plus large à tous les secteurs. L’intégration de ces associations dans le dialogue publique- privé peut également assurer que les réformes et les interventions gouvernemen- tales (aux niveaux national et local) correspondent mieux aux besoins du secteur privé particulièrement pour les secteurs à fort potentiel. L’amélioration de la capacité d’innovation locale passe également par un soutien aux centres d’entrepreneuriat et aux incubateurs existants. Bien que de telles organisations ne soient pas très présentes en Guinée en dehors de la capitale, Boké dispose d’un centre d’entrepreneuriat local (Centre d’entrepreneuriat) qui pourrait bénéficier d’un soutien technique et financier. Des études empiriques transna- tionales démontrent l’importance des améliorations de la productivité, qui repré- sentent la moitié de la croissance du PIB (Easterly et Levine, 2001). L’innovation est une composante majeure de ces améliorations de la productivité à long terme, et le fait d’apporter un soutien aux centres d’entrepreneuriat peut contribuer à renforcer les systèmes d’innovation locaux et à soutenir l’accumulation de capital humain. Une plus grande disponibilité des services de vulgarisation pour les agriculteurs est une contrainte importante à résoudre pour la croissance de l’industrie agroalimen- taire. Une entreprise agroalimentaire interrogée a déclaré que le problème le plus pressant lorsqu’il s’agit de s’approvisionner auprès des agriculteurs est la difficulté de standardiser la production des agriculteurs. 71 De la connectivité à l’opportunité L’agronome de l’entreprise fournit un soutien continu aux agriculteurs au sein des différentes communautés auprès desquelles ils s’approvisionnent en mangues, ananas et noix de cajou, ainsi qu’un soutien fourni par des ONG telles que WinRock, mais les normes de qualité et de quantité, ainsi que l’utilisation de produits chimiques, restent un problème. Soutenir les prestations de services de vulgarisation est un pari stratégique pour soutenir le développement potentiel de l’industrie agroalimentaire. Selon la région, le soutien à d’autres secteurs tels que l’élevage, la pêche et le commerce à petite échelle doit également être envisagé. Les petits commerçants ont tendance à être informels dans les régions frontalières telles que Nzérékoré, et les représentants du gouvernement local soulignent l’importance de soutenir les capacités dans le secteur du commerce, en particulier pour la formalisation. Les secteurs de l’élevage et de la pêche sont également des secteurs à fort potentiel dans toutes les régions de la Guinée et pourraient bénéficier d’un soutien technique sectoriel. Un soutien technique ciblé à des chaînes de valeur spécifiques au sein de l’agri- culture ou d’autres secteurs pourrait constituer un pari stratégique important pour certaines villes et régions. Par exemple, en raison du prix de vente élevé des noix de cajou, l’investissement dans cette chaîne de valeur pourrait rapporter gros à Kankan et plus largement à la région de Haute Guinée. Une entreprise locale de ce secteur a pu obtenir un financement international à petite échelle, bien que ce processus ait pris plusieurs années et que d’autres financements soient nécessaires.56 De tels paris de la part du gouvernement local et/ou national doivent toutefois être examinés avec soin, en tenant compte des exigences potentielles en matière de subventions, de l’engagement stratégique global et du temps nécessaire pour atteindre le seuil de rentabilité. L’industrie du coton à Kankan, par exemple, a été fortement subventionnée et a dû faire face à des retards de financement de la part du gouvernement national. Ces retards pourraient, du moins en partie, être atténués par des engagements stratégiques plus forts et une meilleure coordination entre les différents niveaux de gouvernement. Ainsi, certaines chaînes de valeur pourraient bénéficier d’engagements stratégiques par le biais d’un financement à plus grande échelle pour les producteurs et autres acteurs, mais de tels programmes devraient faire partie d’un effort global de planification stratégique régionale. 56.  Entretiens réalisés lors de la mission d’avril 2019 à Kankan. 72 Que faire? 4.4 Soutien et financement des entreprises. La promotion ciblée de l’investissement peut aider à jouer un rôle dans la géné- ration d’investissements étrangers, en particulier en dehors de la bauxite et des autres activités minières, en tant que priorité souhaitable de second rang. Au cours des entretiens, les entreprises ont mentionné que les investisseurs internationaux, notamment anglophones, perçoivent actuellement la Guinée comme un pays à très haut risque, malgré la richesse des produits à fort potentiel, notamment dans le secteur agricole. Changer cette perception implique plusieurs actions différentes au niveau national, y compris la recherche proactive d’investissements par le biais d’or- ganisations gouvernementales telles que l’Agence de Promotions d’Investissements (API). Ces actions comprennent une plus grande visibilité lors des salons profession- nels, mais aussi la mise en place de dispositions visant à augmenter le rendement des investissements et à atténuer les risques. Des incitations et/ou autres concessions pour les investisseurs à grande échelle dans des secteurs ciblés pourraient accroître l’attrait de la Guinée pour les inves- tisseurs potentiels. De telles incitations permettent d’augmenter les rendements potentiels et ont donc un impact majeur sur l’opportunité d’un investissement. Ces concessions peuvent être mises en place comme des incitations temporaires pour réduire les coûts d’investissement initiaux et améliorer le profil de rentabilité d’un investissement particulier. Dans le cas de la route nationale n° 5 au Vietnam, les auto- rités locales ont cherché de manière proactive des investisseurs de marque pour les grappes industrielles le long de l’autoroute, par le biais de foires commerciales internationales et en établissant des relations à long terme avec des marques recon- nues. En combinant ces efforts proactifs de promotion des investissements et les programmes d’incitation, elles ont réussi à attirer des entreprises telles que Canon, Honda et Panasonic, qui ont chacune contribué à attirer d’autres investissements.57 Des garanties de paiement et de propriété de différents types peuvent contribuer à atténuer les risques pour les investisseurs, en particulier compte tenu du manque d’antécédents de la Guinée en matière d’investissement pour les investisseurs internationaux en dehors du secteur minier. Ces types de dispositions ont été mentionnés précédemment (dans le cadre de la centrale électrique de Gitega au Burundi et du programme Scaling Solar en Zambie) dans le contexte de l’attraction des investisseurs dans les secteurs de l’électricité et de l’eau et pourraient atténuer les risques pour les investissements dans d’autres secteurs également. Les garanties peuvent également être utilisées par les investisseurs potentiels comme sûretés pour accéder au financement des banques internationales et plus régionales, ou pour réduire les taux d’intérêt associés à ce financement. 57.  JICA (Agence japonaise de coopération internationale). 2008. « Projet d’amélioration de la route nationale n° 5 ». Équipe d’évaluation conjointe Vietnam-Japon 2007. Lien 73 De la connectivité à l’opportunité L’amélioration de la qualité du contenu local disponible peut contribuer à attirer des investisseurs potentiels et à faire en sorte que la population locale soit mieux placée pour tirer parti des investissements actuels. La Bourse de Sous-Traitance, qui a été mise en place à Boké, est un bon exemple de ce fonctionnement en pratique. La bourse fournit actuellement un soutien technique et financier aux entreprises afin qu’elles puissent soumissionner et obtenir des contrats de service avec les grandes sociétés minières de la région. La bourse fournit également une plateforme permettant aux sociétés minières d’afficher tous les contrats disponibles afin que les sociétés puissent satisfaire à leurs exigences en matière de contenu local. En tant que telle, la structure de la bourse améliore la qualité du contenu local disponible et facilite la circulation de l’information lorsque de tels contrats font l’objet d’offres. Compte tenu de son statut indépendant, l’utilisation de la bourse améliore égale- ment la gouvernance dans le processus d’attribution des contrats de contenu local. Un dispositif similaire pourrait être mis en place à Nzérékoré pour soutenir les entre- prises locales afin qu’elles puissent soumissionner et assurer le service des contrats miniers, alors que l’industrie minière commence à s’implanter dans la région de la Guinée Forestière. Le champ d’application de la bourse pourrait également être élargi au-delà de l’industrie minière pour servir d’autres secteurs où des investisse- ments à plus grande échelle sont en cours, et/ou fournir aux entreprises internatio- nales des partenaires locaux de haute qualité dans plusieurs industries différentes. Accroître le soutien disponible aux petites et moyennes entreprises (PME) dans les villes guinéennes contribuerait également à améliorer les capacités locales ; cela sera particulièrement important dans les villes où les investissements sont impor- tants, comme le secteur minier bien développé à Boké ou celui qui commence à se développer à Nzérékoré.58 L’accès au financement pour les PME qui ont des options limitées pour accéder aux capitaux nécessaires à la création et/ou à la croissance est une contrainte contraignante. Apporter un soutien dans ce domaine est un pari stra- tégique pour soutenir les PME prioritaires qui peuvent fournir des biens et services aux secteurs miniers de Boké et Nzérékoré. La bourse, décrite ci-dessus, fournit des financements aux entreprises avec lesquelles elle travaille, et une disposition similaire pourrait être étendue pour inclure un guichet spécifiquement destiné aux PME. Le développement d’accélérateurs à petite échelle pourrait également servir à répondre à ce besoin, de même que les exigences en matière de gestion et de formation de base et/ou de soutien technique pour les PME au sein des chaînes de valeur locales. Des programmes de soutien à plus petite échelle pourraient également être utilisés pour fournir un soutien technique et financier aux micro-entreprises, en particulier pour mieux impliquer les jeunes et les femmes locales. La région de Boké a été particulièrement vulnérable aux troubles civils en raison des niveaux de chômage des jeunes ; cibler les jeunes avec des programmes visant à développer les micro-entreprises locales pourrait aider à atténuer ce problème. Des programmes visant spécifiquement à répondre aux besoins des femmes en matière de capacités pourraient également combler les lacunes en matière de genre, largement pré- sentes en Guinée. Par exemple, la formation à l’initiative personnelle a été particu- lièrement efficace pour permettre la croissance des MPME dirigées par des femmes en Afrique du Sud59 et au Togo.60 58.  Ce point est également traité dans le Diagnostic Pays du Secteur Privé (CPSD) de la Guinée, qui développe davantage la manière dont le secteur minier pourrait fonctionner comme un catalyseur pour le contenu local des PME et les investissements dans d’autres secteurs, tels que l’énergie et le transport. 59.  Solomon, G., Frese, M., Friedrich, C., et Glaub, M. (2013). « La formation à l’initiative per- sonnelle peut-elle améliorer la réussite des petites entreprises ? A Longitudinal South African Evaluation Study ». International Journal of Entrepreneurship and Innovation, 14(4):255-268. 60.  Campos, F., Frese, M., Goldstein, M., Iacovone, L., et Johnson, H. (2017). « L’enseignement de l’initiative personnelle bat la formation traditionnelle pour stimuler les petites entreprises en Afrique de l’Ouest ». Science, 22 sept 2017. 74 Que faire? TABLEAU 3 Résumé des recommandations Institutions Enterprise Support & Regulations Infrastructure & Land Skills & Innovation & Finance Mise en œuvre Réglementation de Programmes de Promotion des inves- complète d’un l’utilisation des sols : développement des tissements : environnement plus compétences : favorable aux PPP : • Rationalisation de • Incitations et mise en œuvre de la la réglementation • Formation pro- concessions pour loi ; création d’une des terrains publics fessionnelle pour les investisseurs nouvelle unité PPP et privés la main-d’œuvre • Garanties de • Cohérence dans la locale afin de paiement et de Normes et certifi- dualité de la tenure répondre aux propriété pour cations nationales : besoins des chaînes atténuer les risques • Mettre à jour les Bureau national de de valeur minières codes d’utilisation normalisation, faci- • Soutien aux centres Accès au financement des sols litant les processus d’entrepreneuriat et programmes de locaux locaux développement des Planification du déve- loppement spatial : PME : Réforme de l’en- Soutien ciblé sur Meilleur inventaire vironnement des l’industrie : • Formation tech- des biens publics et entreprises : Mise en nique utilisation coordon- œuvre complète du • Services de vulga- née des sols • Gestion / formation guichet unique pour risation pour les de base le commerce agriculteurs Amélioration des • Financement des Gouvernement infrastructures de • Soutien aux PME Réformes de la poli- central services publics : secteurs : Élevage, tique commerciale : • Structures de pêche, transport/ soutien au contenu • Investissements logistique • Concurrence accrue local (par exemple, préparatoires • Formalisation du dans les secteurs expansion de (c’est-à-dire études commerce à petite du transport/de la la Bourse de de faisabilité) échelle logistique et des sous-traitance à services • Une meilleure Boké) coordination avec • Intégration plus • Soutien aux MPME, les gouvernements étroite des agences avec des pro- locaux frontalières de grammes pour chaque côté de la • Réforme du secteur les femmes / les frontière, procé- (par exemple, loi jeunes dures frontalières sur l’énergie pour simplifiées les IPP) • Sensibilisation proactive des four- nisseurs indépen- dants • Investissements routiers, y compris les routes d’accès 75 De la connectivité à l’opportunité Renforcement des Amélioration des Programmes de Accès au financement capacités des GL : services publics développement des et programmes de locaux : compétences : développement des • Réformes et assis- PME : tance technique • Soutien aux four- • Formation pro- visant à accroître nisseurs privés fessionnelle pour • Formation tech- les recettes fiscales d’énergie et d’eau la main-d’œuvre nique et autres recettes • Paiements commu- locale afin de • Gestion / formation autonomes nautaires répondre aux de base • Gestion des besoins des chaînes • Des contrats basés • Financement des revenus de valeur minières sur la performance PME • Numérisation pour une meilleure • Soutien aux centres • Structures de maintenance d’entrepreneuriat • Administration / soutien au contenu locaux Gouvernement exploitation des • Investissements local (par exemple, local actifs locaux dans l’entretien des expansion de Soutien ciblé sur • Meilleure planifi- routes, y compris la Bourse de l’industrie : cation / applica- les voies d’accès sous-traitance à tion des contrats Boké) • Services de vulga- miniers risation pour les • Soutien aux MPME, • Amélioration de la agriculteurs avec des pro- communication sur grammes pour • Soutien aux le contenu local les femmes / les secteurs : Élevage, jeunes pêche, transport/ logistique • Formalisation du commerce à petite échelle 76 Annexes 79 De la connectivité à l’opportunité Annexe 1 Corridors sélectionnés. La route côtière transafricaine, également connue sous le nom de route transafri- caine 7 (TAH 7), qui passe par Boké et Conakry, est l’une des neuf grandes routes qui constituent le réseau de la route transafricaine - développé par la Commission des Nations unies pour l’Afrique, l’Union africaine et la BAD. Le corridor longe la côte de l’océan Atlantique de Dakar à Lagos. Pour la Guinée, il relie la Guinée à la Guinée Bissau et au Sénégal au nord et à la Sierra Leone et au Liberia au sud. En Guinée, il relie Boké (500 000 habitants) et Boffa (un nouveau site minier) à Conakry. Le corridor pourrait soutenir les exportations de café, de fruits et de fonio vers le Sénégal et d’arachides, de pommes de terre et de fruits vers la Sierra Leone (Figures A1 et A2). Le corridor Conakry - Dakar, qui passe par Kindia, Mamou et Labé en Guinée et Tambacounda au Sénégal. Il a été (i) désigné comme un corridor prioritaire par le programme d’action pour les infrastructures et les transports de l’UEOMA, (ii) cité par la BAD comme un corridor crucial pour l’intégration régionale de la Guinée, et (iii) partiellement mis en évidence dans la décision 8/12/88 de la CEDEAO concer- nant la deuxième phase du programme de la CEDEAO visant à fournir un accès portuaire aux territoires intérieurs de la CEDEAO. En tant que tel, il peut aider à relier les villes et les villages de l’intérieur de la Guinée aux marchés des autres régions de la Guinée et du Sénégal, ainsi qu’aux ports de Conakry et de Dakar. En Guinée, le corridor relie les villes de Kindia (environ 500 000 habitants), Mamou (environ 250 000 habitants) et Labé (environ 250 000 habitants) à Conakry et Dakar. Le corridor traverse également la région du Fouta Djallon, une importante zone de production agricole en Guinée. Il pourrait soutenir les exportations de café, de fruits et de fonio vers le Sénégal. Le corridor Conakry - Bamako, passant par Kindia, Mamou et Kankan. Il a été mis en évidence par la décision du 8/12/88 de la CEDEAO et de la BAD comme un corridor essentiel pour l’intégration régionale. Ce corridor relie le port de Conakry à Bamako. En tant que tel, il pourrait servir d’alternative viable au corridor Dakar - Bamako, car la distance entre le port de Conakry et Bamako est nettement plus courte que la distance entre Dakar et Bamako. Cependant, le corridor Dakar - Bamako (qui fait partie de la route transafricaine 5) est actuellement beaucoup plus développé. En Guinée, en plus de Kindia et Mamou (cités ci-dessus avec le corridor Conakry - Dakar), il relie également Kankan (environ 500 000 habitants) à Conakry et Bamako. Elle pourrait servir d’intermédiaire pour les exportations guinéennes de fonio et de fruits vers le Mali. Le corridor Bamako - Monrovia, passant par Kankan et Nzérékoré en Guinée. Il est mis en évidence dans la décision 8/12/88 de la CEDEAO et composé de segments des corridors mis en évidence par la BAD. Ce corridor offre à Bamako une voie d’accès supplémentaire à l’océan Atlantique via la Guinée et le Liberia. Depuis Kankan, il traverse l’intérieur de la Guinée du nord au sud, puis le Liberia d’est en ouest jusqu’à la côte. À l’intérieur de la Guinée, elle relie Nzérékoré (environ 400 000 habitants), dans la région isolée de la Guinée forestière, à Kankan et au Mali au nord et au Liberia au sud. Elle pourrait servir d’intermédiaire pour les exportations de fonio et de fruits vers le Mali et pour les exportations de caoutchouc, d’arachides, de pommes de terre et de fruits vers le Liberia. 80 Annexes Le corridor Conakry - Abidjan 1, passant par Kindia, Mamou, Faranah, Kissidou- gou, Guéckédou, et Nzérékoré en Guinée et Man, Dékoué et Yamssoukro en Côte d’Ivoire. Il est défini comme un corridor essentiel par la BAD et composé de plu- sieurs segments de la route transafricaine et du réseau de l’UEMOA. Il dessert plu- sieurs villes de la région de la Guinée forestière. En Guinée, outre Kindia et Mamou (citées plus haut), elle relie Faranah (300 000 habitants), Kissidougou (300 000 habi- tants) et Guéckédou (250 000 habitants) à Nzérékoré et à la Côte d’Ivoire à l’est et à Conakry au sud-ouest. Sur la base de la Il pourrait servir d’intermédiaire pour les exportations guinéennes de noix de cajou et de cacao vers la Côte d’Ivoire. De plus, à partir de Mamou, le corridor Conakry - Abidjan passe du nord au sud à l’intérieur de la Guinée, à peu près à la même distance de la côte (250 kilomètres) que le corridor Conakry - Dakar, corridor 2 ci-dessus. On peut donc également envisager un corridor Dakar - Abidjan qui passe par l’intérieur de la Guinée (une combinaison des corridors 2 et 5). Cet itinéraire intérieur est plus court que la Route Côtière Trans-Occidentale (TCA7, corridor 1 ci-dessous qui traverse la Sierra Leone et passe à proximité de Freetown). Il est également moins lourd sur le plan adminis- tratif, puisqu’il ne nécessite que deux passages aux frontières internationales pour un voyage de Dakar à Abidjan, au lieu des sept passages aux frontières nécessaires pour le même voyage via la route côtière transafricaine. Ensemble, les corridors 2 et 5 relient les régions de la Guinée centrale et de la Guinée forestière à la Côte d’Ivoire à l’est, au Sénégal au nord et à Conakry au sud-ouest. Le corridor Conakry - Abidjan 2, qui passe par Kindia, Mamou et Kankan en Guinée et Odienne, Man et Yamssoukro en Côte d’Ivoire. Il est considéré comme un corridor essentiel pour l’intégration régionale de la Guinée par la BAD et est composé de plusieurs segments du réseau de l’UEMOA. Il pourrait soutenir les exportations de noix de cajou et de cacao vers la Côte d’Ivoire. Le corridor Conakry - Bissau, passant par Kindia, Mamou, Labé, et Koundara. Il a été mis en évidence comme un corridor essentiel pour l’intégration régionale par la BAD et se compose de plusieurs segments du réseau de l’UEMOA. En Guinée, il relie Kindia et les villes de la région du Fouta Djallon aux ports de Bissau et de Conakry. Bien que l’itinéraire le plus court en kilomètres entre Conakry et Bissau reste le TAT7 (qui longe la côte), les retards fréquents dans la traversée de certaines rivières le long du TAT7 rendent cet itinéraire alternatif très populaire. Le corridor Conakry - Monrovia qui passe par Kindia, Mamou, Faranah, Kissidou- gou, Guéckédou, et Nzérékoré. Il est considéré comme un corridor essentiel pour l’intégration régionale de la Guinée par la BAD. Il pourrait servir de conduit pour les exportations de caoutchouc, d’arachides, de pommes de terre et de fruits vers le Liberia. 81 De la connectivité à l’opportunité FIGURE A1 Corridors sélectionnés Dakar Senegal Mbour Tambacounda Mali Gambia Bamako Banjul Guinea-Bissau Bissau Labé Boké Kindia Kankan Conakry Faranah Mamou Sierra Leone Kissidougou Guéckédougou Nzérékoré Côte d’Ivoire Abidjan Monrovia Liberia 82 Annexes Annexe 2 Méthodologie d’analyse de l’accès aux marchés. FIGURE A2 Entrées du modèle (données OSM, données CIESIN et calculs des auteurs) Villes (noeuds) Cities (nodes) Réseau routier Road network Primary roads Secondary roads Coastal Liens links de la côte Dakar Banjul Conakry go u La ono s Co é Freetown Ac di Ta jan m cra t ra Lo id Monrovia ko Ab Douala 83 De la connectivité à l’opportunité L’accès au marché est une mesure de la capacité d’une ville à commercer avec le reste de l’économie. L’accès total au marché est une combinaison de l’accès au marché des entreprises (capacité d’exporter) et de l’accès au marché des consom- mateurs (capacité d’importer). Les villes ont un niveau d’accès au marché plus élevé si elles sont mieux reliées aux autres villes par des routes, des chemins de fer et des ports maritimes. Suivant le modèle de coût de transport de l’iceberg (Samuelson 1954), laissons : τij ≡ 1 + ( Shipping cost from i to j ⁄ 50,000 ) où τij est une mesure des coûts d’exportation de la ville i vers la ville j. Il est défini comme la valeur des marchandises qui doivent être expédiées de la ville d’origine i à la ville de destination j pour qu’une unité de valeur (ou 50 000 USD, valeur par défaut d’un conteneur équivalent vingt pieds (EVP)) arrive à la ville j. Si les coûts d’ex- pédition étaient de 0, τij serait égal à 1. Toute valeur de τij supérieure à 1 représente les frais d’expédition, qui « fondent » dans le modèle de l’iceberg avant qu’une unité de la marchandise n’arrive dans la ville de destination j. L’accès au marché que les entreprises de la ville i ont aux consommateurs de la ville j est estimé en prenant la « taille du marché » (mesurée par le PIB) de la ville j et en la divisant par le coût de l’exportation de la ville i vers la ville j, τij. En additionnant cette mesure sur toutes les villes autres que la ville i nous obtenons l’accès au marché des entreprises (FMA) de la ville i. L’accès au marché des consommateurs (CMA) est calculé de manière similaire, sauf que les coûts d’importation sont utilisés au lieu des coûts d’exportation. Pour une ville i on définit l’accès au marché des entreprises, FMAi et l’accès au marché des consommateurs CMAi comme suit : FMAi ≡ CMAi ≡ où j est la ville avec laquelle on échange, Yj est la taille du marché de cette ville, et θ est un paramètre représentant la sensibilité aux coûts de transport. Comme estima- tion de θ, nous suivons Head et Mayer (2014), qui étudient la littérature et trouvent que les estimations varient largement entre 3 et 13, selon la méthode d’estimation utilisée, avec une valeur moyenne de θ = 6,74. Maintenant, l’accès au marché, d’une ville est défini comme suit MAi ≡ FMAi + eβ x CMAi ou, alternativement, lnMAi ≡ lnFMAi + β x lnCMAi où β est la part du travail dans le revenu. Une valeur standard pour la part du travail dans les pays en développement est l’estimation de la borne inférieure de Gollin (2002) de β=0,65. 84 Chapter name Pour analyser les changements dans l’accès au marché dus à l’amélioration des infrastructures et aux mesures de facilitation du commerce, deux versions diffé- rentes du modèle ont été mises en œuvre, chacune basée sur des paramètres et des composants différents pour les coûts de transport. Premièrement, pour l’analyse de l’impact des améliorations de l’infrastructure, les coûts commerciaux ont été évalués en dollars pour expédier une unité équivalente à vingt pieds (TEU) sur un kilomètre (USD/TEU/km) et calculés comme la somme des coûts de transport bruts, des tarifs et des frais de traitement douanier. Deuxièmement, pour l’analyse de l’impact des mesures de facilitation du commerce, les coûts commerciaux ont été définis en heures et calculés comme la somme du temps de transport et des délais de passage des frontières. Pour une comparaison des deux versions du modèle, voir le tableau A1 ci-dessous. La mise en œuvre de deux modèles distincts permet de quantifier séparément les changements dans l’accès au marché dus aux réduc- tions des coûts monétaires (c’est-à-dire les coûts de fret) et aux réductions du temps de transport (c’est-à-dire les retards au passage des frontières) sans avoir à faire des hypothèses très fortes sur la valeur monétaire des retards aux frontières. Il est impor- tant de souligner que, étant donné que chaque application du modèle utilise des composantes et des paramètres différents pour les coûts de transport, l’ampleur des effets n’est pas comparable et qu’il n’est donc pas possible de comparer les efficaci- tés relatives des mesures de facilitation des échanges par rapport aux améliorations des infrastructures. Cependant, cette méthode permet de comparer la distribution des effets de ces mesures et investissements. 85 De la connectivité à l’opportunité TABLEAU A1 Paramètres de chaque version du modèle d’accès aux marchés et sources Analyse de l’amélioration Analyse de la facilitation des échanges des infrastructures • Coûts du fret (allant de 0,5 à 3,0 USD/ • Temps de parcours (de 25 à 100 km/h selon la TEU/km) qualité de la route) Composantes des • Tarifs douaniers (Doing Business 2015) • Retards aux passages frontaliers (Doing coûts de transport • Frais de traitement douanier (Doing Business 2015) Business 2015) 50 000 USD est la valeur théorique de La valeur temporelle de 800 heures est obtenue l’envoi fournie aux répondants à l’enquête en divisant la valeur de l’envoi en USD par une lorsqu’il leur est demandé d’estimer les gamme d’estimations de la valeur temporelle Valeur du coûts du commerce transfrontalier dans les présentées par les études examinées dans Shams conteneur indicateurs Doing Business (DBI). (2017). Un chiffre prudent est pris pour tenir compte des différences entre les pays dévelop- pés et les pays en développement. Unité d’estimation Coût du fret (USD/TEU/km) Temps (heures) 86 Annexes Annexe 3 Modèle MA : Gains en termes d’accès au marché uniquement grâce à l’amélioration des infrastructures, par ville et par corridor. Bamako - Bamako - Conakry Conakry - Conakry - Conakry - Dakar - Conakry Monrovia - Bissau Abidjan 2 Monrovia Abidjan 1 Conakry HAT7 Labé 1,8% 0,4% 1,5% 2,0% 1,1% 1,4% 1,7% 0,9% Sangarédi 0,6% 0,2% 0,2% 0,7% 0,2% 0,5% 0,4% 2,0% Pita 1,7% 0,3% 1,6% 1,9% 1,3% 1,6% 1,8% 0,8% Kamsar 0,6% 0,2% 0,2% 0,7% 0,2% 0,5% 0,4% 1,8% Fria 0,6% 0,2% 0,2% 0,7% 0,2% 0,5% 0,4% 1,1% Kindia 1,2% 0,2% 0,8% 1,3% 0,8% 1,0% 0,9% 0,8% Nzérékoré 1,3% 0,9% 0,8% 1,4% 3,4% 4,1% 0,9% 2,4% Siguiri 3,8% 1,2% 1,1% 3,2% 1,1% 1,4% 1,3% 1,0% Dinguiraye 2,4% 0,4% 1,2% 2,6% 1,2% 1,6% 1,4% 0,9% Boké 0,6% 0,2% 0,2% 0,7% 0,2% 0,5% 0,4% 2,0% Kankan 3,3% 0,6% 1,2% 3,8% 1,5% 1,7% 1,4% 1,0% Mamou 1,7% 0,3% 1,2% 1,9% 1,3% 1,6% 1,4% 0,8% Faranah 1,5% 0,3% 1,2% 1,7% 2,3% 2,4% 1,3% 0,9% Kissidougou 1,5% 0,4% 1,1% 1,6% 2,8% 2,9% 1,3% 1,1% Guéckédougou 1,4% 0,4% 1,1% 1,5% 3,2% 3,4% 1,3% 1,2% Macenta 1,4% 0,5% 1,1% 1,3% 3,4% 3,7% 1,3% 1,7% Conakry 0,6% 0,2% 0,2% 0,7% 0,2% 0,4% 0,3% 0,7% 87 De la connectivité à l’opportunité Annexe 4 Méthodologie du modèle d’équilibre général computationnel spatial (Lebrand, 2021). Nous utilisons le cadre théorique de Redding (2016) que nous appliquons à 662 localités de 16 pays d’Afrique de l’Ouest : Bénin (76 districts), Nigeria (37 pro- vinces), Gambie (6 districts), Sénégal (46 districts), Mauritanie (44 districts), Gui- née-Bissau (9 districts), Mali (50 districts), Togo (21 districts), Ghana (137 districts), Cameroun (58 districts), Niger (36 districts), Burkina Faso (45 districts), Côte d’Ivoire (34 districts), Liberia (15 districts), Sierra Leone (14 districts) et Guinée (34 districts61). Chaque emplacement est indexé par i. Les emplacements diffèrent les uns des autres en termes d’offre de terres, de productivité, d’équipements et de leur situa- tion géographique les uns par rapport aux autres. Les coûts du commerce bilatéral des biens sont supposés prendre la forme d’un iceberg, de sorte que dni unités d’un bien doivent être expédiées depuis le lieu i pour qu’une unité arrive dans le lieu n, où dni > 1 pour n ≠ i et dnn = 1. La terre et le travail sont les deux facteurs de production. Les travailleurs sont mobiles entre les localisations à l’intérieur du pays mais pas entre les pays. Ils ont des tirages idiosyncrasiques pour les préférences pour chaque emplacement dans leur propre pays. Le détail des équations des préférences des consommateurs, des parts de dépenses et des indices de prix, des choix résidentiels et des revenus peut être trouvé dans l’article (Lebrand, 2021). L’équilibre général du modèle peut être repré- senté par la mesure des travailleurs (Ln) dans chaque localisation n є N, la part des dépenses de chaque localisation en biens produits dans d’autres localisations (pni) et le salaire dans chaque localisation (ωn). Les informations nécessaires à la calibration du modèle proviennent de sources de données traditionnelles et d’images satellites. Quatre types de données au niveau de l’État et du district sont utilisés : la taille des terrains résidentiels, la population active, les salaires et les coûts de transport. La main-d’œuvre comprend la popula- tion active telle que calculée par la couche mondiale des établissements humains (GHSL) pour 2015. Tous les salaires sont mensuels et exprimés en dollars sur la base des estimations de Tilottama et al. (2010). Les terres couvrent les zones urbaines en utilisant les données du CIESIN. 61.  Pour assurer l’homogénéité de la taille des unités administratives d’un pays à l’autre, le niveau d’analyse retenu pour la Guinée est le niveau préfectoral. 88 Annexes Nous supposons la mobilité de la main-d’œuvre au sein du pays mais pas entre les pays pour des raisons de simplicité. Suivant Redding (2016) et une équation de choix résidentiel spécifiée, les travailleurs peuvent se déplacer vers un lieu où les salaires sont plus élevés et où les prix de la consommation et du logement sont plus bas, en fonction de leurs préférences initiales parmi les commodités offertes dans les différents lieux. De telles hypothèses permettent de lisser le mouvement des travailleurs entre les lieux, sinon tous les travailleurs se dirigeront vers les lieux où le pouvoir d’achat est le plus élevé. Les coûts de transport sont mesurés en fonction du temps de déplacement pour atteindre d’autres lieux à partir du centre de chaque lieu. Le temps de déplace- ment, qui est calculé à l’aide des techniques de réseau des systèmes d’information géographique (SIG), est le temps le plus court compte tenu de tous les itinéraires possibles dans le réseau routier. Les temps de parcours sont basés sur les catégories de routes d’Open Street Map (primaire, secondaire, tertiaire et le reste) avec des hypothèses assignées pour chaque catégorie. Pour les routes principales de la ligne de base, on suppose 35 km par heure sur le réseau primaire et 20 km par heure pour le reste du réseau principal (routes secondaires et tertiaires). Si les camions peuvent se déplacer plus rapidement sur certains segments que sur d’autres, la qualité globalement limitée des routes ainsi que les activités le long des routes ralentissent le transport terrestre de marchandises. En outre, les frictions à la frontière augmentent le temps de déplacement entre les paires de lieux. Les retards sont ajoutés à la frontière de deux manières : un temps de transit pour traverser les pays qui ne sont ni l’origine ni la destination, et un retard final lorsqu’on atteint le pays de destination. Les délais de transit dans un pays sont supposés être de 20 heures pour chaque passage de frontière. Le même temps est supposé pour toutes les frontières, étant donné le manque de données cohérentes sur les délais aux frontières en Afrique de l’Ouest. Les retards lors de l’arrivée dans le pays de destination sont supposés être de 50 heures, ce qui représente le temps nécessaire pour passer par les processus commerciaux administratifs non inclus dans le temps de transit. Cependant, étant donné le manque de fiabilité de certaines données provenant de différentes sources, nous supposons que la même quantité de retards est appliquée à tous les pays et paires de pays. Aucun délai supplémen- taire n’est supposé pour le commerce à l’intérieur des pays. Dans les contrefactuels, nous augmentons la vitesse de conduite à 80 km par heure sur les segments de routes en cours de rénovation. Bien que cette vitesse soit rela- tivement élevée, il s’agit de la vitesse de conduite des camions observée dans les économies plus riches et attendue sur les segments nouvellement rénovés. Dans les scénarios complémentaires, les délais de transit sont réduits à zéro et les délais aux frontières finales sont réduits de moitié. 89 Les objectifs de cette étude sont (1) d’évaluer l’impact de la connectivité régionale et interne sur les emplois et l’accès aux services et (2) de fournir des recommandations pour les réformes politiques et les investissements. Cette analyse utilise des approches quantitatives et qualitatives pour comprendre les opportunités qu’une meilleure connectivité offre aux villes secondaires en Guinée, les facteurs qui pourraient limiter le potentiel de croissance et, comment les décideurs politiques à différents niveaux de gouvernement devraient réagir pour maximiser les avantages des corridors économiques. Cette analyse vise également à fournir une meilleure compréhen- sion de l’impact relatif des améliorations du transport et des réformes directes de facilitation du commerce. Enfin, l’étude évalue les réformes complémentaires, les investissements et les politiques globales afin d’élaborer des recommandations pratiques et applicables qui pourraient être déployées pour accroître les bénéfices d’un meilleur commerce et d’une meilleure connectivité des zones urbaines en Guinée. CIIP Competitive Industries and Innovation Program