83278 Gestion du respect de la loi basée sur les risques Guide des administrations douanières Avril 2012 Modernisation de la gestion des frontières Guide de référence et de mise en œuvre Gestion du respect de la loi basée sur les risques Guide des administrations douanières Le présent guide a été élaboré par le professeur David Widdowson, de l’Université de Canberra, pour le compte du Département du commerce international de la Banque mondiale, grâce à un don du Gouvernement néerlandais accordé dans le cadre du Programme de partenariat Banque/Pays-Bas (BNPP). Table des matières 1. À propos du présent guide. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1 2. Rôles et responsabilités des administrations douanières. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 3 3. Qu’est-ce que la gestion du respect de la loi basée sur les risques ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 7 4. Comment gérer les risques transfrontaliers ?. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Définition du contexte. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 9 Recensement des risques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 11 Analyse des risques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 13 Évaluation et détermination de la priorité des risques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 14 5. Atténuation des risques recensés. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 Base législative . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17 Service à la clientèle. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 19 Évaluation de la conformité . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 20 Reconnaissance de la conformité. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 23 Application de la réglementation. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 24 Suivi et examen des risques. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 25 6. Facilitateurs et entraves . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Communication . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Enjeux organisationnels. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27 Instruments internationaux . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 Collaboration. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 28 7. Guide de démarrage . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31 8. Références. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33 1 À propos du présent guide L’ouvrage de la Banque mondiale intitulé Border chapitre 6 (Principales disciplines de la gestion des Management Modernization (2011)1 offre aux frontières : gestion du respect de la loi basée sur les décideurs et aux réformateurs une vision « pangou- risques) et au chapitre 11 (Outils et instruments de vernementale » globale des moyens de faciliter réforme, et pratiques optimales dans ce domaine) le commerce grâce à une meilleure gestion des pour présenter : frontières. Il insiste en guise d’introduction sur le fait que les procédures de dédouanement bureaucra- • une introduction aux enjeux principaux liés à la tiques à l’excès imposées par les douanes et autres mise en œuvre pratique, par les administrations services frontaliers sont plus nuisibles au commerce douanières, d’un système moderne de gestion du que l’imposition de droits de douane. respect de la loi basée sur les risques ; • les diverses étapes de la mise en œuvre, par Rappelant que la douane n’est qu’une des nombreuses l’administration douanière, d’une méthode organisations chargées de veiller aux contrôles de gestion de la conformité aux prescriptions transfrontaliers, Border Management Modernization douanières ; présente un vaste tour d’horizon de l’évolution de la • des exemples pratiques portant sur un éventail situation internationale en cette matière ainsi que des d’activités de gestion des frontières et servant à principes qui régissent actuellement l’ensemble des illustrer la méthodologie préconisée ; aspects de la gestion des frontières, quelle que soit • des conseils pratiques pour reconnaître et l’entité responsable au final de cette gestion ou de simplifier ou supprimer les processus réglemen- l’application des politiques frontalières. taires inefficaces qui demandent beaucoup de ressources et prennent beaucoup de temps. Le présent guide de référence et de mise en œuvre a été élaboré pour compléter les informations fournies dans l’ouvrage de la Banque mondiale. Il s’appuie Voir 1 http://issuu.com/world.bank.publications/docs/ tout spécialement sur les informations présentées au 9780821385968 2 Rôles et responsabilités des administrations douanières On a tendance dans la plupart des pays à confier les des procédures mises en place par l’une ou diverses responsabilités de réglementation des opéra- l’autre agence, la gestion efficace des frontières tions transfrontalières à un certain nombre d’orga- est une responsabilité pangouvernementale qui nisations différentes. Chacune de ces organisations intéresse ultimement l’ensemble des organisations a un mandat qui lui est propre — santé, innocuité publiques appelées à intervenir à la frontière. des produits, biosécurité, contrôles à l’immigration, recouvrement des recettes ou sécurité des trans- Les exemples proposés ci-après sont loin d’être ports. Cependant, leur mission fondamentale est la exhaustifs, mais ils mettent en lumière l’ampleur même : faciliter la circulation légitime des personnes des rôles et responsabilités des administrations et des biens d’un côté à l’autre de la frontière tout douanières. Ces divers aspects de la gestion des en maintenant l’intégrité des contrôles douaniers frontières serviront d’exemples et d’études de cas en assurant le respect des dispositions juridiques tout au long du présent guide. applicables. Comme nous pourrons le constater, la notion de La gestion appropriée des frontières est une risque est omniprésente dans tous les aspects condition indispensable à la rentabilité des de la gestion des frontières, et les pays mettent transactions commerciales internationales et à donc en œuvre diverses politiques conçues pour la circulation sans entrave des personnes et des atténuer l’éventail des risques qui peuvent faire biens, dans le contexte des activités légitimes des obstacle à la réalisation de leurs objectifs straté- secteurs public et privé. Peu importe la qualité giques ; par exemple : Tableau 1.  Rôles et responsabilités des administrations douanières Sécurité alimentaire Les aliments importés dans un pays donné doivent respecter les normes alimentaires pertinentes prescrites par ce pays. Les lois relatives aux produits alimentaires importés sont conçues pour assurer la sécurité et la santé publiques en limitant les risques d’introduction de maladies transmises par les aliments. Par ailleurs, les contrôles des exportations veillent à faire en sorte que les produits alimentaires exportés répondent aux normes de qualité pertinentes afin de satisfaire aux obligations internationales du pays exportateur et de protéger la réputation de son industrie alimentaire. Les lois sur la sécurité alimentaire comportent généralement des dispositions qui autorisent une organisation à inspecter et à analyser les aliments importés ou exportés pour veiller au respect des normes en vigueur. En règle générale, ces lois exigent également que les opérateurs commerciaux qui importent ou exportent certains produits alimentaires obtiennent un permis ou un certificat à cette fin. Biosécurité — quarantaine végétale Les contrôles phytosanitaires sont conçus pour veiller à l’application des normes nationales et internationales concernant la santé des végétaux importés ou exportés. Le contrôle des importations vise à réduire les risques d’introduction de ravageurs ou de maladies, tandis que le contrôle des exportations vise à protéger la réputation du pays exportateur sur les marchés étrangers et à lui garantir ainsi l’accès à ces marchés. Les lois sur la quarantaine végétale autorisent les organisations pertinentes à inspecter, tester et, le cas échéant, traiter les végétaux et les produits végétaux pour veiller à ce qu’ils répondent aux normes pertinentes et ne risquent pas d’introduire des ravageurs ou des maladies. Certains pays mettent les plantes vivantes importées en quarantaine dans des stations spéciales, le temps de vérifier qu’elles ne présentent aucun risque phytosanitaire. Il est aussi d’usage courant d’exiger que les opérateurs commerciaux qui importent ou exportent certains végétaux ou produits végétaux obtiennent un permis ou un certificat à cette fin. 4 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières Tableau 1.  Rôles et responsabilités des administrations douanières (Suite) Biosécurité — quarantaine animale Les animaux importés ou exportés font l’objet de contrôles zoosanitaires. Le contrôle des importations vise essentiellement à réduire les risques d’introduction de ravageurs ou de maladies, tandis que le contrôle des exportations veille à assurer le respect des exigences réglementaires du pays importateur et, dans le cas des transactions commerciales, à protéger la réputation du pays exportateur sur les marchés étrangers. Les lois sur la quarantaine animale autorisent les organisations pertinentes à inspecter, tester et traiter les animaux pour veiller à ce qu’ils répondent aux normes et exigences pertinentes et pour assurer leur santé et leur bien-être. Beaucoup de pays mettent les animaux importés ou exportés en quaran- taine, et ne lèvent cette quarantaine que lorsque l’organisation responsable a obtenu l’assurance qu’ils sont exempts de maladies. Il est aussi d’usage courant d’exiger que les opérateurs commerciaux qui importent ou exportent des animaux obtiennent un permis ou un certificat à cette fin. Immigration Les contrôles à l’immigration s’appliquent aux personnes qui arrivent dans un pays ou qui quittent un pays, sauf dans certains cas où des dispositions spéciales s’appliquent — par exemple aux frontières des pays de l’Union européenne. Ces contrôles sont conçus pour veiller à ce que les personnes qui passent la frontière d’un pays soient autorisées à le faire, et pour réduire les risques d’entrées ou de sorties illégales. Ils servent également à faire en sorte que les personnes autorisées à entrer dans un pays moyennant certaines conditions respectent effectivement ces conditions. Les lois sur l’immigration autorisent les organisations pertinentes à interroger, fouiller et détenir les personnes qui souhaitent passer la frontière du pays et à contrôler leur identité. Dans beaucoup de cas, les voyageurs qui ne sont pas ressortissants du pays où ils souhaitent se rendre sont tenus d’obtenir un visa d’entrée avant ou au moment d’arriver au poste frontière. Propriété intellectuelle Le commerce international des biens fait l’objet d’un large éventail de contrôles, dont certains ont notamment pour objet de protéger la propriété intellectuelle. Ces contrôles visent à prévenir le commerce international de produits contrefaits ou piratés afin de protéger les droits des propriétaires de marques de commerce et des titulaires de droits d’auteur, et de protéger les collectivités contre les risques que peuvent présenter ces produits (par exemple, médicaments contrefaits). Les lois sur la protection de la propriété intellectuelle autorisent généralement les organisations pertinentes à examiner et à saisir les biens importés qu’elles soupçonnent de violer la propriété intellectuelle. De tels contrôles ne sont d’ordinaire effectués que si le titulaire des droits de propriété intellec- tuelle demande officiellement à l’organisation d’intervenir pour le protéger contre l’importation de matériel contrefait, piraté ou interdit. Recouvrement de recettes La plupart des pays imposent des droits d’importation ou d’autres impôts et tarifs sur les marchandises importées. Dans certains cas, de tels droits sont aussi imposés sur certaines marchandises exportées. Les lois sur le recouvrement des recettes sont conçues pour assurer le recouvrement des droits appropriés sur les marchandises importées (ou exportées) et pour réduire les risques de pertes de recettes publiques. Les organisations chargées de l’application des lois fiscales jouissent de pouvoir étendus qui vont de l’examen des documents et de la fouille à la détention, en passant par la saisie, l’audit et l’ouverture d’une enquête. Les opérateurs commerciaux internationaux sont tenus de fournir les pièces justificatives qui permettront aux autorités de prendre des décisions éclairées sur le montant des droits, impôts et autres tarifs exigibles. Sécurité des transports Le transport international est strictement réglementé et les mesures en vigueur ont été élargies pour protéger la chaîne logistique contre les actes de terrorisme. Les contrôles réglementaires pertinents sont généralement exercés à la frontière du pays ou à celle de ses partenaires commerciaux, notamment dans le cas du transport aérien ou maritime et du fret. Les lois en vigueur sont essentiellement conçues pour réduire les risques d’attentat terroriste. Les lois portant sur la sécurité des transports confèrent aux organisations pertinentes de larges pouvoirs qui leur permettent de surveiller la bonne application des normes de sécurité et de vérifier la validité et l’intégrité des expéditeurs et des autres membres de la communauté commerciale internationale. Normes de sécurité Les produits échangés à l’échelle internationale sont très nombreux à faire l’objet de normes de sécurité qui servent à protéger les consommateurs contre les risques de blessures, de maladies et de mort que peuvent entraîner les marchandises dangereuses. Le contrôle des exportations sert à faire respecter les exigences réglementaires du pays importateur, et à protéger la réputation des pays sur les marchés étrangers. Les lois pertinentes permettent aux agences de sécurité d’examiner et de tester les marchandises pour veiller à ce qu’elles respectent les normes de sécurité, et de vérifier que leur importation ou leur exportation n’est pas interdite. L’application des normes de sécurité ne se limite pas nécessairement aux caractéristiques physiques qui risquent de rendre un produit dangereux ; elle peut également s’étendre à des aspects immatériels tels que la production obligatoire d’avis, d’informations et d’instructions. Rôles et responsabilités des administrations douanières | 5 • maladies transmises par les aliments ; Figure 1.  Matrice « facilitation-contrôle » • ravageurs et maladies exotiques ; • personnes arrivant au pays ou quittant le pays Élevé illégalement ; • pertes de recettes publiques ; APPROCHE APPROCHE ÉQUILIBRÉE • attentats terroristes. BUREAUCRATIQUE CONTRÔLE Cependant, les administrations douanières ont également pour mandat d’offrir aux voyageurs et APPROCHE aux opérateurs commerciaux un niveau approprié de GESTION DE CRISE DU LAISSER-FAIRE services de facilitation, et il peut arriver qu’elles se trouvent incapables de s’acquitter de cette respon- sabilité à la satisfaction des autorités publiques. Ce Faible FACILITATION Élevée risque supplémentaire met en lumière la nécessité de réglementer les opérations frontalières de manière à Source : Widdowson (2003). limiter le plus possible les répercussions de stratégies interventionnistes. Autrement dit, si le maintien du contrôle transfrontalier est non négociable, les réglementation ; les deux contribuent également à la moyens utilisés pour y parvenir devraient en même réalisation des objectifs de l’État. temps permettre d’assurer des niveaux appropriés de facilitation. Nous définirons dans les sections qui suivent des stratégies conçues pour assurer des niveaux Malheureusement, les procédures et processus mis en appropriés de facilitation et de contrôle réglemen- œuvre à la frontière ne reflètent pas toujours le ou taire. Cette approche de la gestion du respect de la les risques que les administrations douanières sont loi est représentée par le quadrant supérieur droit censées atténuer, et c’est là le problème sous-jacent sur lequel se penche le présent guide. (contrôle élevé, facilitation élevée) de la matrice facilitation-contrôle décrite plus en détail dans La matrice « facilitation-contrôle » présentée à la l’ouvrage « Border Management Modernization ». figure 1 fournit un aperçu des divers moyens utilisés Cette « approche équilibrée » est celle que les par les administrations douanières pour remplir leur administrations douanières devraient préconiser rôle et s’acquitter de leurs responsabilités. La facili- puisqu’elle présente le plus d’avantages tant pour tation et le contrôle constituent ici les deux variables les administrations elles-mêmes que pour ceux et distinctes, mais compatibles, d’une matrice de celles qui sont censés obéir à leurs règles. 3 Qu’est-ce que la gestion du respect de la loi basée sur les risques ? Comme nous l’avons vu dans la section précédente, La présente section se penche en guise de démons- toutes les organisations chargées de la gestion des tration sur certaines des différences fondamentales frontières ont pour responsabilité fondamentale de qui existent entre les stratégies de gestion du respect veiller à l’application d’un ensemble particulier de de la loi basées ou non sur les risques. règles. Cependant, elles peuvent s’acquitter de leur mandat de diverses façons. C’est ici qu’entre en jeu la Bien que les exemples qui suivent aient trait à des notion de gestion des risques. aspects particuliers de la gestion des frontières, ils n’en sont pas moins génériques par nature, et sont La gestion des risques est garante de l’efficacité donc applicables à la plupart des facettes de l’activité de la gestion des frontières et constitue la clé de réglementaire, peu importe la politique appliquée ou l’« approche équilibrée » décrite à la figure 1. Les l’organisation chargée de son application. mesures non basées sur les risques peuvent réduire sensiblement l’efficacité des contrôles et limiter la Nous pouvons constater à l’examen des exemples facilitation en pénalisant les opérateurs commer- du tableau 2 que la gestion des risques n’est pas ciaux et les voyageurs respectueux des règles, qui se une notion nouvelle ; en fait, l’immense majorité consacrent à des activités transfrontières légitimes. des administrations douanières utilisent déjà, Tableau 2.  Exemples de gestion du respect de la loi — basée ou non sur les risques Gestion non basée sur les risques Gestion basée sur les risques Examen systématique des catégories de marchandises qui présentent Les organisations publiques collaborent avec la communauté commerciale au un risque de violation des droits d’auteur. dépistage de possibles atteintes aux droits de propriété intellectuelle (DPI). Les programmes de contrôle destinés à reconnaître les menaces Les programmes publics de contrôle comptent notamment sur la démons- terroristes se résument à l’examen régulier des opérations des tration volontaire, par les entreprises de transport, de leur conformité aux entreprises de transport par les fonctionnaires. normes de sécurité prescrites. Inspection et analyse systématiques des produits alimentaires Les importateurs de produits alimentaires qui justifient de bons antécédents importés pour le contrôle de la conformité douanière, peu importe de conformité à la réglementation sont soumis à un régime d’inspections et l’identité de l’importateur. d’analyses « allégé ». Contrôle systématique des étiquettes de mise en garde obligatoires Les importateurs réguliers sont autorisés à compléter l’étiquetage de certains produits importés avant de consentir la mainlevée. réglementaire des produits après leur importation et avant leur mise en vente sur le marché intérieur. Les importateurs de végétaux sont tenus d’obtenir un permis Les importateurs connus de végétaux et tous les importateurs de certaines d’importation pour chacune de leurs cargaisons de produits. espèces peuvent obtenir leurs permis d’importation sur une base périodique. La réglementation en matière d’immigration exige que tous les Les titulaires de passeports de certains pays peuvent obtenir leur visa à voyageurs obtiennent un visa avant leur arrivée. l’arrivée, ou n’en ont pas besoin. Les programmes de contrôle réglementaire visant les exportateurs Les programmes de contrôle réglementaire visant les exportateurs d’animaux d’animaux sont axés sur le dépistage de possibles contrevenants. reconnaissent les opérateurs commerciaux qui respectent les règles et ceux qui les transgressent. Les produits importés sont détenus en attendant le contrôle de la Les importateurs peuvent prendre livraison de leurs marchandises avant conformité à l’ensemble des exigences réglementaires, y compris le d’achever les formalités douanières dans les cas où il est possible de prévoir à paiement des droits prescrits. l’avance l’issue de ces formalités. 8 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières officiellement ou non, une forme quelconque de procédures ou de directives de gestion des risques. Aucune organisation douanière ne songerait en effet à contrôler chaque passager, chaque lot de marchan- dises, chaque transporteur ou chaque membre de l’équipage d’un moyen de transport ; elle n’aurait de toute manière probablement pas les ressources requises pour le faire. La gestion des risques constitue donc également une technique propice à l’allocation efficace des ressources. Partout dans le monde, les administrations douanières ont recours à un éventail de techniques de gestion des risques d’un degré de raffinement et d’une efficacité très variables afin de cerner les risques liés aux transactions et activités transfrontalières et d’uti- liser les ressources dont ils disposent pour obtenir les meilleurs résultats possibles. Cependant, bien que la gestion des risques se pratique sous une forme ou une autre un peu partout dans le monde, rares sont les administrations qui la pratiquent d’une façon systé- matique. Dans la section suivante, nous examinerons une approche structurée de la gestion des risques transfrontaliers. Comment gérer les risques transfrontaliers ? | 9 4 Comment gérer les risques transfrontaliers ? La présente section propose un cadre de gestion des Comme le laisse constater la boucle « Suivi, risques transfrontaliers pertinent à la fois pour les examen et évaluation du degré de conformité » de organisations publiques et privées. la figure 2, la gestion des risques est un processus itératif. Cela tient au fait que les risques, loin d’être Le cadre de gestion des risques présenté à la figure 2 statiques, évoluent constamment. Nous revien- propose une série logique et structurée d’étapes drons plus loin sur cette question en même temps pour la gestion des risques ; il comporte cinq grands que nous examinerons la nécessité de commu- volets : niquer avec les principales parties prenantes et de les consulter tout au long du processus. • définition du contexte ; • recensement des risques ; • analyse des risques ; • évaluation et détermination de la priorité des Définition du contexte risques ; • traitement des risques. La première question à examiner lorsqu’on aborde la gestion des risques est celle du contexte dans lequel Dans la présente section, nous examinons les quatre ils se posent. Or, répondre à cette question n’est pas premiers volets du cadre de gestion des risques. Le aussi facile qu’il n’y paraît. cinquième — traitement des risques — fera l’objet de la section 5. L’enjeu le plus important consiste à bien recenser les risques afin d’éviter l’introduction de variables extérieures dans le processus ultérieur de prise de Figure 2.  Cadre de gestion des risques décisions concernant la gestion des risques. C’est la raison pour laquelle la définition du contexte constitue probablement l’étape la plus importante du cycle de gestion des risques. Une erreur à cette Dé nition du contexte étape peut conduire à l’échec du processus tout entier Suivi, examen et évaluation du degré de conformité puisqu’elle en constitue la pierre d’assise. Communication et consultations Recensement des risques Le risque peut se définir comme l’éventualité d’un événement pouvant empêcher une organisation donnée d’atteindre ses objectifs. En conséquence, la Analyse des risques première étape de la gestion des risques frontaliers consiste à examiner d’un œil critique et à peaufiner les objectifs de l’organisation en question pour faire Évaluation et détermination en sorte qu’ils soient clairement définis. Cet exercice de la priorité des risques constitue le point de référence à partir duquel seront Évaluation des risques définies les étapes subséquentes du processus de gestion des risques. Traitement des risques S’agissant de la liste d’exemples établie plus tôt, il est utile de rappeler certains des objectifs straté- giques de haut niveau de l’État concernant la gestion Source : Inspiré de la norme originale de gestion des risques de l’Australie des frontières. Le tableau 3 énumère ces objectifs et de la Nouvelle-Zélande (AZ/NZS 4360: 2004) qui a servi de référence à la en indiquant pour chacun certaines des stratégies norme ISO 31000. d’ensemble conçues pour en assurer la réalisation. 10 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières Les objectifs et stratégies présentés au tableau 3 sont Si on utilise à titre d’exemple la sécurité des trans- énoncés de manière à mettre en lumière le rôle fonda- ports, l’objectif stratégique se traduira comme suit : mental joué par les politiques publiques ainsi que les stratégies primordiales retenues pour les appliquer. • Protéger la chaîne logistique contre les actes de Les États cherchent essentiellement à protéger le terrorisme tout en facilitant la libre circulation mode de vie de leurs citoyens, et les administra- des biens et des personnes légitimes. teurs ont pour responsabilité de gérer les risques qui peuvent faire obstacle à la réalisation de cet objectif. La stratégie à retenir devra donc également être adaptée en conséquence : Cela dit, il convient de ne pas perdre de vue un autre objectif important : celui de faciliter les mouvements • Minimiser les risques d’attentats terroristes en légitimes de personnes et de marchandises qui, veillant à respecter les normes internationales comme nous l’avons déjà vu, constituent un enjeu et nationales de sécurité de manière à faciliter de plus en plus important pour tous les États et les la libre circulation des biens et des personnes organisations chargées de la gestion des frontières. légitimes. En conséquence, il conviendra d’ajouter dans tous les cas « ... tout en facilitant la libre circulation des biens et des personnes légitimes ». Tableau 3.  Objectifs stratégiques de l’État Enjeu Principaux objectifs stratégiques de l’État Stratégies d’ensemble Sécurité • Protection de la santé et de la sécurité publiques. • Minimiser les risques de maladies transmises par les aliments alimentaire • Protection de la réputation de l’industrie alimentaire en veillant à ce que la qualité des produits alimentaires nationale. faisant l’objet d’échanges internationaux réponde aux normes pertinentes. Biosécurité • Protection du pays contre les ravageurs et maladies exotiques. • Minimiser les risques d’introduction de ravageurs et de — quarantaine • Protection de la réputation du pays sur les marchés étrangers. maladies en veillant au respect des normes nationales végétale et internationales relatives à la santé des végétaux. Biosécurité • Protection du pays contre les ravageurs et maladies exotiques. • Minimiser les risques d’introduction de ravageurs et de — quarantaine • Protection de la réputation du pays sur les marchés étrangers. maladies en veillant au respect des normes nationales animale et internationales relatives à la santé des animaux. Immigration • Protection du droit de l’État de déterminer qui est autorisé à • Minimiser les risques d’entrée ou de sortie illégale du pays entrer dans le pays, à en sortir ou à y rester temporairement en veillant à ce que les personnes qui passent la frontière ou pour de bon. ou s’installent dans le pays soient autorisées à le faire. Propriété • Protection des droits des titulaires de marques de commerce • Minimiser les risques de commerce de produits contrefaits intellectuelle ou de droits d’auteur. ou piratés en veillant à ce que les échanges internationaux • Protection de la collectivité contre les produits potentiellement de produits respectent les droits de propriété intellectuelle, nocifs (par exemple, médicaments contrefaits). y compris les marques de commerce et les droits d’auteur. Recouvrement • Protection du revenu national. • Minimiser les risques de pertes de recettes en veillant au de recettes recouvrement des droits appropriés sur les biens importés (ou exportés). Sécurité des • Protection de la chaîne logistique contre les actes • Minimiser les risques d’attentats terroristes en veillant au transports de terrorisme. respect des normes internationales et nationales de sécurité. Normes • Protection des consommateurs contre les risques de • Minimiser les risques d’échange de biens dangereux en de sécurité blessures, de maladies et de mort que peuvent entraîner veillant au respect des normes nationales et internationales les marchandises dangereuses. de sécurité. • Protection de la réputation du pays sur les marchés étrangers. Comment gérer les risques transfrontaliers ? | 11 Tableau 4.  Facteurs contextuels Les États cherchent à protéger le mode de vie de leurs citoyens, et les administrateurs ont pour responsabilité de gérer les risques Contexte intérieur Contexte extérieur qui peuvent faire obstacle à la réalisation de cet objectif • Heures d’ouverture du poste • Géographie. frontière. • Installations et infrastruc- • Nombre d’agents et tures (privées et publiques) Noter que chaque stratégie comporte deux volets : compétence de ces derniers. présentes à la frontière. 1) minimiser les risques qui peuvent faire obstacle • Responsabilités et obligations • Nature du commerce, des à la réalisation d’un objectif particulier ; 2) mettre des fonctionnaires. échanges et des déplacements en œuvre les mesures requises pour y parvenir. • Cadre administratif, y compris internationaux. pratiques et procédures. • Volume des échanges et des Cependant, nous nous limiterons pour le moment • Infrastructures de l’organi- déplacements internationaux. à la détermination des objectifs à poursuivre. sation au poste frontière, • Traités et obligations Nous examinerons plus loin les stratégies requises y compris systèmes et internationales. pour le recensement et le traitement des risques technologie. • Qualité des lois et des (c’est-à-dire, la marche à suivre pour minimiser • Qualité et rapidité du soutien politiques de l’État. les risques). Entre temps, d’autres considéra- assuré par la Direction. • Accords inter-agences et degré tions doivent être prises en compte concernant le • Mécanismes de communi- de coopération. cation interne et d’établis- contexte dans lequel se déroulera la gestion des sement de rapports. risques. Une fois les objectifs de l’organisation établis et clairement articulés, il importe de se pencher sur les aspects pertinents du contexte intérieur et possibles. Si on utilise à titre d’exemple l’appli- extérieur dans lequel évolue cette organisation cation des normes de sécurité, les enjeux énumérés et qui risquent d’influer sur la réalisation de ses au tableau 5 peuvent s’avérer pertinents selon le objectifs. Toute décision ayant trait aux risques contexte particulier dans lequel ils se posent. doit en effet tenir compte du contexte dans lequel ces risques se posent. Par exemple, le tableau 4 Il existe une diversité de causes possibles. Pour énumère certains des facteurs qui risquent d’influer sur l’aptitude d’une organisation à cette raison, il importe qu’un groupe de personnes faire respecter les normes relatives à la santé des bien informées consacrent les ressources voulues au végétaux. processus de recensement des risques, ainsi d’ailleurs qu’aux autres aspects du processus de gestion des Après avoir clairement défini nos objectifs et risques. obtenu une idée précise des facteurs contex- tuels qui risquent d’influer sur la réalisation de Nous avons eu recours jusqu’ici à des exemples ces objectifs, nous sommes prêts à engager le relativement globaux. Or, bien que de tels exemples processus de recensement des risques. puissent nous aider à mieux comprendre le processus de gestion des risques, seules des études de cas pratiques nous permettront souvent de reconnaître Recensement des risques à leur juste valeur les avantages du processus. Nous proposons de tels exemples au tableau 6. Pour recenser les risques qui pèsent sur la réalisation des objectifs de l’organisation, il suffit essentiellement Beaucoup d’autres risques peuvent de toute évidence de répondre à deux questions : faire obstacle à la réalisation de ces objectifs parti- culiers. Cependant, les exemples présentés ci-dessus • Qu’est-ce qui risque d’arriver ? • Comment et pourquoi cela risque-t-il d’arriver ? donnent un aperçu des types d’enjeux dont il conviendra de tenir compte au moment de recenser La première de ces questions aide à clarifier la les risques ; ils ont trait à des risques qui découlent nature du risque potentiel, tandis que la seconde d’un éventail de lacunes possibles des contrôles fournit des informations utiles sur les causes réglementaires, y compris : 12 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières Tableau 5.  Recensement des risques concernant les normes de sécurité Qu’est-ce qui risque d’arriver ? • Introduction de marchandises dangereuses sur le marché intérieur. Comment et pourquoi ? • L’organisation responsable s’appuie sur les recommandations d’autres services frontaliers, qui omettent de leur côté de signaler des marchandises qui pourraient présenter un danger. • La réglementation régissant les importations est inadéquate — par exemple, les dangers nouvellement recensés ne sont pas pris en compte par la législation nationale. • Les importateurs n’ont pas été avisés des normes ou procédures les plus récentes. • Les importateurs cherchent sciemment à se soustraire aux contrôles réglementaires. • Le régime de contrôle a posteriori n’est pas efficace. • Les douaniers n’ont pas les connaissances ni les compétences nécessaires pour reconnaître les marchandises non conformes. Tableau 6.  Exemples de risques opérationnels Objectif : Protection du pays contre l’introduction de l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB), communément appelée « maladie de la vache folle », qui peut conduire chez les humains à une maladie mortelle du système nerveux appelée maladie de Creutzfeldt-Jacob. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Les consommateurs sont exposés à des bovins et à du bœuf infectés par l’ESB à cause de l’inefficacité (ou de l’absence) Comment et pourquoi ? des mesures de détection et de prévention de l’importation des marchandises infectées. Objectif : Protection du pays contre l’introduction du feu bactérien, une maladie bactérienne de la pomme qui risque de décimer l’industrie pomicole locale. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Introduction de la bactérie due aux failles des méthodes de traitement des marchandises contaminées arrivées dans Comment et pourquoi ? le pays. Objectif : Protection du pays contre l’introduction de la fièvre aphteuse, une maladie virale très grave de tous les animaux à onglons — par exemple, bovins, moutons, porcs et chèvres. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Introduction du virus par le biais de chaussures contaminées transportées dans les bagages d’un voyageur. Comment et pourquoi ? Objectif : Protection du pays contre les visiteurs qui présentent un risque criminel. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Des visiteurs ayant un casier judiciaire sont admis sous un faux nom et avec un faux passeport. Comment et pourquoi ? Objectif : Protection de la collectivité contre les médicaments contrefaits. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Des médicaments contrefaits contenant des ingrédients dangereux pour la santé risquent d’être écoulés sur le marché Comment et pourquoi ? à l’insu des autorités sous un faux nom ou dans un emballage imité. Objectif : Protection du revenu national contre l’évasion douanière. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Les importateurs payent un montant insuffisant de droits sur des produits particuliers à cause du manque de clarté de Comment et pourquoi ? la législation pertinente. Objectif : Protection de la chaîne logistique contre les actes de terrorisme. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Des groupes terroristes peuvent compromettre la chaîne logistique en introduisant des engins explosifs dans des Comment et pourquoi ? cargaisons expédiées par un commerçant de bonne réputation. Objectif : Protection des consommateurs contre les produits électriques potentiellement dangereux. Qu’est-ce qui risque d’arriver ? Importation d’équipements électriques de qualité inférieure aux normes venant de pays où les contrôles de la Comment et pourquoi ? production et de la vente de ces équipements sont insuffisants (ou inexistants). Comment gérer les risques transfrontaliers ? | 13 • le fait de ne pas savoir détecter ou prévenir Pour des raisons pratiques, les définitions des termes l’importation de marchandises très dangereuses ; « probabilité », « incidence » et « niveau de risque » • les méthodes inadéquates de traitement des devraient refléter les exigences et le contexte opéra- marchandises déjà importées ; tionnel de l’organisation faisant l’objet de l’examen. • le fait de ne pas savoir détecter ou prévenir les Pour les besoins de la démonstration, nous utiliserons activités criminelles ; dans l’exemple suivant des définitions génériques. • le manque de clarté des lois. D’abord, s’agissant de la probabilité : Presque : L’événement se produira presque certain certainement. Analyse des risques Probable : L’événement se produira probablement. Une fois les risques possibles recensés, l’étape Possible : L’événement pourrait se produire à un suivante consiste à les analyser. Ce faisant, il importe moment ou un autre. de garder à l’esprit que la notion de risque comporte Improbable : L’événement ne devrait pas se deux éléments : la probabilité de l’événement, et produire. l’incidence de sa réalisation éventuelle. Nous posons Rare : L’événement risque très peu de se chaque jour, consciemment ou non, des jugements produire. sur ces éléments — par exemple, pourquoi se rendre au travail en voiture alors qu’un accident grave serait L’incidence décrit les conséquences de la réalisation si lourd de conséquences ? La réponse réside dans la du risque : valeur extrêmement faible que nous attribuons à la probabilité d’un tel accident : nous considérons que Catastrophique : Conséquences très graves pour la la décision de prendre le volant constitue un risque réalisation des objectifs. acceptable. Majeure : Conséquences graves pour la réali- sation des objectifs. Cette étape du processus d’évaluation des risques Modérée : Conséquences importantes pour la consiste donc en l’analyse des rapports entre la proba- réalisation des objectifs. bilité d’un événement et son incidence prévisible. La Mineure : Conséquences légères pour la réali- combinaison de ces facteurs permet de déterminer sation des objectifs. le niveau global de risque, avant de comparer et de Minimale : Conséquences faibles, voire négli- classer par ordre de priorité l’éventail des risques geables pour la réalisation des recensés. L’objectif consiste donc à déterminer objectifs. l’importance relative de chaque risque pour pouvoir ensuite prendre des décisions éclairées au cours des Une fois définies la probabilité et l’incidence de étapes ultérieures du processus. chacun des risques recensés, on peut en établir le niveau de gravité global à l’aide de la matrice de Trois méthodes fondamentales peuvent servir à risques (figure 3) et les définir selon l’échelle qui l’analyse des risques : quantitative ; semi-quanti- suit : tative ; qualitative. Le choix de la méthode à retenir Extrême : Risque élevé de répercussions graves dépendra en règle générale de la mesure dans laquelle sur la réalisation des objectifs. Requiert on peut quantifier le risque avec un degré raison- une attention immédiate et soutenue au nable de précision. Par exemple, les risques relatifs au niveau de la gestion et des opérations. recouvrement des recettes seront probablement plus Élevé : Risque probable de répercussions graves faciles à quantifier, tandis que ceux relatifs à l’immi- sur la réalisation des objectifs. Requiert gration se prêteront plus facilement à une analyse une attention soutenue au niveau de la qualitative. On constate sans surprise que l’approche gestion et des opérations. qualitative est celle qui est le plus souvent retenue Modéré : Risque possible de répercussions impor- dans le contexte de la douane, où les gestionnaires tantes sur la réalisation des objectifs. s’appuient sur leur expérience, leur intuition et leur Requiert une certaine attention au niveau jugement pour prendre leurs décisions. de la gestion et des opérations. Une matrice 5x5 du risque comportant cinq défini- Certaines agences trouveront la matrice 5x5 particu- 2 tions de la probabilité du risque et cinq définitions lièrement utile, mais d’autres pourraient préférer des de son incidence constitue un outil d’analyse utile2. matrices plus ou moins complexes. 14 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières Figure 3.  Matrice de risques PROBABILITÉ Rare Improbable Possible Probable Presque certain Catastrophique Modéré Élevé Élevé Extrême Extrême INCIDENCE Majeure Faible Modéré Élevé Élevé Extrême Modérée Faible Modéré Modéré Élevé Élevé Mineure Très faible Faible Modéré Modéré Élevé Minimale Très faible Très faible Faible Faible Modéré Faible : Pourrait entraîner certaines répercus- Cet exemple laisse conclure à la nécessité de se sions sur la réalisation des objectifs. pencher en priorité sur les enjeux suivants : Pourrait requérir une certaine attention au niveau de la gestion et des opérations. • procédures permettant de vérifier que les Très faible : Ne devrait pas se répercuter sur la marchandises à risque ont été dûment contrôlées réalisation des objectifs. Requiert peu par d’autres services frontaliers ; d’attention au niveau de la gestion et des • stratégies permettant de démasquer les opérations, voire aucune. opérateurs commerciaux qui cherchent sciemment à se soustraire aux contrôles ; À partir de l’exemple précédent portant sur les • programmes visant à accroître les connais- normes de sécurité des produits (voir tableau 5), il sances et les compétences des douaniers. est possible d’imaginer un scénario en vertu duquel des marchandises dangereuses sont introduites sur le Il est possible que des mesures soient déjà en place marché intérieur. pour faire face à certains des risques recensés, auquel cas la probabilité de ces risques sera réduite. Il importe cependant de bien vérifier l’efficacité de ces mesures pour veiller à ce qu’elles donnent les Cause Probabilité Incidence Risque résultats attendus. D’autres services frontaliers Possible Majeure Élevé omettent de signaler des marchandises qui pourraient Évaluation et détermination présenter un danger de la priorité des risques La réglementation régissant Improbable Majeure Modéré les importations est inadéquate Cette étape du processus a pour objet de déter- miner si les risques recensés sont acceptables ou Les importateurs n’ont pas Improbable Mineure Faible non, et de sélectionner ensuite, parmi les risques été avisés des normes ou jugés inacceptables, ceux sur lesquels l’organi- procédures les plus récentes sation devrait se pencher en priorité. Les importateurs cherchent Probable Majeure Élevé sciemment à se soustraire Certaines personnes ont beaucoup de mal à aux contrôles réglementaires accepter qu’un risque puisse être considéré comme Le régime de contrôle a Possible Modérée Modéré « acceptable ». Il importe toutefois de rappeler posteriori n’est pas efficace qu’en règle générale, les organisations n’ont pas les Les douaniers n’ont pas Probable Majeure Élevé moyens d’assurer une protection contre la totalité les connaissances ni les des risques possibles, et qu’elles doivent donc faire compétences nécessaires des arbitrages entre ceux qui seront tolérés et ceux pour reconnaître les au traitement desquels elles devront consacrer une marchandises non conformes partie de leurs ressources limitées. Diverses raisons Comment gérer les risques transfrontaliers ? | 15 peuvent être invoquées pour justifier le caractère pragmatisme commande de mettre l’accent sur l’atté- « acceptable » d’un risque ; par exemple : nuation des impacts et sur la continuité des activités en cas d’attentat. • la menace posée par un risque potentiel peut être jugée trop faible pour justifier une intervention, Une fois définis les risques qui doivent faire l’objet compte tenu des ressources disponibles ; d’une intervention, il s’agit de déterminer ceux qui • le coût du traitement d’un risque potentiel devraient recevoir la plus grande priorité, compte peut être si élevé pour l’organisation que cette tenu des moyens et des ressources limitées de l’orga- dernière n’a d’autre choix que de l’accepter ; nisation. La priorité accordée au traitement d’un • le coût d’opportunité de la décision d’accepter risque donné dépendra en règle générale du score un risque potentiel peut dépasser le coût des établi dans la matrice des risques. Cependant, il arrive menaces posées par ce risque. souvent que des risques reçoivent le même score et qu’il ne soit pas possible de les traiter tous. Dans de Supposons que certains oiseaux migrateurs risquent tels cas, une décision devra être prise concernant la d’introduire dans le pays certaines maladies nuisibles répartition des ressources limitées de l’organisation. pour l’économie nationale. Comme il n’y a pas grand-chose à faire pour empêcher la migration des Enfin, pendant que les risques jugés inacceptables oiseaux, il conviendra plutôt de mettre l’accent sur font l’objet d’un plan de traitement officiel, ceux qui des mesures propres à limiter l’impact des maladies sont jugés acceptables devraient faire l’objet d’un introduites par cette voie. De la même façon, il est suivi et d’une évaluation périodiques afin de veiller impossible d’assurer une protection totale contre les à ce que leur « acceptabilité » reste valide. Cette possibilités d’attentats terroriste. En conséquence, le question sera examinée dans la section suivante. 5 Atténuation des risques recensés Nous examinons dans la présente section les dangereuses et pourrait donc être considéré comme méthodes d’atténuation ou de traitement des risques une action « basée sur les risques », mais on passerait — dernier élément du cadre de gestion des risques. dans ce cas sous silence l’autre risque important : l’entrave aux échanges commerciaux légitimes. Un retour au tableau 3 nous permet de constater que En effet, si les contrôles frontaliers systématiques les stratégies conçues pour assurer la réalisation des permettent sans contredit de réduire les risques objectifs de l’État comportent deux volets : 1) minimi- d’importation de marchandises dangereuses, ils ont sation des risques qui pourraient faire obstacle à la par contre pour effet d’entraver le flux des échanges, réalisation d’objectifs particuliers ; 2) mise en œuvre y compris les transactions légitimes. de mesures concrètes qui permettront d’y arriver. Il convient de rappeler à ce point-ci de l’exercice que les Comment donc faire en sorte que les procédures régle- actions retenues détermineront dans quelle mesure mentaires soient fondées sur l’analyse des risques ? le travail de gestion de l’organisation se fondera sur Une manière efficace d’y arriver consiste à élaborer l’analyse des risques. une stratégie qui prendra en compte les cinq éléments fondamentaux suivants de la gestion du respect de L’exemple de l’application des normes de sécurité a la loi : montré qu’une des stratégies utiles pour protéger la santé des consommateurs consiste à minimiser les • la base législative de l’administration douanière ; risques de commerce de marchandises dangereuses • le service à la clientèle ; en veillant à ce que les marchandises échangées • l’évaluation de la conformité ; respectent un ensemble de normes nationales et • la reconnaissance de la conformité ; internationales, tout en facilitant la libre circu- • l’application de la réglementation. lation des biens et des personnes légitimes. Une des façons d’y parvenir consiste à exiger que tous les La combinaison de ces éléments ouvre la voie à une produits importés s’accompagnent d’avertissements approche structurée de la gestion du respect de la loi, à l’intention des consommateurs. Cependant, nous comme l’illustre la pyramide de la gestion du respect avons déjà vu (tableau 2) que certaines méthodes de de la loi basée sur les risques présentée à la figure 4. gestion du respect de la loi sont fondées sur l’analyse des risques — et conçues pour faciliter les échanges — et que d’autres ne le sont pas : Base législative • gestion basée sur les risques : Importateurs réguliers autorisés à compléter l’étiquetage Les organismes publics ont tous pour mandat fonda- réglementaire des produits après leur impor- mental de veiller au respect des lois. Ainsi, tout tation et avant leur mise en vente sur le marché régime efficace de gestion des frontières doit pouvoir intérieur ; s’appuyer sur une législation nationale bien conçue • gestion non basée sur les risques : Contrôle fournissant les bases juridiques de l’éventail de systématique des étiquettes de mise en garde stratégies de gestion de la conformité que le service obligatoires de certains produits importés avant frontalier pourrait souhaiter adopter. de consentir la mainlevée. Nous avons examiné un certain nombre de ces Il est possible de faire valoir que le contrôle systé- stratégies à la section 2 dans le contexte des rôles et matique des importations constitue en fait un moyen responsabilités des services frontaliers. Nous avons d’atténuer les risques posés par les marchandises relevé en particulier que : 18 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières Figure 4.  Pyramide de la gestion du respect de la loi basée sur les risques Inspiré de la « pyramide de mise en œuvre » de Ayres Sanction Procédures et Braithwaite (1992) simpli ées Recours accru à l’auto-évaluation Avertissement o ciel Intervention par exception Surveillance réglementaire réduite Modalités de paiement périodique Persuasion Assouplissement des exigences d’établissement de rapports Procédures basées sur les risques : Pouvoir Pouvoir Équilibre entre contrôle et facilitation discrétionnaire discrétionnaire Accent sur la détermination de la conformité de sanction de la de récompense et de la non-conformité Accent sur la gestion de l’information non-conformité de la conformité Évaluation avant l’arrivée, dédouanement et mainlevée Intervention en temps réel en cas de risques élevés Accent sur l’après-transaction dans la majorité des cas Audits des systèmes et procédures de l’industrie Enquête en cas de non-conformité soupçonnée Consultation et coopération Directives administratives claires Règles o cielles Éducation et sensibilisation Mise en œuvre/ Assistance et conseils techniques, mécanismes d’appel reconnaissance Reconnaissance des responsabilités respectives Évaluation de la conformité de l’État et de l’industrie Services de communication électronique Service à la clientèle Système de sanctions en cas de non-conformité Souplesse et solutions sur mesure Suppression du lien entre le contrôle physique Base législative des cargaisons et le recouvrement des recettes publiques Source : Widdowson (2003) ; voir également Border Management Modernization 2011, figure 6.3, p. 108. • les agences de sécurité alimentaire sont • les agences de l’immigration sont autorisées à autorisées à inspecter et à analyser les aliments interroger, fouiller et détenir les personnes qui importés ou exportés pour veiller au respect souhaitent passer la frontière du pays, ainsi qu’à des normes en vigueur, et que les opérateurs contrôler leur identité, et les voyageurs qui ne commerciaux qui importent ou exportent sont pas ressortissants du pays où ils souhaitent certains produits alimentaires sont souvent tenus se rendre peuvent dans certains cas être tenus d’obtenir un permis ou un certificat à cette fin ; d’obtenir un visa d’entrée ; • les agences de biosécurité sont autorisées à • les agences de la sécurité des transports inspecter, tester et, le cas échéant, traiter les détiennent de larges pouvoirs qui leur permettent végétaux et les produits végétaux pour veiller à de surveiller l’application des normes de sécurité ce qu’ils répondent aux normes pertinentes et et de vérifier la validité et l’intégrité des expédi- qu’ils ne risquent pas d’introduire des ravageurs teurs et des autres membres de la communauté ou des maladies, et à mettre les plantes vivantes commerciale internationale. en quarantaine dans des stations spéciales, le temps de vérifier qu’elles ne présentent aucun Tous les pouvoirs sur lesquels se fondent les droits et risque phytosanitaire ; responsabilités de l’administration douanière doivent Atténuation des risques recensés | 19 être clairement énoncés dans la législation pertinente. d’au moins 30 jours la date d’expiration de leur Par exemple : passeport, etc. • Les procédures d’importation des produits de • Le Customs Act de Singapour confère aux l’élevage en vigueur en Inde précisent que tous fonctionnaires des douanes un éventail de ces produits doivent faire l’objet d’un permis pouvoirs : émettre des mandats de perqui- d’importation sanitaire et passer par un port ou sition, pénétrer dans des locaux et y conduire un aéroport doté d’une station de quarantaine des fouilles, perquisitionner sans mandat dans animale et de services de certification, etc. certaines circonstances, accéder aux ordina- • La législation japonaise sur les exportations teurs et autres équipements pour en inspecter le exige des exportateurs qu’ils déclarent à la contenu et en vérifier les opérations, fouiller des douane la nature, la quantité, la valeur et toute navires et des aéronefs, arrêter et examiner tout autre caractéristique particulière des biens qu’ils véhicule dans certains cas, ouvrir les paquets et souhaitent exporter, et qu’ils fournissent les examiner les marchandises, fouiller les visiteurs factures et autres pièces justificatives requises à leur arrivée à Singapour, etc. par la loi (par exemple, permis, approbations ou • La Loi sur la mise en quarantaine du Canada licences), qu’ils apportent les biens à exporter confère aux agents de quarantaine et aux agents dans une zone douanière désignée à cette fin ou de salubrité de l’environnement un éventail de dans un entrepôt autorisé, etc. pouvoirs d’inspection en lien avec le contrôle des maladies transmissibles : ordonner l’immo- bilisation d’un véhicule et le rediriger vers un Service à la clientèle lieu où pourra être effectuée une inspection, procéder à l’inspection du véhicule ou du lieu Un cadre juridique transparent et prévisible contribue où s’est trouvé le véhicule, ouvrir et examiner également à faire en sorte que les personnes la marchandise ou tout contenant, bagage ou assujetties à la réglementation connaissent les règles. emballage ou toute autre chose ; prélever des Dans le cas contraire, comment pourraient-elles s’y échantillons et effectuer des analyses, etc. conformer ? Et s’il est vrai que nul n’est censé ignorer • Le Citizenship and Immigration Control Act de la loi, les cas de non-respect de la réglementation l’Ouganda confère les pouvoirs suivants aux peuvent souvent être mis sur le compte d’un cadre agents de l’immigration : fouiller tout navire, réglementaire mal conçu, mal expliqué ou ambigu. aéronef, voiture de train ou véhicule sans mandat de perquisition, interroger une personne Il est par conséquent important de fournir des infor- qu’elle soupçonne de s’apprêter à entrer ou sortir mations claires et des conseils judicieux à ceux du pays, d’être un immigrant illégal, ou d’être en qui sont assujettis à la réglementation. On désigne mesure de fournir des informations concernant communément sous le terme de « service à la une quelconque infraction à la règlementation, clientèle » cet aspect de la gestion de la conformité exiger d’une personne ayant l’intention d’entrer qui comprend des activités (traitement des risques) dans le pays qu’elle rédige et signe une décla- telles que : ration et qu’elle subisse un examen médical réalisé par un médecin agréé par l’État, etc. • la consultation et la coopération ; • l’élaboration de directives administratives claires ; De même, la législation nationale devrait énoncer les • l’édiction de règles officielles ; droits et responsabilités des membres de la commu- • l’éducation et la sensibilisation ; nauté commerciale internationale et des voyageurs. • l’assistance et les conseils techniques ; Par exemple : • les mécanismes d’appel. • Le Immigration Act d’Afrique du Sud dispose que Les activités de service à la clientèle comme celles les voyageurs qui entrent dans le pays ou qui en énumérées ci-dessus sont conçues pour permettre de sortent doivent obligatoirement passer par un lever toute ambiguïté, dans l’esprit des membres du port d’entrée officiel et qu’ils doivent détenir un public, quant à leurs droits et responsabilités et quant passeport valide, que les ressortissants sud-afri- cains ne seront admis que s’ils sont en mesure de s’identifier, que la date de la fin du séjour prévu des voyageurs étrangers doit précéder http://www.customs.govt.nz 3 20 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières aux dettes qu’ils doivent acquitter ou aux exemp- plaider l’erreur commise en toute bonne foi, d’autres tions auxquelles ils pourraient avoir droit. Vues sous chercheront délibérément à contourner la loi, et les l’angle de la gestion des risques, elles représentent autorités devront donc également prévoir la mise des stratégies d’atténuation (ou de traitement) des en place de mesures plus coercitives. Ces stratégies risques que peuvent engendrer au sein du public seront examinées plus loin dans la présente section. assujetti aux règles une connaissance ou une compré- hension défaillantes, ou un manque de clarté ou de crédibilité de ces règles. Évaluation de la conformité De telles stratégies offrent un moyen efficace Les stratégies d’évaluation de la conformité d’atténuer les types suivants de risques que nous poursuivent essentiellement deux objectifs. Elles avons définis antérieurement. Par exemple, les permettent d’abord de reconnaître les cas de respect services douaniers néozélandais ont publié une série ou de non-respect de la loi, et ensuite, dans le de fiches de renseignement disponibles sur le Web deuxième cas, de comprendre les raisons d’un tel qui expliquent les dispositions réglementaires appli- comportement, c’est-à-dire de faire une distinction cables à un éventail de transactions internationales — entre les erreurs commises en toute bonne foi et les par exemple, conseils sur l’importation de véhicules à infractions délibérées. moteur privés à l’intention des importateurs privés, y compris les immigrants, qui souhaitent importer un Diverses méthodes peuvent servir à reconnaître les cas véhicule en Nouvelle-Zélande. de respect ou de non-respect de la loi ; notamment : De même, le Conseil suédois de l’agriculture diffuse • dépistage et vérification des données ; sur son site Web5 des informations complètes sur les • examen des documents ; règles à respecter en matière d’importation et d’expor- • interventions physiques (inspections, tests, tation, et beaucoup d’autres organisations utilisent vérifications, échantillonnages, analyses, etc.) ; la même stratégie — par exemple, Citoyenneté • audits ; et Immigration Canada6, les services japonais de • enquêtes. quarantaine animale7, le Département thaïlandais du développement de l’élevage8, le ministère sud-africain Les diverses méthodes d’évaluation de la conformité de l’Agriculture, des Forêts et des Pêches9 et la Food devraient être mises en œuvre de manière à assurer and Drug Administration des États-Unis10. aux opérateurs commerciaux et aux voyageurs légitimes un niveau approprié de facilitation. Par Les règles officielles servent à clarifier et à confirmer exemple, les interventions physiques ne devraient les obligations de la communauté commerciale inter- être envisagées que dans les cas où les conclusions de nationale ; elles peuvent prendre diverses formes. Par l’analyse des risques le justifient. exemple, la Direction générale des services frontaliers du Canada publie des décisions anticipées couvrant L’expression « intervention par exception » sert à le classement tarifaire des biens, et les négociants et désigner une stratégie de gestion de la conformité fabricants peuvent solliciter des décisions anticipées réglementaire fondée sur les principes de la gestion de ce genre auprès des administrations douanières des risques. En vertu de ces principes, la décision du Canada, du Mexique et des États-Unis en vertu d’intervenir dépendra des risques recensés. des dispositions de l’ALENA concernant le traitement des marchandises. En fait, les décisions anticipées couvrant des questions, telles que le classement 4 New Zealand Customs Service Fact Sheet No. 29 Advice tarifaire, l’évaluation et le traitement préférentiel on Private Motor Vehicle Imports, October 2010. constituent désormais un élément habituel des 5 http://www.jordbruksverket.se/swedishboardof accords de libre échange11. agriculture 6 http://www.cic.gc.ca/english/index.asp 7 http://www.maff.go.jp/aqs/english/animal/im_index. Les diverses stratégies d’atténuation des risques htm élaborées dans le cadre des services à la clientèle 8 http://www.dld.go.th/webenglish/move1.html sont conçues pour veiller à ce que les personnes 9 http://www.nda.agric.za/ assujetties à la réglementation en comprennent 10 http://www.fda.gov bien les tenants et aboutissants. Cependant, bien 11 Par exemple, ceux conclus par la Thaïlande et l’Australie, que certaines personnes prises en défaut puissent et par les États-Unis et Singapour. Atténuation des risques recensés | 21 Bien que de nombreuses organisations aient désormais un voyageur qui descend d’un avion n’est pas libre adopté une politique d’intervention par exception, on de sortir de l’aéroport par la porte la plus proche ; il observe régulièrement un manque de cohérence entre doit se plier à une série de formalités — inspection la politique énoncée et sa pratique opérationnelle. Par physique, examen de documents — clairement exemple, une administration douanière particulière définies avant d’être autorisé à quitter l’aéroport. d’un pays d’Asie de l’Est ouvre systématiquement À défaut de telles procédures, il serait impossible tous les colis express, mais ne montre pas la même d’exercer le moindre contrôle réglementaire. rigueur pour les envois de fret maritime. La raison de cette situation est malheureusement très simple : les organisations concentrent souvent leur attention sur Évaluation de la conformité avant et après les envois faciles à examiner, sans égard aux risques le dédouanement qu’ils peuvent poser. L’évaluation de la conformité peut être effectuée par De plus, on constate fréquemment que le nombre l’administration douanière avant le dédouanement de « transactions à haut risque » tend à être direc- des marchandises ou après, c’est-à-dire a posteriori. tement proportionnel aux ressources disponibles pour la réalisation des inspections. Par exemple, Comme son nom l’indique, le dédouanement pré- pendant la récente crise économique mondiale, les arrivée permet à un commerçant de soumettre ses taux d’inspection observés dans beaucoup de pays informations à un organisme public avant l’arrivée ont augmenté malgré une réduction des volumes de ses marchandises à la frontière, et d’accélérer d’échanges. Or, il est douteux que le niveau de risque ainsi le travail de l’administration douanière. Dans ait considérablement changé pendant cette période. les cas où aucun problème réglementaire ne se pose, Le ralentissement des échanges a simplement conduit la mainlevée peut ainsi être consentie dès l’arrivée à une plus grande disponibilité des inspecteurs. des marchandises à la frontière. Cette procédure est particulièrement utile dans le cas de certains types de produits hautement périssables ou qui doivent être Régimes de contrôle sous-jacents manutentionnés rapidement dès leur arrivée. Lorsque l’évaluation de la conformité donne à conclure à une erreur commise de bonne foi, diverses méthodes peuvent servir à éviter la répétition de telles erreurs à l’avenir. Les plus appropriées de ces méthodes sont les suivantes : Établissement de profils et ciblage avant l’arrivée • maintien d’un régime de contrôles de base ; • diverses formes de services à la clientèle (voir Le profil de risque est un ensemble d’indicateurs de risque liés plus haut). au type, à la valeur ou à l’origine des marchandises, au transit par un tiers pays ou au transbordement, au mode de transport, à la D’autres méthodes sont par ailleurs utiles pour méthode de paiement, etc. réduire les risques de non-respect délibéré de la Les profils de risque sont établis à partir de données et de rensei- réglementation, notamment : gnements obtenus par les administrations douanières et d’autres services de maintien de l’ordre, y compris des informations • maintien d’un régime de contrôles de base ; recueillies lors d’infractions antérieures. • diverses stratégies coercitives (voir ci-dessous). Les administrations douanières peuvent mettre sur pied des unités d’analyse du fret ou des passagers afin d’élaborer des profils de À quoi peut donc ressembler un régime de contrôles risque et de les peaufiner au fil du temps. de base ? Il s’agira essentiellement d’un ensemble de procédures législatives, documentaires et physiques L’utilisation des profils de risque pour l’analyse d’informations conçues pour aider les organisations à s’acquitter de obtenues par l’administration douanière avant l’arrivée des leur mandat. Par exemple, lorsqu’un camion traverse marchandises ou des personnes dans leur pays de destination une frontière, il doit le faire à un endroit précis, et permet d’évaluer le risque qu’elles posent a priori et d’intervenir en certaines formalités doivent être remplies avant que conséquence. L’utilisation des informations recueillies avant l’arrivée le chauffeur, le camion et la cargaison qu’il trans- profite à la fois aux autorités publiques et aux entreprises puisqu’elle porte n’obtiennent le droit de passage. De même, accroît l’efficacité des procédures de dédouanement. 22 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières une entreprise ou par un secteur industriel donnés. Collaboration étroite des administrations Ils mettent par ailleurs en lumière ou confirment douanières au ciblage des risques les sources de risques qui devraient faire l’objet de pour un contrôle frontalier plus efficace mesures supplémentaires ou plus rigoureuses, et fournissent ce faisant des données qui peuvent être Le centre intégré de ciblage et d’opérations (Integrated Targeting réinjectées dans le processus de gestion des risques and Operations Centre — ITOC) récemment mis sur pied en (y compris pour la mise à jour des profils de risque). Nouvelle-Zélande a contribué à renforcer l’aptitude des autorités à assurer la sécurité de l’ensemble des habitants de ce pays en encourageant les divers services frontaliers — douanes, services Les administrations douanières peuvent recourir à de quarantaine, services d’immigration et transport — à colla- diverses formes d’audits, y compris ceux effectués borer pour améliorer le ciblage des risques que peuvent poser sur pièces, ceux portant sur les transactions et ceux certains types particuliers de marchandises, de personnes ou de portant sur le système tout entier. Le choix du type moyens de transport pour ainsi pouvoir intervenir d’une manière d’audit dépendra de la nature du risque potentiel plus efficace et mieux coordonnée. défini par l’organisation lors de la sélection du parti- culier ou de l’entreprise à soumettre à une évaluation L’ITOC est actif 24 heures par jour et sept jours par semaine. Ses de la conformité. Les différents types d’audits 60 agents qualifiés s’occupent de l’ensemble des opérations de sont examinés au chapitre 6 de l’ouvrage « Border direction, de planification et de coordination des opérations Management Modernization ». transfrontalières. L’ITOC remplit deux fonctions principales : • ciblage (ensembles de règles du risque, profils, évaluations, L’audit est une activité qui se caractérise principa- recommandations, information et renseignement, établissement lement par le but qu’elle poursuit. Il sert essentiel- de la priorité des interventions) ; lement à déterminer si la partie assujettie aux règles • coordination des opérations (appréhension du domaine respecte ou non ces dernières. Il ne saurait servir à transfrontalier, aide aux activités opérationnelles, direction opérationnelle). L’ITOC est doté d’une structure de commande et de contrôle — le contrôle (choix des actions) est centralisé, et l’exécution opération- Avantages de la reconnaissance nelle (choix de la démarche) est décentralisée. Les groupes de travail des situations à faible risque et les administrations douanières répondent chacun des résultats de Les entreprises et les particuliers qui présentent de bons antécé- leurs opérations à une structure de gestion permanente. dents en matière de conformité peuvent faire l’objet de contrôles moins rigoureux que ceux dont les antécédents sont moins relui- Source : « Integrated Targeting and Operations Centre », New Zealand sants ou dont on connaît peu de chose. Ce concept est au cœur d’un Customs Service (2011) certain nombre de programmes de reconnaissance des «  opéra- teurs de confiance » qui offrent un éventail d’avantages à certaines entreprises jouissant d’un statut à faible risque. Ces programmes s’appuient sur de saines pratiques de gestion du risque qui recon- Le dédouanement avant l’arrivée n’est pas une naissent les membres de la communauté commerciale interna- méthode d’allégement des contrôles réglementaires ; tionale à faible risque et permettent de ce fait de consacrer une part il vise plutôt à établir un calendrier des interventions plus grande des ressources disponibles au contrôle des opérateurs qui réduira les risques de retards du traitement. qui présentent un risque potentiel plus élevé. On a recours en règle générale à un audit qui sert non pas, comme L’audit est le type le plus commun de contrôle a poste- certains le supposent, à simplement détecter les erreurs commises riori. Il peut prendre diverses formes, du contrôle par une entreprise dans l’application de la réglementation, mais aléatoire de la conformité à l’exercice d’optimisation plutôt à évaluer le degré de conformité aux exigences réglemen- visant des particuliers ou des secteurs industriels tout taires pertinentes. Ce qu’il faut comprendre ici, c’est que ce type entier. L’audit s’appuie sur une législation qui confère d’évaluation, peu importe les résultats obtenus, sert à déterminer à des agents compétents le pouvoir de pénétrer l’affectation future des ressources consacrées au contrôle de la dans un lieu pour y inspecter des marchandises et conformité. documents ayant trait à des transactions transfron- tières (par des moyens physiques ou électroniques). Il convient par ailleurs de rappeler qu’un audit donnant des résultats positifs est aussi valable qu’un audit négatif. Les vérificateurs de la conformité réglementaire ont en effet tendance à mesurer leur Ces audits permettent aux administrations douanières efficacité à l’aune du nombre de cas de non-respect des règles qu’ils de se faire une idée précise des transactions effectuées parviennent à démasquer. ainsi que du taux global de conformité affiché par Atténuation des risques recensés | 23 la seule fin de détecter les erreurs commises par une programmes d’« opérateurs de confiance » et de entreprise ou un particulier dans l’application des « voyageurs enregistrés » mis en œuvre par les règles. Utilisé judicieusement, il peut fournir à l’orga- services de douanes. nisation des informations utiles sur le respect ou le non-respect des lois (voir l’encadré sur les « avantages de la reconnaissance des situations à faible risque »). Expéditeur connu Plusieurs pays ont entrepris de mettre en place des Reconnaissance de la conformité programmes d’« expéditeur connu », y compris les États-Unis12, l’Afrique du Sud13 et certains États On peut soumettre les entreprises et les particu- membres de l’UE14. Ces programmes gérés par des liers que l’on considère présenter un niveau de organisations responsables de la sécurité des trans- risque relativement faible à des contrôles allégés et ports ont pour effet de lever l’exigence du contrôle mettre davantage l’accent sur l’auto-évaluation de systématique des marchandises transportées sur la conformité à la réglementation. Cette démarche les vols passagers lorsqu’on juge que l’expéditeur reconnaît qu’en matière de gestion de la conformité applique lui-même des contrôles de sécurité adéquats. aux prescriptions douanières, ce qui convient à l’un L’organisation reconnaît ainsi officiellement la ne convient pas nécessairement aux autres. capacité de certains expéditeurs de veiller au respect d’exigences prédéterminées en matière de sécurité L’allégement des contrôles appliqués à ceux qui justi- (et qui présentent donc un risque relativement faible) fient de bons antécédents présente deux avantages et les soumet en conséquence à des contrôles moins notables. Il facilite d’abord les échanges commerciaux rigoureux. et les déplacements légitimes, et permet ensuite aux organisations de consacrer une plus grande partie de L’entreprise qui souhaite être reconnue au titre d’un leurs ressources au contrôle des entreprises et des tel programme devra d’ordinaire répondre à certaines particuliers qui présentent un risque plus élevé, c’est- conditions : à-dire ceux dont les antécédents sont moins reluisants ou dont on connaît peu de chose. • démontrer qu’elle a mis sur pied et qu’elle applique un programme de sécurité opération- La reconnaissance de la conformité est un aspect de nelle fondé sur l’analyse des risques ; la gestion des frontières souvent négligé. Les adminis- • accepter de se conformer en tout temps à trations douanières mettent en général l’accent sur certains critères réglementaires précis ; l’imposition de sanctions à ceux qui ne respectent • démontrer l’efficacité de ses contrôles de pas les règles, au lieu de privilégier l’approche de sécurité ; la carotte et du bâton. En d’autres mots, elles ont • entreprendre d’inculquer aux membres de son personnel les connaissances, aptitudes et tendance à préférer le bâton à la carotte. compétences qui leur permettront de s’acquitter correctement de leurs responsabilités en matière Les stratégies de reconnaissance de la conformité de sécurité. sont le fruit de ce qu’on décrit souvent comme une démarche de renforcement de la conformité dont l’objet principal est d’assurer la conformité future à la réglementation et d’établir un juste équilibre entre les mesures qui encouragent la conformité et celles qui sanctionnent la non-conformité. Les administrations douanières peuvent recourir à 12 http://www.tsa.gov/ diverses formes de reconnaissance de la conformité, 13 http://www.caa.co.za/ 14 For example, the UK known consignor program, http:// y compris l’utilisation de procédures simplifiées, un www.dft.gov.uk/ recours accru à l’auto-évaluation, l’allégement des 15 http://internet1.customs.go.th/ contrôles, les accords de paiements périodiques et 16 http://www.auhcustoms.gov.ae/en/index.aspx l’assouplissement des règles relatives à l’établis- 17 http://www.customs.gov.jo/ sement de rapports. On peut mentionner à titre 18 « Convention internationale pour la simplification et d’exemple la notion d’« expéditeur connu » appliquée l’harmonisation des régimes douaniers (amendée) », par les agences de la sécurité des transports, et les entrée en vigueur en 2006. 24 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières Opérateur de confiance Intervention à la frontière ou contrôle Les programmes de l’« opérateur de confiance », a posteriori « Carte d’or » du « client qualifié » ou autres des Bien que le contrôle a posteriori facilite le commerce et les douanes existent depuis de nombreuses années. déplacements, il peut arriver dans certaines circonstances qu’une On en trouve des exemples en Thaïlande15, à Abou administration douanière doive intervenir à la frontière, c’est-à-dire Dhabi16 et en Jordanie17. au moment de l’importation ou de l’exportation, ou même avant si cela est possible. La Convention de Kyoto révisée18, principale Le problème est donc de déterminer dans quelles circonstances convention internationales sur les questions il convient d’intervenir à la frontière, et dans quelles circonstances douanières, comporte des dispositions concernant les contrôles a posteriori sont indiqués. La réponse à cette question réside dans la nature du risque à gérer. l’établissement de partenariats mutuellement avantageux entre les autorités douanières et le secteur Par exemple, le risque qui pèse sur le recouvrement des recettes privé et la mise en place de programmes de recon- peut en règle générale être traité a posteriori dans le cas des opéra- teurs réguliers puisqu’il est facile de recouvrer les droits et taxes naissance des opérateurs commerciaux respectueux impayés après coup (en particulier si un système de caution a été des prescriptions douanières. Les entreprises jugées mis en place). Cependant, pour les importateurs qui se présentent à faible risque sont soumises à des contrôles moins pour la première fois ou que l’on connaît mal, il sera préférable de rigoureux et peuvent s’attendre à poursuivre leurs percevoir les droits et taxes avant de consentir la mainlevée. activités sans être inquiétées outre-mesure. Les entre- De même, s’il y a risque d’importation de marchandises interdites, prises qui bénéficient de ce statut sont plus souvent d’introduction de ravageurs ou de maladies ou d’attentat terroriste, autorisées à évaluer elles-mêmes les dettes qu’elles par exemple, une intervention immédiate sera généralement préfé- doivent acquitter et les exemptions auxquelles rable puisque la possibilité d’atténuer ce genre de risque après-coup elles ont droit ; la mainlevée est consentie avec un est mince. minimum de documentation ; les règles relatives à la préparation des rapports sont plus souples ; les frais de traitement des dossiers sont réduits et ces entre- prises bénéficient d’accords de paiements périodiques et de procédures simplifiées. Application de la réglementation Ce concept a été élargi ces récentes années pour Comme nous l’avons déjà mentionné, l’évaluation inclure non seulement la conformité aux prescriptions par les administrations douanières du degré de conformité peut conduire à l’un ou l’autre de deux douanières générales, mais également la conformité résultats : conformité ou non-conformité. Or, si aux normes de sécurité de la chaîne logistique. Les certaines personnes prises en défaut peuvent plaider entreprises qui répondent à ces critères sont commu- l’erreur commise en toute bonne foi, d’autres nément appelés « opérateurs économiques agréés » chercheront à commettre une fraude ou une autre (OEA), et certains accords bilatéraux disposent que le infraction délibérée. statut d’OEA est mutuellement reconnu par les parte- naires commerciaux. De tels accords de reconnais- Dans le pire des cas envisageables, c’est-à-dire pour sance mutuelle ont déjà été conclus entre le Canada ceux qui ont l’intention d’enfreindre ou de contourner et le Japon, entre la Corée et Singapour, et entre la la loi, les stratégies axées sur le service à la clientèle Nouvelle-Zélande et les États-Unis19. seront de peu d’effet et il faudra songer à imposer une forme quelconque de sanction. Les stratégies Voyageurs enregistrés On envisage la mise en place de tels programmes 19 On peut trouver un recueil de l’ensemble de ces fondés sur l’analyse des risques dans le contexte des programmes à l’adresse http://www.wcoomd.org/ contrôles de sécurité des passagers. Les passagers home_research_researchseries.htm jugés à faible risque seraient soumis à une inspection 20 La Fondation Reason a entrepris des recherches sur ce moins rigoureuse20 avant l’embarquement. type de programme. Voir http://reason.org/ Atténuation des risques recensés | 25 axées sur la dissuasion peuvent comprendre l’aver- Cependant, dans le cadre du processus de suivi et tissement officiel, les sanctions administratives, la d’examen, il importe de mesurer l’efficacité de tels dénonciation par le biais de l’établissement d’une contrôles afin de décider s’il y a lieu de les renforcer « liste de la honte », la suspension ou la révocation du ou de les compléter d’une manière ou d’une autre. permis, la poursuite pénale, l’imposition d’amendes Par ailleurs, il peut arriver que les contrôles en et l’emprisonnement. place soient jugés excessifs, et qu’ils mobilisent des ressources qui pourraient servir plus utilement au traitement d’autres sources de risques. Suivi et examen des risques Il convient en outre de noter que les stratégies de Les risques ne sont pas statiques ; ils évoluent au gestion de la conformité offrent elles-mêmes aux fil du temps. Ainsi, un risque jugé acceptable à un administrations douanières des moyens utiles de certain moment peut finir par être inacceptable pour reconnaissance des risques nouveaux et qu’elles toutes sortes de raisons et exiger l’application d’une devraient être considérées comme des instruments forme quelconque de traitement. De la même façon, très utiles de suivi et d’examen des risques et de l’effi- la pertinence des méthodes de traitement des risques cacité des méthodes de traitement en place. Dans ce peut elle aussi changer. C’est la raison pour laquelle contexte, on aura davantage tendance à choisir les le cadre de gestion des risques illustré à la figure 2 est entités qui présentent un risque élevé et les transac- un modèle itératif comportant un élément de suivi et tions ou entités qui n’ont par encore fait l’objet d’une d’examen. évaluation des risques en guise de cibles des inter- ventions et examens réglementaires de plus haut Par exemple, dans le cadre de l’analyse des risques, niveau. L’évaluation de la conformité nouvelle ou nous avons souligné qu’il est possible qu’une organi- révisée qui en résultera pourrait donner à conclure sation ait déjà mis en place les contrôles qui lui à un niveau de risque plus élevé ou plus faible que permettent de traiter certains des risques recensés. celui déterminé antérieurement. 6 Facilitateurs et entraves Dans la présente section, nous nous penchons sur administrations douanières ne parviennent pas certains enjeux réglementaires, organisationnels et à coordonner leurs activités et à gérer collecti- administratifs supplémentaires qui pourraient avoir vement l’ensemble des politiques, processus et une incidence sur la mise en œuvre et la pérennité pratiques de gestion des frontières, l’efficacité d’un régime de gestion du respect de la loi basée de tout programme de gestion du respect de la sur les risques. Nous examinons notamment la loi basée sur les risques s’en trouvera sensi- gamme d’instruments et d’outils de réforme et les blement amoindrie. Nous examinons en détail guides de pratiques optimales utiles pour appuyer ci-dessous cette question de gestion partici- le processus de mise en œuvre. pative des frontières. Communication Enjeux organisationnels La communication et les consultations efficaces avec L’aptitude organisationnelle à assurer une gestion les parties prenantes encourageront le partage des efficace du respect de la loi (basée ou non sur les informations, de l’expérience et des idées chez ceux risques) constitue un aspect critique de l’aptitude qui risquent le plus d’être touchés par les nouvelles d’une organisation à s’acquitter efficacement de son politiques et procédures. Elles permettront par ailleurs rôle et de ses responsabilités. Lorsque nous nous d’élargir les perspectives du processus de gestion des sommes penchés sur le recensement des risques, risques, ce qui, en retour, facilitera l’évaluation des nous avons souligné la nécessité pour les entreprises incidences possibles de propositions particulières en et les particuliers de bien comprendre leurs droits et mettant en lumière les possibles obstacles et en déter- responsabilités et d’avoir accès à des informations qui minant les méthodes les plus appropriées de mise en leur permettent d’agir avec assurance et clarté dans œuvre et d’exécution. leurs rapports avec les administrations douanières. Il importe en outre de faire en sorte que les membres du Les intérêts privés et les autres organismes publics personnel des administrations douanières possèdent forment deux groupes particulièrement importants de les aptitudes, connaissances et compétences néces- parties prenantes. saires pour s’acquitter efficacement de leurs tâches. Toute lacune dans ces domaines pourrait en fait être • Il importe de bien comprendre les intérêts considérée comme un risque pour la réalisation des du secteur privé et d’entretenir des rapports objectifs de l’organisation, et la mise en œuvre d’ini- réguliers avec les éléments de ce secteur qui tiatives pertinentes de renforcement des capacités risquent d’être touchés par certains aspects serait alors vue comme une méthode appropriée de des initiatives et de leur mise en œuvre. Il traitement de ce risque. importe donc de mobiliser activement la communauté des affaires et de tenir compte Le soutien politique, les responsabilités et obligations de ses points de vue. de rendre compte, les processus et procédures, les ressources financières ou autres, l’infrastructure et la • La nécessité de mobiliser d’autres organismes technologie comptent parmi les autres enjeux organi- publics, y compris ceux qui partagent des sationnels qui peuvent influer sur la réalisation des responsabilités de gestion des frontières, fait objectifs. l’objet d’un examen assez détaillé dans les sections de l’ouvrage « Border Management Il importe de souligner que la gestion des risques Modernization » qui abordent les questions ne devrait pas être séparée des autres aspects des de gestion participative des frontières. Si les processus de gestion de l’organisation, mais devrait 28 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières plutôt faire partie intégrante du cadre de gestion de concernant la prise en charge des responsabilités et la l’organisation. Il importe donc d’intégrer la gestion direction des actions liées à la gestion des frontières. des risques dans les pratiques de gestion au quotidien, L’annexe ci-jointe propose un recueil de tels instru- et en particulier dans le processus de planification ments utiles, y compris ceux recensés dans « Border stratégique. Cet aspect est examiné plus en détail dans Management Modernization ». l’ouvrage « Border Management Modernization ». Collaboration Instruments internationaux Les administrations douanières qui choisissent de Les instruments internationaux constituent une mettre en œuvre des stratégies de gestion du respect source précieuse de conseils stratégiques et d’infor- de la loi basée sur les risques en vase clos peuvent mations techniques qui peuvent aider les adminis- certes apporter des améliorations tangibles à leur trations douanières à mettre en œuvre et à maintenir propre échelle, mais pour obtenir des résultats une démarche efficace de gestion du respect de la optimaux à l’échelle nationale, elles auront besoin loi basée sur les risques. Ces instruments vont des de coordonner leurs actions et de collaborer avec exigences juridiquement contraignantes comme celles incorporées dans les accords de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à tout un éventail de bonnes pratiques et de directives. Ils comprennent : Gestion participative de la frontière • les conventions qui ont force obligatoire de droit au Cambodge pour les parties contractantes — par exemple les Avant 2008, onze organismes publics étaient responsables, au accords de l’OMC et la Convention de l’Orga- Cambodge, du dédouanement des envois internationaux, les cinq nisation maritime internationale (OMI) sur la principaux étant les services douaniers, les ministères de la Santé, facilitation du trafic maritime international ; de l’Agriculture et de l’Industrie, et Camcontrol. Le dédouanement • les recommandations — par exemple, celles était caractérisé par des contrôles inefficaces, les chevauchements publiées par la Commission économique des et les doubles emplois, les contrôles systématiques, l’intervention Nations Unies pour l’Europe (CENUE) — qui non coordonnée de diverses administrations indépendantes, et ne sont pas juridiquement contraignantes, mais l’absence de tout signe d’une gestion du respect de la loi basée sur qui suggèrent des moyens pratiques d’assurer les risques. Les coûts de ce système, les retards qu’il occasionnait et l’harmonisation et l’uniformité des pratiques la complexité de la réglementation entravaient considérablement internationales ; les échanges et les investissements. • les directives — elles aussi non contraignantes Dans un effort mené pour corriger cette situation, les autorités — qui fournissent des informations sur des cambodgiennes ont engagé un processus de réformes axées sur questions techniques particulières comme la conception et la mise en œuvre d’un système d’inspection du l’étude de l’Organisation mondiale des douanes fret fondé sur l’analyse des risques au sein de chacun des services (OMD) sur le temps pris pour l’obtention de responsables de la gestion de la frontière. La stratégie révisée la mainlevée et les directives de l’audit de la prévoit notamment la coordination par les services de diverses Banque mondiale sur la facilitation des échanges activités — par exemple, accords d’inspections conjointes, interven- et du transport ; tions fondées sur les risques recensés, et facilitation du traitement • les compilations d’études de cas et de pratiques des envois légitimes à faible risque. optimales portant sur des questions techniques particulières — par exemple, les études de cas Cette stratégie a notamment conduit à l’adoption d’amendements sur la création d’un guichet unique réalisées par législatifs habilitants, à la mise sur pied d’unités de gestion des le Centre de la facilitation du commerce et des risques, à l’élaboration et à la mise en œuvre de nouvelles procé- transactions électroniques des Nations Unies dures opérationnelles, à la conclusion d’accords de niveau de service (CEFACT-ONU). entre les divers services (en vertu desquels un service donné peut s’acquitter de certaines tâches pour le compte d’un autre service), Comme les instruments internationaux sont en règle à l’élaboration conjointe de critères de risque et de sélectivité, à la générale adoptés et ratifiés au niveau politique, mise en place d’un système de TI interinstitutionnel (intégrant les ils peuvent constituer des facteurs de changement profils de risque approuvés) et à la création d’une vaste gamme convaincants et des outils utiles de gestion des de services de formation accessibles à l’ensemble des services conflits qui peuvent survenir entre divers organismes pertinents. Facilitateurs et entraves | 29 l’ensemble des autres administrations douanières. Les diverses formes de collaboration interinstitution- Une véritable vision interinstitutionnelle permettra nelle varient largement par leur portée et peuvent de créer un point unique d’accès pour le processus inclure diverses activités, telles que le partage des de dédouanement (un guichet unique), alors qu’un informations, l’harmonisation des exigences en système ou chaque service travaille en isolation matière de collecte des données et de codage, la obligera la communauté commerciale à composer délégation de pouvoirs, les opérations conjointes avec une multitude de points d’accès pour se et l’utilisation d’un guichet unique aux fins des conformer à l’ensemble des exigences réglementaires. processus de dédouanement. Cette collaboration permet également le partage de données et d’informa- tions qui peuvent servir à étayer les décisions fondées Les processus de dédouanement qui nécessitent sur l’analyse des risques. l’intervention non coordonnée de diverses instances de réglementation dans de multiples étapes de vérifi- L’application de ce concept favorise également cation et d’approbation peuvent entraîner des retards l’harmonisation transfrontalière qui reconnaît que inutiles, la perte de débouchés commerciaux et des les processus d’exportation et d’importation sont coûts accrus pour la communauté commerciale inter- directement liés et que l’intégration croissante de nationale. Les efforts de gestion de la conformité la chaîne logistique ouvre la voie à l’amélioration risquent par ailleurs d’être sérieusement entravés de l’efficacité par le biais d’une harmonisation dans un cadre défavorable au partage des données conduisant à l’intégration des procédures et de l’information qui pourraient autrement servir d’importation et d’exportation dans un seul et même à l’élaboration de profils de risque plus complets et processus de dédouanement. L’ouvrage « Border plus exacts des cargaisons, des entreprises et des Management Modernization » fournit de plus amples particuliers. informations sur cette question. 7 Guide de démarrage Nous examinons brièvement dans la présente section L’étape suivante consiste à déterminer la forme que certaines techniques qui faciliteront la mise en œuvre prendra la future stratégie de gestion du respect de et le maintien d’un système de gestion du respect la loi et à définir les étapes à franchir pour arriver au de la loi basée sur les risques. Nous nous penchons résultat souhaité. On appelle cette étape l’analyse des en particulier sur les moyens d’évaluer la démarche lacunes. utilisée par une organisation pour assurer la gestion de la conformité, ses capacités existantes et ses L’analyse de la situation et l’analyse des lacunes priorités en matière de réforme. sont des opérations qui demandent temps et efforts. Il importe que l’organisation leur consacre des La mise en place d’un régime de gestion du respect de ressources suffisantes, et qu’un groupe de personnes la loi basée sur les risques n’est pas une mince tâche, compétentes et expérimentées soit chargé de les et les administrations douanières qui s’engagent dans mener à bien. Il conviendra idéalement de demander ce processus risquent de rencontrer une certaine à des personnes possédant les connaissances résistance au changement. Il sera donc nécessaire techniques requises pour s’acquitter de l’éventail d’entretenir des liens efficaces de communication des responsabilités qui incombent à l’organisation et de consultation tout au long du processus afin de d’étudier le présent guide du point de vue de leur pouvoir compter sur le soutien et l’engagement des domaine particulier de compétence et d’établir des principales parties prenantes. comparaisons avec les pratiques et procédures en vigueur. On ne saurait cependant s’attendre à ce que Il conviendra au départ d’établir une comparaison ces experts techniques travaillent en autonomie, et il entre le modus operandi actuel de l’organisation et sera donc souhaitable de mettre en place une équipe les principes et procédures qui sont examinés dans de direction qui sera chargée de surveiller et de le présent guide de référence et de mise en œuvre. coordonner leurs activités. L’exercice a pour but de déterminer les aspects de la gestion du respect de la loi basée sur les risques qui Un des moyens envisageables d’introduire la gestion sont déjà appliqués par l’organisation, et ceux sur du respect de la loi basée sur les risques consiste à lesquels il conviendrait de se pencher. Nous appel- procéder par étapes en déterminant d’abord certains lerons ce processus une analyse de la situation. des aspects du régime proposé qui peuvent être adoptés à court terme et moyennant un coût relati- vement faible. Par exemple, il peut arriver que le cadre réglementaire existant autorise l’introduction de Figure 5.  Analyse de la situation et des lacunes processus fondés sur l’analyse des risques sans qu’il soit nécessaire de procéder à une réforme législative. Régime Principes et De même, certaines activités fondées sur l’analyse des de gestion Comment nous pratiques Analyse de de la conformité comparons-nous ? proposés dans risques pourront être effectuées « manuellement », en la situation en vigueur le présent guide attendant l’adoption de technologies de l’information et des communications (TIC). Régime de gestion Comment Régime de gestion de la conformité changeons-nous ? de la conformité Analyse en vigueur proposé des lacunes Source : Inspiré de la norme australienne et néo-zélandaise de gestion des risques (AZ/NZS 4360: 2004) qui sert de référence à la norme ISO 31000. 32 | Gestion du respect de la loi basée sur les risques : Guide des administrations douanières L’absence de technologie n’est pas un obstacle à la gestion des risques Les douanes du Sri Lanka ont calculé les avantages que pourraient procurer à l’État et à l’industrie le contrôle et le dédouanement des envois express par avion avant leur arrivée. Elles ont déterminé que le moyen le plus efficace d’instaurer un tel régime serait de mettre en place un système de dédouanement automatisé. Cependant, il n’était pas possible d’envisager la mise en œuvre des mesures d’automatisation souhaitées dans un avenir prévisible. L’organisation a néanmoins décidé de procéder à la mise en place de procédures de contrôle préalable avant l’installation de systèmes automatisés en adoptant des procédures manuelles révisées : examen manuel de la documentation ; inspections sélectives ; installation d’appareils à rayons X pour réduire les risques de descriptions erronées. Les manifestes sont transmis manuellement aux douanes avant l’arrivée des avions, accompagnés de copies des connaissements et des factures. Ces documents sont examinés manuellement par les douanes aux fins de la détection d’envois à haut risque (définis à partir des renseignements glanés, des tendances émergentes, des antécédents de l’expéditeur et du destinataire, etc.). Les envois jugés à haut risque sont identifiés aux fins d’un examen approfondi à l’arrivée, en même temps que certaines marchandises taxables ou réglementées qui sont retenues en attendant leur dédoua- nement officiel. Tous les autres envois (à faible risque) sont prêts à livrer dès leur arrivée. Source : De Wolf et Sokol (2004) Références | 33 8 Références De Wolf, Luc et Sokol, Jose B. 2004. Customs OMD (Organisation mondiale des douanes). 2011. Modernization Handbook. Washington : Banque Recueil de l’OMD sur la gestion des risques en mondiale. matière douanière, Bruxelles : OMD. ISO 2009. ISO 31000:2009, Management du risque — Widdowson, David. 2003. Intervention by Exception: Principes et lignes directrices, Genève : A Study of the use of Risk Management by Organisation internationale de normalisation. Customs Authorities in the International Trading Environment, thèse de doctorat, McLinden, Gerard ; Fanta, Enrique ; Widdowson, Canberra : University of Canberra. David et Doyle, Tom. 2010. Border Management Modernization, Washington : Banque mondiale. Widdowson, David. 2010. Gestion des risques : les passages obligés, OMD Actualités no 62 : 25–27, Polner, Mariya. 2011. Document de recherche de l’OMD juin 2010. no 14 : Recueil des programmes d’opérateurs économiques agréés, édition 2011, Bruxelles : Organisation mondiale des douanes. BANQUE MONDIALE 1818 H Street, NW Washington, DC 20433