66937 G O O D P R A C T I C E PA P E R N O . 1 Se regarder dans le miroir II Gazing into the mirror II Les contrats de performance dans les Performance contracts in Cameroon douanes camerounaises Customs Minette Libom Li Likeng, Marcellin Djeuwo, Samson Bilangna SUB-SAHARAN AFRICA TRANSPORT POLICY PROGRAM Se regarder dans le miroir II « Se regarder dans le miroir II » Les contrats de performance dans les douanes camerounaises Minette Libom Li Likeng Marcellin Djeuwo Samson Bilangna 1 Décembre 2011 Sub-Saharan Africa Transport Policy Program 1 Respectivement Directeur Général des Douanes du Cameroun, Chef de l’équipe de Gestion des Risques et Directeur de la division en charge de l’informatique. Le SSATP, né d’un partenariat international, a pour mission de promouvoir la réforme et le développement des capacités dans le secteur des transports en Afrique subsaharienne. De bonnes politiques garantissant un système de transport sûr, fiable et économiquement sain, aident les plus démunis à sortir de la pauvreté et les pays à intégrer la compétition internationale. ******* Le SSATP a pour partenaires  36 pays africains  8 communautés économiques régionales  2 institutions africaines : CEA et UA-NEPAD  7 bailleurs de fonds actifs : Commission européenne (principal bailleur de fonds), Norvège, Royaume-Uni, Suède, Fonds de facilitation des échanges, Banque islamique de développement, Banque africaine de développement et Banque mondiale (institution d’accueil)  Des organisations régionales publiques et privées ******* Le SSATP remercie la Commission européenne, la Norvège, le Royaume-Uni, la Suède, le Fonds de facilitation des échanges, la Banque islamique de développement, la Banque africaine de développement et la Banque mondiale pour leur soutien et leur appui financier au Programme. ******* Autres publications sur le site Web du SSATP www.worldbank.org/afr/ssatp Les constatations, interprétations et conclusions présentées ici sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement les vues des bailleurs de fonds du SSATP ou de ses partenaires. © 2011 Banque internationale pour la reconstruction et le développement /Banque mondiale Tous droits réservés. Table des matières Avant-propos ___________________________________________ vii Remerciements ___________________________________________ ix Sigles et abréviations ______________________________________ xi Introduction ______________________________________________1 Contexte des contrats de performance _________________________ 3 Structure des contrats ______________________________________5 Qualité des parties contractantes ____________________________ 5 Objectifs des douanes camerounaises et du contrat de performance_ 5 Mesures de la performance et ses modalités ____________________ 6 Les engagements mutuels __________________________________ 8 Récompenses et sanctions __________________________________ 9 Mise en œuvre des contrats _________________________________13 Les actes préparatoires aux contrats _________________________ 13 Passer par une nécessaire phase expérimentale ________________ 17 La démystification des rapports hiérarchiques _________________ 17 La nécessaire évaluation __________________________________ 18 Résultats obtenus _________________________________________19 L’impact des contrats sur les recettes douanières _______________ 20 Impact sur la lutte contre la fraude __________________________ 23 Impact sur les mauvaises pratiques __________________________ 27 Nouvelle étape : des contrats opérateurs ______________________ 33 Contexte ______________________________________________ 33 Les objectifs recherchés ___________________________________ 35 Mesures de la performance et ses modalités ___________________ 36 Engagements des parties __________________________________ 37 Récompenses et sanctions _________________________________ 38 Résultats à mi-parcours ___________________________________ 38 Les premières leçons à tirer des contrats opérateurs ____________ 41 Conclusion générale _______________________________________43 Bibliographie ____________________________________________45 vi Avant-propos Deux années après la parution du premier fascicule des douanes came- rounaises sur leur réforme, il m’est particulièrement agréable d’assurer aussi la préface du second. Cette nouvelle publication entre dans le contexte de l’année 2011 que l’Organisation mondiale des douanes a placée sous le signe de la « con- naissance comme catalyseur de l’excellence ». Elle atteste que les douanes gagnent à analyser et à montrer ce qu’elles font, afin de recueil- lir tout le soutien possible à leur réforme, de l’intérieur comme de l’extérieur de l’administration. Par ailleurs, il est très encourageant et instructif pour l’ensemble de la communauté douanière de voir se dérouler une réforme sur le long terme. En assurant une double continuité, dans la méthode de ré- forme—mesurer ses performances pour les améliorer—et dans la pu- blication des résultats, les douanes camerounaises se sont livrées à un exercice difficile, à la fois par la technique qu’il requiert et la transpa- rence qu’il occasionne. L’Organisation mondiale des douanes a été associée techniquement à cette réforme et il nous est donc possible d’en tirer directement quelques enseignements pour toute notre communauté. L’exemple relaté dans ce deuxième volet illustre l’attention que nous devons ac- corder au caractère empirique et pragmatique de toute réforme des vii douanes, la prise en compte de la culture professionnelle existante qui représente parfois une entrave au changement mais constitue surtout le plus sûr levier de progrès. Introduire des chiffres, mesurer la performance changent la représenta- tion qu’ont les douaniers et les usagers de leur propre métier et des relations qu’ils entretiennent, vers plus d’éthique et de respect des ré- glementations. Tous les acteurs de la chaîne de dédouanement sont ainsi appelés à plus d’efficacité pour assumer leurs fonctions devenues cruciales au sein de sociétés de plus en plus ouvertes au commerce in- ternational. En ce sens, ce second volume fournira aux réformateurs une matière à penser originale. Kunio Mikuriya Secrétaire général Organisation mondiale des douanes viii Remerciements Au moment où ce travail arrive à son terme, ses auteurs adressent leur profonde gratitude à Messieurs Thomas Cantens et Gaël Raballand qui, par delà l’appui des institutions qu’ils représentent (Organisation mon- diale des douanes et Banque mondiale), ont éclairé de façon détermi- nante la réflexion menée par les douanes camerounaises pour améliorer leurs performances. Ils remercient aussi Messieurs Nestor Demanou, Andomo Elanga, Adoum Mahamat, et le personnel de la Cellule de Gestion des Risques (David Clovis Um Batta, Eugène Lucie Bela, Sa- muel Nhanag Moka, Abel Thierry Zogo, Vitus Landry Zambo, Ro- drigue Boubou Kamdem, Victorine Tah Nasah, Marlyse Fossi, Raphael Athanase Hamadjam, Etienne Jean Baptiste Zhe Mekoulou, Ouseini Hadidja, Firmin Keambou, Jeanne d’Arc Mahabo, Pythagore Oumarou de regretté mémoire) pour leurs contributions multiformes à la réalisa- tion du présent ouvrage, qui fait suite à un précédent ouvrage publié en 2009 par le SSATP 2. 2 Se regarder dans le miroir, le contrôle de l’exécution du service dans les douanes camerounaires, Minette Libom Li Likeng, Thomas Cantens et Samson Bilangna, SSATP Discussion Paper No. 8, Washington D.C, 2009. ix Sigles et abréviations CEPR Center for Economic and Policy Research CERDI Centre d’études et de recherches sur le développement international CIFD Centre international pour la fiscalité et le développement DG Directeur général DLP Douala Port DPO Direction par objectif FCFA Francs de la communauté financière africaine GAR Gestion axée sur les résultats p page SYDONIA SYstème DOuaNier Automatisé T trimestre xi Introduction Ajian Van Weele 3 décrit la ‘performance’ comme une combinaison de l’efficacité et de l’efficience, l’efficacité étant la mesure du degré avec lequel les objectifs sont remplis et l’efficience, le rapport entre les résul- tats obtenus et les ressources utilisées. Ainsi, la mesure de la perfor- mance doit non seulement vérifier que les objectifs fixés ont été atteints, mais aussi, qu’ils ont mobilisé un minimum de ressources possible. La problématique de la mesure des performances n’est pas nouvelle au Cameroun. Plusieurs tentatives ont été engagées avec des résultats miti- gés certes, mais qui ont permis de montrer l’existence d’un besoin de modernisation de l’administration publique. On peut à cet égard évoquer les ‘contrats de performance’ signés au début des années ‘90, entre le gouvernement du Cameroun et les socié- tés parapubliques pour les aider à améliorer leur compétitivité mise à mal par la crise économique. Cette initiative a produit un résultat mixte, faute d’indicateurs et de critères d’évaluation des performances. On peut aussi se souvenir du concept de la ‘DPO’ (direction par objec- tif), cousin lointain des contrats de performance actuellement appliqués dans les douanes camerounaises et institués par le ministère des Fi- nances dans les années 2000. En effet, depuis cette époque, celui-ci fixe des objectifs quantitatifs aux différents services administratifs au début 3 Arjan Van Weele, Purchasing and Supply Chain Management, 2001, cité dans La mesure de la performance achats, Recherche collective, École supérieure des affaires, Grenoble. www.iae-grenoble.fr/. 1 Se regarder dans le miroir II de l’exercice budgétaire et leur affecte les moyens correspondants. Chaque responsable est jugé en fonction de ses résultats. Le système présente une limite majeure, le seul indicateur mesurable étant le mon- tant des droits et taxes de douane perçus, sans savoir par ailleurs com- ment cet objectif est atteint. Or, la qualité du service rendu et les inté- rêts des opérateurs économiques, sont autant d’éléments à prendre en compte pour une évaluation claire et précise, objective et quantifiable, de la performance de l’administration. Reste le projet « GAR » (Gestion axée sur les résultats) qui vise à incul- quer aux agents publics la culture de la performance dans la gestion des affaires publiques. Cette nouvelle démarche n’étant qu’à ses débuts et aucune évaluation n’ayant encore, à notre connaissance, eu lieu, il est difficile d’en juger. Dans le cadre des indicateurs de contrôle de l’exécution du service et par suite, des contrats de performance, les douanes camerounaises se sont engagées dans une dynamique de la recherche de la performance objectivement mesurable et quantifiable. Dans cette perspective, le Directeur général des Douanes du Cameroun a signé le 1er février 2010, des contrats individuels de performance avec ses collaborateurs exer- çant dans les principaux Bureaux des Douanes de Douala, le Bureau de Douala Port I chargé du contrôle de l’importation des marchandises conteneurisées et le Bureau de Douala Port V qui traite les importations des véhicules. Ces deux bureaux ont réalisé à peu près 60 % des recettes douanières nationales au cours des quatre dernières années. Ces contrats, qui s’enracinent dans un contexte et un environnement précis, ont été mis en œuvre selon une démarche originale, empreinte de patience et de prudence. 2 Contexte des contrats de performance Dans le cadre de la mise en œuvre de son programme de réforme, les Douanes camerounaises ont adopté le système SYDONIA++ comme élément structurant du processus de modernisation institutionnelle. Ce programme de réforme a été lancé le 2 janvier 2007 dans un contexte conflictuel marqué par des attaques répétées par voie de presse contre la hiérarchie douanière et un discours pessimiste tenu par des personnes malveillantes à l’égard de la réforme douanière. Il est donc apparu né- cessaire d’apporter des indications chiffrées, non seulement pour éclai- rer l’opinion et rendre compte du fonctionnement réel de l’outil, mais aussi pour surveiller le système contre les blocages que développeraient les douaniers et les opérateurs véreux en vue de légitimer leur discours. Pour ce faire, la Direction générale des Douanes met alors en place un dispositif de compte rendu quotidien du fonctionnement de SYDONIA. Trop manuel, ce système montre très vite ses limites et une équipe est alors créée avec pour mandat d’améliorer et d’automatiser la produc- tion de ces comptes rendus. Quatre types d’indicateurs sont définis et appliqués dans 11 bureaux douaniers de Douala:  Les indicateurs d’activités qui suivent l’activité douanière pour mettre en perspective économique les variations des résultats at- teints dans chaque bureau.  Les indicateurs de performance qui mesurent les performances de bout en bout et jusqu’au niveau individuel des douaniers et des professions partenaires.  Les indicateurs de contrôle qui surveillent les procédures doua- nières sensibles afin d’informer les responsables de l’activité de leur service et de leurs agents. 3 Se regarder dans le miroir II  Les indicateurs de risques qui ont une fonction de lutte contre la fraude pour veiller au respect des orientations de contrôle four- nies par la cellule douanière de gestion des risques. Par ce moyen, les douanes ont renforcé le dispositif de contrôle de l’exécution du service, ce qui a contribué à résoudre l’asymétrie d’information entre services centraux et services opérationnels. Cette politique de contrôle veille à ce que les nouvelles procédures décidées soient réellement appliquées sur le terrain. Les différents indicateurs produits mensuellement font l’objet d’un rapport adressé au Directeur général des douanes autant qu’aux respon- sables opérationnels, afin que tout le monde ‘sache tout sur tout’, en partageant la même réalité objective lors des réunions mensuelles orga- nisées à cet effet. Ce système, baptisé ‘se regarder dans le miroir’, a conduit à une sorte d’autocontrôle et fait, par conséquent, reculer la corruption et certaines mauvaises pratiques. Toutefois, ces indicateurs ne donnent qu’une photographie statique qui décrit le fonctionnement de la Douane sans en donner les pistes d’amélioration. Karl Marx 4 ne disait-il pas déjà en son temps que « les philosophes n'ont fait qu'interpréter diversement le monde, il s'agit maintenant de le transformer » ? C’est donc pour don- ner du mouvement à cette vue statique du fonctionnement de la Douane que les contrats de performance sont alors le prétexte tout trouvé pour passer d’un système purement descriptif des indicateurs à une approche prescriptive où des objectifs quantitatifs et mesurables sont fixés aux inspecteurs, sur la base desquels ils sont jugés. 4 Marx (Karl) Thèses sur Feuerbach (1845), XI. 4 Structure des contrats Les contrats définissent clairement les champs et les modalités de leur mise en œuvre. Qualité des parties contractantes Le contrat spécifie sans équivoque les parties concernées : le Directeur général des douanes camerounaises qui s’engage es-qualité et engage donc l’institution qu’il représente et l’agent public nommément désigné ou le cas échéant, l’opérateur économique cocontractant. Si la portée des engagements entre le Directeur général et son collaborateur semble moins évidente du fait des rapports hiérarchiques qui les lient, il n’en va pas forcément de même lorsque deux directeurs généraux (l’un des douanes et l’autre d’une entreprise) contractent. D’où la nécessité pour les parties d’être clairement identifiées. Objectifs des douanes camerounaises et du contrat de performance Sur la base de ce qui précède, la politique des contrats de performance s’inscrit dans une logique de mise en œuvre du plan de réforme de l’administration des Douanes. Ces contrats ont pour principal objectif de lutter avec plus d’efficacité contre la fraude et la corruption, tout en visant une plus grande célérité et efficience dans le traitement des dos- siers. En d’autres termes, à partir d’indicateurs objectifs, les contrats cherchent à rendre les services performants, responsables et transpa- rents, en privilégiant les règles d’éthique. L’inspecteur qui s’engage doit travailler vite, mais en détectant la fraude. Pour ce faire, il doit être présent à son poste de travail, être professionnel et convaincu que son 5 Se regarder dans le miroir II apport dans la réduction du temps et des coûts de passage des mar- chandises est primordial. Depuis quelques années en effet, les douanes camerounaises s’efforcent d’améliorer la qualité de service rendu aux usagers. Cette nouvelle cul- ture doit imprégner tout autant son organisation que les comporte- ments attendus des agents. L’usager doit voir ses démarches facilitées et simplifiées au sein d’une administration plus accessible et réactive, qui prend toute sa part dans les enjeux de compétitivité économique du pays. En bref, la démarche vise à rendre les douanes camerounaises plus per- formantes pour offrir un service de qualité aux entreprises, améliorer l’efficacité des contrôles et alléger les démarches administratives lors du franchissement des frontières. Mesures de la performance et ses modalités Afin de concilier facilitation des échanges et efficacité de lutte contre la fraude, huit indicateurs ont été définis (quatre par catégorie) pour for- mer la base de l’évaluation de la performance de l’inspecteur. Le souci premier était ici de mesurer les performances sur la base de données objectives et quantifiables, directement issues du système informatique SYDONIA. Les informations provenant de sources non vérifiables et non quantifiables ne sont pas prises en compte dans l’évaluation. Si ce choix peut être critiquable, il a été guidé par le souci de proscrire de l’environnement des contrats, l’arbitraire ou les erreurs d’appréciation. Les imprécisions dans la définition des modalités d’évaluation des per- formances pourraient générer des divergences d’interprétation et par conséquent, des conflits préjudiciables à la suite des événements. Par ailleurs, les contrats fournissent des bases d’évaluation de l’inspecteur et ont des conséquences sur sa carrière. Ils doivent donc reposer sur des instruments rigoureusement précis. En outre, l’absence de base solide 6 Structure des contrats rendra difficile l’évaluation des résultats globaux obtenus et ne permet- tra donc pas de savoir si les objectifs recherchés ont été atteints ou non. Les indicateurs existent ou ont été recalculés mensuellement depuis janvier 2007, ce qui les rend fiables car fondés sur des milliers d’observations. À partir de là, des valeurs médianes sont calculées pour tous ces indicateurs (annexées au contrat de performance) et les per- formances mesurées à partir de ces valeurs médianes qui fixent des objectifs réalistes. Par ce fait, il est plus facile d’exiger de quelqu’un des résultats déjà obtenus par plus de la moitié des agents qui se sont trou- vés dans la même situation. Parce que les engagements sont faits pour être exécutés, les contrats ne cherchaient pas à piéger, mais à inciter ou à encourager l’agent à se perfectionner en améliorant les performances générales du groupe. Dans la pratique, un tableau définit l’appréciation attribuée à chaque indicateur en se fondant sur l’expérience des quatre dernières années. Ce tableau révisé tous les trois mois répertorie tous les inspecteurs ap- partenant à un même bureau afin de tenir compte de l’évolution de la performance du bureau. Le contrat est réalisé à 100 % si tous les indicateurs atteignent le niveau 3 (bon) et si les valeurs par indicateur ne sont pas en deçà ou au-delà du minimum/maximum fixé pour l’indicateur ; un tableau indexé au con- trat reprend ces minimums/maximums. Les appréciations sont définies comme suit :  Le niveau faible (1) correspond à un niveau de performance infé- rieur à la médiane  Le niveau moyen (2) correspond à la médiane  Le niveau bon (3) correspond à un niveau de performance supé- rieur au niveau médian à concurrence d’un pourcentage donné et plus élevé que le ‘niveau moyen’ 7 Se regarder dans le miroir II  Le niveau très bon (4) correspond à un niveau de performance supérieur au niveau médian à concurrence d’un pourcentage donné et plus grand que le ‘niveau bon’ Les engagements mutuels Les contrats stipulent les engagements des différentes parties. Concrè- tement, l’inspecteur qui s’engage adhère simplement aux dispositions contractuelles qu’il a acceptées lors des négociations et sur la base des- quelles il sera jugé. Ces dispositions comportent des indicateurs qui fixent les résultats chiffrés à atteindre. Elles déterminent aussi les ré- compenses garanties à ceux qui réalisent convenablement leurs enga- gements, ainsi que les sanctions auxquelles s’exposent les moins per- formants. Toutes les parties ont intérêt à ce que le but recherché soit atteint, c’est pour cela que le Directeur général s’engage à encadrer et à accompagner les inspecteurs signataires des contrats. Pour y parvenir, il a accepté de :  créer une cellule de gestion des risques chargée, entre autre, de mesurer les performances. Elle répond dans les plus brefs délais, à toute question que se pose l’inspecteur sur son évaluation et son contrat de performance. Elle s’occupe aussi de l’évaluation régulière des contrats et en assure le suivi décadaire, mensuel et trimestriel. Cette structure est composée de fonctionnaires ca- pables de résister à la pression des opérationnels (inspecteurs et chefs de service) qui pourraient par des moyens divers, solliciter la modification des résultats à leur profit. Elle doit être prudente parce qu’une erreur de sa part peut avoir des répercussions néga- tives et graves sur la carrière d’un inspecteur. En tout état de cause, elle doit rester impartiale et courageuse parce qu’à l’instar d’un magistrat, elle plaide à charge et à décharge.  traiter de façon spécifique les contentieux des bureaux concernés pour améliorer la célérité du versement des parts contentieuses. 8 Structure des contrats Récompenses et sanctions Récompenses Les contrats passés avec les inspecteurs comportent toujours en toile de fond les rapports hiérarchiques qui lient les deux parties. De ce fait même, Le Directeur général n’attend de son subordonné ni récompense ni sanction. Par contre, il a pour devoir d’encourager l’inspecteur méri- tant. Le système de récompense peut être de nature pécuniaire. Il est nécessaire et même logique que l’inspecteur qui contribue à une hausse des recettes soit récompensé. Cette forme de rétribution peut toutefois présenter des limites : d’abord parce qu’aucune somme d’argent ne pourra combler le ‘manque à gagner’ de celui qui renonce au gain facile en pratiquant la vertu par le refus de la corruption. Ensuite, parce que l’autorité politique (ministre des finances, gouvernement ou parlement) pourrait redouter de se mettre à dos les fonctionnaires qui ne bénéfi- cient pas de la même attention. Enfin, parce que les incitations non- financières dépendent surtout du Directeur général et semblent assez valorisantes et plus pérennes que les avantages financiers. On comprend alors que la plupart des fonctionnaires camerounais ont pour habitude d’afficher dans leur bureau les photos prises avec tel ou tel supérieur hiérarchique dans le cadre de manifestations officielles. Ils aiment gar- der également à portée de main tel diplôme ou telle médaille obtenu en raison ‘des bons et loyaux services rendus à la nation’. Toutefois, il est important que des motivations financières raisonnables soient couplées aux incitations non financières. Ainsi, dans le contexte camerounais, le Directeur général a pris les engagements suivants :  Personnaliser le parcours professionnel des inspecteurs sous forme d’entretiens annuels destinés à explorer avec eux les pers- pectives d’évolution professionnelle.  Citer les noms de trois inspecteurs ayant atteint le meilleur pour- centage moyen de réalisation du contrat au sein du bureau, dans 9 Se regarder dans le miroir II l’organe 5 d’informations des douanes camerounaises et sur le site Internet de la direction générales des douanes.  Gratifier les trois meilleurs inspecteurs au cours du trimestre écoulé et en faire mention dans leur dossier. Le montant de la gratification n’est pas intégré dans le contrat et ne fait pas l’objet de négociation, sans doute à cause de son caractère modique, comparé à ce que le douanier perd en renonçant aux mauvaises pratiques. En fait, la somme donnée par le Directeur général aux inspecteurs concernés est moins une récompense qu’un symbole.  Donner droit à une formation supplémentaire aux trois meil- leurs inspecteurs à l’issue du semestre écoulé. Sanctions Comme en matière de récompense, l’inspecteur est par ailleurs exposé à des sanctions directes appliquant les conditions suivantes :  Si l’inspecteur n’atteint pas les minima/maxima requis au cours d’un mois, il sera frappé d’un avertissement.  Si sa performance ne s’améliore pas sur une période de deux mois consécutifs, le chef de bureau ou de secteur se verra dans l’obligation de le convoquer.  Si ce manque de performance persiste ou est inférieure à 100 % le mois suivant, l’inspecteur fera l’objet de sanctions discipli- 5 La Direction générale des douanes publie mensuellement une revue intitulée « Customs and Business Challenge » : celle-ci reprend les performances trimes- trielles des douanes et des autres acteurs de la chaîne de dédouanement. C’est donc une revue qui est très lue par ceux qui travaillent dans l’environnement douanier. Le fait pour un inspecteur de voir figurer son nom dans cette revue comme ayant exécuté de manière particulière ses engagements contractuels est très valorisant pour lui. 10 Structure des contrats naires de la part de la direction générale, voire à une mutation disciplinaire et cet état de service sera inclus dans son dossier. Le but du jeu est d’édicter des sanctions suffisamment dissuasives pour inquiéter l’inspecteur et le pousser à l’effort, mais aussi pour que l’appât du gain facile ne prenne pas le dessus sur la volonté de réforme. Durée et révision du contrat Le contrat a été rédigé pour une durée de six mois. À l’issue de trois mois, il était prévu que les indicateurs retenus dans le contrat de per- formance feraient l’objet d’un audit à mi-parcours pour vérifier leur fiabilité et leur pertinence. Un amendement au contrat pourrait ainsi être signé si les indicateurs sélectionnés où les valeurs-cibles de la per- formance étaient modifiés. Dans le cas contraire, le contrat continuerait par périodes de six mois par reconduction tacite. 11 Mise en œuvre des contrats La mise en œuvre des contrats a été l’aboutissement d’une démarche rigoureuse. Cette démarche a été conçue de manière à maintenir le cap, quelles que soient les zones de turbulence à franchir. Il fallait garder clair à l’esprit que le caractère novateur et même révolutionnaire de cette initiative bousculerait des habitudes. Les douanes sont réputées être une administration conservatrice et toute innovation est regardée avec suspicion. La méthode de travail suivie a bien intégré cette logique et l’équipe chargée de la mise en œuvre des contrats savait qu’elle n’allait pas en terrain conquis. Les actes préparatoires aux contrats La mise en œuvre des contrats découle d’une démarche volontariste du Directeur général. Cette volonté, associée à une bonne dose de courage administratif ont permis de surmonter les multiples difficultés rencon- trées sans se détourner de l’objectif. Franchir le pas Peut-on faire signer des contrats aux fonctionnaires qui sont déjà liés à l’État par le statut général de la fonction publique ? Telle est la contro- verse à l’annonce de l’introduction de contrats de performance au sein de l’administration des douanes camerounaises. Certains douaniers n’ont eu de cesse en effet d’épiloguer sur la pertinence de ces contrats, dans un environnement où les droits et les obligations des acteurs sont d’avance réglés par voie réglementaire. Comme on peut le constater, les premiers débats se sont donc déportés sur le terrain juridique non pas 13 Se regarder dans le miroir II pour examiner la nécessité des contrats, mais pour en vérifier la légiti- mité. Les tenants du ‘non’ ont trouvé parfois des partisans jusqu’à cer- tains lieux insoupçonnés de la hiérarchie administrative et douanière. À vrai dire, un faux débat puisque les contrats ne sont que de simples outils de management et n’ont pas été conçus pour affronter le statut de la fonction publique. En fait, il n’est pas exagéré de penser que certains douaniers ont eu peur de l’inconnu. Ils redoutaient la fin de certains privilèges et se sentaient bousculés jusque dans certaines de leurs certi- tudes. Les moins bons savaient que les bonnes performances des meil- leurs ne masqueraient plus leurs faiblesses et qu’ils seraient jugés aux résultats. Encore une fois, il a fallu une bonne dose de courage administratif pour franchir le pas. Le caractère novateur de la démarche portait aussi sa part de risque. Il fallait avancer par touches successives, prudemment mais fermement pour ne pas se laisser distraire. Tout échec de l’expérimentation était redouté car près de 76 % des recettes douanières du Cameroun étaient en jeu et, ni les décideurs politiques, ni l’opinion publique n’auraient pardonné à la douane d’avoir pris tant de liberté au nom de la recherche de la performance. Les partisans de l’immobilisme auraient trouvé du grain à moudre et exigé des têtes à couper. La presse à sensation aurait amplifié les faits et demandé des sanctions. Pour vaincre les sceptiques, rassurer les uns et les autres, une campagne de sensibilisation a été organisée afin que tout le monde accepte l’expérience et qu’elle ne démarre pas avec un caillou dans la chaussure. Communiquer La campagne de communication a eu pour objet de susciter l’adhésion des personnes concernées. L’équipe responsable était formée des per- sonnes convaincues du bien-fondé de l’initiative. Elle devait être con- vaincante et surtout se montrer perméable aux contributions et aux critiques des uns et des autres. Elle ne devait à aucun moment laisser 14 Mise en œuvre des contrats penser qu’elle avait recours à la camisole de force ou à un prêt à porter. Cette démarche participative a rassuré les sceptiques et amené le plus grand nombre à adhérer à l’idée et à s’en imprégner. Les discussions ont abordé tous les aspects d’un contrat dans le menu. L’exposé des motifs ou préambule n’a pas posé de problèmes particu- liers. Les débats, par contre, ont achoppé au niveau du choix des indica- teurs, des engagements réciproques des parties, des sanctions et des récompenses éventuelles. L’équipe qui négociait pour le compte du Directeur général devait faire preuve de beaucoup de doigté et avoir une idée exacte des points faibles du système en vigueur, car les engage- ments devaient justement être pris pour l’améliorer. Des analyses et simulations avaient d’ailleurs été préalablement effectuées de manière à opposer aux déclarations anecdotiques des contradicteurs, des données chiffrées. Ces donnés ont été particulièrement utiles durant la phase de concerta- tion car elles ont permis de concentrer les discussions et d’éviter d’entrer dans des débats hors propos. L’équipe s’est montrée humble et en l’absence de réponse immédiate à une préoccupation, elle n’a pas hésité à se donner un temps de réflexion. Elle a multiplié les rencontres tant que nécessaire ; l’objectif recherché étant de lever la plupart des doutes, d’aplanir les obstacles majeurs et surtout, de tenir la barre. Une dizaine de réunions a précédé le lancement des contrats de performance dans les deux bureaux du port de Douala. Les premières ont soulevé beaucoup de passion, mais peu à peu, le calme s’est installé. Cependant, conscient que ces nouveaux contrats ne feraient pas forcément l’unanimité, le Directeur général, a amené le personnel à faire librement un choix – contracter ou ne pas contracter ; chaque choix comportant des conséquences précises. Celui qui contracte accepte de prendre part à la réforme et de s’exposer aux critiques. Il a donc droit à plus d’égards et de considération que celui qui ne prend pas de risque. Par contre, celui qui refuse le contrat, décide aussi de quitter le bureau et de perdre le prestige et les avantages qui y sont attachés. Dans la pratique, aucun 15 Se regarder dans le miroir II inspecteur n’a choisi cette deuxième solution. La signature des contrats a été entourée de suffisamment de publicité pour que les acteurs de la chaîne de dédouanement soient informés qu’une nouvelle culture pro- fessionnelle avait cours dans l’administration douanière. Cela a sans doute préparé le terrain et facilité la tâche à l’inspecteur signataire du contrat, qui pouvait désormais de manière ‘loyale’ rompre les accords souterrains qui le liaient aux transitaires ou aux importateurs véreux. Assainir l’environnement des contrats Il est rare et même déconseillé de mettre tous les services sous contrat au même moment. De plus, certains bureaux, de par leurs spécificités, peuvent difficilement être mis sous contrats. Dans ces conditions, les bureaux sous contrat cohabitent nécessairement avec ceux qui ont un statut différent. Dès lors, le détournement du trafic généralement domi- cilié chez les premiers, au profit des seconds est à redouter. Ainsi, le risque de ‘transhumance’ des déclarations est bien réel. Ce phénomène consiste pour les opérateurs véreux, à détourner le trafic normalement domicilié dans les bureaux sous contrats vers les bureaux sans contrat afin de continuer de profiter d’un traitement de faveur de la part de leurs ‘comparses’ en service à ces endroits. De même, les bureaux sous contrats peuvent se livrer à une compétition en vue d’attirer le maxi- mum de trafic. Le chef de secteur (grade immédiatement supérieur à celui de chef de bureau, il gère une ‘région douanière’) devait jouer à ce niveau un rôle d’habile arbitre. Il doit, à partir d’analyses précises, assu- rer une surveillance permanente du mouvement des marchandises de manière à garantir aux contrats, un environnement apaisé et assaini. Le contraire serait désastreux pour la suite parce que certains rempliront artificiellement leurs engagements contractuels sans qu’on en ressente l’impact sur les performances globales des services. Dans ce cas, l’objectif recherché ne sera jamais atteint. 16 Mise en œuvre des contrats Passer par une nécessaire phase expérimentale La mise en œuvre des contrats a nécessité une phase expérimentale de six mois pour  évaluer les impacts positifs et négatifs de l’expérience  adapter les objectifs des contrats  résoudre les problèmes techniques ou informatiques qui pour- raient éventuellement survenir à l’usage Cette phase a été aussi un moment d’adaptation et d’imprégnation pour les acteurs (inspecteurs sous contrats, leurs chefs, voire l’unité de suivi et d’évaluation). Les contrats représentaient une idée originale et iné- dite ; la douane camerounaise n’avait pour seul référent qu’elle-même et devait donc trouver sa voie toute seule. Les six premiers mois des contrats ont donc été salutaires à cet égard. Cette période a permis d’avancer, mais d’avancer prudemment en mesurant chaque action entreprise, de déceler les problèmes et de les résoudre au fur et à me- sure. L’équipe de suivi avait donc pour instruction de ne prendre que des risques mesurés. La démystification des rapports hiérarchiques Les contrats sont de type synallagmatique ou bilatéral, signés entre l’inspecteur et le Directeur général des Douanes. Ils comportent donc des droits et des obligations pour chacune des parties. Dès lors, le Di- recteur général, sans perdre les égards qui lui sont dus, devient un co- contractant qui a l’obligation d’exécuter les engagements souscrits vis- à-vis de l’autre partie. La crédibilité, la pertinence et la force des con- trats viendront de ce que le Directeur général accepte d’être interpellé par son collaborateur en cas d’inexécution ou d’exécution irrégulière de ses engagements ou plus simplement, sur les conditions d’exécution de ces engagements. 17 Se regarder dans le miroir II Les contrats posent les rapports hiérarchiques dans l’administration publique sous un autre jour. En principe, la nomination ou l’affectation d’un agent public relève du pouvoir discrétionnaire de l’autorité investi de ce pouvoir, sans qu’il sente la nécessité de motiver sa décision. Les contrats ne lui retirent pas ce pouvoir et ne l’obligent pas à muter ou à promouvoir l’agent vers un poste précis. Cependant, il se sent plus ‘obligé’ de promouvoir le collaborateur méritant (le maintien à son poste prestigieux est en soit une sorte de promotion), ou au contraire, de le sanctionner, si besoin est. Les contrats sont donc un outil supplé- mentaire de gestion objective des ressources humaines. La nécessaire évaluation Une réunion mensuelle est organisée pour évaluer le niveau des per- formances de chaque acteur. L’inspecteur qui n’a pas atteint le niveau acceptable est reçu par ses chefs hiérarchiques pour s’expliquer sur les raisons de sa contre performance. Les chefs en profitent pour lui prodi- guer des conseils. Aux termes du trimestre, une autre réunion est orga- nisée en vue, non seulement d’évaluer les performances des inspecteurs pour cette période, mais aussi d’analyser l’impact des contrats sur l’évolution des services concernés. À cette occasion, ceux qui atteignent les objectifs fixés sont récompensés et mention de leur récompense est faite dans leur dossier professionnel. Ceux qui, par contre, ne remplis- sent pas les engagements souscrits, peuvent être mutés à des postes moins prestigieux. C’est ainsi qu’après l’évaluation semestrielle des contrats en 2010, trois inspecteurs sur seize ont perdu leur poste pour résultats insuffisants, alors que les six meilleurs d’entre eux ont été promus. Les évaluations successives montrent que les résultats atteints sont encourageants. C’est la raison pour laquelle depuis janvier 2011, ces contrats ont été étendus à deux autres bureaux des douanes de Douala (Bureau des douanes de l’aéroport et Bureau des douanes des transferts). 18 Résultats obtenus Bien que les contrats soient individuels, les impacts sont mesurés à l’échelle plus large des bureaux de douane. En outre, les comparaisons sont faites entre la période sous contrat et la période d’avant contrat d’une part, et d’autre part, d’une année à l’autre, pour tenir compte des variations saisonnières des importations. Les contrats avec les inspec- teurs ont eu un impact réel en termes de réduction des délais de traite- ment des dossiers et de l’amélioration des recettes douanières, consé- quence directe du recul de certaines mauvaises pratiques qui pesaient sur les rapports usagers / inspecteurs des douanes. L’impact sur le temps de traitement des déclarations Le temps mis entre l’enregistrement du dossier et son traitement par l’inspecteur a sensiblement baissé aussi bien dans les bureaux ancien- nement sous contrat (bureau principal Douala Ports I et V) que dans les nouveaux bureaux (Douala Aéroport et Douala Transferts). Ce temps est passé à Douala Port I 6, au troisième trimestre 2010 de 4 heures environ, à moins de 2 heures au troisième trimestre 2011. Ce temps était de 22 heures environ avant les contrats à la même période en 2009. À Douala Port V, la réduction est plus visible encore : le temps 6 Douala Port I est le bureau des douanes qui est chargé du dédouanement, pour la mise à la consommation des marchandises importées en conteneurs, à l’exception des véhicules. Douala Port V lui, est responsable du dédouanement, pour la mise à la consommation, des véhicules, même importés en conteneurs. 19 Se regarder dans le miroir II est passé de presque 15 heures en 2009 à 02 heures 31 en 2010 puis à moins d’une heure en 2011. À Douala Transferts et Douala Aéroport, la réduction du temps a suivi la même tendance que dans les bureaux cités plus haut. Dans le premier, l’on est passé de 60 heures environ en 2009, puis à 28 heures 45 et 9 heures 20 respectivement en 2010 et 2011. Dans le second, la réduction est allée de 44 heures environ en 2009 à 42 heures environ en 2010. Ce temps est de 11 heures 38 en 2011. La ré- duction du temps de passage des marchandises induit des bénéfices immédiats et réduit les risques de développement des comportements déviants. Tableau 1 : Délais dans les différents bureaux en net recul BUREAUX 3 T* 2009 3 T* 2010 2 T *2011 3 T* 2011 Douala Port I 22H03 04H06 02H43 01H53 Douala Port V 14H44 02H31 00H43 00H27 Douala Transferts 57H59 28H45 11H30 9H20 Douala Aéroport 44H13 42H22 15H22 11H38 T = trimestre H = heure L’impact des contrats sur les recettes douanières (Cantens 2011) Alors que le niveau d’activité (nombre de conteneurs équivalent 20’) n’a augmenté que de 17 % entre le premier trimestre 2010 et le premier trimestre 2011, les recettes douanières se sont améliorées de 22 %. Par ailleurs, hormis le Bureau de l’Aéroport, la rentabilité moyenne par déclaration (rapport entre le volume des droits et taxes enregistrés et le nombre de déclarations enregistrées) s’est beaucoup appréciée pendant le premier trimestre 2011 par rapport à la même période en 2010, 2009 et 2008. Sur la base de ce qui précède, on peut conclure que la qualité 20 Résultats obtenus des contrôles s’est améliorée et que les procédures ont été davantage suivies. Rendement des déclarations dans les bureaux sous contrat depuis 2011 Au bureau de l’Aéroport, l’impact sur le rendement des déclarations n’a pas été significatif au terme des trois mois. Néanmoins, les résultats du premier trimestre 2011 sont meilleurs que ceux de la même période en 2010 et 2008. Ils sont cependant inférieurs aux résultats globaux des années 2009 et 2008. Au Bureau des Transferts, la tendance positive est nette. Dès lors qu’on exclut les déclarations ayant bénéficié d’une exonération, le rendement moyen du trimestre 2011 est le meilleur depuis 2008 (cf. tableau 2). Tableau 2 : Rendement des déclarations dans les bureaux sous-contrat depuis janvier 2011 en comparaison avec les années antérieures (FCFA) Aéroport Transfert Rendement Rendement moyen Rendement Rendement moyen Période moyen* (exo exclues 7) Moyen* (exo exclues) 2008 1 268 043 1 509 090 1 839 194 1 538 992 1 T 2008 968 822 1 125 881 1 868 934 1 647 297 2009 1 273 184 1 353 728 2 156 864 1 603 662 1 T 2009 1 370 103 1 430 124 2 047 522 1 643 444 2010 1 119 354 1 149 748 1 833 128 1 595 468 1 T 2010 1 030 654 1 015 219 1 856 306 1 564 831 1 T 2011 1 200 244 1 221 287 2 048 330 1 805 618 * en F CFA 7 Par « exo exclues », il faut entendre que les déclarations en exonération totale ou partielle ont été exclues du calcul. 21 Se regarder dans le miroir II Rendement des déclarations dans les bureaux sous contrat depuis 2010 À Douala Port I, le résultat est positif. Le premier trimestre 2011 enre- gistre le meilleur rendement, toutes périodes confondues. La progres- sion est importante : +7,7 % en comparaison avec le premier trimestre 2010 soit un gain estimé de 5,8 milliards de francs CFA. À Douala Port V, comme vu précédemment, le premier trimestre de l’année est nettement inférieur aux suivants en termes d’activité. La comparaison de trimestre à trimestre apparaît donc légitime. De ce point de vue, le rendement de 2011 est supérieur à celui de 2010, de 4 %, ce qui occasionne un gain de 730 millions de francs CFA. La pro- gression est moins forte qu’à Douala Port I, mais elle avait été déjà im- portante entre 2009 et 2010 (+19 %). Tableau 3 : Rendement des déclarations dans les bureaux sous contrat depuis janvier 2010 en comparaison avec les années antérieures Douala Port I Douala Port V Rendement Rendement Rendement moyen Rendement Période moyen exo ex- moyen exo exclues moyen clues 2008 9 913. 574 9 246 106 2 440 705 2 374 569 1 T 2008 10 056 668 9 174 723 2 498 897 2 459 816 2009 9 746 136 9 039 497 2 047 148 1 986 711 1 T 2009 10 128 108 9 469 814 2 310 758 2 264 097 2010 10 063 401 9 354 801 2 441 657 2 386 .523 1 T2 010 9 818 084 9 246 085 2 075 466 2 036 619 1 T 2011 10 574 029 9 733 657 2 161 758 2 020 352 À titre de comparaison, les rendements 2011 de Douala Port VI (bureau des douanes qui n’est pas sous contrat) ont baissé. A priori, l’augmentation du rendement de Douala Port I est à mettre au crédit des inspecteurs puisque les rendements des 11 entreprises sous contrat 22 Résultats obtenus opérateurs (voir infra) ont baissé ou sont restés stables selon que l’on considère l’ensemble de leurs déclarations ou qu’on exclut celles qui ont bénéficié d’exonérations (cf. tableau 4). Tableau 4 : Rendement des déclarations des 11 importateurs sous con- trat par année et par premier trimestre Période Rendement moyen* Rendement moyen exo exclues* 2008 18 815 569 10 406 552 1 T 2008 19 833 623 14 012 270 2009 17 597 625 8 360 034 1 T 2009 21 066 913 11 630 914 2010 17 894 409 9 947 931 1 T 2010 17 241 456 10 005 329 1 T 2011 15 840 264 10 506 897 * en Franc CFA Impact sur la lutte contre la fraude L’évaluation de cet impact suit deux critères :  l’efficacité du contrôle (montant des droits et taxes récupérés suite au contrôle / total des droits et taxes liquidés)  la qualité du contrôle (montant moyen des droits et taxes récu- pérés sur un contentieux) Contentieux dans les nouveaux bureaux sous contrat en 2011 Au Bureau de l’Aéroport, l’impact est significatif. Le ratio droits com- promis et droits liquidés pour le premier trimestre 2011 est le meilleur depuis le lancement de SYDONIA (1,76 %), ce qui a rapporté 100 mil- lions de francs CFA (152 440 euros environ) supplémentaires pour un contentieux moyen de 265 000 de francs CFA (404 euros environ). 23 Se regarder dans le miroir II Au Bureau des Transferts, les contrats passés n’ont pas eu d’impact notable sur le contentieux. Si le ratio droits compromis et droits liqui- dés pour le premier trimestre 2011 est élevé (1,4 % soit 41 millions FCFA) par rapport aux trimestres précédents (de 0,3 % à 0,6 %), il demeure en deçà des ratios du premier trimestre 2010 (1,6 %) et de trimestres de 2007 et 2008. Le contentieux a été relevé à 511 000 FCFA, second résultat derrière le premier trimestre 2010 (586 000 FCFA). Tableau 5 : Évolution trimestrielle du contentieux dans les bureaux sous contrat depuis 2011 en comparaison avec les années précédentes Aéroport Transferts Ratio* Contentieux moyen** Ratio* Contentieux moyen** 1T 0,58 680.119 0,46 673.902 2T 1,20 1.481.100 0,91 705.765 3T 1,69 1.528.984 2,62 616.951 2007 4T 0,43 421.298 3,36 679.304 1T 1,26 1.061.578 2,70 487.220 2T 1,15 596.683 1,61 396.385 3T 0,97 678.440 1,79 498.361 2008 4T 0,75 259.208 1,04 377.912 1T 1,69 253.238 1,10 376.798 2T 1,02 141.550 1,48 510.009 3T 1,47 229.670 0,68 278.456 2009 4T 1,21 267.620 1,15 283.925 1T 1,14 190.136 1,60 586.389 2T 1,32 193.892 0,30 250.332 3T 1,60 277.095 0,47 321.498 2010 4T 1,33 261.455 0,62 300.617 2011 1T 1,76 264.596 1,45 511.456 ∗ droits compromis récupérés/ droits liquidés (%) ** in Franc CFA 24 Résultats obtenus Contentieux dans bureaux sous contrat depuis 2010 À Douala Port I, le contentieux a baissé en 2009. Les deux derniers trimestres 2010 ont vu une remontée. Le premier trimestre 2011 a chuté à nouveau. Il est de 0,7 %, ce qui représente des droits compromis ré- cupérés de 538 millions de francs CFA. Une comparaison modère le mauvais résultat. Il faut comparer ces 0,7 % attribués à une équipe de nouveaux inspecteurs, aux 0,6 % du premier trimestre 2010, date de début des contrats alors que l’équipe était déjà en place depuis quelques mois. À ce titre, le résultat du pre- mier trimestre est donc encourageant. Le contentieux moyen (‘Droits compromis récupérés en moyenne par contentieux’) a fortement progressé pendant la période sous contrat et cette tendance s’est maintenu à l’arrivée des nouveaux inspecteurs. À Douala Port V, le contentieux a fortement progressé à partir des con- trats. Il s’est maintenu à un niveau élevé de 1%. Le résultat du premier trimestre est de 0,98 %, avec une équipe de nouveaux inspecteurs. Le contentieux moyen a légèrement baissé au premier trimestre 2011 (631 000 FCFA équivalent à 950 euros environ), ce qui tend à montrer que les inspecteurs ont réalisé leurs résultats contentieux en sanction- nant plus souvent. Là encore, le résultat est encourageant. Pour mé- moire, le résultat du premier trimestre 2010 était de 0,7 % pour un contentieux moyen plus faible (624 000 CFA, soit 951 euros environ). Contentieux sur les 11 importateurs sous contrat (Cantens 2011) S’agissant des 11 importateurs sous contrat, en circuit bleu (dans le cadre de la facilitation des opérations de dédouanement, le circuit bleu favorise l’enlèvement rapide des marchandises), aucun contentieux n’a été relevé. 25 Se regarder dans le miroir II Globalement, hors circuit bleu, le contentieux à l’encontre de ces 11 importateurs baisse également depuis 2010. Il était nul au 4ème trimestre 2010. Pour le premier trimestre 2011, il est de 0,1 %, taux qui s’est maintenu à Douala Port V et Douala Port I. Tableau 6 : Évolution trimestrielle du contentieux dans les bureaux sous contrat depuis 2010 en comparaison avec les années précédentes Douala Port I Douala Port V Contentieux Contentieux Ratio* moyen** Ratio* Moyen** 1T 1,02 989.392 0,49 790.530 2T 0,89 772.078 0,85 665.935 3T 0,91 749.566 0,62 456.868 2007 4T 0,80 784.579 0,45 259.159 1T 0,83 860.506 0,97 1.333.410 2T 1,39 1.258.337 1,33 1.503.656 3T 1,28 1.216.898 1,12 627.965 2008 4T 1,24 1.207.997 0,79 680.203 1T 1,14 1.528.443 0,53 670.800 2T 1,19 1.245.729 0,84 1.118.503 3T 1,25 1.388.492 0,71 1.003.157 2009 4T 0,94 1.041.792 0,23 276.770 1T 0,64 1.373.782 0,73 624.466 2T 0,86 2.750.727 1,43 1.186.054 3T 1,31 4.538.816 0,80 851.152 2010 4T 1,07 4.697.090 1,04 807.731 2011 1T 0,69 2.468.333 0,98 631.961 ∗ droits compromis récupérés/ droits liquidés (%) ** in franc CFA Il est probable que le contentieux sur ces importateurs soit une « va- riable d’ajustement ». En effet, lorsque le contrôle doit être ciblé rapi- dement, les inspecteurs épargnent ces importateurs établis. C’est une conséquence positive des contrats à la condition que le contentieux a posteriori compense cette vigilance moindre sur ces opérateurs. Cette 26 Résultats obtenus tendance va dans le sens du développement du contentieux a posteriori (enquêtes). Tableau 7 : Évolution trimestrielle du contentieux dans les bureaux sous contrat depuis 2010 en comparaison avec les années antérieures Ratio* Contentieux moyen** 1T 0,58 1.098.166 2T 1,04 1.428.740 3T 1,07 1.253.147 2007 4T 0,51 1.043.453 1T 0,50 951.317 2T 1,40 1.965.642 3T 0,86 1.810.602 2008 4T 1,16 2.092.457 1T 1,01 2.264.437 2T 0,63 1.590.700 3T 0,29 879.173 2009 4T 0,48 1.142.728 1T 0,15 994.403 2T 0,28 2.344.846 3T 0,17 1.922.604 2010 4T \N \N 2011 1T 0,12 2.133.779 ∗ droits compromis récupérés/ droits liquidés (%) ** in franc CFA Impact sur les mauvaises pratiques L’impact est mesuré pour les mauvaises pratiques qui ont été intégrées dans les contrats. Leur évaluation trimestrielle a mis en évidence le recul 27 Se regarder dans le miroir II de certains comportements identifiés, potentiellement sources de cor- ruption. Citons en exemple les « contre écritures » et les « reroutages ». Le reroutage des déclarations du circuit jaune vers le circuit rouge est plus efficace. La réorientation des déclarations du circuit jaune (con- trôle documentaire et léger) au circuit rouge (contrôle plus contrai- gnant par scanner et éventuellement par vérification physique) n’est pas a priori interdite à l’inspecteur, mais doit être plus efficace en termes de contentieux puisqu’elle résulte d’un ciblage individuel de la part de l’inspecteur. Auparavant, le reroutage aurait été utilisé comme menace envers l’usager. La proportion de déclarations redressées parmi celles qui ont été reroutées du jaune au rouge s’est améliorée. Dans les bureaux sous contrat depuis 2010, l’impact a été mesuré. À Douala Port I, les reroutages sont passés de 5 % (moyenne trimes- trielle 2009) à 1,6 % (moyenne trimestrielle 2010) et le taux de conten- tieux est passé de 18 % (moyenne trimestrielle 2009) à 50 % (moyenne trimestrielle 2010). La nouvelle équipe d’inspecteurs reroute moins (0,6 %) mais avec plus d’efficacité (75 % des déclarations reroutées ont été redressées). Il est possible qu’ils aient la même crainte à rerouter que celle observée début 2010. Le chef de bureau pourrait rappeler les termes du contrat et le fait que l’objectif de redressements sur déclarations reroutées n’est pas si élevé, ce qui devrait les encourager à rerouter plus souvent. À Douala Port V, l’impact est plus évident puisque le taux de reroutage entre 2009 et 2010 n’a presque pas varié (0,58 % contre 0,56 %) mais le taux de redressements des déclarations reroutées est passé de 5 % en 2009 à 62 % en 2010 (moyennes trimestrielles). Au Bureau de l’Aéroport, les contrats ont donné confiance aux inspec- teurs pour rerouter. Le taux de reroutage était très faible, généralement 28 Résultats obtenus inférieur à 0,1% des déclarations. Il est de 0,36% au premier trimestre 2011. Les résultats sont meilleurs puisque 94% des reroutages ont été positifs en termes de contrôles, alors qu’ils étaient nuls les années pré- cédentes. Au Bureau des Transferts, l’impact dépend fortement des sections. Huit magasins sur 10 ont une tendance identique : plus de reroutages effec- tués avec plus d’efficacité qu’auparavant. Deux magasins sur 10 n’ont pas changé, avec peu ou aucun reroutages. ‘Temps d’activité SYDONIA’. Les temps d’activité des bureaux Douala Port I et Douala Port V sont très élevés : respectivement 6,9 heures et 7,5 heures, temps les plus élevés depuis le lancement de SYDONIA dans ces deux bureaux. (Cantens 2011). Impact sur les contre-écritures (déclarations en circuit jaune liquidées, puis modifiées après liquidation par le même inspecteur). Il s’agit d’une manœuvre par laquelle l’inspecteur s’attirait le maximum de dossiers, dans le but sans doute d’augmenter ses possibilités de contact avec les usagers ou pour augmenter ses chances de faire du contentieux facile (il faut relever qu’au Cameroun, l’agent contestateur d’une infraction perçoit une part du montant de l’amende). Cette pratique est nocive pour l’environnement de travail et impacte négativement sur la perfor- mance du bureau. Elle a drastiquement diminué passant pour l’ensemble des bureaux de 424 cas en 2009 à 130 cas en 2010 puis à 33 seulement en 2011. La contre-écriture a la même cause et les mêmes conséquences que la course aux déclarations : la compétition. 29 Se regarder dans le miroir II Tableau 8 : Chute des contre écritures bureaux 3 T 2009 3 T 2010 3 T 2011 Douala Aéroport 160 115 13 Douala Port I 166 4 4 Douala Port V 53 8 15 Douala Transfert 45 3 1 TOTAL 424 130 33 Compétition malsaine entre inspecteurs. Le nombre de déclarations en portefeuille est un enjeu important : plus un inspecteur traite de décla- rations, plus le nombre de fraudes qu’il découvre est élevé et plus éle- vées également sont ses chances de gagner, légalement ou illégalement, de l’argent. En utilisant de façon non appropriée le système informa- tique, certains inspecteurs parvenaient à traiter trois à six fois plus de déclarations que leurs collègues. Cette compétition était dangereuse, certains inspecteurs cherchaient à être « plus attractifs » que leurs col- lègues auprès des usagers. Cette pratique a été réduite mais insuffisam- ment au goût d’une partie des inspecteurs qui ont demandé au bout d’une année de mise en œuvre qu’un nouvel objectif soit intégré dans les contrats pour rendre compte et limiter mensuellement le nombre de déclarations traitées par chacun (Cantens, Raballand, Bilangna, Djeu- wo, 2011). Le graphe ci-dessous montre le nombre d’occurrences par trimestre où un inspecteur a liquidé au moins deux fois plus de déclarations par jour que la médiane des inspecteurs de son bureau. 30 Résultats obtenus 100 80 60 40 DLP I DLP V 20 0 Impacts non quantifiables. Les contrats pesant sur les inspecteurs les obligent à plus de transparence en cas de contentieux avec l’usager. En cas de redressement, l’inspecteur doit faire signer à l’usager un procès- verbal constatant l’infraction. Auparavant, l’inspecteur redressait et attendait que l’usager vienne à lui. La pression sur l’usager venait essen- tiellement du calcul d’espérance de gain qu’il réalisait entre d’une part, les droits relevés et l’amende et d’autre part, les frais (surestaries) de stockage dans le port. Les contrats soumettent les inspecteurs à une double contrainte de célérité et de contentieux. Pour ce faire, il doit se convaincre du bien-fondé légal du redressement qu’il opère (Cantens 2011). 31 Nouvelle étape : des contrats opérateurs Contexte Malgré les résultats encourageants des contrats de performance passés avec les inspecteurs, le comportement de certains acteurs de la chaîne de dédouanement, notamment des intermédiaires, peut être source de nuisance et diluer les effets bénéfiques de cette initiative. C’est pour cette raison que la Douane expérimente maintenant des contrats passés avec les entreprises, celles-ci étant des donneurs d’ordre par excellence aux intervenants sur lesquels elles ont un certain contrôle (transitaires, commissionnaires en douane, banque pour le paiement des droits et taxes de douane…). L’expérience porte sur un échantillon limité d’entreprises remplissant certains critères objectifs tels que le volume d’activité, la régularité des opérations, la surface financière, et surtout la volonté de ces sociétés de servir de baromètre des délais de passage au port de Douala. En effet, les 20 importateurs qui sont actuellement utilisés par le comité national de facilitation (Comité FAL) pour établir un ‘baromètre’ du passage au port ont été invités à négocier les contrats ; 11 d’entre eux ont accepté et ont signé in fine avec la Direction générale des Douanes. Les ‘contrats de performance opérateurs’ sont similaires à la notion d’‘opérateurs économiques agréés’ telle que développée dans divers instruments juridiques internationaux et par l’Organisation mondiale 33 Se regarder dans le miroir II des Douanes : l’un et l’autre se préoccupent de la sécurité de la chaîne logistique et envisagent d’accorder des facilités à quelques importateurs remplissant des conditions définies par l’Administration. Toutefois, la notion de ‘contrats de performance’ a été retenue pour les raisons sui- vantes :  les contrats permettent une plus grande flexibilité en adaptant ré- gulièrement les facilités accordées, aux ‘performances’ des importa- teurs. Ces performances sont mesurées objectivement et régulière- ment.  les termes ‘contrats de performance’ font partie de la culture pro- fessionnelle des douanes camerounaises depuis février 2010. Ils fai- saient déjà suite aux ‘indicateurs de performance’ initiés en janvier 2008. Il a donc semblé nécessaire de conserver cette continuité sé- mantique (Cantens 2010). Ces ‘contrats opérateurs’ ont fait l’objet d’une phase expérimentale de six mois allant de janvier à juin 2011 durant laquelle les douanes ont pu :  évaluer les impacts positifs et négatifs des facilités accordées,  adapter leur fonctionnement au suivi du respect des conditions par les importateurs bénéficiant de facilités,  résoudre les problèmes techniques ou informatiques susceptibles de survenir à l’usage. Cette démarche suppose la rationalisation de l’organisation interne des bureaux de douane et des procédures : certaines déclarations des im- portateurs sous contrats sont désormais traitées par un personnel dédié selon une procédure particulière mise en place à cet effet par une déci- sion du service datant du 3 janvier 2011. Elle suppose aussi de définir et de mettre en œuvre une chaîne rénovée des contrôles en amplifiant le recours aux méthodes modernes d’audit, d’analyse de risque et de ci- blage, et en tenant compte du niveau de fiabilité des opérateurs. Dans ce cadre les contrôles après dédouanement doivent efficacement relayés les 34 Nouvelle étape : des contrats opérateurs contrôles immédiats pour éviter des déperditions des recettes. Enfin, elle implique le développement de la professionnalisation de certaines missions, comme l’audit, la gestion des procédures, la supervision et la réalisation des contrôles ou le renseignement aux usagers, grâce à un plan de formation professionnelle tourné vers les nouveaux métiers du dédouanement. Elle suppose enfin que les relations entre la douane et les importateurs si souvent empreintes de méfiance, se transforment pour se nouer en partenariat mutuellement bénéfiques. Les objectifs recherchés Les contrats ont pour objectifs de réduire les délais et les coûts de libé- ration des marchandises, ainsi que améliorer la collecte des recettes douanières. D’où l’application de procédures allégées et contractuelle- ment acceptées par les opérateurs fiables. Les contrats spécifient des obligations mutuelles de résultats, visant à améliorer l’efficacité des douanes camerounaises, la compétitivité de la place portuaire et des entreprises. Ils sont avant tout conçus comme étant un outil de dialogue créant les conditions d’une dynamique de progrès au sein des douanes camerounaises. À terme, les contrats contribueront à la transparence des opérations douanières (réunion mensuelle avec les opérateurs et partage mutuel des expériences) et à la prévisibilité de l’action douanière et des activités de l’entreprise (un seuil minimal de circuit sans contrôle, évolutif en fonction des résultats de l’entreprise, ce qui constitue un système de sanction et de récompense transparent). Les contrats sont assis sur sept indicateurs. Mais avant le terme de cette période expérimentale, les différentes parties se retrouvent mensuelle- ment pour faire le point sur l’exécution de leurs engagements respectifs. Une évaluation à mi-parcours de l’expérimentation a eu lieu en avril 2011 avec des résultats assez prometteurs. 35 Se regarder dans le miroir II Mesures de la performance et ses modalités Les sept indicateurs sont les suivants : 1. Le taux de contentieux (pourcentage du montant des droits et taxes redressés par rapport au montant des droits et taxes liquidés) ; 2. La récurrence du contentieux (pourcentage nombre de déclarations redressées/nombre de déclarations enregistrées par le même opéra- teur au cours de la période) ; 3. La célérité de paiement des importateurs (pourcentage montant des droits payés le jour de la liquidation de la déclaration/sur le montant total des droits liquidés au cours de la période) ; 4. La part de déclarations anticipées (pourcentage montant des droits et taxes enregistrés sur les déclarations enregistrées au plus tard le jour de l’arrivée du navire /le montant total des droits enregistrés sur les déclarations enregistrées au cours de la période) ; 5. Les impayés (montant des impayés 5 jours après la date de la liqui- dation / le montant total des droits liquidés sur les déclarations du même opérateur au cours de la période) ; 6. Le rendement par déclaration (montant des droits liquidés en toutes taxes/ nombre de déclarations liquidés en toutes taxes) ; 7. L’homogénéité entre le couple commissionnaire en douane/ im- portateur (identité des commissionnaires en douane employés par le même opérateur au cours de la période n /identité des Commis- sionnaire en Douane utilisés à la période n-1). Cet indicateur est conservé pour des besoins purement statistiques et ne servira pas lors de l’appréciation des performances des entreprises. Les modalités de calcul des performances des opérateurs sont identiques à celles de l’évaluation des inspecteurs. Par conséquent, les indicateurs ont été calculés mensuellement depuis janvier 2007, afin de posséder des bases fiables car fondés sur des milliers d’observations dans les trois bureaux qui servent de support aux contrats (Douala Port I, V et VI). 36 Nouvelle étape : des contrats opérateurs Des valeurs médianes ont été calculées pour tous ces indicateurs. Les contrats fixent aussi la méthodologie d’évaluation des performances des sociétés concernées. Engagements des parties Le Directeur général des Douanes s’est engagé à :  Transmettre tous les mois à l’opérateur sa performance par indica- teur, ainsi que l’évolution de sa performance dans les trois derniers mois.  Accorder le bénéfice du circuit bleu sur un taux de 40 % de décla- rations couplé ou non à un compte de prépaiement. Le circuit bleu est un couloir de dédouanement rapide ne requérant aucun con- trôle douanier au moment de l’enlèvement de la marchandise. Il est soutenu par un système de ciblage rigoureux pour limiter certaines dérives et est encadré par des vérifications physiques non systéma- tiques des marchandises à domicile. Le taux du circuit bleu est évo- lutif par tranche de 10 % et modulé en fonction de la capacité des opérateurs à exécuter convenablement leurs propres engagements. En revanche, l’opérateur s’est engagé à :  Ne pas atteindre un niveau de fraude ou d’erreur déterminé par l’échelle de notation.  Ne pas commettre un certain nombre d’infractions énumérées au point dans le contrat.  Payer les droits dans un délai déterminé par l’échelle de notation.  Déposer les déclarations au plus tard le jour de l’arrivée des navires à concurrence d’un niveau déterminé par l’échelle de notation.  Déposer les déclarations en circuit bleu (dossiers complets) dans les mains de l’inspecteur coté avant l’enlèvement des marchandises. Le 37 Se regarder dans le miroir II cas échéant, les deux parties conviennent du lieu et de l’heure de la visite à domicile. Récompenses et sanctions La Direction générale des Douanes a accepté d’augmenter progressive- ment le taux du circuit bleu de 10 % par trimestre de réalisation du contrat sans dépasser un taux maximal de 80 %. Toutefois, elle pourra à titre exceptionnel, augmenter ce pourcentage pour certaines entreprises en fonction de leur comportement ou d’autres critères de son choix. L’opérateur qui atteindra le niveau de 80 % de circuit bleu, bénéficiera concomitamment du crédit d’enlèvement. Dans ce cas, l’importateur pourra être admis à enlever ses marchandises avant liquidation et paie- ment des droits, moyennant dépôt d’un engagement cautionné par une banque, de revenir payer lesdits droits dans un délai précis. En revanche, si l’opérateur n’atteint pas les minimums/maximums requis au cours d’un mois, il sera frappé d’un avertissement de la Direc- tion générale des Douanes. Pour le cas ou ceci se reproduirait deux mois consécutivement, un second avertissement lui sera adressé. Pour le cas où ceci se reproduirait un troisième mois consécutif ou si sa per- formance moyenne était inférieure à 100 % le troisième mois, l’opérateur retrouvera le niveau de base avec le niveau minimum de facilités. L’opérateur perdra le bénéfice des privilèges entraînant la rési- liation du contrat en cas de commission des infractions suivantes direc- tement ou par ses préposés (transporteur, commissionnaire…) : con- trebande, importation sans déclaration, opposition aux fonctions. Résultats à mi-parcours D’une manière générale, sur les 11 opérateurs, deux ont parfaitement réalisé leurs contrats sur le trimestre. Ces deux opérateurs sont les socié- tés les mieux organisées et qui ont très tôt remanié leurs procédures internes. Des notes ont été transmises à leurs partenaires (banque, 38 Nouvelle étape : des contrats opérateurs commissionnaires en douanes…) sur la nécessité pour eux de s’arrimer au nouvel environnement de travail. L’une des sociétés a d’ailleurs me- nacé de quitter sa banque si elle ne s’engageait pas à reverser à temps les droits liquidés par l’administration des douanes. Ces menaces ont porté leurs fruits puisque les banques ont revu leur procédure de transfert des fonds au trésor public. Les contrats, de ce point de vue, ont eu pour effet immédiat de pousser les importateurs concernés, ainsi que leurs partenaires à réorganiser avantageusement leur mode de fonctionne- ment. Un opérateur a réalisé 100 % des valeurs cibles mais a des difficultés avec deux indicateurs de célérité (paiement et anticipation). Sept opérateurs ont des niveaux de réalisation des contrats stables indi- quant clairement qu’un effort supplémentaire leur permettrait d’atteindre leurs objectifs. Un opérateur a des difficultés et travaille avec la cellule de Gestion des Risques pour identifier les problèmes spécifiques et envisager des solu- tions. Par ailleurs, trois mois après le début de l’expérimentation, le nombre de jours entre la date d’arrivée du navire et le jour du franchissement de la guérite par la marchandise a évolué :  pour les deux meilleurs opérateurs, il est passé 10,5 jours en moyenne (avant les contrats) à 8,5 jours ;  pour tous les opérateurs sous contrat, il est passé de 13,4 en moyenne jours à 12 jours ;  pour les opérateurs hors contrat, le temps s’est dégradé passant de 19 jours en moyenne à 22 jours. 39 Se regarder dans le miroir II Par ailleurs, la moyenne trimestrielle (premier trimestre 2011) du temps de passage des marchandises en circuit bleu est de 11,5 jours alors qu’elle atteint 22 jours dans les autres circuits (circuit de contrôle rouge et jaune). Au premier trimestre 2011, avec la mise en place du circuit bleu, la célérité de paiement des droits et taxes le jour de la liquidation s’est améliorée de 5,3 % par rapport au circuit de contrôle et de 31,1 % par rapport aux opérations des importateurs hors contrat. Le taux des droits et taxes impayés 5 jours après liquidation est nul pour les opérations en circuit bleu. Il est de 18,4 % pour les opérations hors contrat et de 9,8 % pour les opérations en circuit de contrôle. Les délais de paiement des droits se sont raccourcis. Le paiement des droits et taxes dus le jour de la liquidation s’est amélioré de 5,3 % par rapport aux droits perçus sur les déclarations en circuit de contrôle et de 31,1 % par rapport aux opérations hors contrat. 40 Nouvelle étape : des contrats opérateurs Par contre, la diminution du montant des droits et taxes enregistrés au plus tard le jour de l’arrivée du navire au premier trimestre 2011 par rapport aux performances de la même période en 2010 montre que les opérateurs sous contrat ont encore des efforts à faire en matière d’anticipation de leurs opérations douanières. Les premières leçons à tirer des contrats opérateurs Les contrats ont été une opportunité pour les entreprises sous contrats de se réorganiser en interne et de revoir leurs relations avec leurs parte- naires (CAD, banques, …). Rappelons que la principale raison d’être des contrats était d’encourager les entreprises à pousser leurs intermé- diaires dont le comportement était source de nuisance, à s’améliorer. Les opérateurs ayant atteint les objectifs des contrats ont eu droit à un taux de circuit bleu plus élevé que prévu (60 % au lieu 50 %, autrement dit, la douane a respecté ses engagements). L’exigence de compétitivité du port de Douala appelle à la fois l’anticipation des opérations d’importations et une plus grande implica- tion de tous les intervenants de la place portuaire sans lesquels une réduction significative du délai global du passage portuaire des mar- chandises est impossible. La douane a fait confiance à certains opérateurs en prenant des risques en termes de facilités accordées. L’expérimentation montre que ces facilités n’ont pas induit de dérives particulières, d’autant plus que le niveau du contentieux a été maîtrisé, grâce à un bon niveau de ciblage. 41 Conclusion générale Qu’on les aime ou qu’on ne les aime pas, les contrats de performance ne laissent personne indifférent aux douanes camerounaises. Ils ont introduit un nouveau type de rapport autant entre le sommet et la base de la hiérarchie douanière qu’entre la douane et ses usagers. Ils ont façonné et façonnent encore la nouvelle culture douanière impliquant la mesure permanente des performances individuelles et collectives, ainsi que l’obligation de rendre des comptes. La notion de compte ren- du va avec celles plus voisines, de la liberté et de la responsabilité. L’Administration laisse à chaque agent une marge de manœuvre suffi- sante pour réaliser les objectifs qui lui sont assignés ; en même temps, cet agent est conscient que tout le monde saura tout sur tout ce qu’il a entrepris. De ce point de vue, chacun assume et répond de ses actes. En définitive donc, les contrats sont un outil précieux de contrôle de l’exécution du service et de management des ressources humaines. Au plan international, l’expérience camerounaise fait tâche d’huile et plusieurs pays montrent un réel engouement à s’y exercer. Ces pays doivent les traduire dans leur contexte. Cela est d’autant plus vrai que chaque pays a son histoire et sa géographie, ses angoisses et ses ambi- tions, sa culture et ses traditions, bref son environnement. Le Cameroun pour sa part, doit encourager les recherches autour ou au-delà des contrats pour mieux penser les contrats et l’après contrat. Si la réflexion s’estompe, si la source d’inspiration tarit, si les recherches s’essoufflent, la routine reprendra le dessus et personne ne pourrait prédire jusqu’où irait la reculade. 43 Bibliographie LIBOM LI LIKENG, (Minette) ; CANTENS (Thomas) ; BILANGNA (Samson) : Se regarder dans le miroir, le contrôle de l’exécution du service dans les douanes, SSATP Discussion Paper N° 8, Regional Integration and Trade –RIT Series, janvier 2009. DRAY (Alain) ; VINCENT (Laëtitia) ; FROMAGER (Bruno) ; LA- CHAUSEE (Lucile) POUSSARD (Céline) ; WESSEL (Rudolf) ; ALLI- MANN (Daniel) ; PIRON (Xavier) ; VILAR (José) : La mesure de la performance achats, École supérieure des Affaires, Grenoble. CANTENS (Thomas) ; Cameroun, Évaluation de l’expérimentation des contrats de performance, 3ème mission du 28 mars au 9 avril 2011, avril 2011. CANTENS (Thomas), RABALLAND (Gael), BILANGNA (Samson), DJEUWO (Marcellin) ; Contractualisation et mauvaises pratiques, le cas des douanes camerounaises, Exposé présenté à Clermont-Ferrand le 24 octobre 2011 à la conférence Fiscalité et développement, des réformes et après, organisée par le CERDI et le CIFD. DJEUWO (Marcellin), La corruption dans le management des ressources humaines dans l’administration des douanes, Afrique contemporaine N° 230, 2009-2. CANTENS (Thomas), RABALLAND (Gael), BILANGNA (Samson), DJEUWO (Marcellin), 2011. Reforming Customs by measuring perfor- mance: a Cameroon case study in Cadot (O.), Fernandes (A.), Gourdon (J.), Mattoo (A.) Where to Spend the Next Million? Applying Impact Evaluation to Trade Assistance, CEPR 235 p. 45