93690 v2 Perspectives économiques mondiales : Résumé analytique Disposer d’une marge de manœuvre budgétaire et l’utiliser Janvier 2015 En 2014, la croissance mondiale a été plus faible que prévu — illustration supplémentaire de la série de résultats décevants enregistrés depuis quelques années. La croissance ne s’est que légèrement accélérée en 2014 pour atteindre un taux de 2,6 % contre 2,5 % en 2013. Derrière ces chiffres globaux se dissimulent toutefois des divergences de plus en plus marquées au sein des grandes économies. Tandis que l’activité gagnait de la vitesse aux États-Unis et au Royaume-Uni, parallèlement à l’assainissement du marché du travail et à la poursuite de politiques monétaires extrêmement accommodantes, la reprise piétinait dans la zone euro et au Japon en raison des effets persistants de la crise financière conjugués aux blocages structurels. Pour sa part, la Chine traverse une phase de ralentissement soigneusement gérée. Les taux de croissance insatisfaisants observés dans d’autres pays en développement en 2014 sont dus à la faiblesse de la demande extérieure, mais aussi au durcissement des politiques intérieures, au climat d’incertitude politique et aux limites imposées par l’offre. Les perspectives mondiales sont influencées par plusieurs grands facteurs : la faiblesse des cours des produits de base ; la persistance de taux d’intérêt peu élevés, mais aussi des divergences de plus en plus grandes en matière de politique monétaire dans les grandes économies ; le manque de dynamisme des échanges commerciaux à l’échelle mondiale. La chute des cours pétroliers amorcée au milieu de l’année 2014 soutiendra l’activité mondiale et contribuera à compenser certaines entraves à la croissance dans les pays en développement importateurs de pétrole. En même temps, l’effondrement du prix du pétrole affaiblira les perspectives de croissance des pays exportateurs de pétrole, avec les importantes conséquences que cela suppose au niveau régional. Selon les prévisions, la croissance mondiale devrait se renforcer légèrement pour atteindre 3 % en 2015, puis un taux moyen d’environ 3,3 % en 2017. Il est probable que la croissance des pays à revenu élevé s’établira à 2,2 % en 2015-17, contre 1,7 % en 2014, grâce au redressement progressif du marché du travail, au reflux des mesures d’assainissement des finances publiques et au niveau encore bas des coûts de financement. Dans les pays en développement — à mesure que s’atténueront les obstacles intérieurs qui ont freiné la croissance en 2014 et que la reprise économique se raffermira lentement dans les pays à revenu élevé —, la croissance devrait s’accélérer progressivement pour passer de 4,4 % en 2014 à 4,8 % en 2015 et 5,4 % en 2017. La faiblesse des cours pétroliers contribuera à faire diverger les perspectives des pays exportateurs et importateurs de pétrole, notamment en 2015. Les risques qui pèsent sur cette molle reprise de l’économie mondiale sont importants et penchent dans le sens d’une détérioration. L’instabilité des marchés financiers, aggravée par le risque d’une dégradation soudaine des conditions de liquidité, pourrait alourdir fortement les charges d’emprunt des pays en développement — perspective fâcheuse après plusieurs années d’émissions massives de ces pays sur les marchés des capitaux. Une aggravation des tensions géopolitiques, des phases d’instabilité sur les marchés des produits de base ou l’apparition de tensions financières sur tel ou tel grand marché émergent pourraient entraîner une réévaluation des placements à risques. Si la zone euro ou le Japon entraient dans une période prolongée de stagnation ou de déflation, les échanges commerciaux internationaux pourraient s’affaiblir davantage. Même s’il s’agit d’une hypothèse peu probable, compte tenu des importants dispositifs d’amortissement mis en place par la Chine, une chute plus prononcée de la croissance risquerait d’entraîner une correction désordonnée des facteurs de vulnérabilité financière et serait lourde de conséquences pour l’économie mondiale. Les forces qui gouvernent les perspectives mondiales et les risques connexes présentent d’importants défis pour les responsables de l’action publique . Dans les pays à revenu élevé, la fragilité de la reprise milite en faveur de la poursuite de politiques monétaires accommodantes et de politiques budgétaires souples, à même de soutenir la croissance, mais accompagnées de programmes concrets de rééquilibrage et de réformes structurelles à moyen terme. Dans les pays en développement, le durcissement des conditions financières à l’échelle mondiale pourrait réduire les flux de capitaux et déprécier davantage les monnaies. Certes, ces dépréciations pourraient stimuler les exportations et faciliter l’ajustement des comptes courants, mais elles risqueraient aussi d’affaiblir les comptes de patrimoine ainsi que les effets désinflationnistes du faible niveau des cours des produits de base. Les banques centrales de certains pays en développement devront donc peut-être mettre en balance les mesures de politique monétaire visant à soutenir la croissance et les dispositifs destinés à stabiliser l’inflation et la monnaie ou à renforcer la stabilité du système financier. Il est possible aussi d’envisager des mesures de relance par voie budgétaire en cas de forte baisse de l’activité. En pratique, toutefois, le recours à la politique budgétaire comme action anticyclique peut être entravé par l’insuffisance des marges de manœuvre budgétaire, qui réduit les possibilités de relance budgétaire ainsi que l’efficacité de ce type de mesures. Les pays à revenu élevé et les pays en développement doivent mettre en œuvre des réformes structurelles d’envergure, portant notamment sur l’amélioration des institutions et de s infrastructures publiques, afin de promouvoir la croissance et la création d’emplois. Une telle démarche Perspectives économiques mondiales : Résumé analytique Disposer d’une marge de manœuvre budgétaire et l’utiliser Janvier 2015 contribuera à porter les taux de croissance aux niveaux nécessaires pour atteindre les objectifs de réduction de la pauvreté à l’horizon 2030. La présente édition des Perspectives économiques mondiales comprend aussi quatre essais consacrés à l’analyse des principaux défis et possibilités qui se présentent actuellement aux pays en développement : la politique budgétaire comme outil anticyclique ; les causes et conséquences du faible prix du pétrole ; l’incapacité des échanges commerciaux, du fait de leur manque de dynamisme, à stimuler la croissance ; les envois de fonds comme moyen de stabiliser la consommation durant les périodes d’arrêts brutaux de flux de capitaux. L’espace budgétaire La politique budgétaire pourrait-elle soutenir efficacement l’activité si le besoin s’en fait sentir ? Au cours des 30 dernières années, la politique budgétaire des pays en développement a acquis un caractère de plus en plus anticyclique. La vaste marge de manœuvre budgétaire constituée avant la crise financière mondiale n’a pas seulement permis aux pays en développement de prendre des mesures de relance par voie budgétaire pendant la crise : elle a aussi renforcé l’impact de la relance sur la croissance, car les multiplicateurs budgétaires sont généralement plus puissants dans les pays dotés d’une marge de manœuvre budgétaire importante . Dans de nombreux pays en développement, toutefois, les soldes budgétaires n’ont pas encore été ramenés aux niveaux nécessaires pour stabiliser la dette. Cette situation a probablement affaibli l’efficacité des politiques budgétaires et réduit les multiplicateurs budgétaires d’environ un tiers par rapport au x niveaux qui prévalaient avant la crise. À moyen terme, de nombreux pays devront rétablir leur capacité d’amortissement budgétaire ainsi que la viabilité de leurs finances publiques. La rapidité avec laquelle il faudra reconstituer l’espace budgétaire dépendra de divers facteurs propres aux pays concernés. Parmi ces facteurs figurent les conditions cycliques ainsi que les contraintes pesant sur la politique monétaire, notamment l’augmentation de la dette du secteur privé après la crise ou les taux d’inflation encore élevés de plusieurs pays en développement. Des mécanismes institutionnels crédibles et bien conçus — règles budgétaires, fonds de stabilisation, cadres de dépenses à moyen terme — peuvent contribuer à reconstituer les marges de manœuvre budgétaire et à renforcer l’impact de l’action publique, permettant ainsi la mise en œuvre de mesures de stimulation budgétaire ainsi que l’accroissement de l’ampleur et de l’efficacité des programmes de réduction de la pauvreté. Faiblesse des échanges commerciaux Quelles sont les causes et les conséquences de la récente baisse du prix du pétrole ? Après s’être stabilisés pendant quatre ans aux alentours de 105 dollars le baril, les cours pétroliers ont fortement baissé à partir de juin 2014. Divers facteurs ont contribué à ce phénomène : plusieurs années de hausses imprévues de l’offre de pétrole et de baisses inattendues de la demande ; l’atténuation de certains risques géopolitiques qui menaçaient la production ; la modification des objectifs stratégiques de l’OPEP ; et la hausse du dollar des États-Unis. Il est difficile de déterminer avec précision l’influence respective de ces divers facteurs, mais ceux qui sont liés à l’offre semblent avoir joué un rôle prédominant. Si elle se maintient, la faiblesse des cours du pétrole contribuera à stimuler la croissance mondiale et entraînera d’importants rééquilibrages des revenus réels au profit des pays importateurs de pétrole et au détriment des pays exportateurs. Dans les pays importateurs, le faible niveau des prix pétroliers stimulera l’activité et réduira les pressions inflationnistes, extérieures et budgétaires. En revanche, les pays exportateurs seront pénalisés sous la forme d’un affaiblissement de leur situation budgétaire et de leur position extérieure et d’un ralentissement de leur activité économique. Quoi qu’il en soit, la faiblesse des cours pétroliers est une excellente occasion de modifier la fiscalité des produits énergétiques ainsi que les subventions sur les carburants — considérables dans plusieurs pays en développement. Comment expliquer la faiblesse du commerce mondial durant les années qui ont suivi la crise ? À l’échelle planétaire, les échanges commerciaux ont progressé de moins de 4 % par an pendant la période 2012-14, chiffre bien inférieur au taux de croissance annuel moyen de 7 % enregistré avant la crise. Si les échanges avaient continué de progresser selon leur tendance antérieure, ils seraient supérieurs d’environ 20 % à leur niveau de 2014. Le ralentissement du commerce mondial s’explique à la fois par des facteurs cycliques, notamment la faiblesse persistante des importations des pays à revenu élevé, et des facteurs structurels, tels que l’évolution de la relation entre commerce et revenu : les échanges internationaux sont devenus moins sensibles à l’évolution du revenu mondial en raison du ralentissement du développement des chaînes de valeur internationales et d’une réorientation de la demande vers des produits à moindre intensité d’importations. Envois de fonds Les envois de fonds peuvent-ils stabiliser la consommation ? Selon les prévisions, le montant des envois de fonds vers les pays en développement continuera d’augmenter, alors que les apports de capitaux privés pourraient ralentir lorsque les taux d’intérêt mondiaux commenceront à augmenter ou si la croissance reste atone dans les pays en développement. Les transferts de fonds sont généralement une source de financement extérieur plus stable que d’autres types de flux privés, car moins liée aux cycles intérieurs. Ainsi, dans le passé, Perspectives économiques mondiales : Résumé analytique Disposer d’une marge de manœuvre budgétaire et l’utiliser Janvier 2015 les rapatriements de fonds ont augmenté de 7 % alors que des arrêts brutaux de flux de capitaux faisaient chuter de 25 % en moyenne ces flux vers les pays en développement. En raison de cette tendance, les envois de fonds vers les pays en développement qui en sont très dépendants peuvent contribuer à atténuer le manque de liquidités, élargir l’accès aux services financiers et lisser la consommation des ménages, notamment durant les périodes de tensions financières. Table 1.1 Les perspectives mondiales en résumé (changement en pourcentage depuis l'année précédente) 2012 2013 2014e 2015f 2016f 2017f 1 Croissance du PIB réel Monde 2.4 2.5 2.6 3.0 3.3 3.2 Pays à revenu élevé 1.4 1.4 1.8 2.2 2.4 2.2 Zone Euro -0.7 -0.4 0.8 1.1 1.6 1.6 Japon 1.5 1.5 0.2 1.2 1.6 1.2 États-Unis 2.3 2.2 2.4 3.2 3.0 2.4 Pays en Développement 4.8 4.9 4.4 4.8 5.3 5.4 Asie de l'Est et Pacifique 7.4 7.2 6.9 6.7 6.7 6.7 Europe et Asie centrale 1.9 3.7 2.4 3.0 3.6 4.0 Amérique latine et Caraïbes 2.6 2.5 0.8 1.7 2.9 3.3 Moyen-Orient et Afrique du Nord 1.4 0.5 1.2 2.5 3.0 3.5 Asie du Sud 5.0 4.9 5.5 6.1 6.6 6.8 Afrique subsaharienne 4.0 4.2 4.5 4.6 4.9 5.1 Pour mémoire Mondiale (2010 PPA poids) 3.1 3.2 3.3 3.6 4.0 4.0 2 Volume de Commerce Mondial (GNFS) 2.8 3.4 4.0 4.5 4.8 4.8 Prix des Marchandises (USD) Marchandises non-pétrolières -8.6 -7.2 -3.6 -1.1 0.2 0.3 3 Prix du pétrole 1.0 -0.9 -7.7 -31.9 4.9 4.7 Flux de capitaux internationaux (% of PIB) Pays en Développement 5.0 5.9 5.8 5.5 5.3 Asie de l'Est et Pacifique 4.6 6.4 6.3 5.9 5.5 Europe et Asie centrale 8.0 7.4 5.4 6.0 6.2 Amérique latine et Caraïbes 5.4 5.9 6.2 5.9 5.7 Moyen-Orient et Afrique du Nord 1.8 2.3 1.8 1.8 1.9 Asie du Sud 5.7 4.6 5.4 5.3 5.3 Afrique subsaharienne 5.6 5.2 4.5 4.7 4.8 Source: Banque Mondiale. Remarques: PPA = Parité de pouvoir d'achat e = estimate; f = forecast. 1. Taux de croissance des agrégats calculés à l'aide dollars constants de 2010 poids du PIB. 2. Volume du commerce mondial des biens et services 3. Moyenne simple de Dubaï, du Brent et du West Texas Intermediate.