DJIBOUTI Revue du capital humain 2 DJIBOUTI | Revue du capital humain DJIBOUTI Revue du capital humain © 2024 Banque internationale pour la reconstruction et le développement / Banque mondiale 1818 H Street NW, Washington, DC 20433 Téléphone : 202-473-1000; Internet: www.worldbank.org Ce rapport est le produit du personnel de la Banque mondiale et de contributions externes. Les résultats, interprétations et conclusions exprimés dans ce rapport ne reflètent pas nécessairement les points de vue de la Banque mondiale, de son Conseil des administrateurs ou des gouvernements qu'ils représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l'exactitude, l'exhaustivité ou l'actualité des données incluses dans ce rapport et n'assume aucune responsabilité en cas d'erreurs, d'omissions ou de divergences dans les informations, ni aucune responsabilité quant à l'utilisation ou à la non-utilisation des informations, des méthodes, des processus ou des conclusions présentées. Cet ouvrage a été publié à l'origine par la Banque mondiale en anglais sous le titre de Djibouti Human Capital Review en 2024. En cas de divergence, la langue originale prévaudra. Les frontières, couleurs, dénominations et autres informations figurant sur les cartes de cet ouvrage n'impliquent aucun jugement de la part de la Banque mondiale quant au statut juridique d'un territoire, ni l'approbation ou l'acceptation de ces frontières. Rien dans les présentes ne peut constituer ou être interprété ou considéré comme une limitation ou une renonciation aux privilèges et immunités de la Banque mondiale, qui sont tous spécifiquement réservés. Droits et permissions Le contenu de ce rapport est soumis à des droits d'auteur. La Banque mondiale encourageant la diffusion de ses connaissances, ce rapport peut être reproduit, en tout ou en partie, à des fins non commerciales, à condition que l'entière attribution de cet ouvrage soit indiquée. Toute question concernant les droits et les licences, y compris les droits subsidiaires, doit être adressée à World Bank Publications, The World Bank Group, 1818 H Street NW, Washington, DC 20433, USA ; fax : 202-522-2625 ; e-mail : pubrights@worldbank.org Conception : Jihane El Khoury Roederer ii TABLE DES MATIÈRES ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES VII REMERCIEMENTS IX RÉSUMÉ XI I. CONTEXTE NATIONAL XI II. SITUATION DES PRINCIPAUX RÉSULTATS EN MATIÈRE DE CAPITAL HUMAIN À DJIBOUTI XIII III. INDICE DU CAPITAL HUMAIN DE DJIBOUTI XV CHAPITRE 1 : INTRODUCTION 1 I. CONTEXTE NATIONAL 1 II. PRINCIPAUX GOULETS D’ÉTRANGLEMENT DES RÉSULTATS EN MATIÈRE DE CAPITAL HUMAIN 5 III. ORGANISATION DU RAPPORT 9 CHAPITRE 2 : L’INDICE DE CAPITAL HUMAIN 12 I. COMPOSANTE 1 : SURVIE DE L’ENFANT 13 II. COMPOSANTE 2 : SCOLARISATION 16 III. COMPOSANTE 3 : SANTÉ 19 IV. IMPACT DE LA COVID-19 SUR LE CAPITAL HUMAIN À DJIBOUTI 20 CHAPITRE 3 : DÉVELOPPEMENT DE LA PETITE ENFANCE 23 I. IMPORTANCE MONDIALE DU DPE DANS L’ACCUMULATION DU CAPITAL HUMAIN 23 II. SITUATION DU DPE À DJIBOUTI 25 III. CONTRAINTES SUR LE DPE 35 IV. RECOMMANDATIONS SUR LA MANIÈRE D’ÉTENDRE UN DPE DE BONNE QUALITÉ 36 CHAPITRE 4 : L'ADOLESCENCE ET LA JEUNESSE 39 I. L'ADOLESCENCE : UNE PHASE CLÉ DE LA TRANSITION DU CYCLE DE VIE 39 II. TRANSITIONS DES ADOLESCENTS 41 III. TRANSITIONS VERS LE MARIAGE ET LA REPRODUCTION 44 IV. EFFETS D’UNE MAUVAISE SANTÉ MATERNELLE SUR LES ADOLESCENTES 46 V. RECOMMANDATIONS POLITIQUES 53 CHAPITRE 5 : LES ANNÉES DE TRAVAIL : LES MARCHÉS DU TRAVAIL À DJIBOUTI 55 I. RÉSULTATS EN MATIÈRE D’EMPLOI 55 II. SALAIRES 59 III. QU’EST-CE QUI POURRAIT LIMITER L’OFFRE DE TRAVAIL ? 63 IV. DEMANDE DE MAIN-D’ŒUVRE 67 V. OFFRE DE MAIN-D’ŒUVRE 70 VI. LA VOIE À SUIVRE 73 iii CHAPITRE 6 : CONCLUSIONS 75 RÉFÉRENCES 81 ANNEXE A : CALCUL DE L’INDICE DU CAPITAL HUMAIN 85 I. OBJECTIFS ET RAISON D’ÊTRE DE L’ICH 85 II. LES COMPOSANTES 86 III. AGRÉGATION 92 ANNEXE B : CARTOGRAPHIE DES DONNÉES 96 I. FEUILLE DE ROUTE POUR DES MISES À JOUR RÉGULIÈRES DE L’ICH 96 II. INDICATEURS COMPLÉMENTAIRES DE L’ICH 96 III. BASES DE DONNÉES UTILISÉES POUR L’EXAMEN DU CAPITAL HUMAIN 97 ENCADRÉS ENCADRÉ 1 : Réformes de l’éducation 18 ENCADRÉ 2 : Évolution du secteur de la protection sociale 34 ENCADRÉ 3 : L'engagement du Maroc à investir dans la petite enfance pour développer le capital humain 38 ENCADRÉ 4 : Impact des mutilations génitales féminines sur la vie des filles et des femmes 46 ENCADRÉ 5 : Projet d’autonomisation des femmes et de dividende démographique au Sahel 52 FIGURES FIGURE ES1. Indice de capital humain : Composantes de l’indice de capital humain xvi FIGURE 2. Structure institutionnelle des efforts de Djibouti en matière de capital humain 4 FIGURE 3. Effets cumulatifs des investissements en capital humain 5 FIGURE 4. Taux de dépendance par âge à Djibouti 10 FIGURE 5. Comparaison de l’indice de capital humain (ICH) simulé de Djibouti 13 FIGURE 6. Comparaison de la mortalité des moins de 5 ans 14 FIGURE 7. Comparaisons entre pays du taux de mortalité maternelle 15 FIGURE 8. Inscription à l’école en fonction de l’état de santé 16 FIGURE 9. Accumulation de capital humain tout au long du cycle de vie et effets de la COVID-19 22 FIGURE 10. Développement du cerveau humain 24 FIGURE 11. Plateformes de prestation de services de DPE 24 FIGURE 12. Taux de mortalité infantile 26 iv FIGURE 13. Environnement favorable au développement de la petite enfance à Djibouti 27 FIGURE 14. Soins attentifs pour le développement de la petite enfance 28 FIGURE 15. Taux de vaccination : Diphtérie, tétanos et coqueluche 29 FIGURE 16. Principaux problèmes de santé des enfants de moins de 5 ans à Djibouti 30 FIGURE 17. Cartographie de l’éducation préscolaire, 3 à 6 ans 32 FIGURE 18. Taux de scolarisation en fonction de l'âge, du sexe, de la pauvreté et de la situation urbaine ou rurale 42 FIGURE 19. Scolarité et participation à la vie active selon l’âge et le sexe 43 FIGURE 20. Emploi selon le secteur et le sexe 44 FIGURE 21. Âge à la première naissance en fonction de la richesse et de la situation urbaine ou rurale 45 FIGURE 22. Principales causes d’années de vie ajustées de l’incapacité chez les femmes et les filles 49 FIGURE 23. Soins à l’accouchement selon le quintile de richesse 50 FIGURE 24. Prévalence des problèmes de santé en fonction de la richesse, de la situation urbaine ou rurale et de la distance par rapport au centre de soins de santé le plus proche 51 FIGURE 25. Chômage des jeunes dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord 56 FIGURE 26. Cohortes d’âge pour l’emploi et sexe 57 FIGURE 27. Niveau d’éducation selon le type d’emploi 58 FIGURE 28. Masse salariale du secteur public au Moyen-Orient et en Asie centrale, 2005-2016 63 FIGURE 29. Envois de fonds avec comparateurs 64 FIGURE 30. Comparateurs de l’indice de l’emploi des travailleurs 66 FIGURE 31. Composition de la croissance 68 FIGURE 32. Productivité du travail Estimations 2016 69 FIGURE 33. Obstacles à la réussite identifiés par les entreprises 71 FIGURE 34. Actions et interventions prioritaires pour l’amélioration du capital humain à Djibouti 78 TABLEAUX TABLEAU ES1. Indice de capital humain simulé pour Djibouti xvii TABLEAU ES2. Indice de capital humain simulé de Djibouti avec les comparateurs xviii TABLEAU 3. Accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène en milieu urbain et rural 7 TABLEAU 4. Impact des principales interventions en matière de développement de la petite enfance 25 TABLEAU 5. Accès aux services et résultats selon le quintile 26 TABLEAU 6. Résultats nutritionnels chez les enfants de moins de 5 ans 31 TABLEAU 7. Causes des années de vie corrigées de l’incapacité chez les enfants de moins de 5 ans 49 TABLEAU 8. Emploi à Djibouti et dans les pays à faible revenu 56 v TABLEAU 9. Logarithme moyen de la différence de salaire entre le secteur privé (formel) et le secteur public 59 TABLEAU 10. Taux de rendement de l’éducation par pays 60 TABLEAU 11. Rendements de la scolarisation 61 TABLEAU 12. Rendements de l’éducation 62 TABLEAU 13. Progrès de Djibouti sur les indicateurs Doing Business 67 TABLEAU A.1. Taux bruts de scolarisation à Djibouti pour 2021 88 TABLEAU A.2. Indicateurs de l’indice du capital humain 95 TABLEAU B.1. Enquêtes qui pourraient être utilisées pour mettre à jour l'indice du capital humain 96 TABLEAU B.2. Indicateurs complémentaires potentiels du capital humain 97 TABLEAU B.3. Bases de données et sources de données utilisées pour l’analyse du capital humain 98 vi ABRÉVIATIONS ET ACRONYMES Abbreviation definition ASA Années de scolarisation attendues CCG Conseil de coopération du Golfe CONFEMEN Conférence des ministres de l’Éducation des États et gouvernements de la francophonie COVID Corona Virus Disease DEGRA Évaluation de la lecture au début de l’année scolaire DGETFP Direction générale de l’enseignement technique et de la formation professionnelle IDE Indice de difficulté d’embauche DJF Franc djiboutien DPE Développement de la petite enfance EDAM Enquête djiboutienne auprès des ménages EFTP Enseignement de la formation technique et professionnelle EGRA Évaluation de la lecture dans les premières années d’études FMI (IMF) Fonds monétaire international HCR Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés ICH Indice du capital humain ICHU Indice du capital humain ajusté pour l’utilisation IET l’indice d’emploi des travailleurs IGAD Autorité intergouvernementale pour le développement IGME Groupe interinstitutions des Nations Unies pour l’estimation de la mortalité infantile IHME Métrologie et évaluation de la santé IMR Taux de mortalité infantile INDH Initiative nationale pour le développement humain INSTAD Institut National de la Statistique de Djibouti IST Infection sexuellement transmissible ISU Institut de statistique de l’UNESCO JME Estimations conjointes de la malnutrition (Joint malnutrition estimates) MASS Ministères des Affaires sociales et des Solidarités MEFI Ministère de l’Économie et des Finances MENA Moyen-Orient et Afrique du Nord MENFOP Ministère de l’Éducation et de la Formation professionnelle MFF Ministère de la Femme et de la Famille MGF Mutilation génitale féminine vii Abbreviation definition MOH Ministère de la santé MTN Maladies tropicales et négligées MTRA Ministère du travail et de la réforme administrative ODD Objectif de développement durable OIT (ILO) Organisation internationale du travail OMS (WHO) Organisation mondiale de la santé ONG Organisation non gouvernementale ONU Organisation des Nations Unies OPEP Organisation des pays exportateur de pétrole PASEC Programme d’analyse des systèmes éducatifs de la CONFEMEN PFR Pays à faible revenu PIB Produit intérieur brut PIRLS Étude internationale sur les progrès de la lecture et de l’écriture PISA Programme international pour le suivi des acquis des élèves PNUD Division de la population des Nation-Unies PRE Pays à revenu élevé PRITI Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure PRITS Pays à revenu intermédiaire, tranche supérieure PRFM Pays à revenu faible et moyen RCH Revue du capital humain SRMNIA+N Services de santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile, des adolescents et de nutrition SIDA Syndrome d’immunodéficience acquise SMART Suivi et évaluation normalisés des secours et des transitions STH Scores des tests harmonisés TBS Taux brut de scolarisation TIMSS Tendance de l’écriture internationale des mathématiques et des sciences UNPD Division de la population des Nations Unies UNESCO Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture UNICEF Fonds des Nations Unies pour l’enfance UNIGME United Nation Inter-agency Group for Child Mortality Estimation USAID Agence des États-Unis pour le développement international USD Dollar américain WB Banque mondiale viii DJIBOUTI | Revue du capital humain REMERCIEMENTS Cette Revue du capital humain de Djibouti (RCH) fait partie du Projet du capital humain du Groupe de la Banque mondiale, un effort global qui soutient les pays à travers des données, des politiques et des recherches pour encourager des investissements plus nombreux et de meilleure qualité dans les personnes pour une plus grande équité et une plus grande croissance économique. Elle met en lumière l’état actuel du capital humain à Djibouti, y compris les principales réalisations et les défis du pays, et souligne les interventions et les investissements prioritaires spécifiques pour accroître l’accumulation, la protection et l’utilisation du capital humain et, à son tour, stimuler une croissance durable et un développement économique de Djibouti. Une équipe dirigée par Rianna Mohammed-Roberts (chef d’équipe, chef de programme, développement humain) et comprenant Bridget Sabine Crumpton (co-chef d’équipe, spécialiste principal de l’éducation), Manjula M. Luthria (co-chef d’équipe, économiste principal), D. Priyanka Kanth (co- chef d’équipe, économiste, santé), Alex Kamurase (spécialiste principal de la protection sociale), Abdo Said Abdo (spécialiste de l’éducation), Nicholas Hans Buhne (consultant analyste du développement humain), Yi Ning (associé professionnel junior), et Nevine Sameh Salaheldin Elnahass (consultante en apprentissage précoce) ont préparé le rapport, qui a bénéficié des conseils et de la supervision de Keiko Miwa (ancienne directrice régionale du développement humain pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord), de Marina Wes (directrice nationale pour l’Égypte, le Yémen et Djibouti), de Boubacar-Sid Barry (représentant résident pour Djibouti) et des responsables des pratiques de développement humain pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord : Rekha Menon (santé, nutrition et population), Andreas Bloom (éducation) et Anush Bezhanyan (protection sociale et emploi). L’équipe remercie les évaluateurs Damien De Walque (économiste en chef), Rifat Hasan (spécialiste en chef de la santé), Igor Kheyfets (économiste principal), Bilal Malaeb (économiste), Maria Laura Sanchez (chef de programme, développement humain), et Venkatesh Sundararaman (économiste en chef) et apprécie le soutien de l’équipe de l’Indice du capital humain dans le développement de l’indice du capital humain simulé pour Djibouti, en particulier, Ritika Dsouza (économiste) et Yanbin (Tracy) Xu (consultant). L’équipe souhaite remercier le ministère de l’Éducation et de  ix la Formation professionnelle et FHI 360 pour avoir partagé les données de l’Évaluation de la Lecture en début d’année 2022 et pour leur aide dans le calcul du score des Résultats harmonisés de l’apprentissage (Harmonized Learning Outcomes). Enfin, l’équipe souhaite remercier ses nombreux homologues à Djibouti qui ont partagé leurs idées lors des consultations et des réunions. x  RÉSUMÉ MESSAGES CLÉS • Sur la base d’une simulation de l'indice du capital humain (ICH), un enfant né à Djibouti en 2022 n’atteindra que 41 % (ICH de 0,41) de son plein potentiel de capital humain à l’âge de 18 ans, ce qui signifie que 59 % des talents à Djibouti restent inexploités, mettant en évidence une occasion manquée d’améliorer la productivité et d’exploiter le capital humain en tant que moteur de croissance et de développement. • En examinant l’ICH de Djibouti à travers ses trois composantes (survie de l’enfant, éducation, santé), on constate que les faibles résultats en matière de survie de l’enfant et d’apprentissage sont les principaux facteurs déterminant du score. • L’augmentation des investissements dans la petite enfance est le meilleur investissement que Djibouti puisse faire pour renforcer son capital humain et jeter les bases du bien-être et de la productivité future de ses enfants et de ses citoyens. Les interventions de développement de la petite enfance (DPE) à Djibouti n’en sont qu’à leurs débuts, mais elles se développent et peuvent être stimulées par des augmentations progressives du financement afin d’accroître l’accès, la couverture et la qualité des services essentiels pour les familles avec de jeunes enfants et d’améliorer les résultats en matière de DPE. • Les années d’adolescence offrent également l'occasion d’accroître l’accumulation et l’utilisation du capital humain. Il s’agit d’une période cruciale au cours de laquelle les interventions et les investissements en faveur des adolescentes pourraient permettre d’exploiter ce potentiel et d’obtenir des retours sur investissement plus élevés. • Le capital humain est un facteur déterminant de la productivité du travail et joue un rôle essentiel dans la détermination de la trajectoire de développement à long terme d’un pays. Djibouti doit s’orienter vers une économie plus compétitive et axée sur la productivité. I. CONTEXTE NATIONAL Djibouti est un petit pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) qui occupe une position géostratégique. Il compte moins d’un million d’habitants, dont plus de 80 % vivent dans des zones urbaines. Sa situation stratégique dans la Corne de l’Afrique, le long du golfe d’Aden, a façonné la trajectoire de développement du pays et son objectif de devenir une plaque tournante pour le commerce et la logistique. La construction de nouvelles installations portuaires et de liaisons de transport vers le grand marché éthiopien a été le principal moteur de sa croissance rapide et stable. Le déficit budgétaire est faible, à 1,5 % du produit intérieur brut (PIB) [World Bank 2023a], Résumé xi mais le risque de surendettement est élevé, ce qui laisse une marge de manœuvre budgétaire limitée pour lutter contre la pauvreté. Une série de chocs extérieurs a lourdement pesé sur l’économie et s’est ajoutée aux pressions budgétaires déjà significatives, le service de la dette ayant triplé. Une action urgente est nécessaire pour rétablir la viabilité de la dette et promouvoir une croissance inclusive, notamment en créant une marge de manœuvre budgétaire pour des dépenses sociales supplémentaires. Djibouti reste un pays relativement pauvre, avec des niveaux élevés d’inégalité. En utilisant le seuil de pauvreté de la Banque mondiale pour les pays à revenu faible et moyen (PRFM) de 3,65 USD par jour (parité de pouvoir d’achat de 2017), approprié pour une économie au niveau de développement de Djibouti, l’extrême pauvreté pour 2022 est estimée à 39 % (World Bank 2023a). Les inégalités à Djibouti sont parmi les plus élevées du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, avec un coefficient de Gini estimé à 0,42 en 20171. Le décile de revenus le plus élevé de la population consomme environ 16 fois plus que le décile le plus bas et deux fois plus que le neuvième décile (World Bank 2019a). L’extrême pauvreté dans les zones rurales du pays est estimée à 62,6 % (INSTAD 2017). La situation géographique de Djibouti, sa stabilité sociopolitique et ses similitudes socioculturelles avec de nombreux pays voisins le rendent vulnérable aux afflux de réfugiés fuyant les conflits. Djibouti accueille plus de 31 400 réfugiés et demandeurs d’asile (UNHCR 2023), ce qui représente environ 2,8 % de la population du pays2. Plus de 80 % des réfugiés enregistrés sont hébergés dans trois camps de réfugiés situés dans des régions frontalières isolées et mal desservies, où les services de santé et autres services de base sont assurés par un système de prestation parallèle financé par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR) et coordonné par l’Office national d’assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées. Il existe souvent des inégalités importantes dans l’accès aux services entre les réfugiés et les communautés d’accueil. Les femmes et les filles déplacées, représentant 49 % des réfugiés, sont exposées à la violence sexuelle et sexiste, aux mutilations génitales féminines (MGF), aux mariages précoces et à des opportunités de revenus limitées. Le statut de pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure de Djibouti est en contradiction avec son faible capital humain. La faiblesse du capital humain est observée tout au long du cycle de vie, et ce, dès la petite enfance, avec des taux élevés de mortalité infantile et de retard de croissance. Plus tard, des résultats d’apprentissage et des compétences inadéquats, une participation limitée au marché du travail pour les hommes et les femmes, et des résultats sanitaires faibles pour les femmes, notamment des taux élevés de MGF et des résultats faibles en matière de santé maternelle, constituent des obstacles majeurs à l’accumulation de capital humain. Les enquêtes menées auprès du secteur privé révèlent une pénurie de compétences appropriées dans l’offre de main-d’œuvre. Les femmes sont confrontées à une situation plus difficile en raison de normes sociales profondément enracinées et d’obstacles structurels qui entravent l’auto-emploi et l’entrepreneuriat, comme le démontre l’indice Women, Business, and the Law (World Bank 2022a). 1 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (3 mai 2023), https://databank. worldbank.org/source/world-development-indicators. 2 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (3 mai 2023), https://databank. worldbank.org/source/world-development-indicators. xii DJIBOUTI | Revue du capital humain L’objectif de cette Rapport sur le Capital Humain (RCH) est d’identifier les principaux obstacles à l’accumulation du capital humain à Djibouti et de recommander un ensemble d’actions prioritaires et d’interventions politiques pour contribuer à un développement équitable et efficace du capital humain. La RCH adopte une approche fondée sur le cycle de vie pour comprendre les facteurs qui entravent l’accumulation du capital humain au cours des différentes étapes de la vie. Investir dans le capital humain est essentiel pour augmenter les revenus des individus, les revenus des pays et la cohésion sociétale. L’accumulation du capital humain est un processus continu qui nécessite des investissements à chaque étape de la vie. Cette RCH se concentre sur trois transitions de la vie : la petite enfance, l’adolescence et l’âge adulte. Parallèlement, l’équipe s’est engagée dans des consultations multisectorielles avec des homologues gouvernementaux pour discuter du capital humain et des limites des données et des contraintes de capacité de mesure, qui sont essentielles pour mesurer et suivre le capital humain. II. SITUATION DES PRINCIPAUX RÉSULTATS EN MATIÈRE DE CAPITAL HUMAIN À DJIBOUTI Le gouvernement de Djibouti a identifié le capital humain comme un moteur essentiel de la croissance et du développement durable et a mis en place des dispositions institutionnelles claires pour diriger et conduire des priorités politiques essentielles étayées par des stratégies et des politiques nationales et sectorielles. Par exemple, Vision 2035 reconnaît que, pour que l’économie du pays devienne plus diversifiée, elle doit disposer d’une main-d’œuvre productive dotée de compétences variées. En élargissant la base économique pour qu’elle repose davantage sur le capital humain, Djibouti peut créer des trajectoires de croissance plus équitables qui profitent à une plus grande partie de la population. Les résultats sanitaires de Djibouti se sont améliorés au cours des deux dernières décennies. La prestation de services de santé reproductive, maternelle, néonatale, infantile, des adolescents et de nutrition (SRMNIA+N) a considérablement augmenté au fil du temps dans certaines régions, car les prestataires de services de santé et les médicaments sont devenus plus disponibles, et les capacités de gestion se sont accrues. En 2019, le pays a atteint un score de 56 % sur l’indice de couverture sanitaire universelle pour les interventions SRMNIA+N3, bien que les améliorations soient en retard par rapport à d’autres pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, et que la pandémie de COVID-19 ait perturbé la prestation des services de santé dans un environnement déjà difficile. Les adolescentes courent un risque plus élevé de décès maternel et de complications que les femmes plus âgées. Il est donc essentiel d’autonomiser les filles et d’améliorer l’accès à la formation aux compétences nécessaires à la vie quotidienne et à l’éducation en matière de santé reproductive afin de retarder le mariage et l’accouchement. 3 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (consulté le 3 mai 2023), https:// databank.worldbank.org/source/world-development-indicators. Résumé xiii Les interventions de développement de la petite enfance (DPE) à Djibouti en sont à leurs débuts mais se développent. Djibouti s’efforce de créer un environnement politique et juridique favorable à un système efficace de DPE, fournissant un point d’entrée pour catalyser les améliorations de la situation du DPE et produire des gains cumulatifs de capital humain en investissant dans les premières années de la vie. Les efforts actuels se concentrent sur la promotion d’enfants en bonne santé et bien nourris et sur l’apprentissage précoce, et les possibilités de promouvoir la protection sociale et les soins adaptés sont limitées et fragmentées. Bien que l’engagement du gouvernement à étendre l’éducation préscolaire ait contribué à doubler les inscriptions entre 2015 et 2021, le taux d’inscription reste faible (13,2 %). Les taux de scolarisation à tous les niveaux ont augmenté à Djibouti au cours des deux dernières décennies, en particulier dans le primaire et le premier cycle du secondaire, bien que le nombre d’années de scolarisation attendues reste faible, à savoir 9,2 années (World Bank 2023b). Ce chiffre est inférieur à la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et à celle des pays à faible revenu (PFR). Les disparités entre les taux de scolarisation des filles et des garçons s’accentuent à chaque niveau d’éducation. Les résultats de l’apprentissage à Djibouti sont généralement faibles, en particulier en ce qui concerne le calcul et l’alphabétisation. Le manque de données sur l’apprentissage rend difficile la mesure des progrès et l’identification des domaines à améliorer. Les compétences en lecture des élèves se sont récemment améliorées, comme l’indiquent les résultats de l’évaluation de la lecture en début de scolarité, et des progrès ont été réalisés dans l’évaluation des résultats d’apprentissage. L’évaluation a révélé des progrès significatifs entre l’évaluation de base et l’évaluation à mi-parcours, faisant de Djibouti l’un des rares pays à avoir amélioré les résultats de l’apprentissage pendant la pandémie de COVID-19. Ces développements reflètent les réformes en cours conçues pour améliorer l’apprentissage (USAID 2022). La population djiboutienne en âge de travailler est confrontée à un triple défi : des salaires élevés, un taux de chômage plus élevé parmi les travailleurs les plus instruits, et de faibles résultats en matière d’emploi en général. Les salaires élevés résultent de l’emploi dans le secteur public, qui offre une prime salariale bien supérieure à l’équilibre de compensation du marché basé sur l’éducation et les compétences, segmentant ainsi le marché du travail. Le chômage plus élevé parmi la main-d’œuvre qualifiée résulte du nombre limité d’emplois dans le secteur public, ce qui semble endémique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, en particulier dans les économies riches en ressources et rentières. Djibouti pourrait être décrit comme ce dernier cas. La faiblesse de l’emploi global résulte du faible taux de création d’emplois, ce qui n’est pas inhabituel pour une petite économie peu diversifiée où un secteur (transport et logistique) domine, et où l’accumulation de capital contribue davantage à la croissance économique que la main d’œuvre ou la productivité. xiv DJIBOUTI | Revue du capital humain Cinq facteurs primordiaux influencent les résultats de Djibouti en matière de développement humain. Premièrement, la petite taille (par sa population) du pays, sa vulnérabilité aux catastrophes et les retombées de la fragilité et de l’insécurité régionales posent des défis inhérents. Les déséconomies d’échelle, en particulier, rendent difficile une croissance tirée par le secteur privé et limitent la formation et l’utilisation du capital humain. Deuxièmement, la pauvreté est omniprésente, avec d’importantes disparités géographiques et socio-économiques en termes de bien-être. Selon les estimations de 2017, un peu plus d’un cinquième de la population djiboutienne vit dans l’extrême pauvreté, incapable de couvrir ses besoins de base. La pauvreté et l’éloignement, en particulier dans les zones rurales, rendent difficile l’accès aux services de santé et d’éducation. Troisièmement, l’insécurité alimentaire, qui conduit à la sous-alimentation, est présente dans certaines régions et affecte les résultats nutritionnels tout au long du cycle de vie. Les effets d’une mauvaise alimentation se répercutent d’une génération à l’autre et entravent l’accumulation de compétences. Quatrièmement, les dépenses consacrées à l’éducation, à la santé et aux systèmes de protection sociale sont faibles. Le système de protection sociale de Djibouti, par exemple, est insuffisant pour protéger les pauvres et les personnes vulnérables des effets négatifs du cycle de vie ou pour encourager les investissements dans le capital humain. Le système est fragmenté et offre une couverture limitée. Cinquièmement, le manque de données et la faible capacité de mesure constituent un obstacle majeur à la mesure et au suivi précis des indicateurs clés du capital humain, ce qui entrave la capacité à évaluer l’état du capital humain dans le pays de manière globale. III. INDICE DU CAPITAL HUMAIN DE DJIBOUTI La quantité de capital humain qu’un enfant né aujourd’hui peut espérer atteindre à l’âge de 18 ans est mesurée à l’aide de l’indice du capital humain (ICH), qui compare la productivité de la prochaine génération de travailleurs à une référence de travailleurs ayant suivi un enseignement complet et jouissant d’une bonne santé. Cet indice, basé sur les résultats, prend en compte les étapes de la vie au cours desquelles l’acquisition de connaissances et de compétences est la plus critique. Il se compose de cinq indicateurs, répartis sur trois éléments, et décrit clairement l’accumulation de capital humain tout au long du cycle de vie : à la naissance, les enfants doivent survivre ; pendant l’enfance, ils doivent être bien nourris ; à l’âge scolaire, ils doivent achever toute leur scolarité à des niveaux d’apprentissage adéquats ; et à l’âge adulte, ils doivent rester en bonne santé. L’ICH combine les taux de mortalité et de retard de croissance, les années de scolarisation attendues, les résultats d’apprentissage harmonisés et les taux de survie à l’âge adulte (figure ES1). Résumé xv FIGURE ES1. Indice de capital humain : Composantes de l’indice de capital humain INDICE DE CAPITAL HUMAIN SANTÉ DES ENFANTS ÉDUCATION SANTÉ Productivité d'une personne Taux de survie des enfants Années de scolarisation Taux de survie née aujourd'hui à l'âge de moins de cinq ans sans ajustées pour des adultes de 18 ans. retard de croissance l'apprentissage L’ICH est une mesure prospective, axée sur la production, de la productivité attendue de la prochaine génération de travailleurs si les circonstances actuelles se maintiennent. Des scores de l'ICH plus élevés indiquent une plus grande productivité future du travail. Plutôt que de s’appuyer sur une agrégation ad hoc avec des pondérations arbitraires, l’ICH utilise les revenus estimés associés à une unité supplémentaire de santé et d’éducation pour les traduire en contributions à la productivité des travailleurs, par rapport à une référence d’éducation complète et de santé totale. Le résultat est le score de l’ICH, qui varie entre 0 et 1. Le lien entre les indicateurs, leur agrégation et la productivité repose sur une base factuelle rigoureuse (annexe A). Par exemple, la recherche montre qu’une augmentation d’un centimètre de la taille des adultes augmente la productivité de 3,4 % (World Bank 2020a). La simulation du premier score de l’ICH de Djibouti dans le rapport est une réalisation majeure. Le score de 0,41 indique qu’un enfant né à Djibouti en 2022 n’atteindra que 41 % de son plein potentiel de productivité qu’il aurait eu avec une éducation complète et une pleine santé4. Le tableau ES1 présente le score simulé de l’ICH de Djibouti, ventilé par composante. Les scores pour la scolarisation sont faibles à Djibouti. En 2022, Il est attendu qu’un enfant passe 1,3 année de moins à l’école que la moyenne des PRFM en 2020, et 1,6 année de plus que les pays de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD). Si l’on tient compte de ce que les élèves apprennent pendant qu’ils sont à l’école, le nombre d’années de scolarisation passe de 9,2 à 5,0 ans. La faiblesse de la scolarisation à Djibouti s’explique par la combinaison d’un faible taux de transition de l’école primaire à l’école secondaire et de faibles résultats obtenus lors des premières évaluations de l’apprentissage comparables à l’échelle internationale. La contribution de la composante scolaire a l’effet le plus significatif sur la productivité potentielle. 4 Cette simulation ICH basée sur la méthodologie ICH, utilise les sources de données standards à travers les composantes ICH jusqu’en 2022. Elle a impliqué l’équipe mondiale ICH, et est dérivée du calculateur ICH, bien qu’elle ne soit pas considérée comme un score ICH officiel parce qu’une mise à jour globale ICH, à laquelle Djibouti peut être ajouté, ne sera pas faite avant 2024. Le score officiel de l’ICH pour Djibouti, lorsqu’il sera publié, peut être différent de ce qui est présenté, étant donné la possibilité de données nouvelles ou de mises à jour, liées, par exemple, à la scolarisation. xvi DJIBOUTI | Revue du capital humain TABLEAU ES1. Indice de capital humain simulé pour Djibouti Total Homme Femme Composante 1 : Survie Probabilité de survie jusqu’à l’âge de 5 ans (0-1) 0.95 0.94 0.95 Contribution à la productivité en tant que futur travailleur (A) 0.95 0.94 0.95 Composante 2 : Scolarisation Années de scolarisation attendues (0-14 années à l’école) 9.2 9.7 8.5 Score au test harmonisé (300-625) 340 344 336 Contribution à la productivité en tant que futur travailleur (B) 0.49 0.50 0.47 Composante 3 : Santé Fraction des enfants de moins de 5 ans ne souffrant pas de retard de 0.79 0.78 0.80 croissance (0-1) Fraction des jeunes de 15 ans qui survivent jusqu’à l’âge de 60 ans (0-1) 0.73 0.69 0.78 Contribution à la productivité en tant que futur travailleur (C) 0.88 0.87 0.90 Indice du capital humain (A x B x C) 0.41 0.41 0.40 Source : Groupe interinstitutions des Nations unies pour les estimations de la mortalité infantile 2021, calculs du personnel de la Banque mondiale complétant les données administratives de Djibouti 2021, calculs du personnel de la Banque mondiale complétant les données de l’USAID 2022, estimations conjointes de l’UNICEF, de l’OMS et de la Banque mondiale sur la malnutrition 2019, Division de la population des Nations unies 2022 Les variations entre les sexes dans l’ICH simulé pour Djibouti sont largement cohérentes avec les tendances mondiales, bien qu’elles soient influencées différemment par les composantes individuelles. Les garçons ont un ICH plus élevé (0,41) que les filles (0,40), contrairement à la moyenne mondiale où les filles ont un ICH plus élevé. Les filles à Djibouti obtiennent de meilleurs résultats pour toutes les composantes individuelles, à l’exception de l’école. La tendance globale est que les filles obtiennent de meilleures notes à l’école. Le modèle de Djibouti est plus similaire aux tendances des pays les plus pauvres et est moins commun dans les PRFM. Les filles à Djibouti ont un score au test harmonisé plus faible et un nombre d’années de scolarisation attendues plus faible (8,5 ans) car elles sont plus nombreuses à abandonner l’école et il y a moins de filles à chaque niveau, en particulier au niveau secondaire. Par exemple, selon les données administratives, le taux brut de scolarisation des garçons était de 101,6 % et de 90,2 % pour les filles dans l’enseignement primaire ; 83,4 % et 69,2 % respectivement dans le premier cycle du secondaire ; et 49,6 % et 42,4 % dans le deuxième cycle du secondaire5 en 2021 (MENFOP 2023). Djibouti est devenu un PRITI, son ICH simulé pour 2022 reste inférieur à la moyenne des PRITI de 0,48 en 20206. La moyenne des PFR était de 0,38, et la moyenne régionale du Moyen- Orient et de l’Afrique du Nord (à l’exclusion des pays à revenu élevé) était de 0,51 (Tableau ES2). Djibouti a de meilleurs résultats pour le nombre d’années d’études attendues mais des résultats 5 Voir MENFOP (Ministry of Education and Vocational Training). 2023. Annexe Annuaire 2021-2022. Djibouti, Djibouti: MENFOP. http://www.education.gov.dj/index.php?option=com_k2&view=item&id=647:annexe-annuaire-2021​ -2022&Itemid=1700&lang=en 6 L’ICH simulé pour Djibouti est celui de 2022, car c’est la première année où des données sur la qualité de l’apprentissage ont été disponibles. L’ICH de tous les autres pays porte sur 2020 et utilise des données antérieures à la pandémie. Cela limite la comparabilité de l’ICH simulée de Djibouti, car elle utilise des données antérieures et postérieures à la pandémie, alors que les autres pays n’utilisent que des données antérieures à la pandémie. Résumé xvii de tests harmonisés inférieurs à ses moyennes de revenu et de pairs régionaux, une probabilité similaire de survie jusqu’à l’âge de 5 ans et de meilleurs résultats en matière de santé que les pairs régionaux. TABLEAU ES2. Indice de capital humain simulé de Djibouti avec les comparateurs Pays à revenu Moyen-Orient et Afrique Autorité Pays à Djibouti intermédiaire - Composante du Nord (à l’exclusion intergouvernementale faible 2022 tranche des pays à haut revenu)a pour le développementb revenu inférieure Composante 1 : Survie de l’enfant Probabilité de survie jusqu’à 0.95 0.98 0.94 0.93 0.96 l’âge de 5 ans Composante 2 : scolarisation Années de scolarisation 9.2 10.5 7.6 7.6 10.4 attendues Harmonisation des résultats 340 384 383 356 392 des tests Composante 3 : Santé Fraction des enfants de moins de 5 ans 0.79 0.82 0.68 0.65 0.75 ne souffrant pas de retard de croissance Taux de survie entre 15 et 60 0.73 0.89 0.75 0.75 0.80 ans Indice du 0.41 0.51 0.40 0.38 0.48 capital humain Source : Groupe interinstitutions des Nations Unies pour les estimations de la mortalité infantile 2019 et 2021, estimations du personnel de la Banque mondiale complétant l’Institut de statistique de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture 2019, calculs du personnel de la Banque mondiale complétant l’USAID 2022, Division de la population des Nations Unies 2019 et 2021, estimations conjointes UNICEF-OMS-Banque mondiale de la malnutrition 2019, calculs du personnel de la Banque mondiale complétant les statistiques administratives du MENFOP 2023 (a) À l’exclusion de Bahreïn, Israël, Koweït, Malte, Oman, Qatar, Arabie Saoudite, Émirats Arabes Unis. (b) Données disponibles pour l’Éthiopie, le Kenya, le Soudan et l’Ouganda. Données non disponibles pour Djibouti, l’Erythrée, le Sud-Soudan. xviii DJIBOUTI | Revue du capital humain L’ICH ajusté pour l’utilisation (ICHU) de base pour Djibouti est de 0,097, ce qui indique que seulement 9 % du plein potentiel du capital humain est exploité. L’ICH ajusté pour l’utilisation corrige l’ICH pour tenir compte de la sous-utilisation du capital humain sur le marché du travail, en se basant sur le ratio emploi/population (fraction des personnes âgées de 15 à 65 ans qui sont employées). Les gains économiques du capital humain ne peuvent être réalisés que si les populations peuvent utiliser leurs compétences et leur ingéniosité dans des activités productives, telles que le travail. Cela signifie que les bénéfices que Djibouti peut tirer de son capital humain sont encore plus faibles que ne le suggère son ICH de 0,41, parce que les conditions ne sont pas réunies pour que les populations mettent leur capital humain au travail. L’ICH ajusté pour l’utilisation pour les femmes est encore plus faible (0,05) en raison des estimations de l’OIT selon lesquelles le ratio emploi/population pour les femmes sont de 11,3 % en 2022.8 De 2005 à 2015, le travail en tant que facteur de production n’a augmenté que de 2 % et a contribué pour moins d’un point de pourcentage à la croissance, alors que le capital physique a augmenté, en moyenne, de plus de 21 % et a contribué pour 12 points de pourcentage à la croissance (World Bank 2018a). Le RHC fournit une vue d’ensemble des résultats du développement humain tout au long du cycle de vie, en mettant l’accent sur trois périodes : la petite enfance, l’adolescence et les années de travail. Ces périodes sont des périodes de transition importantes au cours du cycle de vie et sur la trajectoire d’accumulation du capital humain. Elles permettent également de concevoir des interventions intersectorielles efficaces. Les choix reproductifs des jeunes, par exemple, sont étroitement liés à la petite enfance. Les résultats sur le marché du travail sont étroitement liés à la qualité de l’éducation et des compétences, et les résultats en matière de capital humain et de développement humain au cours de ces périodes sont particulièrement faibles à Djibouti. Bien que les faibles résultats d’apprentissage et le nombre limité d’années de scolarisation aient l’effet le plus significatif sur la productivité potentielle, ils n’ont pas été inclus dans les domaines d’approfondissement parce que les interventions nécessaires pendant les années scolaires sont en grande partie spécifiques au secteur de l’éducation. Les efforts de réforme de l’éducation en cours, qui se concentrent sur l’amélioration de la qualité et l’augmentation de l’accès et du nombre d’années de scolarisation, sont soulignés dans le chapitre 2, ainsi qu’une vue d’ensemble des résultats de l’éducation à Djibouti. 7 ICH ajusté pour l’utilisation = Taux d’ emploi de la population en âge de travailler (15-65) × ICH. ICH ajusté pour l’utilisationfemmes = Taux d’emploi des femmes en âge de travailler (15-65) × ICH. 8 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (5 mai 2023), https://databank​ .worldbank.org/source/world-development-indicators. Résumé xix CHAPITRE 1 : INTRODUCTION MESSAGES CLÉS • Le gouvernement de Djibouti s’est engagé à améliorer le capital humain en tant que moteur d’une croissance et d’un développement durables, malgré une marge de manœuvre fiscale limitée pour les dépenses sociales. En tant que petit État aux capacités limitées, l’adhésion politique est essentielle. • Cinq facteurs clés influencent l’accumulation du capital humain : la petite taille du pays, la pauvreté généralisée et les disparités géographiques et socio-économiques importantes, l’insécurité alimentaire, les dépenses sociales limitées et la très faible capacité de collecte et de mesure des données. • Le HCR approfondira trois domaines clés du cycle de vie : la petite enfance, l’adolescence et la jeunesse, ainsi que les années de travail. Il s’agit de périodes de transition importantes dans la trajectoire d’accumulation du capital humain et de points d’entrée essentiels pour la conception d’interventions et d’actions politiques intersectorielles. I. CONTEXTE NATIONAL Djibouti est un petit pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI) qui occupe une position géostratégique. Il compte moins d’un million d’habitants, dont plus de 80 % vivent dans des zones urbaines. Le pays est multiethnique, avec des Afars, des Arabes et des Somaliens. La ville de Djibouti représente environ 70 % de la population du pays, le reste étant réparti dans les cinq régions administratives, où la population rurale varie de 40 % (à Ali Sabieh) à 77 % (à Tadjourah). La situation stratégique de Djibouti détermine sa trajectoire de développement et son objectif de devenir une plaque tournante pour le commerce et la logistique. C’est la principale voie de passage pour le pétrole du Golfe vers l’Amérique du Nord, et plus de 20 000 navires transitent par Bab al-Mandeb chaque année, ce qui représente environ 30 % du commerce maritime mondial, estimé à plus de 700 milliards de dollars américains. Les importations et les exportations en provenance d’Éthiopie représentent environ deux tiers des activités du port. La croissance de Djibouti a été rapide et stable, malgré les perturbations dues à la pandémie de la COVID-19. La croissance du produit intérieur brut (PIB) réel a été en moyenne de 6 % par an entre 2000 et 2019, le PIB par habitant passant de moins de 800 USD en 2000 à plus de 3 360 USD en 2021, ce qui place la performance de la croissance économique de Djibouti devant celle de ses pairs structurels (Belize, Cabo Verde, Comores, Malaisie, São Tomé et Príncipe). La construction de nouvelles installations portuaires et de liaisons de transport vers l’important marché éthiopien est à l’origine d’une grande partie de cette croissance. Le pays accueille les bases militaires de plusieurs CHAPITRE 1 : Introduction 1 pays étrangers, preuve de son rôle important en matière de sécurité dans la Corne de l’Afrique, mais il connaît une croissance étroite et non durable fondée sur des investissements en infrastructures physiques financés par la dette. Les principales liaisons de transport ont accru les capacités commerciales, mais le ratio de la dette publique par rapport au PIB a presque doublé entre 2013 (35 %) et 2019 (66 %). Le déficit budgétaire est faible (1,5 %), mais le risque de surendettement est élevé, ce qui laisse une marge de manœuvre budgétaire limitée pour les dépenses sociales. Djibouti est un pays relativement pauvre, avec de fortes inégalités. Environ 21 % de la population est extrêmement pauvre, sur la base du seuil de pauvreté officiel de 2,17 USD par jour en parité de pouvoir d’achat de 2011 (World Bank 2023a). L’extrême pauvreté dans les zones rurales est nettement plus élevée (~62,6 %) (INSTAD 2017). En utilisant le seuil de pauvreté de la Banque mondiale pour les PRFM de 3,65 USD par jour (parité de pouvoir d’achat de 2017), le taux d’extrême pauvreté en 2022 a été estimé à 39 % (World Bank 2023a). Les inégalités à Djibouti sont parmi les plus élevées du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, avec un coefficient de Gini estimé à 0,42. Le décile de revenu le plus élevé consomme environ 16 fois plus que le décile le plus bas et deux fois plus que le neuvième décile (World Bank 2019a). La situation géographique de Djibouti, sa stabilité sociopolitique et sa proximité socioculturelle avec les pays voisins le rendent vulnérable aux vagues de réfugiés fuyant le conflit qui sévit dans ces pays depuis le milieu des années 1970. Djibouti accueille plus de 31 400 réfugiés et demandeurs d’asile (UNHCR 2023), ce qui représente environ 2,8 % de la population du pays9 ; ces personnes viennent principalement d’Érythrée, d’Éthiopie, de Somalie et, plus récemment, du Yémen. Le pays abriterait également près de 150 000 résidents sans papiers dans les centres urbains selon les données du gouvernement. Plus de 80 % des réfugiés enregistrés sont hébergés dans trois camps de réfugiés situés dans des régions frontalières isolées et mal desservies, où les services de santé et autres services de base sont parfois assurés par un système de prestation parallèle financé par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (UNHCR) et coordonné par l’Office national d’assistance aux réfugiés et aux personnes déplacées. Il existe souvent des inégalités importantes dans l’accès aux services entre les villages des réfugiés et des communautés d’accueil et les zones urbaines. Les femmes et les filles déplacées, qui représentent 49 % des réfugiés, sont exposées à la violence sexuelle et sexiste, aux mutilations génitales féminines (MGF), aux mariages précoces et à des possibilités de revenus limitées. Djibouti a donné l’exemple en encourageant et en reconnaissant la valeur du capital humain des réfugiés par le biais d’une série de politiques inclusives, notamment en pilotant le Pacte mondial sur les réfugiés10 et le cadre de la réponse globale aux réfugiés11. Djibouti a également eu accès à des fonds 9 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (22 décembre 2023), https:// databank.worldbank.org/source/world-development-indicators. 10 Le Pacte mondial sur les réfugiés a été approuvé par l’Assemblée générale des Nations Unies en décembre 2018. Il s’agit d’un cadre pour un partage des responsabilités plus prévisible et équitable, reconnaissant qu’une solution durable aux situations de réfugiés ne peut être atteinte sans coopération internationale. Il fournit un plan directeur aux gouvernements pour s’assurer que les communautés d’accueil reçoivent le soutien dont elles ont besoin et que les réfugiés peuvent mener des vies productives. 11 Le cadre global d’intervention pour les réfugiés est une initiative prévue dans la résolution des Nations unies connue sous le nom de Déclaration de New York pour les réfugiés et les migrants, qui vise à créer une réponse cohérente et solide aux crises de réfugiés grâce à la complémentarité des programmes et des ressources. 2 DJIBOUTI | Revue du capital humain du sous-fonds de l’Agence internationale de développement pour les réfugiés12. Le soutien aux réfugiés va au-delà de l’accès à la scolarisation, aux soins de santé et aux systèmes de protection sociale et comprend des efforts pour adapter les services aux besoins des réfugiés. Par exemple, pendant la pandémie de la COVID-19, des kits scolaires comprenant du matériel d’apprentissage de base ont été distribués aux réfugiés ayant un accès limité aux outils numériques d’apprentissage à distance. Bien que le nombre de réfugiés rejoignant le marché du travail formel soit limité, ils ont le droit légal d’obtenir un emploi formel, contrairement à ce qui se passe dans de nombreux autres pays. Djibouti dispose de ressources naturelles limitées et est exposé aux risques naturels. Les inondations, les sécheresses récurrentes et les invasions de criquets ont mis à mal les moyens de subsistance des éleveurs. Djibouti est le quatrième pays le plus vulnérable du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord aux chocs climatiques et se classe au 122e rang mondial selon l’indice de l’initiative d’adaptation mondiale de Notre Dame, qui mesure la vulnérabilité et la préparation aux effets du climat13. Le risque pour l’approvisionnement alimentaire (dû en grande partie à la rareté des précipitations, qui ne permet pas de soutenir une base agricole), les écosystèmes, l’habitat humain et la santé a été évalué comme étant plus élevé que la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord, les impacts négatifs provenant des températures élevées, de l’aridité, du manque de précipitations et de l’élévation du niveau de la mer. L’intrusion d’eau salée dans les aquifères par l’érosion côtière, par exemple, menace la qualité de l’eau. Ces risques affectent les enfants de manière disproportionnée, avec des répercussions sur l’éducation, les soins de santé, les moyens de subsistance et la transmission intergénérationnelle du capital humain. L’indice de risque climatique pour les enfants du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF)14 met en évidence l’impact potentiel des effets du climat sur les enfants. Le score national de 5,8 (sur 10), qui est le deuxième risque le plus élevé au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, après le Yémen, indique que les risques climatiques empêchent les enfants de développer leur capital humain par le biais d’une bonne santé et d’une bonne éducation. Les enfants sont plus vulnérables aux chocs climatiques et environnementaux que les adultes car ils sont physiquement moins aptes à résister aux chocs, physiologiquement plus affectés par la pollution et plus exposés au risque de décès dû aux maladies induites par le climat, qui limitent les résultats de l’apprentissage et augmentent la mortalité et les retards de croissance. Le gouvernement s’est engagé à améliorer le capital humain, comme en témoignent les efforts déployés pour mettre en œuvre des stratégies sectorielles visant à relever les défis en matière de capital humain et la mise en place d’accords institutionnels intersectoriels clairs (Figure 2). La Vision Djibouti 2035, par exemple, donne la priorité au développement humain en se concentrant sur l’extension de la couverture du filet de sécurité sociale et l’amélioration de l’efficacité et de l’efficience des systèmes de prestation ; la réforme du secteur des soins de santé, notamment en utilisant le financement axé sur les résultats pour rapprocher la prise de décision du lieu de soins et en développant le système de soins 12 Le guichet pour les communautés d’accueil et les réfugiés soutient les pays qui accueillent d’importantes populations de réfugiés afin de créer des opportunités de développement à moyen et long terme pour les réfugiés et les communautés d’accueil. 13 Voir Country Index (base de données), Notre Dame Global Adaptation Initiative, Notre Dame, IN. (12 avril 2023), https://gain​ .nd.edu/our-work/country-index/. 14 L’indice des risques climatiques pour les enfants fournit une vue d’ensemble de l’exposition et de la vulnérabilité des enfants au changement climatique. Il classe les pays en fonction de l’exposition des enfants aux chocs climatiques et environnementaux, tels que les cyclones et les vagues de chaleur, et de leur vulnérabilité à ces chocs, en fonction de leur accès aux services essentiels. CHAPITRE 1 : Introduction 3 de santé communautaire ; la réforme du système éducatif pour renforcer l’apprentissage en améliorant la qualité, le développement professionnel des enseignants et en développant l’enseignement en maternelle ; et le développement des compétences pour faire de Djibouti un centre numérique régional. Bien que, comme le montre la Figure 2, il existe une structure institutionnelle claire pour mener et conduire l’agenda du capital humain, l’engagement et l’opérationnalisation des comités de pilotage et des comités techniques nécessiteront des efforts continus. FIGURE 2. Structure institutionnelle des efforts de Djibouti en matière de capital humain Niveau ministériel Comité de Présidé par le Premier ministre pilotage Niveau du Secrétaire général Suivi, évaluation et Coordonné par le MASS et décentralisation composé de points focaux du Comité Institut national de la statistique, ministère de la santé, du technique Secrétariat de la décentralisation MENFOP, du MENSUR, du MTRA, du MASS et du MEFI Éducation Survival MASS, MEFI, MENFOP, MENSUR, MASS, MEFOP, MoH, MTRA, Santé MTRA, Société Civile, MFF, Ministère de l'Agriculture, MASSE, MEFI, MENFOP, Secrétariat à la Décentralisation, Société Civile, MoH, MFF, MTRA Agence Handicap , Agence des personnes Ministère de l'Agriculture, handicapées Ministère de la Communication Note : MASS, ministère des Affaires sociales et de la Solidarité ; MEFI, ministère de l’Économie et des Finances ; MENFOP, ministère de l’Éducation et de la Formation professionnelle ; MENSUR, ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche ; MoH, ministère de la Santé ; MTRA, ministère du Travail et de la Réforme administrative ; MFF, ministère de la Femme et de la Famille L’égalité des sexes est au cœur de la conception de la Vision Djibouti 2035. Le gouvernement a mis en œuvre plusieurs plans et programmes nationaux qui promeuvent l’égalité des sexes, l’autonomisation des femmes et l’éradication de toutes les formes d’exclusion. Ce faisant, il a reconnu que, malgré les efforts nationaux, des normes sexistes néfastes persistent et augmentent la charge de morbidité des femmes, ce qui a des répercussions négatives sur le système de soins de santé. Malgré l’adoption d’une loi spéciale criminalisant les MGF et malgré les efforts du gouvernement pour remplir ses engagements nationaux, régionaux et internationaux en vue d’éradiquer ce crime, les efforts ont dû partir d’un niveau élevé de 93 % en 2006.15 L’une des cinq priorités de la Vision Djibouti 2035 est d’améliorer l’accès et la qualité des soins de santé, y compris la santé sexuelle et reproductive, et d’assurer un accès total et égal aux droits reproductifs. 15 Voir Djibouti Country Page (base de données), United Nations Population Fund, New York (May 7, 2023), https://www.unfpa​ .org/data/DJ. 4 DJIBOUTI | Revue du capital humain II. PRINCIPAUX GOULETS D’ÉTRANGLEMENT DES RÉSULTATS EN MATIÈRE DE CAPITAL HUMAIN Le capital humain - le stock de connaissances, d’expériences et d’attributs que les individus accumulent tout au long de leur vie et qui leur permet de réaliser leur potentiel en tant que membres productifs de la société - est un moteur essentiel de la croissance durable et équitable et du développement économique. Il est un facteur déterminant de la productivité du travail et joue un rôle essentiel dans la détermination de la trajectoire de développement à long terme d’un pays. Un capital humain plus important est associé à des revenus plus élevés pour les personnes, à des revenus plus élevés pour les pays et à une plus grande cohésion dans les sociétés. Les investissements dans le capital humain s’accumulent (Figure 3) et sont nécessaires à chaque étape de la vie. L’éducation et le développement des compétences, par exemple, offrent un retour sur investissement substantiel. On estime qu’une année de scolarité supplémentaire augmente les revenus de 8 % par an. En outre, une main-d’œuvre hautement qualifiée est une condition préalable à la compétitivité d’un pays dans l’économie mondiale. Parallèlement, des systèmes de soins de santé inclusifs et rentables sont nécessaires pour garantir des vies saines et productives et éviter l’appauvrissement dû aux chocs sanitaires, et des programmes efficaces de protection sociale et d’emploi empêchent les populations de tomber dans le piège de la pauvreté et du chômage. Le capital humain se déprécie avec les longues périodes de chômage et l’incapacité qui s’ensuit de suivre les progrès de la technologie et de l’innovation. FIGURE 3. Effets cumulatifs des investissements en capital humain Un meilleur rendement Une épargne plus Un meilleur Bon sur le marché du travail importante réduction de apprentissageune développement une meilleure santé la pauvreté des meilleure santéDe de la petite des revenus plus élevés personnes âgées solides résultats enfance de meilleures pratiques vieillissement en socio-économiques parentales bonne santé Cinq facteurs influencent les résultats de Djibouti en matière de capital humain : la petite taille de la population du pays, qui pose des défis inhérents ; les disparités géographiques et socio- économiques substantielles et la pauvreté généralisée ; l’insécurité alimentaire, qui entraîne une sous-alimentation pendant les périodes critiques du cycle de vie et entrave l’accumulation future de compétences ; les dépenses sociales limitées ; et les données limitées et la faible capacité de mesure, qui rendent difficile la détermination de l’état du capital humain à Djibouti et l’adoption des mesures nécessaires. Djibouti est un petit État vulnérable aux catastrophes et aux retombées de la fragilité et de l’insécurité régionales. Les facteurs de stress climatique et les chocs météorologiques peuvent affecter la sécurité d’un État en amplifiant le stress social et la concurrence pour des ressources limitées. Si ces dynamiques dépassent la capacité d’adaptation d’un pays, elles peuvent créer ou aggraver l’instabilité (Boyer, Meijer et Gilligan 2020). Malgré des investissements substantiels dans les infrastructures par des entreprises publiques au cours de la dernière décennie, la croissance CHAPITRE 1 : Introduction 5 économique forte et soutenue du pays n’a pas été inclusive, avec une contribution limitée du secteur privé. Comme dans beaucoup d’autres petits États, le secteur public de Djibouti joue un rôle important dans l’économie, et il existe une petite communauté de donateurs, sans cadre de coordination formel. Avec une population et une superficie réduites, les petits États disposent généralement d’un capital humain limité et sont confrontés à des contraintes de marché du travail et de capacité en raison de déséconomies d’échelle, ce qui rend difficile une croissance tirée par le secteur privé. Djibouti ne fait pas exception. Le secteur privé à Djibouti est embryonnaire, et les coûts élevés de l’activité commerciale ainsi que le faible capital humain le limitent. Le secteur informel comprend principalement des petites et moyennes entreprises de services et de commerce de détail qui offrent des possibilités d’emploi limitées. En outre, comme beaucoup de petits États, le pays dispose d’une connectivité limitée en matière de technologies de l’information et de la communication, ce qui entrave le secteur des services. À Djibouti, cela est dû au fait que le secteur des technologies de l’information et de la communication n’est pas compétitif, avec des prix élevés et une faible pénétration de la téléphonie mobile à large bande et de l’internet. La pauvreté est omniprésente, avec d’importantes disparités géographiques et socio- économiques en matière de bien-être. Selon les estimations de 2017, basées sur le seuil national de pauvreté, un peu plus d’un cinquième de la population djiboutienne vit dans l’extrême pauvreté, incapable de couvrir ses besoins de base. Le taux d’extrême pauvreté est de 13,6 % à Djibouti-ville, et dans les zones rurales, il est plus de quatre fois plus élevé (62,6 %). Les zones rurales regroupent 15 % de la population mais 45 % de la population pauvre (World Bank 2020b). La pauvreté et la distance, en particulier dans les zones rurales, constituent des obstacles importants à l’accès aux soins de santé et à l’éducation. La localisation des individus est également en corrélation avec leurs résultats en matière de capital humain. Par exemple, les taux d’alphabétisation tendent à diminuer à mesure que la distance par rapport à l’école primaire augmente, ce qui affecte davantage les populations rurales que les populations urbaines. Il existe également d’importantes variations dans les schémas de scolarisation en fonction de la pauvreté et du fossé entre les zones rurales et les zones urbaines. La scolarisation est systématiquement plus faible pour les populations pauvres et rurales que pour les populations non pauvres et urbaines. Les retards de croissance sont également plus fréquents chez les enfants des zones rurales (34 %) que chez ceux des zones urbaines (19 %). Au niveau national, le respect par les ménages du critère d’alimentation minimale à base de quatre groupes alimentaires varie en fonction du statut socio-économique et de la localisation. Les régions de Dikhil et de Tadjourah, qui sont en grande partie rurales, ont les niveaux les plus bas de respect du régime alimentaire. En outre, les habitants des zones rurales sont plus susceptibles d’avoir des problèmes de santé qui augmentent avec la distance qui les sépare d’un centre de santé communautaire. Les disparités géographiques et socio-économiques se reflètent aussi clairement dans l’accès à l’eau, à l’assainissement et aux services d’hygiène, en particulier dans les zones rurales (Tableau 3). L’accès à une source d’eau propre est essentiel pour prévenir les maladies infectieuses. 6 DJIBOUTI | Revue du capital humain Dans les zones rurales, où le paludisme, la fièvre et la diarrhée sont plus fréquents que dans les zones urbaines, la source d’eau et les conditions de vie (par exemple, le type de toilettes) sont fortement corrélées à la prévalence des maladies. L’enquête sur les ménages de 2017/18 a montré une corrélation entre le manque d’eau et d’assainissement et les épisodes de maladie. La disparité entre les zones urbaines et rurales s’étend aux écoles, avec des lacunes dans l’accès à l’assainissement et à l’eau potable de base. TABLEAU 3. Accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène en milieu urbain et rural Urbain Rural % Accès de la population à l’eau potable de base 84 47 Accès de la population à des installations sanitaires sûres 42 21 Accès des écoles à l’eau potable de base 96 83 Accès des écoles à l’assainissement de base 91 75 Accès à l’hygiène de base dans les écoles 100 100 Source: UNICEF et OMS 2021 Djibouti importe 90 % de sa nourriture car ses terres arables et ses précipitations sont limitées. Bien que cela ait été possible en raison de sa situation géographique, il ne s’agit pas d’un modèle durable pour répondre aux besoins de consommation et cela constitue une menace pour la sécurité alimentaire globale. La sécheresse prolongée qui a récemment frappé Djibouti a exposé au moins 20 % de la population de Djibouti-ville et 75 % des ménages ruraux à l’insécurité alimentaire. Ces chocs sur les moyens de subsistance peuvent interrompre l’accumulation de capital humain, endommageant le stock de capital humain et sa transmission intergénérationnelle. La prévalence de l’insécurité alimentaire a des effets négatifs sur les résultats nutritionnels tout au long du cycle de vie. Les ménages confrontés à des difficultés économiques, en particulier les ménages pauvres, s’adaptent souvent en adoptant des aliments plus transformés et moins nutritifs et en réduisant le nombre ou la taille des repas. Dans la ville de Djibouti, par exemple, 41,4 % des enfants de moins de 5 ans n’avaient pas un régime alimentaire minimum acceptable comprenant quatre groupes d’aliments. Ce manque de diversité alimentaire contribue à de mauvais résultats nutritionnels dans la petite enfance. L’enquête de suivi normalisé des secours et des transitions de 2019 a montré que près des trois quarts des femmes de Djibouti n’avaient pas une alimentation diversifiée, ce qui les prédisposait à des carences en micronutriments, notamment à l’anémie ferriprive (INSTAD 2019). Les effets d’une mauvaise alimentation se répercutent d’une génération à l’autre, 18,6 % des femmes en âge de procréer étant classées comme souffrant de malnutrition sur la base de mesures indirectes de la circonférence du milieu et de la partie supérieure du bras (23,1 % en milieu rural contre 16,7 % en milieu urbain). Les retards de croissance varient également en fonction de la localisation, avec des taux plus élevés dans les régions en retard, notamment Obock (40,2 %), Dikhil (33,3 %) et Tadjourah (32,6 %). CHAPITRE 1 : Introduction 7 L’insuffisance des dépenses en matière de soins de santé et de protection sociale est préoccupante. Seuls 5 % du budget sont consacrés aux soins de santé et 3 % à la protection sociale, contre plus de 30 % pour les infrastructures publiques. Selon la loi d’orientation sur l’éducation de 2000, l’éducation est un droit pour tous les enfants, sans distinction de sexe, d’âge, de statut social, d’origine ethnique ou de religion. À ce titre, l’État garantit une éducation de base gratuite de 6 à 16 ans. Vingt pour cent du budget est alloué à l’éducation, alors qu’en 2018, Djibouti n’avait alloué que 3,75 % du PIB à l’éducation, par rapport à la moyenne des petits États de 4,8 %16. Les dépenses de santé étaient encore plus faibles (1,8 % du PIB), alors que la moyenne des petits États est de 5,0 %17. Le système de protection sociale de Djibouti est insuffisant pour protéger les pauvres et les personnes vulnérables des effets néfastes du cycle de vie ou pour encourager l’investissement dans le capital humain. Le système est fragmenté et offre une couverture limitée. La couverture du filet de sécurité sociale était de 9,5 % en 2012, avec des dépenses de filet de sécurité sociale du gouvernement de 0,18 % du PIB, par rapport à la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord de 1 % et à la moyenne mondiale de plus de 1,5 %. En 2019, neuf programmes de protection sociale couvraient différents groupes, ce qui a entraîné une fragmentation. Les systèmes de filets de sécurité sociale sont essentiels pour protéger et renforcer le capital humain des enfants menacés par des impacts négatifs sur les moyens de subsistance, tels que les chocs environnementaux. Ce soutien est particulièrement important pour les 21 % de Djiboutiens qui sont extrêmement pauvres et n’ont pas la capacité de lisser la consommation et de protéger leur capital humain. Le manque de données et de capacités de mesure est un obstacle majeur à la mesure et au suivi précis des indicateurs clés du capital humain, ce qui entrave la capacité à évaluer l’état du capital humain dans le pays de manière globale. Plusieurs facteurs contribuent à ce problème : premièrement, les données sont rares car les enquêtes sur les revenus et les dépenses des ménages sont peu fréquentes et l’impact des politiques publiques n’est pas évalué fréquemment ; deuxièmement, la faibles qualité des données dans le secteur de la santé rend difficile la mesure de résultats sanitaires importants tels que le retard de croissance ; et troisièmement, l’accès aux données existantes est limité. Malgré l’adoption d’un plan national pour les statistiques, la collecte et l’utilisation des données sont souvent pilotées et financées de l’extérieur, ce qui entraîne des mesures peu fréquentes et une capacité d’évaluation limitée. Ces difficultés liées aux données font qu’il est difficile de mesurer et de suivre avec précision les indicateurs clés du capital humain au fil du temps. Il n’existe pas de stratégie solide de collecte de données permettant de mesurer les progrès de manière précise et régulière. L’importance de la production de données sur l’efficacité des politiques publiques est de plus en plus reconnue, comme le montrent les efforts du ministère de l’Éducation et de la Formation professionnelle (MENFOP) pour donner la priorité à l’expansion des données d’apprentissage par le biais d’évaluations en classe, nationales et internationales, telles que l’évaluation de la lecture en début d’année scolaire. 16 Voir Sustainable Development Goal 4 Indicators (base de données), Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la culture et la science, Paris, France Paris, France (consulté le 18 avril 2023), http://data.uis.unesco.org. 17 Voir Global Health Expenditure Database, Organisation mondiale de la santé, Genève, Suisse (3 mai 2023), https://apps.who​ .int/nha/database. 8 DJIBOUTI | Revue du capital humain III. ORGANISATION DU RAPPORT La simulation de l’Indice de capital humain (ICH) de Djibouti est une réalisation majeure de ce rapport qui sera discutée en détail dans le chapitre 2. Le score simulé de l’ICH de Djibouti est de 0,41, ce qui indique qu’un enfant né en 2022 n’atteindra que 41 % du plein potentiel de capital humain qu’il aurait atteint avec une éducation complète et une bonne santé. L’ICH, qui compare la productivité de la prochaine génération de travailleurs à une référence d’éducation complète et de santé alimentaire, a été calculé en utilisant la méthodologie de l’ICH, les sources de données standard de l’ICH mises à jour pour 2022, et a été dérivé du calculateur de l’ICH. Cet ICH est plus élevé que celui des pays à faible revenu (PFR) de 0,38 en 2020 et inférieur à la moyenne des pays à revenu intermédiaire de la tranche inférieure (PRITI), qui est de 0,48. La division de l’ICH de Djibouti en ses trois composantes (survie de l’enfant, éducation, santé) et les indicateurs fournissent un point de départ important pour comprendre les moteurs de ce score et les leviers potentiels pour l’action politique tout au long du cycle de vie. Djibouti a des résultats bien pires ou moins bons sur toutes les composantes de l’ICH et à tous les stades du cycle de vie que ses pairs en matière de revenus (à l’exception du retard de croissance chez les moins de 5 ans), et comparable à l'IGAD. Trois étapes particulièrement importantes ont été priorisées pour un examen approfondi dans cette Revue du Capital Humain (RCH) : la petite enfance, l’adolescence et la jeunesse, et les années de travail. Ces étapes sont des périodes de transition importantes dans la trajectoire d’accumulation du capital humain, les résultats du développement humain étant influencés par des interventions et des actions politiques intersectorielles. Grâce à un examen des données et des analyses existantes, ce RCH consacrera un chapitre à chacune de ces périodes du cycle de vie. L’accent sera mis sur les réalisations, les principaux goulets d’étranglement de l’accumulation du capital humain, ainsi que sur les actions prioritaires et les interventions politiques susceptibles de soutenir une accumulation équitable et efficace du capital humain. Le chapitre 3 examine l’intérêt d’investir dans le DPE pour obtenir les rendements cumulés les plus élevés. Pour atteindre leur plein potentiel de développement, les individus ont besoin de soins attentifs pendant leurs premières années, notamment d’un accès à des soins de santé et à des services de nutrition de qualité (par exemple, des soins prénataux et postnataux) ; d’une stimulation cognitive précoce et de possibilités d’apprentissage (par exemple, des programmes de soins et des classes préscolaires qui structurent l’apprentissage autour d’activités adaptées à l’âge et basées sur le jeu qui stimulent le développement de l’enfant et les compétences socio-émotionnelles précoces) ; et d’un environnement nourricier, sûr et sécurisé. Le DPE est une porte d’entrée fondamentale vers l’apprentissage et les soins de santé, les interventions précoces au cours des 1 000 premiers jours de la vie étant essentielles pour atténuer les risques et promouvoir les facteurs de protection qui permettent un développement sain du cerveau et produisent des gains cumulatifs pour le bien-être et la productivité future. Le DPE profite également davantage aux enfants des groupes défavorisés. Si le gouvernement a fait des progrès considérables dans la création d’un environnement favorable en promulguant des politiques, des stratégies et des lois intégrées, telles que la politique nationale pour le développement intégré de la petite enfance, il reste encore beaucoup à faire au niveau de la mise en œuvre et de la coordination. CHAPITRE 1 : Introduction 9 Les résultats en matière de DPE à Djibouti sont limités et inégalement répartis entre les enfants, reflétant les disparités socio-économiques et géographiques. Cela signifie que de nombreux enfants n’auront pas la possibilité de réaliser leur plein potentiel. Bien que Djibouti prenne des mesures pour créer un environnement politique et juridique favorable à un système de DPE efficace, il existe des faiblesses importantes en termes d’accès, de couverture, d’équité et de qualité de la prestation de services essentiels pour les familles avec de jeunes enfants. Les interventions multisectorielles, dans les domaines de la santé, de la nutrition, de la sécurité sociale et de l’éducation, jettent les bases de la réussite de l’éducation préscolaire et de la transition vers l’école primaire. Par exemple, l’accès aux classes préscolaires et leur disponibilité, passés de 28 en 2017 à environ 80 en 2021, s’étendent progressivement aux zones urbaines et rurales, et le taux de scolarisation préscolaire augmente mais reste faible (13,2 %). Les obstacles à l’élargissement de l’accès sont notamment le manque de financement, de salles de classe et d’enseignants préscolaires qualifiés. Le chapitre 4 se concentre sur les périodes de transition des adolescents et des jeunes, l’entrée sur le marché du travail et les choix reproductifs effectués au cours de cette période. Au cours de ces années de formation, les interventions en matière de capital humain sont susceptibles de produire des retours sur investissement élevés. Les résultats de cette période sont influencés par la qualité du SRMNIA+N, du développement du jeune enfant et des services scolaires, et en sont le reflet, car les jeunes femmes prennent des décisions en matière de procréation qui affectent leur propre santé et celle de la génération suivante. Dans le même temps, la scolarisation affecte à la fois l’entrée sur le marché du travail et la productivité. Lorsque les jeunes deviennent parents, ils façonnent également la transition, car les jeunes adultes avec enfants ont tendance à avoir les taux les plus élevés d’abandon scolaire et ne sont souvent ni employés, ni scolarisés, ni en formation. Les jeunes femmes, en particulier, entrent dans cette période avec moins d’éducation, ont souvent été soumises à des MGF, sont mariées plus tôt et ont moins de mobilité sociale intergénérationnelle. FIGURE 4. Taux de dépendance par âge à Djibouti 100 92 88 90 80 Ratio de dépendance par âge 80 71 70 63 60 55 54 49 49 50 40 30 20 10 0 70 75 80 85 90 95 15 20 00 05 10 25 30 35 40 45 50 55 60 20 20 19 19 20 20 20 19 20 19 20 20 19 20 19 20 20 20 20 Ratio de dépendance totale par âge - estimations Ratio de dépendance totale - prévisions Source : Division de la population de l’ONU Division de la population de l’ONU 2022 10 DJIBOUTI | Revue du capital humain Le chapitre 5 se concentre sur les années de travail, en fournissant une vue d’ensemble des résultats du marché du travail et des opportunités de s’orienter vers une économie plus compétitive, alimentée par la productivité. La croissance à Djibouti n’a pas fourni des opportunités d’emploi plus nombreuses et de meilleure qualité pour la population en âge de travailler qui est en expansion. Djibouti devrait atteindre son taux de dépendance par âge le plus bas en 2050, avec environ 48 % des Djiboutiens en âge de travailler (Figure 4)18. Seulement 32,1 % étaient dans la population active en 2019 - moins que les pairs structurels et régionaux. La participation des femmes, des jeunes et des habitants des zones rurales à la population active est particulièrement faible. Une faible participation à la population active accroît la dépendance à l’égard de la population active et réduit les perspectives de croissance. En 2017, le taux d’activité des femmes était de 32 %, contre 59 % pour les hommes, moins de 33 % pour les personnes âgées de 15 à 24 ans, 55 % pour celles âgées de 25 à 39 ans et 53 % pour celles âgées de 40 à 60 ans. La faible participation des femmes au marché du travail est liée aux mariages et aux grossesses précoces, qui interrompent l’accumulation de capital humain. En outre, la faible acquisition de compétences tout au long de la vie, associée à une demande inadéquate de compétences et à la nécessité d’une plus grande flexibilité sur le marché du travail, conduit à un équilibre circulaire de faibles compétences avec des incitations inadéquates pour briser le cycle des faibles compétences et de la faible demande de ces compétences sur le marché du travail. Le chapitre 6 présente les principales actions et interventions politiques qui permettront à Djibouti d’améliorer ses résultats en matière de capital humain. Les actions sont conçues pour développer une population en bonne santé, qualifiée et résiliente en tant que moteur d’une croissance et d’un développement économiques durables et inclusifs. Les politiques et les investissements appropriés permettront à un plus grand nombre de personnes d’être en meilleure santé, plus éduquées, plus qualifiées et plus productives en participant à l’économie croissante du pays, ce qui créera des emplois plus nombreux et de meilleure qualité. En investissant aujourd’hui dans le capital humain, les enfants bénéficieront d’une meilleure qualité de vie et de possibilités accrues lorsqu’ils atteindront l’âge adulte. 18 Voir Age Dependency Ratio Projections, Djibouti, 1950 to 2100 (base de données), Our World in Data, Oxford, UK (May 5, 2023), https://ourworldindata.org/grapher/age-dependency-ratio-projected-to-2100?country=~DJI. CHAPITRE 1 : Introduction 11 CHAPITRE 2 : L’INDICE DE CAPITAL HUMAIN MESSAGES CLÉS • Le score de l’ICH simulé de Djibouti est de 0,41, ce qui indique qu’un enfant né en 2022 n’atteindra que 41 % du plein potentiel de productivité qu’il aurait atteint s’il avait bénéficié d’une éducation complète et d’une bonne santé. Cet ICH est plus élevé que la moyenne des PFR de 0,38 en 2020, mais plus bas que la moyenne des PRITI de 0,48. • Djibouti a de meilleurs résultats pour le nombre d’années d’études escomptées, mais des résultats de tests harmonisés inférieurs aux moyennes des pays à faible revenu et de l'IGAD, une probabilité similaire de survie jusqu’à l’âge de 5 ans et de meilleurs résultats en matière de santé que les pairs de la région. • Le taux de survie des enfants et les faibles résultats de l’apprentissage expliquent en grande partie le score de Djibouti dans l’ICH. La survie de l’enfant est le point de départ pour devenir un futur membre productif de la société. Le manque de données sur l'apprentissage rend difficile la mesure des résultats de l’apprentissage en matière de calcul et d’alphabétisation, les occasions manquées d’acquérir des connaissances de base dans les premières années limitant l’accumulation du capital humain tout au long du cycle de vie. • L’utilisation du capital humain à Djibouti est remarquablement faible, surtout pour les femmes. En ajustant pour l’utilisation, le capital humain tombe de 0.41 à 0.09, ce qui indique qu’un enfant né à Djibouti en 2022 peut s’attendre à utiliser seulement 9 % de son potentiel de capital humain ; pour les femmes, ce chiffre tombe a 5%. L’ICH est un indicateur transnational qui mesure le capital humain qu’un enfant né aujourd’hui peut espérer accumuler d’ici son 18e anniversaire, compte tenu des risques de mauvaise santé et de mauvaise éducation dans son pays. L’ICH rassemble des mesures de différentes dimensions du capital humain : la santé (survie des enfants, retard de croissance et taux de survie des adultes) et la quantité et la qualité de l’éducation (nombre d’années de scolarité attendues et qualité de l’éducation). En utilisant des estimations du rendement économique de l’éducation et de la santé, les composantes sont combinées en un indice qui reflète la productivité attendue d’un enfant né aujourd’hui en tant que futur travailleur, par rapport à une référence d’éducation complète et de santé totale. Dans les pays les plus pauvres, les enfants courent un risque important de mourir avant leur cinquième anniversaire. Même s’ils atteignent l’âge de la scolarité, ils risquent de ne pas commencer l’école ou de ne pas achever un cycle complet de 14 années de scolarité, de la maternelle à la douzième année, comme c’est généralement le cas dans les pays à revenu élevé (PRE). Le temps passé à l’école ne se traduit pas toujours par un apprentissage, en fonction de facteurs tels que la qualité des écoles et des enseignants qu’ils rencontrent. Lorsqu’ils atteignent 12 DJIBOUTI | Revue du capital humain l’âge de 18 ans, ils peuvent subir les effets durables d’une mauvaise santé et d’une mauvaise nutrition pendant l’enfance, ce qui pourrait limiter leurs capacités physiques et cognitives lors de la transition vers l’âge adulte. L’annexe B présente une vue d’ensemble de la méthodologie et du calcul de l’ICH. Malgré l’amélioration de divers indicateurs de capital humain au cours des deux dernières décennies, le score simulé de l’ICH de Djibouti est de 0,41, ce qui indique qu’un enfant né en 2022 n’atteindra que 41 % de la capacité humaine potentielle qu’il aurait pu atteindre avec une éducation complète et une pleine santé. Ceci est en retard par rapport à la moyenne des PRFM de 0,48, la moyenne du Moyen Orient et de l’Afrique du Nord (excluant les PRE) de 0,51, mais est plus élevé que la moyenne de l’IGAD de 0,40. Comprendre la performance de Djibouti à travers les composantes de l’ICH est un premier pas important dans l’amélioration des résultats du capital humain. Néanmoins, il est important de noter que l’ICH pour chaque pays et groupe de pays fait référence à des données de 2020 ou avant. Dans le cas de Djibouti, le score simulé est pour 2022 et combine les données avant et après la pandémie. FIGURE 5. Comparaison de l’indice de capital humain (ICH) simulé de Djibouti , Composantes ICH ( - ) avec ICH ci-dessus , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , , Moyen-Orient IGAD Pays à faible Pays à revenu Djibouti et Afrique du revenu intermédiaire, Nord(hors PRE) tranche inférieure Composante : Survie de l'enfant Composante : Scolarisation Composante : Santé Source : Groupe interinstitutions des Nations Unies pour les estimations de la mortalité infantile 2018, estimations du personnel de la Banque mondiale complétant l’Institut de statistique de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture 2019, calculs du personnel de la Banque mondiale complétant l’USAID 2022, Division de la population des Nations Unies 2019, estimations conjointes UNICEF-OMS-Banque mondiale sur la malnutrition 2019 Note : La figure montre les composantes individuelles de l’ICH, avec une valeur de 0 à 1. Le score de l’ICH (en gras) est calculé en multipliant les trois composantes. L’ICH de chaque groupe, le score simulé de Djibouti est pour 2022 et combine les données avant et après la pandémie. I. COMPOSANTE 1 : SURVIE DE L’ENFANT La composante 1, la survie de l’enfant, est considérée comme le point de départ pour devenir un futur membre productif de la société. Elle évalue la probabilité qu’un enfant survive jusqu’à l’âge de 5 ans si les taux de mortalité par âge actuels prévalent par rapport à la référence de tous les enfants survivants. La mortalité dans les premières années de la vie est largement utilisée comme indicateur du futur capital humain. Elle agit comme un multiplicateur, avec un effet significatif sur le CHAPITRE 2 : L’indice de capital humain 13 score global. Le taux de survie des enfants de Djibouti (0,95), qui est inférieur aux taux du Moyen- Orient et de l’Afrique du Nord (0,98 ; à l’exclusion des pays à revenu élevé) et des pays à revenu intermédiaire (0,96), explique en partie son ICH simulé, car cet indicateur a un effet multiplicateur. Son taux de survie des enfants est supérieur à celui de l’IGAD (0,94) et à la moyenne des PFR (0,93). Les résultats sanitaires de Djibouti se sont améliorés au cours des deux dernières décennies. Une plus grande disponibilité des prestataires de services de santé et des médicaments, ainsi qu’une plus grande capacité de gestion, ont considérablement amélioré la prestation de certains services, en particulier le SRMNIA+N, et les résultats sanitaires connexes dans certaines régions. Le pays, par exemple, a augmenté son indice de couverture universelle des services de santé, qui est passé de 27 en 2000 à 48 en 201919 20. Les améliorations du système de santé ont régulièrement réduit la mortalité des enfants de moins de 5 ans à Djibouti (54 décès pour 1 000 naissances vivantes) au cours de la dernière décennie, bien qu’elle soit plus élevée que la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (24 décès pour 1 000 naissances vivantes) et que celle des PRITI (44 naissances pour 1 000 naissances vivantes) (Figure 6) (IGME 2019). Les estimations sont basées sur les données de 2019, fournissant une base de référence pré-COVID-19. La mortalité des moins de 5 ans est élevée pour les filles (50,8) et les garçons (60,8). La mortalité infantile à Djibouti est la plus élevée de la région (47,2 pour 1 000 naissances vivantes) et représente 84 % des décès de moins de 5 ans, ce qui souligne l’importance de répondre aux besoins de soins de santé dès les premiers stades de la vie. FIGURE 6. Comparaison de la mortalité des moins de 5 ans naissances vivantes) (Estimation modélisée, pour Année Djibouti Moyen-orient et afrique du nord (hors pays à haut revenu) Pays à Faible Revenu Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure Source : IGME 2019 19 Cet indice mesure la couverture des services de santé essentiels (définie comme la couverture moyenne des services essentiels sur la base d’interventions traceurs qui incluent la santé reproductive, maternelle, néonatale et infantile, les maladies infectieuses, les maladies non transmissibles et la capacité et l’accès aux services, parmi la population générale et la population la plus défavorisée). L’indicateur est un indice rapporté sur une échelle sans unité de 0 à 100, qui est calculé comme la moyenne géométrique de 14 indicateurs de suivi de la couverture des services de santé. 20 Voir l’Observatoire mondial de la santé (base de données), Organisation mondiale de la santé, Genève, Suisse (7 mai 2023), https://www.who.int/data/gho/indicator-metadata-registry/imr-details/4834. 14 DJIBOUTI | Revue du capital humain La mortalité maternelle est l’une des principales causes de décès à Djibouti et, à l’instar de la mortalité des moins de 5 ans, elle est nettement supérieure à la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (à l’exclusion des pays à revenu élevé), qui est de 62 pour 100 000 naissances vivantes (Figure 7). Les causes de la mortalité maternelle à Djibouti sont systémiques et comprennent les hémorragies du post-partum, les accouchements par obstruction, les complications liées à l’avortement, les troubles de l’hypertension et les infections. Bien que ces causes puissent être évitées grâce à des soins de bonne qualité, l’accès aux soins prénatals n’a pas progressé au même rythme que l’amélioration de l’accouchement en institution. Seulement 12% des femmes enceintes à Djibouti bénéficient d’au moins quatre visites de soins prénatals, et 54 % reçoivent des soins postnatals, avec des disparités selon le quintile de revenu (UNICEF 2022). Environ 29 % des établissements de santé de Djibouti peuvent fournir des soins obstétriques d’urgence, soit environ huit établissements pour 500 000 habitants21. FIGURE 7. Comparaisons entre pays du taux de mortalité maternelle naissances vivantes) (Estimation modélisée, pour Année Djibouti Moyen-orient et afrique du nord (hors pays à haut revenu) Pays à Faible Revenu Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure Source : OMS, UNICEF, FNUAP, Groupe de la Banque mondiale et Division de la population des Nations Unies 2019 Les obstacles liés à l’offre et à la demande limitent les résultats en matière de santé et de nutrition à Djibouti. Du côté de la demande, la pauvreté et les obstacles financiers, le manque de connaissances, l’engagement limité de la communauté et les croyances socioculturelles néfastes influencent les comportements de recherche de santé. Du côté de l’offre, il y a peu de travailleurs de la santé et de la nutrition adéquatement formés - on estime à dix le nombre de professionnels de la santé qualifiés pour 10 000 habitants et à sept le nombre de nutritionnistes (World Bank 2018a). Les possibilités d’amélioration de la qualité, telles que l’accréditation, l’octroi de licences, la formation, la supervision et les audits cliniques, font également défaut. 21 Voir Djibouti Country Page (base de données), Fonds des Nations Unies pour la population, New York (7 mai 2023), https:// www.unfpa.org/data/DJ. CHAPITRE 2 : L’indice de capital humain 15 II. COMPOSANTE 2 : SCOLARISATION La composante 2 de l’ICH évalue les années de scolarisation corrigées de l’apprentissage, en combinant les informations sur les années de scolarisation attendues d’un enfant avec les résultats de tests harmonisés pour évaluer le niveau d’apprentissage des élèves par rapport au nombre d’années passées à l’école. La quantité et la qualité de l’éducation constituent un élément important de la formation du capital humain. Les taux de scolarisation à Djibouti ont augmenté à tous les niveaux au cours des deux dernières décennies, en particulier aux niveaux primaire et secondaire inférieur, mais le nombre d’années de scolarisation attendues est encore faible (9,2 ans) - inférieur à la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (à l’exclusion des pays à revenu élevé) de 10,5 ans, à la moyenne des pays à faible revenu de 10,4 ans, mais supérieur à la moyenne des pays à faible revenu de 7,6 ans. Les taux bruts de scolarisation ont augmenté à tous les niveaux entre 2005 et 2021 : de 44 % à 96 % au niveau primaire, de 28 % à 76 % au niveau secondaire inférieur et de 16 % à 46 % au niveau secondaire supérieur22. Les taux de redoublement et d’abandon étaient élevés, en particulier pour les filles (INSTAD 2017). FIGURE 8. Inscription à l’école en fonction de l’état de santé 80 60 40 20 0 5 10 15 20 Âge Pas de maladie (12 mois) Maladie (12 mois) Source : INSTAD 2017 L’inscription à l’école est étroitement liée à la santé des élèves. Les taux de scolarisation pour 2017 étaient systématiquement inférieurs chez les enfants ayant déclaré des problèmes de santé ou une maladie en cours ou récents (dans les 12 mois) (figure 8). L’écart se creuse dès l’âge de 9 ans. Les individus âgés de 15 à 18 ans ayant des problèmes de santé ou une maladie et ayant déclaré rétrospectivement l’âge du décrochage scolaire (11,8) ont abandonné l’école 1,1 an plus tôt en moyenne que ceux qui ne l’ont pas abandonnée (12,9). 22 Voir MENFOP (Ministry of Education and Vocational Training). Annexe Annuaire 2021-2022. Djibouti, Djibouti: MENFOP. http://www.education.gov.dj/index.php?option=com_k2&view=item&id=647:annexe-annuaire-2021​ -2022&Itemid=1700&lang=en. 16 DJIBOUTI | Revue du capital humain Les résultats de l’apprentissage sont faibles en ce qui concerne le calcul et l’alphabétisation. Le manque de données sur l’apprentissage rend difficile l’évaluation de l’ampleur du problème et la conception de solutions appropriées pour y remédier. Les réformes entreprises par le MENFOP pour améliorer l’apprentissage fondamental et combler les lacunes en matière de données d’apprentissage donnent des résultats prometteurs, bien que partant d’une base peu élevée. Les résultats d’une récente évaluation de la lecture en début de scolarité montrent des améliorations significatives des résultats d’apprentissage des élèves en lecture entre l’évaluation de base et l’évaluation à mi-parcours, faisant de Djibouti l’un des rares pays à afficher une augmentation de l’apprentissage au cours de la période de la COVID-19. En novembre 2020, les élèves ont été évalués comme étant capables de lire en moyenne 17 lettres et 5 mots d’un texte adapté à leur âge. Un an plus tard, ce chiffre était passé à 40 lettres et 20 mots. Ces progrès et la dynamique des efforts de réforme (encadré 1) doivent être maintenus et, si possible, accélérés. Les occasions manquées d’acquérir des connaissances de base dans les premières années limitent l’accumulation du capital humain tout au long du cycle de vie. Le faible taux d’alphabétisation des adultes à Djibouti (60,1 % pour les hommes, 39,5 % pour les femmes) est un obstacle important à l’acquisition des compétences nécessaires pour entrer sur le marché du travail. Il existe des variations géographiques dans les contraintes de capacité du système éducatif et de l’environnement d’apprentissage à domicile, ce qui rend difficile l’amélioration des résultats d’apprentissage. Le ratio élèves/enseignants à l’école primaire est de 27,7:1 23, plus élevé que le ratio médian de 27:1 pour les PRFM. Tous les enseignants sont qualifiés, mais le ratio enseignants/ enfants en âge d’être scolarisés est faible. La proportion d’enseignantes est également très faible (30 %) et diminue avec le niveau d’éducation. Les inégalités entre les zones rurales et urbaines, en ce qui concerne l’infrastructure physique des écoles et l’environnement favorable, aggravent les difficultés des enseignants. Les enseignants ruraux, par exemple, sont moins susceptibles de recevoir un soutien pédagogique de la part des accompagnateurs. Par ailleurs, l’accès à l’électricité varie en fonction du lieu, avec un taux d’accès de 100 % dans le centre-ville et les banlieues de Djibouti, mais de seulement 50 % dans d’autres régions. En ce qui concerne l’environnement familial, seuls 7,6 % des élèves ont déclaré avoir des livres et des magazines à la maison - 22,6 % dans le centre-ville et 1,9 % dans les autres régions (USAID 2022). La fréquentation de l'enseignement préscolaire, qui est examinée en détail dans le chapitre suivant, est faible (13.2 %), mais elle se développe et constitue une priorité du gouvernement. Le manque d’accès à un environnement favorable à l’apprentissage peut aggraver les résultats pour les enfants, en particulier ceux qui ont déjà du retard, comme par exemple, les filles, les enfants ayant des besoins spéciaux et les enfants de familles disposant de moins de ressources pour favoriser l’apprentissage en dehors de l’école. Les écarts entre les sexes sont importants et se creusent à chaque niveau. En deuxième année, les filles atteignent un niveau de compétence en lecture orale, avec une compréhension de la lecture et de l'écoute presque identique à celui des garçons (USAID 2021), mais seulement 71 % des filles atteignent la dernière année de l’école primaire, contre 80 % des garçons. Le taux de passage du primaire au secondaire est également faible : 75 % pour les filles et 77 % pour les garçons. Les filles risquent d’avantage un décrochage scolaire en raison des normes et des barrières culturelles 23 Voir MENFOP (Ministry of Education and Vocational Training). Annuaire Statistique 2021-2022. Djibouti, Djibouti: MENFOP. http://www.education.gov.dj/index.php?option=com_k2&view=item&id=647:annexe-annuaire-2021​ -2022&Itemid=1700&lang=en. CHAPITRE 2 : L’indice de capital humain 17 ENCADRÉ 1 : Réformes de l’éducation Au cours des deux dernières décennies, le gouvernement a placé l’éducation au centre de ses politiques de développement. Le MENFOP met en œuvre une réforme globale de l’éducation axée sur l’amélioration de la qualité, de l’accès et de la pertinence. Ces réformes sont introduites sous la forme d’un ensemble intégré visant à améliorer l’apprentissage de plusieurs manières : • Développer l’enseignement préscolaire pour favoriser la préparation à l’école. L’enseignement préscolaire est axé sur les zones rurales et les enfants vulnérables, où le retour sur investissement est le plus élevé. L’engagement d’offrir une année d’enseignement préscolaire à tous les enfants d’ici 2030 représente un effort concerté pour garantir que tous les enfants puissent bénéficier d’un développement précoce de leurs compétences cognitives et socio-émotionnelles. • Réviser le programme d’études dans le primaire et le premier cycle du secondaire pour qu’il soit davantage axé sur les compétences nécessaires à la vie courante, l’apprentissage fondamental et un contenu pertinent. • Offrir un développement professionnel continu aux enseignants, aux conseillers pédagogiques et aux chefs d’établissement afin de renforcer les pratiques d’enseignement pertinentes et interactives. • Réaliser des évaluations de l’apprentissage pour mesurer les progrès et identifier les domaines prioritaires afin de renforcer les pratiques d’enseignement et le développement professionnel continu. Le MENFOP donne la priorité aux réformes du système d’examen et se concentre sur les évaluations formatives complétées par des évaluations nationales de l’apprentissage pour contrôler l’apprentissage fondamental. Dans ce cadre, le MENFOP participe à sa première évaluation internationale par le biais du Programme d’analyse dessystèmes éducatifs pour les ministres de l’éducation des États et gouvernements francophones (PASEC). • Mettre l’accent sur l’inclusion et l’équité, ce qui inclut le soutien à l’éducation des réfugiés, y compris la mise à disposition de programmes et de matériel d’apprentissage dans les langues clés des réfugiés, des programmes visant à améliorer la scolarisation des filles et leur maintien à l’école, ainsi que des stratégies visant à soutenir l’éducation des enfants ayant des besoins particuliers. • Mettre l’accent sur les technologies de l’éducation pour améliorer l’apprentissage, renforcer les compétences numériques, faciliter le développement professionnel en ligne adapté au rythme des enseignants et des responsables de l’éducation, et renforcer l’apprentissage à distance et la résilience du système pour répondre aux crises et aux chocs. Ces réformes, soutenues par la Banque et d’autres partenaires de développement, donnent des résultats prometteurs en matière d’apprentissage fondamental, comme en témoignent les récentes évaluations de l’apprentissage. Le maintien de ces réformes dans l’ensemble du système éducatif et leur intégration dans celui-ci seront essentiels pour développer les compétences de base nécessaires à la vie courante et jeter les bases de l’accumulation du capital humain. 18 DJIBOUTI | Revue du capital humain qui limitent leur accès à l’éducation et à d’autres services sociaux, plus particulièrement au niveau secondaire. Les mariages précoces, les MGF et les grossesses affectent également la santé maternelle et ont des répercussions intergénérationnelles sur la santé des enfants. III. COMPOSANTE 3 : SANTÉ La composante 3 est composée de deux indicateurs de substitution pour la santé : (i) le taux de survie des adultes (pourcentage des jeunes de 15 ans qui survivront jusqu’à l’âge de 60 ans) et (ii) la proportion d’enfants qui ne souffrent pas de retard de croissance (fraction des enfants de moins de 5 ans dont la taille est inférieure d’au moins 2 écarts types à la médiane de référence de la courbe de croissance de la taille pour leur âge). L’espérance de vie à Djibouti s’est améliorée après une forte baisse entre 1990 et 2000. En 2020, une personne née à Djibouti devrait vivre en moyenne 63 ans, contre 72 ans au Moyen-Orient et en Afrique du Nord (à l’exclusion des pays à revenu élevé)24. Le taux de survie des adultes à Djibouti est de 80 %, ce qui est comparable aux moyennes des PFR- PRI du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (à l’exclusion des PRE) avec un taux supérieur aux moyennes de l’Autorité intergouvernementale pour le développement et des PFR (75 %). Djibouti est confronté à un double fardeau de maladies transmissibles et non transmissibles, avec des défis sanitaires tout au long du cycle de vie. Le virus de l’immunodéficience humaine et le syndrome d’immunodéficience acquise (VIH/sida) sont une cause majeure de mortalité, et les maladies non transmissibles telles que les cardiopathies ischémiques, les accidents vasculaires cérébraux, les cirrhoses et le diabète ont augmenté de manière significative entre 2009 et 2019. Les taux d’obésité sont également en hausse chez les femmes (18,3 %), les hommes (8,6 %) et les enfants (5,0 %). Les carences nutritionnelles et sanitaires accumulées pendant la petite enfance sont en partie à l’origine des niveaux élevés de maladies non transmissibles. Comme indiqué précédemment, les obstacles liés à la demande et à l’offre affectent les résultats en matière de santé et de nutrition, notamment les lacunes dans l’infrastructure des soins de santé, la capacité limitée de surveillance des maladies infectieuses, le manque de personnel de santé qualifié, de médicaments et d’équipements, les croyances et pratiques socioculturelles néfastes et l’accès inégal à des services de soins de santé de bonne qualité dans des domaines tels que la santé sexuelle et génésique. Les données d’une enquête téléphonique d’avril 2021 ont révélé que, bien que 96 % des 47 % de répondants urbains ayant indiqué avoir pu accéder aux services de santé dont ils avaient besoin au cours des 30 derniers jours (World Bank 2021), dans les régions mal desservies, la demande de services est supérieure à l’offre. Le taux de retard de croissance chez les enfants de moins de cinq ans a diminué de 28,0 % en 2013 à 20,9 % en 2019, mais reste une préoccupation majeure, affectant environ 33 000 enfants par an. Le taux de retard de croissance est inférieur à la moyenne modélisée des PRFM de 29,9 %25, mais se classe parmi les 15 % les plus élevés au monde. Le retard de croissance est le résultat d’un processus cumulatif qui commence pendant la grossesse et se poursuit pendant la petite enfance. 24 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (7 mai 2023), https://databank​ .worldbank.org/source/world-development-indicators. 25 Voir World Development Indicators (base de données), Banque mondiale, Washington, DC (7 mai 2023), https://databank​ .worldbank.org/source/world-development-indicators. CHAPITRE 2 : L’indice de capital humain 19 Il est dû à des expériences répétées de maladies (diarrhée, paludisme, infections respiratoires aiguës) et à un apport alimentaire insuffisant qui limitent la croissance de l’enfant. L’enquête 2019 Standardized Monitoring Assessment for Relief and Transitions (SMART) montre que les retards de croissance sont plus fréquents chez les garçons (27,4 %) que chez les filles (23,8 %). Ce phénomène pourrait être lié à des causes biologiques ou sociales (Thurstans et al. 2020). Le retard de croissance est associé à des retards cognitifs et à un manque de réussite scolaire. Les enfants souffrant d’un retard de croissance sont plus susceptibles d’avoir de mauvais résultats à l’école, ce qui limite leur potentiel de gain tout au long de leur vie et leur productivité sur le marché du travail. À l’inverse, les enfants qui ne souffrent pas de retard de croissance ont 33 % de chances supplémentaires de ne pas vivre dans la pauvreté à l’âge adulte, les programmes de nutrition précoce augmentant les salaires des adultes de 5 à 50 % et l’achèvement de la scolarité d’un an (Hoddinott et al. 2011). Les faibles résultats nutritionnels pour les enfants sont omniprésents dans le pays et sont souvent liés à de mauvaises pratiques d’alimentation des nourrissons et des jeunes enfants, à des maladies diarrhéiques pendant l’enfance et au risque de maladies non transmissibles à l’âge adulte. La dénutrition, très répandue, est à l’origine de 57 % des décès d’enfants de moins de cinq ans (World Bank 2022). On estime que 17 % des enfants de moins de 5 ans souffrent d’insuffisance pondérale (contre 29,6 % en 2013), sans différence entre les sexes (INSTAD 2019). La dénutrition est liée à l’insécurité alimentaire et à la malnutrition (qui sont liées aux sécheresses fréquentes), aux épidémies régulières de rougeole et de diarrhée aiguë, au manque d’accès à l’eau, à l’assainissement et à l’hygiène, aux prix élevés des denrées alimentaires et à la couverture limitée des filets de sécurité. Chez les enfants de moins de 5 ans, la fièvre, le paludisme, la toux, le rhume et la diarrhée sont les principaux problèmes de santé. La diarrhée est le principal problème de santé chez les enfants de moins d’un an, représentant plus de 33 % des enfants ayant eu des problèmes de santé récents. La diarrhée a été signalée comme le principal problème de santé d’environ 4,4 % des enfants de moins d’un an. IV. IMPACT DE LA COVID-19 SUR LE CAPITAL HUMAIN À DJIBOUTI À Djibouti, comme dans presque tous les pays du monde, la pandémie de la COVID-19 a affecté les efforts déployés pour constituer, protéger et employer le capital humain (Figure 9). La leçon à tirer des pandémies et des crises passées est que les effets de la pandémie se limitent rarement aux personnes directement touchées, mais qu’ils se répercutent sur l’ensemble des populations. Le capital humain s’accumule sur plusieurs générations, mais la pandémie a perturbé et inversé les résultats du capital humain tout au long du cycle de vie : dans l’enfance, sur le marché du travail, par des perturbations de la santé et des pertes d’apprentissage, et par la transmission intergénérationnelle. À Djibouti, l’impact le plus évident et le plus mesurable de la COVID sur le capital humain a été le décès et la maladie. De janvier 2020 au 10 mai 2023, on compte 15 690 cas confirmés de COVID-19 et 189 décès26. Le taux de vaccination contre la COVID-19 à Djibouti est inférieur à celui 26 Voir le tableau de bord des urgences sanitaires mondiales (base de données), OMS, Genève. (10 mai 2023), https://covid19​ .who.int/region/emro/country/dj. 20 DJIBOUTI | Revue du capital humain de la région, avec seulement 30,3 % de la population ayant reçu au moins une dose (Johns Hopkins 2022). L’hésitation vaccinale, le grand nombre de personnels de santé non vaccinés et l’impact moins important que prévu de la pandémie à Djibouti sont à l’origine de ce faible taux (UNICEF 2021). L’action précoce du gouvernement pour appliquer les mesures visant à limiter la propagation du virus (par exemple, éloignement physique, dépistage rapide, traçage, isolement des cas positifs), qui a permis un contrôle rapide de l’épidémie, associée aux caractéristiques démographiques de la population (c’est-à-dire une population plus jeune), a conduit à cet impact moins important que prévu. Entre le 17 mars et le 16 mai 2020, par exemple, Djibouti a effectué le plus grand nombre de tests par habitant en Afrique et a isolé, traité et retracé les contacts de chaque cas positif (Elhakim et al. 2020). Les mesures proactives prises par le gouvernement pour promouvoir la continuité de l’apprentissage, en réponse aux perturbations de la scolarité, ont limité les pertes d’apprentissage et, par extension, augmenté la productivité potentielle future. En réponse aux fermetures d’écoles de mars à août 2020, le MENFOP a mis en place un système d’enseignement à distance, avec un soutien ciblé pour les réfugiés. Pour ceux qui n’ont pas eu un accès à l’apprentissage à distance par la télévision et pour combler les lacunes en matière d’apprentissage numérique, des kits de fournitures scolaires contenant du matériel d’apprentissage de base ont été distribués avec le soutien de jeunes diplômés dans les écoles rurales. Des diagnostics rapides de l’apprentissage pour élaborer une stratégie de remédiation, associés à la formation des enseignants et à des programmes psychosociaux, ont complété cette intervention. La réponse à la COVID-19 a renforcé la capacité du système éducatif à construire et à protéger le capital humain dans un contexte de crise, notamment grâce à des interactions intersectorielles avec d’autres secteurs concernés. Le programme d’alimentation scolaire, par exemple, a fourni des aliments frais et secs aux enfants des zones rurales afin de combler les lacunes nutritionnelles au cours des premiers mois de la pandémie. On pense que ce programme a permis d’augmenter la fréquentation scolaire après la réouverture des écoles, d’améliorer la nutrition des enfants et le bien-être des ménages. Face à la tendance mondiale à la baisse de la scolarisation et à l’augmentation des abandons scolaires liée à la COVID-19, Djibouti fait partie des quelques pays à avoir enregistré aucun changement dans la capacité des enfants à retourner à l’école et à y rester après la pandémie (World Bank 2022). La pandémie de la COVID-19 a perturbé la prestation des services de santé dans un environnement déjà difficile. Au niveau mondial, on estime que les perturbations des services de santé maternelle et infantile ont augmenté la mortalité infantile de 45 % dans 118 pays à revenu faible ou intermédiaire en réduisant l’accès à la nourriture et aux soins de santé (Roberton et al. 2020). À Djibouti, 37 % des ménages qui avaient besoin de soins de santé en juin 2020 n’ont pas pu y accéder, principalement par manque d’argent (World Bank 2020b). La COVID-19 a accru les pressions sur le système de santé, notamment les pénuries chroniques de personnel de santé qualifié, de médicaments et d’équipements. Selon une modélisation réalisée en 2021, les interruptions de service à Djibouti ont privé 14 600 enfants d’antibiotiques oraux contre la pneumonie, 20 800 enfants de vaccins contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche, 4 300 naissances de moins dans les établissements de santé et 13 500 femmes de moins bénéficiant de la planification familiale (World Bank 2021). Bien que les taux d’immunisation aient été en baisse avant la pandémie, on pense que la pandémie a encore réduit les taux d’immunisation. CHAPITRE 2 : L’indice de capital humain 21 La pandémie a provoqué des chocs de revenus, en particulier parmi les populations les plus pauvres dont 47 % travaillent de manière informelle. En juin 2020, on estimait que 19 % des soutiens de famille avaient perdu leur emploi et que 42 % travaillaient moins ou pas du tout (World Bank 2020b). En tant que petit pays dont la base de production est limitée et qui dépend fortement des flux commerciaux, les premières restrictions limitant les déplacements et les perturbations de la chaîne d’approvisionnement des importations de denrées alimentaires ont affecté les moyens de subsistance. Des enquêtes téléphoniques réalisées en juillet 2020 montrent que, peu après les premières restrictions, 79 % des ménages avaient un accès limité aux légumes frais (World Bank 2020). Dans l’ensemble, 26 % des ménages ont manqué de nourriture au cours des 30 jours précédant l’enquête. Bien que cet effet ait diminué et ait été presque éliminé en mars 2021, des données mondiales montrent qu’une mauvaise alimentation in utero et au cours des 1 000 premiers jours de la vie peut avoir des effets durables sur la santé chronique et le niveau cognitif à l’âge adulte (Almond et Currie 2011). L’élargissement de l’assistance aux ménages vulnérables a permis d’atténuer les perturbations des revenus ; 154 000 personnes à Djibouti City et Balbala ont reçu des bons d’alimentation pendant trois mois. Ces bons se sont transformés en transferts d’argent liquide pour 12 300 ménages. Ces interventions sont devenues une bouée de sauvetage pour de nombreux ménages. En juin 2020, 26 % des ménages recevaient une aide publique, ce qui en fait la source de revenus la plus courante (World Bank 2020b). FIGURE 9. Accumulation de capital humain tout au long du cycle de vie et effets de la COVID-19 Retard de Niveau scolaire et croissance apprentissage, chômage, mauvaise santé Trouble du Mortalité Années d'espérance langage, des fonctions infantile et niveau scolaire de vie en bonne santé, Marqueurs exécutives, et des faible taux et apprentissage augmentation de la morbidité compétences de natalité et de la mortalité socioémotionnelles Université In utero Naissance 0–5 5–18 18–60 60+ Manque de Vie professionnelle Déplacer les stimulation Chocs précoce Abandon scolaire Morbidité, stress soins à la et baisse de naissance et isolement l'apprentissage en Malnutrition de raison de la Malnutrition fermeture Chômage et la mère due à baisse de possible l'enfermement revenus Source : World Bank 2020b 22 DJIBOUTI | Revue du capital humain CHAPITRE 3 : DÉVELOPPEMENT DE LA PETITE ENFANCE MESSAGES CLÉS Promouvoir le développement de la petite enfance est le meilleur investissement que Djibouti puisse faire pour renforcer son capital humain : • Malgré les progrès récents par rapport aux indicateurs clés du DPE, les résultats du DPE sont à la fois faibles et inégalement répartis, reflétant les faiblesses en termes d’accès, de couverture et de qualité de la prestation des services essentiels pour les familles avec de jeunes enfants. Les contraintes incluent un faible financement publique, des systèmes d’assurance de qualité et de données naissants, ainsi que les capacités limitées des prestataires du DPE. • Les interventions de DPE sont naissantes et en expansion à Djibouti. Les interventions actuelles de DPE sont axées sur la promotion de la santé et la nutrition infantile. Les possibilités de promouvoir la protection sociale, la prise en charge réactive et l’apprentissage précoce sont limitées et fragmentées. L’engagement du gouvernement à étendre l’éducation préscolaire d’un an a contribué à un doublement des inscriptions entre 2015 et 2021, mais reste faible à 13,2 % des enfants de 5 ans inscrits. • Djibouti entreprend des efforts considérables pour mettre en place un système juridiques et des politiques propice au développement d’un système de DPE efficient. Ce dernier permettant d’être un point d’entrée pour catalyser les améliorations du statut du DPE à travers : une augmentation progressive du financement public et des partenariats public-privé ; des interventions peu coûteuses et à fort impact telles que les programmes de stimulation psychosociale précoce ; et une collaboration institutionnelle et interministérielle renforcée. I. IMPORTANCE MONDIALE DU DPE DANS L’ACCUMULATION DU CAPITAL HUMAIN Le DPE est le processus de développement physique, cognitif, linguistique et socio-émotionnel au cours d’une période critique du développement humain. Investir dans les premières années de la vie donne aux enfants une longueur d’avance et a des effets positifs tout au long du cycle de vie, notamment en termes de progrès individuel, économique et social à court et à long terme (World Bank 2018b). La petite enfance couvre trois périodes d’âge : « les 1 000 premiers jours (de la conception à l’âge de 2 ans), les premières années et les années préscolaires (de 2 à 5 ou 6 ans), et les années scolaires (de 6 à 8 ans) » (UNICEF 2017). Ce chapitre se concentre sur les deux premières périodes : de la conception à l’entrée à l’école. CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 23 FIGURE 10. Développement du cerveau humain Les voies sensorielles (vision, audition) Langue Fonctions cognitives supérieures Le développement des fonctions cérébrales humaines atteint son apogée au cours des cinq premières années de la vie. Première année –8 –7 –6 –5 –4 –3 –2 –1 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 Naissance Mois Années Source : Banque mondiale 2018b Les premières années de la vie sont mondialement reconnues comme la période clé du développement rapide et de la croissance du cerveau. Cette courte période offre la possibilité de renforcer les capacités d’apprentissage, la résilience psychologique et l’adaptabilité (Figure 10). Les enfants qui ne bénéficient pas de soins attentifs peuvent rencontrer des difficultés à long terme en matière d’apprentissage et de résultats dans la vie (World Bank 2018b). Les investissements dans le DPE sont plus efficaces lorsqu’ils ciblent tous les domaines pertinents (par exemple, la santé, la nutrition, l’apprentissage précoce, la sécurité et la sûreté, les soins adaptés) et qu’ils utilisent toutes les plateformes disponibles (Figure 11). Les retours sur investissement dans la petite enfance sont élevés pour les individus et les sociétés (World Bank 2020c). Les impacts attendus des principales interventions en matière de DPE et le retour sur investissement escompté sont présentés dans le Tableau 4. FIGURE 11. Plateformes de prestation de services de DPE Santé et nutrition Éducation Communauté Protection • Centres de santé • Écoles maternelles • Centres de garde d'enfants • Plateformes de protection et cliniques. • Écoles (santé, protection de l' sociale • Centres de conseils enfance et éducation) • Visite à domicile nutritionnels • Lieu de travail • Système de protection • Hôpitaux sociale Source : UNICEF 2017 Donner la priorité au DPE pour les enfants et les familles vulnérables et défavorisés est efficace pour réduire les inégalités, briser le cycle de la pauvreté et accroître l’équité et l’inclusion pour les enfants et les familles, avec des avantages potentiels pour l’autonomisation des femmes. Des programmes de DPE de bonne qualité ciblant les groupes vulnérables aux États-Unis, par exemple, 24 DJIBOUTI | Revue du capital humain TABLEAU 4. Impact des principales interventions en matière de développement de la petite enfance Retour sur Dimension Intervention Impact indiqué investissement La nutrition Accès des femmes 10 à 20 % de scores de Un rapport coût-bénéfice enceintes au sel iodé développement plus élevés, pouvant atteindre 30:1 poids de naissance plus important Santé Immunisation Réduire la morbidité et la Un rapport coût-bénéfice mortalité infantiles (dépend de pouvant atteindre 20:1 nombreuses variables) Apprentissage Programmes d’éducation 0,13 à 2,68, taille de l’effet sur les Gain de revenus à vie précoce précoce mesures du développement de de 14 à 34 milliards de l’enfant dollars américains Des soins Intervention à domicile sur 14 % d’augmentation du nombre 37 % de gains en plus adaptés deux ans pour améliorer les d’inscriptions à l’université interactions entre les mères et les enfants souffrant d’un retard de croissance Sources : Denoba et al. 2014 ; Gertler et al. 2021 ont conduit à une meilleure fréquentation scolaire et à une augmentation de 60 % des revenus des femmes (Rolnick et Grunewald 2007). L’expansion des services de garde d’enfants, par exemple, est corrélée à une augmentation de chances aux femmes d’entrer sur le marché du travail, avec le potentiel d’augmenter les revenus des familles et le bien-être économique (Devercelli 2020). Au niveau mondial, les responsabilités liées à la garde des enfants incombent principalement aux femmes, ce qui les empêche de rejoindre le marché du travail formel ou les pousse à occuper des emplois informels ou mal rémunérés. L’augmentation de l’offre de services de garde d’enfants abordables et de bonne qualité a pour effet externe positif de créer un environnement favorable à l’emploi des femmes et d’accroître leurs revenus et leurs prestations. Au Mexique, par exemple, une couverture à 100 % des services de garde d’enfants âgés de 1 à 3 ans augmenterait la participation des mères au marché du travail de 15 %, et au Kenya, l’offre de bons de garde d’enfants a augmenté les revenus mensuels des mères de 24 % (Halim, Perova et Reynolds 2021). II. SITUATION DU DPE À DJIBOUTI À Djibouti, les programmes de DPE sont en train d’émerger et la couverture globale est en expansion mais limitée. Ce n’est pas seulement le cas à Djibouti, mais reflète la situation au Moyen- Orient et en Afrique du Nord, qui perdure malgré l’augmentation des investissements et des efforts de réforme. Les progrès sont plus lents que dans d’autres régions et partent de plus bas. Malgré les améliorations, la mortalité infantile à Djibouti reste supérieure à la moyenne du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et à la moyenne mondiale (Figure 12). On estime que 10 % de la population de Djibouti (~11 690) a moins de 5 ans. Djibouti obtient un score de 56 % sur l’indice de couverture sanitaire universelle pour la santé reproductive, maternelle, néonatale et infantile, ce qui est CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 25 considéré comme un score moyen. (WHO and World Bank 2021). On estime que 13.2 % des enfants de 5 ans ont eu accès à l’enseignement préscolaire en 2021 (MENFOP 2023). FIGURE 12. Taux de mortalité infantile 90 Nombre de nourrissons décédés avant l'âge d'un an, pour 1 000 naissances 80 70 60 50 vivantes 40 30 20 10 0 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021 Année Djibouti Moyen-orient et afrique du nord (hors pays à haut revenu) Pays à Faible Revenu Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure Source : Groupe interinstitutions des Nations Unies pour les estimations de la mortalité infantile 2022 Les faibles résultats en matière de santé, de nutrition et d’éducation de la petite enfance à Djibouti reflètent des problèmes structurels et sectoriels qui sont similaires dans tous les secteurs. Par exemple, un financement public limité, des lacunes dans les infrastructures et les équipements, des ressources humaines inadéquates et un accès limité aux services de formation. Il y a 3,2 lits de maternité pour 1 000 femmes enceintes, alors que les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé en prévoient 10. L’insuffisance des données et des informations dans tous les secteurs rend la planification et la budgétisation difficiles, limitant la disponibilité de données fiables pour une prise de décision, un suivi et une évaluation efficaces. La richesse des ménages est un facteur déterminant des résultats en matière de DPE et est liée aux disparités dans l’accès et la qualité des services de DPE. Ceci est clairement indiqué dans le Tableau 5 qui montre l’état de trois indicateurs clés du DPE : l’accès à l’éducation préscolaire, le retard de croissance et les soins prénatals, dans les quintiles les plus riches et les plus pauvres. TABLEAU 5. Accès aux services et résultats selon le quintile Les plus Les plus Indicateurs de DPE riches (Q5) pauvres (Q1) Accès à l’enseignement préscolaire 21 % 2 % Enfants de moins de 5 ans souffrant d’un retard de croissance 23 % 41 % Soins prénatals (4+ visites) 24 % 17 % Sources : INSTAD 2019 26 DJIBOUTI | Revue du capital humain Djibouti jette les bases d’un système de DPE efficace en se concentrant sur trois domaines clés pour améliorer l’environnement favorable (Figure 13). Premièrement, un cadre réglementaire a été établi. Il définit la petite enfance comme étant inférieure à 6 ans, conformément à la Loi n° 31/AN/18/8e soutenant « l’institutionnalisation des crèches et garderies » (Loi). Une année de préscolaire a été incluse dans l’offre d’éducation de base dans la loi sur le système éducatif en 2000. Deuxièmement, il existe des dispositions institutionnelles bien définies dont la mise en œuvre effective présente des faiblesses. La responsabilité des enfants âgés de 18 mois à 4 ans a été confiée au ministère de la Femme et de la Famille (MFF), et celle des enfants de plus de 4 ans au MENFOP selon la loi. Le Conseil national de l’enfance, présidé par le Premier ministre, a été créé en 2012 pour suivre et coordonner l’évolution du développement des activités en faveur de l’enfance. Troisièmement, Djibouti a développé une série de stratégies pour une mise en œuvre efficace des interventions de DPE. FIGURE 13. Environnement favorable au développement de la petite enfance à Djibouti Cadre juridique Coordination intersectorielle Stratégies et plans La loi du Code civil définit la Plan national de nutrition petite enfance. 2020–2030 La Politique Nationale Genre La loi sur le système éducatif de Création du Conseil 2011–2021 Djibouti reconnaît le préscolaire national de l'enfance comme éducation de base. présidé par le Premier ministre. Stratégie nationale de protection sociale La loi du Code de protection (2018–2022) juridique des mineurs protège et promeut les droits de l'enfant. Politique nationale de l'enfance (2021–2035) Loi et décret d'application Stratégie d'éducation institutionnalisant les crèches inclusive et les garderies. Plan national de La stratégie nationale pour développement sanitaire La loi de protection l’accélération de l’abandon (2020–2024) juridique des mineurs total des MGF/E (2018–2022). Stratégie nationale d'accélération de la Loi sur la violence à l'égard des réduction de la femmes, en particulier sur les mortalité maternelle mutilations génitales féminines et néonatale (2022–2026) Des efforts sont déployés pour accroître l’équité et l’inclusion, en mettant l’accent sur les réfugiés. Les réfugiés et les demandeurs d’asile représentent environ 2,8 % de la population (UNHCR 2023) ; 9,3 % d’entre eux ont moins de 4 ans (UNICEF 2018). En 2019, le MENFOP et le ministère de la Santé ont ratifié un mémorandum avec le UNHCR pour l’inclusion progressive des réfugiés dans le système éducatif national et l’égalité d’accès aux services de santé (UNHCR, 2017). L’accent est également mis de plus en plus sur la promotion de l’inclusion des enfants ayant des besoins spéciaux dans tous les secteurs, sous l’impulsion du président. CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 27 FIGURE 14. Soins attentifs pour le développement de la petite enfance NUT TÉ RIT AN ION E S AD NN É BO QU AT E ES OI N S Les L' A P P R E N T IS S composantes OP PO RT UN GE PR des soins T AUX B attentifs DAN IT ÉS É C A ON P O OC ÉP UR E SR IN SO SÉCU RIT É E T S Û R E TÉ Source : OMS, UNICEF et Banque mondiale 2018 De nombreux cadres sont disponibles pour guider l’analyse des interventions qui affectent le développement du jeune enfant. Dans ce chapitre, l’analyse du DPE est basée sur le cadre des soins nourriciers pour le DPE (Figure 14) qui fournit un aperçu multisectoriel des politiques et des services les plus efficaces. Ce cadre a été développé en partenariat avec la Banque mondiale, l’Organisation mondiale de la santé et l’UNICEF en 2018. L’analyse se concentre sur les interventions qui affectent le DPE à Djibouti en utilisant une approche de cycle de vie. Ce chapitre se concentre sur les résultats en matière de santé, de nutrition et d’éducation du DPE pour lesquels des données sur les indicateurs clés sont disponibles. A. Promouvoir des enfants en bonne santé et bien nourris : Santé maternelle et infantile Les soins de santé et les interventions nutritionnelles sont des éléments essentiels au cours des 1 000 premiers jours de la vie et sont principalement assurés par le système de soins de santé. Les données recueillies dans les pays à revenu faible et intermédiaire suggèrent que ces interventions soient essentielles pour prévenir les retards de croissance et favoriser le développement du cerveau, au même titre que la stimulation précoce et la qualité de l’eau et de l’assainissement. Le bien-être et la survie des mères et des nouveau-nés se sont améliorés, de même que la santé des enfants. Le taux de mortalité maternelle est passé de 262 décès maternels pour 100 000 naissances vivantes en 2012 à 248 en 2017 (Figure 7), et le taux de mortalité néonatale est passé de 36,3 décès 28 DJIBOUTI | Revue du capital humain néonatals pour 1 000 naissances vivantes en 2012 à 30,4 en 202027. Ces baisses sont associées à une augmentation des accouchements assistés par des professionnels qualifiés, qui représentent 87,2 % du total des accouchements (UNICEF 2022). Djibouti a également réalisé des progrès notables dans la réduction de la mortalité infantile, qui est passée de 59,3 pour 1 000 naissances vivantes en 2012 à 47,2 en 2020 (IGME 2022). Dans le même temps, les vaccinations infantiles de routine ont légèrement augmenté, le pourcentage d’enfants âgés de 12 à 23 mois vaccinés contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche passant de 81 % en 2012 à 85 % en 201928. La diarrhée, la fièvre, le paludisme, le rhume et la toux sont les principaux problèmes de santé rencontrés par les enfants de moins d’un an en 2017. Les principaux problèmes de santé des enfants de moins de 5 ans étaient la fièvre et la malaria (Figure 15). Ces problèmes de santé sont révélateurs des défis qu’il reste à relever pour améliorer l’accès et la qualité des soins. FIGURE 15. Taux de vaccination : Diphtérie, tétanos et coqueluche 100 88 89 87 85 84 82 80 76 % d'enfants âgés de 12 à 23 mois 68 71 59 60 40 20 0 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021 Année Djibouti Moyen-orient et afrique du nord (hors pays à haut revenu) Pays à Faible Revenu Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure Source : INSTAD 2017 La pandémie de la COVID-19 a perturbé les services et affecté les résultats en matière de santé (par exemple, l’accès aux vaccinations de base, avec une baisse de la couverture vaccinale contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche entre 2019 et 2021) (Figure 16). En 2021, la modélisation de la Banque mondiale a montré que les perturbations des services dues à la pandémie ont entraîné une baisse de 4 300 naissances dans les établissements de santé et ont privé 14 600 enfants d’antibiotiques oraux contre la pneumonie (World Bank 2021). 27 UN Interagency Group for Child Mortality Estimates (base de données), UNICEF, Washington, DC (consulté le 10 décembre 2022), https://databank.worldbank.org/source/world-development-indicators. 28 Voir Observatoire de la santé mondiale (base de données), OMS, Genève, (consulté le 24 novembre 2022), https://www​ .who​.int/data/gho/data/indicators/indicator-details/GHO/diphtheria-tetanus-toxoid-and-pertussis-(dtp3)-immunization​ -coverage-among-1-year-olds-(-). CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 29 FIGURE 16. Principaux problèmes de santé des enfants de moins de 5 ans à Djibouti Fièvre/paludisme Toux, rhume Diarrhée Autres Fièvre typhoïde Mal de gorge Problème de stress Problème de peau Problème d'estomac Maladie des yeux Problème dentaire Accident/blessure 0 5 10 15 20 25 30 35 Source : OMS et UNICEF : Estimations conjointes de l’OMS et de l’UNICEF 2021 Djibouti agit au niveau politique pour améliorer les résultats en matière de santé maternelle et infantile Une stratégie nationale visant à réduire la mortalité maternelle et néonatale de 2022 à 2026 a été récemment lancée à Djibouti, une loi sur l’assurance maladie a également été lancée en 2014 pour la fourniture de soins de santé gratuits jusqu’à l’âge de 5 ans, permettant de couvrir les services de soins préventifs et curatifs tels que prescrits par un médecin spécialiste. En outre, des efforts sont déployés pour donner la priorité à l’accès aux soins prénataux pour les ménages pauvres ayant des enfants. La nutrition en particulier, de la conception à l’âge de 2 ans, joue un rôle essentiel dans le développement du cerveau. L’allaitement maternel est une intervention clé spécifique à la nutrition et est d’une importance cruciale car il agit comme un premier vaccin naturel pour les bébés. Le gouvernement a commencé à réglementer l’offre de substituts du lait maternel en 2010. Une enquête de suivi normalisé des secours et des transitions réalisées en 2019 a indiqué que 49,7 % des femmes djiboutiennes ont nourri leurs enfants exclusivement au sein pendant une période allant jusqu’à six mois ; la moyenne mondiale est de 48 % (UNICEF 2021). Seuls 20 % des enfants âgés de 6 à 24 mois reçoivent la diversité alimentaire minimale. La supplémentation en micronutriments est faible dans l’ensemble, avec seulement 53,3 % des enfants âgés de 1 à 5 ans recevant une supplémentation en vitamine A (INSTAD 2019). Le pays fait quelques progrès dans l’enrichissement de la farine de blé nationale en fer, en zinc et en acide folique en exigeant que 95 % de la farine de blé soit enrichie. L’état nutritionnel des enfants de moins de 5 ans reflète un continuum de mauvaise nutrition au cours des 1 000 premiers jours. Trente-sept pour cent des femmes enceintes étaient anémiques en 201929, ce qui a des effets durables sur la santé, la nutrition et les résultats cognitifs des enfants. Le Tableau 6 résume les principaux résultats nutritionnels des enfants de moins de 5 ans à Djibouti, en particulier les niveaux élevés de retard de croissance et d’émaciation. Ceux-ci peuvent être 29 Voir l’Observatoire de la santé mondiale (base de données), Organisation mondiale de la santé, Genève (consulté le mois, l’année), http://www.who.int/gho/en/. 30 DJIBOUTI | Revue du capital humain partiellement attribués à l’insécurité alimentaire et aux facteurs interdépendants que sont la dépendance à l’égard des exportations de denrées alimentaires, la production alimentaire nationale limitée et les sécheresses régulières, exacerbées par les augmentations actuelles des prix des denrées alimentaires. De mauvaises pratiques et connaissances en matière d’alimentation peuvent aggraver les difficultés d’accès. D’autres facteurs incluent la fourniture limitée de services de nutrition en raison d’une pénurie de spécialistes, la faible coordination des activités nutritionnelles et le faible financement du programme national de nutrition, qui ne dispose pas de sa propre ligne budgétaire et dépend du soutien des partenaires de développement (MoH 2018). TABLEAU 6. Résultats nutritionnels chez les enfants de moins de 5 ans 2013 2019 Résultats % Retard de croissance 29.7 20.9 Gaspillage 17.8 10.3 Sous-pondération 29.6 17.0 Surcharge pondérale 0.8 2.0 Source : NIS 2019 B. Promouvoir une soin adaptée et des possibilités d’apprentissage précoce La stimulation précoce et l’interaction avec les personnes qui s’occupent des enfants sont essentielles pour que les jeunes enfants développent des compétences cognitives et socio- émotionnelles et atteignent leur plein potentiel. À Djibouti, l’éveil de la petite enfance relève essentiellement de la responsabilité des parents et des personnes qui s’occupent des enfants. Il n’existe aucune preuve de l’existence de programmes formels visant à aider les parents et les personnes qui s’occupent des enfants à promouvoir des activités d’éveil à la maison, ni de données fiables sur les pratiques locales. Plusieurs projets pilotes innovants sont en cours pour déterminer comment l’apprentissage précoce à domicile peut être adapté au contexte social et culturel de Djibouti. Ce manque de stimulation précoce pour les bébés et les jeunes enfants pourrait être comblé par des programmes rentables et à fort impact qui incluent des histoires, des chants et d’autres activités interactives. Le Bangladesh a adopté une méthode rentable de promotion des efforts de stimulation précoce auprès des parents et des soignants lors de visites à domicile effectuées par des agents de santé communautaires existants et nouvellement formés aux compétences psychosociales, pour un coût de 6 USD par enfant et une efficacité de 0,67 sur la cognition, 0,97 sur le langage expressif et 0,85 sur le langage (Verguet et al. 2022). À Djibouti, les enfants âgés de 18 mois à 4 ans ont quelques possibilités d’apprentissage précoce par le biais de centres d’accueil privés ou communautaires ou de programmes à domicile. Le MFF se concentre sur les enfants de cette tranche d’âge. Le système d’éducation préscolaire à Djibouti est représenté schématiquement dans la Figure 17. Le secteur privé ou communautaire est le principal CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 31 fournisseur de services de garde d’enfants pour cette tranche d’âge. Ces services sont limités et leur accès est entravé par des frais et une disponibilité restreinte. Au niveau communautaire, le MFF aide les communautés à développer des centres de garde d’enfants subventionnés, souvent soutenus par des partenaires de développement avec une aide en nature et un renforcement des capacités des enseignants, visant à donner aux enfants des familles défavorisées la possibilité de se préparer à l’apprentissage. En 2020, il y avait 24 garderies communautaires avec un total de 720 enfants inscrits (Mingat, Mahdjoub, et Seurat 2020). L’un des objectifs de la création de crèches communautaires est de garder les enfants afin que les mères puissent s’engager dans des activités génératrices de revenus pour répondre à leurs besoins. La réglementation limitée à ce niveau s’ajoute à la fragmentation et aux préoccupations concernant la qualité des programmes. Une collaboration entre le MFF, le MENFOP et l’UNICEF est en cours pour harmoniser les programmes et les guides d’enseignement des différents prestataires pour les enfants de moins de 4 ans afin de promouvoir une approche normalisée fondée sur les bonnes pratiques internationales. FIGURE 17. Cartographie de l’éducation préscolaire, 3 à 6 ans 3-6 ans Entrée 3-6 ans Âge d'entrée Actuel: 5 Garderies privées Garderies communautaires Écoles maternelles publiques Financement : privé Financement : MFF et partenaires Financement : MENFOP communautaires Frais: déterminés par une entité privée Frais : Gratuit Frais : Subventionnés Géré par : le secteur privé Géré par : MENFOP Géré par : MFF Supervision curriculaire : MENFOP Supervision curriculaire : MENFOP Supervision curriculaire : MENFOP Note : MENFOP, ministère de l’Éducation et de la Formation professionnelle ; MFF, ministère de la Femme et de la Famille. La reconnaissance politique de l’effet de l’éducation préscolaire sur la préparation à l’école et le développement cognitif a fait une percée, reflétant les tendances mondiales dans le secteur de l’éducation. Le gouvernement de Djibouti a formellement reconnu l’éducation préscolaire dans la loi sur le système éducatif en 2000, qui stipule que « l’éducation de base comprend l’éducation préscolaire et l’enseignement primaire ». L’article 20 précise que l’enseignement préscolaire est « dispensé dans des structures spécialisées au profit des enfants âgés de 4 à 5 ans ». Djibouti a choisi de développer les services d’éducation préscolaire dans trois types d’établissements : publics, privés et communautaires (Figure 17). L’inscription au préscolaire est facultative, ce qui reflète les limites de l’offre de services. L’offre publique est prévue pour une seule année, uniquement pour les enfants de 5 ans, dans l’objectif d’être obligatoire pour tous les enfants de 4 et 5 ans d’ici 2030 (MENFOP 2022). 32 DJIBOUTI | Revue du capital humain Djibouti s’est engagé à mettre en place et à accélérer l’expansion d’un système d’éducation préscolaire de bonne qualité et devra veiller à ce que le financement suive le rythme. Le MENFOP prend des mesures proactives pour jeter les bases de politiques préscolaires conçues pour promouvoir la qualité et la réglementation afin d’institutionnaliser une approche normalisée de l’offre entre les différents prestataires. Dans cette optique, un cadre de normes de qualité a été lancé en 2020, le programme d’enseignement préscolaire a été révisé pour promouvoir une approche plus ludique, ainsi qu’un cadre de compétences pour les enseignants du préscolaire, et la formation des enseignants est en cours. Le développement d’un mécanisme d’assurance qualité, d’outils d’observation en classe et l’introduction d’un numéro d’identification unique pour le suivi des enfants à partir de l’âge préscolaire font partie des efforts continus du MENFOP pour renforcer le système d’information de gestion, aider à combler les lacunes en matière de données et éclairer la prise de décision. Une approche inclusive est importante lors de l’extension de l’offre d’enseignement préscolaire. Djibouti donne la priorité à l’inclusion des zones rurales et des groupes défavorisés dans le cadre de l’expansion du préscolaire et prend des mesures pour intégrer les enfants ayant des besoins spéciaux dans les écoles ordinaires, complétées par des écoles spéciales en fonction du type et du niveau d’handicap. L’inclusion s’étend aux réfugiés, avec environ 365 réfugiés inscrits dans les écoles maternelles des villages de réfugiés en 2021 (MENFOP 2021). Bien qu’encore faible, le taux brut de scolarisation en maternelle a augmenté, passant de 10,9 % en 2019 à 13,2 % en 2021 (MENFOP 2023). L’amélioration de la qualité progresse progressivement, bien qu’en deçà de l’objectif de 17 % fixé par le MENFOP pour 2016. La réalisation de l’objectif récemment fixé d’un enseignement préscolaire universel d’ici 2030 nécessitera un effort concerté pour remédier aux contraintes du financement public, en tenant compte des coûts initiaux élevés de l’expansion des infrastructures, de l’équipement et de la formation professionnelle, ainsi que du manque de capacités professionnelles pour augmenter la cohorte d’enseignants du préscolaire afin de respecter la norme d’un ratio élèves/enseignant de 25:1 (MENFOP 2021). C. Promouvoir la sécurité, la sûreté et la protection sociale L’enregistrement des naissances est un service essentiel de protection sociale du DPE, qui garantit que l’État reconnaît les enfants et qu’ils peuvent accéder aux services. Le taux national d’enregistrement des naissances est d’environ 92 % à Djibouti, les enfants les plus vulnérables étant les moins susceptibles d’être enregistrés. En 2013, Djibouti a commencé à délivrer des certificats de naissance aux enfants nés de réfugiés et de demandeurs d’asile résidant dans les camps de réfugiés, tandis que les réfugiés vivant dans les zones urbaines doivent entamer le processus d’enregistrement des naissances. Tous les enfants nés de réfugiés ne sont pas enregistrés à Djibouti en raison d’un manque de sensibilisation et de barrières financières (UNHCR 2017). Les prestations sociales protègent les enfants et les ménages. Les mères djiboutiennes sont désavantagées en termes de protection sociale, puisque seulement 5 % d’entre elles seraient effectivement couvertes par un mécanisme de protection sociale (OIT 2020). Encore moins d’enfants, 3,5 %, étaient effectivement couverts par un mécanisme de protection sociale en 2020. Malgré les cadres juridiques et institutionnels visant à promouvoir la protection sociale et à prévenir la violence à l’encontre des mineurs, 36 % des enfants âgés de 2 à 5 ans ont été signalés CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 33 comme ayant fait l’objet de mesures disciplinaires violentes, et on estime que 19 % des enfants de 5 ans travaillaient (El-Kogali et Krafft 2015). Le gouvernement djiboutien donne la priorité à la protection contre la violence domestique et à la formation du système juridique et a créé une plateforme nationale pour la protection de l’enfance par le décret présidentiel n° 2021-194. Djibouti a également lancé un système préliminaire de registre social unifié qui a le potentiel d’augmenter les investissements et de promouvoir une approche plus normalisée pour faciliter l’accès et donner la priorité aux enfants pauvres et vulnérables. Voir l’encadré 2 pour l’évolution du secteur de la protection sociale à Djibouti. ENCADRÉ 2 : Évolution du secteur de la protection sociale Le système de protection sociale de Djibouti a évolué de manière significative au cours des dix dernières années avec l’introduction (i) d’une stratégie de protection sociale à moyen terme (2017- 2022), (ii) d’un programme de transferts ciblés en espèces et en nature, (iii) d’interventions visant à renforcer les systèmes de prestation basés sur le Registre social des bénéficiaires, (iv) d’un projet pilote d’activités d’inclusion productive et (v) d’un ensemble de mesures d’accompagnement bien conçues visant à promouvoir des pratiques de changement de comportement qui améliorent les résultats en matière de développement humain. En outre, des sous-projets communautaires ont été financés dans des zones mal desservies afin de faciliter la fourniture de services de base dans les domaines de la santé, de l’éducation, de l’eau et d’autres secteurs jugés prioritaires par les communautés. Le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité est le principal responsable de la protection sociale et coordonne la mise en œuvre en collaboration avec d’autres agences gouvernementales et les gouvernements locaux. La Banque mondiale a collaboré avec le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité dans tous les domaines susmentionnés. Le Projet intégré de transferts monétaires et de capital humain de Djibouti est conçu pour soutenir un système de filets de sécurité sociale élargi et amélioré et l’accès aux services de base dans des communautés pauvres ciblées, y compris pour les réfugiés. Le projet de protection sociale d’urgence en cas de crise a été lancé en 2022 pour fournir des transferts de filet de sécurité aux ménages ciblés touchés par les multiples crises récemment traversées par Djibouti et renforcer les mécanismes adaptatifs de protection sociale pour répondre aux crises futures. Le soutien de la Banque mondiale à la protection sociale dans le cadre des deux projets à Djibouti fournit des transferts ciblés à environ 22 500 ménages et 2 200 étudiants et favorise leur autonomisation économique et le développement du capital humain par le biais d’activités d’inclusion économique qui transmettent des compétences non techniques et fournissent des subventions de subsistance aux ménages pauvres et vulnérables pour mettre en œuvre des activités génératrices de revenus. Le soutien permet également la mise en œuvre de sessions de changement de comportement au niveau communautaire qui constituent la conditionnalité douce pour les transferts conditionnels d’argent liquide. Ces sessions communautaires sont axées sur des thèmes liés au développement du capital humain, en particulier ceux liés aux premières années de la vie et au programme de DPE. En finançant des sous-projets communautaires qui facilitent l’accès aux services de base dans les zones (suite) 34 DJIBOUTI | Revue du capital humain ENCADRÉ 2 : Évolution du secteur de la protection sociale (suite) difficiles d’accès afin de promouvoir le développement humain, la Banque finance 130 sous-projets prioritaires au niveau local dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de l’eau et de l’assainissement, ainsi que dans les marchés locaux. Une nouvelle stratégie de protection sociale à moyen terme (2023-2027) est en cours d’élaboration et devrait aborder la question de la durabilité des filets de sécurité en offrant des possibilités de dialogue sur l’espace budgétaire et le financement de la protection sociale, entre autres sujets. Ses objectifs comprennent l’augmentation de la couverture des populations les plus vulnérables, l’amélioration de l’efficacité des mécanismes de protection sociale pour s’adapter aux chocs, l’encouragement de la solidarité et de l’inclusion sociale, le renforcement des services sociaux de base et l’augmentation de l’inclusion financière des ménages pauvres et vulnérables. L’orientation stratégique selon laquelle la stratégie complétera les efforts actuels des programmes soutenus par la Banque pour renforcer les systèmes de protection sociale adaptatifs, mettre en œuvre des initiatives d’inclusion productive et accroître l’autonomisation économique des segments vulnérables des communautés en fournissant des subventions pour les moyens de subsistance qui soutiennent la reprise après les crises actuelles et la préparation aux crises futures. Les efforts visant à faire progresser l’agenda de la protection sociale à Djibouti s’appuieront sur les leçons tirées des réponses aux crises actuelles et bénéficieront de la coordination et de l’alignement des bailleurs de fonds. III. CONTRAINTES SUR LE DPE Les contraintes qui pèsent sur la fourniture et l’accès à la santé adéquats, à la nutrition, aux soins, à l’apprentissage précoce, à la sécurité et à la protection contre le danger, la douleur et le stress émotionnel se renforcent mutuellement. De même, leurs effets négatifs sont cumulatifs et limitent le bien-être et le développement cognitif des enfants au cours des premières années de leur vie. Cette section identifie les contraintes liées à la fourniture de services de DPE et à leur qualité. Les contraintes touchent tous les secteurs du DPE (santé, nutrition, apprentissage précoce, sécurité et sûreté, soins adaptés) et mettent en évidence les goulets d’étranglement intersectoriels qui affectent la fourniture et l’utilisation efficaces et équitables de ressources limitées. Les budgets consacrés au DPE sont en augmentation, mais ne permettent pas d’assurer l’accès à des services de bonne qualité. Le budget national pour le développement humain est largement consacré aux dépenses récurrentes telles que les salaires, ce qui laisse peu de place à l’investissement pour étendre les services, les infrastructures ou les réformes de qualité. Le secteur préscolaire illustre ce défi, le plan actuel du MENFOP visant à ajouter environ 40 classes préscolaires chaque année contribuant à un déficit de financement d’environ 11 % (MENFOP 2022). Une préoccupation croissante concerne l’impact que les contraintes budgétaires actuelles auront sur le budget national et la mesure dans laquelle les allocations au capital humain peuvent suivre le rythme des coûts supplémentaires associés à l’augmentation de la demande, aux réformes et aux tendances démographiques. Il sera important de mettre l’accent sur l’efficacité, l’établissement de priorités et le ciblage. CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 35 Le manque de données et de mécanismes d’assurance qualité réduit l’efficacité des services fournis et, par conséquent, les résultats en matière de DPE. Ce phénomène est encore plus prononcé dans les secteurs des soins de santé et de la nutrition. Les mécanismes d’assurance qualité du DPE ont été conçus pour réglementer et normaliser la qualité des services de DPE fournis par les différents prestataires (publics, privés, communautaires). Les données sur le statut du DPE sont incomplètes, principalement qualitatives, et manquent largement sur les soins et les opportunités d’apprentissage pour les enfants de moins de 4 ans. Les faiblesses des dispositions institutionnelles entraînent une fragmentation des prestations et des efforts, ce qui limite l’efficacité des programmes de DPE et leur portée auprès des populations vulnérables. L’approche des services de DPE est fragmentée et les dispositions institutionnelles visant à encourager la collaboration intersectorielle et une approche globale du gouvernement sont limitées. Les capacités humaines et les compétences dans les domaines clés du DPE sont limitées en termes de quantité et de qualité. La disponibilité limitée d’agents de santé qualifiés rend difficile l’amélioration de l’accès et de la qualité des soins de santé et des services de nutrition. (Djibouti compte 10 agents de santé pour 10 000 habitants ; la recommandation de l’Organisation mondiale de la santé est de 23). Pour atteindre l’objectif de l’éducation préscolaire universelle en 2030, il faudra six fois plus d’enseignants du préscolaire qu’il n’y en a actuellement. De même, le manque de sensibilisation à la valeur de la stimulation précoce et des pratiques d’apprentissage par le jeu limite le développement des compétences socio-émotionnelles précoces. Cela se traduit par un manque de données et des interventions limitées pour encourager les pratiques positives de stimulation des parents, des soignants et des communautés. IV. RECOMMANDATIONS SUR LA MANIÈRE D’ÉTENDRE UN DPE DE BONNE QUALITÉ Les services de DPE à Djibouti sont émergents et la couverture globale est limitée et inéquitable, mais en expansion. Les contraintes liées à la fourniture et à l’accès à des soins de santé adéquats, à la nutrition, aux soins, à l’apprentissage précoce, à la sécurité, et à la protection contre le danger, la douleur et le stress émotionnel se renforcent mutuellement et peuvent être principalement attribuées au manque de financement public, à l’absence de systèmes d’assurance qualité, à la capacité limitée du personnel de DPE, aux dispositions institutionnelles fragmentées et limitées, et à l’inégalité dans l’accès aux services. L’engagement croissant du gouvernement à développer le DPE à Djibouti, tel que reflété dans une série de nouvelles stratégies et de nouveaux objectifs, crée une fenêtre d’opportunité pour développer l’offre de DPE en mettant l’accent sur l’amélioration de l’accès à des services de bonne qualité et d’équité. Cet effort pourrait exploiter des avantages rentables grâce aux synergies issues de la collaboration et de la programmation intersectorielles, tout en tirant parti d’approches et de partenariats novateurs avec des acteurs privés, communautaires et non gouvernementaux. Il serait plus productif de se concentrer sur les interventions les plus efficaces pour chaque groupe d’âge que sur des objectifs diffus. Les recommandations s’appuient sur les actions en cours et mettent en lumière les domaines ou des efforts et des investissements supplémentaires dans la 36 DJIBOUTI | Revue du capital humain petite enfance peuvent améliorer le bien-être, la santé et le développement cognitif des enfants. Elles sont présentées tout au long du cycle de vie pour répondre aux principales contraintes. • Promouvoir des augmentations progressives du financement public pour les services de DPE, stimulées par des solutions innovantes et rentables qui exploitent les partenariats avec le secteur privé, les communautés, les parents et les organisations de la société civile. Une révision des plans actuels de DPE (plan national de DPE, stratégie d’éducation inclusive, stratégie nationale de réduction de la mortalité maternelle et néonatale, programme national de nutrition) devrait être envisagée pour relier les plans aux budgets, exploiter les possibilités de collaboration intersectorielle et étendre le rôle et l’efficacité des partenariats public-privé. • Améliorer la qualité, la cohérence et l’équité des services de DPE grâce à une collecte de données mieux coordonnée et au ciblage des groupes vulnérables afin d’améliorer l’efficacité de l’utilisation des ressources limitées. Les systèmes de collecte de données offrent un bon point de départ pour une collaboration interministérielle afin d’identifier les enfants vulnérables et de suivre les résultats du développement de l’enfant. Par exemple, les systèmes d’information numériques que le MENFOP, le MFF, et le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité ont mis au point pourraient être coordonnés pour consolider les données et les utiliser plus efficacement afin de cibler les enfants vulnérables pour l’accès aux écoles maternelles ou la fourniture de matériel scolaire. L’établissement de normes réglementaires peut améliorer la normalisation de l’offre de services préscolaires, une bonne pratique émergeant de l’élaboration d’un mécanisme d’assurance de qualité pour les établissements préscolaires. • Soutenir l'engagement du gouvernement à étendre l'offre préscolaire de qualité, complétée par un soutien aux programmes de stimulation psychosociale précoce pour les parents, les soignants et les acteurs de la communauté. Les fondements politiques d'un programme d'enseignement préscolaire, d'un cadre de compétences et de normes sont en place. L'expansion nécessitera l'ajout rapide de salles de classe, d'équipements et d'enseignants, en mettant l'accent sur la qualité et la mobilisation de ressources supplémentaires par le biais de financements publics et de partenariats public-privé innovants. La stimulation psychosociale comblera une lacune en tant qu'intervention à faible coût et à fort impact pour permettre aux parents d’augmenter les compétences de communication efficaces pour améliorer le développement de l'enfant. • Renforcer la collaboration interministérielle pour réduire la fragmentation de la fourniture de DPE et lancer une programmation, une mise en œuvre et un suivi conjoint du DPE. Avec des ressources limitées, il s'agit d'un domaine où la collaboration interministérielle peut permettre de réaliser des économies, d'améliorer les prestations et d'obtenir de meilleurs résultats en matière de DPE pour les enfants qui en bénéficieront le plus. Le renforcement des mécanismes existants, tels que le Conseil national des enfants, dirigé par le cabinet, pourrait être un puissant catalyseur de la collaboration et de l'engagement multisectoriels. Le Maroc offre un bon exemple d'investissement prioritaire dans le DPE pour les enfants vulnérables des zones rurales (encadré 3). • Promouvoir la planification stratégique de la main-d'œuvre pour répondre au besoin croissant de formation dans les domaines de la nutrition, de la petite enfance, de la santé, de l'éducation et de la protection sociale. Étant donné la rareté des formations en DPE à Djibouti, une approche efficace peut consister à identifier les compétences prioritaires nécessaires pour chaque secteur (par exemple, la santé, la nutrition, l'apprentissage précoce, la sécurité et la sûreté, les soins adaptés) et à coordonner la formation et le partage du personnel qualifié dans la mesure du possible. CHAPITRE 3 : Développement de la petite enfance 37 ENCADRÉ 3 : L'engagement du Maroc à investir dans la petite enfance pour développer le capital humain L’engagement du Maroc en faveur du DPE est un bon exemple de priorité accordée au capital humain dans le modèle de développement national, parallèlement à des approches multisectorielles visant à étendre les interventions en faveur du DPE. Le Maroc a réalisé des progrès significatifs sur ses indicateurs de développement humain au cours des 30 dernières années, bien que de grandes inégalités subsistent dans les résultats du DPE, y compris un niveau élevé de retard de croissance dans les zones rurales (20,5 %) et un accès inéquitable à l’éducation de la petite enfance (avec 25 % des enfants n’ayant accès à aucune forme d’éducation de la petite enfance, 33 % dans les zones rurales). Avec un indice de capital humain (ICH) de 0,5, les Marocains nés aujourd’hui n’atteindront que 50 % de leur potentiel productif à l’âge adulte. La trajectoire sociale et économique du Maroc est donc conditionnée par sa capacité à accélérer les progrès en matière de capital humain en investissant davantage et mieux dans le DPE. L’Initiative nationale pour le développement humain (INDH) est un programme phare lancé en 2005 qui place le capital humain au cœur du modèle de développement du Maroc. Sous l’égide du Roi du Maroc, le ministère de l’Intérieur est responsable de sa mise en œuvre et de son exécution, en étroite collaboration avec les entités décentralisées. L’INDH se concentre sur les zones rurales et vise à améliorer les conditions de vie des groupes pauvres et vulnérables et à accroître leur inclusion grâce à de meilleures opportunités économiques, un plus grand accès aux services de base et une meilleure gouvernance. Les phases initiales ont permis d’améliorer les infrastructures de base dans les zones rurales, mais n’ont eu qu’un impact modeste sur le capital humain. Dans sa phase actuelle, l’INDH a subi une profonde transformation, passant d’un ensemble d’interventions disjointes et lourdes en infrastructures à un programme multisectoriel qui cherche à « investir doucement et tôt », y compris dans des interventions prioritaires de développement du jeune enfant. Les deux objectifs des services de DPE sont 1) d’améliorer la santé et la nutrition des mères et des enfants en aidant le ministère de la Santé à réduire la mortalité maternelle, néonatale et infantile et à améliorer l’état nutritionnel, en ciblant les jeunes enfants dans les zones rurales les plus touchées, et 2) de promouvoir le développement cognitif et social des enfants en aidant le ministère de l’Éducation à universaliser l’enseignement en maternelle en augmentant l’accès à des services préscolaires de bonne qualité dans les zones rurales et isolées en partenariat avec des associations et en sensibilisant les parties prenantes à l’importance de l’enseignement en maternelle. Les caractéristiques qui font que l’INDH est particulièrement bien adaptée pour soutenir l’accélération des progrès en matière de capital humain sont notamment les suivantes : • Visibilité et pouvoir de convocation grâce à une approche pangouvernementale et à des mécanismes spécifiques aux niveaux régional et local pour renforcer la coordination et la cohérence dans la mise en œuvre du DPE. • Capacité de mise en œuvre par le biais d’organes décentralisés, garantissant une supervision et un suivi étroits au niveau local. • Une attention particulière à la qualité, à la mesure et à l’évaluation, à l’amélioration de la qualité et de l’intégration des services, y compris les services de DPE, et à l’amélioration de la collecte de données et du suivi des résultats du DPE. • Innovation et incubation : agilité accrue de l’INDH dans le pilotage et l’évaluation rigoureuse des initiatives et dans l’engagement avec les ministères de tutelle pour développer l’innovation. 38 DJIBOUTI | Revue du capital humain CHAPITRE 4 : L'ADOLESCENCE ET LA JEUNESSE MESSAGES CLÉS L'adolescence est une autre occasion d'accumuler et d'utiliser le capital humain. C’est à l’adolescence que sont prises les décisions cruciales de la vie, de sorte que les interventions à ce moment-là peuvent avoir un retour sur investissement alimentaire. • Djibouti doit investir dans l’autonomisation des adolescentes, qui ont un potentiel productif inexploité ; faciliter leur entrée sur le marché du travail ; et leur fournir des compétences essentielles dans la vie courante et une formation en matière de santé génésique afin de retarder le mariage et la naissance d’enfants. • Investir dans des organisations de jeunes peut contribuer à créer des espaces sûrs pour les adolescents, filles et garçons, en particulier ceux qui ne sont pas scolarisés, où ils pourraient recevoir des informations sur la formation professionnelle et les compétences cognitives et non cognitives pour améliorer leur capital humain et les rendre plus compétitifs sur le marché du travail. • Investir dans l’éducation sanitaire des adolescents pourrait avoir des effets multiplicateurs positifs en réduisant la mortalité maternelle et infantile. Les adolescentes courent un risque beaucoup plus élevé de décès maternel et de complications que les femmes plus âgées, et il est essentiel de sensibiliser les jeunes adolescentes avant qu’elles ne prennent des décisions cruciales pour leur vie. I. L'ADOLESCENCE : UNE PHASE CLÉ DE LA TRANSITION DU CYCLE DE VIE L'adolescence (et la période de jeunesse qui la chevauche30) est une phase critique de transition au cours de laquelle un individu subit des changements biologiques, psychologiques et sociaux pour passer à l'âge adulte (Molyneux 2020). C'est entre 15 et 29 ans que la plupart des personnes commencent à assumer des responsabilités d'adulte, telles que la prise de décisions concernant la participation à la vie active, l'état civil et la reproduction. Vers cet âge, ils cessent généralement d'être dépendants et deviennent chefs de famille et parents31 (ILO 2019). 30 L’adolescence est définie comme la tranche d’âge des 10-19 ans et les jeunes représente la tranche d’âge des 15-24 ans. Ce chapitre couvre la période de 10 à 24 ans, en se référant à l’adolescence ou à la jeunesse selon le contexte. 31 Selon une étude de l’Organisation internationale du travail, dans de nombreux pays, les jeunes adultes continuent à vivre dans des ménages de la famille élargie même après le mariage, mais deviennent généralement chefs de famille vers l’âge de 30 ans. CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 39 Le passage à l'âge adulte est également une phase de transition entre l'école et le travail, la plupart des personnes entrant sur le marché du travail après avoir terminé leurs études. L'éducation et les compétences acquises pendant et après l'école déterminent la réussite de la transition école-travail. La transition vers la parentalité, qui intervient souvent à cet âge, affecte également la transition vers le marché du travail. Par exemple, les jeunes adultes ayant des enfants sont les plus susceptibles d'abandonner l'école prématurément et de ne pas avoir d'emploi, en particulier les femmes. Dans les pays où les normes sociales empêchent les femmes de participer à la société sur un pied d'égalité et où la participation au marché du travail est faible pour les hommes comme pour les femmes, les politiques d'emploi des jeunes devraient tenir compte de la mesure dans laquelle la parentalité interfère avec le moment de l'entrée sur le marché du travail et réfléchir à des politiques d'atténuation pour faire en sorte que la parentalité ne soit pas un obstacle à la participation à long terme au marché du travail. La qualité des services publics mis à la disposition des adolescents est un facteur déterminant de leur capacité à utiliser pleinement leur capital humain lors de leur passage à l'âge adulte, de leur rôle de parents et de leur participation au marché du travail. Une éducation de mauvaise qualité limite leur capacité à développer les compétences nécessaires pour participer au marché du travail, et des services de santé de mauvaise qualité affectent le bien-être général, en particulier pour les femmes en âge de procréer. De nouvelles recherches sur la manière dont les adolescents réagissent à différentes interventions ciblées, s'appuyant sur une meilleure connaissance de l'évolution des besoins au cours du cycle de vie, montrent que des interventions bien conçues pour aider les adolescents à cette période critique de leur vie peuvent avoir des effets positifs importants. En Éthiopie, dans les populations Afar et Somali, qui sont les deux plus grands groupes ethniques de Djibouti, avec respectivement 35 et 60 % de la population, plusieurs interventions ciblées sur les adolescents, notamment la réduction des pratiques néfastes telles que les MGF, le report du mariage et de la maternité, le renforcement de la voix et de l'action en favorisant le développement de réseaux d'adolescents et de jeunes par le biais du sport, l'atténuation des effets négatifs des conflits et de la fragilité sur l'éducation, et l'investissement dans les compétences et le soutien à la participation des adolescents et des jeunes à des activités génératrices de revenus, ont eu des effets positifs (Nicola et al. 2019). Ce chapitre examine les facteurs clés des transitions des adolescents à Djibouti. Il décrit les obstacles à l'accumulation et à l'utilisation du capital humain lors de la transition entre l'école et le travail et de la transition vers la parentalité ; il donne un aperçu des goulets d'étranglement systémiques du côté de l'offre, en particulier en ce qui concerne la santé et l'éducation, qui affectent ces transitions ; et il propose des mesures politiques potentielles dans ces secteurs et des politiques de protection sociale qui pourraient soutenir les adolescents dans leur parcours. Le chapitre examine l'adolescence (de 12 à 19 ans) et la phase de jeunesse (de 15 à 24 ans), qui se chevauchent et qui sont marquées par la formation d'une famille, les décisions en matière de procréation et l'entrée sur le marché du travail. 40 DJIBOUTI | Revue du capital humain Bien que ce chapitre utilise les données existantes pour mieux comprendre les transitions des adolescents et des jeunes, le manque général de données affecte la profondeur de l'analyse. La plupart des analyses présentées dans ce chapitre sont basées sur les données de l'Enquête sur les ménages de Djibouti de 2017. Plusieurs éléments clés des transitions vers le marché du travail et le statut des adolescentes lorsqu'elles entrent en âge de procréer ne sont pas bien compris en raison de la rareté des données. Il est difficile de comprendre quelles compétences cognitives et non cognitives les adolescents ont acquises lorsqu'ils commencent à passer au marché du travail. De même, pour les adolescentes, en l'absence de données, il est difficile de comprendre leur état de santé et de nutrition (par exemple, insuffisance pondérale, anémie), qui affectera la génération suivante. C'est pourquoi nous présentons un aperçu général de la situation. II. TRANSITIONS DES ADOLESCENTS Il existe des différences marquées entre les sexes dans les schémas de scolarisation et de grandes variations en fonction de la pauvreté et du fossé entre les zones rurales et les zones urbaines. La quantité d'éducation reçue (nombre d'années de scolarisation attendues) reflète le taux de rétention des enfants tout au long du parcours éducatif. L'enquête 2017 auprès des ménages djiboutiens fournit une image détaillée de la scolarisation et de l'abandon scolaire en fonction de l'âge. Les taux nets de scolarisation sont relativement élevés pour l'enseignement primaire, mais diminuent rapidement tout au long du premier et du deuxième cycle de l'enseignement secondaire (Figure 18). Ils masquent également des variations en fonction de la pauvreté et du statut urbain-rural. Les garçons non pauvres sont les plus scolarisés et les filles pauvres les moins scolarisées. Les taux de scolarisation sont nettement inférieurs pour les enfants pauvres, garçons et filles. Le fossé entre les zones urbaines et rurales est encore plus important, les taux de scolarisation des enfants ruraux étant environ deux fois moins élevés que ceux des enfants urbains. L'écart entre les sexes en matière de scolarisation semble être moindre entre les garçons et les filles ayant le même statut économique ou la même situation géographique. L'écart entre les sexes en matière de scolarisation en 2017 était important à tous les âges. Les filles représentent 49 % des élèves de l'enseignement préscolaire, 46 % des élèves de l'enseignement primaire et 45 % des élèves de l'enseignement du premier cycle du secondaire. Même si leur taux de participation est inférieur à celui des garçons, les filles réussissent mieux à l'école, avec des taux de redoublement inférieurs au niveau primaire et des résultats légèrement meilleurs à l'examen national de l'école primaire. Les filles ont un taux d'abandon plus élevé en cinquième année ; 38 % des femmes et 57 % des hommes déclarent avoir terminé au moins l'enseignement primaire. On estime que près de 46 % des filles et 39 % des garçons ne sont pas scolarisés ; dans les zones rurales, 47 % des filles et 31 % des garçons du premier cycle de l'enseignement secondaire ne sont pas scolarisés (Figure 18). CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 41 FIGURE 18. Taux de scolarisation en fonction de l'âge, du sexe, de la pauvreté et de la situation urbaine ou rurale 100 100 80 80 60 60 40 40 20 20 0 0 5 10 15 20 5 10 15 20 Âge Âge Garcons, non pauvre Filles, non pauvre Garcons, urbaine Filles, urbaine Garcons, pauvre Filles, pauvre Garcons, rurale Filles, rurale Source : INSTAD 2017 Les mauvais résultats scolaires et le manque d'intérêt sont les principales raisons d'abandon à tous les niveaux d’enseignement. Ce n'est que pour la cohorte des élèves âgés de 16 à 19 ans que le "niveau d'éducation souhaité atteint" devient une raison importante d'abandon, bien qu'elle soit toujours nettement moins fréquente que les deux autres raisons. Pour les filles, les deux principales raisons d'abandon sont le manque d'intérêt et le refus des parents de les envoyer à l'école parce qu'elles sont des filles. Des efforts renouvelés et ciblés sont nécessaires pour atteindre la parité entre les sexes, en particulier dans le premier cycle de l'enseignement secondaire. L'éducation est liée à la mobilité sociale, mais les changements intergénérationnels du niveau d'éducation ne sont pas importants, en particulier pour les femmes. Au niveau de la population, on constate une mobilité économique et sociale positive liée à l'éducation. Environ 36 % de la population âgée de 25 ans et plus a atteint un niveau d'éducation supérieur à celui de la génération de leurs parents, et environ 60 % a atteint le même niveau. Il existe des variations considérables entre les sous-groupes de population, les hommes non pauvres ayant la plus grande mobilité sociale et les femmes pauvres la plus faible. Au fur et à mesure que la scolarisation diminue, la participation au marché du travail augmente, en particulier pour les garçons, bien qu'à des taux inférieurs à ceux de l'abandon scolaire. Bien que l'abandon scolaire commence à s'accélérer vers l'âge de 13 ans, l'entrée sur le marché du travail se produit plus près de l'âge de 18 ou 19 ans et à des taux inférieurs à ceux de l'abandon scolaire (Figure 19), ce qui indique que de nombreux adolescents et jeunes n'ont pas d'emploi, ne sont pas scolarisés ou ne suivent pas de formation, y compris les jeunes découragés et les jeunes en dehors du marché du travail pour diverses raisons, notamment les responsabilités familiales et l'incapacité à trouver un emploi en raison de problèmes structurels sur le marché du travail et d'un manque de compétences adéquates. Par exemple, seuls 8 % des élèves de sexe masculin en âge de suivre un 42 DJIBOUTI | Revue du capital humain enseignement secondaire sont inscrits à des programmes professionnels, et seuls 10 % des jeunes hommes âgés d'environ 20 ans et environ 30 % des jeunes de 25 ans déclarent faire partie de la population active ; l'âge de 25 à 54 ans est l'âge où la participation à la population active et l'activité sont les plus élevées. FIGURE 19. Scolarité et participation à la vie active selon l’âge et le sexe 100 % 80 % 60 % 40 % 20 % 0% 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 Âge Homme, scolarisé Hommes, dans la population active Femme, scolarisée Femmes, dans la population active Source : INSTAD 2017 Pour les élèves qui restent à l'école, la réussite scolaire et les mesures indirectes de l'apprentissage diminuent fortement. À la fin de la deuxième et de la cinquième année, les élèves passent les épreuves de l’Objectif terminal d'intégration. Pour passer à l'école secondaire, les élèves doivent réussir l'examen de cinquième année ; 27 % d'entre eux redoublent la cinquième année. De même, les élèves de neuvième année doivent passer un examen pour obtenir le certificat d'éducation de base ; 30 % d'entre eux redoublent la neuvième année. Ces examens constituent des obstacles structurels à la progression dans le système éducatif, qui est également compromise par les faibles capacités des écoles secondaires inférieures et supérieures elles- mêmes. Une analyse des résultats de l'examen de neuvième année menée en 2015 a montré une grande disparité des taux de réussite entre les écoles publiques (58 %) et privées (79 %). Les taux de redoublement dans le primaire et le premier cycle du secondaire sont globalement plus élevés pour les garçons que pour les filles. En termes de résultats d'apprentissage, malgré une légère amélioration par rapport à l'évaluation des mathématiques en début de scolarité de 2017, les résultats de l'évaluation de 2018 ont montré qu'en moyenne, les élèves de deuxième année n'étaient capables de résoudre que 16 % des problèmes mathématiques et que près de 60 % d'entre eux obtenaient la note 0 (Partenariat mondial pour l'éducation 2019). Ces faibles résultats en mathématiques sont très préoccupants. Les résultats sur le marché du travail pour les jeunes de 15 à 24 ans sont médiocres et indiquent une sous-utilisation du capital humain ; aucune amélioration substantielle n'est observée avec l'âge. CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 43 En 2020, le ratio emploi/population était de 2,5 % pour les jeunes de 15 à 24 ans et de 22,5 % pour l'ensemble de la population âgée de 15 ans et plus. Les écarts entre les sexes dans le ratio emploi/population étaient de 1,3 % pour les jeunes de 15 à 24 ans et de 22,9 % pour la population totale, car la participation des femmes à la population active stagne à environ 20 à 25 % dans les groupes d'âge plus élevés ; les hommes continuent d'entrer sur le marché du travail, bien qu'à des taux faibles, alors que les femmes n'y entrent pas. Les taux de chômage pour les personnes âgées de 15 à 25 ans sont de 80,3 % pour les hommes et de 82,5 % pour les femmes. Le marché du travail est très segmenté, et le type d’emploi que les jeunes choisissent est un déterminant important de l’utilisation du capital humain et un moteur potentiel de l’emploi. Il existe trois secteurs à Djibouti : le secteur privé formel, qui emploie environ 10 % de la main- d’œuvre ; le secteur public hypertrophié, qui emploie environ 43 % ; et le secteur privé informel, qui emploie environ 47 % (Figure 20). La population active de moins de 30 ans est également largement employée dans le secteur public et dans des emplois informels dans le secteur privé (36 % des jeunes hommes, 46 % des jeunes femmes dans des emplois informels). FIGURE 20. Emploi selon le secteur et le sexe Homme Femme Public Public Privé informel Privé informel Privé formel Privé formel 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 0 10 20 30 40 50 60 70 80 90 Source : INSTAD 2017 Note : Les pourcentages correspondent à la population active totale. III. TRANSITIONS VERS LE MARIAGE ET LA REPRODUCTION Avec la baisse de la scolarisation, le taux de mariage augmente sensiblement pour les filles, mais pas pour les garçons. Dans les ménages pauvres, les femmes sont susceptibles de se marier avant l’âge de 20 ans. La plupart des femmes déjà mariées l’ont été pour la première fois avant l’âge de 22 ans, et 5 % des femmes âgées de 20 à 24 ans sont mariées avant l’âge de 18 ans, bien que ce chiffre soit nettement inférieur à celui de l’Éthiopie voisine (40,3 %). Les jeunes femmes qui abandonnent l’école sont susceptibles d’assumer le rôle prédominant de soignantes au sein de la famille et de ne jamais entrer sur le marché du travail. La plupart des femmes en âge de travailler ont de jeunes enfants dans leur foyer et seulement 52,2 % d’entre elles ont une école maternelle dans un rayon de 5 km (INSTAD 2017). 44 DJIBOUTI | Revue du capital humain Les filles sont plus vulnérables que les garçons pendant l’adolescence, notamment en ce qui concerne les mariages précoces, la maternité, l’abandon scolaire et le fait de ne pas entrer sur le marché du travail formel. Les filles sont confrontées à davantage de restrictions en matière de mobilité et d’autonomie à mesure qu’elles grandissent, mais lorsqu’elles en ont la possibilité, elles obtiennent souvent de meilleurs résultats que les garçons. Les filles qui accouchent avant l’âge adulte courent des risques sanitaires plus importants et sont confrontées à des restrictions sociales et à des conséquences économiques négatives pour le reste de leur vie. La grossesse et l’accouchement sont la principale cause de décès chez les filles âgées de 15 à 19 ans. Elles sont également exposées à des risques sanitaires plus élevés que les mères âgées de 20 à 24 ans, notamment aux complications liées à l’accouchement, qui contribuent à la mortalité maternelle, à l’insuffisance pondérale à la naissance et à de graves problèmes néonataux. Les mères adolescentes sont moins susceptibles de continuer à aller à l’école, ce qui les empêche de réaliser pleinement leur potentiel et de trouver de meilleures opportunités économiques, et se traduit souvent par des revenus inférieurs tout au long de leur vie. Les adolescentes issues de familles pauvres sont la principale source de l’écart entre les sexes en matière de mariage précoce. Le pourcentage de femmes âgées de 25 à 39 ans au moment de l’enquête qui se sont mariées pour la première fois avant 18, 20 ou 25 ans a diminué, bien que le mariage avant 18 ans reste courant (>15 %). L’âge moyen du premier mariage est significativement plus bas pour les femmes âgées de 20 à 50 ans que pour les hommes du même âge. L’âge minimum légal du mariage est de 18 ans, mais la loi permet le mariage d’enfants avant 18 ans, sans âge minimum, si un tuteur ou un juge l’autorise. La fixation d'un âge minimum pour le mariage, sans exception, pourrait contribuer à réduire le nombre de mariages précoces. FIGURE 21. Âge à la première naissance en fonction de la richesse et de la situation urbaine ou rurale 0,10 0,10 0,05 0,05 0 0 15 20 25 30 35 40 45 50 15 20 25 30 35 40 45 50 Âge de la mère à la première naissance Âge de la mère à la première naissance Filles, nonpauvre Filles, pauvre Filles, urbaine Filles, rurale Source : INSTAD 2017 CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 45 Le taux de fécondité des adolescentes32 était de 23 pour 1 000 adolescentes en 2020 ; l’âge au premier enfant ne différait pas beaucoup selon le statut de pauvreté, bien que les femmes rurales aient eu leur premier enfant à un âge plus jeune en moyenne. Le taux de grossesse non désirée est de 50 pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans, et 51,4 % des femmes âgées de 15 à 49 ans ont déclaré être satisfaites des méthodes modernes de contraception en 2022. Djibouti est l’un des 23 pays qui n’ont pas de politique ou de loi pour protéger le droit à l’éducation des filles enceintes et des mères adolescentes, d’après les recherches menées par Human Rights Watch dans tous les pays membres de l’Union africaine. Le plan d’action pour l’éducation du pays présente des stratégies visant à réduire les disparités entre les sexes dans l’éducation, notamment des investissements dans des espaces adaptés aux filles et des campagnes de sensibilisation des communautés, mais il ne précise pas comment le gouvernement a l’intention de s’attaquer concrètement aux difficultés rencontrées par les étudiantes enceintes, mères adolescentes ou mariées. IV. EFFETS D’UNE MAUVAISE SANTÉ MATERNELLE SUR LES ADOLESCENTES La plupart des adolescents n'ont qu'un accès limité à la justice, aux services essentiels de santé, d'éducation et de protection sociale. Cette exclusion est souvent due à la pauvreté et au manque d’opportunités, ainsi qu’à des politiques, des lois et des budgets inadaptés pour répondre à leurs droits et à leurs besoins. Les normes sociales vont également à l’encontre de leur participation et perpétuent les rôles traditionnels des hommes et des femmes. Par exemple, la forte prévalence des MGF affecte la santé des femmes et leur capacité à participer pleinement à la société (encadré 4). Seule une fraction des adolescents dont les droits ont été violés demandent réparation ou ont accès à la justice. Parmi eux, peu, voire aucun, ne reçoivent la justice qu’ils méritent. ENCADRÉ 4 : Impact des mutilations génitales féminines sur la vie des filles et des femmes Les MGF impliquent l’ablation partielle ou totale des organes génitaux externes de la femme ou d’autres lésions des organes génitaux féminins pour des raisons non médicales. Plus de 200 millions de filles et de femmes en vie aujourd’hui ont été excisées dans 30 pays d’Afrique, du Moyen-Orient et d’Asie, où les MGF sont concentrées. Au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, c’est à Djibouti et en Égypte que la prévalence des MGF est la plus élevée. En 2006, 93,1 % des femmes âgées de 15 à 49 ans à Djibouti avaient subi des mutilations génitales. Les MGF constituent une forme extrême de discrimination fondée sur le sexe. Elles sont reconnues au niveau international comme une violation des droits humains des filles et des femmes, notamment (suite) 32 Le taux de natalité est le nombre total de naissances pour 1 000 individus dans une population. Le taux de fécondité est le nombre total de naissances pour 1 000 femmes en âge de procréer dans une population. Le taux de fécondité des adolescentes est le nombre total de naissances pour 1 000 filles âgées de 15 à 19 ans. 46 DJIBOUTI | Revue du capital humain ENCADRÉ 4 : Impact des mutilations génitales féminines sur la vie des filles et des femmes (suite) le droit à la santé, à la sécurité et à l’intégrité physique et le droit de ne pas être soumis à la torture et à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s’agit également d’une forme extrême de violence fondée sur le genre, la violence à l’encontre des femmes et des filles, l’agression sexuelle et la maltraitance des enfants. La violence fondée sur le genre est le principal type de violence affectant les femmes et les filles à Djibouti, devant les mariages précoces et les autres types de violence, et l’un des principaux obstacles à l’égalité des sexes et à l’autonomisation des femmes. L’Organisation mondiale de la santé classe la forme la plus répandue de MGF imposée aux femmes et aux filles djiboutiennes comme étant la MGF de type 3, également connue sous le nom d’infibulation - excision du clitoris et des lèvres et suture des bords de la vulve afin d’empêcher les rapports sexuels. Les MGF ont des conséquences à court et à long terme sur la santé des femmes et des jeunes filles et peuvent entraîner la mort. Les conséquences à court terme des MGF sont liées à l’intervention elle-même. Les organes adjacents peuvent être blessés et les hémorragies qui s’ensuivent peuvent entraîner un choc ou la mort. Les infections chroniques, les hémorragies intermittentes, les abcès et les petites tumeurs du nerf, qui peuvent résulter de la clitoridectomie et de l’excision, peuvent entraîner un handicap, une gêne et une douleur extrême. Les infibulations peuvent avoir des effets à long terme tels qu’une infection chronique des voies urinaires, la stérilité, une cicatrisation excessive des tissus et des kystes desmoïdes. Les MGF peuvent également affecter la santé mentale d’une femme longtemps après l’intervention. Les femmes et les filles qui ont subi des MGF présentent souvent des signes de traumatisme psychologique, des rapports sexuels douloureux et traumatisants, de l’anxiété, de l’isolement, de la somatisation, de la dépression, du stress post-traumatique et d’autres troubles de l’humeur. Les conséquences physiques et psychologiques des MGF peuvent empêcher les filles d’aller à l’école ou d’y réussir. À court terme, après la cérémonie, les filles doivent guérir et manquent donc l’école. À long terme, les problèmes de santé, la douleur et la détresse liés aux MGF peuvent amener les filles à être moins concentrées à l’école ou à s’en absenter et, par conséquent, à avoir de faibles résultats et à abandonner l’école. Étant donné que le niveau d’éducation des parents influence les chances d’une fille d’accéder au marché du travail, l’effet des MGF sur le niveau d’éducation de la mère peut limiter les chances d’une fille qui n’a pas été soumise aux MGF ou qui a bénéficié d’un niveau d’éducation lui permettant d’être compétitive sur le marché du travail. Compte tenu des effets des circonstances à la naissance et des caractéristiques individuelles sur les possibilités d’accès au marché du travail, il faudrait au moins trois générations de mères non excisées pour atténuer les conséquences des MGF sur les possibilités d’accès d’une fille au marché du travail. L’éducation des filles semble être un facteur de protection contre les MGF, de sorte que les filles qui abandonnent l’école peuvent augmenter le risque de MGF pour les (suite) CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 47 ENCADRÉ 4 : Impact des mutilations génitales féminines sur la vie des filles et des femmes (suite) générations actuelles et futures. Le lien bidirectionnel entre les MGF et l’éducation - et à son tour, la participation au marché du travail - peut se renforcer mutuellement. Les effets des MGF sur la santé des femmes limitent leur productivité et les types d’emploi qu’elles peuvent occuper. Un rapport parrainé par la Banque mondiale a attribué certains des coûts économiques des MGF à la perte de travail productif due à la mortalité et à la morbidité, conséquences directes et indirectes de la pratique, et une baisse de la productivité (et des revenus) due à l’invalidité liée aux MGF a été associée aux complications sanitaires à long terme de la pratique. Une étude de l’Organisation mondiale de la santé a révélé que les femmes ayant subi des MGF courent un risque plus élevé d’accouchement dangereux et compliqué. En cas de MGF de type 3, le risque d’hémorragie après l’accouchement est 70 % plus élevé, le risque de césarienne est 30 % plus élevé et le risque de séjour prolongé à l’hôpital est 98 % plus élevé que pour les femmes qui n’ont subi aucune mutilation. Les MGF sont associées à un risque plus élevé de fistule obstétricale parce qu’elles sont également corrélées à un plus grand nombre de grossesses précoces et parce que la pratique elle- même endommage gravement les organes génitaux. À Djibouti, la médicalisation des MGF est devenue un facteur important ; l’UNICEF a signalé que le personnel de santé pratiquait environ 20 % des MGF dans le pays, bien que cela soit contraire au code de déontologie médicale. Les MGF transfrontalières constituent une autre tendance de plus en plus inquiétante à laquelle il convient de prêter attention. Le ministère de la Femme et de la Famille, le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité et le ministère de la Santé sont responsables de l’éradication des MGF. L’Association nationale des femmes djiboutiennes est la principale organisation communautaire et représente le Comité interafricain contre les pratiques traditionnelles à Djibouti. Le programme conjoint du Fonds des Nations unies pour la population et du Fonds des Nations unies pour l’enfance pour l’élimination des MGF est actif à Djibouti depuis 2008 et constitue la plus grande initiative au monde portant spécifiquement sur les MGF. Le Comité national de pilotage pour l’abandon de toutes les formes d’excision coordonne les travaux visant à mettre fin aux MGF à Djibouti depuis 2009, et le gouvernement a lancé une stratégie nationale pour l’abandon de toutes les formes d’excision en 2016. Les troubles maternels et néonatals sont responsables de la plupart des années de vie corrigées de l’incapacité pour les enfants de moins de 5 ans et les femmes de tous âges (Tableau 7). Les principales causes de décès chez les adolescents sont les accidents de la route, le VIH/sida, la tuberculose, les maladies diarrhéiques et les infections des voies respiratoires inférieures ; la principale cause chez les adolescentes est liée à la santé maternelle (Tableau 7). Bien que le VIH/sida ait été endigué, la transmission du VIH de la mère à l’enfant reste un problème, et le poids du VIH/sida en tant que facteur de risque pendant la grossesse reste élevé. 48 DJIBOUTI | Revue du capital humain TABLEAU 7. Causes des années de vie corrigées de l’incapacité chez les enfants de moins de 5 ans Cause % Troubles maternels et néonataux 51 Infections respiratoires et tuberculose 14 Autres maladies non transmissibles 11 Autres maladies infectieuses 7 Infections entériques 5 Carences nutritionnelles 4 Virus de l’immunodéficience humaine, syndrome d’immunodéficience acquise et infections 3 sexuellement transmissibles Blessures non intentionnelles 1 Tumeurs 1 Source : International Health Metrics and Evaluation (IHME) (métrologie et évaluation de la santé) FIGURE 22. Principales causes d’années de vie ajustées de l’incapacité chez les femmes et les filles 1990 Classement 2019 Classement 1 Maternelle et néonatale 1 Maternelle et néonatale 2 Infections respiratoires et tuberculose 2 VIH et IST 3 Infections entériques 3 Infections respiratoires et tuberculose 4 Autres infections 4 Autres maladies non transmissibles 5 Carences nutritionnelles 5 Maladies cardiovasculaires 6 Autres maladies non transmissibles 6 Tumeurs 7 Maladies cardiovasculaires 7 Autres in fections 8 MTN et paludisme 8 Carences nutritionnelles 9 Tumeurs 10 Infections entériques 10 VIH et IST 17 MTN et paludisme Les maladies transmissibles, maternelles, néonatales et nutritionnelles Maladies non transmissibles Source : International Health Metrics and Evaluation (IHME) (métrologie et évaluation de la santé) L’insuffisance des infrastructures sanitaires et le manque de services expliquent en partie les mauvais résultats en matière de santé maternelle. Les infrastructures sanitaires sont très insuffisantes (surtout en dehors de la ville de Djibouti) et l’organisation des services n’est pas optimale. Au niveau national, il y a 3,2 lits de maternité pour 1 000 femmes enceintes, ce qui est bien inférieur aux 10 lits recommandés par l’Organisation mondiale de la santé. Il y a 10,7 lits d’hôpitaux pour 10 000 habitants, dont seulement 51 % sont fonctionnels. Les établissements ne disposent pas de fournitures de base suffisantes pour les opérations chirurgicales. CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 49 La demande non satisfaite de services de santé maternelle est particulièrement élevée dans les régions rurales, la plupart des sages-femmes, qui sont les principaux prestataires de santé assistant aux accouchements, étant concentrées dans la ville de Djibouti. Au niveau national, les sages- femmes assistent à plus de 80 % des naissances (UNICEF 2022). C’est à Tadjourah que les populations ont le plus de mal à accéder aux soins, car le temps de trajet jusqu’à l’hôpital le plus proche est long. Cela est particulièrement difficile pour les femmes qui ont besoin de services complets de soins obstétricaux et néonatals d’urgence, qui à Djibouti ne sont disponibles que dans les établissements de santé de niveau supérieur, généralement de grands hôpitaux, alors que les établissements de santé locaux n’ont souvent même pas de services de soins obstétricaux et néonatals d’urgence de base. À Dorra, la ville la plus peuplée de Tadjoura, près de 15 000 personnes doivent voyager plus de 60 minutes pour se rendre à l’hôpital, contre 200 personnes à Djibouti-ville. Les femmes et les enfants n’ont donc pas accès à des soins de qualité à des stades critiques de leur vie. FIGURE 23. Soins à l’accouchement selon le quintile de richesse Les plus pauvre Pauvres Moyen Riches Les plus riches 0 5 10 15 20 Pourcentage Médecin/infirmière Sage-femme Non-qualifié Source : Enquête nutritionnelle de Djibouti 2014 L’accès aux services de santé est fortement associé à une diminution des problèmes de santé, et l’accès n’est pas homogène entre les zones rurales et urbaines. La prévalence déclarée des problèmes de santé est plus faible lorsque la distance jusqu’au centre de santé communautaire le plus proche est plus courte, que ce soit dans les zones rurales ou urbaines, et davantage de problèmes de santé sont déclarés dans les zones rurales, ce qui indique l’inadéquation des services de santé disponibles et la moins bonne qualité des services dans les zones rurales que dans les zones urbaines (Figure 24). Cela s’explique par le fait que la distance ou le temps de trajet jusqu’à l’établissement le plus proche n’est pas nécessairement un indicateur de l’accès à Djibouti. Ceci s’explique en partie par le fait l’ensemble des services de base offerts dans les formations sanitaires n’est pas homogène 50 DJIBOUTI | Revue du capital humain dans les différentes régions et entre les zones rurales et urbaines, en particulier pour les services SRMNIA+N, et par le fait que les soins de niveau supérieur ne sont généralement disponibles que dans les hôpitaux, même si les formations sanitaires sont considérées comme fonctionnelles. FIGURE 24. Prévalence des problèmes de santé en fonction de la richesse, de la situation urbaine ou rurale et de la distance par rapport au centre de soins de santé le plus proche 0 à 1 km à 1 à 5 km Rurale 5 à 10 km 10+ km 0 à 1 km Urbaine, rurale 1 à 5 km 5 à 10 km 10+ km Urbaine, non-pauvre 0 à 1 km 1 à 5 km 5 à 10 km 10+ km 0 0,05 0,10 0,15 Source : INSTAD 2017 Bien qu’il y ait une compréhension implicite des défis liés à la qualité des services de soins de santé, une mesure plus complète et significative n’a pas été possible en raison du manque de disponibilité des données et de la capacité de collecte et de gestion des données. Comme Djibouti ne collecte pas de données périodiques à l’aide d’enquêtes normalisées et couramment utilisées, telles que l’évaluation de la disponibilité et de l’état de préparation des services, les indicateurs de prestation de services ou l’enquête démographique et sanitaire, il est difficile d’obtenir une compréhension précise des résultats au niveau de la population et des défis liés à la prestation de services. L’investissement dans les données à tous les niveaux sera essentiel pour Djibouti afin d’améliorer la prestation de services et, en fin de compte, les résultats au niveau de la population grâce à de meilleures mesures et à un meilleur suivi. CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 51 ENCADRÉ 5 : Projet d’autonomisation des femmes et de dividende démographique au Sahel Plusieurs pays de la sous-région du Sahel en Afrique partagent avec Djibouti de nombreuses caractéristiques démographiques et des défis structurels. La région est exposée à de multiples stress tels que l’insécurité alimentaire, la fragilité, les sécheresses répétées, les inondations et les crises mondiales telles que la crise alimentaire et la crise des prix du pétrole. Bien que la région ait connu une forte croissance économique, les inégalités y sont considérables, comme à Djibouti. Les adolescents de toute la région, en particulier les filles et les jeunes femmes, sont confrontés aux mêmes problèmes qu’à Djibouti : taux de fécondité et de mortalité maternelle élevés, mariages et grossesses précoces et forte prévalence des MGF. Les adolescentes en particulier subissent les conséquences extrêmes et disproportionnées du mariage et de la maternité précoces, exacerbées par les MGF. Une adolescente a deux fois plus de risques de mourir de complications liées à la grossesse qu’une femme qui attend d’avoir 20 ans pour avoir des enfants. La fistule est également plus fréquente chez les jeunes femmes, qui sont plus susceptibles d’avoir un bassin faible, rabougri ou sous-développé, ou à la suite d’une excision. Le mariage et la maternité précoces peuvent également limiter les possibilités éducatives et économiques des jeunes femmes. Les femmes sont soumises à différentes formes de violence fondée sur le sexe et, en général, elles sont peu autonomes sur le plan économique et n’ont que peu d’influence. La capacité d’un pays à développer son capital humain dépend dans une large mesure de sa capacité à atteindre et à accroître le potentiel de ses jeunes, en particulier des femmes, parce qu’elles sont confrontées à davantage de défis que les jeunes hommes. Dans dix pays de la région du Sahel, environ 80 % des adolescentes risquent d’être mariées, de tomber enceintes et d’abandonner l’école prématurément. Pour relever ces défis, la Banque mondiale et d’autres partenaires ont financé le projet Sahel Women’s Empowerment and Demographic Dividend (Autonomisation des femmes et dividende démographique), un projet multi-pays à multiples facettes conçu pour accroître l’autonomie et l’action des femmes, maintenir les filles à l’école, élargir les opportunités économiques pour les adolescentes et les jeunes femmes, et prévenir la violence sexiste en s’attaquant à ses causes profondes. Le projet est mis en œuvre au Bénin, au Burkina Faso, au Cameroun, en Côte d’Ivoire, en Guinée, au Mali, en Mauritanie, au Niger et au Tchad. Le projet a combiné des interventions au niveau de la demande et de l’offre, en particulier dans le secteur de la santé, et a donné de bons résultats : • Entre 2015 et 2020, 160 000 filles ont reçu des bourses ou d’autres formes de soutien pour aller à l’école. Dans les zones de projet du Mali, les taux d’abandon scolaire chez les filles sont passés de 53 % en 2016 à 2 % en 2019. En Côte d’Ivoire, 82 % des bénéficiaires recevant un repas scolaire par jour ont vu leurs notes s’améliorer et 85 % ont obtenu leur diplôme à temps, ce qui leur a permis de passer au niveau supérieur. (suite) 52 DJIBOUTI | Revue du capital humain ENCADRÉ 5 : Projet d’autonomisation des femmes et de dividende démographique au Sahel (suite) • Plus de 3 400 espaces sécurisés ont été créés où environ 120 000 filles non scolarisées apprennent à vivre et reçoivent des connaissances essentielles en matière de santé sexuelle et génésique et, dans certains cas, savent lire, écrire et compter. • Plus de 20 000 jeunes femmes ont suivi une formation à des professions non traditionnelles, augmentant ainsi leur potentiel de gain. Au Mali, les activités d’autonomisation économique ont permis aux femmes de gagner davantage (d’environ 5 USD par mois en 2014 à 110 USD en 2020). Au Tchad, des milliers d’adolescents et de femmes ont accepté des emplois non traditionnels et mieux rémunérés, tels que l’installation de panneaux solaires. • Entre 2015 et 2020, des campagnes de changement social et comportemental ont touché plus de 4 millions de personnes par le biais de stations de radio locales, de chefs religieux et d’associations de femmes sur des sujets liés aux rôles positifs des hommes et des femmes, à la scolarisation des filles, aux mariages d’enfants, aux grossesses d’adolescentes et aux MGF. • Entre 2015 et 2020, plus de 6 400 chefs religieux se sont engagés dans des dialogues communautaires en faveur de l’éducation secondaire des filles, du report des grossesses, de l’espacement des naissances, de la planification familiale et de la lutte contre la violence fondée sur le genre dans les communautés rurales. • Plus de 24 000 maris et futurs maris ont été inscrits dans des « écoles de (futurs) maris » entre 2015 et 2020, où le programme a contribué à accroître la participation des hommes aux tâches ménagères et les comportements sains en matière de santé sexuelle et reproductive, et à réduire la violence à l’égard des femmes et des enfants. V. RECOMMANDATIONS POLITIQUES Les jeunes sont des acteurs clés dans la construction des sociétés. À l’âge adulte, ils deviennent le moteur du développement économique. Pour atteindre le dividende démographique (accélération de la croissance tirée par la main-d’œuvre) à Djibouti, le gouvernement doit être en mesure de répondre aux besoins des jeunes, d’offrir des possibilités de formation professionnelle et de mieux préparer les jeunes au marché du travail et à leurs années productives. Il est essentiel d’investir dans des politiques créatrices d’emplois, d’augmenter la productivité économique, même dans le secteur informel, et le capital humain, comme l’éducation et la santé, pour soutenir les jeunes dans ce processus et les aider à devenir plus indépendants sur le plan économique. Les jeunes, lorsqu’ils sont correctement formés et en bonne santé, peuvent réaliser leur potentiel et avoir un impact transformationnel sur les conditions de vie de leur ménage et de leur communauté. L’autonomisation des adolescentes et des femmes peut réduire les taux de fécondité, retarder l’accouchement et préserver la santé des femmes. Accroître l’accès et l’utilisation des services de santé reproductive, garantir l’éducation des filles et aider les femmes à acquérir des compétences pratiques sont des éléments essentiels pour gérer la fécondité et réduire l’inégalité entre les sexes. CHAPITRE 4 : L'adolescence et la jeunesse 53 Les recommandations spécifiques sont les suivantes : • Générer une demande pour les services SRMNIA+N en encourageant les changements sociaux et comportementaux et l’autonomisation des femmes et des adolescentes. Cela soutiendrait les investissements du côté de l’offre que le gouvernement entreprend pour améliorer la prestation des services de santé, en particulier les services SRMNIA+N. • Soutenir les programmes de formation des sages-femmes rurales, améliorer la qualité et augmenter le nombre de professionnels de la santé et d’autres personnels impliqués dans les services du SRMNIA+N. • Renforcer le plaidoyer et le dialogue à haut niveau et promouvoir l’élaboration de politiques et la mise en œuvre de projets. • Améliorer la situation des jeunes sur le marché du travail grâce à des politiques ciblées qui s’attaquent aux taux élevés de chômage et de sous-emploi chez les jeunes et leur donnent accès à des emplois de qualité. Cela devrait inclure des mesures à court terme pour répondre aux tendances de chômage et de sous-emploi élevés chez les jeunes et des mesures à long terme facilitant l’acquisition de compétences pertinentes et supprimant les obstacles à l’emploi dans des emplois de bonne qualité dans l’économie formelle. • Proposer des apprentissages et des stages de qualité pour aider les jeunes à passer en douceur de l’école au monde du travail. • Fournir une aide au revenu aux jeunes chômeurs qui ne disposent pas d’un capital ou de moyens financiers suffisants pour éviter qu’ils ne tombent dans la pauvreté. 54 DJIBOUTI | Revue du capital humain CHAPITRE 5 : LES ANNÉES DE TRAVAIL : LES MARCHÉS DU TRAVAIL À DJIBOUTI MESSAGES CLÉS • Les salaires à Djibouti sont élevés et le principal employeur des personnes ayant un niveau d’éducation formelle supérieur au secondaire est le secteur public, qui paie une prime importante pour ce niveau d’éducation et plus. L’emploi dans le secteur privé se situe principalement dans le secteur informel. • Compte tenu de la petite taille de l’économie et de son manque de diversification habituel, les marchés de produits ne créent pas suffisamment d’emplois pour absorber les jeunes. Les rigidités du marché du travail, telles que les réglementations qui augmentent la difficulté d’embaucher des travailleurs, pourraient également limiter l’emploi. • Du côté de l’offre, l’amélioration du système d’enseignement et de formation technique et professionnelle pourrait aider à préparer les travailleurs à des emplois dans des secteurs émergents à Djibouti ou à l’extérieur. La fonction première des marchés est de faire coïncider l’offre et la demande et, grâce à leurs interactions, de parvenir à un équilibre sur le marché. À ce titre, les marchés du travail mettent en relation les détenteurs de capital humain et physique et créent des résultats d’utilisation du capital humain sous la forme d’un prix et d’une quantité d’équilibre, c’est-à-dire un certain nombre d’emplois et un salaire d’équilibre de marché qui leur est associé. Pour comprendre la nature des marchés du travail à Djibouti, nous décrivons ces deux résultats, puis nous travaillons à rebours pour découvrir les facteurs en jeu dans l’obtention de ces résultats. L’utilisation du capital humain à Djibouti est remarquablement faible, surtout pour les femmes. Ajusté en fonction de l’utilisation, l’ICH passe de 0,41 à un niveau étonnamment bas de 0,09, et pour les femmes il tombe encore plus bas - 0,0533 ; qui indique qu’un enfant né à Djibouti en 2022 peut s’attendre à n’utiliser que 9 % de son potentiel de capital humain si les tendances actuelles se poursuivent. I. RÉSULTATS EN MATIÈRE D’EMPLOI Djibouti est un pays jeune, avec plus de 75 % de la population ayant moins de 35 ans. Seulement 45 % de la population en âge de travailler (15 ans et plus) participe au marché du travail (IMF 2019b). 33 ICH ajusté pour l’utilisation = Taux d’emploi de la population en âge de travailler (15-65) × ICH. ICH ajusté pour l’utilisationfemmes = Taux d’emploi des femmes en âge de travailler (15-65) × ICH. CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  55 L’inactivité économique des jeunes est élevée, avec seulement un tiers de la population âgée de 15 à 24 ans participant à la force de travail. Les statistiques les plus troublantes concernant les jeunes sont peut-être les suivantes : près de 22 % sont au chômage et près de 28 % n’ont pas d’emploi et ne suivent pas d’études ou de formation34. Ces tendances sont similaires à celles d’autres pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, avec des différences significatives dans la participation à la population active en fonction du sexe et des niveaux élevés d’inactivité, de chômage et de sous- emploi chez les jeunes (Figure 25). FIGURE 25. Chômage des jeunes dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord 100 Chômage des jeunes (pourcentage) 80 72 74 74 77 67 69 71 59 61 64 60 40 20 0 2003 2005 2007 2009 2011 2013 2015 2017 2019 2021 Année Djibouti Moyen-orient et afrique du nord (hors pays à haut revenu) Pays à Faible Revenu Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure Source : World Bank 2023c Le taux d’activité des personnes en âge de travailler est de 55 % pour les 25 à 39 ans et de 53 % pour les 40 à 60 ans. Les femmes et les jeunes sont considérablement désavantagés sur le marché du travail (Tableau 8) et sont moins susceptibles d’être actifs sur le marché du travail ; la plupart des personnes de ces deux groupes qui participent au marché du travail sont au chômage. TABLEAU 8. Emploi à Djibouti et dans les pays à faible revenu Djibouti Pays à faible revenu Taux de chômage (% de la population active totale) 11.1 5.6 • Femmes (% de la population active féminine) 12.0 6.5 • Jeunes (% de la population active totale, 15-24 ans) 21.3 10.6 • Participation au marché du travail (% de la population totale 63.0 66.4 âgée de 15 ans et plus) • Femmes (% de la population féminine âgée de 15 ans et plus) 54.8 58.2 • Jeunes (% de la population âgée de 15 à 24 ans) 45.9 47.7 Source : IMF 2019 34 Base de données des statistiques sur la main-d’œuvre, Organisation internationale du travail, Genève, Suisse. 56 DJIBOUTI | Revue du capital humain La participation à la vie active varie considérablement en fonction de l’âge, du sexe et de la région. Par exemple, l’inégalité entre les sexes est importante sur le marché du travail djiboutien, avec un taux d’activité global d’environ 59 % pour les hommes et 32 % pour les femmes (IMF 2019a). Le Tableau 8 illustre la répartition de la population en âge de travailler (15 ans et plus) selon l’âge et le sexe. L’information la plus frappante de la figure 26 est peut-être que les individus âgés de 15 à 24 ans, qui ont le niveau d’éducation le plus élevé de toutes les cohortes d’âge, ont la plus grande part d’individus essayant de trouver un emploi, ce qui indique que, même avec un ICH relativement faible, l’utilisation du capital humain est encore plus faible, ce qui signifie que Djibouti n’est pas en mesure d’utiliser le capital humain créé, mettant l’accent sur la question de savoir comment les augmentations de l’ICH peuvent être incitatives. FIGURE 26. Cohortes d’âge pour l’emploi et sexe 100 26 24 80 38 47 47 63 60 86 43 51 32 40 30 28 25 20 30 25 30 25 23 7 11 6 0 Tous Les hommes Les femmes 15-24 ans 25-39 ans 40-60 ans 61 ans Employé dans le secteur public Employé ailleurs Chômeurs Source : World Bank 2019a Bien qu’il puisse sembler contre-intuitif que la cohorte la plus éduquée soit aussi celle qui compte le plus grand nombre de personnes essayant de trouver un emploi, l’explication réside probablement dans la distorsion des structures d’incitation. Les personnes les plus pauvres n’ont généralement pas le luxe d’être au chômage et doivent travailler pour survivre, mais c’est moins vrai pour celles qui sont en mesure d’atteindre des niveaux de scolarité plus élevés dans des pays comme Djibouti, et qui constatent généralement qu’il y a peu ou pas d’opportunités pour elles sur le marché du travail formel, mais elles reconnaissent également qu’elles sont l’élite académique dans leur propre pays. Étant donné la facilité d’accès au marché du travail informel, il n’est pas rare que des personnes ayant un niveau d’éducation ou de formation relativement élevé et des personnes peu ou pas scolarisées soient en concurrence pour les mêmes emplois sur le même marché du travail. Le marché n’est pas en mesure de répartir efficacement les individus sur l’ensemble des emplois disponibles en fonction de leur niveau d’études ou de compétences. Cette incapacité à trier efficacement les individus en fonction de leur niveau d’études et de compétences sur le marché du travail a pour conséquence que les personnes les plus qualifiées ne sont pas disposées à s’engager dans un travail auquel CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  57 participent également d’autres personnes ayant peu ou pas de compétences formellement acquises, ce qui modifie considérablement les incitations au travail. L’élite universitaire a donc tendance à rechercher des opportunités dans le secteur formel et plus particulièrement dans le secteur public. L’emploi est très segmenté, avec des travailleurs se répartissant entre trois marchés distincts : le petit secteur privé formel, l’important secteur privé informel et le grand secteur public. Le secteur public a tendance à attirer des personnes hautement qualifiées, tandis que le secteur privé a tendance à attirer des personnes moins qualifiées. Près d’un cinquième des travailleurs du secteur public ont terminé l’enseignement secondaire ou plus, et près d’un tiers ont au moins un niveau d’éducation primaire (Figure 27). Le marché privé formel est petit en termes d’emploi et ne recrute pas de personnes hautement qualifiées. Le secteur privé informel est un employeur important et un employeur important de ceux qui n’ont pas d’éducation ou qui sont autodidactes. Les possibilités offertes par le marché du travail formel sont moins nombreuses pour les femmes que pour les hommes, ce qui explique que le secteur privé informel emploie 63 % des femmes actives, alors que le secteur public en emploie environ 33 % (contre près de la moitié pour les hommes). Plus de la moitié de la population du pays travaille dans de petites entreprises qui emploient 10 travailleurs ou moins, dont beaucoup sont des entreprises de vente au détail unipersonnelles ou des individus travaillant en tant que micro-entrepreneurs. FIGURE 27. Niveau d’éducation selon le type d’emploi 50 46,3 43,8 40 30,8 30 20 19,9 11,5 11 10 9,1 9,9 3,9 3,2 3,9 2,5 2,5 1,3 0,4 0 Privé informel Privé formel Administration publique Pas d'éducation / propre éducation Inférieur au primaire Primaire et plus, mais inférieur au secondaire Secondaire et plus Total Source : World Bank 2019b 58 DJIBOUTI | Revue du capital humain II. SALAIRES Les données salariales indiquent une segmentation entre le secteur privé et le secteur public sur les marchés du travail de Djibouti. L’analyse empirique montre également que des facteurs tels que la sélectivité, les rendements du marché et les différentes dotations en capital humain (comme mentionné ci-dessus) jouent un rôle moins important dans l’explication de ces différences qu’une prime salariale pure. Les employés du secteur public gagnent une prime salariale qui va au-delà de leurs attributs personnels et de leurs dotations en capital humain (Tableau 9), et l’importance de cette prime s’accroît dès lors qu’un biais de sélection est introduit. L’enquête empirique révèle également (mais ne figure pas dans le Tableau 9) qu’ils sont plus susceptibles d’être des hommes et d’avoir des parents dans le secteur public, ce qui indique que les politiques d’embauche et de fixation des salaires du secteur public faussent le marché du travail et interfèrent avec l’allocation efficace de la main-d’œuvre et des ressources publiques. TABLEAU 9. Logarithme moyen de la différence de salaire entre le secteur privé (formel) et le secteur public Moindres carrés ordinaires Sélectivité contrôlée Différence moyenne totale en logarithme 0.41 0.04 Composants attribuables à Prime salariale 0.21 2.86 Dotations en capital humain 0.34 −0.06 Rendement du marché −0.15 −1.80 La sélection −0.95 Différentiel total inexpliqué 0.06 1.06 Source : Anós Casero et Seshan 2006 Ahad, Tzannatos et Diwan (2016) utilisent les informations du Gallup World Poll pour estimer le rendement de la scolarité dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord35. Cela montre que les taux ont tendance à être plus élevés pour les femmes que pour les hommes en général, avec quelques exceptions notables, à savoir Bahreïn, Oman, l’Arabie saoudite et la Syrie, bien qu’en moyenne les taux de rendement pour les femmes soient environ 10 % plus élevés que pour les hommes. Les taux les plus élevés se trouvent au Maroc et à Djibouti, et les plus faibles en Irak, au Koweït, en Arabie saoudite et en Syrie. 35 Toutefois, en procédant aux adaptations statistiques nécessaires, les auteurs présentent des estimations comparables pour les pays de la région MENA, comme indiqué ci-dessus, pour les hommes et les femmes. CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  59 TABLEAU 10. Taux de rendement de l’éducation par pays HOMMES (%) FEMMES (%) Saoudien 2 1 Koweït 2 3 EAU 3 5 Qatar 5 5 Bahreïn 8 7 Oman 9 5 CCG 4.8 4.4 Syrie 1 0 L’Irak 3 3 Palestine 4 7 Yémen 5 6 Jordanie 6 7 Liban 7 7 Moyen-Orient 4.2 5.1 Algérie 4 5 Tunisie 5 5 Égypte 5 7 Libye 5 7 Maroc 10 13 Afrique du Nord 5.9 7.3 Comores 5 7 Mauritanie 5 5 Soudan 6 7 Somalie 7 6 Djibouti 9 11 Autres 6.3 7.1 Moyenne de tous les pays 5.2 5.8 Source : Tzannatos, Diwan et Abdel Ahad (2016) 60 DJIBOUTI | Revue du capital humain L’écart entre les sexes en termes de rendement de l’éducation n’est pas surprenant étant donné que presque tous les hommes travaillent, ce qui n’est pas le cas de toutes les femmes. La courbe en U de la participation des femmes suggère que les femmes qui travaillent occupent les deux extrémités du spectre, les femmes les plus pauvres étant généralement engagées dans des travaux à faible rémunération et étant moins éduquées et qualifiées, et les femmes les plus riches étant engagées dans des travaux à plus forte rémunération et étant généralement plus éduquées et qualifiées. En outre, en termes d’offre de main-d’œuvre, il est possible que le système produise trop de personnes éduquées pour le nombre d’emplois disponibles et que, par conséquent, le stock de personnes éduquées au chômage continue d’augmenter. La taille croissante du secteur public par rapport au secteur privé en est la preuve et, bien qu’elle semble réfuter l’argument du déficit de compétences comme l’une des raisons d’une participation aussi faible à la population active, elle suggère que les opportunités dans le secteur privé ne se développent pas au rythme nécessaire pour absorber le nombre croissant de travailleurs qualifiés. Les estimations des rendements privés annuels en fonction du niveau d’éducation dans les secteurs public et privé révèlent un écart important pour l’enseignement supérieur et, de manière quelque peu surprenante, pour la formation professionnelle (Tableau 11). Les travailleurs du secteur public ont des taux de rendement de la scolarité plus élevés que les travailleurs du secteur privé une fois qu’ils ont atteint l’enseignement secondaire, professionnel et universitaire. Pour les salariés du secteur privé, le rendement privé annuel de l’éducation culmine à 8,9 % après l’achèvement du premier cycle de l’enseignement secondaire et diminue ensuite régulièrement pour atteindre 6,6 % pour ceux qui terminent l’enseignement secondaire, 2,0 % pour ceux qui terminent l’enseignement professionnel et 0,8 % pour ceux qui obtiennent un diplôme universitaire. En revanche, le rendement privé annuel de la scolarité dans le secteur public passe de 2,4 % pour le primaire à 5,8 % pour le premier cycle de du secondaire et à 9,9 % pour le deuxième cycle du secondaire, avant de diminuer à 9,5 % pour le professionnel et à 9,0 % pour le supérieur. Cela montre clairement que les rendements de l’éducation dans le secteur public sont beaucoup plus élevés non seulement pour les travailleurs ayant une formation universitaire, mais aussi pour ceux ayant une formation professionnelle, ce qui est moins attendu que l’écart pour l’enseignement supérieur. TABLEAU 11. Rendements de la scolarisation Régression contrôlée par la sélectivité Niveau d’éducation Public Privé Primaire 2.4 6.7 Moyen 5.8 8.9 Secondaire 9.9 6.6 Professionnel 9.5 2.0 Supérieur 9.0 0.8 Source : Anós Casero et Seshan 2006 CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  61 L’évaluation de la pauvreté de la Banque mondiale (2019) estime les rendements de l’éducation en tenant compte de divers attributs. En exécutant une fonction mincerienne standard et en contrôlant des éléments tels que le secteur de travail et les années d’expérience, l’analyse montre que chaque année supplémentaire d’éducation formelle augmente les salaires de 7,8 %. Elle montre également que le fait de travailler dans le secteur public est associé à des salaires plus élevés et à une prime de 18 %, même après avoir pris en compte d’autres caractéristiques des employés (Tableau 12). TABLEAU 12. Rendements de l’éducation Variable dépendante : logarithme des salaires Variable [1] [2] [3] [4] Années d’études 0,078*** (0,001) 0,073*** (0,001) Travaille dans le secteur public 0,180*** (0,006) 0,184*** (0,006) Expérience professionnelle 0,018*** (0,001) 0,018*** (0,001) 0,019*** (0,001) 0,019*** (0,001) Moins que l’enseignement primaire 0,158*** (0,014) 0,152*** (0,014) Enseignement primaire mais 0,386*** (0,008) 0,354*** (0,008) inférieur à l’enseignement secondaire Enseignement secondaire et supérieur 1,064*** (0,009) 0,997*** (0,009) Constant 13,008*** (0,015) 13,025*** (0,015) 13,086*** (0,015) 13,098*** (0,015) R2 0.214 0.225 0.214 0.225 Source : World Bank 2019b Le fait que l’État soit le plus grand employeur, avec 46 % des travailleurs, associé à l’importance de l’avantage salarial (Figure 26), fait de la masse salariale à Djibouti un problème pour la stabilité fiscale et pour la capacité de l’État à développer la prestation de services, à créer un environnement favorable au secteur privé et à développer l’assistance sociale pour les personnes vulnérables. (Le Fonds monétaire international estime que la prime salariale est encore plus élevée - environ 21 % en 2018). Après avoir décrit les caractéristiques principales de l’emploi et des salaires à Djibouti, le reste de ce chapitre tente de mettre en lumière les facteurs de demande et d’offre qui contribuent à ces résultats. Nous commençons par la demande (les marchés de produits qui créent la demande dérivée de travail) et discutons des secteurs qui ont contribué à la croissance et à ses implications sur l’emploi. Nous passons ensuite à l’offre pour expliquer les incitations et la capacité du système à produire les compétences dont Djibouti a besoin pour favoriser une croissance inclusive. 62 DJIBOUTI | Revue du capital humain FIGURE 28. Masse salariale du secteur public au Moyen-Orient et en Asie centrale, 2005-2016 Pourcentage du PIB, moyenne de la période Pourcentage des dépenses, moyenne de la période MEED MEED Exportateurs de pétrole et de gaz Exportateurs de pétrole et de gaz Yémen Yémen Irak Irak Irak et Yémen Irak et Yémen L'Iran L'Iran Emirats Arabes Unis Emirats Arabes Unis Arabie Saoudite Arabie Saoudite Qatar Qatar Oman Oman Koweit Koweit Bahreïn Bahreïn Algérie Algérie CCG et Algérie CCG et Algérie Cisjordanie et Gaza Cisjordanie et Gaza Tunisie Tunisie Soudan Soudan Maroc Maroc Mauritanie Mauritanie Liban Liban Jordan Jordan Égypte Égypte Djibouti Djibouti Afghanistan Afghanistan Importateurs de pétrole MOANAP Importateurs de pétrole MOANAP Turkménistan Turkménistan Kazakhstan Kazakhstan Azerbaïdjan Azerbaïdjan CAC Exportateurs de pétrole CAC Exportateurs de pétrole Tadjikistan Tadjikistan République du Kirghizistan République du Kirghizistan Géorgie Géorgie Arménie Arménie Importateurs de pétrole de la CAC Importateurs de pétrole de la CAC 0 2 4 6 8 10 12 14 16 18 0 10 20 30 40 50 Source : IMF 2019 III. QU’EST-CE QUI POURRAIT LIMITER L’OFFRE DE TRAVAIL ? Les données disponibles mettent en évidence trois facteurs susceptibles de limiter l’offre de main- d’œuvre en empêchant l’acceptation d’un emploi : Premièrement, les files d’attente retardent par définition l’entrée sur le marché du travail. Ayant établi que chaque année supplémentaire d’éducation formelle augmente le revenu de 7,8 % et que la prime salariale pour le déploiement de cette éducation et de cette formation dans le secteur public plutôt que dans le secteur privé est d’environ 18 %, il n’est pas surprenant que cela conduise à encourager l’attente d’un emploi dans le secteur public. Utiliser le secteur privé formel comme tremplin en attendant ne semble pas viable étant donné la petite taille du secteur privé formel, CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  63 laissant l’informalité comme seul choix et retardant ainsi l’entrée sur le marché du travail et limitant l’offre de main-d’œuvre36. Le deuxième facteur qui peut limiter l’offre est que les salaires de réserve37 à Djibouti sont élevés, bien que les raisons ne soient pas évidentes. Habituellement, les salaires de réserve élevés sont observés dans les pays qui reçoivent beaucoup des transferts de fonds, mais cela ne semble pas être le cas à Djibouti, si l’on se base sur les registres officiels des transferts de fonds (Figure 29), bien qu’il soit possible que les registres officiels ne reflètent pas les niveaux élevés de transferts de fonds parce qu’une grande partie de la population locale et les individus somaliens et d’autres qui ont de vastes réseaux à travers le monde reçoivent une grande partie de leurs transferts de fonds par le biais de systèmes informels. Il est également possible que les salaires élevés, les avantages généreux et la sécurité de l’emploi dans le secteur public aient conduit à des attentes salariales plus élevées de la part de tous les aspirants au marché du travail. Bien qu’il y ait des preuves considérables de cela dans les pays du Conseil de Coopération du Golfe, ce qui conduit souvent à des attentes significatives pour la bonne opportunité dans le secteur public, il n’est pas clair qu’à Djibouti, avec une couverture de sécurité beaucoup plus pauvre et un système de contrat social plus limité, les individus refuseraient des emplois dans l’attente d’un emploi dans le secteur public. FIGURE 29. Envois de fonds avec comparateurs 7,0 Envois de fonds (pourcentage du PIB) 6,0 5,0 4,0 3,7 3,7 3,0 3,0 2,9 2,0 2,5 2,1 2,0 1,0 1,7 1,5 0,0 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2020 Année Djibouti Moyen-orient et afrique du nord (hors pays à haut revenu) Pays à Faible Revenu Pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure Source : World Bank 2021 36 L’informalité est caractéristique du marché du travail djiboutien. Le secteur informel est défini de différentes manières ; une taxonomie détaillée du secteur informel peut être trouvée dans Benjamin et al. (2012). Généralement, le secteur informel fait référence aux entreprises informelles ou à l’entrepreneuriat. Emli et Robleh (2019) notent qu’il existe principalement trois types d’entreprises : celles liées à la Caisse nationale de sécurité de Djibouti, celles enregistrées à la Chambre de commerce et celles qui fonctionnent comme des entreprises non enregistrées. Leurs recherches montrent qu’il y a au moins 178 entreprises et 790 emplois dans le secteur informel. Les données du ministère des Affaires sociales et des Solidarités montre que ce secteur emploie environ 20 % de la force de travail effective du pays. 37 Le salaire d’acceptation est le taux de salaire le plus bas auquel un travailleur serait prêt à accepter un type d’emploi particulier. Il s’agit d’une représentation théorique du taux horaire auquel un individu valorise son propre temps de loisir. 64 DJIBOUTI | Revue du capital humain Un troisième facteur à prendre en considération est la rigidité du marché du travail. En général, le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ne présentent pas de niveaux de rigidité très élevés, comme l’indiquent l’indice d’emploi des travailleurs (IET) et l’indice de difficulté d’embauche (IDE). L’indice IET se concentre sur le niveau de rigidité des réglementations du travail et, bien qu’il ne s’agisse pas d’une méthode parfaite pour mesurer la rigidité et qu’il faille être prudent avant de tirer des conclusions politiques sur le degré de flexibilité ou de rigidité d’un marché du travail, il s’agit de la seule source de données consolidées disponible sur la réglementation du travail au Moyen-Orient et en Afrique du Nord. L’indice IET est compris entre 0 et 100, les chiffres les plus élevés indiquant une plus grande rigidité. Il est construit à partir de plusieurs sous-indices, notamment les difficultés d’embauche, la rigidité des heures de travail, les difficultés de licenciement et le coût du licenciement. L’IDE, qui mesure dans quelle mesure la loi restreint les types de contrats flexibles et à quel point il est coûteux pour les entreprises d’embaucher des primo-demandeurs d’emploi en raison de ces lois, est intégré à l’IET. Cela pourrait limiter considérablement la capacité des étudiants à se tourner vers les opportunités du marché, car la législation est plus stricte en ce qui concerne les emplois dans le secteur formel. Bien qu’il y ait eu un changement général vers des arrangements de travail et des structures d’organisation plus flexibles en raison de la mondialisation, ainsi que des changements significatifs dans la technologie qui ont contribué à ce que les contrats de travail deviennent beaucoup moins standard et créent une force de travail presque 24 heures sur 24 dans de nombreux pays, Djibouti a fait des progrès significatifs dans ce domaine. Djibouti a fait des progrès significatifs sur un certain nombre d’indicateurs dans le climat des affaires et même récemment sur la question de l’emploi des travailleurs. Les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord pour lesquels des données sont disponibles ont des IET et des IDE très faibles (par exemple, les pays du Conseil de coopération du Golfe) et très élevés (par exemple, l’Algérie, Djibouti, le Maroc) (Figure 30). Ces dernières années, Djibouti a progressé sur certains indicateurs de Doing Business, notamment la facilité d’emploi des travailleurs (Tableau 13). L’IDE de Djibouti est élevé selon les normes régionales et internationales, et il est important d’y remédier afin d’accroître la flexibilité du marché du travail. Par exemple, il existe des restrictions à l’utilisation de contrats à durée déterminée pour ce qui est considéré comme des tâches permanentes, des règles sur la durée des contrats à durée déterminée uniques (12 mois) et une période maximale d’utilisation de 24 mois. Les lignes directrices relatives à la période d’essai sont également restrictives, exigeant des entreprises qu’elles prennent des décisions rapidement, dans un délai maximum de deux mois. L’une des évolutions les plus complexes est sans doute l’utilisation généralisée d’un salaire minimum de 200 USD par mois, qui faisait autrefois partie de la législation du pays et qui a été abandonné, mais qui sert encore de référence pour l’embauche dans le secteur public. Djibouti s’est montré progressiste en termes de protection des travailleurs et de fourniture de services aux réfugiés. Il a ratifié les huit conventions fondamentales de l’Organisation internationale du travail, qui protègent les droits des travailleurs, et s’est engagé à fournir un accès aux services aux réfugiés. Les réfugiés sont intégrés dans le système national de santé, et des papiers d’identité et des certificats ont été délivrés aux réfugiés et aux demandeurs d’asile, qui peuvent ainsi avoir accès à des comptes bancaires, au crédit et à l’emploi. Ces mesures positives contribuent à libérer leur capital humain et à réduire la charge fiscale liée à l’assistance aux non-nationaux, même si, compte tenu de la demande limitée de main-d’œuvre à Djibouti, il serait utile de procéder à une étude plus approfondie de l’impact de ces mesures sur les Djiboutiens de souche. CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  65 FIGURE 30. Comparateurs de l’indice de l’emploi des travailleurs GCC Asie de l'Est et Pacifique Asie du sud OECD Amérique latine et Caraïbes Europe de l'Est et Asie centrale Moyen-Orient et Afrique du Nord (hors CCG) Afrique sub-saharienne Bouwait Emirates quitte Onita Oman Qatar Arabie Saoudite Rép. arabe syrienne Jorukam Rép. du Yémen Irak Liban Egypte Rép. Arabe Iran, Rép. Islamique. Cisjordanie et Gaza Tunisie Algérie Djibouti Maroc 0 10 20 30 40 50 60 70 Source: Angel-Urdinola et Kuddo 2010 66 DJIBOUTI | Revue du capital humain TABLEAU 13. Progrès de Djibouti sur les indicateurs Doing Business ANNÉE DÉVELOPPEMENTS ANNÉE DÉVELOPPEMENTS 2020 Obtention d’un crédit ✓ 2015 Traitement des permis de construire ✓ Protéger les investisseurs ✓ minoritaires Résolution de l’insolvabilité ✓ 2014 Créer une entreprise ✓ Employer des travailleurs ✓ Obtention d’un crédit ✓ Résolution de l’insolvabilité ✓ 2019 Créer une entreprise ✓ Enregistrement des biens ✓ 2012 Traitement des permis de construire ✘ Obtention d’un crédit ✓ Commerce transfrontalier ✓ Protéger les investisseurs ✓ minoritaires Exécution des contrats ✓ 2010 Paiement des impôts ✘ Résolution de l’insolvabilité ✓ 2009 Commerce transfrontalier ✓ 2018 Créer une entreprise ✓ Traitement des permis de construire ✓ 2008 Enregistrement des biens ✓ Enregistrement des biens ✓ Commerce transfrontalier ✓ Obtention d’un crédit ✓ Protéger les investisseurs ✓ minoritaires Source : Banque mondiale, base de données Doing Business Indicators IV. DEMANDE DE MAIN-D’ŒUVRE Djibouti a réalisé des progrès économiques remarquables depuis 2000 grâce au commerce et aux investissements. Après une guerre civile dans les années 1990, un accord de paix avec un partage du pouvoir a été conclu au début de l’année 2000 et continue d’être appliqué. La stabilité de l’environnement politique national a permis à Djibouti de tirer parti de sa position stratégique pour attirer les investisseurs et stimuler la croissance. Les investissements les plus importants comprennent le développement du port et la construction d’un chemin de fer électrique qui relie le pays à l’Éthiopie, le deuxième pays le plus peuplé d’Afrique et l’économie à la croissance la plus rapide, dont les importations et les exportations représentent plus de 80 % des activités portuaires de Djibouti. CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  67 A. D’où vient la croissance à Djibouti ? L’accumulation de capital, de plus en plus financée par la dette, a été le principal moteur de la croissance, avec une faible contribution de la productivité du travail ou de l’innovation des entreprises (Figure 31). Les investissements importants réalisés au cours de la dernière décennie ont entraîné une forte croissance économique, mais les bénéfices n’ont pas été largement partagés. Djibouti a investi massivement dans les infrastructures reliant l’Éthiopie aux marchés mondiaux, portant la croissance à une moyenne de 6,2 % sur la période 2013-2019, avant la crise de la COVID, mais les investissements étant concentrés sur des projets d’équipement, peu d’emplois ont été créés et le taux de chômage reste élevé. FIGURE 31. Composition de la croissance 40 Taux de croissance (points de pourcentage) 20 0 –20 2005 2006 2007 2008 2009 2010 2011 2012 2013 2014 2015 Le stock de capital (D*gK) Capital humain par travail ((1–D)*gh) PIB reel (gY) Travail ((1–D)*gL) Productivité totale des facteurs (gA) Source : World Bank 2018a La plupart des investissements ont été financés par des emprunts d’entreprises d’État, ce qui a exacerbé les vulnérabilités budgétaires qui reposent sur une base fiscale de plus en plus étroite. La dette publique extérieure est passée de 34 % du PIB en 2013 à 72 % en 2021, les entreprises d’État représentant la majeure partie des emprunts. L’accumulation de capital financée par la dette soulève des inquiétudes quant à la durabilité de la croissance, car elle a entraîné une augmentation rapide de la dette publique extérieure et de la dette publique et garantie par l’État, qui est passée de 57,1 % du PIB en 2014 à une estimation de 89,7 % en 2017. Le fardeau du remboursement de la dette, qui évolue rapidement, devrait restreindre la marge de manœuvre budgétaire et pourrait limiter les dépenses indispensables dans les secteurs sociaux. Dans le même temps, les recettes publiques ont diminué en raison d’exonérations généralisées, et les loyers des bases militaires étrangères sont restés inchangés depuis 2016. Plus fondamentalement, le rôle prépondérant de l’accumulation de capital dans la croissance, ainsi que la contribution limitée du travail ou de la productivité, indiquent un manque de transformation économique. Lorsque la transformation économique sous-tend la croissance, les gains de 68 DJIBOUTI | Revue du capital humain productivité sont libérés par le mouvement des travailleurs et des ressources des activités à faible productivité vers des activités à plus forte productivité au sein des secteurs et entre les secteurs. Une telle transformation ne semble pas avoir eu lieu à Djibouti, qui a pu croître sans transformation significative parce que les dividendes de son importance géostratégique (ports et bases militaires) ont soutenu cette croissance, ce qui a réduit les incitations à entreprendre des réformes. Le secteur des services est le principal moteur de l’économie, représentant près de 80 % de la croissance et une part importante de l’emploi ; le secteur agricole a un potentiel limité étant donné les conditions climatiques arides de Djibouti, mais même dans le secteur des services, la plupart des travailleurs du secteur privé sont engagés dans le commerce de gros et de détail informel à faible valeur ajoutée. La plupart de la population en âge de travailler est au chômage, employée de manière informelle ou hors de la population active. Le secteur public joue un rôle dominant dans l’économie en tant qu’employeur et producteur de biens et de services. La faiblesse du capital humain, en particulier des taux d’alphabétisation, contribue également à la faible productivité de l’économie. L’activité d’exportation limitée et la dépendance à l’égard des importations sont d’autres preuves de la faible valeur ajoutée de l’économie nationale. FIGURE 32. Productivité du travail Estimations 2016 Petits États Revenu moyen inférieur Djibouti 0 20 000 40 000 60 000 Produit intérieur brut par personne employée Dollars américains Source : World Bank 2018a La séparation de la croissance en fonction des facteurs de production et de la productivité montre que l’accumulation de capital économique a dominé la croissance, avec une faible contribution du travail. Le capital a augmenté en moyenne de plus de 21 % entre 2005 et 2015 et a contribué à hauteur de 12 points de pourcentage à la croissance. Dans le même temps, le travail n’a augmenté que de 2 % et a contribué à la croissance à hauteur de moins d’un point de pourcentage. La croissance de la productivité totale des facteurs a été négative et a donc réduit la croissance. L’accumulation de capital résultant d’investissements à grande échelle dans les infrastructures et la logistique a un faible potentiel de création d’emplois et augmente principalement la demande de main-d’œuvre qualifiée. Le potentiel de création d’emplois des ports et des secteurs du transport et de la logistique diminue au fur et à mesure que les services portuaires deviennent de plus en plus automatisés et dépendent moins de la main d’œuvre non qualifiée. Plutôt que de poursuivre l’accumulation de capital, Djibouti doit réorienter sa politique vers l’expansion de l’emploi par le biais d’un secteur privé dynamique et de travailleurs en bonne santé, éduqués et productifs. L’augmentation de la productivité du secteur privé et de l’employabilité des travailleurs sont deux voies interdépendantes pour faciliter la transformation économique. CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  69 B. Comment réaliser le grand saut dans la transformation économique ? Djibouti est une économie non compétitive. Sa monnaie est surévaluée et les coûts des services publics sont extrêmement élevés, ce qui la rend peu compétitive en général, puisque les coûts relatifs des intrants sont la clé de la compétitivité. Le potentiel agricole et minier naturel est faible et il n’y a qu’une seule grande usine de fabrication - une usine d’embouteillage de Coca Cola qui produit également de l’eau en bouteille. L’étroitesse de son marché intérieur et le coût élevé des facteurs de production limitent son potentiel manufacturier. Djibouti est une économie duale, basée sur les services et la rente, qui ne profite qu’à une minorité de la population, et qui est basée en grande partie sur des rentes provenant de plusieurs sources majeures et mineures, y compris un port stratégiquement situé et des bases militaires étrangères. La création d’une classe d’initiés ayant des liens étroits avec l’État caractérise souvent la gouvernance économique dans une économie de rente, et Djibouti n’est peut-être pas une exception (USAID 2004). L’économie de rente de Djibouti a principalement favorisé la classe privilégiée de la population, en grande partie grâce à l’influence de la famille pour accéder à des emplois dans le secteur privé formel, les entreprises publique, et la fonction publique. Djibouti pourrait se positionner comme la plaque tournante commerciale de la région, avec des retombées qui iraient bien au-delà du port lui-même. Le commerce mondial devrait croître de 7 % par an et doubler d’ici dix ans. Pour y faire face, l’industrie du transport maritime est en constante évolution technologique. La formation et la préparation aux exigences professionnelles des services auxiliaires du port et les possibilités accrues créées par l’impulsion donnée au secteur de la construction pourraient avoir des retombées considérables. Un Djibouti qui dispose d’une gestion efficace de l’électricité, des télécommunications, d’Internet et d’une logistique de transport à des prix compétitifs offrirait de nouvelles opportunités économiques. V. OFFRE DE MAIN-D’ŒUVRE Cette section examine l’offre de main-d’œuvre et en particulier s’il existe à Djibouti des facteurs susceptibles de limiter la quantité de main-d’œuvre, de créer des inadéquations de compétences ou de limiter la qualité de la main-d’œuvre. A. Inadéquation des compétences Aucune discussion sur la quantité et la qualité des compétences disponibles ne peut être considérée comme complète sans aborder la question de l’inadéquation des compétences. La déclaration de l’inadéquation des compétences est peut-être l’un des termes les plus utilisés à tort pour expliquer les faibles résultats sur le marché du travail. La principale inadéquation qui semble exister sur le marché djiboutien est que le système produit des individus surqualifiés pour les emplois disponibles dans le pays. Ceci n’est pas propre à Djibouti et est peut-être largement répandu dans le monde, mais doit être considéré avec prudence. Le discours récurrent est que les jeunes diplômés et les autres ne sont pas suffisamment préparés aux exigences du marché du travail et ne possèdent pas les compétences nécessaires, ce qui 70 DJIBOUTI | Revue du capital humain expliquerait le taux de chômage élevé. Cependant, il devient de plus en plus évident que les raisons du chômage élevé, malgré un grand nombre d’offres d’emploi, sont basées sur des facteurs autres que l’inadéquation des compétences (Figure 33). FIGURE 33. Obstacles à la réussite identifiés par les entreprises % d'entreprises choisissant l'électricité comme principal obstacle 48,8 % d'entreprises choisissant la corruption comme principal obstacle 12,6 % d'entreprises considérant les taux d'imposition comme l'obstacle le plus important 12,4 % d'entreprises qui considèrent le manque d'éducation des travailleurs comme 6,6 l'obstacle le plus important % d'entreprises choisissant le secteur informel comme principal obstacle 4 % d'entreprises considérant la réglementation commerciale comme 3,8 l'obstacle le plus important % d'entreprises considérant le transport comme l'obstacle le plus important 2,6 % d'entreprises considérant l'accès au financement comme l'obstacle le plus important 1,9 % d'entreprises considérant l'octroi de licences comme l'obstacle le plus important 1,8 % d'entreprises ayant choisi la réglementation du travail comme principal obstacle 1,7 0 10 20 30 40 50 60 Pourcentage d'entreprises Source : Angel-Urdinola et Kuddo 2010 Les entreprises djiboutiennes ne citent pas l’inadéquation des compétences des travailleurs parmi les trois principaux obstacles identifiés à la réussite de l’entreprise, et lorsqu’elle apparaît en quatrième position, c’est de loin en termes de pourcentage d’entreprises qui la considèrent comme un obstacle. Il n’est peut-être pas tout à fait approprié d’emprunter le langage de l’inadéquation des compétences dans le contexte des économies plus avancées pour l’utiliser dans le contexte de Djibouti. Les déficits de compétences sont omniprésents dans l’économie djiboutienne, et le pays pourrait bénéficier du développement d’un large éventail de compétences dans tous les secteurs. Ce point est abordé dans la section suivante. En même temps, la demande pour un tel éventail de compétences est limitée, et même si ces compétences étaient produites dans le pays, il y a peu de chances qu’elles soient absorbées. B. Contraintes sur la qualité de l’éducation et des compétences Jusqu’en 2019, il manquait une vision claire et une définition précise du rôle, des objectifs et du fonctionnement du système d’enseignement technique et de formation professionnelle. En 2019, le gouvernement djiboutien a élaboré la Politique nationale de formation professionnelle, qui propose une évaluation complète du secteur de l’enseignement et de la formation technique et professionnelle (EFTP) ainsi que des réformes nécessaires pour améliorer son fonctionnement. Cependant, cette politique de formation ne fait pas de distinction entre les interventions et les activités ciblées pour les différents groupes sociaux, tels que les jeunes, les femmes, les réfugiés et d’autres groupes vulnérables. CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  71 Le système d’EFTP et de développement des compétences à Djibouti est peu flexible, avec des programmes à moyen et long terme. La plupart des programmes d’EFTP durent au minimum un an et peuvent durer jusqu’à trois ans. Ces programmes doivent être réformés pour rendre le système global de développement des compétences plus flexible en les convertissant en programmes modulaires, superposables, en courts et micro-programmes, ce qui favoriserait la flexibilité en termes d’entrée et de sortie des programmes, augmenterait l’accès aux groupes qui ne peuvent pas rejoindre les programmes de développement des compétences en raison de leur durée, établirait une échelle de compétences, ferait du développement des compétences une option pour ceux qui sont déjà sur le marché du travail, et permettrait de mieux cibler les ressources. L’accès à la formation post-élémentaire est extrêmement limité à Djibouti. Malgré le nombre d’institutions, il y a peu d’opportunités de formation dans le pays. La plupart des programmes de formation sont pour ceux qui ont terminé au moins leur scolarité obligatoire avant de poursuivre une formation complémentaire dans le système formel, et semblent être axés sur les rares opportunités d’emploi disponibles dans le secteur formel, même si la plupart des emplois se trouvent dans le secteur informel. Les possibilités sont donc limitées pour ceux qui ont quitté l’école prématurément ou qui n’ont jamais été scolarisés et qui sont directement entrés sur le marché du travail, travaillant dans le secteur informel. Même avec cette barrière élevée à l’entrée, les programmes de formation professionnelle sont souvent considérés comme inférieurs, stigmatisés et perçus comme une option réservée aux personnes défavorisées. Ainsi, bien qu’une part importante de la population n’ait pas la possibilité d’acquérir une formation supplémentaire, même si elle le souhaite, il existe un autre groupe qui choisit de ne pas le faire, même lorsqu’il est en mesure d’accéder à ces programmes. La capacité de la Direction générale de l’enseignement technique et de la formation professionnelle (DGETFP) à remplir son objectif de soutien au développement des compétences et à l’employabilité de la jeunesse djiboutienne est limitée. La DGETFP a été restructurée en 2018 et devrait contribuer à la planification, à la budgétisation et à la mise en œuvre des programmes d’EFTP, assurer toutes les fonctions de suivi et d’évaluation, fonctionner comme un service d’inspection et surtout, soutenir et assurer la coordination de l’ensemble des entités impliquées dans la mise en œuvre de l’enseignement technique et des compétences professionnelles, mais bien qu’elle soit l’organe clé du gouvernement en matière d’EFTP, la DGETFP manque d’autonomie, de personnel, de financement et d’autres ressources nécessaires pour soutenir un ensemble de fonctions aussi large, ce qui limite sa capacité à atteindre ses objectifs. Les mécanismes d’assurance qualité ne sont pas entièrement en place et les éléments en place ne fonctionnent pas bien. Le système d’EFTP de Djibouti bénéficierait de l’élaboration de procédures et de mécanismes d’assurance qualité, ce qui impliquerait une série d’activités, notamment l’élaboration et la mise en place d’un cadre national de qualification professionnelle. Des efforts doivent également être faits pour s’assurer que les programmes d’études, les mécanismes d’évaluation des étudiants, les travaux pratiques et l’élaboration de dossiers sont tous renforcés dans le cadre des programmes de formation. De plus, étant donné que les certificats locaux disponibles ne sont pas établis en fonction des compétences, il devient difficile pour les employeurs de sélectionner les travailleurs dont ils ont besoin sans recourir à ces approches de la formation axées sur les compétences. Des partenariats doivent être développés et renforcés pour garantir que l’offre de formation réponde aux besoins des employeurs. Des partenariats de travail étroits doivent être établis entre 72 DJIBOUTI | Revue du capital humain le système et les institutions de formation et les représentants du secteur privé, les employeurs, la chambre de commerce et les autres parties prenantes concernées, y compris les organisations de jeunesse, les organisations non gouvernementales travaillant avec les populations vulnérables et les organisations soutenant l’éducation et la formation des réfugiés, telles que le UNHCR et l’UNICEF. Le système d’EFTP souffre d’un sous-financement et d’un manque de ressources. Bien que les crédits alloués à l’EFTP aient augmenté ces dernières années grâce à la création d’un fonds spécial pour le développement du secteur, aux crédits budgétaires ordinaires alloués au département pour le fonctionnement des institutions et aux sources externes par le biais de la coopération avec les partenaires de développement, la nouvelle stratégie identifie le financement comme une contrainte majeure qui continuera à entraver le développement et la qualité du secteur de la formation si l’on n’y remédie pas. Malgré le sous-financement, des mesures doivent être prises pour accroître l’efficacité de l’utilisation des ressources disponibles. Le système de développement professionnel des formateurs à Djibouti est faible et ne consiste qu’en une formation initiale. L’élément le plus important de tout système de formation est le formateur qui formera la prochaine génération de travailleurs. Les formateurs actuels du système djiboutien n’ont pas été suffisamment formés au cours des dernières années, que ce soit au niveau de la formation initiale ou de la formation continue. Il existe peu de programmes de formation continue pour les formateurs et, étant donné que certains d’entre eux sont formateurs depuis longtemps, ils comprennent mal les besoins actuels en matière de compétences dans les secteurs productifs. Le renforcement des partenariats entre l’industrie et les organismes de formation favoriserait l’élaboration de programmes de formation adaptés au marché. En résumé, les salaires à Djibouti sont élevés et le secteur public est le principal employeur des personnes ayant un niveau d’éducation supérieur au secondaire, offrant une prime importante pour ce niveau d’éducation. Le secteur privé, quant à lui, est principalement représenté par le secteur informel. Cependant, en raison de la petite taille de l’économie et de sa faible diversification, la création d’emplois sur le marché du travail ne parvient pas à suivre le nombre croissant de jeunes à la recherche d’un emploi. Les rigidités du marché du travail, telles que les réglementations qui compliquent l’embauche de travailleurs, peuvent également limiter l’emploi. Du côté de l’offre, l’amélioration du système de formation technique et professionnelle (EFTP) pourrait contribuer à préparer les travailleurs à des emplois dans les secteurs émergents à Djibouti ou dans la région. VI. LA VOIE À SUIVRE Le conflit en Éthiopie a pesé lourdement sur l’économie de Djibouti. En outre, la hausse des prix des produits de base et la sécheresse régionale ont érodé le pouvoir d’achat des ménages et réduit les recettes publiques. La récente trêve en Éthiopie pourrait permettre une reprise du commerce, inversant les récentes baisses de l’activité portuaire, et contribuer à attirer de nouveaux investissements étrangers. Le Fonds monétaire international prévoit que la croissance économique de Djibouti reprendra en 2023 avec un rebond en Éthiopie et que l’inflation diminuera conformément aux tendances internationales. Ceci présente une opportunité de revoir le modèle de croissance et d’opter pour un modèle moins intensif en capital, basé sur les rentes et financé par la dette, qui peut fournir une croissance CHAPITRE 5 : Les années de travail : Les marchés du travail à Djibouti  73 inclusive par le biais de la croissance de la productivité. Pour ce faire, Djibouti doit démontrer que l’utilisation du capital humain s’améliore, ce qui nécessitera de prêter attention aux signaux que les marchés envoient aux individus et aux ménages qui prennent des décisions d’investissement en capital humain - qu’il s’agisse de signaux provenant du marché du travail sur la segmentation par les employeurs privés et publics, des marchés de produits sur la demande de compétences, ou des décisions en matière de commerce et d’investissement. Certaines recommandations consistent à envisager des actions qui aboutissent à : • Améliorer l’environnement des entreprises et réduire les rigidités du marché du travail pour faciliter la création de nouvelles entreprises et l’embauche. Djibouti doit assouplir sa législation du travail pour permettre à un plus grand nombre de Djiboutiens d’être embauchés tout en veillant à ce que les travailleurs soient protégés contre l’exploitation et les pratiques déloyales. Même si Djibouti a fait quelques progrès ces dernières années, il continue à se classer plus haut que les autres pays du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord en ce qui concerne la difficulté d’embaucher des travailleurs. • Réduire la segmentation du marché entre le secteur privé et le secteur public. Il faudrait pour cela réduire la prime salariale, qui est actuellement de 20 % ou plus, ce qui réduirait l’impact de distorsion de l’embauche dans le secteur public sur le marché du travail, diminuerait la masse salariale du secteur public et libérerait une marge de manœuvre budgétaire pour les investissements productifs. • Augmentation de l’offre et de la qualité de la formation professionnelle pour les jeunes. Une série de réformes a été discutée ci-dessus pour rendre les programmes d’EFTP plus modulaires, plus flexibles et plus accessibles aux groupes marginalisés et pour accroître l’accès à la formation post-élémentaire, avec un cadre national de qualifications accompagné de meilleurs mécanismes d’évaluation des étudiants. L’accroissement de l’autonomie et du financement du principal organe gouvernemental chargé de la formation technique et professionnelle (DGETFP) aurait un effet positif substantiel sur l’amélioration de la gouvernance de l’offre de compétences. • Implication du secteur privé dans la formation. Une plus grande implication du petit secteur privé dans la conception de la formation, l’incorporation des technologies de l’information et de la communication dans la formation des jeunes ruraux, des femmes et de ceux qui ont abandonné l’école formelle, aiderait à créer les bases d’une croissance inclusive et à améliorer l’utilisation du capital humain à Djibouti. • Connecter les travailleurs djiboutiens aux marchés du travail voisins. Il est difficile pour les petits États de diversifier leurs sources de croissance et d’emploi, de sorte qu’une économie monosectorielle émerge, généralement à forte intensité de ressources ou de capital. Dans ces situations, la mise en relation des travailleurs avec des emplois situés ailleurs dans la région peut contribuer à prévenir l’érosion du capital humain, et même, à accroître les incitations à investir davantage dans le capital humain en augmentant le taux de rendement grâce à la mobilité, qui permet une meilleure utilisation du capital humain. Une telle mobilité pour les Djiboutiens dans le cadre de la coopération de l’Autorité intergouvernementale pour le développement (IGAD), ou au-delà, vers le Conseil de coopération du Golfe ou l’Europe pourrait être explorée de la même manière que d’autres pays d’Afrique le font activement par leurs efforts d’intermédiation entre les travailleurs et les marchés internationaux du travail. 74 DJIBOUTI | Revue du capital humain CHAPITRE 6 : CONCLUSIONS Sur la base d’une simulation ICH, on peut s’attendre à ce qu’un Djiboutien moyen né en 2022 n’atteigne que 41 % de son plein potentiel de capital humain à l’âge de 18 ans. Cela signifie que 59 % de tous les talents à Djibouti ne sont pas exploités, ce qui place le pays à proximité des PFR et de l'IGAD, et à un niveau inférieur à celui des pairs en termes de revenus. L’exploitation de ces talents permettrait à Djibouti d’augmenter sa capacité de production et d’exploiter une population saine, qualifiée et résiliente comme moteur d’une croissance économique et d'un développement durable et inclusif. Les projections selon lesquelles Djibouti devraient atteindre son ratio de dépendance par âge le plus bas en 2039, avec environ 55 % des Djiboutiens en âge de travailler, soulignent l’urgence de se concentrer sur l’accumulation de capital humain (Our World in Data 2022). Cette RCH fournit une vue d’ensemble des résultats du développement humain à Djibouti tout au long du cycle de vie, en mettant l’accent sur trois périodes : la petite enfance, l'adolescence et la jeunesse. Il s’agit de périodes de transition importantes dans le cycle de vie et dans la trajectoire d’accumulation du capital humain, qui permettent de concevoir des interventions intersectorielles et des actions politiques efficaces. Se concentrer sur ces périodes est également une priorité pour le gouvernement. Dans un petit État aux capacités limitées comme Djibouti, l’adhésion politique est un précurseur essentiel de l’action. Les progrès récents en matière de développement humain sont indéniables, notamment les efforts louables déployés pour soutenir l’afflux de réfugiés. Cependant, il reste encore beaucoup à accomplir. Les inscriptions aux programmes de DPE, par exemple, ont doublé entre 2015 et 2021 pour atteindre 13,2 %, mais elles restent faibles et inégalement réparties, ce qui offre des possibilités d’améliorer l’accès, la couverture et la qualité de la prestation de services essentiels pour les familles ayant de jeunes enfants. De même, malgré l’augmentation des taux de scolarisation à tous les niveaux au cours des deux dernières décennies, en particulier dans le primaire et le premier cycle du secondaire, le nombre d’années de scolarisation attendues reste faible (9,2 ans), avec des taux de redoublement et d’abandon élevés mais en baisse, en particulier chez les filles. Les résultats de l’apprentissage en matière de calcul et d’alphabétisation sont inférieurs à ceux des pays à revenu équivalent et des pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (à l’exception des pays à revenu élevé) et sont exacerbés par le manque de données sur l’apprentissage. Cela dit, les efforts de réforme déployés par le MENFOP pour améliorer la qualité, accroître l’apprentissage fondamental et combler les lacunes dans les données d’apprentissage donnent CHAPITRE 6 : Conclusions 75 des résultats prometteurs, comme l’indiquent les résultats de la récente évaluation de la lecture en début d’année scolaire. L’expansion progressive de l’éducation préscolaire et l’engagement du gouvernement à fournir une éducation préscolaire à tous d’ici 2030 reflètent cette tendance positive de la réforme. La dynamique de la réforme doit être maintenue et, si possible, accélérée. Les occasions manquées d’acquérir des connaissances de base dans les premières années limitent l’accumulation du capital humain tout au long du cycle de vie. Le faible taux d’alphabétisation des adultes à Djibouti (60,1 % pour les hommes, 39,5% pour les femmes) est un obstacle important à l’acquisition des compétences nécessaires pour entrer sur le marché du travail. Les résultats sanitaires de Djibouti se sont améliorés au cours des deux dernières décennies, mais les améliorations sont inférieures à celles d’autres pays (à revenu non élevé) du Moyen- Orient et de l’Afrique du Nord. Par exemple, bien que la prestation de services SRMNIA+N ait considérablement augmenté dans certaines régions, l’accès aux soins de santé maternelle et néonatale reste limité. Associé à l’insécurité alimentaire, cela limite le potentiel des nourrissons et des jeunes enfants à atteindre un développement optimal, à être prêts pour l’école, à obtenir des résultats cognitifs à plus long terme et à développer leur capital humain. Le système de protection sociale de Djibouti a évolué au cours des dix dernières années, mais les programmes de protection sociale restent inadéquats, fragmentés et non viables. Les programmes de transfert actuels soutenus par la Banque mondiale couvrent environ 22 500 ménages pour la période de mise en œuvre du projet (voir encadré 2), et le soutien de la Banque a permis d’étendre la couverture du registre social à environ la moitié de la population, bien qu’un ciblage efficace des personnes pauvres et vulnérables nécessite davantage d’améliorations et de mesures des performances correspondantes. Le ministère des Affaires sociales et de la Solidarité a mis en place un mécanisme de soutien au niveau local qui devrait améliorer la mise en œuvre des programmes de protection sociale, mais sa couverture est également faible. Malgré une augmentation significative de la couverture des filets de sécurité sociale, le soutien aux populations vulnérables reste donc limité, dépendant du financement des donateurs et, par conséquent, non durable et inadéquat en termes d’apport d’un ensemble minimum de services susceptibles de lisser la consommation et de protéger les acquis du développement humain. Le système de protection sociale est insuffisant pour protéger les populations pauvres et vulnérables des effets négatifs tout au long du cycle de vie ou pour encourager l’investissement dans le capital humain. La nouvelle stratégie de protection sociale en cours d’élaboration devrait compléter les opérations actuelles soutenues par la Banque en aidant le gouvernement à étendre la couverture et à accroître l’efficience et l’efficacité des programmes de protection sociale et des liens avec d’autres prestations de services sociaux en vue d’obtenir des résultats. Les années d’adolescence offrent la possibilité d’accroître l’accumulation et l’utilisation du capital humain. Les filles, en particulier, ont un potentiel productif inexploité. Les taux de participation des filles sont inférieurs à ceux des garçons, même si les filles réussissent mieux à l’école (elles ont des taux de redoublement le plus faibles à l’école primaire et de meilleurs résultats à l’examen national de l’école primaire). Les filles ont un taux d’abandon scolaire plus élevé en cinquième année, et on estime que près de 46 % des filles ne sont pas scolarisées, contre environ 39 % des garçons. En 2017, le taux d’activité des femmes était de 32 %, contre 59 % pour les hommes, et de moins de 76 DJIBOUTI | Revue du capital humain 33 % pour les jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans. Bien que les taux d’achèvement de la scolarité et de redoublement doivent être améliorés pour les garçons et les filles, les filles en particulier doivent être soutenues avec l’acquisition de compétences de vie essentielles et une formation en santé reproductive pour retarder le mariage et l’accouchement et faciliter leur entrée sur le marché du travail. Investir dans l’éducation sanitaire des adolescents pourrait avoir des effets multiplicateurs positifs en réduisant la mortalité maternelle et infantile. La population djiboutienne en âge de travailler est confrontée à un triple problème : des salaires élevés, un chômage plus important parmi les travailleurs les plus instruits, et de faibles résultats en matière d’emploi en général. En tant que tel, Djibouti doit s’orienter vers une économie plus compétitive, alimentée par la productivité, en dépit de sa petite taille qui impose naturellement des contraintes à la diversification, et de sa vulnérabilité aux chocs extérieurs. Pour concrétiser cette opportunité, il faudra réduire la segmentation entre les secteurs public et privé (i) en réduisant lentement la prime salariale, (ii) en allégeant le fardeau fiscal de l’importante masse salariale afin de permettre des investissements productifs susceptibles de stimuler l’investissement dans le capital humain, (iii) en renforçant les retombées du secteur des transports et de la logistique pour créer des liens avec d’autres activités génératrices d’emplois, (iv) en réduisant les rigidités de l’environnement des entreprises et des marchés du travail, et (v) en orientant l’infrastructure de formation de manière à ce qu’elle réponde aux besoins de la population. Il faudra également orienter l’infrastructure de formation pour répondre aux exigences des emplois auxiliaires pour lesquels les jeunes pourraient être formés, et impliquer les employeurs dans la conception de la formation pour assurer l’alignement sur les besoins du petit secteur privé, y compris une plus grande intégration du système d’EFTP avec le secteur privé pour augmenter les possibilités de formation directe pour ceux qui abandonnent l’école tôt ou ne sont jamais allés à l’école et entrent directement dans la main d’œuvre informelle. Le gouvernement s’est fortement engagé en faveur de l’accumulation de capital humain et de l’agenda du capital humain qui s’est traduit par la stratégie de développement national Vision 2035 et par des efforts visant à introduire des stratégies sectorielles pour relever les défis en matière de capital humain. Vision 2035, par exemple, reconnaît qu’une main-d’œuvre productive dotée d’un éventail de compétences est essentielle à la création d’une économie diversifiée. L’élargissement de la base économique pour qu’elle repose davantage sur le capital humain permettrait de nouvelles trajectoires de croissance plus équitables qui réuniraient des segments plus larges de la population djiboutienne sous un parapluie productif. Le gouvernement a organisé deux forums sur le capital humain, accompagnés d’une série d’ateliers techniques (avec le soutien de la Banque mondiale), et élabore actuellement un plan d’action sur le capital humain, qui devrait comprendre des investissements prioritaires et ciblés. La mise en œuvre du plan d’action pour le capital humain nécessitera une augmentation de l’allocation et de l’efficacité des dépenses sociales, le développement d’un cadre institutionnel fonctionnel ancré dans des interventions et une collaboration intersectorielle, et la priorité donnée à des systèmes de collecte de données plus solides et à une plus grande capacité de mesure et d’utilisation des données. La Figure 34 présente les principales actions et interventions prioritaires par étapes du cycle de vie qui ont fait l’objet d’études approfondies dans le cadre de CHAPITRE 6 : Conclusions 77 cette RCH, ainsi que sur l’ensemble du cycle de vie. L’objectif général est de faire en sorte qu’un plus grand nombre de personnes aient la possibilité d’être en meilleure santé, plus instruites, plus qualifiées et plus productives, et de participer à l’économie croissante du pays, qui génère des emplois plus nombreux et de meilleure qualité. FIGURE 34. Actions et interventions prioritaires pour l’amélioration du capital humain à Djibouti Petite enfance Adolescence et la jeunesse Années de travail • Améliorer la qualité, la couverture • Générer une demande de services de • Améliorer l'environnement des et l'équité des services de DPE santé maternelle et infantile, d'éduca- entreprises et réduire les en ciblant de manière coordonnée tion et de nutrition en encourageant les rigidités du marché du travail les enfants défavorisés et en tirant changements sociaux et comportement pour faciliter la création de parti du rôle des communautés et et l'autonomisation des femmes et des nouvelles entreprises et des partenariats. adolescentes. l'embauche. • Soutenir l'engagement du gouver • Le ministère de la santé et ses • Réduire la segmentation du nement à augmenter l'o re d'éduca partenaires devraient soutenir les marché entre le secteur privé tion préscolaire, complétée par des programmes de formation des et le secteur public. programmes de nutrition, de sages-femmes rurales et l'expansion • Améliorer la formation et la stimulation psychosociale, de santé du personnel de santé communautaire qualité de l'emploi en maternelle et infantile et de afin d'améliorer la disponibilité et la impliquant le secteur privé, protection sociale. qualité des services du SRMNIA+N. national et international. • Renforcer les systèmes de données et de suivi en donnant la priorité à l'augmentation de la fréquence des enquêtes, à l'amélioration de la qualité et de la coordination de la collecte des données de routine, en se concentrant sur le renforcement des capacités de mesure et d'évaluation aux niveaux national et infranational, et en améliorant l'utilisation des données pour la prise de décision. L'évaluation continue du paysage du capital humain et de l'e cacité des interventions en cours nécessitera un meilleur accès aux données administratives et d'enquête de routine, ainsi qu'un meilleur suivi et une meilleure évaluation aux niveaux national et infranational. Avec le nouvel élan donné à l'Institut national de la statistique de Djibouti, il y a une opportu nité d'intégrer le suivi et l'évaluation des interventions sur le capital humain dans l'architecture des données de Djibouti. Les données nécessaires à la mise à jour du prochain ICH sont présentées dans le tableau B.1. • Renforcer le cadre institutionnel du capital humain en (i) en incluant un large éventail de parties prenantes aux niveaux central et local, y compris les organisations non gouvernementales, les partenaires du développement, la société civile et les associations professionnelles, et (ii) en veillant à ce qu'un plan d'action pour le capital humain soit mis en place pour guider l'agenda du capital humain. Donner la priorité à l'agenda et au plan d'action en matière de capital humain nécessitera de nouvelles méthodes de travail qui transcendent les hiérarchies intraministérielles et les rigidités institutionnelles en faveur d'une approche plus large de l'ensemble de la société. En outre, l'engagement de maintenir l'agenda du capital humain, le plan d'action du capital humain et les comités de mise en œuvre indépendants des structures ministérielles peut contribuer au développement d'une approche intersectorielle. • Accroître l'allocation et l'e cacité des dépenses sociales en fonction d'investissements en capital humain ciblés et prioritaires. Un examen des finances publiques pour Djibouti pourrait fournir des informations importantes sur les possibilités d'accroître l'e cacité et l'e cience des dépenses sociales axées sur les résultats. 78 DJIBOUTI | Revue du capital humain RÉFÉRENCES Ahad, Joanna Abdel, Zafiris, Tzannatos, and Ishac Diwan. 2016. “Rates of Return to Education in Twenty-Two Arab Countries: An Update and Comparison Between MENA and the Rest of the World.” Economic Research Forum, Giza, Egypt. https://econpapers.repec.org/paper/ergwpaper/1007.htm. Almond, Douglas, and Janet Currie. 2011. “Killing Me Softly: The Fetal Origins Hypothesis.” Journal of Economic Perspectives, 25 (3): 153-72. Angel-Urdinola, Diego F., and Arvo Kuddo. 2010. “Key Characteristics of Employment Regulation in the Middle East and North Africa.” SP Discussion Paper 1006, World Bank, Washington, DC. https://openknowledge​ .worldbank.org/handle/10986/27712. 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Dans les pays les plus pauvres du monde, un enfant risque fort de ne pas survivre jusqu’à son cinquième anniversaire, et même s’il survit, il risque de ne pas commencer l’école, et encore moins d’achever le cycle complet de 14 années de scolarité, de la maternelle à la douzième année, qui est la norme dans les pays à revenu élevé. Le temps qu’ils passent à l’école peut se traduire de manière inégale en termes d’apprentissage, en fonction de divers facteurs, notamment la qualité des enseignants et des écoles qu’ils fréquentent. Lorsqu’ils atteignent l’âge de 18 ans, ils portent en eux les effets durables d’une mauvaise santé et d’une mauvaise nutrition pendant l’enfance, qui limitent leurs capacités physiques et cognitives au moment où ils entrent dans l’âge adulte. Le capital humain peut être relié à la productivité future, au niveau de revenu global et à la croissance en suivant la logique de la littérature sur la comptabilité du développement. Cela se traduit par l’Équation 1 suivante, la fonction de production Cobb-Douglas est modifiée pour montrer que la production par travailleur augmente de manière équiproportionnelle au capital humain par travailleur ; y est le PIB par travailleur, kp et kh sont les stocks de capital physique et humain par travailleur, A est la productivité totale des facteurs et α est l’élasticité du capital physique par rapport à la production. Cela signifie qu’un doublement du capital humain par travailleur entraînera un doublement de la production par travailleur à long terme. La méthodologie et les preuves du lien entre l’ICH et ses composantes, d’une part, et la productivité et la croissance, d’autre part, sont détaillées dans Kraay (2018). ÉQUATION 1. Comment les changements dans le capital humain peuvent affecter le revenu à long terme Annexe A| Calcul de l’indice du capital humain  85 Plusieurs critères ont guidé la conception de l’ICH. Tout d’abord, l’ICH est une mesure prospective, axée sur les résultats plutôt que sur les intrants. Il se concentre sur les résultats et le capital humain de la prochaine génération plutôt que sur le capital humain de la main-d’œuvre actuelle, qui reflète largement les choix politiques effectués il y a plusieurs décennies, lorsque la main-d’œuvre actuelle était en âge d’aller à l’école. En tant que tel, l’ICH évalue quantitativement l’étape clé de la trajectoire du capital humain d’une personne et ses conséquences sur la productivité de la prochaine génération de travailleurs. Il a été estimé qu’un enfant né en 2020 n’atteindrait, en moyenne, que 56 % de sa pleine productivité en tant que futur travailleur. Cette estimation ne tient pas compte de l’impact de la pandémie de la COVID-19. Comme on pouvait s’y attendre, il existe une grande hétérogénéité dans l'ICH au niveau mondial. Dans les économies les plus pauvres du monde, un enfant ne sera que 30 % plus productif qu’il ne pourrait l’être s’il bénéficiait d’une santé et d’une éducation complètes, contre 80 % dans les économies les plus riches. Malgré la forte corrélation entre l’ICH et le PIB par habitant, certains pays obtiennent des résultats nettement supérieurs à ce que leur niveau de revenu pourrait laisser supposer, notamment l’Estonie, la République kirghize, le Viêt Nam, et la Cisjordanie et la bande de Gaza. À l’inverse, l’ICH de plusieurs pays est inférieur à ce que le revenu par habitant pourrait laisser supposer. Il s’agit notamment de quelques économies riches en ressources où le capital humain n’a pas atteint le potentiel que l’on pourrait envisager compte tenu des niveaux de croissance économique. Dans l’ensemble, les différences de qualité et de quantité de l’éducation représentent la plus grande part des différences d’indice au sein des groupes de revenus des pays, allant de 65 à 85 %. Au niveau mondial, l’ICH moyen est légèrement plus élevé pour les filles (0,59) que pour les garçons (0,56), comme on peut également l’observer pour toutes les composantes de l’ICH (World Bank 2020a). II. LES COMPOSANTES A. Composante 1 — Survie de l’enfant : a) Description des données et méthodologie : • La survie à l’âge de 5 ans est le complément du taux de mortalité des moins de 5 ans. • Le taux de mortalité des moins de 5 ans est la probabilité qu’un enfant né au cours d’une année donnée meure avant d’atteindre l’âge de 5 ans, s’il est soumis aux taux de mortalité actuels par âge. • Les taux de mortalité des moins de 5 ans sont calculés par l’IGME à partir de la mortalité enregistrée dans les enquêtes sur les ménages et les registres d’état civil. • L’IGME évalue la qualité des données, recalcule les données d’entrée et procède à des ajustements si nécessaire en appliquant des méthodes standard. Il ajuste ensuite un modèle statistique à ces données pour générer une courbe de tendance lisse qui fait la moyenne des estimations éventuellement disparates provenant des différentes sources de données pour une économie. Enfin, il extrapole le modèle à une année cible. 86 DJIBOUTI | Revue du capital humain b) La formule utilisée pour calculer le score est la suivante : ÉQUATION 2. Formule de survie de l’enfant En utilisant cette formule, et sur la base des données de l'UNIGME (2021), nous obtenons le score suivant : ÉQUATION 3. Calcul de la survie de l’enfant B. Composante 2— Scolarisation : L’indicateur des années de scolarisation attendues ajustées pour l’apprentissage combine des informations sur la quantité et la qualité de l’éducation (années de scolarisation attendues et résultats de l’apprentissage). Il se compose de deux indicateurs : les années de scolarisation attendues (ASA) et les résultats harmonisés des tests. a) Indicateur #2 : Années de scolarisation attendues (ASA) Les années de scolarisation attendues représentent le nombre d’années d’études qu’un enfant né aujourd’hui peut espérer terminer à l’âge de 18 ans, compte tenu du modèle de scolarisation qui prévaut dans le pays. Conceptuellement, les années de scolarisation attendues sont la somme des taux de scolarisation selon l’âge de 4 à 17 ans. Les taux de scolarisation par âge n’étant ni largement ni systématiquement disponibles, les données sur les taux de scolarisation par niveau d’enseignement sont utilisées pour estimer les taux de scolarisation dans les différentes tranches d’âge. L’objectif étant d’obtenir une approximation proche des taux d’inscription par âge, la mesure préférée est le taux net d’inscription totale, bien que d’autres taux, y compris le taux brut, soient également utilisés. Le taux net de scolarisation totale mesure la fraction des enfants de la tranche d’âge théorique pour un niveau scolaire donné qui sont scolarisés à n’importe quel niveau. i) Description des données et méthodologie : • La version 2020 du ICH mondial pondère les années de scolarisation par niveau d’éducation : 2 pour la maternelle, 6 pour le primaire, 3 pour le premier cycle du secondaire et 3 pour le deuxième cycle du secondaire, soit un total de 14 années d’éducation. Pour une meilleure comparabilité, la simulation de l’ICH Djibouti 2022 conserve cette pondération. Annexe A| Calcul de l’indice du capital humain  87 • Les taux bruts de scolarisation pour 2021 sont issus de l’Annexe Annuaire 2021-2022 du site du MENFOP. Alors que l'ICH préfère généralement utiliser les taux nets de scolarisation totale de l’Institut de Statistique de l’UNESCO, l’équipe éducation de la Banque mondiale a considéré que les données administratives brutes reflétaient mieux les taux de scolarisation pour deux raisons principales. Premièrement, les données de l’ISU (Institut de statistique de l’UNESCO) utilisent les projections démographiques du recensement de 2009, alors que les projections démographiques des données administratives sont basées sur l’EDAM 2017. Deuxièmement, les taux de fréquentation scolaire tirés de l’enquête sur les ménages de 2017 correspondaient davantage aux données administratives que les taux d’inscription de l’ISU, en particulier en ce qui concerne les disparités entre les sexes. Dans le rapport mondial 2020 du ICH, des sources autres que l’ISU ont été utilisées pour calculer l’ASA dans 50 pays. • La méthodologie du HCI ajuste les inscriptions pour tenir compte des redoublements. Pour Djibouti, les ajustements pour le redoublement ont été basés sur l’utilisation de données administratives. Les taux d’inscription en maternelle ne sont pas ajustés pour le redoublement dans la méthodologie du l'ICH ni dans la simulation 2022 de Djibouti. TABLEAU A.1. Taux bruts de scolarisation à Djibouti pour 2021 TBS totale TBS femmes TBS hommes Maternelle (4–5 années) 13.2% 12.2% 14.1% primaire (6–10 années) 95.9% 90.2% 101.6% Premier cycle du secondaire (11–14 années) 76.4% 69.2% 83.4% Deuxième cycle du secondaire (15–17 années) 46.0% 42.4% 49.6% ii) La formule utilisée pour calculer l’ASA est la suivante : ÉQUATION 4. Formule ASA iii) En utilisant cette formule, et sur la base des données administratives de 2021, ajustées pour le redoublement, en utilisant la norme internationale pour la durée du niveau scolaire (qui s’élève à 14), nous obtenons les résultats suivants : ÉQUATION 5. Calcul de l’ASA 88 DJIBOUTI | Revue du capital humain b) Indicateur #3 : Résultats des tests harmonisés i) Description des données et méthodologie : • Les scores des tests harmonisés (STH) sont utilisés pour évaluer la qualité de l’apprentissage. Les STH sont calculés à partir des résultats de programmes de tests internationaux et régionaux, notamment le programme Tendances de l’étude internationale des mathématiques et des sciences (TIMSS), l’Étude internationale sur les progrès de la lecture et de l’écriture (PIRLS), le Programme international pour le suivi des acquis des élèves (PISA) et l’Évaluation de la lecture dans les premières années d’études (EGRA). • L’harmonisation des tests de réussite des élèves est réalisée à l’aide de l’ensemble de données mondiales sur la qualité de l’éducation. L’ensemble des données comprend 163 pays et régions sur la période 1965-2015. • Avec l’EGRA, les résultats sont convertis à l’aide de la méthodologie exposée dans Patrinos et Angrist (2018). La méthodologie d’harmonisation repose sur la production d’un « taux de change » entre les tests internationaux de réussite des élèves et leurs homologues régionaux, qui peut ensuite être utilisé pour placer les tests sur une échelle commune. • Le taux de change est basé sur le rapport entre les scores moyens de l’économie dans chaque programme et les scores correspondants de l’économie dans le programme de test du numéraire pour l’ensemble des économies participant à la fois au numéraire et à l’autre programme de test. • Les données de l’EGRA de fin d’année d’avril 2022 ont été fournies par FHI (l’agence de mise en œuvre du projet DEGRA). Les résultats de la deuxième année ont été convertis en STH à l’aide de la méthodologie standard de l’ensemble de données mondiales sur la qualité de l’éducation. ii) En utilisant la méthodologie ci-dessus, le résultat du test harmonisé pour Djibouti est de 340. c) Calcul du score pour la composante scolaire : ÉQUATION 6. Formule pour la composante scolaire En utilisant cette formule, et sur la base des données administratives (2021) relatives aux i) inscriptions, nous obtenons les résultats suivants : ÉQUATION 7. Calcul de la composante scolaire Annexe A| Calcul de l’indice du capital humain  89 C. Composante 3— Santé : En l’absence d’un indicateur unique largement accepté, directement mesuré et largement disponible, l’environnement sanitaire global est appréhendé à l’aide de deux indicateurs : les taux de survie des adultes, définis comme la fraction des jeunes de 15 ans qui survivent jusqu’à l’âge de 60 ans, et le taux de retard de croissance chez les enfants de moins de 5 ans. Les taux de survie des adultes peuvent être interprétés comme une approximation de l’éventail des résultats de santé mortels et non mortels qu’un enfant né aujourd’hui connaîtrait à l’âge adulte si les conditions actuelles prévalaient à l’avenir. Le retard de croissance est largement reconnu comme un indicateur des environnements sanitaires prénataux, infantiles et de la petite enfance et résume donc les risques pour la santé que les enfants nés aujourd’hui sont susceptibles de connaître dans leurs premières années, avec des conséquences importantes pour la santé et le bien-être à l’âge adulte a) Indicateur #4 : Taux de Survie des Adultes (15-60) i) Description des données et méthodologie : • Le taux de mortalité des 15-60 ans est la probabilité qu’une personne âgée de 15 ans, au cours d’une année donnée, décède avant d’atteindre l’âge de 60 ans, si elle est soumise aux taux de mortalité actuels par âge. • Il est souvent exprimé comme un taux pour 1 000 personnes en vie à 15 ans, auquel cas il doit être divisé par 1 000 pour obtenir la probabilité qu’une personne de 15 ans décède avant l’âge de 60 ans. • Les taux de mortalité des adultes sont estimés sur la base des tendances dominantes des taux de mortalité par âge et sont rapportés par la Division de la population des Nations Unies (UNPD) pour des périodes de cinq ans. Les données quinquennales sont interpolées pour obtenir des estimations annuelles permettant de calculer l’ICH. ii) La formule utilisée pour calculer le Taux de survie des adultes est la suivante : ÉQUATION 8. Formule pour la survie des adultes En utilisant cette formule et en se basant sur les données de la division de la population des iii) Nations Unies (2021), nous obtenons les résultats suivants : ÉQUATION 9. Calcul de la survie des adultes 90 DJIBOUTI | Revue du capital humain ndicateur #5 : La fraction des enfants de moins de 5 ans ne souffrant pas de retard b) I de croissance i) Description des données et méthodologie : • La fraction des enfants de moins de 5 ans souffrant d’un retard de croissance est la proportion d’enfants de moins de 5 ans dont la taille est inférieure de plus de deux écarts-types à la médiane de référence pour leur âge. La médiane et les écarts types de référence sont fixés par l’Organisation mondiale de la santé pour un développement normal et sain de l’enfant. • La prévalence du retard de croissance au niveau de l’enfant est moyennée sur l’ensemble de la tranche d’âge 0-5 ans concernée pour obtenir un taux global de retard de croissance chez les moins de 5 ans. • Le taux de retard de croissance de l’enquête SMART 2019 a été utilisé pour calculer l’ajustement au nombre de personnes ne souffrant pas de retard de croissance, tel qu’indiqué dans la base de données Joint Malnutrition Estimates (JME) gérée par l’UNICEF, l’OMS et la Banque mondiale. ii) La formule utilisée pour calculer l'indicateur est la suivante : ÉQUATION 10. Formule pour le taux sans retard de croissance En utilisant cette formule, basée sur les données du JME, nous obtenons les résultats iii) suivants : ÉQUATION 11. Calcul du taux sans retard de croissance Calcul du score pour la composante Santé : i) La formule pour calculer la composante est la suivante : ÉQUATION 12. Formule pour le composante Santé En utilisant cette formule et les indicateurs déjà calculés, nous obtenons les résultats ii) suivants : ÉQUATION 13. Calcul de la composante santé Annexe A| Calcul de l’indice du capital humain  91 D. Indice de capital humain simulé de Djibouti Les composantes de l’ICH sont combinées en un seul indice en les convertissant en contributions à la productivité par rapport à une référence d’éducation complète et de santé complète, puis en multipliant ces contributions à la productivité pour obtenir l’ICH global. ÉQUATION 14. Formule ICH En utilisant cette formule et les composantes déjà calculées, nous obtenons les résultats suivants sur la base des données de 2022 : ÉQUATION 15. Calcul de l'ICH simulée Paramètres utilisés pour la pondération de l’ICH : ϕ = 0,08 pour l’école γ ASR = 0,65 pour la survie des adultes γ Retard de croissance = 0,35 pour le retard de croissance Les coefficients de pondération sont choisis pour être les mêmes dans tous les pays, de sorte que les différences entre pays dans l’ICH ne reflètent que les différences entre pays dans les variables qui le composent. Cela facilite l’interprétation de l’indice. Il s’agit également d’un choix pragmatique, car il n’est pas possible d’estimer les rendements de l’éducation et de la santé spécifiques à chaque pays pour tous les pays inclus dans l’ICH. III. AGRÉGATION Les composantes santé et éducation de l’ICH ont une valeur intrinsèque mais sont difficiles à quantifier, ce qui rend difficile la combinaison des composantes en un seul indice. Plutôt que de s’appuyer sur une agrégation ad hoc avec des pondérations arbitraires, l’ICH utilise les revenus estimés associés à une unité supplémentaire de santé et d’éducation pour les traduire en contributions à la productivité des travailleurs par rapport à une référence d’éducation complète et de pleine santé. L’indice qui en résulte varie de 0 à 1. Un pays dans lequel un enfant né aujourd’hui peut espérer jouir d’une pleine santé (pas de retard de croissance et 100 % de survie à l’âge adulte) et d’une éducation complète (14 années d’enseignement de qualité supérieure à l’âge de 18 ans) obtiendrait un score de 1. Un score de 0,70 indique donc que la productivité en tant que futur travailleur d’un enfant né aujourd’hui est inférieure de 30 % à ce qu’elle aurait pu être avec une éducation complète et une pleine santé. Étant donné que les fondements théoriques de l’ICH se trouvent dans la littérature sur 92 DJIBOUTI | Revue du capital humain la comptabilité du développement, l’indice est lié aux différences réelles dans la quantité de revenus qu’un pays peut générer à long terme et mesure une composante cruciale de la richesse potentielle future. En 2014, le capital humain représentait environ 64 % de la richesse mondiale. Il est donc un moteur du développement économique bien plus important qu’on ne le pense traditionnellement et se place au-dessus des actifs physiques tangibles en tant qu’ingrédient le plus crucial pour la réussite économique et la réduction de la pauvreté (Ersado et al. 2022). Si un pays a un score de 0,50, le PIB par travailleur serait deux fois plus élevé si le pays atteignait le niveau de référence d’une éducation complète et d’une santé totale avec un ICH de 1. Un pays comme Djibouti avec une valeur d’ICH d’environ 0,41 pourrait avoir un futur PIB par travailleur dans ce scénario d’éducation complète et de santé totale qui est 1/0,41 = 2,4 fois plus élevé que le PIB par travailleur dans le scénario du statu quo. La manière dont cela se traduit en taux de croissance annuels moyens dépend de la durée du long terme. Par exemple, si l’on suppose qu’il faut 50 ans pour que ces scénarios se concrétisent, un doublement du futur revenu par habitant par rapport au statu quo correspond à environ 1,8 point de pourcentage de croissance supplémentaire par an (World Bank 2020a). Les composantes de l’ICH sont combinées en un seul indice en les convertissant en contributions à la productivité par rapport à une référence d’éducation complète et de pleine santé, puis en multipliant ces contributions à la productivité pour obtenir l’ICH global. Dans le cas de la survie, l’interprétation de la productivité relative est frappante : les enfants qui ne survivent pas à l’enfance ne deviennent jamais des adultes productifs. Par conséquent, la productivité attendue en tant que futur travailleur d’un enfant né aujourd’hui est réduite d’un facteur égal au taux de survie par rapport au scénario de référence dans lequel tous les enfants survivent. La référence d’une éducation complète de haute qualité correspond à 14 années d’école et à un score de 625 aux tests harmonisés. L’interprétation de la productivité relative de l’éducation est ancrée dans l’importante littérature empirique mesurant les rendements de l’éducation au niveau individuel. Un consensus approximatif de cette littérature est qu’une année d’études supplémentaire augmente les revenus d’environ 8 %. Le paramètre ϕ = 0,08 mesure le rendement d’une année d’études supplémentaire et est utilisé pour convertir les différences d’années d’études corrigées de l’apprentissage entre les pays en différences de productivité des travailleurs. Par rapport à un point de référence dans lequel tous les enfants suivent 14 années d’études complètes avant l’âge de 18 ans, un enfant qui ne suit que 10 années d’études, par exemple, peut s’attendre à être 32 % moins productif à l’âge adulte (un écart de 4 années d’études multiplié par 8 % par an). Dans le cas de la santé, l’interprétation de la productivité relative est basée sur la littérature empirique mesurant le rendement économique d’une meilleure santé au niveau individuel. Le principal problème que pose cette littérature est l’absence d’un indicateur synthétique unique et directement mesuré des différents aspects de la santé qui ont une incidence sur la productivité. Cette littérature microéconométrique utilise souvent des indicateurs de substitution pour la santé, tels que la taille adulte, parce que la taille adulte peut être mesurée directement et qu’elle reflète l’accumulation des chocs sur la santé au cours de l’enfance et de l’adolescence. Un consensus approximatif tiré de cette littérature est que l’amélioration de la santé associée à une augmentation d’un centimètre de la taille de l’adulte Annexe A| Calcul de l’indice du capital humain  93 augmente la productivité de 3,4 %. La conversion de ces données sur les rendements d’un indicateur de santé (taille adulte) en d’autres indicateurs de santé utilisés dans l’ICH (retard de croissance et survie des adultes) nécessite des informations sur les relations entre ces indicateurs : • Il existe une relation directe entre le retard de croissance dans l’enfance et la taille future à l’âge adulte, car les déficits de croissance dans l’enfance persistent dans une large mesure à l’âge adulte, en plus des déficits sanitaires et cognitifs qui y sont associés. Les données suggèrent qu’une réduction de 10 points de pourcentage des taux de retard de croissance augmente la taille adulte d’environ 1 centimètre, ce qui accroît la productivité de 10,2 (taux de retard de croissance) × 0,1 (taille) × 3,4 (pourcentage de productivité), soit 3,5 %. • Les données empiriques suggèrent que, si l’état de santé général s’améliore, la taille des adultes et le taux de survie augmentent de telle sorte que la taille des adultes augmente de 1,9 centimètre pour chaque amélioration de 10 points de pourcentage du taux de survie des adultes. Cela signifie que l’amélioration de la santé qui conduit à une augmentation de 10 points de pourcentage du taux de survie des adultes est associée à une amélioration de la productivité des travailleurs de (1,9 × 3,4) pour cent, soit 6,5 %. Dans l’ICH, les contributions estimées de la santé à la productivité des travailleurs basées sur ces deux indicateurs alternatifs sont moyennées ensemble, si les deux sont disponibles, ou utilisées individuellement si seul l’un des deux est disponible. La contribution de la santé à la productivité est exprimée par rapport à la référence de la pleine santé, définie comme l’absence de retard de croissance et un taux de survie à l’âge adulte de 100 %. Par exemple, par rapport à une référence d’absence de retard de croissance, dans un pays où le taux de retard de croissance est de 30 %, une mauvaise santé réduit la productivité des travailleurs de (30 × 0,34) pour cent, soit 10,2 %. Par rapport au taux de référence de 100 % de survie des adultes, la mauvaise santé réduit la productivité des travailleurs de (30 × 0,65) pour cent, soit 19,5 %, dans un pays où le taux de survie des adultes est de 70 %. La moyenne des deux estimations de l’effet de la santé sur la productivité est utilisée dans l’ICH. 94 DJIBOUTI | Revue du capital humain TABLEAU A.2. Indicateurs de l’indice du capital humain Base de données Enquête la plus Indicateur Année Modélisé Année internationale récente Groupe interinstitutions Projet pan arabe Probabilité de survie des Nations Unies pour les 2021 Oui pour la santé 2012 jusqu’à l’âge de 5 ans estimations de la mortalité familiale infantile Estimations des services de la Nombre d’années Données Banque mondiale complétant 2021 Non 2021 d’études prévues administratives les données administratives Évaluation de la lecture en début de scolarité par Évaluation de la Harmonisation des l’Agence des États-Unis pour le 2022 Non lecture en début 2022 résultats des tests développement international, d’année à Djibouti avec les calculs de la Banque mondiale. Enquêtes en Division de la population des Taux de survie entre grappes à Nations Unies, Perspectives de 2021 Oui 2006 15 et 60 ans indicateurs la population mondiale multiples Fonds des Nations Unies Évaluation Fraction des enfants pour l’enfance, Organisation normalisée du suivi de moins de 5 ans mondiale de la santé et 2019 Non de la méthode 2019 ne souffrant pas de Banque mondiale - Estimations d’allégement et de retard de croissance conjointes de la malnutrition transition Annexe A| Calcul de l’indice du capital humain  95 Annexe B| Cartographie des données I. FEUILLE DE ROUTE POUR DES MISES À JOUR RÉGULIÈRES DE L’ICH Les scores de l’ICH évoluent rarement rapidement car les changements apportés aux services de base peuvent mettre des années à produire leurs effets, mais l’identification régulière des changements dans les composantes peut aider à identifier les tendances et les goulets d’étranglement qui entravent les gains de productivité qu’une augmentation de l’ICH entraîne. Ces composantes peuvent être dérivées d’un certain nombre d’enquêtes et d’estimations, ce qui permet de les collecter plus fréquemment d’un pays à l’autre. Les bases de données internationales utilisent ces enquêtes pour créer les estimations utilisées par l’ICH. Le tableau B.1 énumère les types d’enquêtes qui peuvent être utilisées pour créer un ICH et qui devraient être menées dans un avenir proche. TABLEAU B.1. Enquêtes qui pourraient être utilisées pour mettre à jour l'indice du capital humain Indicateur Base de données internationale Prochaine enquête potentielle Probabilité de Groupe interinstitutions des Nations Recensement de Djibouti survie jusqu’à l’âge Unies pour les estimations de la Enquête sur les ménages de Djibouti (EDAM) de 5 ans mortalité infantile Nombre d’années Estimations des services de la Banque Enquête sur les ménages de Djibouti (EDAM) d’études prévues mondiale complétant les données Administratif (annuaire statistique) administratives Harmonisation des Agence américaine pour le Évaluation de la lecture au début de l’année résultats des tests développement international (U.S. scolaire à Djibouti (DEGRA) Agency for International Development) Programme d’analyse des systèmes éducatifs - Évaluation de la lecture en début de la CONFEMEN (PASEC) d’année scolaire avec les calculs de la Banque mondiale Taux de survie entre Division de la population des Nations Recensement de Djibouti 15 et 60 ans Unies, Perspectives de la population Enquête sur les ménages de Djibouti (EDAM) mondiale Fraction des enfants Fonds des Nations Unies pour l’enfance, Méthode SMART (Suivi et évaluation de moins de 5 ans Organisation mondiale de la santé normalisés des secours et des transitions) ne souffrant pas de et Banque mondiale - Estimations retard de croissance conjointes de la malnutrition II. INDICATEURS COMPLÉMENTAIRES DE L’ICH Le capital humain, un ingrédient crucial pour la croissance économique, est multidimensionnel et se construit de manière cumulative tout au long du cycle de vie. En raison de la nature lente de l’ICH, un ensemble supplémentaire d’indicateurs complémentaires du capital humain peut offrir un instantané 96 DJIBOUTI | Revue du capital humain des dimensions proches du capital humain à Djibouti qui peuvent être suivies pour mesurer les progrès sur les résultats intermédiaires. En combinaison avec les moyennes des groupes de revenus régionaux, ils mettent en évidence les besoins d’investissement dans les personnes à chaque étape de la vie, ainsi que les besoins de collecte et de mise à jour des données pour l’élaboration de politiques fondées sur des données probantes. Le tableau B.2 présente une sélection d’indicateurs complémentaires par étape du cycle de vie, ceux pour lesquels les données ne sont pas disponibles étant en italique et surlignés en jaune. TABLEAU B.2. Indicateurs complémentaires potentiels du capital humain Petite enfance Mortalité néonatale (décès pour 1 000 naissances vivantes) Mortalité maternelle (décès pour 100 000 naissances vivantes) Complétude de l’enregistrement des naissances (%) Vaccination contre le bacille de Calmette-Guérin (tuberculose) (%) Enfants recevant une fréquence de repas minimale (%) Taux brut d’inscription dans l’enseignement préscolaire (%). Années scolaires Achèvement de l’école primaire (%). Taux brut d’inscription dans l’enseignement secondaire (%) Pauvreté éducative (%) Jeunesse/adolescence Chômage des jeunes (%) Jeunes sans emploi ou scolarisés ou en formation (%) Fécondité des adolescentes (naissances pour 1 000 femmes) Taux brut d’inscription dans l’enseignement supérieur (%) L’âge adulte Participation des femmes au marché du travail (%) Participation des hommes au marché du travail (%) Espérance de vie à la naissance (années) III. BASES DE DONNÉES UTILISÉES POUR L’EXAMEN DU CAPITAL HUMAIN La RCH s’appuie sur un éventail de sources de données allant des rapports officiels aux articles de journaux, en passant par les bases de données. Le tableau B.3 énumère les bases de données utilisées dans la RCH. Il inclut également les bases de données consultées lors de la phase de collecte des données qui sont pertinentes pour le capital humain à Djibouti mais qui ne figurent plus dans le rapport. Annexe B| Cartographie des données 97 TABLEAU B.3. Bases de données et sources de données utilisées pour l’analyse du capital humain Primaire ou Année Nom et source secondaire 2019 Base de données spatiales des établissements de santé gérés par le secteur de la Secondaire santé publique en Afrique subsaharienne - Alegane et al. 2017 Compte à rebours vers 2030 - UNICEF Secondaire 2020 COVID-19 Enquête téléphonique par panel national - Institut national de la Primaire statistique 2021 Évaluation de la lecture dans les premières années de l’école - USAID Primaire 2002 Échantillon principal et enquête préliminaire sur la pauvreté - Institut national de Primaire statistique 2012 Enquête sur les ménages de Djibouti 3 - Institut national de la statistique Primaire 2017 Enquête sur les ménages de Djibouti 4 - Institut national de la statistique Primaire 1990–2019 Échange de données sur la santé mondiale - Institut de métrologie et d’évaluation Secondaire de la santé 2017 Indicateurs des ODD relatifs au marché du travail - Organisation Secondaire internationale du travail 2010–2021 Statistiques sur la main-d’œuvre - Organisation internationale du travail Secondaire 2022 Base de données des estimations et projections modélisées - Organisation Secondaire internationale du travail 2019 Base de données des enquêtes de sécurité sociale - Organisation internationale Secondaire du travail 2022 Perspectives de l’économie mondiale - fonds monetaire international Secondaire 2022 Dépôt de données COVID-19 - John Hopkins Secondaire 2019 Indice de poids relatif - Calculs de l’équipe Meta & HCR Secondaire 2022–2021 Annuaire statistique - ministère de l’Éducation nationale et de la Formation Primaire professionnelle 2014 Enquête nutritionnelle de la phase de sécurité alimentaire intégrée - Enquête Primaire nutritionnelle de la phase de sécurité alimentaire intégrée Secrétariat 2012 Projet pan arabe pour la santé familiale - Fonds de l’OPEP pour le développement Primaire international 2012, 2019 Enquête sur la méthode normalisée d’évaluation de la surveillance de l’aide et de Primaire la transition - Institut national de la statistique 2020 Groupe interinstitutions des Nations Unies pour les estimations de la mortalité Secondaire infantile - Fonds des Nations Unies pour l’enfance 2022 Perspectives de la population mondiale - Division de la population des Nations Unies Secondaire 2018 aidsinfo - Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida Secondaire 2017–2017 Indicateurs de l’objectif 4 du développement durable - Institut de statistique de Secondaire l’UNESCO 2016 Couverture en vitamine A - Fonds des Nations Unies pour l’enfance Secondaire 2006 Enquête 3 en grappes à indicateurs multiples - Fonds des Nations Unies pour Primaire l’enfance 2021 Estimations de la couverture vaccinale nationale - Organisation mondiale de la Secondaire santé, Fonds des Nations Unies pour l’enfance 2018–2021 L’évolution de la richesse des nations - Banque mondiale Secondaire 1996-2021 Indicateurs de gouvernance mondiale - Banque mondiale Secondaire 2017 Indicateurs de la bureaucratie dans le monde - Banque mondiale Secondaire 2010, 2019 Portail de données sur le genre - World Bank Secondaire 98 DJIBOUTI | Revue du capital humain CHAPITRE 6 : Conclusions 101