NOMIQUES QUIEME CAHIERS ECO CIN RICAINE A REPUBLIQUE CENTRAF DE L Se prémunir face aux risques croissants Apporter une réponse aux défis macro-budgétaires et libérer le potentiel du secteur agricole I © 2022 La Banque mondiale 1818 H Street NW, Washington DC 20433 Téléphone : 202-473-1000 ; Internet : www.worldbank.org Certains droits réservés Cette publication a été réalisée par les services de la Banque mondiale. Les constatations, interprétations et conclusions qui y sont exprimées ne reflètent pas nécessairement les opinions des Administrateurs de la Banque mondiale ou des gouvernements qu’ils représentent. La Banque mondiale ne garantit pas l’exactitude des données fournies dans cet ouvrage. Les frontières, les couleurs, les dénominations et autres informations figurant sur les cartes de cette publication n’impliquent aucun jugement de la Banque mondiale sur le statut juridique d’un territoire quelconque ni la reconnaissance ou l’acceptation de ces frontières. 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II Table des matières Résumé exécutif 1 1 Evolutions économiques récentes et perspectives 13 1.1 Evolutions économiques récentes : une perte d’élan 14 La croissance économique de la RCA a stagné en 2021 après une 1.1.1 15 performance raisonnable avant la COVID-19. Politique monétaire et secteur financier : ouvrir une boîte de 1.1.2 19 Pandore 1.1.3 Le pays est en train de se diriger vers une falaise budgétaire. 22 La COVID-19 et les chocs sécuritaires ont aggravé la position 1.1.4 26 extérieure de la RCA. Perspectives économiques et risques : croissance positive mais 1.2 28 très vulnérable aux vents contraires Les perspectives économiques de la RCA sont positives mais très 1.2.1 29 vulnérables aux vents contraires. 1.2.2 Risques et incertitudes croissants 34 Libérer le potentiel du secteur agricole pour protéger les 2 41 moyens de subsistance Le secteur agricole offre d’immenses possibilités, mais sa 2.1 43 performance est en déclin depuis des décennies. 2.1.1 Le secteur agricole de la RCA a un immense potentiel. 43 La contribution de l’agriculture à la croissance reste toutefois 2.1.2 47 faible. III L’agriculture a souffert d’une faible performance au cours des 2.1.3 47 dernières décennies Plusieurs goulots d’étranglement ont empêché le secteur de 2.2 51 libérer son potentiel. 2.2.1 Faible allocation budgétaire 51 Les difficultés d’accès aux semences améliorées et aux engrais 2.2.2 53 persistent. 2.2.3 Apporter une réponse aux défis persistants de la transhumance 55 Combler l’écart entre les sexes peut contribuer à stimuler la 2.2.4 58 transformation de l’agriculture et à réduire la pauvreté. Principaux effets en termes d’insécurité alimentaire, de retards de 2.2.5 60 croissance et de malnutrition Principales problématiques transversales à aborder pour 2.3 62 réussir la transformation du secteur 2.3.1 S’attaquer aux problèmes de gouvernance et d’institutions 62 2.3.2 Faible accès au financement 65 2.3.3 Améliorer l’accès aux marchés 67 Problèmes persistants concernant les droits de propriété et 2.3.4 69 d’utilisation des terres 2.3.5 Renforcer l’accès aux moyens de production et leur disponibilité 71 Annexe 76 IV Liste des figures Figure 1 : Priorités politiques pour réduire les déséquilibres macroéconomiques et 6 soutenir une reprise vigoureuse Figure 2 : En 2021, la croissance annuelle du PIB réel de la RCA a stagné et atteint l’un 16 de ses niveaux les plus bas depuis 2015. Figure 3 : Une contraction de la consommation privée et des exportations a entraîné 16 une stagnation de la croissance du PIB réel. Figure 4 : L’inflation a ralenti au second semestre 2021. 18 Figure 5 : La RCA est restée peu compétitive sur le plan commercial par rapport à ses 18 pairs en 2021. Figure 6 : Les avoirs extérieurs nets ont continué à suivre la tendance des 20 décaissements de l’appui budgétaire des bailleurs. Figure 7 : La part des crédits au secteur privé a diminué en 2021 mais a continué de 21 représenter une part importante du crédit total. Figure 8 : Le solde budgétaire global de la RCA s’est détérioré en 2020. 22 Figure 9 : Les recettes publiques totales ont augmenté en 2020 en raison d’une 22 augmentation des dons publics. Figure 10 : La RCA a mis en œuvre 97 réformes économiques audacieuses au cours des 24 5 dernières années… Figure 11 : … et leur impact sur l’exécution du budget a été remarquable. 24 Figure 12 : La baisse des transferts publics a contribué au creusement du déficit 26 courant… Figure 13 : … mais le déficit du compte courant de la RCA est resté le plus important 26 parmi les pays pairs. Figure 14 : L’amélioration du compte financier s’est traduite par un excédent modéré de 27 la balance des paiements. Figure 15 : Les envois de fonds personnels restent faibles, jouant un rôle marginal dans 27 la balance des paiements. Figure 16 : Projection des impacts des crises qui se produisent simultanément sur la 35 croissance du PIB réel Figure 17 : La population active est encore essentiellement concentrée dans le secteur 44 agricole. Figure 18 : La répartition agro-pastorale des produits met en évidence un potentiel 45 immense dans toutes les régions. Figure 19 : Les investissements nationaux dans le secteur agricole ont été relativement 52 modestes au cours de la dernière décennie. Figure 20 : La productivité agricole a stagné au cours des dernières années. 52 Figure 21 : Par rapport à ses pairs de la région, l’utilisation d’engrais reste faible... 54 Figure 22 : .... et la proportion de terres aménagées pour l’irrigation est petite. 54 Figure 23 : Les conflits récurrents entre éleveurs et agriculteurs affectent 56 considérablement leurs activités. V Figure 24 : Les animaux errants, les dégâts en milieu rural, le vol et l’abattage du bétail 56 constituent les principales causes de la transhumance. Figure 25 : La résolution informelle des conflits est l’approche privilégiée. 57 Figure 26 : Près de la moitié de la population devrait être affectée par une insécurité 60 alimentaire aiguë. Figure 27 : Le secteur agricole regroupe une multitude d’acteurs qui n’ont généré qu’un 64 faible impact. Figure 28 : Le faible accès au financement, à l’appui technique et aux semences 65 améliorées constitue les principaux goulots d’étranglement du secteur agricole. Figure 29 : Le manque de produits vétérinaires et de financement constitue la 73 principale contrainte à laquelle les éleveurs sont confrontés. Figure 30 : La RCA valorise peu sa production agricole. 73 Liste des tableaux Tableau 1 : Principales options stratégiques pour redynamiser le secteur agricole 10 Tableau 2 : Opérations financières de l’administration centrale, 2017-2024 23 Tableau 3 : Projections macro-budgétaires et financières à moyen terme, 2017–25 30 Tableau 4 : Priorités politiques pour réduire les déséquilibres macroéconomiques et 40 soutenir une reprise solide Tableau 5 : Un transfert de la main-d’œuvre de l’agriculture vers les services est 49 constaté. Tableau 6 : L’évaluation des politiques agricoles récentes met en évidence des défis 76 structurels persistants. Liste des encadrés Encadré 1 : Le taux d’exécution du budget s’est nettement amélioré grâce aux réformes 24 de la gestion des finances publiques. Encadré 2 : Vers une falaise budgétaire : impact socioéconomique et sécuritaire aux 32 niveaux national et régional Encadré 3 : Les crises se produisant simultanément pourrait retarder la reprise 34 économique. Encadré 4 : La loi sur les crypto-monnaies en RCA et ses éventuelles retombées 37 régionales dans la CEMAC VI Abréviations et acronymes ASS Afrique subsaharienne BEAC Banque des États de l’Afrique centrale CEMAC Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale COBAC Commission Bancaire de l’Afrique Centrale CVM Chaînes de valeur mondiales DTS Droits de tirage spéciaux FCV Fragilité, conflits et violence FMI Fonds monétaire international PNP Prêt non productif RCA République centrafricaine VII Remerciements Le présent document constitue la cinquième édition des Cahiers Economiques de la République centrafricaine. Il analyse l’évolution des tendances économiques en République centrafricaine (RCA) sur une base annuelle dans le but d’aider le Gouvernement et ses partenaires au développement à cerner les opportunités émergentes et à s’attaquer aux défis persistants. Chaque édition présente un aperçu de l’évolution de la position macroéconomique de la RCA, suivi d’une étude détaillée d’un sujet particulier. Les objectifs de la série sont de : (i) renforcer les fondements analytiques de la politique de développement en RCA ; et (ii) contribuer à un débat éclairé sur les options politiques pour améliorer la gestion macroéconomique et accélérer l’avancement vers le double objectif du Groupe de la Banque mondiale d’éliminer l’extrême pauvreté et de promouvoir une prospérité partagée dans un contexte de fragilité de l’État. Ce Cahier Economique s’appuie sur les constats des éditions précédentes et souligne l’importance de s’appuyer sur la paix, la stabilité, la mobilisation des ressources nationales, la diversification économique et le capital humain pour parvenir à une croissance économique soutenue et à la réduction de la pauvreté. Dans ce rapport, les évolutions économiques récentes sont examinées de manière à faire ressortir les lacunes et les défis en matière de capital humain et présenter les opportunités pour renforcer l’investissement dans les personnes afin de protéger le futur. La cinquième édition des Cahiers Economiques de la République centrafricaine a été préparée par une équipe de la Banque mondiale sous la direction de Wilfried A. Kouame. Le Chapitre 1 a été préparé par Wilfried A. Kouame et Diderot Tomi. Le Chapitre 2 a été préparé par Wilfried Kouame, Senakpon Aurelia Dakpogan, Raoul Choumbou et Robert Djidonou. Nabil M. Chaherli a fourni d’excellents commentaires sur le Chapitre 2 et le rapport a bénéficié des commentaires constructifs d’un comité de lecture composé de  : Diego Arias Carballo (Directeur sectoriel, SLCAG) ; Abdoul Mijiyawa (Economiste principal, EAWDR), Nathalie Picarelli (Economiste principale, EAWM1) et Ashesh Prasann (Economiste de l’agriculture, SLCAG). L’équipe a reçu des conseils, des commentaires et des encouragements de Francisco Carneiro (Directeur sectoriel), Raju Singh (Economiste en chef), Abdoulaye Seck (Directeur pays), Han Fraeters (Responsable pays), Clelia Rontoyanni (Cheffe de programme) et Nabil M. Chaherli (Chef de programme). L’équipe remercie les collègues du Fonds monétaire international pour leurs commentaires. Claudia Rocio Manrique, Irene Sitienei et Appoline Yete (Assistantes de programme) ont soutenu l’équipe lors de la préparation du rapport. En outre, l’équipe a grandement bénéficié des consultations avec les principaux décideurs et analystes en RCA, y compris les responsables de la Cellule de Suivi des Reformes Economiques et Financières ; du Ministère de l’Economie, du Plan et de la Coopération ; du Ministère des Finances et du Budget  ; de l’Institut de la Statistique et des Etudes Economiques et Sociales de la République centrafricaine ; et de la Banque des États de l’Afrique centrale. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale Résumé exécutif Evolutions économiques récentes 2 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Evolutions économiques récentes : une perte d’élan L’économie de la République centrafricaine L’insécurité et les perturbations des chaînes (RCA) a stagné en 2021 par rapport à 2020 . d’approvisionnement ont poussé l’inflation au- L’activité économique a particulièrement souffert au dessus du plafond régional de 3 pour cent en 2021. premier trimestre de 2021, le regain d’insécurité au La reprise des conflits à la fin du deuxième trimestre milieu des conflits électoraux perturbant la production 2021 a perturbé les chaînes d’approvisionnement et le commerce. Stimulée par la reprise du commerce alimentaire le long du principal corridor commercial le long du corridor Douala-Bangui et les améliorations du pays et a contribué aux pressions inflationnistes en matière de sécurité, l’activité économique s’est au premier semestre 2021. Des milliers de camions redressée au second semestre. Les effets durables de marchandises sont restés bloqués à la frontière de la COVID-19 sur l’économie mondiale ont entraîné avec le Cameroun pendant environ trois mois. En une perturbation persistante des chaînes de valeur conséquence, l’inflation s’est accélérée de 5,2 pour mondiales et une faible demande extérieure, qui cent, en glissement annuel, au premier semestre ont affecté les échanges internationaux et les 2021. Avec la reprise progressive du trafic sur le transports. En conséquence, la croissance du PIB corridor Douala-Bangui au second semestre, l’inflation réel s’est établie à 1,0 pour cent en 2021, en dessous a nettement décéléré pour s’établir à 4,5 pour cent de la moyenne de la Communauté économique en moyenne, ce qui est au-dessus du critère de et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC) (2,1 convergence régionale de 3 pour cent. La flambée des pour cent), de l’Afrique subsaharienne (ASS) (3,5 prix des denrées alimentaires dans le pays constituait pour cent) et des pays en situation de fragilité, de environ 70,1 pour cent des pressions inflationnistes conflits et de violence (FCV) (2,6 pour cent). Du côté en 2021. Le secteur bancaire a eu une performance de l’offre, l’évolution positive du secteur agricole a relativement bonne en 2021 en rapport à une série permis de prévenir un ralentissement plus marqué d’indicateurs de solidité financière. Toutefois, les de la croissance économique. Du côté de la demande, réserves nettes de change ont fortement chuté au la consommation privée a augmenté en 2021, en quatrième trimestre, la disposition des bailleurs à cohérence avec la reprise de l’activité économique accorder des appuis budgétaires s’estompant. au second semestre. Le taux d’extrême pauvreté est passé de 71,0 pour cent en 2020 à 71,4 pour cent en Les pressions budgétaires se sont intensifiées 2021, touchant plus de 3,4 millions de personnes, en 2021 et ont entraîné une détérioration de le taux de croissance démographique dépassant la la situation budgétaire et des vulnérabilités croissance du PIB réel. persistantes en matière de dette. Les recettes 3 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE intérieures ont baissé de 9,1 pour cent du PIB passée de 44,1 pour cent du PIB en 2020 à 47,9 pour en 2020 à 8,7 pour cent du PIB en 2021, en cent du PIB en 2021, tirée par les emprunts publics raison du blocus du corridor Bangui-Douala et de auprès des banques commerciales destinés, en vue l’impact économique prolongé de la pandémie de financer le budget et d’éviter une crise budgétaire. sur le commerce international. Les dons publics ont atteint leur niveau le plus bas sur la dernière Le solde du compte courant de la RCA s’est décennie. Les dons des bailleurs internationaux à la encore détérioré en 2021 en raison d’une forte RCA sont passés de 12,6 pour cent du PIB en 2020 baisse des transferts publics. Le déficit du compte à 4,9 pour cent du PIB en 2021, les désaccords courant a augmenté de 8,5 pour cent du PIB en 2020 avec les partenaires internationaux ayant poussé à 10,6 pour cent du PIB en 2021 – le niveau le plus les partenaires au développement à suspendre élevé depuis 2015 – en raison d’une forte baisse leurs appuis budgétaires. Cette situation a généré des transferts publics. La balance commerciale s’est d’importantes pressions budgétaires tout au long améliorée mais est restée déficitaire, les exportations de 2021 et a créé un risque de défaut éventuel sur ayant rebondi au second semestre 2021. Le déficit du des obligations essentielles (falaise budgétaire). La compte courant de la RCA devrait être plus important RCA a échappé à la falaise budgétaire parce qu’elle que celui des pays de comparaison également en a effectué des coupes dans les dépenses publiques, situation de FCV, ou dans la région de la CEMAC et en s’appuyant sur les financements relais sur le de l’ASS. Le solde de la balance de capital a baissé, marché intérieur (3,3 pour cent du PIB) ainsi que passant de 7,5 pour cent du PIB en 2020 à 4,9 les allocations de Droits de tirage spéciaux (DTS) du pour cent du PIB en 2021, reflétant une tendance Fonds monétaire international (1,9 pour cent du PIB). à la baisse des dons projets, tandis que le compte Les dépenses publiques totales sont passées de 24,9 financier est passé d’un déficit en 2020 à un excédent pour cent du PIB en 2020 à 19,7 pour cent du PIB en 2021 avec la baisse des investissements nets en 2021, le Gouvernement ayant réduit les dépenses du secteur public et une augmentation marginale publiques en réponse aux tensions de trésorerie de l’investissement direct étranger. L’amélioration et annulé son plan de relance budgétaire suite à la des comptes de capital et des comptes financiers a COVID-19. En conséquence, la situation budgétaire contribué à faire passer la balance des paiements à un globale s’est davantage détériorée, passant d’un excédent, augmentant les réserves de change qui ont déficit de 3,3 pour cent en 2020 à un déficit de 6,1 alors atteint un niveau équivalent à environ 4,5 mois pour cent du PIB en 2021. La dette publique est d’importations enfin 2021, contre 3,5 mois en 2020. Perspectives économiques et risques Les perspectives économiques de la RCA légal. La croissance économique de la RCA devrait sont positives mais très vulnérables aux effets atteindre en moyenne 3 pour cent sur la période adverses de crises qui surviennent simultanément. de 2023 à 2025, ce qui est au-dessus du taux de L’économie devrait croître de 1.5 pour cent en croissance démographique moyen. En conséquence, 2022, soit 1,7 point de pourcentage de moins que le PIB réel devrait augmenter bien qu’à un rythme les projections précédentes, dans la mesure où la marginal. Le taux d’extrême pauvreté devrait rester consommation privée et les investissements devraient élevé à 70 pour cent en moyenne à moyen terme, être affectés par l’impact de la guerre en Ukraine, les tandis que l’insécurité alimentaire et le faible accès plans d’ajustement budgétaire du Gouvernement aux services publics de base, en particulier dans annoncés en avril 2022, et les incertitudes liées à les zones reculées, resteront des préoccupations l’adoption du Bitcoin comme monnaie ayant cours majeures. 4 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE L’adoption de la loi sur les crypto-monnaies sécuritaire fragile, associée à une faible diversification et l’absence d’appui budgétaire menacent la économique, fait que la RCA est extrêmement stabilité financière et budgétaire . La nouvelle vulnérable aux chocs qui influencent la demande loi sur les crypto-monnaies soulève plusieurs de produits de base. Les chocs externes et internes préoccupations critiques, notamment la capacité qui affectent la production et les exportations de technique de la RCA à superviser et surveiller ses principaux produits de base pourraient saper efficacement les transactions en crypto-monnaie, à la performance économique globale et la stabilité préserver l’intégrité financière, à assurer la protection macroéconomique du pays à moyen terme, la RCA ne des données à caractère personnel et à contrôler disposant pas de tampons pour atténuer ces chocs. les risques de blanchiment d’argent. En l’absence d’appui budgétaire, les arbitrages budgétaires Les retards dans la reprise économique seront difficiles et coûteux quelles que soient les mondiale et l’impact de la guerre en Ukraine options de financement. L’inadéquation du cadre pourraient être préjudiciables aux perspectives macroéconomique qui en résulte réduira davantage économiques de la RCA. Une reprise tardive de la les options de retour de l’appui budgétaire à moyen demande internationale pour les produits de base du terme. L’incertitude mondiale persistante aggravera pays pourrait aggraver le déficit du compte courant et les vulnérabilités nationales existantes, des chocs réduire les recettes intérieures. Ce scénario, associé alimentaires et pétroliers étant attendus en plus à une faible marge de manœuvre budgétaire, pourrait du choc dû à l’absence d’appui budgétaire. Même faire que le déficit budgétaire se creuse, en particulier avec des réductions importantes des dépenses non si les dons continuent de baisser, compromettant la prioritaires et la pleine utilisation de tous les DTS fourniture de biens et services publics. restants, les projections montrent qu’à partir du début de 2023, il sera extrêmement difficile pour le À court terme, la voie proposée pour une Gouvernement de respecter ses obligations les plus reprise robuste, résiliente et inclusive pourrait essentielles. reposer sur les quatre piliers suivants (Figure 1) : Une inversion des gains en matière de sécurité → Promouvoir la paix et la sécurité et renforcer les pourrait potentiellement compromettre des programmes de filets de sécurité sociale pour années de progrès en matière de réduction de la amortir l’impact des crises qui se produisent pauvreté. Les réformes visant à apporter une réponse simultanément sur les plus vulnérables . A aux griefs des crises précédentes et à renforcer le cette fin, un appui en situation de crise bien ciblé contrat social déjà fragile pourraient être retardées. pourrait être offert aux ménages vulnérables De même, la mise en œuvre des recommandations touchés par la hausse des prix des produits de du Dialogue Républicain, tenu en mars 2022, pourrait base. Pour garantir un retour durable à la paix et à être gravement menacée, augmentant les incertitudes la sécurité, la RCA doit également mettre en œuvre en matière de sécurité. Cela pourrait aboutir à une les recommandations du Dialogue Républicain et prime de risque pays plus élevée et pourrait continuer poursuivre la mise en œuvre de l’Accord Politique à décourager l’investissement privé. Une détérioration pour la Paix et la Réconciliation de 2019 ou de l’environnement sécuritaire pourrait perturber l’actualiser à la lumière des évolutions récentes. la production agricole, entraînant une pénurie alimentaire. Une telle situation pourrait générer des → La poursuite de la campagne de vaccination pressions inflationnistes susceptibles d’éroder le pour réduire le risque de nouvelles vagues pouvoir d’achat des ménages, plongeant nombre de COVID-19 et l’émergence de nouveaux d’entre eux dans l’extrême pauvreté. variants reste critique et nécessitera des efforts aux niveaux national et mondial. En La forte dépendance du pays vis-à-vis des parallèle, la RCA doit maintenir les mesures de exportations de produits de base fait qu’il ne prévention, d’endiguement et de prise en charge parvient pas à créer les tampons nécessaires de la COVID-19 tout en renforçant les mesures de pour atténuer les chocs externes. La situation prévention contre les maladies infectieuses. 5 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE → Réduire les déséquilibres budgétaires en répondant aux pressions de trésorerie sans accroître la vulnérabilité à la dette. La RCA pourrait donner la priorité aux sources de financement concessionnelles et améliorer la gestion de la trésorerie pour éviter l’accumulation de nouveaux arriérés. Cela pourrait également réduire autant que possible les incertitudes et les risques fiscaux et financiers associés à l’adoption du Bitcoin comme monnaie ayant cours légal en se conformant rigoureusement aux orientations données par les institutions monétaires et financières régionales. Du côté des recettes, les priorités pourraient porter sur la mise en œuvre du décret sur l’interconnexion d’eDouane et de SYDONIA et le rapprochement mensuel des données import-export pour réduire la fraude et la corruption. → Permettre le développement du commerce et du secteur privé en  : (i) réduisant les mesures non tarifaires (tracasseries) sur le principal corridor commercial pour permettre aux entreprises et aux ménages d’accéder aux intrants à moindre coût et encourager les dépenses d’investissement ; (ii) rendre les restrictions à l’importation et les régimes spéciaux moins complexes et plus transparents ; et (iii) harmoniser les procédures commerciales et rationaliser les mesures non tarifaires dans la Communauté économique des États de l’Afrique centrale de manière à réduire les délais et faciliter la libre circulation des biens et services. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 6 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 1 : Priorités politiques pour réduire les déséquilibres macroéconomiques et soutenir une reprise vigoureuse Piliers d’une reprise robuste, résiliente et inclusive Promouvoir la paix et la sécurité et renforcer les filets de sécurité sociale Mettre en œuvre la campagne de vaccination pour réduire le risque de nouvelles vagues de nouveaux variants Reprise résiliente Permettre le développement du commerce et du secteur privé Réduire le déséquilibre budgétaire en apportant une réponse aux tensions de la trésorerie sans aggraver la vulnérabilité de la dette Source : Services de la Banque mondiale. 7 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Libérer le potentiel du secteur agricole Les crises qui se produisent simultanément La faiblesse des politiques et des institutions devraient avoir des effets économiques durables, a empêché le secteur agricole de maximiser son ce qui fait qu’il est urgent d’adopter des réformes potentiel. Des plans et des stratégies spécifiques de grande ampleur et solides, en particulier dans au secteur ont été menés selon une approche le secteur agricole, le principal contributeur à la discontinue et par projet. Des décennies de conflits, réduction de la pauvreté en RCA. Avec la hausse d’instabilité et de progrès variables en ce qui des prix des produits de base, la perturbation des concerne le programme de réformes structurelles chaînes d’approvisionnement, les troubles politiques font que le cadre institutionnel du secteur agricole est suite à l’adoption du Bitcoin comme monnaie légale sévèrement déficient. Le cadre institutionnel actuel et l’impact de la guerre en Ukraine, la croissance est lourd et empêche l’innovation et la disponibilité économique de la RCA devrait être inférieure à de semences et d’engrais améliorés, des intrants ce qui avait été envisagé à moyen terme, dans un essentiels pour stimuler la productivité. De plus, les contexte de risques manifestes. Dans cette situation, institutions publiques ont une faible capacité à fournir il est primordial de libérer le potentiel du secteur des services de base aux agriculteurs et aux éleveurs agricole compte tenu des défis auxquels le pays est et à remplir leurs missions essentielles. confronté. Cela pourrait permettre de protéger les moyens de subsistance, accélérer la croissance, créer Les défis auxquels le secteur agricole de la RCA des emplois et améliorer les conditions de vie des est confronté comprennent : Centrafricains. → Des lois foncières obsolètes qui ne favorisent Le secteur agricole dispose d’un potentiel pas le développement agricole. La loi de 1964 important qui reste largement sous-exploité. Le régissant l’accès à la terre comporte plusieurs secteur a toute son importance des points de vue lacunes, notamment la présomption de domanialité économique, écologique, politique et social. Il produit et des procédures de concession foncière lourdes plus de 75 pour cent des produits alimentaires du et coûteuses. De plus, la loi foncière actuelle pays et fournit des emplois à trois Centrafricains reconnaît le droit coutumier, qui domine l’accès à la sur quatre, principalement dans le secteur informel. terre et le régime foncier, principalement en milieu Environ un tiers de la superficie totale de la RCA rural. En conséquence, la concurrence entre les lois est considérée comme propice à l’agriculture. Les coutumières et le droit foncier persiste, affectant régimes de précipitations conviennent aux cultures, les droits de propriété et d’usage. Une nouvelle loi les cycles de croissance étant longs, et le vaste foncière agro-pastorale, qui devrait apporter une système fluvial du pays fournit des eaux de surface et réponse à certains de ces problèmes, est en attente souterraines pour l’agriculture, l’élevage et la faune. d’examen au Parlement depuis plusieurs mois. Malgré son potentiel, le secteur agricole ne contribue que modestement à l’activité économique. Sa → Faible accès au financement, un goulot performance s’est détériorée au cours des dernières d’étranglement majeur pour les agriculteurs. décennies. La contribution du secteur à la croissance Selon la dernière enquête agricole, plus de 93 du PIB est passée de 55 pour cent en 2011 à 32 pour pour cent des agriculteurs déclarent que l’accès cent en 2020 en raison de la baisse de la production au crédit est la principale contrainte à leurs agricole, de l’élevage, de la foresterie et de la pêche, activités, suivi du manque d’appui technique et de et du transfert de la main-d’œuvre au secteur des l’absence de semences améliorées. Le Fonds de services. Au cours des dernières décennies, la Développement Agropastoral, censé soutenir les productivité a été faible et a été en baisse en raison agriculteurs et les aider à surmonter les difficultés d’un sous-investissement persistant, de difficultés d’accès au financement, n’est pas opérationnel. d’accès aux semences et engrais améliorés, de lois Il existe des institutions de microfinance dans le foncières obsolètes et de plusieurs autres problèmes pays, mais elles n’ont pas réussi à améliorer l’accès structurels. des agriculteurs au crédit. En outre, la RCA ne 8 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE dispose pas de cadres institutionnel et juridique minéraux pour accroitre la productivité des cultures régissant la finance rurale, et aucun des plans et et néglige le système de semis direct sur paillis. stratégies conçus pour soutenir le secteur agricole L’utilisation d’engrais en RCA est l’une des plus n’a abordé l’accès au financement. faibles de la région, principalement en raison du coût élevé des produits. Plusieurs projets → Le mauvais état des routes et l’absence de humanitaires distribuent des engrais ou aident à stratégie d’entretien, en particulier pour les réduire leurs prix pour les agriculteurs. Cependant, pistes rurales, constituent une entrave à ces programmes de distribution ne sont pas l’accès aux marchés. Les politiques et plans suffisamment ciblés en raison d’un manque de de développement rural n’ont pas mis l’accent méthodologies rigoureuses et de l’absence d’une sur l’amélioration des infrastructures rurales et base de données sur les bénéficiaires potentiels. l’accès aux marchés. Les produits agricoles sont De plus, en raison d’un manque de connaissances généralement cultivés dans des zones rurales et d’éducation, les agriculteurs ne savent pas quels reculées, mais seuls 16 pour cent du réseau types d’engrais acheter ou quel dosage appliquer. routier rural sont classés comme étant dans un La mauvaise gestion de l’approvisionnement en état « bon » ou « passable ». Il n’y a non plus de engrais est associée au coût élevé sur le marché stratégie d’entretien des pistes rurales, ce qui fait intérieur. les réseaux routiers cruciaux restent de longues périodes sans entretien. Une grande partie du → Incertitudes quant aux avantages attendus de pays n’est pas couverte par le réseau routier, ce la mécanisation. Les politiques et les institutions qui limite l’accès aux zones rurales, aux marchés et n’ont pas mis l’accent sur l’utilisation et l’adoption aux services de base. Le Fonds routier centrafricain, d’alternatives en matière d’équipements et d’outils qui est chargé de l’entretien des routes, souffre agricoles (qui peuvent être acquises à un coût d’une mauvaise gouvernance et de l’insuffisance réduit) pour améliorer la productivité du travail. de ressources. Les agriculteurs utilisent encore des méthodes agricoles rudimentaires en raison du coût élevé → D i f f i c u lté s p e r s i st a n te s d ’a ccè s a u x des machines. Par exemple, moins de 1 pour semences améliorées et aux engrais. L’un des cent des agriculteurs utilisent des tracteurs et principaux obstacles à la productivité agricole des motoculteurs, principalement en raison du en RCA est la persistance de l’utilisation de coût élevé de la mécanisation, les tracteurs étant semences de faible qualité chez les petits 15 fois plus chers que la production manuelle. La exploitants agricoles. Pendant des décennies, promotion de la mécanisation ne tient pas compte les agriculteurs centrafricains ont habilement de la nature de petits exploitants des agriculteurs exploité leurs propres systèmes de semences et des éleveurs, du coût élevé des machines informels, recyclant des variétés non résilientes et de la capacité des agriculteurs à utiliser les à maturation tardive, à faible rendement et peu équipements de manière productive. résistantes aux ravageurs et aux maladies. Le cadre réglementaire des semences est lourd et → Transhumance et tensions entre éleveurs et chronophage, limitant la qualité et la quantité des agriculteurs, entraves au développement du variétés de semences améliorées. Il ne prévoit secteur agricole. La concurrence pour l’utilisation également que l’enregistrement, la certification, des ressources conduit à des attaques et des le contrôle qualité et la livraison aux agriculteurs, meurtres de représailles entre les communautés ce qui freine la recherche et le développement d’agriculteurs et d’éleveurs et cette concurrence en matière de sélection. Le principal fournisseur entraîne aussi une perte rapide de la fertilité de variétés de semences améliorées, l’Institut des sols et une détérioration des ressources d’Agronomie, est confronté à des défis techniques naturelles. Près de 70 pour cent des éleveurs et et financiers, d’où sa faible capacité de production. des agriculteurs déclarent que les conflits affectent La politique actuelle du pays en matière d’engrais leurs activités. Les animaux errants, les dégâts en met principalement l’accent sur les engrais milieu rural, les vols et l’abattage du bétail sont 9 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE les principales causes de la transhumance. Les Il faudrait des réformes audacieuses et principales difficultés auxquelles les éleveurs sont soutenues pour mettre à profit le potentiel du confrontés sont le manque de produits vétérinaires, secteur agricole. La RCA pourrait faire de l’agriculture le faible accès au financement, le manque le moteur de la croissance économique et permettre d’appui technique et l’absence de compléments ainsi à des millions de Centrafricains d’échapper à alimentaires. Les services vétérinaires ne peuvent l’extrême pauvreté et à la précarité. Cela nécessitera assurer la qualité à cause du peu de capacités toutefois des réformes audacieuses et soutenues. Par humaines et financières disponibles. Le manque exemple, pour stimuler les exportations agricoles, il de synergie et de coordination entre les acteurs du faudrait améliorer la qualité des produits de manière secteur de l’élevage a limité leur capacité à adopter à satisfaire aux normes de valeur des produits, relier des stratégies d’adaptation efficaces pour faire les producteurs aux chaînes d’approvisionnement face aux défis tels que le changement climatique, et améliorer la connectivité en milieu rural. Les les épizooties, l’insécurité, la pression agricole, réformes supplémentaires porteraient sur la l’expansion des aires protégées et les efforts pour réforme des politiques foncières pour garantir les poursuivre une telle expansion. droits et améliorer l’allocation des ressources, en particulier pour les femmes, et sur la promotion et le renforcement des organisations de producteurs pour mieux tirer profit des chaînes de valeur nationales, régionales et mondiales. Le Tableau 1 présente les principaux domaines de réformes pour libérer le potentiel du secteur agricole de la RCA. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 10 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Tableau 1 : Principales options stratégiques pour redynamiser le secteur agricole Priorités immédiates Priorités à court terme Priorités à moyen terme (Prochains 3 à 9 mois) (Prochains 9 à 24 mois) (Prochains 24 à 36 mois) Améliorer la • • qualité des Déterminer quels sont les Améliorer la gestion budgétaire grâce à dépenses types de dépenses qui des systèmes de gestion de l’information publiques sont généralement les plus budgétaire appropriés et à un personnel productives et s’assurer que doté de capacités d’analyse budgétaire la composition de l’allocation pour permettre de surveiller et ajuster budgétaire actuelle en tient les dépenses en cours d’année fiscale. compte. Selon les estimations Pour la mise en œuvre de cette stratégie, de nombreuses études, le l’appui du Ministère des Finances et du financement de la recherche Budget et des PTF pour le renforcement et du développement (R&D), des capacités du personnel administratif par exemple, a un taux de et financier du Ministère de l’Agriculture rendement très élevé qui peut et du Développement Rural, semble atteindre 34 pour cent en essentiel. Afrique subsaharienne (Alston et al., 2000 ; Pardey et al., 2007). Améliorer • • • l’accès au Évaluer les contraintes à Concevoir et mettre en place un système Améliorer l’inclusion financement et l’accès au financement incitatif de partage des risques pour le financière et la portée du à la terre agricole crédit agricole qui comprend : système de partage des • ¬ Un fonds de garantie de crédit ; risques en utilisant les Mettre en place un cadre ¬ Une assistance technique pour technologies de transfert réglementaire pour la finance améliorer la capacité des agriculteurs d’argent et les outils rurale. (par exemple, littératie financière, financiers numériques. • gestion financière, gestion de • Établir une base de données l’agriculture comme une entreprise, etc.) Aider les petits agriculteurs nationale des agriculteurs et des prestataires de services financiers à avoir un accès sécurisé et diviser les agriculteurs en (par exemple, formation du personnel à la terre à travers des grappes ou groupes. bancaire, appui au développement de titres fonciers, le bail • produits, personnalisation de logiciels, emphytéotique, ou Adopter et promulguer le code développement de processus de l’amélioration du régime foncier agropastoral. crédit, lignes directrices, systèmes et foncier, en mettant l’accent • procédures, normes et exigences de sur les femmes et les Faire en sorte que les souscription de prêts, soutien au suivi jeunes. organisations travaillant sur les des prêts, etc.) ; et • droits des femmes, les droits ¬ Un mécanisme d’incitation pour les Mettre en œuvre une humains et les droits fonciers banques offrant : (i) un prix de la réforme agraire axée sur continuent de sensibiliser aux meilleure banque de crédit agricole ; le marché et adopter droits fonciers des femmes par (ii) des incitations en espèces pour que des politiques visant à le biais de vastes campagnes les banques réalisent des études de accroître la productivité d’information, d’éducation et faisabilité sur l’entrée sur le marché, agricole et à promouvoir de communication. ouvrent des succursales dans les lieux le développement rural enclavés, embauchent du nouveau intégré. personnel, couvrent les frais de surveillance, etc. ; et (iii) des incitations en espèces pour les emprunteurs qui, par exemple, remboursent intégralement leurs prêts avec des bonifications d’intérêts. • Préparer et promulguer la législation secondaire du code foncier agropastoral. • Réaliser un inventaire et une cartographie des terres agricoles en vue de l’élaboration d’un schéma directeur de gestion durable des terres. 11 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Créer un • • • environnement Élaborer des politiques et Promouvoir la création de centres de Permettre la création qui permet la des cadres réglementaires services de mécanisation agricole sous d’un assemblage ou mécanisation régissant l’importation forme d’entreprises. d’une fabrication locale d’outils de mécanisation et • de machines adaptées à réglementant les services Mettre en œuvre des efforts de l’agriculture paysanne. de location commerciale de renforcement des capacités des • technologies et de services de ressources humaines pour les artisans, les Mettre en synergie la mécanisation. techniciens et les professionnels, en ce qui stratégie de mécanisation • concerne à la fois le matériel et le logiciel. agricole avec les Mettre en place un régime investissements publics fiscal favorable, en vertu dans le secteur de l’énergie duquel les obstacles à l’accès (carburant, électricité et au financement pour les solaire) et la construction équipements et les services de routes en raison du rôle sont réduits autant que central que l’électricité et possible ou supprimés, tout les infrastructures dans la en élargissant les modèles mécanisation jouent. de financement innovants tels que le financement par crédit-bail et les accords de location-achat (par exemple, exonérations fiscales pour les outils agricoles). Apporter une • • • réponse aux Opérationnaliser et renforcer Renforcer les capacités locales à résoudre Améliorer le développement tensions en la plateforme transhumance et les conflits et donner une plus grande des infrastructures relatives rapport à la pastoralisme. autorité aux groupes locaux dans un cadre aux pâturages. transhumance entre les • de principes de base et de justice. • éleveurs et les Rétablir le dialogue entre • Mettre en place un centre agriculteurs éleveurs et agriculteurs et Mettre en place un mécanisme multidisciplinaire de gestion ainsi qu’aux impliquer les dirigeants institutionnel de prévention et de gestion et de lutte contre les défis concernant communautaires, les experts des catastrophes. zoonoses. les services locaux et les représentants • vétérinaires de différents groupes sociaux Accroître la disponibilité d’équipements dans la gestion dans les initiatives de gestion de laboratoire pour faciliter l’identification de la lutte contre les des conflits, étant donné que des maladies contagieuses. maladies cela pourrait renforcer les efforts mutuels pour maintenir la paix et offrir des moyens de résoudre les malentendus entre éleveurs et agriculteurs. • Créer des stratégies de transhumance et les adapter à celles des pays voisins (Tchad, Cameroun et Soudan) pour le contrôle des mouvements et du commerce du bétail transhumant (transhumance transfrontalière principalement). • Former davantage de personnel à la gestion des zoonoses. • Renforcer la collaboration multidisciplinaire dans la gestion et la lutte contre les zoonoses. 12 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Améliorer • • • l’accès aux Simplifier les procédures Identifier et investir dans des entreprises Renforcer la collaboration variétés de d’enregistrement, de semencières locales ou des groupes de entre l’Institut Centrafricain semences certification et de contrôle producteurs de semences et établir des de Recherche Agricole améliorées et aux engrais. qualité. chaînes d’approvisionnement locales et l’Université de • (le système de partage des risques à Bangui pour établir une Éduquer les agriculteurs développer créera une opportunité nouvelle génération de pour assurer qu’ils effectuent d’investissement). sélectionneurs en RCA à les bonnes associations • travers la formation de d’engrais et en font un bon Développer et harmoniser la politique et scientifiques et la mise en usage (par exemple, s’assurer le cadre réglementaire des engrais de la œuvre de programmes de que les agriculteurs savent RCA à travers les structures continentales développement de variétés que les cultures réagissent et régionales existantes, un effort qui de cultures améliorées. généralement mieux aux bénéficiera du développement des • engrais minéraux qu’aux marchés régionaux des engrais dans la Utiliser des subventions engrais organiques, mais mesure où ce développement réduirait intelligentes basées sur que les deux types sont les obstacles au commerce et entrainerait des bons électroniques nécessaires pour maximiser le une harmonisation des règles et des et des téléphones rendement). normes. portables pour améliorer • le ciblage dans le cadre Concevoir un programme pour l’adoption des programmes actuels et l’utilisation d’un système de culture à de distribution d’intrants base de semis direct sous paillage. à titre humanitaire et pour • prévenir les abus. Former les agriculteurs à l’utilisation d’un • système de culture à semis direct sur Mettre en œuvre des paillis. programmes pour accroître l’adoption et l’utilisation d’un système de culture à semis direct sur paillis. Accroître la • • • sensibilisation Élaborer une stratégie Promouvoir l’utilisation de vidéos animées Promouvoir l’utilisation et les contacts nationale de vulgarisation comme support pour la formation en du téléphone portable avec les s’appuyant sur des outils TIC vulgarisation pour aider à transmettre les pour faire la publicité agriculteurs à l’aide d’outils messages de vulgarisation clés dont les des services et renforcer TIC agriculteurs ont besoin la communication des messages de vulgarisation clés pour atteindre des millions d’agriculteurs Lutter contre • • • les pertes post- Élaborer des politiques Promouvoir les investissements dans Elaborer des réformes récolte stratégiques sur l’amélioration les installations de transformation post- politiques qui favorisent des infrastructures de récolte et les infrastructures de marché l’agriculture commerciale. stockage et le partage des connaissances sur les pratiques d’excellence en matière de stockage et de conservation afin de réduire considérablement les pertes alimentaires et améliorer la disponibilité des aliments sur les marchés locaux et régionaux du pays Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 1 CHAPITRE Evolutions économiques récentes et perspectives 14 1.1 Evolutions économiques récentes : une perte d’élan La pandémie de COVID-19, l’instabilité politique et les menaces sécuritaires ont contribué à la détérioration de la performance économique de la République centrafricaine (RCA). La croissance économique a été révisée à la baisse à 1,0 pour cent en 2020 tout comme en 2021 (-1,1 pour cent et -2,8 pour cent, respectivement, en termes par habitant), soit 3,6 et 4,2 points de pourcentage de moins que les projections antérieures à la COVID-19. La position budgétaire s’est détériorée à mesure que les recettes fiscales ont chuté tandis que les dépenses publiques ont augmenté en raison de la pandémie, de l’effort de guerre et du non-décaissement de l’appui budgétaire. En 2021, l’inflation s’est accélérée en raison de la perturbation des chaînes d’approvisionnement nationales et internationales, et le compte courant s’est détérioré, principalement en raison de la réduction des transferts publics. La réponse politique des autorités nationales et régionales a contribué à atténuer les retombées économiques de la pandémie et a soutenu la reprise économique dans la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC). La Banque des États de l’Afrique Centrale (BEAC) a rapidement assoupli sa politique monétaire en mars 2020 et a introduit des mesures d’accommodation pour assurer une liquidité adéquate dans le système bancaire et trouver le juste équilibre soutenir la stabilité interne et soutenir la stabilité externe. En outre, la Commission Bancaire des États de l’Afrique Centrale (COBAC), l’autorité régionale de supervision bancaire, a assoupli les réglementations prudentielles pour aider les banques à retarder les pertes liées à la pandémie. 15 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.1.1 La croissance économique de la RCA a stagné en 2021 après une performance raisonnable avant la COVID-19 La croissance économique mondiale a rebondi depuis l’indépendance du pays, la croissance à 5,5 pour cent en 2021 grâce à l’assouplissement étant soutenue par une amélioration relative de des mesures de confinement liées à la COVID-19, l’environnement sécuritaire, une plus grande stabilité ce qui a stimulé la demande mondiale1. Il s’agit macroéconomique et une mise en œuvre soutenue de là d’une nette inversion par rapport à la contraction réformes structurelles avec l’aide des partenaires au économique mondiale de 3,4 pour cent en 2020, développement. Ce taux de croissance a entrainé une qui a été causée par d’importantes perturbations de réduction du nombre de Centrafricains vivant dans l’économie mondiale, du commerce international et l’extrême pauvreté de 73,7 pour cent de la population des chaînes de valeur mondiales et du report des en 2015 à 70,7 pour cent en 2019. Pourtant, à dépenses d’investissement en raison des mesures de cause de défis structurels préexistants tels qu’une confinement liées à la pandémie dans de nombreux faible diversification économique, la petite taille du pays. La croissance dans les pays à faible revenu s’est secteur privé et le manque de marges budgétaires, accélérée de 3,3 pour cent en 2021, contre 1,3 pour la RCA était particulièrement vulnérable à l’épidémie cent en 2020. La croissance économique en Afrique de COVID-19 et à son impact socio-économique, subsaharienne (ASS), l’une des régions les moins malgré l’impact relativement limité sur la santé. La affectées par la pandémie, s’est redressée en 2021, croissance du PIB réel par habitant a ralenti à 1,0 avec une croissance en hausse de 3,5 pour cent en pour cent en 2020, son niveau le plus bas depuis 2021, après une contraction de 2,2 pour cent en 2014. La pandémie a également affecté la RCA par 2020. Cependant, la reprise économique dans les son impact sur les chaînes de valeur mondiales trois plus grandes économies d’Afrique subsaharienne (CVM), notamment la baisse de la demande pour les - l’Afrique du Sud, l’Angola et le Nigeria - a été inégale, exportations de la RCA - en particulier de la part des la production y ayant augmenté de 4,6 pour cent, marchés des pays développés d’Europe et d’Amérique 0,4 pour cent et 2,4 pour cent respectivement, en du Nord, ce qui a affecté les entreprises du pays. En 2020. En Angola, la lenteur de la reprise tient au fait outre, les CVM ont été touchées par des perturbations que la forte reprise dans les secteurs non pétroliers des chaînes d’approvisionnement, ce qui a créé des a été contrecarrée par la baisse de la production difficultés pour les entreprises participant aux chaînes des gisements pétroliers vieillissants. Au Nigéria, de valeur mondiales. la reprise a été tirée par la reprise du secteur non pétrolier, tandis que la reprise rapide en Afrique A cause de la pandémie de COVID-19 et d’un du Sud a été tirée par un fort rebond des secteurs regain d’insécurité au milieu des conflits post- minier, manufacturier et des services. De même, les électoraux, l’économie de la RCA a eu une piètre économies de la CEMAC ont connu une croissance performance en termes de croissance. L’activité moyenne de 2,1 pour cent en 2021, soutenues par économique a particulièrement souffert au premier l’assouplissement des mesures d’endiguement et des trimestre de 2021, le regain d’insécurité au milieu mesures de relance budgétaire. des conflits électoraux perturbant la production et le commerce. Stimulée par la reprise du commerce le L’économie de la RCA était en perte de vitesse long du corridor Douala-Bangui et les améliorations alors qu’on entrait en 2021. Avec une croissance en matière de sécurité, l’activité économique s’est moyenne de 4,1 pour cent sur la période de 2015 redressée au second semestre. La production minière à 2019, la RCA a connu son taux de croissance et agricole s’est accélérée grâce à l’amélioration de moyen le plus élevé sur une période de cinq ans la sécurité autour des sites de production et à une 1 World Bank. 2022. Global Economic Prospects, January 2022. Washington DC: World Bank. http://hdl.handle.net/10986/36519. 16 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE pluviométrie favorable. L’investissement public faible demande extérieure, affectant le commerce est passé de 11,4 pour cent du PIB en 2020 à 7,5 international et les transports. En conséquence, la pour cent du PIB en 2021, le Gouvernement ayant croissance du PIB réel s’est établie à 1,0 pour cent annulé son plan de relance budgétaire suite à la en 2021 (Figure 2), ce qui est inférieur à la moyenne COVID-19. Les effets durables de la COVID-19 sur de la CEMAC, de l’ASS et des pays en situation de l’économie mondiale ont entraîné une perturbation fragilité, de conflits et de violence (FCV). persistante des chaînes de valeur mondiales et une Figure 2 : En 2021, la croissance annuelle du PIB réel de la RCA a stagné et atteint l’un de ses niveaux les plus bas depuis 2015. Croissance annuelle du PIB réel, RCA par rapport à des groupes de comparaison, 2015–22 Pourcentage (%) 6 4 2 0 -2 -4 -6 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021e 2022p RCA CEMAC ASS FCV Source : Estimations des services de la Banque mondiale utilisant les données des WEO, GEP et MPO. Remarque : Des projections ont été utilisées pour la croissance du PIB réel en 2022. La CEMAC, les pays en situation de FCV et l’ASS n’incluent pas la RCA. Figure 3 : Une contraction de la consommation privée et des exportations a entraîné une stagnation de la croissance du PIB réel. Contribution à la croissance du PIB réel, 2015-2021 Pourcentage (%) 8 6 4 2 0 -2 -4 -6 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Consommation privée Consommation publique Formation brute de capital fixe Exportations Croissance du PIB réel Source : Estimations des services de la Banque mondiale à partir des données MPO et WDI. 17 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE La consommation privée a augmenté en 2021, L’insécurité a entrainé de l’inflation qui a en cohérence avec l’accélération des activités dépassée le plafond régional de 3 pour cent en économiques au cours du second semestre. Le 2021. La reprise du conflit à la fin de 2020 a entrainé retour des conflits sur fond de contentieux post- une perturbation des chaînes d’approvisionnement électoral a conduit au blocage du corridor Bangui- alimentaire le long du principal corridor commercial Doual au cours des trois premiers mois de 2021. du pays et a contribué aux pressions inflationnistes La reprise du commerce le long du corridor Douala- au premier semestre 2021. Des milliers de camions Bangui et les améliorations de la situation sécuritaire de fret sont restés bloqués à la frontière avec le ont stimulé l’activité économique au second semestre, Cameroun pendant environ trois mois, l’insécurité conduisant à une augmentation de la consommation croissante dans un contexte marqué par le privée de 0,5 pour cent en 2021, une nette inversion contentieux électoral à la fin de 2020 ayant entraîné par rapport à une contraction de 4,2 pour cent en un blocus du corridor Douala-Bangui. L’impact sur les 2020 (Figure 3). Par ailleurs, la croissance des coûts de transport iceberg a incité les fournisseurs investissements publics a ralenti, passant de 11,4 nationaux tournés vers l’avenir à réajuster à la pour cent du PIB en 2020 à 7,5 pour cent du PIB en hausse leurs prix sur les biens importés. De plus, la 2021, le Gouvernement ayant annulé son plan de production de biens locaux dans les zones reculées relance budgétaire suite à la COVID-19. Malgré une a été perturbée du fait du déplacement massif des forte reprise économique mondiale, la croissance populations des sites de production vers les zones des exportations de biens s’est contractée pour la sécurisées. En conséquence, l’inflation s’est accélérée deuxième année consécutive de 5,5 pour cent en de 5,2 pour cent, en glissement annuel, au premier 2021 (contre une contraction de 2,8 pour cent en semestre 2021. Avec la reprise progressive du trafic 2020), le regain d’insécurité pesant lourdement sur sur le corridor Douala-Bangui au second semestre, les exportations de produits de base clés tels que le l’inflation a nettement décéléré pour atteindre une diamant et l’or. moyenne de 4,5 pour cent, mais est restée au- dessus du critère de convergence régionale (Figure Du côté de l’offre, l’évolution positive du secteur 4). La flambée des prix des denrées alimentaires agricole a permis de prévenir un ralentissement a représenté environ 70,1 pour cent des pressions plus marqué de la croissance économique. Les inflationnistes en 2021. Les prix des produits améliorations de la sécurité dans les zones enclavées alimentaires et des boissons non alcoolisées ont ont permis l’expansion de la production agricole, en augmenté de 5,6 pour cent en glissement annuel, particulier des cultures vivrières, à mesure que les principalement tirés par la hausse des prix du manioc, agriculteurs retournaient au travail. En conséquence, de la viande de bœuf, du sésame et de l’huile de la croissance du secteur agricole a ralenti de 4,5 pour palme. Par exemple, en décembre 2020, 10 000 XAF cent en 2020 à 3,2 pour cent en 2021. Parallèlement, permettait d’acheter en moyenne 25,4 kg de manioc les conflits survenus en début d’année, notamment le (Cossette), assez pour un ménage, mais cette somme blocus du principal corridor commercial, ont prolongé ne permettait plus d’acheter que 19,5 kg un an plus les difficultés du secteur industriel, entrainant une tard. contraction de 0,2 pour cent en 2021 malgré une augmentation de la production d’or et de diamant. Le secteur des services s’est légèrement redressé après la pandémie de COVID-19, tiré par le dynamisme des sous-secteurs des télécommunications et de l’hôtellerie. Le nombre de passagers arrivant à l’aéroport international de Bangui M’Poko a augmenté de 38 pour cent, en glissement annuel, en 2021 - après une baisse de 48 pour cent, en glissement annuel, en 2020 en raison de la pandémie - tandis que la performance du secteur des services a été limitée par la baisse des ventes en gros et du fret aéroportuaire. 18 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 4 : L’inflation a ralenti au second semestre 2021. Indice des prix à la consommation (IPC), prix des produits alimentaires et boissons non alcoolisées, glissement annuel Fermeture de la frontière RCA- Cameroun à cause 27 décembre, élections Blocus du corridor de la COVID-19 et blocus du corridor Bangui-Doula Pourcentage (%) Bangui-Douala 8 7 6 5 4 3 2 1 0 -1 -2 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 2019 2020 2021 IPC Aliments et boissons non alcoolisées Source : Estimations de l’ICASEES et de la Banque mondiale. Figure 5 : La RCA est restée peu compétitive sur le plan La compétitivité commerciale de la RCA s’est commercial par rapport à ses pairs en 2021. améliorée au quatrième trimestre 2021 mais reste Taux de change effectif réel basé sur l’indice des prix à la consommation, 2020-21 faible par rapport à celle des pays pairs. L’indice du taux de change effectif réel du pays a baissé d’environ 4 pour cent, en glissement annuel, au quatrième Indice, 2010=100 trimestre 2021, alors que les échanges avec ses 150 principaux partenaires ont repris après plusieurs mois d’un blocus dû à l’insécurité. Néanmoins, l’indice de 140 compétitivité commerciale de la RCA est resté élevé 130 en 2021 (134,4) par rapport à la moyenne de l’ASS 120 (97,4), de la CEMAC (102,5) et des pays en situation de FCV (106,5) (Figure 5). Cela veut dire que les 110 exportations de la RCA sont devenues plus coûteuses 100 et ses importations moins chères par rapport à celles de ses pairs en 2021, en raison des coûts 90 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 de production locaux élevés résultant de plusieurs facteurs, notamment la fragilité de l’environnement 2019 2020 2021 RCA CEMAC ASS FCV sécuritaire, le grand déficit de compétences s’accompagnant d’une faible productivité, la mauvaise qualité du réseau d’infrastructures (routes, électricité et télécommunications) et la forte prévalence de Source : Estimations IFS, WEO et Banque mondiale. l’informalité. 19 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.1.2 Politique monétaire et secteur financier : ouvrir une boîte de Pandore Le secteur bancaire a eu une performance (275,6 millions USD et environ 81,2 pour cent) ont relativement bonne en 2021 en rapport à une été alloués au secteur privé, 23,5 milliards XAF (37,8 série d’indicateurs de solidité financière. Le total millions USD, 11,2 pour cent) aux non-résidents, du bilan des quatre banques commerciales s’élevait 11,9 milliards XAF (19,2 millions USD, 5,6 pour cent) à 354,0 milliards XAF en 2021, contre 321,4 milliards aux entreprises publiques et 2,3 milliards XAF (3,7 XAF en 2020. L’excédent de trésorerie a augmenté millions USD, 1,1 pour cent) à l’Etat (Figure 7). Le de 3,8 pour cent en glissement annuel en 2021 pour crédit aux entreprises publiques a augmenté de 39,6 atteindre 97,2 milliards XAF (27,5 pour cent du total pour cent en 2021 et pourrait représenter une source du bilan). Le ratio d’adéquation des fonds propres majeure d’instabilité financière en RCA, compte tenu s’élevait à 23,8 pour cent à la fin de septembre 2021. de leur faible compétitivité et de leur faible gestion. Le ratio d’adéquation des fonds propres s’établissait à 23,8 pour cent à la fin de septembre 2021, au- Les réserves nettes de change ont fortement dessus de l’exigence minimale de 9,5 pour cent. Les chuté au quatrième trimestre, la disposition prêts non performants (PNP) ont continué de baisser des bailleurs à accorder des appuis budgétaires régulièrement à partir du troisième trimestre 2020, s’estompant. Les réserves nettes de change de atteignant en moyenne 15,2 pour cent en 2021, la RCA ont été fortement corrélées avec l’appui son niveau le plus bas des cinq dernières années. budgétaire des bailleurs au cours des deux Cette amélioration de la performance a été favorisée dernières années. Les améliorations des réserves par l’assouplissement des mesures prudentielles nettes de change ont été principalement associées appliquées par la COBAC, ces mesures visant à aux décaissements des appuis budgétaires des réduire autant que possible l’impact des prêts liés à bailleurs, rendant le pays vulnérable aux retards ou la COVID-19 sur la liquidité et la rentabilité des actifs à un gel des financements extérieurs. Les réserves des banques commerciales. Le ratio de couverture de change nettes ont augmenté de 16,1 pour cent, des liquidités à court terme s’est amélioré à 214 en glissement annuel, au troisième trimestre de pour cent, principalement grâce aux opérations de 2021, principalement en raison du décaissement refinancement de la BEAC. de 85 milliards XAF (environ 136,8 millions USD) d’allocations de Droits de tirage spéciaux (DTS) du La masse monétaire a augmenté au dernier Fonds monétaire international (FMI). Ces allocations trimestre de 2021 en raison de l’augmentation ont fourni un coussin en temps opportun et ont aidé du crédit à l’économie . Le volume des crédits le pays à financer ses déficits de la balance des à l’économie a augmenté de 8,2 pour cent en paiements. Cependant, les pressions croissantes sur glissement annuel au quatrième trimestre de 2021, les dépenses, associées à une faible mobilisation des reflétant la volonté des banques commerciales de ressources intérieures et au gel des décaissements de soutenir la reprise économique, et a été facilité par l’appui budgétaire en raison des politiques sécuritaire l’assouplissement de la politique monétaire de la du Gouvernement, ont entraîné une forte baisse des BEAC jusqu’au 25 novembre 2021. En conséquence, réserves nettes de change de 25,1 pour cent, en la masse monétaire a augmenté de 8,9 pour cent glissement annuel, au quatrième trimestre. en glissement annuel au cours du dernier trimestre de 2021 et de 11,5 pour cent en moyenne sur une base annuelle (Figure 6). Le crédit au secteur privé a continué de représenter l’essentiel du total des crédits alloués en 2021 bien que sa part dans le crédit total ait légèrement diminué. En 2021, le volume total des crédits alloués s’est élevé à 210,8 milliards XAF (339,4 millions USD), dont 171,2 milliards XAF 20 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale Figure 6 : Les avoirs extérieurs nets ont continué à suivre la tendance des décaissements de l’appui budgétaire des bailleurs. Croissance de la masse monétaire brute, des créances nettes sur l’État et du crédit à l’économie, 2018-2021 Décaissement de Décaissement du l'allocation de DTS Décaissement FMI, première et du FMI, août 2021 de l'UE et appui deuxième revues budgétaire de la dans le cadre du Pourcentage (%) Banque mondiale, programme FEC, novembre 2020 janvier 2021 25 20 15 10 5 0 -5 -10 -15 -20 -25 -30 T1 T2 T3 T4 T1 T2 T3 T4 2020 2021 Crédit á l'économie Masse monétaire brute (M2) Avoirs extérieurs nets Source : Estimations de la BEAC et de la Banque mondiale. 21 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 7 : La part des crédits au secteur privé a diminué en 2021 commune en place. La disposition de certains mais a continué de représenter une part importante du crédit total. articles de la loi qui donnent cours légal aux crypto- Allocation du crédit intérieur par entité, 2020 (cercle intérieur) vs monnaies sont en contravention de la convention de 2021 (cercle extérieur) la CEMAC (article 20, titre II) qui dispose que la BEAC a le privilège exclusif d’émettre une monnaie dans 0,9 1,1 les pays membres. Enfin, en disposant que la RCA 11,2 5,6 fournira des alternatives permettant aux utilisateurs d’effectuer des transactions en crypto-monnaies et 3,5 1,4 d’avoir une convertibilité automatique et instantanée 0,8 5,0 dans la devise utilisée dans le pays (et vice versa), la loi pourrait exposer le pays à des risques fiscaux importants compte tenu de la forte volatilité des crypto-monnaies. 89,4 81,2 La COBAC a prolongé l’assouplissement de ses mesures prudentielles jusqu’en 2022 et interdit les crypto-monnaies comme moyen de paiement Gouvernement central EP dans la zone CEMAC. Dès le début de la pandémie Secteur privé Non-résidents de COVID-19, la COBAC, le régulateur bancaire de la Autre région CEMAC, a décidé de modifier temporairement un ensemble de réglementations bancaires pour Source : Estimations de la BEAC et de la Banque mondiale. limiter les effets néfastes de la pandémie sur le secteur bancaire et garantir l’intégrité financière de la CEMAC. Du 1er juin 2020 au 31 décembre 2021, la La RCA est devenue la deuxième nation au COBAC a notamment décidé de : (i) relever l’exigence monde à adopter le Bitcoin comme monnaie ayant de capital réglementaire à 10,5 pour cent  ; (ii) cours légal, une démarche qui pose une menace supprimer les conditions existantes pour reclasser à la stabilité financière et monétaire et augmente les prêts restructurés des PNP en prêts sains  ; et les risques budgétaires2. Le président Touadéra a (iii) prolonger la période de défaut depuis le premier promulgué le 22 avril 2022 la loi régissant les crypto- défaut de 90 jours à 180 jours lors du reclassement monnaies en RCA. La loi est composée de 26 articles des prêts sains en PNP. En 2021, la COBAC a prolongé et définit le champ d’application, la réglementation, jusqu’à fin 2022 les mesures qu’elle avait adoptées la protection des données et les sanctions en rapport en matière de PNP, tandis que les mesures relatives aux transactions de crypto-monnaie dans le pays. aux exigences de fonds propres resteront en place La nouvelle loi sur les crypto-monnaies soulève jusqu’à mi-2022. Le 6 mai 2022, elle a confirmé plusieurs préoccupations critiques, notamment la l’interdiction des crypto-monnaies comme moyen capacité technique de la RCA à superviser et surveiller de paiement dans la zone CEMAC. En plus d’interdire efficacement les transactions en crypto-monnaie, à toutes les opérations liées aux cryptoactifs, elle a mis préserver l’intégrité financière, à assurer la protection en place un système d’identification et de déclaration des données à caractère personnel et à contrôler les des transactions liées aux crypto-monnaies. A ce risques de blanchiment d’argent. En outre, l’absence titre, toutes les institutions financières assujetties de consultation avec la BEAC pose un problème à la COBAC sont tenues d’identifier les transactions et fait peser des risques importants sur la stabilité effectuées ou rejetées en rapport aux crypto- financière dans la région CEMAC, compte tenu des monnaies et de communiquer mensuellement les liens existants avec le système financier et la monnaie résultats à la COBAC et à la BEAC. 2 Le Salvador a été le premier pays à adopter le Bitcoin comme monnaie ayant cours légal en septembre 2021. 22 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.1.3 Le pays est en train de se diriger vers un précipice budgétaire Malgré la modération des dépenses, la situation redressement n’a pas entièrement compensé les budgétaire globale de la RCA s’est détériorée pertes subies au cours du premier semestre. En pour la deuxième année consécutive en 2021 en conséquence, les recettes intérieures ont légèrement raison de la baisse des recettes intérieures et des diminué, passant de 9,1 pour cent du PIB en 2019 à dons. Le pays a généré un déficit budgétaire global 8,7 pour cent du PIB en 2021 (Tableau 3). estimé à 6,1 pour cent du PIB en 2021, reflétant une baisse des recettes intérieures et l’annulation Les recettes publiques totales ont et le report de l’appui budgétaire des bailleurs en considérablement diminué en 2021 en raison d’une raison de désaccords (Figure 8). Hors dons, le déficit baisse du financement extérieur par rapport aux budgétaire est passé de 16 pour cent du PIB en 2021 prévisions. Les dons des bailleurs internationaux à la à 11 pour cent du PIB en 2021, le Gouvernement RCA sont passées de 12,6 pour cent du PIB en 2020 ayant annulé son plan de relance budgétaire suite à 4,9 pour cent du PIB en 2021, ce qui représente 36 à la COVID-19. Au cours du premier semestre pour cent des recettes publiques totales. Les appuis 2021, les recettes intérieures ont augmenté de 4 de la communauté des bailleurs ont été inférieurs à ce pour cent en glissement annuel, principalement qui était attendu en raison des tensions géopolitiques, en raison d’une augmentation des recettes non et de désaccords avec les partenaires internationaux. fiscales. Le blocus du corridor Bangui-Douala qui a Les dons publics ont atteint leur niveau le plus bas limité les activités économiques, combiné à l’impact de la dernière décennie, générant des pressions économique durable de la pandémie sur le commerce budgétaires importantes tout au long de 2021 malgré international, a eu un effet significatif sur les recettes les réductions des dépenses publiques, obligeant le douanières et fiscales qui ont ainsi diminué de Gouvernement à recourir à un financement relais sur 1,3 pour cent, en glissement annuel, au cours du le marché intérieur. Les recettes publiques totales premier semestre 2020. Au second semestre 2020, sont passées de 21,7 pour cent du PIB en 2020 à les recettes intérieures se sont redressées mais ce 13,7 pour cent du PIB en 2021 (Figure 9). Figure 8 : Le solde budgétaire global de la RCA s’est détérioré Figure 9 : Les recettes publiques totales ont augmenté en en 2020. 2020 en raison d’une augmentation des dons publics. Dépenses, solde global et recettes, 2015-2021 Composition des revenus, 2015-2021 Pourcentage du PIB Pourcentage du PIB 30 25 25 20 20 15 15 10 10 5 5 0 -5 0 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 -10 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Recettes directes Taxes sur les biens et services Revenus Dépenses Solde budgétaire Taxes sur le commerce international Recettes non-fiscales Subventions Source : Calculs des services de la Banque mondiale à partir des données du Ministère des Finances et du Budget, du WDI et du MPO. 23 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Les dépenses publiques ont également diminué d’atténuer les pressions budgétaires. De manière de manière significative en 2021, le Gouvernement générale, les dépenses en salaires et traitements ayant mis fin à son plan de relance budgétaire sont passées de 5,8 pour cent du PIB en 2020 à 4,9 suite à la COVID-19 et réduit les dépenses pour pour cent du PIB en 2021. En outre, les dépenses contenir les tensions sur les flux de trésorerie. en capital sont passées de 11,3 pour cent du PIB en Les dépenses publiques totales sont passées de 2020 à 7,5 pour cent du PIB en 2021, principalement 24,9 pour cent du PIB en 2020 à 19,7 pour cent en raison d’une baisse significative des dépenses en du PIB en 2021. Au premier semestre 2021, les capital financées sur ressources extérieures qui sont dépenses publiques ont augmenté de 3,3 pour passées de 9,4 pour cent à 5,3 pour cent du PIB au cent en glissement annuel, les dépenses primaires cours de la même période, représentant 70 pour et d’investissement ayant augmenté. Les dépenses cent du total des dépenses en capital. La gestion des publiques ont encore diminué au cours du second finances publiques s’est améliorée au fil des ans grâce semestre de l’année, le Gouvernement poursuivant à la mise en œuvre de plusieurs réformes publiques des coupes dans les dépenses publiques afin (Encadré 1). Tableau 2 : Opérations financières de l’administration centrale, 2017-25 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 Réel Est. Est. Projections En pourcentage du PIB Recettes totales (et dons) 12,8 16,6 18,3 21,7 13,7 12,3 13,3 14,6 15,6 Recettes fiscales 7,0 8,0 7,8 7,5 6,9 7,2 6,9 7,4 8,0 Impôts sur les biens et services 3,4 4,1 4,1 3,5 3,2 3,2 3,2 3,4 3,7 Impôts sur les bénéfices et l’immobilier 1,2 1,7 1,8 2,0 1,9 2,0 1,9 2,1 2,2 Taxes sur le commerce international 2,4 2,3 2,0 2,0 1,8 2,0 1,8 1,9 2,1 Recettes non fiscales 0,8 0,8 0,9 1,6 1,8 0,6 0,5 1,0 1,0 Dons 5,0 7,8 9,6 12,6 4,9 4,5 5,9 6,2 6,6 Dépenses 13,8 17,6 16,9 24,9 19,7 17,9 17,3 17,1 17,9 Dépenses courantes 9,3 10,2 11,1 13,6 12,3 11,8 11,0 11,0 10,9 Salaires et traitements 4,7 4,8 4,9 5,8 5,5 5,2 4,9 4,7 4,5 Transferts courants 2,0 2,2 2,9 3,8 3,0 3,0 2,6 2,7 2,9 Paiements d’intérêts 0,3 0,4 0,3 0,3 0,3 0,4 0,5 0,7 0,8 Biens et services 2,3 2,8 3,0 3,7 3,5 3,2 3,0 2,9 2,8 Dépenses en capital 4,5 7,4 5,6 11,3 7,5 6,1 5,8 6,1 7,0 Intérieures 0,7 0,8 1,3 1,9 2,3 0,9 0,9 0,9 1,0 Financé par des bailleurs 3,8 6,6 4,3 9,4 5,3 5,2 4,9 5,2 5,9 Solde global (dons inclus) -1,0 -1,0 1,4 -3,3 -6,1 -5,6 -4,0 -2,5 -2,3 Solde primaire intérieur -2,0 -1,7 -3,5 -6,6 -5,2 -9,5 -9,0 -9,4 -10,6 Solde global (base caisse) -2,0 -3,6 -1,0 -4,5 -7,0 -5,8 -4,1 -1,9 -1,7 Financement 2,0 3,6 2,1 0,4 1,5 0,7 1,9 2,5 3,0 Externe (net) 1,0 1,4 0,9 0,6 1,4 0,7 1,8 2,3 2,8 Intérieur (net) 1,0 2,2 1,2 -0,2 0,1 0,0 0,1 0,2 0,2 Source : Autorités de la RCA et services de la Banque mondiale (juin 2022). 24 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Encadré 1 : Le taux d’exécution du budget s’est nettement amélioré grâce aux réformes de la gestion des finances publiques. Sur les 97 réformes de la gestion des finances publiques que le Gouvernement a mises en œuvre sur la période 2017-2021, 28 visaient à améliorer l’exécution du budget, à réduire les dépenses hors budget et à réduire le recours aux procédures de dépenses exceptionnelles, tandis que 19 réformes visaient à soutenir le programme de mobilisation des ressources intérieures du pays (Figure 10). La mise en œuvre de ces réformes a eu des impacts positifs. Par exemple, le taux d’exécution du budget a atteint 85,03 pour cent en 2021, contre 52,6 pour cent en 2017 (Figure 11). Alors que les efforts de réforme de la gestion des finances publiques du Gouvernement doivent être consolidés, l’arrêt ou le ralentissement de la mise en œuvre des réformes budgétaires pourrait freiner la croissance et accroître les risques d’endettement extérieur. Figure 10 : La RCA a mis en œuvre 97 réformes économiques audacieuses au cours des 5 dernières années… Nombre de réformes adoptées, 2017-2021 Exécution et allocation du budget 28 Mobilisation de recettes 19 Système d’information et renforcement institutionnel 15 Promotion de la gouvernance 12 Amélioration du climat des affaires 8 Audit interne/externe et contrôle citoyen 8 Préparaton du budget 4 Autre 3 0 5 10 15 20 25 30 Nombre de réformes Figure 11 : … et leur impact sur l’exécution du budget a été remarquable. Taux d’exécution budgétaire, 2017–2021 Pourcentage (%) 90 80 84.9 85.0 81.8 70 77.3 60 50 40 52.6 30 20 10 0 2017 2018 2019 2020 2021 Source : Estimations du MFMOD et de la Banque mondiale 25 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE La baisse de l’accès au financement des le budget à de sérieux risques et vulnérabilités. Le bailleurs a creusé le déficit global de la RCA et non-décaissement de tous les appuis budgétaires son ratio dette/PIB a augmenté. La dette publique attendus en 2021 a entraîné d’importants problèmes a légèrement augmenté, passant de 44,1 pour cent de trésorerie et a exposé le pays à un éventuel défaut du PIB en 2020 à 47,9 pour cent du PIB en 2021, d’obligations essentielles (précipice budgétaire), tirée par les emprunts publics auprès des banques notamment le paiement des salaires et le service de commerciales pour financer le budget et éviter une la dette. L’émission de 48 milliards XAF (78,5 millions crise budgétaire. La dette intérieure a augmenté, USD) de bons du Trésor (environ 35 pour cent des pour la première fois depuis 2014, passant de 9,4 ressources intérieures totales du pays), la réduction pour cent du PIB en 2020 à 14,0 pour cent en 2021, des dépenses publiques et le recours à l’allocation de tandis que la dette extérieure a diminué au cours de 35 milliards XAF (64 millions USD) en DTS du FMI ont la même période. Contrairement aux autres pays permis à la RCA d’honorer ses obligations essentielles de la CEMAC et à la plupart des pays d’ASS, la dette en matière de dette en 2021. Pour 2022, le budget publique de la RCA était en baisse depuis 2014, mais comprend des dons équivalant à 10,9 pour cent du cette tendance s’est inversée en 2021 en raison de PIB, l’appui budgétaire s’élevant à 3,8 pour cent du la situation budgétaire difficile. Le non-décaissement PIB. Ces dons devraient provenir des partenaires de l’appui budgétaire en 2021 - représentant environ traditionnels de la RCA (tels que le FMI, la Banque 3,7 pour cent du PIB - a poussé le Gouvernement mondiale et l’UE). Selon les projections de trésorerie à rechercher un financement relais sur le marché de la Banque mondiale, l’absence d’appui budgétaire intérieur. pourrait entraîner un déficit de financement de 4,8 pour cent du PIB en 2022. Les pressions en matière Alors que la RCA a échappé à un précipice de flux trésorerie se maintiendront en 2023 en budgétaire en 2021, elle se retrouve dans une l’absence d’appui budgétaire. Malgré les réductions situation budgétaire de plus en plus difficile. Le des dépenses publiques, les projections indiquent budget du pays dépend fortement de l’aide extérieure. que le Gouvernement a peut-être déjà épuisé ses En 2020, les dons représentaient 12,6 pour cent dépôts à la Banque centrale et pourrait être sur la du PIB (58 pour cent des recettes), avec l’appui voie d’un éventuel défaut d’obligations essentielles budgétaire représentant 5,1 pour cent du PIB. Cette (précipice budgétaire), y compris le paiement des dépendance vis-à-vis des ressources externes expose salaires et le service de la dette. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 26 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.1.4 La COVID-19 et les chocs sécuritaires ont aggravé la position extérieure de la RCA. Le déficit du compte courant s’est creusé en coût de la vie. La poursuite de la mise en œuvre de raison des tensions géopolitiques qui ont retardé la nouvelle réglementation du taux de change de la le décaissement des transferts publics. Le déficit BEAC a contribué à maintenir le déficit de la balance du compte courant est passé de 8,5 pour cent du PIB des revenus nets à 0,1 pour cent du PIB en 2021. La en 2020 à 10,6 pour cent du PIB en 2021, le niveau balance commerciale s’est améliorée mais est restée le plus élevé depuis 2015. Cette augmentation est déficitaire à 15,0 pour cent du PIB en 2021, contre principalement due à une forte baisse des transferts 16,8 pour cent du PIB en 2020, principalement en publics, de 6,8 pour cent du PIB en 2020 à 1,9 pour raison d’un rebond des exportations (telles que celles cent du PIB en 2021, les tensions géopolitiques ayant de diamants et de bois) au second semestre 2021 retardé le décaissement de l’appui budgétaire. Les (Figure 12). Dans ce contexte, le déficit du compte transferts privés (c’est-à-dire les envois de fonds) courant de la RCA est resté plus important par rapport ont augmenté de 0,9 point de pourcentage en 2021, à celui de ses pairs en 2021 (Figure 13), selon les reflétant de plus fortes incitations ciblant la diaspora estimations. à aider les ménages locaux à faire face à la hausse du Figure 12 : La baisse des transferts publics a contribué à Figure 13 : … le déficit du compte courant de la RCA est resté creuser le déficit du compte courant… le plus important parmi les pays pairs. Composition du solde du compte courant, 2015-2021 Solde du compte courant Pourcentage du PIB Pourcentage du PIB 20 0 15 -2 10 -4 5 -6 0 -8 -5 -10 -10 -12 -15 -14 -20 -16 -25 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 -18 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 Solde commercial Services Internet Revenu net Transferts nets ASS RCA CEMAC FCV Solde du compte courant Source : Estimations WDI, FMI-WEO et Banque mondiale. 27 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE En 2021, le déficit du compte courant a été plus de 83,3 pour cent la même année. En conséquence, que compensé par les entrées de capitaux, ce qui le compte financier est passé d’un déficit de 0,2 pour a entraîné un excédent modéré de la balance des cent du PIB en 2020 à un excédent de 0,1 pour cent paiements. Le solde de capital s’est rétréci de 7,5 en 2021. Cette amélioration a entrainé un excédent pour cent du PIB en 2020 à 4,9 pour cent du PIB en modéré de la balance des paiements, qui a atteint 2021, reflétant une tendance à la baisse des dons 0,5 pour cent du PIB en 2021, ce qui représente pour projets. Malgré les incertitudes persistantes au une amélioration par rapport au déficit de 1,2 pour niveau mondial à cause de la pandémie de COVID-19 cent du PIB en 2020 (Figure 14). Dans ce contexte, et un environnement sécuritaire relativement stable, la contribution de la RCA aux réserves de change les investissements directs étrangers ont augmenté régionales s’est améliorée et a atteint 4,5 mois de 0,1 point de pourcentage en 2021, tandis que les d’importations en 2021, contre 3,5 mois en 2020 investissements nets du secteur public ont diminué (Figure 15). Figure 14 : L’amélioration du compte financier s’est traduite Figure 15 : Les envois de fonds personnels restent faibles, par un excédent modéré de la balance des paiements. jouant un rôle marginal dans la balance des paiements. Balance des paiements, 2015–2021 Entrées d’envois de fonds personnels, 2011-2020 Pourcentage du PIB Pourcentage du PIB 10 10 9 5 8 0 7 4,52 4,20 6 3,90 -5 5 0,36 0,37 4 0,38 -10 3 2 4,05 4,34 3,75 -15 2015 2016 2017 2018 2019 2020 2021 1 0 Compte courant Compte de capital 2011-2013 2014-2017 2018-2020 Compte financier BdP ASS RCA CEMAC FCV Source : BEAC, WDI, FMI-WEO et estimations de la Banque mondiale. 28 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.2 Perspectives économiques et risques : croissance positive mais très vulnérable aux risques de retournement La guerre en Ukraine, associée aux effets persistants de la pandémie de COVID-19, a entravé la reprise économique mondiale3. L’impact de la guerre en Ukraine sur le commerce mondial et les marchés des produits de base et financiers contribuera à un ralentissement significatif de la croissance économique mondiale. Les prix des biens et des services devraient rester élevés, sous l’effet de la hausse des prix des produits de base induite par la guerre et de l’intensification des pressions sur les prix. La production économique mondiale devrait croître de 3,6 pour cent en 2022 et 2023, soit de 0,8 et 0,2 point de pourcentage, respectivement, ce qui est en dessous des projections établies avant l’invasion de l’Ukraine par la Russie. La plus grande incertitude devrait affecter la demande et le commerce mondiaux. Dans les économies émergentes et en développement, la croissance économique devrait être de 3,8 pour cent en 2022, contre 6,8 pour cent en 2021. La croissance du PIB réel en Chine, l’un des principaux partenaires commerciaux de la RCA, devrait ralentir à 2,8 pour cent, l’émergence de variants plus transmissibles de la COVID combinée à la stratégie du pays de zéro cas pouvant freiner la consommation privée. La guerre en Ukraine, la pandémie de COVID-19 et la faiblesse de l’accès aux vaccins, ainsi que le resserrement monétaire et la volatilité des marchés financiers façonneront probablement les perspectives économiques mondiales à court terme. De nouvelles vagues de COVID-19 en Chine ont contraint le pays à imposer un nouvel ensemble de mesures d’endiguement, ce qui risque de ralentir la reprise économique mondiale. 3 World Bank. 2022. Global Economic Prospects, June 2022. Washington DC: World Bank. doi:10.1596/978-1-4648-1665-9 29 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.2.1 Les perspectives économiques de la RCA sont positives mais très vulnérables aux risques de retournement Les perspectives économiques de la RCA et le faible accès aux services publics de base, en sont positives mais très vulnérables risque de particulier dans les zones reculées, resteront des retournement. Après la stagnation économique préoccupations majeures. La faible diversification attendue en 2022 pour cause de pénuries de économique et la fragilité de l’environnement carburant, l’économie du pays devrait croître de 2,7 sécuritaire, ainsi que la guerre en Ukraine et une pour cent entre 2023-25 ( Tableau 3). Comme la éventuelle nouvelle vague d’une souche plus croissance économique devrait rester légèrement contagieuse de COVID-19, constituent des risques supérieure à la croissance démographique moyenne importants qui façonneront probablement les de 2,3 pour cent sur cette même période, le PIB réel prévisions à court et moyen termes. L’inflation devrait par habitant devrait se relever après 2022, bien qu’à rester largement au-dessus du plafond régional de 3 un taux marginal. Plus de 3,5 millions de personnes pour cent en 2022, avant de baisser progressivement devraient continuer à vivre dans l’extrême pauvreté à moyen terme. sur la période 2022-2025, et l’insécurité alimentaire Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 30 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Tableau 3 : Projections macro-budgétaires et financières à moyen terme, 2017–25 2017 2018 2019 2020 2021 2022 2023 2024 2025 Réel Est. Est. Projections En pourcentage du PIB Croissance économique, revenus et prix PIB réel 4,5 3,7 3,0 1,0 1,0 0,0 3,0 3,8 3,8 PIB réel par habitant 3,2 2,1 1,4 -0,9 -0,9 -2,2 0,8 1,5 1,5 PIB réel par habitant (USD) 390 398 404 400 396 363 366 371 377 Déflateur du PIB 6,5 1,4 2,3 1,9 3,2 6,7 6,6 3,0 2,7 IPC (moyenne annuelle) 4,1 1,6 2,8 2,3 3,8 5,8 6,3 2,7 2,8 Secteur extérieur Volume des importations de marchandises -2,0 -0,7 10,4 1,7 -11,3 7,0 -4,7 1,0 7,2 Volume des exportations de marchandises 42,5 10,3 -6,7 9,4 -5,3 -6,5 8,2 3,6 16,3 Termes de l’échange (détérioration) -18,5 +12,4 13,8 400 396 -17,5 15,3 8,2 14,4 % du PIB, sauf indication contraire Comptes fiscaux Dépenses 13,8 17,6 16,7 24,9 19,7 17,9 17,3 17,1 17,9 Recettes et dons 12,8 16,6 18,4 21,7 13,7 12,3 13,3 14,6 15,6 Solde budgétaire global (dons inclus) -1,0 -1,0 1,4 -3,3 -7,1 -5,6 -4,0 -2,5 -2,3 Variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire Comptes monétaires sélectionnés Monnaie de base 10,3 14,0 8,9 11,5 14,6 6,2 9,8 7,0 6,4 Crédit à l’économie 1,4 11,5 -1,0 8,5 14,6 -2,2 9,5 8,0 5,3 % du PIB, sauf indication contraire Balance des paiements Solde du compte courant -7,8 -8,0 -4,8 -8,8 -10,8 -13,2 -8,9 -7,2 -7,0 Importations de biens et services -33,8 -35,2 -35,8 35,8 31,8 33,1 30,6 29,8 30,7 Exportations de biens et services 16,6 16,6 16,4 15,8 14,8 12,4 13,0 13,0 14,5 Investissement direct étranger 0,8 0,8 1,1 0,1 0,6 0,2 1,0 1,4 1,4 % du PIB, sauf indication contraire Dette publique Total gouvernement (fin de période) 50,3 50,0 47,2 44,0 48,4 52,1 49,5 49,3 49,3 dont Dette extérieure 35,4 37,2 36,1 34,7 34,4 34,4 30,3 29,6 29,0 Note PIB nominal (millions USD) 1979,7 2181,4 2180,2 2288 2384 2448 2688 2875 3066 Source : Autorités de la RCA et services de la Banque mondiale (juin 2022). 31 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Du côté de l’offre, les améliorations de La politique monétaire devrait rester l’environnement sécuritaire devraient soutenir accommodante au niveau régional, mais la loi une augmentation de la production agricole relative au Bitcoin suscite des incertitudes. Dès le et industrielle. Les activités liées au bois et à la début de la pandémie, la BEAC a adopté une position foresterie devraient connaitre une croissance à plus accommodante, notamment en réduisant son mesure que les cours internationaux augmentent taux directeur de 25 points de base en mars 2020 et que les autorités continuent de résoudre les pour encourager les banques commerciales à prêter tensions au sein des industries. Les exportations au secteur privé. Ces mesures ont été adéquates, formelles de diamants devraient reprendre à moyen permettant d’éviter toute contrainte de liquidité et terme avec l’amélioration de la sécurité dans les soutenant les activités économiques pendant la crise. zones de production. Le secteur de la construction De même, le Comité de politique monétaire de la devrait continuer à se développer dans la capitale, BEAC a décidé de relever son principal taux directeur Bangui, la demande de logements se maintenant à de 3,5 pour cent à 4,0 pour cent le 28 mars 2022 afin un niveau élevé. Le faible accès à une alimentation d’aider à atténuer l’impact de la guerre en Ukraine sur électrique fiable freine la dynamique positive du l’économie des pays membres. Le crédit intérieur à secteur industriel et son potentiel à contribuer l’économie devrait augmenter de 9 pour cent à moyen plus significativement à la croissance économique. terme, dans l’hypothèse du maintien de la stabilité Les réformes politiques en matière de production, et de la sécurité dans le pays. L’adoption du Bitcoin de transport et d’accès fiable à l’énergie seront comme monnaie ayant cours légal crée cependant essentielles pour accroître l’approvisionnement des incertitudes quant à la stabilité financière. La loi énergétique et créer les conditions nécessaires au relative au Bitcoin soulève des inquiétudes critiques développement d’industries dynamiques. Après quant à son impact sur la stabilité et l’intégrité s’être contracté pendant la pandémie de COVID-19, financières, ainsi qu’aux risques liés aux transactions le secteur des services devrait se redresser à court de crypto-monnaie, tels que la volatilité extrême des terme, avec une croissance moyenne de 2,7 pour cent prix, la crypto-criminalité, le blanchiment d’argent, en 2022-2025, tirée par les télécommunications et le financement du terrorisme et l’évasion fiscale. les services de restauration et d’hôtellerie. En outre, la loi crée des risques opérationnels et de solvabilité substantielle si les banques commerciales Du côté de la demande, la consommation privée sont exposées à des transactions en crypto-monnaie. devrait continuer à tirer la croissance économique. Il est nécessaire de mener un travail important Le dynamisme de la consommation privée devrait de développement d’une législation secondaire continuer à soutenir la reprise économique de la RCA, appropriée pour rendre la loi applicable, si la RCA à condition qu’il y ait stabilité et sécurité à moyen décide d’aller de l’avant avec cette loi. La loi adoptée terme. L’adoption par les autorités d’un plan global est relativement vague et n’encadre pas des aspects assorti de délais pour apurer les arriérés intérieurs critiques tels que  : (i) les exigences et conditions renforcera probablement la consommation privée, d’agrément pour les différents intermédiaires ; (ii) le qui devrait ainsi augmenter de 4,7 pour cent en fonctionnement et la gouvernance du fonds fiduciaire 2022 (contre seulement 0,7 pour cent en 2021), et la garantie de convertibilité ; (iii) le rôle de la BEAC avant d’atteindre une moyenne de 5,0 pour cent sur et de la COBAC, le cas échéant ; et (iv) les exigences la période 2023-2025. Cependant, des réformes réglementaires, la supervision et la protection des favorables aux entreprises, axées en particulier sur clients. Ces aspects devront être soigneusement l’amélioration du système judiciaire, la protection pris en compte dans le droit dérivé si les autorités des investisseurs minoritaires et la facilitation de décident d’aller de l’avant avec la loi. l’obtention de permis de construire pour attirer les investisseurs, sont toujours indispensables pour favoriser le développement du secteur privé. 32 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Le solde budgétaire global devrait rester dette publique devrait continuer à diminuer et rester déficitaire à moyen terme, le financement des viable, à condition que le Gouvernement adopte une bailleurs diminuant progressivement sans être approche prudente en ce qui concerne les nouveaux compensé par les recettes intérieures. Le solde emprunts. Des réformes structurelles telles que la budgétaire, dons compris, devrait s’améliorer, passant rationalisation des dépenses publiques, la limitation d’un déficit de 6,1 pour cent du PIB en 2021 à un des exonérations et l’amélioration de l’efficacité de déficit de 4,8 pour cent du PIB en 2022 (Tableau 2), le l’administration fiscale et des investissements publics Gouvernement procédant à d’importants ajustements seront essentielles pour contenir le déficit budgétaire budgétaires compte tenu du non-décaissement de et créer des réserves budgétaires à moyen terme. l’appui budgétaire en 2022 (Encadré 1). À moyen terme, le solde budgétaire devrait également Le solde du compte courant devrait s’améliorer s’améliorer à mesure que l’économie se redresse à moyen terme mais rester structurellement progressivement et que les réformes stimulent le déficitaire. Le déficit du compte courant devrait recouvrement des recettes intérieures. Les dépenses se réduire de 10,8 pour cent du PIB en 2021 à 6,8 en capital devraient augmenter légèrement, passant pour cent du PIB en 2022, reflétant une amélioration de 7,5 pour cent du PIB en 2021 à 7,7 pour cent de la balance commerciale. À moyen terme, le du PIB en 2022, avant de s’établir à une moyenne déficit du compte de capital devrait s’améliorer de 7,2 pour cent du PIB à court terme. Du côté des et atteindre une moyenne de 5,6 pour cent du PIB recettes, les dons publics devraient passer d’un pic dans la mesure où la reprise économique mondiale de 12,6 pour cent du PIB en 2020 à une moyenne stimulera probablement les exportations tandis que de 7 pour cent du PIB sur la période 2022–2025. La les importations devraient baisser. Encadré 2 : Vers un précipice budgétaire : impact socioéconomique et sécuritaire aux niveaux national et régional Le pays dispose de peu d’options pour répondre à la crise budgétaire. Pour financer ses besoins de financement, le Gouvernement devra mobiliser davantage de recettes fiscales intérieures, réduire les dépenses publiques, utiliser l’allocation restante en DTS et/ou emprunter sur le marché intérieur : ↗ Mobilisation de ressources intérieures supplémentaires. La performance de la RCA en matière de recettes est en deçà des attentes en 2022, ce qui contribue aux tensions sur les flux de trésorerie. Le Gouvernement renforce ses efforts pour améliorer la mobilisation des ressources intérieures, mais ces efforts mettront du temps à produire des résultats concrets. ↗ Coupes supplémentaires dans les dépenses publiques. Partant de l’hypothèse que la réduction des salaires et du service de la dette aura un coût important pour le Gouvernement des points de vue social et politique, l’ajustement budgétaire nécessaire pourrait reposer sur le report des obligations de paiement des exercices précédents et du remboursement des arriérés intérieurs, le gel des transferts, des 33 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE subventions et des investissements publics et la réduction des dépenses en biens et services. Dans ce scénario, les arriérés intérieurs (tels que les pensions, les salaires et les arriérés commerciaux) pourraient pratiquement doubler et atteindre environ 2 pour cent du PIB, et les réductions des transferts et des subventions non prioritaires affecteraient probablement le fonctionnement des principales unités administratives fournissant des services à la population. Les fournisseurs et les ménages aux prises avec des contraintes financières seront probablement ceux qui souffriront le plus de ces ajustements de dépenses. ↗ Utilisation de toutes les allocations de DTS restantes. Pour atténuer les tensions sur les flux de trésorerie, la RCA pourrait utiliser son allocation restante de DTS d’un montant de 29 milliards XAF (1,9 pour cent du PIB) en 2022. Cela pourrait apporter un répit temporaire et permettre à la RCA d’éviter de réduire les dépenses en biens et services et de geler les investissements publics. Cependant, cette option en elle-même ne serait pas suffisante et il serait difficile d’éviter d’avoir à reporter les obligations de paiement et le remboursement des arriérés et de devoir réduire les dépenses de transferts et de subventions. L’utilisation des DTS entraîne des coûts pour le Trésor, étant donné que les fonds seront rétrocédés au Gouvernement par la banque centrale. De plus, ce scénario impliquerait que la RCA épuiserait toute son allocation de DTS cette année calendaire, ce qui soulèverait des inquiétudes importantes quant à la viabilité budgétaire si aucun appui budgétaire n’est toujours disponible et laisserait le pays sans réserve budgétaire. ↗ Emprunter sur le marché intérieur. Le plus grand recours à des emprunts coûteux sur le marché intérieur pourrait nuire à la viabilité de la dette, le pays étant déjà exposé à un risque élevé de surendettement. De plus, la capacité du Gouvernement à emprunter sur le marché intérieur reste incertaine compte tenu de la détérioration de la solvabilité souveraine en l’absence de l’appui des bailleurs. Le service de la dette représentant déjà 35 pour cent des recettes intérieures à moyen terme en moyenne, tout emprunt supplémentaire obligera le Gouvernement à faire des arbitrages vis-à- vis d’autres dépenses courantes essentielles telles que les transferts et subventions prioritaires et le recrutement de personnel supplémentaire qui est indispensable dans les secteurs de la santé et de l’éducation. Au cas où le précipice budgétaire se matérialiserait, cela pourrait avoir des effets de contagion au niveau régional et entrainer des risques de troubles sociaux. Plus de 7 Centrafricains sur 10 vivent dans l’extrême pauvreté et environ la moitié de la population est confrontée à une insécurité alimentaire aiguë. Une détérioration des dépenses sociales pourrait plonger davantage de ménages dans la pauvreté et l’insécurité alimentaire. Les troubles sociaux pourraient encore être alimentés par les frustrations suscitées par l’incapacité du Gouvernement à régler les salaires et les arriérés intérieurs. Cependant, l’incapacité du Gouvernement à respecter ses obligations pourrait compromettre les gains de sécurité, comme cela a été le cas dans le passé, provoquant une détérioration de la sécurité. Une telle détérioration de la situation sécuritaire et socioéconomique en RCA pourrait déborder sur les pays voisins. Après la guerre civile de 2013, le nombre de Centrafricains cherchant refuge dans les pays voisins a atteint son plus haut niveau à 15 pour cent de la population en décembre 2016, avant de diminuer progressivement. L’insécurité dans les zones frontalières internationales, en particulier dans les zones frontalières du Tchad et du Soudan, pourrait éventuellement s’étendre à ces pays voisins. 34 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 1.2.2 Risques et incertitudes croissants Les risques pesant sur les perspectives restent de la violence pourrait avoir un impact négatif grave élevés. Une dégradation de la situation sécuritaire, sur les résultats socioéconomiques et budgétaires les incertitudes créées par l’adoption de la loi relative parce qu’elle pourrait retarder l’élan d’adoption des au Bitcoin et la baisse de la disposition des bailleurs réformes économiques et sociales (Encadré 1)4. De pour l’appui budgétaire représentent les principaux même, l’adoption de la loi relative au Bitcoin ainsi que risques pesant sur les perspectives économiques le manque d’appui budgétaire menacent la stabilité à court et moyen termes. La reprise des conflits et budgétaire, financière et monétaire. Encadré 3 : Les crises se produisant simultanément pourrait retarder la reprise économique. La guerre en Ukraine affecte directement et indirectement l’économie de la RCA. L’impact direct proviendra de la hausse des cours des produits de base (en particulier les prix des denrées alimentaires et du pétrole) et l’impact indirect d’une moindre disposition des bailleurs à apporter un appui budgétaire.Plusieurs désaccords avec les partenaires internationaux ont déjà poussé les bailleurs à annuler ou reporter leur appui budgétaire. La guerre en Ukraine et le sentiment antirusse croissant exacerberont probablement les tensions géopolitiques existantes et pousseront les bailleurs à retirer leur appui budgétaire. Si cela se matérialise, la RCA épuiserait tous les tampons possibles d’ici le début de 2023, ce qui pourrait déclencher une forte détérioration de la situation sécuritaire et situation humanitaire déjà précaire et causerait alors des difficultés importantes à la population. Si la guerre s’enlise, cela pourrait entrainer le retrait ou la réduction des mercenaires russes, ce qui risque de compromettre les acquis récents en matière de sécurité. Prix des produits de base et perturbations commerciales. La guerre en Ukraine et le ralentissement attendu de l’économie chinoise s’ajoutent aux vents contraires existants face à la reprise mondiale dans la mesure où ils perturbent davantage les chaînes d’approvisionnement. Les perturbations des chaînes d’approvisionnement causées par la guerre en Ukraine entraînent des pénuries d’approvisionnement et des augmentations des prix des produits de base sur les marchés internationaux, notamment en ce qui concerne le pétrole et les produits alimentaires essentiels. Si les importations directes en provenance d’Ukraine et de Russie représentent moins de 1 pour cent des importations totales de la RCA, les importations de produits pétroliers et alimentaires (céréales) représentent environ 50 pour cent des importations totales. Le prix moyen des produits alimentaires a augmenté de 12,5 pour cent sur un an en avril 2022. Le 4 Entre 2017 et 2021, la RCA a adopté plus de 97 réformes économiques soutenues par les partenaires au développement. 35 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE sorgho (78,1 pour cent), l’arachide (23,6 pour cent), la viande bovine (9,1 pour cent), le riz (7,7 pour cent), les haricots blancs (5,5 pour cent), le palmier à huile (3,3 pour cent) et le maïs (3,1 pour cent) ont connu des hausses de prix importantes en avril 2022. L’interdiction d’exportation de certains produits essentiels (y compris le riz) imposée par le Gouvernement camerounais le 22 avril 2022, ainsi que les effets persistants de la guerre en Ukraine, devraient exacerber les pressions inflationnistes préexistantes et les problèmes d’insécurité alimentaire en RCA où 43 pour cent de la population vit déjà en situation d’insécurité alimentaire aiguë. Cette situation continuera d’éroder le pouvoir d’achat des Centrafricains et nuira nettement plus aux plus vulnérables. Révision à la baisse des projections de croissance. La consommation privée et les investissements devraient subir les contrecoups de la guerre en Ukraine et des plans d’ajustement budgétaire du Gouvernement. En conséquence, les projections de croissance à moyen terme ont été revues à la baisse. La croissance du PIB réel est désormais prévue à 1,5 pour cent pour 2022, contre 3,5 pour cent (en janvier 2022). Les incertitudes concernant l’appui des bailleurs à court terme et l’impact de l’ajustement budgétaire continu sur les activités économiques sont les principaux facteurs expliquant la révision à la baisse des prévisions de croissance pour 2023 et 2024. Figure 16 : Projection des impacts des crises qui se produisent simultanément sur la croissance du PIB réel Pourcentage (%) 5 4 3 2 1 0 2019 2020 2021 2022 2023 2024 Post guerre d’Ukraine Avant guerre Source : Projections des services de la Banque mondiale. 36 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Le regain d’insécurité pourrait empêcher En l’absence d’appui budgétaire, les arbitrages la RCA de s’attaquer aux causes profondes de budgétaires seront difficiles et coûteux quelles la crise de 2013 et d’ouvrir la voie qui sortirait que soient les options de financement . Le le pays de la fragilité. Il pourrait déclencher le Gouvernement accélère ses efforts pour améliorer déplacement de personnes ; perturber la production la mobilisation des ressources intérieures, mais et l’approvisionnement en denrées alimentaires ceux-ci mettront du temps à se concrétiser et seront essentielles  ; contribuer à la pression des prix sur compromis si la croissance ralentit comme prévu en les marchés intérieurs ; et aggraver la situation déjà raison de chocs externes. En fait, le Gouvernement alarmante en matière de sécurité alimentaire. Les devra encore réduire ses dépenses, ce qui ralentira pressions inflationnistes pourraient éroder davantage davantage la croissance économique. La réduction le pouvoir d’achat des ménages, augmentant le des dépenses publiques, comme vue en 2021, est risque que des milliers de personnes sombrent dans socialement et économiquement coûteuse et sous- l’extrême pauvreté. Il est probable que les ménages optimale compte tenu de l’ampleur des besoins vulnérables, principalement ceux vivant au jour le croissants de la population et de l’importance jour, soient ceux qui vont le plus souffrir des pressions de soutenir la reprise économique. Une nouvelle sur les prix. En outre, les plus grandes incertitudes augmentation des emprunts intérieurs sera résultant du regain de violence pourraient nuire aux coûteuse et pourrait être compromise si la position investissements du secteur privé en raison de la prime du Gouvernement se détériorait. Elle amènerait de risque et des coûts d’investissement élevés du le surendettement à des niveaux non viables. La pays, et auraient ainsi un impact potentiel important capacité du Gouvernement à emprunter sur le sur la création d’emplois et la reprise économique. marché intérieur reste incertaine compte tenu de la détérioration de la solvabilité souveraine en l’absence de l’appui des bailleurs. Enfin, la pleine utilisation de tous les DTS restants pourrait éviter un effondrement en 2022 mais laisserait le pays sans filet de sécurité en 2023. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 37 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Encadré 4 : La loi sur les crypto-monnaies en RCA et ses éventuelles retombées régionales dans la CEMAC La République centrafricaine est le deuxième pays au monde après le Salvador à faire officiellement du Bitcoin une monnaie ayant cours légal. L’adoption de la loi centrafricaine sur les crypto-monnaies a établi le cadre juridique de l’utilisation du Bitcoin. Cependant, à ce stade, la loi reste muette sur la manière dont les transactions de crypto-monnaie entre agents privés se dérouleront dans les faits. Les effets immédiats de cette loi sur la macroéconomie de la RCA, y compris l’inclusion financière, et sur la gestion globale des finances publiques restent incertains. Cependant, il existe de fortes similitudes avec la loi sur la crypto-monnaie adoptée par le Salvador, ce qui pourrait offrir une compréhension préliminaire. Par exemple, comme la loi du Salvador, la loi sur les crypto-monnaies de la RCA dispose que les Bitcoins peuvent être acceptés comme moyen de paiement pour des biens et des services, mais également utilisés pour acquitter des dettes dans toute transaction. De plus, la loi reconnaît que les impôts peuvent être payés en crypto-monnaie et que toutes les obligations de paiement, y compris celles précédant l’adoption de la loi (exprimées en USD et toute autre devise) peuvent être payées en crypto-monnaies. En ce qui concerne la convertibilité de la crypto-monnaie, la loi souligne que le Gouvernement mettra en place un fonds pour assurer la convertibilité entre Bitcoin et le Franc CFA (XAF), mais le mécanisme ne précise pas le montant que le Gouvernement s’est engagé à mettre dans ce fonds et comment cela fonctionnera dans les faits. Malgré le décaissement des allocations de DTS du FMI, le gel de l’appui budgétaire des bailleurs n’a laissé au pays d’autre choix que de compter sur un financement relais pour couvrir le déficit. Cependant, le coût des emprunts intérieurs est élevé et pourrait représenter une source importante de vulnérabilité de la dette à moyen terme. Les retombées régionales de l’adoption du Bitcoin comme monnaie ayant cours légal en RCA pourraient nuire à la solidité financière de la CEMAC, compte tenu du dispositif monétaire commun et des liens financiers existants. Selon le dispositif de politique monétaire dans la CEMAC, la BEAC - la Banque centrale régionale, a le privilège exclusif d’émettre des billets de banque, qui ont cours légal dans les États membres de la communauté (voir la convention CEMAC sous son article 2, Titre II et les statuts de la BEAC). Par conséquent, l’adoption de cette loi pourrait avoir de graves répercussions négatives sur l’inclusion financière, la stabilité financière, la protection des consommateurs, le blanchiment d’argent et les passifs fiscaux éventuels dans la région. Par exemple, le niveau d’inclusion financière en RCA reste faible à seulement 13 pour cent tandis que l’infrastructure numérique et de réseau est limitée. En conséquence, l’adoption du Bitcoin comme monnaie ayant cours légal pourrait saper les efforts régionaux en cours pour développer les écosystèmes de l’argent mobile et des paiements numériques, qui sont essentiels et se sont avérés efficaces dans 38 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE le renforcement de l’inclusion financière dans de nombreux pays. De plus, en cas d’adoption plus large du Bitcoin par les agents privés, cela pourrait entraver le taux de dépôt et la base des banques commerciales, minant la capacité de celles-ci à jouer leur rôle d’intermédiaires financiers. En outre, il pourrait y avoir de fortes implications pour la solvabilité et le profil de risque opérationnel des banques commerciales si elles finissent par s’exposer davantage à l’achat de cryptoactifs compte tenu de la forte volatilité de ce type d’actifs. La fluctuation des prix des cryptoactifs pourrait poser des défis importants dans la conduite de la politique monétaire, par son impact en termes de désancrage des prévisions d’inflation, surtout si une part élevée des transactions entre agents privés de la CEMAC est réalisée en Bitcoin. La vulnérabilité budgétaire constitue également une préoccupation majeure, étant donné que la convertibilité garantie exposera le Gouvernement à des risques budgétaires. Alors que des pays tels que la Chine et de nombreux autres pays émergents ont pris de nouvelles mesures pour réglementer l’achat et la vente de crypto-monnaies, aucun d’entre eux n’a accordé le statut de monnaie ayant cours légal pour utilisation comme moyen de paiement. D’autres pays, dont la Chine, le Nigéria et la Turquie, ont même interdit leur utilisation pour les transactions économiques et financières. La forte dépendance du pays à l’égard de économiques de la RCA. La hausse des cours des l’aide étrangère reste une source majeure de produits de base, principalement du pétrole et des vulnérabilité . L’accès continu aux ressources céréales, devrait affecter directement la RCA. En extérieures constitue un élément essentiel de la tant que pays enclavé et importateur de pétrole, stabilité et du redressement économique de la RCA, la hausse des cours du pétrole devrait peser sur la et le financement extérieur représentait 66 pour cent facture des importations de la RCA et entrainer une des recettes publiques totales en 2020 en moyenne, détérioration de la position extérieure. L’impact sur ce qui démontre le rôle que les des partenaires au le déficit budgétaire pourrait être sans précédent développement ont à jouer pour aider le pays à surtout si la guerre de la Russie en Ukraine s’enlise sortir du piège de la fragilité. Dans ce contexte, le et que la RCA continue de geler les prix de l’essence non-décaissement attendu de l’appui budgétaire à la pompe5. La hausse des prix internationaux des en 2021-22 a affaibli la situation budgétaire et céréales (blé) pourrait entraîner une augmentation extérieure du pays et ses perspectives de croissance des prix intérieurs de la farine et du pain, contribuant économique. Afin de réduire sa vulnérabilité aux ainsi aux pressions sur les prix alimentaires flux d’aide internationale, la RCA doit renforcer le intérieurs. En l’absence de substituts alimentaires recouvrement des recettes intérieures, améliorer la nationaux, l’inflation pourrait continuer à s’accélérer gestion des ressources naturelles et privilégier les et dépasser le plafond régional de 3 pour cent. investissements productifs. L’impact indirect de l’invasion de l’Ukraine par la Russie sur les perspectives économiques de la La guerre en Ukraine, ainsi que les sanctions RCA pourrait se traduire par une diminution de la mondiales visant la Russie et la Biélorussie, confiance des bailleurs de fonds et une réduction pourraient avoir un impact négatif les perspectives des appuis financiers extérieurs.. Selon le projet de 5 Pour réduire la répercussion directe des prix internationaux du pétrole sur les prix intérieurs, la RCA a mis en place des mesures de soutien aux importateurs de produits pétroliers sur la ligne budgétaire « soutien/restitution ». 39 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE loi de finances 2022, l’appui budgétaire des bailleurs participé au comité préparatoire, bien que certaines de fonds devrait représenter 13,1 pour cent des de ses leaders et partis politiques aient enfreint recettes publiques totales (2,6 pour cent du PIB) la consigne et y aient participé. Les groupes armés en 2022. L’absence d’appui budgétaire extérieur n’avaient pas été invités au Dialogue Républicain, ce pourrait empêcher le Gouvernement de respecter qui a suscité une controverse, étant donné que leurs ses engagements intérieurs, ce qui entraînerait une problèmes continueraient à être traités dans le cadre hausse de l’accumulation des arriérés intérieurs et des initiatives de paix existantes. La société civile a extérieurs, avec potentiellement un risque de non- participé activement, et de nombreuses organisations paiement des salaires des fonctionnaires à terme. ont noté la franchise du dialogue tout en manifestant Cela pourrait provoquer des troubles sociaux et leur déception face au boycott de l’opposition. La mettre en péril des années de progrès en matière de mise en œuvre réussie des recommandations du réduction de la pauvreté. dialogue politique pourrait contribuer à améliorer le climat politique et l’environnement sécuritaire. Dans Si la situation sécuritaire s’est stabilisée, les le contexte de crises qui se produisent simultanément violations des droits de l’homme persistent. Avec et d’incertitude mondiale, les priorités politiques l’appui d’un soutien bilatéral, notamment du groupe devraient viser avant tout à amortir l’impact de ces de sécurité privé russe Wagner, le Gouvernement chocs et sur mettre en œuvre de réformes permettant a pu repousser la Coalition des patriotes pour le de préserver la reprise économique à moyen terme changement, dirigée par l’ex-président Bozizé, (Tableau 4). qui a tenté de renverser le président Touadéra après sa victoire électorale en décembre 2020. En début 2022, la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation en République centrafricaine a indiqué que 72 pour cent du territoire était désormais sous le contrôle du Gouvernement. Les groupes armés ont été affaiblis, se sont désintégrés et ont subi une certaine attrition grâce au désarmement volontaire, tandis que leurs dirigeants ont fui le pays. Les combats se déroulent principalement autour des sites d’extraction d’or et de diamants, où les intérêts commerciaux des groupes armés s’opposent aux forces gouvernementales et aux alliés issus du groupe Wagner. Toutes les parties au conflit commettent des violations des droits de l’homme, la tendance à la violence aveugle contre certains groupes ethniques étant particulièrement préoccupante. La mise en œuvre réussie des recommandations du Dialogue Républicain offre des perspectives positives. Le Dialogue s’est déroulé du 21 au 27 mars avec quelque 500 participants qui ont formulé 600 recommandations portant sur des questions de sécurité, de société, d’économie et de gouvernance. L’opposition politique a annoncé son boycott de cette consultation la veille de son lancement, après avoir 40 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Tableau 4 : Priorités politiques pour réduire les déséquilibres macroéconomiques et soutenir une reprise solide Domaine Priorités immédiates Priorités à court terme (3 à 6 prochains mois) (6 à 18 prochains mois) Sécurité • • et Amortir l’impact des crises qui se produisent simultanément Accélérer le dialogue politique. Mettre en œuvre protection sur les plus vulnérables. Fournir un appui de crise bien ciblé les recommandations du Dialogue Républicain et sociale aux ménages vulnérables affectés par la hausse des prix des poursuivre la mise en œuvre de l’Accord Politique pour denrées alimentaires et du carburant. Dans le contexte d’une la Paix et la Réconciliation de 2019 ou l’actualiser à la faible marge de manœuvre budgétaire, tous les programmes lumière des évolutions récentes pour garantir un retour de filets de sécurité sociale devraient être renforcés par un durable de la sécurité et de la paix. meilleur ciblage des bénéficiaires et des liens avec les activités productives et les programmes sociaux. Fiscal • • Faire face aux tensions de trésorerie sans aggraver la Accroître l’efficacité des dépenses publiques et vulnérabilité de la dette. Le Gouvernement doit se concentrer renforcer la redevabilité. Les projets d’investissement sur les sources d’emprunt et de financement concessionnelles. public doivent être exécutés de manière efficace et L’échange de la dette intérieure à taux d’intérêt élevé contre transparente, en veillant à les définir, les élaborer et les des prêts extérieurs hautement concessionnels pourrait réduire prioriser de manière rigoureuse, à bien gérer les risques les coûts associés aux emprunts intérieurs onéreux. Une et à les intégrer dans les stratégies à moyen terme et combinaison équilibrée d’emprunts intérieurs et extérieurs les cadres de financement. pourrait atténuer les risques liés aux coûts d’intérêt et à la • volatilité des taux de change. Renforcer la mobilisation des ressources intérieures, • notamment en assurant le suivi de la mise en œuvre du Améliorer la gestion de la trésorerie pour prévenir l’accumulation Décret n° 22.087 sur l’interconnexion de eDouane et de de nouveaux arriérés en : (i) conditionnant le déblocage des SYDONIA, en particulier le rapprochement mensuel des allocations budgétaires trimestrielles à la disponibilité de données d’import-export. recettes ; et (ii) améliorant la gestion financière dans les ministères, départements et agences avec le déploiement de responsables du budget et de personnel d’audit interne au sein de ces entités. • Réduire au minimum les incertitudes et les risques fiscaux et financiers liés à l’adoption de Bitcoin comme monnaie ayant cours légal en se conformant rigoureusement aux orientations données par les institutions monétaires et financières régionales. Secteur • • privé et Remédier à la pénurie régulière de carburant par : Harmoniser les procédures commerciales et supprimer commerce (i) l’augmentation de la capacité de stockage et les les mesures non tarifaires dans la Communauté réserves pétrolières ; et (ii) la diversification des canaux économique des États de l’Afrique centrale afin de d’approvisionnement en produits pétroliers. réduire les retards et faciliter la libre circulation des • biens et des services, en stimulant le commerce et la Réduire les mesures non tarifaires (tracasseries) sur le principal compétitivité dans la région. corridor commercial afin de permettre aux entreprises et aux • ménages d’accéder aux intrants à faible coût, d’encourager les Simplifier les restrictions à l’importation et les régimes investissements dans les activités liées aux CMV et de réduire spéciaux et les rendre plus transparents en affichant : (i) le coût de la consommation pour les ménages les plus pauvres sur des tableaux ou des affiches facilement accessibles du pays. au public les droits de douane régulièrement mis à jour, qui tiennent compte des données les plus récentes sur les prix ; et (ii) sur des tableaux ou autres dispositifs accessibles tant pour les fonctionnaires que pour les importateurs les critères et les conditions d’octroi des licences d’importation et les amendes en cas d’infraction. Santé • • Accélérer la campagne de vaccination pour réduire le risque Renforcer le mécanisme de prévention contre les de nouvelles vagues de COVID-19 et l’émergence de nouveaux maladies transmissibles telles que la COVID-19 et variants, ce qui reste essentiel et nécessitera des efforts tant au Ebola. niveau national que mondial. • Maintenir les mesures de prévention, d’endiguement et de prise en charge de la COVID-19 pour réduire au minimum le risque de nouvelles vagues de contamination. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 2 CHAPITRE Libérer le potentiel du secteur agricole pour protéger les moyens de subsistance 42 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE La RCA devrait subir des conséquences économiques durables à cause d’une combinaison de chocs, d’où l’urgence d’adopter de vastes et solides programmes de réformes, notamment dans le secteur agricole qui contribue le plus à la réduction de la pauvreté dans l’ensemble du pays6 Avec la chute des prix des produits de base, la perturbation des chaînes d’approvisionnement et le regain d’insécurité, la croissance économique de la RCA devrait baisser de 2 points de pourcentage par rapport aux prévisions antérieures, et les risques sont orientés à la baisse si le regain de conflits persiste. La pandémie de COVID-19, la crise post-électorale et les impacts de la guerre en Ukraine ont aggravé la situation humanitaire déjà précaire et ont jeté davantage de Centrafricains dans l’extrême pauvreté. Parmi les groupes les plus exposés figurent les 658 000 personnes déplacées à l’intérieur de la RCA (au 30 avril 2022), ainsi que les femmes et les enfants, les personnes en situation de handicap et les personnes âgées, dont la vulnérabilité devrait s’accentuer avec le climat actuel. Une part importante de la main-d’œuvre, notamment les jeunes et les femmes, travaille pour leur propre compte dans le secteur agricole. Il est probable que ces travailleurs aient été particulièrement affectés par la crise actuelle, étant donné que la RCA ne dispose pas d’un filet de sécurité sociale national. Le secteur agricole du pays dispose d’un potentiel prometteur qui reste sous-exploité en raison des méthodes et des techniques rudimentaires utilisées et de plusieurs problèmes primordiaux qui entravent le développement du secteur. Les politiques et les plans visant à améliorer les pratiques agricoles n’ont pas donné les résultats escomptés, avec des conséquences graves en termes d’insécurité alimentaire et de malnutrition. Le secteur est également confronté à des événements induits par le changement climatique, ce qui souligne l’importance d’un programme de réforme urgent pour une meilleure résilience et une meilleure adaptation. 6 Une enquête d’opinion par pays (COS) menée en 2020, qui recueille les commentaires des parties prenantes, révèle que l’agriculture et le développement rural sont les secteurs qui contribuent le plus à la réduction de la pauvreté. Au total, 39 pour cent des parties prenantes consultées dans le cadre du COS souhaiteraient que les interventions du GBM se concentrent sur l’agriculture et le développement rural. 43 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE La RCA doit mettre en œuvre des réformes cependant celui-ci demeure non opérationnel à ce agricoles audacieuses et soutenues pour mettre jour. Afin de garantir son fonctionnement efficace, à profit le potentiel de son secteur agricole. Les il sera nécessaire d’élaborer un cadre solide plans et stratégies dans le secteur agricole ont été pour l’importation d’outils de mécanisation et de exécutés selon une approche discontinue et de réglementer les services de location commerciale de projet. Le secteur manque d’une vision globale à technologies et de services de mécanisation. Pour moyen et long termes qui intègrerait tous les sous- stimuler les importations de produits agricoles, il secteurs et toutes les parties prenantes et créerait faudrait améliorer la qualité des produits de manière une chaîne de valeur durable autour d’un ensemble à se conformer aux normes de valeur des produits, de produits agricoles. Le cadre institutionnel actuel mettre les producteurs en relation avec les chaînes est complexe et empêche l’innovation et la mise à d’approvisionnement et améliorer la connectivité disposition de semences et d’engrais améliorés, deux en milieu rural. D’autres réformes sont nécessaires, choses essentielles pour stimuler la productivité. La notamment la réforme des politiques foncières afin pression en faveur de la mécanisation ne tient pas de garantir les droits et d’améliorer l’allocation des compte du statut de petit exploitant des agriculteurs ressources, en particulier pour les femmes, et la et des éleveurs et du coût élevé des machines. Le promotion et le renforcement des organisations de gouvernement a créé l'Office National de Matériel producteurs afin de mieux tirer profit des chaînes de Agropastoral par la loi 07.016 du 19 janvier 2007, valeur nationales, régionales et mondiales. 2.1 Le secteur agricole offre d’immenses possibilités, mais sa performance est en déclin depuis des décennies 2.1.1 Le secteur agricole de la RCA a un immense potentiel Le secteur agricole constitue l’un des source de revenus en milieu rural où il génère plus principaux piliers de l’économie de la RCA, et de 90 pour cent des revenus des ménages (Figure offre un potentiel considérable. Ce secteur joue 17). Les produits agricoles (c’est-à-dire le coton et le un rôle vital pour le pays sur le plan économique, café) représentent environ 2 pour cent du PIB. Environ environnemental, politique et social. Derrière le un tiers de la superficie totale de la RCA est réputé secteur des services, c’est le secteur qui contribue propice à l’agriculture7. De même, le pays regorge le plus à la formation de la richesse nationale, de ressources en eau, ce qui révèle son potentiel représentant plus de 34 pour cent du PIB sur la agricole. La RCA dispose d’un réseau hydrographique période de 2009-2020. Le secteur de l’agriculture étendu et dense, ses principales ressources en eau produit plus de 75 pour cent des denrées alimentaires provenant du bassin du Tchad au nord et du bassin du pays, procure des emplois à plus de 75 pour cent du Congo au sud. En outre, le pays dispose d’un de la population active et constitue la principale potentiel de pêche considérable et bénéficie d’un 7 https://www.land-links.org/country-profile/central-african-republic/ 44 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE climat favorable, avec des précipitations constantes est indispensable. Jusqu’à 1,9 million d’hectares de chaque année (FIDA 2019). La zone tropicale du sud terres agricoles se prêtent à l’irrigation, mais moins reçoit entre 1 500 et 1 800 millimètres de pluie par de 5 000 hectares sont actuellement irrigués. Enfin, an ; la zone soudano-guinéenne bénéficie d’environ 1 seuls 9 millions d’hectares de pâturages, sur un total 100 à 1 500 millimètres de pluie par an, et la bande estimé à 16 millions, sont utilisés pour l’élevage. Le soudano-sahélienne du nord reçoit entre 800 et 1 sous-secteur de l’élevage en RCA joue un rôle majeur 000 millimètres par an (Figure 18). dans l’économie nationale et est essentiel pour les moyens de subsistance des populations rurales. La RCA dispose d’abondantes terres arables L’élevage représente en moyenne 15 pour cent du PIB et jouit d’un climat généralement favorable à et un tiers de la production agricole. La production l’agriculture et à l’élevage. Le régime des pluies bovine était autrefois confinée aux zones de savane convient aux cultures, avec des cycles de croissance des régions centrales et septentrionales du pays, mais longs, et le vaste réseau hydrographique du pays elle s’étend désormais aux zones forestières du sud- fournit des eaux de surface et souterraines pour ouest. Le cheptel bovin national se chiffre à environ l’agriculture, le bétail et la faune. Malgré l’énorme 4 millions de têtes. L’élevage de petits ruminants et potentiel en termes de disponibilité des terres en autres animaux, tels que les moutons, les chèvres, RCA, l’utilisation des terres agricoles (part de la les porcs et les volailles, est pratiqué dans toutes les superficie des terres), les terres arables, les cultures régions et constitue souvent une activité auxiliaire des permanentes et les pâturages permanents occupaient ménages agricoles. Le petit bétail amortit les chocs, 8,2, 2,9, 0,1 et 5,1 pour cent, respectivement, en favorise la résilience et constitue une part importante 2018. Bien que le climat soit généralement favorable, des actifs productifs des ménages. les variations des précipitations font que l’irrigation Figure 17 : La population active est encore essentiellement concentrée dans le secteur agricole. Part de l’emploi par secteur, 1991-2019 Part de l’emploi (%) 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 1991-2000 2001-2010 2011-2019 Agriculture Industrie Services Source : Indicateurs de développement mondial. 45 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 18 : La répartition agro-pastorale des produits met en évidence un potentiel immense dans toutes les régions. Répartition des produits agro-pastoraux Source : Banque mondiale8. Le secteur de la pêche recèle également un pour faciliter la transformation. Aussi, le pays potentiel considérable. La production de poisson importe-t-il des produits de la pêche pour réduire de la RCA varie entre 15 120 et 35 170 tonnes9 par l’écart entre l’offre et la demande. Les techniques an, le tilapia élevé en étang et le poisson de rivière d’empoissonnement ou d’ajout de poissons dans contribuant de manière substantielle à l’alimentation un plan d’eau devraient être vulgarisées auprès des des ménages10. Le secteur de la pêche du pays a petits exploitants de pêche afin d’augmenter leur été privilégié par la densité du système d’eau douce productivité et leur offre. L’investissement dans les continentale qui couvre la quasi-totalité du territoire étangs piscicoles pourrait également se concrétiser national et qui a été décrit comme le réservoir d’eau par le biais des organisations de pêcheurs, et de l’Afrique centrale. On y relève également des lacs ; l’aménagement des voies navigables dans les bassins des étangs (à savoir les étangs d’Am Timan, de Tissi, du Chari et de l’Oubangui/Shangha pourrait accroître de Gata, de Dahal, de Makia, d’Amdafok, de Mamoun, la production de la pêche et de l’aquaculture. de Kididji et de Tiringoulou) ; des réservoirs artificiels qui couvrent une superficie totale de 20 km² ; une La détérioration des conditions de sécurité faune ichtyologique riche et variée  ; et une vaste freine les espoirs d’une reprise vigoureuse de topographie appropriée à la pisciculture (Dipapoundji l’agriculture en République centrafricaine. Les 2019). Pourtant, la RCA n’arrive pas à satisfaire les conflits sont des facteurs qui peuvent limiter la besoins de consommation du pays, principalement en production agricole et contribuent à la remise en raison du caractère de subsistance de la production, cause des systèmes de production et de contrôle du caractère rudimentaire des équipements de pêche des terres, des réseaux d’échange et des corridors utilisés et du manque d’installations de conservation de marché. En RCA, les conflits affectent la 8 Banque mondiale. 2018. Note d’examen du secteur agricole de la République centrafricaine. 9 https://donnees.banquemondiale.org/indicator/ER.FSH.PROD.MT?locations=CF 10 https://donnees.banquemondiale.org/indicator/ER.FSH.PROD.MT?locations=CF 46 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE production agricole des ménages par des voies de la part de groupes armés non étatiques. Ainsi, diverses, notamment les attaques directes contre la les ménages peuvent réduire la production agricole population telles que la destruction des rendements, pour diminuer leur visibilité dans la communauté et le vol des actifs productifs, entre autres. La plupart prévenir les attaques. Ils freinent également d’autres du temps, les groupes armés non étatiques ciblent investissements destinés à augmenter la productivité. certains groupes de la communauté pour susciter Ces réductions de la production peuvent entrainer une la peur, empêcher les mouvements de résistance flambée des prix des produits agricoles. Alors que la civile ou confisquer illégalement des biens. Le RCA s’efforce de surmonter l’héritage de la fragilité et risque de devoir abandonner ou de perdre la terre de la violence et leurs effets sur le secteur agricole, décourage les investissements dans des structures de précieux enseignements peuvent être tirés de permanentes ou des coûts irrécupérables. En outre, l’expérience d’autres pays en situation de post-conflit, les actifs visibles constituent des signes de richesse, tels que l’Afghanistan ou le Rwanda. ce qui augmente les risques d’attaques délibérées Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 47 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.1.2 La contribution de l’agriculture à la croissance reste toutefois faible L’agriculture joue un rôle essentiel dans La performance du secteur agricole de la RCA le déclenchement de la transformation s’est toutefois dégradée au cours des dernières structurelle du pays . Les réformes dans le décennies. La contribution du secteur à la croissance domaine agricole contribuent à la croissance du PIB est passée de 55 pour cent en 2011 à économique et au développement dans la mesure 32 pour cent en 2020. Cette contreperformance où elles entraineraient  : (i) une accélération de est attribuée à une baisse de 46 pour cent de la l’industrialisation, ce qui stimulerait la productivité production de cultures vivrières, de 55 pour cent de globale du travail  ; (ii) une augmentation des l’élevage, et de 33 pour cent de la foresterie et de excédents agricoles, ce qui est essentiel pour la pêche. Avant la crise de 2013, 75 pour cent des l’accumulation de capital  ; et (iii) l’amélioration de denrées consommées dans le pays étaient produites la balance des paiements grâce aux exportations. Le localement 11. La contraction de la croissance passage à une agriculture différente de l’agriculture enregistrée dans le secteur en 2013 (-44,5 pour cent) traditionnelle de subsistance permet également et en 2014 (-1,4 pour cent) explique également la d’atteindre des objectifs de développement baisse de la contribution du secteur agricole au PIB. humanitaire par la croissance des revenus et de la Cette baisse est principalement imputable au conflit productivité des agriculteurs pauvres en même que armé de 2013-14, tandis que la forte accélération de d’améliorer la nutrition. L’amélioration de l’accès la croissance par la suite est due au plan quinquennal des ménages à la nutrition peut réduire les retards de redressement national et de consolidation de de croissance chez les enfants et renforcer le capital la paix, qui a favorisé la reprise économique et humain. Pour des pays comme la RCA, l’agriculture stimulé les secteurs productifs tels que l’agriculture peut contribuer à de meilleures conditions de en encourageant les systèmes de production liés à vie et à générer des revenus par la réforme et la l’alimentation et la diversification du secteur agricole. modernisation du secteur. 2.1.3 L’agriculture a souffert d’une faible performance au cours des dernières décennies La production agricole du pays a été instable. kg/ha pour le maïs, 600 kg/ha pour le mil/sorgho et La production agricole a connu une baisse drastique, 3 tonnes/ha pour le manioc alors que le potentiel de ce qui limite davantage le développement agricole, rendement de ces cultures vivrières est estimé à 2 le coton et le café étant les cultures de rente les plus tonnes/ha pour le maïs, 2/3 tonnes/ha pour le mil/ impactées, malgré les initiatives mises en place pour sorgho et 12 tonnes/ha pour le manioc. En outre, relancer le secteur. Les cultures vivrières représentent les rendements du Cameroun voisin atteignent 2 95 pour cent de la production totale, le reste étant tonnes/ha, 3,5 tonnes/ha et 9 tonnes/ha pour le constitué de cultures de rente, à savoir le coton, le maïs, le sorgho et le manioc, respectivement, ce qui tabac et le café (GAFSP 2019). Le sous-secteur montre que la performance des cultures de la RCA des cultures a enregistré une faible productivité reste bien inférieure au potentiel escompté. Pour ces dernières années, malgré les initiatives mises Mendes (2012), la cause profonde de la mauvaise en place par le Gouvernement pour le réorganiser. performance du sous-secteur des cultures résulte: Ainsi, les rendements agricoles, notamment des (i) de la faible accessibilité physique et financière principales cultures vivrières, sont très faibles à 800 des intrants (par exemple, engrais, pesticides 11 http://documents.worldbank.org/curated/en/363251558404110297/Central-African-Republic-Agriculture-Recovery-and-Agribusiness-Development-Support- Project 48 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE et emballages adaptés) et des équipements de Le secteur agricole se révèle moins productif transformation pour les petits producteurs  ; (ii) du que les autres secteurs de la RCA. La productivité manque de sources d’énergie dans les zones rurales est une mesure de l’efficacité avec laquelle les pour permettre le fonctionnement de petites unités entreprises combinent les ressources pour produire de stockage et de transformation des aliments ; (iii) de des biens et des services. Elle est mesurée en termes l’absence de mécanisme de gestion de la production/ de production par intrant, ce qui implique que la multiplication et de la distribution des semences productivité augmente si les intrants sont combinés améliorées ; et (iv) de la faible capacité d’intervention de manière optimale pour produire des niveaux de des services de contrôle/certification des semences. production plus élevés. Le secteur agricole du pays Trois contraintes pèsent sur la production, n’est pas aussi productif que les autres secteurs, l’exportation et la compétitivité des cultures de rente la productivité moyenne dans l’agriculture se en RCA, à savoir : (1) les coûts élevés de transport et situant à près de 12 pour cent de celle du secteur de transit tout au long de la chaîne de production ; manufacturier et de 24 pour cent de celle des services (2) la faible productivité due à des carences dans entre 1992 et 2019 (Figure 20). Pour améliorer la l’organisation des agriculteurs, au manque de productivité agricole, les agriculteurs doivent adopter services de vulgarisation et au nombre trop faible des technologies qui limitent le recours à la main- d’installations et de structures de recherche  ; d’œuvre. et (3) de la détérioration des infrastructures de production, marquée par la perturbation des systèmes internes de production, de transformation et de commercialisation (Mendes 2012). Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 49 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Tableau 5 : Un transfert de la main-d’œuvre de l’agriculture vers les services est constaté. Composante intra sectorielle Changement structurel Croissance de la productivité Agriculture Industrie Services Interne Agriculture Industrie Services Changement structurel 1991-2000 0,28 6,63 0,24 7,15 0,03 0,12 0,05 0,2 7,35 2001-2010 8,64 3,43 4,07 16,14 3,82 0,97 1,66 6,46 22,6 2011-2019 -0,01 0,08 3,8 3,86 0,07 0 0,96 1,03 4,89 1991-2019 3,28 3,26 2,84 9,38 1,45 0,4 0,95 2,79 12,18 Source : Calculs des services de la Banque mondiale. Alors qu’il contribue le plus à la croissance qui migrent d’un secteur à l’autre, ce qui montre que de la productivité, le secteur agricole a la RCA ne connaît pas ce changement structurel. enregistré peu d’améliorations institutionnelles Par conséquent, les entreprises des secteurs de et technologiques, et la croissance a baissé au l’industrie et des services doivent adopter des cours des dernières décennies. La productivité du technologies qui leur permettent de maintenir la travail agricole a augmenté de 4,7 pour cent entre production avec moins de travailleurs. Le secteur de 1991 et 2019, la composante intra-sectorielle l’industrie attire peu de travailleurs, avec une maigre contribuant pour plus de 69 pour cent à la croissance contribution de la composante de changement totale de la productivité dans le secteur agricole. structurel de 0,4 pour cent sur la période 1991- Par conséquent, la croissance de la productivité du 2019, contre 1,5 et 1 pour cent pour les secteurs travail dans l’agriculture provient principalement de l’agriculture et des services, respectivement. des changements institutionnels et technologiques. Entre 2011 et 2019, la croissance de la productivité La composante intra-sectorielle de la productivité induite par le transfert des travailleurs vers le secteur agricole était négative en 2011-2019, ce qui de l’industrie a été nulle, ce qui démontre qu’un signifie que le secteur doit être modernisé avec des nombre insignifiant de travailleurs ont migré vers institutions solides pour faire relever sa productivité ce secteur. Cela est probablement dû au manque (Tableau 4). de compétences techniques des travailleurs dans ce secteur, ce qui exige des interventions politiques Le secteur agricole continue cependant d’attirer ciblées pour transformer le secteur et faciliter les des travailleurs. Historiquement, les travailleurs transferts de la main-d’œuvre entre les secteurs. De migrent généralement du secteur agricole, moins même, les transferts de main-d’œuvre vers le secteur productif, vers le secteur manufacturier, plus productif des services requièrent également des interventions (Lewis 1955 ; Djidonou et McGregor 2020). Le secteur politiques ciblées pour accélérer la transformation du agricole attire plus de 50 pour cent des travailleurs secteur. 50 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 51 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.2 Plusieurs goulots d’étranglement ont empêché le secteur de libérer son potentiel 2.2.1 Faible allocation budgétaire Il y a un sous-investissement persistant dans le secteur agricole. L’allocation budgétaire pour la production agricole nationale est marginale, représentant 0,7 pour cent et 0,9 pour cent de l’allocation budgétaire (y compris les dépenses de recherche et d’intervention-fonctionnement) en 2020 et 2021, respectivement. Les dépenses consacrées à la recherche sont infimes et portent sur la lutte contre la strie brune du manioc et l’amélioration de la productivité des produits essentiels tels que les denrées de base, le manioc et la banane. Le budget alloué à l’agriculture provient principalement des investissements étrangers et des dons, les investissements nationaux se chiffrant à 17 pour cent du total des investissements agricoles en 2010- 20. Alors que la part des investissements agricoles nationaux a diminué, celle des investissements étrangers s’est accrue (Figure 19). Les dépenses d’intervention constituent la majeure partie des interventions publiques en faveur de la production agricole nationale. Toutefois, une part importante de ces interventions sert à financer et à soutenir les institutions du secteur agricole, tandis que l’appui direct aux producteurs ne représente qu’une part marginale de l’allocation budgétaire. Au cours de la dernière décennie, les investissements publics dans l’agriculture ont représenté en moyenne moins de 3 pour cent des dépenses totales du secteur public, soit au-dessous de l’objectif de 10 pour cent fixé dans le cadre du Programme détaillé de développement de l’agriculture africaine. 52 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 19 : Les investissements nationaux dans le secteur Figure 20 : La productivité agricole a stagné au cours des agricole ont été relativement modestes au cours de la dernières années. dernière décennie. Investissements agricoles (en pour cent), 2010-2020 Tendances de la productivité par secteur, 1992-2020 Investissement dans le secteur agricole (%) Milliers 100 30 000 90 25 000 80 70 20 000 60 50 15 000 40 10 000 30 20 5 000 10 0 0 1992 1994 1996 1998 2000 2002 2004 2006 2008 2010 2012 2014 2016 2018 2010 2011 2012 2013 2014 2015 2016 2017 2018 2019 2020 Intérieur Extérieur Agriculture Industrie Service Source : Calcul des auteurs sur la base des données du Ministère de l’Agriculture Source : Calcul des services de la Banque mondiale sur la base des données des et du Développement Rural. Indicateurs du développement dans le monde. La RCA n’a pas encore réussi à allouer 10 Il existe un écart énorme entre le budget pour cent du budget national à l’agriculture et alloué et les dépenses de fonctionnement dans au développement rural, conformément aux le secteur de l’agriculture. Par exemple, le rapport engagements pris par les chefs d’État africains entre les dépenses de fonctionnement et le budget dans la Déclaration de Maputo. Néanmoins, la part alloué dans le secteur est passé de 6,2 pour cent du budget public consacrée au secteur agricole est en 2012 à 2,4 pour cent en 2018. Cet écart résulte passée de 3,3 pour cent en 2012 à 9,0 pour cent en (i) de la situation d’insécurité dans le pays, (ii) de 2022, ce qui dépasse la moyenne régionale de 5-6 l’absence d’une base de revenus solide, (iii) de la pour cent. Les dépenses consacrées à la recherche faible capacité d’absorption des projets agricoles agricole sont passées de 3,7 millions USD en 2012 et (iv) du manque de déploiement judicieux et à 5,2 millions USD en 2015, avant de se stabiliser responsable des ressources publiques dans le secteur à 4,9 millions USD en 2016. Cette évolution a été agricole. Des retards sont également constatés soutenue par des projets mis en œuvre par l’Institut dans l’approbation du budget, ce qui peut différer la Centrafricain de Recherche Agricole, avec l’appui disponibilité des ressources budgétaires de plusieurs d’institutions internationales. Cette tendance devait mois dans l’année de mise en œuvre, détourner les se poursuivre et permettre au Gouvernement ressources allouées pour le fonctionnement au lieu d’atteindre en 2020 l’objectif de 10 pour cent des investissements, et entraîner un décalage entre d’allocation budgétaire à l’agriculture (Programme l’année fiscale et les calendriers agricoles. Pour mondial pour l’agriculture et la sécurité alimentaire réduire l’écart, il convient de mobiliser les ressources - GAFSP 2019). en temps opportun et d’approuver le budget l’année précédente (n-1) pour accélérer la mise en œuvre l’année suivante. 53 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.2.2 Les difficultés d’accès aux semences améliorées et aux engrais persistent Le secteur agricole reste dominé par de petites Les agriculteurs recourent encore à des exploitations familiales axées sur la subsistance. méthodes agricoles rudimentaires en raison Le secteur est tiré par la production alimentaire, qui du coût élevé de l’acquisition de machines . représente 95 pour cent de la valeur ajoutée, contre Les techniques manuelles constituent toujours le 5 pour cent pour les cultures de rente constituées du moyen de production dominant, 95 pour cent des coton, du tabac et du café. Selon les estimations, 70 agriculteurs y ayant recours en 2022. Moins de 1 pour cent de la population pratique une agriculture pour cent des agriculteurs se servent de tracteurs de subsistance, la majorité des ménages du pays et de motoculteurs, principalement en raison du vivant en milieu rural et produisant la plupart des coût élevé de la mécanisation, la production par denrées qu’ils consomment. Les cultures vivrières et tracteurs étant 15 fois plus chère que la production le bétail produits pour la consommation des ménages manuelle. De même, les agriculteurs utilisent totalisent environ 80 pour cent de la production probablement des engrais alternatifs moins chers totale des ménages ruraux, les cultures de rente et pour leurs exploitations. Ils pratiquent la culture les revenus du travail représentant les 20 pour cent sur brûlis pour désherber et fertiliser le sol, et les restants. Les ménages se livrent à un mélange de techniques modernes de fertilisation des cultures cultures vivrières, de cultures de rente et d’élevage. sont quasiment exclues. Le taux d’utilisation d’engrais Les cultures vivrières, notamment celles du manioc, (azote nutritif) de 0,1 kilogramme par ha de surface du sorgho et du millet, des fruits et légumes et des cultivée est nettement inférieure à la moyenne de 2,6 oléagineux, occupent environ 90 pour cent de la kilogrammes par ha dans la CEMAC en 2009-2019. superficie totale cultivée en RCA et constituent Les pratiques agricoles continuent d’être articulées la principale source d’emploi et de revenus des autour de l’agriculture pluviale, les opportunités ménages, en particulier en milieu rural. Les d’acquérir un tracteur, des engrais sélectionnés, des variations des conditions météorologiques, bien que pesticides et des semences étant quasi-inexistantes. généralement favorables, et des marchés alimentaires De plus, les surfaces aménagées pour en permettre locaux, ainsi que la fréquence des conflits, ont incité l’irrigation sont restreintes : seuls 672 ha de surfaces la plupart des ménages à adopter des modèles de sont irrigués, ce qui est très inférieur à la moyenne de production qui privilégient la diversification et l’auto- 24 122 ha de la CEMAC (Figure 22). suffisance et évitent les risques liés à la spécialisation dans les cultures de rente ou les activités non agricoles. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 54 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 21 : Par rapport à ses pairs de la région, l’utilisation Figure 22 : .... et la proportion de terres aménagées pour d’engrais reste faible... l’irrigation est petite. Utilisation d’engrais (azote nutritif) par superficie de terres Superficie des terres aménagées pour l’irrigation (ha), 2009-2019 cultivées, 2009-2019 7 100 000 90 000 6 80 000 5 70 000 60 000 4 50 000 3 40 000 2 30 000 20 000 1 10 000 0 0 d n A AC n p. n A ée ée n o ha AC ou bo ou RC ng bo RC Ré in in M Tc M er Ga er Ga Co Gu Gu CE o, CE m m ng Ca Ca Co Source : FAOSTAT. Source : Données de la Banque mondiale/ Indicateurs de développement en Afrique. La politique semencière de la RCA est la demande et l’offre, et sa politique en matière inefficace, principalement en raison de la faible d’engrais a principalement favorisé l’utilisation capacité de production de l’Institut d’Agronomie, d’engrais minéraux pour la productivité des cultures, principal fournisseur de variétés améliorées . négligeant le système de culture de semis direct sur L’un des principaux obstacles qui empêchent de paillage. Cela pourrait expliquer la faible productivité renforcer la productivité agricole dans le pays vient des petites exploitations agricoles qui ne disposent de l’utilisation persistante de semences de mauvaise que d’un faible pouvoir d’achat pour l’acquisition qualité par les petits exploitants. Les agriculteurs se de sacs d’engrais importés. Pour remédier à cette contentent généralement de recycler des variétés non situation, la RCA doit se concentrer sur la formation résistantes, à maturation tardive, à faible rendement des sélectionneurs, la sélection de nouvelles variétés, et non résistantes aux parasites et aux maladies. et les systèmes de production et de distribution Pendant des décennies, les agriculteurs de la RCA nécessaires pour créer des systèmes viables de ont habilement géré leurs propres systèmes de distribution de semences de haute qualité et à haut semences informels. Ils ont conservé les semences rendement. de la récolte d’une année pour les planter l’année suivante et les ont distribués par le biais de réseaux Les institutions et les politiques existantes ne communautaires. Cependant, la performance des prévoient pas d’analyse des sols, et la distribution variétés locales de maïs, de manioc et d’autres des intrants n’est pas suffisamment encadrée. aliments de base ne peut rivaliser avec celle du Outre le faible accès, les agriculteurs ne reçoivent reste du monde. Le pays a importé des variétés aucune information sur les analyses de sol et ignorent de semences améliorées, creusant l’écart entre donc quels types d’engrais conviennent ou quel 55 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE dosage appliquer. En raison de contraintes logistiques, la RCA n’a souscrit à aucune politique semencière ils ne sont non plus en mesure de payer les prix élevés et n’en a ratifiée auprès d’aucune organisation demandés actuellement pour les engrais en RCA. Le internationale de réglementation. En RCA, l’utilisation pays bénéficie actuellement de projets humanitaires d’engrais est faible, avec une moyenne de 0,2 kg/ha, qui contribuent à réduire le prix des engrais pour les ce qui est bien inférieur aux 13 kg/ha du Cameroun, agriculteurs, bien que ces programmes de distribution aux 17,6 kg/ha du Burkina Faso, aux 38 kg/ha du Mali, d’intrants souffrent de l’inadéquation du ciblage des aux 30,9 kg/ha de la Côte d’Ivoire ou encore aux 19,7 bénéficiaires. kg/ha du Nigeria. La faible utilisation d’engrais par les agriculteurs centrafricains résulte de son coût élevé Le coût des demandes de tests pour les variétés sur le marché intérieur et de la nature individuelle importées est élevé. De ce fait, les importateurs des exploitations dont les parcelles couvrent en sont parfois amenés à limiter le nombre de variétés moyenne 1 à 2 hectares. Les prix des engrais fixés soumises pour homologation officielle à celles par le Gouvernement limitent la concurrence des susceptibles de donner de bons rendements dans éventuels investisseurs privés, réduisant ainsi l’offre. tous les lieux d’essai. Il est moins probable que Le cadre réglementaire actuel pour l’importation les variétés nécessitant une adaptation spécifique d’engrais est trop contraignant, décourage les pour certaines niches agroécologiques ou certaines investisseurs potentiels et accroît les inégalités entre utilisations soient présentées. Cette considération les revendeurs d’engrais dans les zones rurales, ce incite les importateurs à opter pour des variétés qui affecte la productivité des agriculteurs. Il convient largement adaptées plutôt que pour des variétés qui de simplifier les procédures administratives pour répondent aux divers besoins des petits agriculteurs les licences d’importation et de réduire le montant (Louwaars 2005). Le cadre politique existant en de la taxe d’importation, ce qui pourrait augmenter matière de semences se limite à l’enregistrement, à l’offre. Il importe également de renforcer la capacité la certification, au contrôle qualité et à la livraison aux des agriculteurs à intensifier leur production, ce qui agriculteurs, et accorde peu d’attention à la recherche pourrait les aider à accroître leur rendement et leurs et au développement liés à la sélection. De ce fait, revenus. 2.2.3 Apporter une réponse aux défis persistants de la transhumance La transhumance et les tensions entre éleveurs Au départ, les agriculteurs sédentaires pratiquant et agriculteurs ont entravé le développement l’agriculture extensive ont accueilli favorablement du secteur agricole . L’élevage et l’agriculture la venue des éleveurs, dont le bétail était censé restent des sources de revenus de premier plan paître loin de leurs terres de culture. Cependant, le pour de nombreux ménages en RCA. Cependant, conflit entre agriculteurs et éleveurs a éclaté lorsque la concurrence dans l’utilisation des ressources le cheptel bovin a dépassé les 4 millions de têtes, provoque des attaques et des meurtres de une augmentation qui a entrainé une concurrence représailles entre les communautés d’agriculteurs pour les ressources foncières (FAO 2018). Les et d’éleveurs, ce qui engendre une perte rapide de la techniques agricoles de la RCA sont axées sur la fertilité des sols et une détérioration des ressources culture sur brûlis, ce qui ne laisse aucun choix aux naturelles. Selon l’enquête sur l’agriculture et agriculteurs que de pratiquer l’agriculture itinérante l’élevage en RCA, plus de 86 pour cent des éleveurs étant donné que les feux de brousse induisent une pratiquent l’agriculture, alors que seulement 4,57 perte rapide de la fertilité des sols et détériorent pour cent des agriculteurs s’adonnent à l’élevage. En les ressources naturelles. En outre, les destructions effet, outre les éleveurs fulanis transhumants, 90 pour causées par les animaux errants sont préjudiciables cent des éleveurs sont des Fulanis Mbororo, arrivés au développement du secteur agricole. Ainsi, environ du Cameroun et du Tchad au début des années 1920. 60 pour cent des propriétaires de bétail se sont enfuis 56 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE dans les pays limitrophes pour protéger leurs bêtes que pour les éleveurs. Près de 70 pour cent des pendant le conflit, et des milliers d’agriculteurs ont éleveurs et des agriculteurs déclarent que les conflits abandonné leurs exploitations (Land Links 2021). Le récurrents affectent leurs activités. Par exemple, les secteur agricole a besoin d’institutions solides pour cultures peuvent être vandalisées et détruites quand assurer une gestion et une réglementation efficaces les animaux traversent les exploitations, et tant les des activités agricoles et d’élevage. agriculteurs que les éleveurs sont contraints à la migration interne et confrontés à la pauvreté suite aux Le conflit entre agriculteurs et éleveurs conflits. Certains agriculteurs ont perdu leurs terres, entraine une détérioration considérable de la et certains éleveurs ont été contraints de migrer vers production agricole et entraîne des déplacements d’autres régions en raison des hostilités dans leurs internes et la pauvreté tant pour les agriculteurs communautés locales. Figure 23 : Les conflits récurrents entre éleveurs et Figure 24 : Les animaux errants, les dégâts en milieu rural, le agriculteurs affectent considérablement leurs activités. vol et l’abattage du bétail constituent les principales causes de la transhumance. Impact des conflits sur les activités agricoles Causes de la transhumance Pourcentage d'éleveurs interrogés Pourcentage d'éleveurs interrogés 38 100 90 37 80 36 70 60 35 50 34 40 30 33 20 32 10 0 31 es s il il ce l nt ra ta ta rr an ra ru bé bé te um er 30 eu de e s ld de x sh ili au ge Vo m an n im tta io en Tr t An 29 a sa Ab es ili ag Ut m m 28 Do Pas du tout Très peu Beaucoup Oui Non Source : Calculs des services de la Banque mondiale à partir des données de l’enquête sur l’agriculture et l’élevage. 57 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Les animaux errants, les dégâts en milieu rural, Les agriculteurs et les éleveurs privilégient le vol et l’abattage du bétail sont les principales la résolution de conflits sous l’égide des chefs causes de la transhumance . La transhumance traditionnels. Très peu d’entre eux saisissent les constitue l’une des principales causes d’instabilité en autorités légales pour résoudre leurs différends. En RCA. Les affrontements entre éleveurs transhumants RCA, plusieurs possibilités sont offertes pour régler et agriculteurs ont provoqué d’importants les conflits entre éleveurs et agriculteurs, notamment déplacements de populations. Ils ont également le recours aux médiations des chefs traditionnels, aux créé un climat de méfiance qui affecte la cohésion autorités légales, aux autres éleveurs ou agriculteurs, sociale et les activités économiques. Plusieurs ou aux groupes armés. En effet, lors de l’enquête facteurs poussent les éleveurs à la transhumance. sur l’agriculture et l’élevage, les éleveurs et les Plus de 70 pour cent des éleveurs déclarent que les agriculteurs ont été interrogés sur leurs préférences animaux errants, les dégâts en milieu rural, le vol et en matière de mode de résolution des conflits. Les l’abattage d’animaux sont les principales causes de résultats montrent que les éleveurs et les agriculteurs leur migration. optent pour la résolution informelle des conflits. Plus de 65 pour cent des agriculteurs et des éleveurs s’en remettent à la médiation des chefs traditionnels, suivie par la médiation d’autres agriculteurs ou éleveurs (plus de 20 pour cent) et le recours aux autorités légales (moins de 10 pour cent). Figure 25 : La résolution informelle des conflits est l’approche privilégiée. Modes de résolution de conflits privilégiés Satisfaction par rapport aux modes de résolution de conflits Pourcentage d'éleveurs interrogés Pourcentage d'éleveurs interrogés 100 100 90 90 80 80 70 70 60 60 50 50 40 40 30 30 20 20 10 10 0 0 s re ie és s re ie és lle le er er ltu ltu m m el e rm m ar ar on on icu u ar ric a es s iti iti r nd nd e ag ag ad ad p up Ge Ge ou tr tr / / o Gr Gr e/ e/ e e s s ag ag rie rie lic lic ev ev fe Po ffe Po él él af a Ch Ch ts s nt en e Ag Ag Oui Non Satisfaits Non satisfaits Source : Enquête sur l’agriculture et l’élevage, RCA. 58 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.2.4 Combler l’écart entre les sexes peut contribuer à stimuler la transformation de l’agriculture et à réduire la pauvreté Les femmes peuvent être des agents de compte le plus grand nombre de travailleuses dans changement déterminants dans la lutte contre le secteur agricole de la CEMAC, derrière le Tchad. la pauvreté rurale, la faim et la malnutrition en Leur autonomisation s’avère essentielle pour le bien- RCA. Elles jouent un rôle essentiel en rapport aux être des familles et des communautés rurales et changements économiques, environnementaux la productivité économique globale, ainsi que pour et sociaux qui sont nécessaires pour parvenir au améliorer la sécurité alimentaire, garantir l’accès à la développement durable et à une production agricole nutrition et réaliser les Objectifs de développement durable. Les femmes assument également des durable. responsabilités considérables dans l’agriculture. Par exemple, si les hommes défrichent les champs, Il existe une disparité considérable entre les la culture est essentiellement assurée par les sexes dans les agences de recherche agricole du femmes qui cultivent le manioc, le maïs, le millet, pays. Il est essentiel d’assurer un équilibre entre le sorgho, le riz, les courges et les arachides pour la les sexes parmi le personnel qualifié des agences consommation de leur famille. Alors que les femmes de recherche agricole. Les chercheuses et les représentent vraisemblablement plus de 75 pour professeures apportent une contribution efficace et cent de la main-d’œuvre agricole en RCA, leur travail efficiente et proposent des idées et des solutions est peu valorisé et elles n’ont pas un accès égal aux qui appuient les agricultrices à relever les défis au retombées économiques de leur labeur. Le pays cours de leurs activités agricoles. La proportion de Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 59 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE chercheuses agronomes en RCA est passée de 26,0 Une meilleure allocation des ressources pour cent en 2011 à 19,7 pour cent en 2016. La FAO aux femmes en RCA peut améliorer de manière (2011)12 estime que si les agricultrices bénéficiaient significative la croissance globale de la du même accès aux ressources que les hommes, la productivité agricole. Conformément à ce qui est production agricole de 34 pays en développement indiqué dans la littérature existante, les estimations s’intensifierait en moyenne jusqu’à 4 pour cent, ce montrent que les femmes disposant de terres qui réduirait le nombre de personnes sous-alimentées arables, d’engrais et de technologies agricoles dans ces pays de 17 pour cent et équivaudrait à contribuent davantage à la productivité agricole sauver jusqu’à 150 millions de personnes de la faim. globale et à la croissance économique. Un meilleur accès des femmes aux terres arables pourrait Le déficit de productivité agricole et la stimuler la productivité globale de 0,05 point. Les surallocation inefficace des intrants aux effets conjugués de l’accès aux terres irriguées et aux parcelles gérées par des hommes affectent engrais engendrent un impact élevé sur la croissance considérablement la productivité globale de de la productivité. l’agriculture. Les femmes sont surreprésentées dans le secteur agricole de la RCA avec plus 77,8 pour L’accès à une éducation, une santé, un capital cent des travailleurs du pays en moyenne étaient et des intrants agricoles de qualité pourrait employés dans l’agriculture en 1991-2019. Bien que soutenir les femmes du secteur agricole à réduire la tendance ait légèrement diminué, la participation efficacement la pauvreté. La faible performance des femmes à l’agriculture reste probablement du secteur agricole dans de nombreux pays en élevée. Une répartition inégale des terres productives développement résulte, entre autres causes, de entre les hommes et les femmes est constatée en l’inégalité d’accès des femmes aux ressources et Afrique. Les femmes africaines font partie intégrante aux opportunités qui leur permettraient d’être plus du secteur agricole, puisqu’elles représentent jusqu’à productives. En effet, les femmes et les hommes 52 pour cent des travailleurs agricoles et occupent ne jouissent pas du même accès aux ressources environ 50 pour cent de la main-d’œuvre agricole qui pourraient améliorer leurs conditions de vie. dans les exploitations d’ASS (Njobe et Kaaria 2015). Principalement, l’accès inégal à la terre et aux autres Dans certains cas, la différence de productivité est facteurs de production (par exemple, les intrants et partiellement due à une surallocation inefficace les équipements), à une assistance-conseil agricole des intrants aux parcelles gérées par les hommes, de qualité, au financement, à la technologie, à la ce qui entraîne des pertes de productivité globale formation et aux marchés constituent les handicaps considérables dans le secteur agricole (Akresh 2008 ; majeurs qui affectent les femmes dans l’agriculture. Udry 1996). En outre, les femmes sont marginalisées En outre, le faible accès à l’éducation et l’abandon en termes d’accès aux engrais organiques et scolaire précoce aggravent encore la situation chimiques, aux produits chimiques de protection des filles et des jeunes femmes en RCA. En milieu des cultures, aux variétés de semences améliorées, rural, le taux de scolarisation des filles n’atteint à la mécanisation, à l’eau, au crédit et aux marchés pas 55 pour cent, bien moins que les 88 pour cent d’intrants et de produits, et elles sont confrontées à des garçons, ce qui favorise les mariages et les diverses contraintes institutionnelles informelles. grossesses précoces ainsi qu’une lourde charge de travail domestique. Si les femmes avaient un accès égal aux ressources productives, elles pourraient accroître considérablement les rendements de leurs exploitations et ainsi réduire la faim. 12 http://www.fao.org/3/i2050e/i2050e.pdf 60 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.2.5 Principaux effets en termes d’insécurité alimentaire, de retards de croissance et de malnutrition L’insécurité alimentaire, les retards de sept Centrafricains sur dix vivant sous le seuil de croissance et la malnutrition se sont aggravés ces pauvreté international (1,90 USD par jour, PPA dernières années en raison de la persistance de 2011) en 2020. La malnutrition chronique sévit problèmes structurels et de la faible productivité chez les nourrissons et les jeunes enfants, le retard du secteur agricole . Près de 2,1 millions de de croissance touchant 37,5 pour cent d’entre eux personnes (43 pour cent de la population) devraient en 201814. La pandémie de COVID-19 et le regain vivre en situation de crise d’insécurité alimentaire d’insécurité dans le contexte des conflits électoraux aiguë (phase 3+ ou plus de la classification intégrée de 2020 ont occasionné une hausse du coût de la vie, de la phase de sécurité alimentaire) entre septembre les prix des denrées alimentaires ayant flambé sur 2021 et mars 2022, selon les estimations les les marchés de Bangui et dans tout le pays, tandis plus récentes de la classification intégrée de la que les revenus des ménages ont stagné ou chuté. phase de sécurité alimentaire13. Cela représente En conséquence, la vulnérabilité et la proportion de une baisse marginale de 7 pour cent par rapport à Centrafricains risquant de tomber dans l’extrême la période comprise entre avril et août 2021. La pauvreté ont augmenté. pauvreté est également prononcée, avec plus de Figure 26 : Près de la moitié de la population devrait être affectée par une insécurité alimentaire aiguë. Insécurité alimentaire aiguë, septembre 2021-mars 2022 Source : Classification de la phase de sécurité alimentaire intégrée, octobre 2021. 13 Analyse d’alerte précoce FAO-PAM des points chauds d’insécurité alimentaire aiguë. Mai 2021. 14 https://globalnutritionreport.org/resources/nutrition-profiles/africa/middle-africa/central-african-republic/. 61 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE La RCA souffre d’une insécurité alimentaire alimentaire, les autorités doivent mettre en œuvre aiguë dû en partie aux conflit armés et la baisse des mesures visant à promouvoir la productivité dans de la productivité agricole. Près de 2,7 millions les différentes zones agroécologiques en fournissant de personnes seraient probablement confrontées des conseils et une assistance aux agriculteurs, en à des niveaux élevés d’insécurité alimentaire aiguë particulier aux femmes et aux populations jeunes. jusqu’en mars 2023 en l’absence d’aide humanitaire. En l’absence d’une réponse immédiate aux besoins Les mesures prises par le Gouvernement croissants, de nouvelles pertes en vies humaines pour lutter contre la malnutrition et l’insécurité se produiront, les vulnérabilités augmenteront et alimentaire ont pour la plupart échoué à cause les niveaux d’insécurité alimentaire deviendront des perturbations liées à la crise sécuritaire de plus alarmants, en même temps que la capacité 2012.. Ainsi, des initiatives telles que la Stratégie de longue date des organisations humanitaires de développement rural, d’agriculture et de à opérer dans le pays et à intervenir dans un sécurité alimentaire, qui n’ est autre que la stratégie environnement extrêmement complexe et dangereux sectorielle détaillée visant à transformer le secteur risque de s’affaiblir. Comme près de la moitié de la rural en moteur de la reprise économique, et le population n’est pas en mesure de satisfaire ses Programme national d’investissement agricole et de besoins alimentaires minimaux quotidiens, il est sécurité alimentaire 2011-2015, destiné à assurer crucial de continuer à fournir une aide aux moyens les besoins alimentaires de la Nation, à accélérer de subsistance pour renforcer la résilience des le développement socioéconomique et à réduire populations vulnérables (FAO 2021). La situation la pauvreté et les inégalités, n’ont pas donné les actuelle est due à un conflit persistant dans plusieurs résultats escomptés, en grande partie à cause du régions du pays, aux violences liées aux élections, aux conflit armé de 2012-13, qui a réduit leur portée. En faiblesses structurelles et aux déplacements massifs outre, la forte prévalence des maladies infectieuses de population. En outre, les effets socioéconomiques a été exacerbée par l’augmentation du nombre de de la pandémie de COVID-19, la guerre en Ukraine et personnes déplacées à l’intérieur du pays en raison du les effets dévastateurs des catastrophes naturelles conflit, et de multiples initiatives gouvernementales telles que des inondations ont exacerbé les ont échoué faute de planification et en raison d’une vulnérabilités des ménages. mauvaise gestion. La RCA souffre également d’une faible expertise en matière de nutrition, ce qui a La coordination des interventions et le suivi entravé les efforts visant à diffuser des informations de la détérioration de la situation de la sécurité et des conseils sur les besoins alimentaires des alimentaire et nutritionnelle sont insuffisants. La groupes vulnérables, notamment des enfants, et à RCA a mis en place un comité interministériel sur la réduire le nombre d’enfants gravement affectés par sécurité alimentaire, qui est rattaché à la Primature. la malnutrition aiguë. Pour lutter de manière adéquate Cependant, pour renforcer la prévention et la gestion contre la malnutrition et l’insécurité alimentaire, les des catastrophes liées à l'insécurité alimentaire, le autorités doivent : (i) recruter plus de professionnels pays devra élaborer des plans et des stratégies, spécialisés en nutrition qui peuvent diffuser des comme le font d'autres pays tels que l'Irak. La informations sur les apports alimentaires ; (ii) allouer communauté internationale et les bailleurs ont pris des fonds dédiés aux activités de nutrition  ; et (iii) des mesures efficaces pour mobiliser des ressources augmenter la disponibilité d’aliments riches en cet égard. En outre, il est peu probable que le recours protéines et en micronutriments en intensifiant la de certaines organisations humanitaires aux appels productivité agricole. téléphoniques sélectifs pour évaluer la situation permette d’avoir une vision précise de l’urgence de l’insécurité alimentaire dans le pays. La guerre actuelle entre la Russie et l’Ukraine a également causé la hausse du prix des céréales, ce qui aura un effet multiplicateur sur les prix des autres produits de base. Pour combattre les défis de l’insécurité 62 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.3 Principales problématiques transversales à aborder pour réussir la transformation du secteur 2.3.1 S’attaquer aux problèmes de gouvernance et d’institutions Les politiques et les plans visant à moderniser développement ainsi que les formations spécifiques les pratiques agricoles se sont avérés inefficaces. liées au secteur agricole sont quasi-inexistantes, ce Les conflits et les violences récurrents ont eu un qui limite le potentiel d’expansion du secteur. De lourd impact le secteur agricole. Des décennies de nombreuses tentatives ont été menées ces dernières conflits, d’instabilité et de progrès disparates dans le années pour mettre en place des stratégies visant programme de réformes structurelles ont gravement à développer l’agriculture et à réduire l’insécurité ébranlé le cadre institutionnel de l’agriculture. Les alimentaire par le biais de l’autonomisation des institutions publiques ne disposent toujours que communautés locales. d’une faible capacité à fournir des services de base aux agriculteurs et aux éleveurs et à remplir leurs Le cadre institutionnel regroupe une multitude missions essentielles. Au cours des dernières années, de structures, mais dispose de capacités limitées le développement agricole a été guidé par plusieurs pour vulgariser les services agricoles. Le contexte documents de planification stratégique qui n’ont pas institutionnel du secteur agricole de la RCA implique été appliqués en raison de dispositifs institutionnels des organes étatiques et non étatiques opérant complexes, d’une structure d’incitation faible, de dans des structures centralisées et décentralisées. changements fréquents dans la hiérarchie et d’un L’efficacité des organes étatiques reste discutable. manque de personnel qualifié, ce qui a fragilisé Par exemple, l’Agence Nationale de Développement l’efficacité des autres grandes institutions sectorielles de l’Elevage n’a pas redynamisé le sous-secteur de (voir Annexe). En dépit de ces plans, l’allocation de l’élevage en accordant aux éleveurs les moyens de ressources au secteur agricole est restée insignifiante. transformer leurs activités pour passer des systèmes La croissance de la productivité agricole a été limitée traditionnels à des systèmes améliorés. De plus, la par des lois foncières obsolètes. La recherche et le Société d’Etat de Gestion des Abattoirs ne fonctionne 63 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE pas à pleine capacité en raison du petit nombre publics agricoles de la RCA résultera de leurs d’animaux livrés, tandis que l’Office National des capacités de gestion et de leurs performances en Semences ne dispose que d’une capacité réduite en termes de capacité d’anticipation et d’appui ponctuel termes d’équipement et de personnel, engendrant aux agriculteurs. Pour satisfaire ces exigences, des retards administratifs dans la certification l’administration de l’agriculture doit être réorganisée de variétés améliorées de semences à utiliser en en se fondant sur une vision à long terme, mettant préparation des prochaines saisons agricoles. l’accent sur la qualité des prestations. Enfin, l’Office National du Coton, qui a été créé il y a quelques années, ne parvient toujours pas à remplir Les structures des entreprises publiques son rôle, et l’Institut Centrafricain de Recherche et parapubliques sont peu fonctionnelles. Par Agricole n’a pas été en mesure de produire et de exemple, tous les fonds institutionnels ont déjà été diffuser des substituts aux engrais minéraux tels dissous en raison de problèmes de gouvernance, que le système de semis direct sur paillis ou de et la Société d’État de Gestion des Abattoirs ne développer des variétés de semences améliorées dispose pas des équipements nécessaires pour pour les agriculteurs. atteindre sa pleine capacité. L’ORCCPA éprouve des difficultés pour son fonctionnement à cause de Une autre faiblesse organisationnelle tient au l’effondrement de la filière café ayant entrainé une fait que la déconcentration des services publics baisse drastique de ses ressources financières qui de l’agriculture est limitée . Il est quasiment ont eu comme corollaire l’accumulation des dettes impossible de créer des offices publics agricoles de l’Office. La Société Centrafricaine de Palmiers à à l’intérieur du pays, dans des provinces rurales Huile est également en cours de liquidation, et l’Office parfois démographiquement denses. Cette situation National du Matériel Agro-pastoral , crée par décret s’explique en partie par le regain d’insécurité. En effet, depuis janvier 2007 n’est pas opérationnel. En ce qui des zones entières désertées par les pouvoirs publics concerne la participation des acteurs non étatiques, se retrouvent livrées à des gangs incontrôlés, des les organisations professionnelles rurales manquent coupeurs de route, des braconniers et autres malfrats de financement et de la synergie nécessaire pour notoires. Il en résulte une répartition asymétrique agir efficacement. Quant aux organisations non des services publics de l’agriculture sur l’ensemble gouvernementales, leurs missions sont hétéroclites, du pays, avec une forte concentration dans les engendrant des conflits d’intérêts sur le terrain et des grandes agglomérations, notamment à Bangui. Les chevauchements d’activités. nominations dans les provinces rurales servent de voie de garage pour le personnel peu apprécié de la hiérarchie qui devient en conséquence démotivé et moins productif. Par ailleurs, les infrastructures qui abritent les services publics de l’agriculture en RCA posent un véritable problème. La plupart de ces infrastructures ont été héritées de l’administration coloniale et ont vieilli, se sont délabrées et tombent en ruine. Il n’est pas rare de voir des bâtiments dépourvus des conditions minimales de travail, sans eau, sans électricité, sans toilettes et sans confort. Cela illustre l’état de dégradation avancé de ces infrastructures administratives. Cette faiblesse organisationnelle se double d’un déficit en matériels ou en équipements. Le peu d’équipement existant est concentré entre les mains de quelques directeurs, au détriment des structures sur le terrain. Le dynamisme des services 64 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 27 : Le secteur agricole regroupe une multitude d’acteurs qui n’ont généré qu’un faible impact. Cadre institutionnel de l’agriculture en RCA ORCCPA SEGA ICRA ONASEM FIDE ACTEURS ÉTATIQUES Directions RDs générales ACDA du MADR CENTRAPALM FDAP ANDE ONMAP ONC Organisations professionnelles ONG Secteur privé ACTEURS NON ÉTATIQUES rurales – Chambre d'Agriculture – Fédérations – Associations Source : Schéma élaboré par les services de la Banque mondiale. 65 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.3.2 Faible accès au financement L’accès au financement constitue le principal surmonter les difficultés d’accès au financement, goulot d’étranglement pour le développement du n’est pas fonctionnel. Des institutions de microfinance secteur agricole. Selon l’enquête sur l’agriculture opèrent dans le pays, mais elles n’ont pas réussi à et l’élevage, plus de 93 pour cent des agriculteurs améliorer l’accès au financement, notamment dans ont déclaré que l’accès au crédit constituait le le secteur agricole. La microfinance représente 1 principal goulot d’étranglement de leurs activités. Le pour cent du total des facilités de crédit et ne dessert manque d’appui technique et l’absence de semences que 0,5 pour cent de la population. Les services améliorées occupent la deuxième et la troisième de banque mobile offrent une alternative qui peut place parmi les contraintes majeures auxquelles servir les clients pour les transactions financières sont confrontées les entreprises. En raison de même dans les villages d’agriculteurs éloignés. Mais l’insuffisance des infrastructures de marché et des contrairement à ce qui se passe dans plusieurs autres cadres juridique et judiciaire, le secteur financier est pays africains, la pénétration du téléphone mobile faible. Le Fonds de Développement Agropastoral, reste faible en RCA, ne touchant que 48 pour cent de censé soutenir les agriculteurs et les aider à la population totale. Figure 28 : Le faible accès au financement, à l’appui technique et aux semences améliorées constitue les principaux goulots d’étranglement du secteur agricole. Principales contraintes auxquelles sont confrontés les agriculteurs en RCA, 2021 Pourcentage des exploitants agricoles 100 90 80 70 60 50 40 30 20 10 0 c. ue s s es s es se .) e n e l re ns es so e le re ss rn tio tc an uv ré ol ol es ol tio iq ta ,e ltu te ou u a fin ric ric ric hn io er d'œ td gé da st in es br cu él ch ag ag ag ec re de vé on en ag n am de n de fo io it Sé ts ts ls In m e ai uv ie at Dé pu qu so ui ui ux s se m ol ad sa r ce ap od od ig /v an Fe ui de de al en M x d’ pr pr Ep ge M M au rie rie m e lla s s m se qu de le nu nu pi ni an ur de pé Pé é/ s (a ba M po l/ rit e s qu re ra ix cu és ltu Pr ru an sé ch cu M e In ar od m s de Ex de n tio e qu ta an s va m Dé Contrainte pr. exploitants Pas une contrainte pr. exploitants Source : Calcul des services de la Banque mondiale sur la base des données de l’enquête sur l’agriculture et l’élevage, 2021-22. 66 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Il n’existe pas de cadre institutionnel et de crédit et d’épargne sur laquelle on peut s’appuyer. juridique réglementant la finance rurale en Par ailleurs, de nombreuses femmes engagées dans RCA. Il en résulte un faible accès aux capitaux de l’agroalimentaire en RCA disposent de compétences base pour les activités agricoles, ce qui entrave entrepreneuriales et sont susceptibles de solliciter le développement potentiel du secteur agricole des prêts pour mener à bien leurs activités. et compromet le développement rural du pays. L’inadéquation des services et l’insuffisance La faible densité de population du pays n’a pas des portefeuilles bancaires limitent l’accès des favorisé les services bancaires conventionnels, populations aux prêts et autres services bancaires. en particulier en milieu rural . La politique Environ 70,2 pour cent des adultes ne possèdent financière ne s’est pas attachée à relever le taux de pas de compte dans une institution financière bancarisation en RCA, qui est faible à 5 pour cent formelle par manque de confiance15. En revanche, selon les estimations, en raison de la distance entre 52,3 pour cent des adultes empruntent de l’argent les centres bancaires (nombre limité d’agences à un groupe d’épargne informel16. Les réformes implantées principalement dans les villes) et du gouvernementales sur les questions de garanties faible taux d’urbanisation. Les services bancaires dans les institutions financières se révèlent trop mobiles sont relativement nouveaux, dépendent de rigides et dépassent la capacité de mobilisation des la présence des sociétés de téléphonie mobile et ressources des citoyens moyens, et les réformes ne restent concentrés à certaines zones urbaines. En prennent pas suffisamment en compte les besoins outre, l’utilisation des services de banque mobile des groupes vulnérables. En conséquence, de pour l’agriculture demeure réduite. Les personnes nombreuses institutions financières estiment qu’il ayant accès aux services bancaires mobiles peuvent est difficile d’accorder des crédits. Selon Making effectuer leurs transactions financières même Finance Work for Africa (2018), parmi les secteurs dans les zones reculées et limiter leur utilisation de qui ont le plus bénéficié de prêts bancaires en 2017 l’argent liquide, ce qui exige d’avoir de l’épargne et figurent le commerce (20 pour cent) et les transports un compte bancaire. De nombreux pays ont réussi et communications (16 pour cent). Pour accroître à élargir l’accès au financement grâce aux systèmes l’accès au financement, les autorités doivent élaborer bancaires mobiles. Au Ghana, par exemple, une un cadre réglementaire pour la finance rurale et banque rurale se fixe comme objectif de faciliter le sensibiliser aux avantages potentiels de l’accès paiement des producteurs de cacao. En Ouganda, le au capital financier d’une institution financière paiement mobile Ensibuuko permet aux coopératives formelle. Des prêts avec des taux d’intérêt à un d’offrir des services financiers à leurs membres grâce chiffre par le biais des institutions de microfinance à une application mobile appelée Mobile Banking and existantes assorties à l’aide aux agriculteurs pour Information Software (Mobis), tandis qu’au Nigeria, le renforcement de leurs capacités faciliteraient le gouvernement a mis en place un programme la transition de l’agriculture de subsistance vers spécifique appelé Stratégie nationale d’inclusion l’agriculture commerciale, et des investissements financière du Nigeria afin d’accroître l’accès au crédit, dans des opportunités hors agriculture sont urgentes en particulier pour les groupes confrontés à des défis pour stimuler la demande de prêts. Il existe des de taille tels les femmes et les jeunes. possibilités prometteuses de mettre en place un cadre réglementaire pour piloter les services bancaires de détail, étant donné que les adultes ont prouvé qu’ils pouvaient être des emprunteurs responsables, et qu’il subsiste une longue tradition de systèmes informels 15 https://globalfindex.worldbank.org/sites/globalfindex/files/countrybook/Central pour cent20African pour cent20Republic.pdf 16 Ibid. 67 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 2.3.3 Améliorer l’accès aux marchés Le mauvais état des routes et l’absence de ou « passable ». Une grande partie du pays n’est pas stratégie d’entretien, notamment pour les pistes desservie par le réseau routier, ce qui limite l’accès rurales, entravent l’accès aux marchés. Sur les 24 aux zones rurales, aux marchés et aux services de 137 km de routes nationales, régionales et rurales, base. Pour évacuer les produits agricoles à moindre seuls 855 km (3,5 pour cent) sont revêtus17. Le coût vers les marchés, les autorités doivent améliorer réseau routier est relativement modeste et souffre la qualité des infrastructures de transport et des d’un manque d’entretien, ce qui entrave l’accès routes. Le corridor Douala-Bangui reste le principal des agriculteurs aux marchés et le développement axe routier pour le transport des marchandises potentiel du secteur agricole. Il n’existe pas de échangées au niveau international, représentant stratégie d’entretien des pistes rurales, de sorte environ 80 pour cent du total des importations et des qu’elles se retrouvent en mauvais état pendant exportations, mais il n’est pas entièrement revêtu. Les de longues périodes. La mauvaise gouvernance et infrastructures routières existantes du pays souffrent l’insuffisance des ressources se sont avérés fatals d’un entretien insuffisant et constituent ainsi une pour le Fonds routier national. Les produits agricoles contrainte cruciale pour les affaires, restreignant proviennent généralement des zones rurales l’accès des agriculteurs aux marchés et aux services éloignées, mais seulement 16 pour cent du réseau sociaux essentiels. routier rural est classé comme étant en état « bon » 17 https://dlca.logcluster.org/display/public/DLCA/Central+African+Republic 68 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Les récentes crises (c’est-à-dire la guerre civile, La politique de développement rural n’a pas l’insécurité, les crises politiques et la pandémie mis l’accent sur l’amélioration des infrastructures de COVID-19) ont exacerbé les défis et les rurales. Les politiques des dernières décennies problèmes liés aux politiques et aux institutions de ont essentiellement porté sur le développement de développement rural. L’insécurité et la destruction la production alimentaire et pastorale par le biais généralisée des infrastructures, des équipements de projets agricoles exclusivement financés par et du bétail pendant la crise de 2013 ont privé de les bailleurs de fonds, tel que le Projet de Relance nombreux agriculteurs et entreprises de fonds de Agricole et de Développement de l’Agribusiness roulement cruciaux, perturbé la production et entraîné financé par la Banque Mondiale. Le non-paiement l’effondrement des marchés des intrants et des des arriérés, l’insécurité généralisée et d’autres produits agricoles. De nombreuses agences agricoles externalités telles que les chocs climatiques ont ont subi des pillages et la destruction d’installations impacté négativement les moyens de subsistance et d’équipements. La perte des banques de gènes au de la population rurale et plus généralement centre de recherche agricole a été particulièrement de la population pauvre. Le niveau de vie de la dommageable et a réduit davantage la disponibilité population a chuté et l’exode rural a augmenté de des semences améliorées. Il est urgent de relancer la façon exponentielle. La proportion de personnes production agricole et animale. La demande intérieure pauvres vivant dans des bidonvilles urbains est de produits alimentaires reste insatisfaite, le conflit, la passée de 91,9 pour cent en 2000 à 95,4 pour cent violence et l’instabilité ayant impacté négativement en 2019. La récente politique de développement le secteur agricole. Selon un rapport de la Banque rural du pays, lancée en 2021 dans le cadre du mondiale sur le projet d’Appui à la relance de programme d’appui au développement rural, met l’agriculture et au développement de l’agrobusiness l’accent sur l’autonomisation des jeunes et des en RCA18, 75 pour cent des denrées consommées femmes à travers  : (i) la formation professionnelle avant la guerre provenaient des agriculteurs. Ce des acteurs de l’agriculture en milieu rural ; et (ii) les pourcentage est tombé à 46 pour cent depuis. Selon services financiers et non financiers pour soutenir le Programme alimentaire mondial19, 47 pour cent de l’entrepreneuriat dans les zones rurales autour des la population urbaine, notamment les habitants de bassins de production (agropoles). Bien que cette l’agglomération de Bangui, qui dépendent davantage politique puisse contribuer à améliorer les conditions des marchés et des salaires pour leur subsistance, de de vie des femmes et des jeunes agriculteurs, elle souffrent d’insécurité alimentaire en raison du conflit est entravée par la faible mobilisation des ressources, en cours et de la COVID-19. Contrairement à leurs l’accès restreint aux intrants productifs et l’insécurité compatriotes ruraux, ils ne disposent généralement dans de nombreuses régions du pays. pas des mécanismes d’adaptation traditionnels tels que la chasse et la cueillette. 18 https://documents1.worldbank.org/curated/pt/363251558404110297/text/Central-African-Republic-Agriculture-Recovery-and-Agribusiness- Development-Support-Project.txt 19 https://www.wfp.org/news/half-population-central-african-republic-grip-dire-food-insecurity-emergency-un-warns 69 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.3.4 Problèmes persistants concernant les droits de propriété et d’utilisation des terres Les lois foncières sont dépassées et ne propriétaires et non comme de simples occupants favorisent pas le développement agricole. La loi précaires de terres. La taille réduite des surfaces de 1964 a classé les terres en deux catégories : le cultivées se traduit par une faible capacité de domaine public - terres non soumises à des droits production, ce qui limite leur potentiel économique. individuels - et le domaine privé - terres appartenant à l’Etat. La concession foncière consiste en une Il existe une concurrence entre le droit procédure par laquelle l’Etat autorise une personne coutumier et le droit foncier. En RCA, les droits ou une communauté à occuper une partie du territoire de propriété émanent soit du cadre juridique du national. Elle peut déboucher sur la propriété si le pays, soit de ses coutumes. Les droits légaux sont bénéficiaire met en valeur le terrain. Selon la loi, le consacrés par des textes nationaux et internationaux terrain est mis en valeur si l’ancienne couverture (conventions, lois internationales, constitutions, végétale est défrichée pour établir de nouvelles lois et règlements nationaux, etc.), tandis que constructions ou plantations. Cette exigence les droits coutumiers découlent des pratiques et restreint les possibilités d’accès à la propriété pour habitudes communautaires et ne se basent sur aucun les communautés qui protègent l’environnement. instrument les formalisant. Les droits coutumiers sont Cette limitation est renforcée par des procédures souvent en contradiction avec les droits légaux, ce qui d’obtention de titres fonciers longues, lourdes et amène à faire la distinction entre les droits légaux et complexes, qui nécessitent des processus et des les droits légitimes. Le défi majeur de la promotion capacités administratives et juridiques confirmées. des droits des peuples consiste à concilier légalité et Les populations rurales dont l’accès aux institutions légitimité. et à l’éducation est faible ignorent généralement ces procédures et ne les suivent pas dans la plupart La procédure administrative pour l’acquisition des cas. En outre, de nombreux agriculteurs se de terres s’accompagne d’un coût prohibitif. Cela a comportent déjà comme propriétaires des terres eu un impact négatif sur l’enregistrement des terres qu’ils occupent avec leur famille parfois depuis (on estime que seulement 0,1 pour cent des terres plusieurs générations. sont enregistrées), les transactions foncières et les marchés fonciers, et a multiplié les occupations La disposition de la Loi n° 63 de 1964, qui informelles de terres. Par exemple, l’enregistrement prévoit que toutes les terres appartiennent à d’une propriété en RCA nécessite cinq procédures l’État, compromet la croissance de la productivité avec un délai moyen de 75 jours et coûte 18,5 pour agricole et appauvrit la population rurale. Elle cent de la valeur de la propriété (USAID 2021  ; précise que les populations ne peuvent pas pratiquer Banque mondiale 2008  ; Banque mondiale 1998  ; d’activités agricoles sans l’autorisation de l’Etat, et Furth 1998). Dans d’autres pays africains, les qu’elles doivent s’acquitter d’une taxe pour exploiter procédures d’enregistrement foncier sont plus courtes leurs propriétés (articles 180 et 189 du code forestier et moins onéreuses. Par exemple, l’enregistrement de la RCA 2008)20. Le paiement des impôts ne permet des terres en Afrique du Sud nécessite 6 procédures pas au Gouvernement de collecter de fonds publics et ne dure en moyenne que 17 jours, et les coûts suffisants pour faire appliquer les lois qui interdisent sont basés sur les taux du marché pour la valeur de l’exploitation par quiconque des ressources naturelles la propriété. Au Kenya, l’enregistrement des terres auxquelles il n’a pas accès légalement. Cependant, prévoit cinq procédures, dure en moyenne 30 jours les agriculteurs cultivent et exploitent leurs terres et coûte 4 pour cent de la valeur de la propriété en ancestrales sans attendre l’autorisation de l’État ni milieu urbain et 2 pour cent en milieu rural. payer d’impôts, se comportant comme les véritables 20 http://extwprlegs1.fao.org/docs/pdf/caf107432.pdf 70 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE La loi foncière actuelle reconnaît le droit productivité agricole. Néanmoins, le Ministère de coutumier mais en réduit la portée, le droit l’Agriculture a mis en place un code agro-pastoral coutumier étant dominant en matière d’accès à pour encadrer l’acquisition et la sécurisation des la terre et de régime foncier en milieu rural. La terres agricoles. Il est primordial de soumettre la loi limite le droit coutumier au droit d’utilisation des gestion des terres rurales au droit coutumier. Les terres, ce qui a pu réduire l’occupation des terres activités agricoles sont pratiquées en milieu rural, en milieu rural à des fins forestières, en particulier ce qui permettra également d’allouer efficacement pour les petits exploitants qui ne disposent que d’un les terres aux pâturages et aux cultures. Les lois faible pouvoir d’achat. Il n’existe pas d’instrument foncières en vigueur n’offrent pas une protection juridique pour la gestion et la sécurisation des en matière d’acquisition de terres cultivables aux terres agricoles. En revanche, le chef et les notables groupes vulnérables tels que les femmes et les jeunes attribuent les terres sans restriction aucune, ce qui forment pourtant un segment indispensable de la qui pourrait déclencher des conflits fonciers entre chaîne de valeur agricole. les agriculteurs et les éleveurs, réduisant ainsi la Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale 71 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE 2.3.5 Renforcer l’accès aux moyens de production et leur disponibilité Améliorer Les procédures d’enregistrement, de certification et de contrôle qualité des l’accès aux semences s’avèrent par ailleurs lourdes et chronophages. Cela explique la qualité et engrais la quantité limitées des variétés de semences améliorées disponibles, ce qui affecte la productivité agricole. En outre, le délai nécessaire pour l’échantillonnage, les essais et la rédaction des rapports est tel que la qualité des semences peut se détériorer au-delà des limites acceptables, et les procédures peuvent engendrer des retards excessifs dans l’homologation des variétés ou des lots de semences. L’enregistrement et la certification des semences commercialisées génèrent un problème majeur pour les initiatives semencières utilisant des variétés locales ou des semences non certifiées. Le secteur formel des semences doit être réglementé tout en évitant d’interférer avec les systèmes semenciers des agriculteurs. L’Indonésie, par exemple, applique une exemption spécifique pour les semences produites par les agriculteurs et commercialisées dans le village, ce qui donne au moins une opportunité pour la production et la diffusion de semences locales (Louwaars 2005). Il est possible de stimuler la productivité agricole en utilisant davantage d’engrais. L’utilisation d’engrais est indispensable à la productivité agricole surtout pour les cultures d’exportation comme le coton et le café, et à la production alimentaire étant donné que les produits agricoles ont besoin de minéraux et de nutriments essentiels pour se développer de manière forte et saine. Le manque d’engrais réduit la productivité agricole et, par conséquent, le rendement des cultures. Les résultats de diverses analyses de régression montrent que l’utilisation des engrais en RCA est positivement corrélée à la croissance de la productivité agricole. Un supplément de 0,01 kg d’engrais par hectare relève la croissance de la productivité agricole de 3,3 pour cent, ce qui met en évidence le rôle que peut jouer l’utilisation des engrais, même dans une proportion modérée, pour stimuler de manière significative la productivité agricole en RCA. Évaluer 88. Les autorités continuent de promouvoir la mécanisation, mais les avantages soigneusement escomptés restent très variables. Les efforts de mécanisation menés par les États dans les coûts et les toute l’Afrique, semblables aux mesures actuellement mises à l’essai en RCA, ont pour la avantages de la plupart échoué, en grande partie à cause de problèmes de gouvernance généralisés tels mécanisation que le manque d’accès à des outils et des machines adaptées aux conditions locales et un accès faible ou inexistant aux pièces de rechange, à des opérateurs qualifiés et aux techniciens. Les programmes visant à relever ces défis, y compris les importations de machines à grande échelle, n’ont pas débouché sur la transformation souhaitée du secteur agricole. Les anecdotes abondent dans d’autres pays sur des tracteurs flambant neufs non exploités. Les politiques et les institutions n’ont pas favorisé l’utilisation et l’adoption d’équipements et d’outils agricoles alternatifs à un coût abordable pour augmenter la productivité du travail. La RCA doit identifier les modèles adaptés, les ressources et les incitations adéquates pour tirer pleinement parti de la mécanisation. Les défis à relever pour une plus grande prévalence et l’adoption de la mécanisation concernent : (i) le faible accès aux tracteurs et aux outils au moment opportun partout où le besoin se fait sentir ; (ii) le manque d’opérateurs pour gérer des entreprises de mécanisation agricole au 72 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE service des petits exploitants ; (iii) l’absence de centres d’entretien et de distribution de pièces détachées en milieu rural ; (iv) le manque de centres de mécanisation agricole; (v) l’inexistence de centres de développement des technologies agricoles destinés à la production primaire des petits exploitants ; (vi) la perception des agriculteurs selon laquelle ils n’ont besoin de s’engager dans la mécanisation (les enquêtes auprès des agriculteurs montrent qu’ils soulignent l’importance de l’accès à des intrants de qualité, au crédit, aux routes et aux marchés) ; et (vii) l’absence d’un écosystème de connaissances, d’expérience et de capacités techniques nécessaires pour permettre une mécanisation généralisée. Bien qu’il existe un fort souhait d’appuyer une plus grande mécanisation en RCA, les modèles, ressources et incitations appropriés doivent être harmonisés pour libérer le potentiel des services de mécanisation du secteur privé. Améliorer La production animale de la RCA est tombée en dessous des niveaux d’avant la l’accès aux guerre de 2013. Ce déclin a été caractérisé par les nombreux déplacements d’éleveurs produits de leurs zones traditionnelles du nord-ouest (Ouham, Ouham Pende) vers le centre et vétérinaires l’est du pays (Bambari, Bria) à cause de l’insécurité récurrente dans ces zones. Beaucoup et renforcer d’éleveurs subissent des pertes de bétail à cause des pillages, des vols et des attaques les capacités des groupes armés pendant leur déplacement. Cela a fortement perturbé la production et humaines et la commercialisation du bétail depuis le début de la guerre de 2013 jusqu’à aujourd’hui. financières Par ailleurs, la santé animale reste préoccupante, avec une augmentation des foyers de maladies bactériennes, virales ou parasitaires (par exemple, la péripneumonie contagieuse bovine et la maladie de Newcastle), l’absence de campagne de vaccination depuis 2017 et les faibles capacités financières et administratives des services étatiques décentralisés. Des médicaments contrefaits sont écoulés sur le marché et les agriculteurs sont contraints d’administrer eux-mêmes les vaccins sans formation ni expérience préalable. Selon les services de l’élevage, cette situation a entrainé une augmentation du taux de mortalité du bétail, qui varie de 20 à 50 pour cent selon les zones. Malgré la persistance de l’insécurité et le faible approvisionnement limité en vaccins dans certaines zones, la production animale de la RCA se classe au deuxième rang de la CEMAC, avec un indice de production de 107,2 (2014-2016 =100), derrière le Tchad (122,2), mais devant certains pays d’Afrique subsaharienne tels que le Nigeria (103), le Botswana (94,7) et l’Afrique du Sud (99,8). Les difficultés majeures auxquelles les éleveurs sont confrontés résident dans le manque de produits vétérinaires, le faible accès au financement et à l’appui technique ainsi que l’insuffisance de l’offre de compléments alimentaires. Les produits vétérinaires sont essentiels pour les éleveurs étant donné que leur utilisation peut stimuler la productivité et améliorer la rentabilité de l’élevage. Ils stimulant la résistance immunitaire des troupeaux, qui est souvent dégradée par la densité d’occupation des bâtiments et les conditions d’élevage stressantes. Certains produits exercent également un effet anabolisant qui accélère la croissance du bétail. Cependant, plus de 90 pour cent des éleveurs déclarent affronter des difficultés à accéder à la fois aux produits vétérinaires et à un financement. 73 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Figure 29 : Le manque de produits vétérinaires et de Figure 30 : La RCA valorise peu sa production agricole. financement constitue la principale contrainte à laquelle les éleveurs sont confrontés. Importations et exportations de matières premières agricoles, Principales difficultés auxquelles sont confrontés les éleveurs 1960-2021 Pourcentage des éleveurs 100 % 100 90 % 90 80 % 80 70 70 % 60 60 % 50 50 % 40 30 40 % 20 30 % 10 0 20 % fin es re Er men e du s il l d ail il s n re rs ntr qu ta ta io 10 % iè r ét at bé bé ai ai ni nc Su ce b ur rin t ch a le u n at co té te 0% re ce vé Vo i e em on de al nd d an ts i i ts ve a at té r ’ ui en d nt ili e ur n ée od n . d s in ép ib ie ou bo a ha po pr on in or ca O ,R pl er Ga Tc Gu d’ ée sp de fri m o m e ch Di ng ra co e qu Ca qu ar nt Co de n m an a ce M e M de qu ic e an bl qu pu M an Ré M Moyenne 1960-2021 Exportations de matières premières agricoles Contrainte Pas une contrainte Moyenne 1960-2021 Importations de matières premières agricoles Source : Enquête sur l’agriculture et l’élevage, RCA. La qualité des services vétérinaires souffre du peu de capacité humaine et financière. La loi donne mandat à la profession des services vétérinaires de gérer la santé et les maladies animales en RCA. Cependant, à l’instar de la gestion d’environ quatre maladies épidémiques depuis 2016, la lutte contre les maladies contagieuses et leur prise en charge sont presque impossibles dans le pays. Il y a un manque important de services vétérinaires qui aideraient les éleveurs. En conséquence, de nombreux éleveurs s’appuient sur des techniques traditionnelles relativement inefficaces pour traiter le bétail. La dernière enquête sur l’agriculture et l’élevage révèle ainsi que moins de 17 pour cent des éleveurs utilisent des équipements et des méthodes modernes pour s’occuper du bétail. Cette situation appelle à une collaboration multidisciplinaire pour renforcer les services vétérinaires en cas d’urgence. Davantage de personnel devrait être formé à la gestion des zoonoses afin de garantir la qualité des ressources humaines disponibles. De même, davantage de matériel de laboratoire devrait être disponible pour faciliter la détection des maladies contagieuses. Il y a un manque de synergie et de coordination entre les acteurs du secteur de l’élevage. Cela a freiné leur capacité à adopter des stratégies d’adaptation efficaces pour faire face aux défis tels que les crises climatiques, les épizooties, l’insécurité, la pression agricole, l’expansion des aires protégées et les efforts pour poursuivre l’expansion des aires 74 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE protégées. Il existe des tensions intercommunautaires entre les éleveurs et les agriculteurs en RCA. L’absence de zones de délimitation des terres pour l’agriculture et les pâturages dans le droit foncier du pays a favorisé les occupations informelles. En conséquence, dès que des troupeaux provenant de l’extérieur se mêlent à ceux des troupeaux semi- nomades domestiques, cela occasionne un risque de vol de bétail, de destruction des champs de culture et de transmission de maladies (Kyra 2020). Il est urgent d’adopter la loi agropastorale pour impliquer toutes les parties prenantes afin de réduire les conflits entre les pasteurs et les cultivateurs. Promouvoir L’agroalimentaire pourrait générer davantage d’emplois et d’opportunités l’entrepreneuriat économiques. En Afrique subsaharienne, le secteur agroalimentaire génère environ 25 agricole et pour cent du PIB et trois-quarts des emplois. Le potentiel agroalimentaire en RCA reste l’agroalimentaire inexploité principalement en raison de  : (i) une faible promotion de l’entrepreneuriat agricole et de l’agroalimentaire ; (ii) une prise en compte insuffisante des infrastructures de production, de transformation et de commercialisation agricoles dans une perspective de chaîne de valeur ; (iv) un manque d’interconnexion entre les différents maillons de la chaîne d’approvisionnement ; (v) et un faible niveau de coordination et de synergie entre les parties prenantes dans la mise en œuvre (PASTAC-PEJA 2019). La situation est telle malgré la mise en œuvre d’un projet d’appui à la transformation du secteur agricole par le développement de chaînes de valeur agricoles prometteuses et la promotion de l’emploi des jeunes dans les secteurs agricole et agro-industriel en 2017. La RCA n’ajoute que très peu de valeur à sa production agricole. Ses exportations se composent essentiellement de produits agricoles bruts et semi-finis et de minéraux. Il s’agit de produits à faible valeur ajoutée en termes de recettes d’exportation qui fournissent peu d’emplois durables. Pour créer des emplois plus durables, les matières premières agricoles doivent être transformées afin d’encourager la création en aval d’emplois de transformation à plus forte valeur ajoutée sur le marché intérieur. L’ajout de valeur consiste à convertir ou à transformer les produits primaires en produits intermédiaires ou finis à plus forte valeur. La RCA fait partie des pays de la région ayant un niveau élevé d’exportations de matières premières agricoles, évalué à plus de 32 pour cent de ses exportations totales de marchandises sur la période 1960-2021, soit bien plus que la moyenne de la CEMAC qui est de 25 pour cent. 75 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Références Akresh, I. R. 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Doing Business 2009: Country Profile for Central African Republic 76 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Tableau 6 : L’évaluation des politiques agricoles récentes met en évidence des défis structurels persistants. ANNEXE Période 2020–2030 Politique Politique agricole nationale (PAN) (en cours) agricole Objectifs 1. Renforcer et diversifier la politique agricole afin d’améliorer la sécurité alimentaire et nutritionnelle. spécifiques 2. Améliorer l’accès des producteurs aux marchés pour accroître leurs revenus. 3. Soutenir le développement des petites et moyennes entreprises agricoles afin d’accroître leur contribution à la croissance économique du pays et au produit intérieur brut national 4. Promouvoir la création d’emplois décents et rémunérateurs afin de réduire la pauvreté et les inégalités. Réalisations • Activités agricoles mises en œuvre dans les bassins de production (agropole), au profit des femmes et des jeunes Contraintes • Faible capacité financière. • Absence du code agropastoral pour assurer l’accès à la terre. • Non-disponibilité des intrants agricoles. • Taux d’insécurité élevé. Forces • Approche spécialisée des activités agricoles planifiées par zones. • Participation des producteurs à l’élaboration de la politique agricole. • Prise en compte de la dimension de genre dans l’élaboration des objectifs. Faiblesses • De nombreux domaines d’intervention prévus sur 10 ans. • Absence de mesure endogène de la mobilisation des ressources au niveau local/communal. • Recours privilégié à l’approche par projet et à l’approche par chaîne d’approvisionnement pour les cultures commerciales. • Absence de mesures pour assurer la pérennité des mesures après le projet. Période 2017–2021 Politique Plan national de relance et de consolidation de la paix (plan agricole) agricole Objectifs 1. Assurer la sécurité alimentaire et la résilience. spécifiques 2. Dynamiser et développer les secteurs productifs : agriculture et élevage. Réalisations • Un meilleur accès aux semences améliorées, favorisant l’autonomisation des populations. • Intégration de pratiques agroécologiques dans les pratiques agricoles des bénéficiaires. • Formation d’agents communautaires en santé animale. • Initiation et accès à l’élevage en cycle court comme activité professionnelle pour les jeunes et les femmes. • Développement et renforcement des petites industries de transformation des produits agricoles et alimentaires (huileries, savonneries, minoterie). Contraintes • Taux d’insécurité élevé. • Difficulté à mobiliser les ressources internes. • Taux élevé de déplacements internes de populations. • Conflit persistant entre les éleveurs et les agriculteurs. • Nombre insuffisant d’organisations humanitaires pour appuyer l’initiative. Forces • Implication de la population locale dans la définition des objectifs. Faiblesses • Le mécanisme élaboré pour traiter de la productivité agricole et de la sécurité alimentaire était inapproprié dans le contexte de l’insécurité. • Mécanismes/stratégies insuffisants pour renforcer les organisations de producteurs. • Recours privilégié à l’approche par projet et à l’approche chaîne d’approvisionnement pour les cultures commerciales. • Absence de mesures visant à garantir la pérennité des réformes après le projet. • Aucune disposition concernant les groupes défavorisés. • Non prise en compte de la dimension de genre. 77 LA BANQUE MONDIALE | CINQUIEME CAHIERS ECONOMIQUES DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE Période 2011–2015 ANNEXE Politique Stratégie de développement rural, d’agriculture et de Politique nationale de développement de l’élevage en agricole sécurité alimentaire République centrafricaine Objectifs 1. Promouvoir la commercialisation des produits 1. Renforcer le cadre d’intervention institutionnel. spécifiques agricoles à l’intérieur et à l’extérieur de la RCA. 2. Renforcement des capacités. 2. Promouvoir et développer les organisations 3. Redynamiser les chaînes de valeur locales et professionnelles et agricoles. améliorer leur compétitivité. Réalisations • La formation des ménages à l’utilisation de la • Mise en œuvre d’une loi créant la formation des traction animale, qui a permis d’augmenter la personnels vétérinaires. production, notamment alimentaire. • Mise en œuvre de projets d’élevage qui ont renforcé l’autonomie de certaines communautés locales. Contraintes • Taux élevé de déplacement interne des • Taux élevé de déplacement interne des populations. populations • Conflit persistant entre les éleveurs et les • Conflit persistant entre les éleveurs et les agriculteurs. agriculteurs. • Nombre insuffisant d’organisations humanitaires • Nombre insuffisant d’organisations humanitaires pour soutenir l’initiative. pour soutenir l’initiative. • Accès limité aux intrants et au financement. Forces • Projets/programmes agricoles spécialisés élaborés • Priorité accordée à la formation du personnel et mis en œuvre pour atteindre les objectifs. vétérinaire. Faiblesses • Non-implication des populations/producteurs • Non-implication des populations/producteurs locaux dans la fixation des objectifs. locaux dans la définition des objectifs. • Recours privilégié à l’approche projet et à • Recours privilégié à l’approche par projet. l’approche sectorielle pour les cultures de rente. • Absence de mesures visant à garantir la pérennité • Absence de mesures visant à garantir la durabilité des réformes au terme du projet. des réformes après le projet. • Non prise en compte des groupes défavorisés. • Non prise en compte de la dimension de genre. • Non prise en compte de la dimension de genre. Credits: @Bureau pays de la Banque mondiale